CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. EVGENI TANCHEV

présentées le 15 juillet 2021 ( 1 )

Affaire C‑869/19

L

contre

Unicaja Banco SA, anciennement Banco de Caja España de Inversiones, Salamanca y Soria, S.A.U.

[demande de décision préjudicielle formée par le Tribunal Supremo (Cour suprême, Espagne)]

« Renvoi préjudiciel – Directive 93/13/CEE – Clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs – Article 6, paragraphe 1 – Principes d’équivalence et d’effectivité – Arrêt du 21 décembre 2016, Gutiérrez Naranjo e.a. (C‑154/15, C‑307/15 et C‑308/15, EU:C:2016:980) – Limitation dans le temps des effets restitutoires de la déclaration de nullité des clauses abusives – Portée du contrôle exercé par la juridiction nationale en appel – Principe dispositif – Principe de congruence – Principe d’interdiction de la reformatio in peius – Principe de l’autorité de la chose jugée – Forclusion »

Introduction

1.

La présente demande de décision préjudicielle, introduite par le Tribunal Supremo (Cour suprême, Espagne, ci-après la « Cour suprême »), porte sur l’interprétation de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs ( 2 ). Elle s’inscrit dans le contexte d’une procédure de pourvoi formée à la suite de l’arrêt en grande chambre du 21 décembre 2016, Gutiérrez Naranjo e.a. ( 3 ). Dans cet arrêt, la Cour a jugé en substance que la jurisprudence de la Cour suprême imposant une limitation dans le temps pour la restitution des montants indûment versés par les consommateurs aux banques sur le fondement d’une clause abusive connue sous le nom de clause « plancher » était contraire à l’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13, qui prévoit que les clauses abusives ne lient pas les consommateurs, et que ces derniers ont donc droit à la restitution intégrale de ces montants en vertu de cette disposition.

2.

Le problème qui se pose dans la présente affaire est que seule la banque, et non le consommateur, a introduit un recours contre le jugement de première instance qui, du fait de la jurisprudence nationale, avait imposé une limitation dans le temps pour la restitution, et que la Cour a prononcé l’arrêt Gutiérrez Naranjo après que le délai pour former un tel recours est arrivé à expiration, mais avant que la juridiction nationale saisie du recours ait rendu sa décision. La principale question qui se pose devant la Cour est donc de savoir si, dans ces circonstances, une juridiction nationale saisie d’un appel doit ordonner d’office la restitution de la totalité du montant indûment versé par le consommateur, conformément à l’arrêt Gutiérrez Naranjo, nonobstant certains principes du droit procédural national, dont le principe dispositif et les principes de congruence et d’interdiction de la reformatio in peius, qui peuvent être considérés comme faisant obstacle à une telle décision d’office.

3.

La Cour est saisie de la présente affaire parallèlement à quatre autres (C‑600/19, C‑693/19, C‑725/19 et C‑831/19) dans lesquelles mes conclusions sont présentées ce jour. Ces affaires sont fondées sur des demandes de décision préjudicielle espagnole, italiennes et roumaine et portent également sur des questions similaires et potentiellement sensibles concernant la mesure dans laquelle la juridiction nationale est tenue d’examiner d’office (ex officio) le caractère abusif de clauses contractuelles, conformément à la jurisprudence de la Cour interprétant la directive 93/13, ainsi que la relation avec les systèmes procéduraux nationaux.

4.

La présente affaire offre donc à la Cour l’opportunité de développer sa jurisprudence sur la directive 93/13, et plus particulièrement de clarifier des questions qui concernent l’application de ces principes de procédure nationale en relation avec le contrôle juridictionnel des clauses abusives au titre de cette directive.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

5.

L’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13 dispose :

« Les États membres prévoient que les clauses abusives figurant dans un contrat conclu avec un consommateur par un professionnel ne lient pas les consommateurs, dans les conditions fixées par leurs droits nationaux, et que le contrat restera contraignant pour les parties selon les mêmes termes, s’il peut subsister sans les clauses abusives. »

Le droit espagnol

6.

Aux termes de l’article 1303 du Código Civil español (ci-après le « code civil ») :

« Lorsqu’une obligation est déclarée nulle, les contractants doivent se restituer réciproquement les choses ayant fait l’objet du contrat, les fruits produits par ces choses et le prix assorti d’intérêts, sauf dans les cas prévus par les articles suivants. »

7.

L’article 216 de la Ley de Enjuiciamiento Civil (ci-après le « code de procédure civile ») dispose :

« Les tribunaux civils tranchent les affaires dont ils sont saisis au regard des faits, des preuves et des conclusions des parties, sauf lorsque la loi en dispose autrement dans des cas particuliers. »

8.

L’article 218, paragraphe 1, du code de procédure civile dispose :

« Les décisions de justice doivent être claires et précises et correspondre aux demandes et autres prétentions des parties, présentées en temps voulu au cours de la procédure. Elles contiennent les déclarations requises, condamnent ou acquittent le défendeur et tranchent tous les points litigieux qui ont fait l’objet du débat.

Le tribunal, sans s’écarter de la cause de l’action en accueillant des éléments de fait ou de droit distincts de ceux que les parties ont voulu faire valoir, statue conformément aux normes applicables à l’affaire, même si celles-ci n’ont pas été correctement citées ou invoquées par les parties au litige. »

9.

L’article 412, paragraphe 1, du code de procédure civile dispose :

« Une fois établi l’objet de la procédure dans la demande, dans le mémoire en défense et, le cas échéant, dans la demande reconventionnelle, les parties ne peuvent le modifier postérieurement. »

10.

L’article 465, paragraphe 5, du code de procédure civile dispose :

« L’ordonnance ou arrêt d’appel statue uniquement sur les points et questions soulevés dans la déclaration d’appel et, le cas échéant, dans les conclusions tendant au rejet de l’appel ou dans l’appel incident visés à l’article 461. La décision de justice ne peut porter préjudice à l’appelant, à moins que le dommage ne résulte de l’accueil de l’appel incident formé par l’intimé. »

Les faits, la procédure au principal et la question préjudicielle

11.

Selon la décision de renvoi, le 22 mars 2006, l’institution financière Banco de Caja España de Inversiones, Salamanca y Soria, S.A.U. (ci-après « Banco Ceiss »), absorbée par la suite par Unicaja Banco SA, a accordé à L, en qualité de consommateur, un prêt hypothécaire de 120000 euros pour acheter son logement familial. L devait le rembourser sur 30 ans au moyen de 360 mensualités.

12.

En vertu des conditions générales du contrat de prêt établies par Banco Ceiss, le taux d’intérêt sur le prêt était de 3,350 % par an pour la première année et devenait ensuite variable, résultant de l’ajout de 0,52 % au taux Euribor ( 4 ) à un an. Le contrat contenait toutefois une clause qui établissait que le taux d’intérêt du prêt ne descendrait jamais en deçà des 3 % annuels (clause « plancher »). Lorsque l’Euribor a fortement baissé en 2009, cette clause a empêché le taux d’intérêt de descendre en deçà des 3 % annuels.

13.

En janvier 2016, L a introduit un recours contre Banco Ceiss devant le Juzgado de Primera Instancia de Valladolid (tribunal de première instance de Valladolid, Espagne, ci-après la « juridiction de première instance »), dans lequel elle demandait que la clause « plancher » soit déclarée nulle en raison de son caractère abusif, compte tenu de son absence de transparence au sens de la législation espagnole transposant la directive 93/13. En plus de la nullité de cette clause, L demandait la condamnation de Banco Ceiss à la restitution de la totalité des montants indûment versés au titre de la clause « plancher ». À titre subsidiaire, L demandait la condamnation de Banco Ceiss à la restitution des montants perçus au titre de cette clause depuis le 9 mai 2013.

14.

Par son jugement du 6 juin 2016 (ci-après le « jugement de première instance »), la juridiction de première instance a constaté que la clause « plancher » était abusive au motif qu’elle était dépourvue de transparence et a condamné Banco Ceiss à restituer les montants perçus depuis le 9 mai 2013, augmentés des intérêts, conformément à la jurisprudence établie par la Cour suprême dans son arrêt du 9 mai 2013 (no 241/2013, ci-après l’« arrêt du 9 mai 2013 »). Elle a également condamné Banco Ceiss aux dépens.

15.

Le 14 juillet 2016, Banco Ceiss a interjeté appel de ce jugement devant l’Audiencia Provincial de Valladolid (cour provinciale de Valladolid, Espagne, ci‑après la « cour provinciale »). Dans son mémoire introductif d’appel, elle s’est opposée à sa condamnation aux dépens, car elle a, en effet, considéré qu’il avait été fait droit au recours de manière partielle et non totale. L s’est opposée à ce qu’il soit fait droit à l’appel.

16.

Le 21 décembre 2016, la Cour a rendu son arrêt Gutiérrez Naranjo ( 5 ), dans lequel elle a jugé, en substance, que l’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13 fait obstacle à une jurisprudence nationale telle que celle établie par l’arrêt du 9 mai 2013, qui limite dans le temps les effets restitutoires de la déclaration de nullité d’une clause abusive aux montants indûment versés après la décision dans laquelle le caractère abusif de la clause a été constaté.

17.

Par son arrêt du 13 janvier 2017, la cour provinciale a fait droit à l’appel au motif que la demande de la requérante n’a été que partiellement accueillie, et a infirmé la condamnation de Banco Ceiss aux dépens. La juridiction d’appel n’a fait aucune mention de l’arrêt Gutiérrez Naranjo et n’a pas non plus modifié la décision rendue en première instance concernant les effets restitutoires de la déclaration de nullité de ladite clause, car cela ne faisait pas l’objet du recours.

18.

L a formé un pourvoi en cassation contre cet arrêt devant la Cour suprême. À l’appui de son pourvoi, L allègue que l’arrêt attaqué, en n’appliquant pas la jurisprudence établie dans l’arrêt Gutiérrez Naranjo et en n’ordonnant pas d’office la restitution totale des montants payés en application de la clause « plancher », a enfreint, notamment, l’article 1303 du code civil, qui réglemente les effets restitutoires liés à la nullité des obligations et des contrats, lu conjointement avec l’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13, qui prévoit l’absence de caractère contraignant des clauses abusives pour les consommateurs. Banco Ceiss s’est opposée au pourvoi, en soulignant que, dès lors que L n’avait pas interjeté appel du jugement de première instance pour attaquer la limitation dans le temps des effets restitutoires de la nullité de la clause « plancher », il n’appartenait pas à la cour provinciale de condamner Banco Ceiss au remboursement du montant total payé.

19.

La juridiction de renvoi expose que, dans son arrêt du 9 mai 2013, la Cour suprême a jugé que les clauses « plancher » contenues dans certains contrats conclus entre des consommateurs et des banques défenderesses dans une action collective étaient nulles du fait de l’absence de transparence, mais elle a décidé de limiter dans le temps les effets restitutoires de la nullité de ces clauses, dans la mesure où elle a considéré qu’ils n’affecteraient pas les paiement effectués antérieurement à la date de publication de l’arrêt, c’est-à-dire le 9 mai 2013, et la jurisprudence ultérieure a confirmé cet arrêt dans le cadre de recours individuels. Dans son arrêt Gutiérrez Naranjo, la Cour a par la suite jugé qu’une telle limitation dans le temps, dans la jurisprudence nationale établie par l’arrêt du 9 mai 2013, était contraire à l’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13. La Cour suprême, à partir de son arrêt du 24 février 2017 (no 123/2017), a donc modifié sa jurisprudence pour refléter l’arrêt Gutiérrez Naranjo. Cependant, lorsque la Cour a rendu cet arrêt, des dizaines de milliers de litiges relatifs à la nullité des clauses « plancher » étaient pendants devant les juridictions espagnoles et, dans des affaires comme la présente, les consommateurs avaient limité leur recours, que ce soit à titre principal ou à titre subsidiaire, au remboursement des montants indûment versés après le 9 mai 2013 du fait de l’existence de la jurisprudence nationale, et, se fondant sur cette jurisprudence, ils n’ont pas interjeté appel des jugements limitant le remboursement dans le temps.

20.

La juridiction de renvoi indique que la procédure civile espagnole est régie par le principe dispositif, par les principes de forclusion des mesures procédurales, d’interdiction de la mutatio libelli ou de modification des conclusions, par le principe de congruence et, dans le cadre des recours et en lien étroit avec le principe de congruence, par le principe d’interdiction de la reformatio in peius. Comme l’indique la jurisprudence du Tribunal Constitucional (Cour constitutionnelle, Espagne, ci-après la « Cour constitutionnelle »), certains de ces principes, comme l’interdiction de la reformatio in peius, sont enracinés dans le droit à la protection juridictionnelle effective consacrée à l’article 24 de la Constitution espagnole, qui trouve son équivalent dans l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte »). Selon la juridiction de renvoi, il est évident que ces principes procéduraux ont conduit la cour provinciale, dans la présente affaire, à ne pas ordonner la restitution totale des montants perçus au titre de la clause « plancher », parce que L n’avait pas interjeté appel du jugement de première instance, qui ordonnait seulement la restitution des sommes payées après le 9 mai 2013.

21.

La juridiction de renvoi note que, conformément à la jurisprudence de la Cour, le principe selon lequel les clauses abusives ne lient pas les consommateurs, tel que fixé à l’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13, est incompatible avec l’établissement d’une limitation dans le temps pour la restitution des montants indûment versés par le consommateur au titre d’une clause abusive, mais que ce principe ne revêt pas un caractère absolu et peut faire l’objet de limitations liées à la bonne administration de la justice, telle que l’autorité de la chose jugée ou la fixation de délais raisonnables de recours à peine de forclusion. La juridiction de renvoi note à cet égard que la règle de droit espagnol qui veut que l’appel permette d’attaquer séparément les différentes parties du dispositif du jugement et que, si une partie du dispositif n’est attaquée par aucune des parties, la juridiction en appel ne peut pas lui ôter tout effet ou le modifier, présente certaines similitudes avec l’autorité de la chose jugée. La juridiction a donc des doutes sur la compatibilité du principe dispositif, du principe de congruence et de l’interdiction de la reformatio in peius, prévus en droit national, avec l’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13, et plus précisément quant à la question de savoir si, dès lors que la Cour a rendu l’arrêt Gutiérrez Naranjo, une juridiction nationale saisie d’un appel introduit exclusivement par la banque, et non par le consommateur, doit ordonner la restitution totale des montants perçus en vertu de la clause abusive, alors que la situation de la banque s’en trouve détériorée, à l’encontre de l’interdiction de la reformatio in peius.

22.

C’est dans ces conditions que la Cour suprême a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante :

« L’article 6, paragraphe 1, de la directive [93/13] s’oppose-t-il à l’application des principes procéduraux que sont le principe dispositif, le principe de congruence et l’interdiction de la reformatio in peius, qui empêchent la juridiction saisie de l’appel interjeté par la banque contre un jugement limitant dans le temps la restitution des sommes indument payées par le consommateur en vertu d’une “clause plancher” déclarée nulle d’ordonner la restitution totale desdites sommes et de désavantager ainsi l’appelant, au motif que cette limitation n’a pas été attaquée par le consommateur ? »

23.

L, Unicaja Banco, les gouvernements tchèque, espagnol, italien et norvégien ainsi que la Commission européenne ont présenté des observations écrites à la Cour.

24.

Une audience commune à l’affaire Ibercaja Banco (C‑600/19) a été tenue le 26 avril 2021, au cours de laquelle L, Unicaja Banco, les gouvernements espagnol, italien et norvégien ainsi que la Commission ont présenté des observations orales.

Synthèse des observations des parties

25.

L estime que, conformément à l’arrêt Gutiérrez Naranjo, la juridiction nationale doit imposer d’office les effets restitutoires de la nullité de la clause « plancher », en tenant compte de l’obligation de protéger les consommateurs au titre de la directive 93/13. À l’audience, L a fait valoir que si elle n’a pas attaqué le jugement de première instance, c’est du fait de la jurisprudence nationale, et, si elle l’avait fait, elle aurait été condamnée aux dépens. L a demandé depuis le début la restitution de la totalité du montant, en sorte qu’il n’y a pas d’extension de l’objet du recours et, en ce qui concerne la limitation dans le temps, aucune décision définitive n’a été rendue, de sorte qu’il ne saurait être question d’autorité de la chose jugée. La position de L ne va pas non plus à l’encontre de la reformatio in peius, puisque l’arrêt Gutiérrez Naranjo doit être respecté, à défaut de quoi L ne peut obtenir le remboursement et la banque peut conserver les montants perçus au titre de la clause abusive.

26.

Unicaja Banco fait valoir que l’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13 n’exige pas d’une juridiction nationale saisie d’un recours qu’elle tire d’office les conséquences découlant d’une clause abusive lorsque, ce faisant, elle doit écarter la règle interdisant la reformatio in peius. Rien n’empêchait L d’interjeter appel ou de former un appel incident contre le jugement de première instance, et L non seulement bénéficiait du conseil juridique de son avocat, mais elle était également au courant de l’arrêt Gutiérrez Naranjo à venir. La règle interdisant la reformatio in peius fait partie du droit à une protection juridictionnelle effective garanti par l’article 24 de la Constitution espagnole et, conformément à l’arrêt du 25 novembre 2008, Heemskerk et Schaap ( 6 ), la directive 93/13 n’exige pas que cette règle soit écartée. À l’audience, Unicaja Banco a fait valoir que les principes d’équivalence et d’effectivité sont respectés, puisque la jurisprudence nationale évoquée par la Commission ne trouve pas à s’appliquer et que les changements dans la jurisprudence ne peuvent entraîner le réexamen de décisions ayant l’autorité de la chose jugée.

27.

Le gouvernement tchèque considère que l’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13 ne fait pas obstacle à l’application des principes de procédure nationale en cause, qui, tels qu’appliqués aux recours, ont aussi un lien avec l’autorité de la chose jugée. En vertu de la jurisprudence de la Cour, ces principes ne peuvent être écartés, même dans l’intérêt de la protection du consommateur, et l’arrêt du 11 mars 2020, Lintner ( 7 ), trouve à s’appliquer à la présente affaire.

28.

Le gouvernement espagnol estime que l’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13, lu en combinaison avec l’article 47 de la Charte, ne fait pas obstacle à l’application par les juridictions nationales des principes de procédure nationaux en cause qui empêchent que la nullité de la clause abusive sortisse pleinement ses effets conformément à l’arrêt Gutiérrez Naranjo, prononcé après que le jugement de première instance est devenu définitif. Accorder une protection à un consommateur qui n’a pas fait usage dans les délais des voies de droit offertes par le droit national enfreindrait ces principes, et l’interdiction de la reformatio in peius trouve son fondement dans le droit à une protection juridictionnelle effective garanti par l’article 47 de la Charte. Le principe d’effectivité est respecté, puisque le droit national permet aux parties en première instance de faire valoir leurs droits et à la juridiction d’examiner d’office les clauses abusives, avec la possibilité d’interjeter appel. À l’audience, le gouvernement espagnol a fait valoir que la présente affaire concerne l’autorité de la chose jugée et qu’il ne peut être fait de comparaison valable avec la jurisprudence nationale citée par la Commission, de sorte que le principe d’équivalence n’est pas enfreint.

29.

Le gouvernement italien estime que l’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13 ne fait pas obstacle à l’application des principes de procédure nationaux en cause. Il découle de la jurisprudence de la Cour que l’absence de recours contre les motifs de l’arrêt défavorables implique en effet l’acquisition de l’autorité de la chose jugée, qui empêche, pour les raisons précitées, que soit soulevée d’office l’interprétation incorrecte du droit de l’Union figurant dans l’arrêt rendu en première instance. Ces conclusions ne compromettent pas le principe d’effectivité, en ce qu’il est loisible au consommateur de former un pourvoi, et un revirement successif de la jurisprudence, européenne ou nationale, ne saurait constituer un moyen permettant d’écarter les principes relatifs à l’autorité de la chose jugée. À l’audience, le gouvernement italien a souligné que l’article 6 de la directive 93/13 doit être invoqué dans les limites des systèmes nationaux, ce qui suppose le respect des règles de procédure nationales, telles que l’autorité de la chose jugée.

30.

Le gouvernement norvégien soutient que l’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13 ne fait pas obstacle à l’application des principes de procédure nationaux en cause dans les procédures d’appel, et ce même lorsque le jugement attaqué contient une décision qui enfreint la directive 93/13, pourvu que les délais de forclusion qui font obstacle aux démarches procédurales du consommateur respectent le principe d’effectivité. Ces principes protègent des intérêts supérieurs qui sont communs aux États membres de l’Union ainsi qu’aux États de l’Association européenne de libre-échange et ne sauraient être écartés par une extension de la portée du principe d’effectivité. À l’audience, le gouvernement norvégien a souligné que si les juridictions nationales font une application incorrecte du droit de l’Union et du droit de l’Espace économique européen, il existe d’autres voies de droit telles que les actions en responsabilité dirigées contre l’État ou les règles nationales qui permettent le réexamen de décisions définitives.

31.

La Commission considère que l’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13 fait obstacle à l’application des principes de procédure nationaux en cause, puisque les principes d’équivalence et d’effectivité ne sont pas respectés. Selon elle, la présente affaire ne concerne pas l’autorité de la chose jugée, puisque les procédures sont toujours en cours. En ce qui concerne le principe d’équivalence, la Commission fait valoir qu’il existe une jurisprudence constante de la Cour constitutionnelle ( 8 ) et de la Cour suprême ( 9 ) admettant que l’application d’office de dispositions d’ordre public constitue une exception aux principes en cause. Étant donné qu’il est admis que l’article 6 de la directive 93/13 est une règle d’ordre public, la juridiction nationale aurait dû donner d’office son plein effet à cette disposition sans être restreinte par ces principes. En ce qui concerne le principe d’effectivité, la Commission estime que l’application stricte des principes en cause rend impossible ou excessivement difficile l’exercice des droits conférés par la directive 93/13, en ce que la jurisprudence nationale a dissuadé L de faire appel du jugement au moment approprié et que ce contexte de droit, combiné à ces principes, a privé L de la seule voie de recours dont elle disposait alors pour faire valoir ses droits au titre de cette directive. À l’audience, la Commission a fait valoir que cette affaire représente une situation exceptionnelle et que si la juridiction nationale doit tirer toutes les conséquences découlant de la clause abusive, les droits de la défense ne sont en rien entravés puisque, avant de s’acquitter de cette obligation, la juridiction entendra les parties, en sorte que le droit à un recours effectif est garanti tout au long de la procédure.

Analyse

32.

Par sa question préjudicielle, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13 fait obstacle à l’application de certains principes du droit procédural, parmi lesquels le principe dispositif, le principe de congruence et l’interdiction de la reformatio in peius prévus à l’article 216, à l’article 218, paragraphe 1, et à l’article 465, paragraphe 5, du code de procédure civile, qui empêchent la juridiction nationale, saisie d’un appel contre un jugement limitant dans le temps la restitution des sommes indûment payées par le consommateur en vertu d’une clause abusive, d’ordonner la restitution totale de ces sommes conformément à l’arrêt Gutiérrez Naranjo, au motif que cette limitation n’a pas été contestée par le consommateur.

33.

Comme le montre la décision de renvoi, cette question découle de l’interaction entre, d’une part, l’obligation pour une juridiction nationale, y compris une juridiction en degré d’appel, d’examiner d’office, en vertu de l’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13, le caractère abusif des clauses contractuelles et de tirer toutes les conséquences de la constatation du caractère abusif d’une clause et, d’autre part, l’application de plusieurs principes du droit procédural national qui régit les procédures lancées sur le fondement de cette directive. Pour le dire sommairement, le principe dispositif signifie qu’il appartient aux parties d’engager les procédures ou d’y mettre fin et de déterminer leur objet ( 10 ). Ce principe est lié au principe de congruence, en ce que la juridiction est tenue de veiller à ce que ses décisions soient conformes aux demandes faites par les parties ( 11 ). En outre, conformément au principe de l’interdiction de la reformatio in peius, une partie qui forme un recours tel qu’un appel ne doit pas se voir placer dans une situation pire que si elle n’avait pas formé le recours ( 12 ).

34.

En vue de répondre à la question soulevée dans la présente affaire, je ferai d’abord une remarque préliminaire sur la pertinence potentielle de l’article 47 de la Charte dans ce contexte (section A). J’examinerai ensuite la jurisprudence de la Cour concernant l’examen d’office des clauses abusives par les juridictions nationales au titre de la directive 93/13, y compris l’arrêt Gutiérrez Naranjo (section B) et l’application des principes développés dans cette jurisprudence dans les circonstances de la présente affaire (section C).

35.

Sur le fondement de cette analyse, je suis arrivé à la conclusion que l’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13, lu à la lumière du principe d’effectivité, fait obstacle à l’application des principes de procédure nationaux en cause dans les circonstances de la présente affaire.

Remarque préliminaire

36.

Il découle de la décision de renvoi et des observations d’Unicaja Banco et du gouvernement espagnol que la question soulevée dans la présente affaire concerne la compatibilité de l’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13 avec certains principes de procédure nationaux qui trouvent leur fondement dans le droit à une protection juridictionnelle effective tel que garanti par l’article 24 de la Constitution espagnole qui contient une disposition analogue à celle de l’article 47 de la Charte. Le gouvernement espagnol suggère également qu’il devrait être tenu compte de l’article 47 de la Charte s’agissant de répondre à cette question.

37.

Selon une jurisprudence constante, l’article 47 de la Charte, qui constitue une réaffirmation du principe de protection juridictionnelle effective, consacre, en faveur de toute personne dont les droits et les libertés garantis par le droit de l’Union ont été violés, le droit à un recours effectif devant un tribunal ( 13 ). Il est constant que cet article trouve à s’appliquer dans la présente affaire, puisque la législation nationale en cause relève du champ d’application de la directive 93/13 et qu’elle représente donc une mise en œuvre du droit de l’Union au sens de l’article 51, paragraphe 1, de la Charte ( 14 ).

38.

Comme je l’ai exposé en détail aux points 59 et 60 de mes conclusions parallèles dans les affaires jointes SPV Project 1503 e.a. (C‑693/19 et C‑831/19, EU:C:2021:615), dans la jurisprudence de la Cour relative à la directive 93/13, une relation particulière a été établie entre l’article 47 de la Charte et le principe d’effectivité, qui implique également l’obligation pour les États membres d’assurer la protection juridictionnelle des droits fondés sur le droit de l’Union (voir point 45 des présentes conclusions) ( 15 ). À cet égard, la Cour a jugé que l’obligation pour les États membres d’assurer l’effectivité des droits que les justiciables tirent de la directive 93/13 implique une exigence de protection juridictionnelle effective, consacrée également à l’article 47 de la Charte, qui vaut, entre autres, en ce qui concerne la définition des modalités procédurales relatives aux actions en justice fondées sur de tels droits ( 16 ).

39.

En outre, comme le montre la jurisprudence de la Cour à ce jour qui concerne la directive 93/13, l’article 47 de la Charte semble jouer, dans une large mesure, un rôle de soutien ou complémentaire par rapport au principe d’effectivité, dans le cadre de l’appréciation de la compatibilité des règles de procédure nationales avec les exigences de cette directive. L’article 47 de la Charte entre, par exemple, en jeu, dans ce contexte, dans les questions relatives à l’accès à un recours effectif, en sorte que les parties puissent exercer les droits qui découlent de la directive 93/13 ( 17 ), ainsi que dans les questions relatives au procès équitable, comme le respect des principes de l’égalité des armes et audi alteram partem dans le contexte de procédures juridictionnelles où la légalité des clauses au regard de cette directive est en cause ( 18 ).

40.

Dans la présente affaire, il n’est pas contesté que les parties ont eu accès à des voies de recours effectives pour faire valoir leurs droits au regard de la directive 93/13. Et comme le note la Commission, l’obligation pour la juridiction nationale de tirer toutes les conséquences découlant de la clause abusive conformément à l’article 6, paragraphe 1, de cette directive n’apparaît pas non plus impliquer une entrave à l’exercice des droits de la défense dans les circonstances de la présente affaire. De plus, il convient de souligner que, dans l’arrêt Gutiérrez Naranjo, la Cour a fondé sa motivation sur l’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13 et n’a pas jugé nécessaire d’aborder la question de l’article 47 de la Charte dans ce contexte ( 19 ). Dès lors, étant donné qu’aucun argument ne concernant que l’article 47 de la Charte n’a été présenté devant la Cour et que la question soulevée dans la présente affaire n’a jusqu’à présent pas été traitée au regard de l’article 47 de la Charte, il n’y a, selon moi, aucune raison de le faire ici.

Jurisprudence pertinente de la Cour concernant l’examen d’office des clauses abusives par les juridictions nationales

41.

Il convient de rappeler que l’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13 exige des États membres qu’ils prévoient que les clauses abusives ne lient pas les consommateurs ( 20 ). En outre, l’article 7, paragraphe 1, de cette directive, lu en combinaison avec son vingt-quatrième considérant, impose aux États membres de prévoir des moyens adéquats et efficaces afin de faire cesser l’utilisation des clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs ( 21 ). Ces dispositions ont donné lieu à un important corpus de jurisprudence et je donnerai un aperçu des principes applicables dégagés de cette jurisprudence, concernant l’existence et l’étendue de l’obligation des juridictions nationales d’examiner d’office le caractère abusif des clauses contractuelles, principes qui, avec l’arrêt Gutiérrez Naranjo, sont les plus pertinents pour mon analyse de la présente affaire.

Sur l’existence d’une obligation pour les juridictions nationales de procéder à un examen d’office

42.

Selon une jurisprudence constante, le système de protection mis en œuvre par la directive 93/13 repose sur l’idée que le consommateur se trouve dans une situation d’infériorité à l’égard du professionnel, en ce qui concerne tant le pouvoir de négociation que le niveau d’information, situation qui le conduit à adhérer aux clauses rédigées préalablement par le professionnel, sans pouvoir exercer une influence sur le contenu de celles-ci ( 22 ). Afin d’assurer la protection voulue par la directive 93/13, la situation d’inégalité entre le consommateur et le professionnel ne peut être compensée que par une intervention positive, extérieure aux seules parties au contrat ( 23 ). Par conséquent, au vu de la nature et de l’importance de l’intérêt public sur lequel repose la protection que la directive 93/13 assure aux consommateurs, le juge national est tenu d’apprécier d’office le caractère abusif d’une clause contractuelle et, ce faisant, de suppléer au déséquilibre qui existe entre le consommateur et le professionnel, dès qu’il dispose des éléments de droit et de fait nécessaires à cet effet ( 24 ).

Sur l’étendue de l’obligation du juge national de procéder à un examen d’office

43.

En ce qui concerne la mise en œuvre de cette obligation du juge national statuant en appel, il est également de jurisprudence constante que, en l’absence de réglementation par le droit de l’Union, les modalités des procédures d’appel destinées à assurer la sauvegarde des droits que les justiciables tirent du droit de l’Union relèvent de l’ordre juridique interne des États membres, pour autant que ces modalités ne soient pas moins favorables que celles régissant des situations similaires de nature interne (principe d’équivalence) ni aménagées de manière à rendre en pratique impossible ou excessivement difficile l’exercice des droits conférés par l’ordre juridique de l’Union (principe d’effectivité) ( 25 ).

44.

En ce qui concerne le principe d’équivalence, il appartient au juge national, qui possède une connaissance directe des modalités procédurales des recours dans son ordre juridique interne, de vérifier le respect du principe d’équivalence, en prenant en considération l’objet, la cause et les éléments essentiels des recours concernés ( 26 ). À cet égard, la Cour a jugé que l’article 6 de la directive 93/13 doit être considéré comme étant une norme équivalant aux règles nationales qui occupent, au sein de l’ordre juridique interne, le rang de normes d’ordre public ( 27 ). Il en découle que, dès lors que le juge national statuant en appel dispose de la faculté ou a l’obligation d’apprécier d’office la validité d’un acte juridique au regard des règles nationales d’ordre public, alors même que cette contrariété n’a pas été soulevée en première instance, il doit également exercer une telle compétence aux fins d’apprécier, d’office et au regard des critères de la directive 93/13, le caractère abusif d’une clause contractuelle ( 28 ).

45.

En ce qui concerne le principe d’effectivité, il résulte de la jurisprudence de la Cour que chaque cas où se pose la question de savoir si une disposition procédurale nationale rend impossible ou excessivement difficile l’application du droit de l’Union doit être analysé en tenant compte de la place de cette disposition dans l’ensemble de la procédure, de son déroulement et de ses particularités vues comme un tout, ainsi que, le cas échéant, les principes qui sont à la base du système juridictionnel national, tels que la protection des droits de la défense, le principe de sécurité juridique et le bon déroulement de la procédure ( 29 ). Dans cette perspective, la Cour a estimé que le respect du principe d’effectivité ne saurait aller jusqu’à suppléer intégralement à la passivité totale du consommateur concerné ( 30 ).

46.

La Cour a de plus reconnu que la protection du consommateur ne revêt pas un caractère absolu et que le droit de l’Union n’impose pas à une juridiction nationale d’écarter l’application des règles de procédure internes conférant, notamment, l’autorité de la chose jugée à une décision, même si cela permettrait de remédier à une violation d’une disposition, quelle qu’en soit la nature, contenue dans la directive 93/13 ( 31 ). La Cour a, en effet, souligné l’importance du principe de l’autorité de la chose jugée tant dans l’ordre juridique de l’Union que dans les ordres juridiques nationaux et le fait que, en vue de garantir aussi bien la stabilité du droit et des relations juridiques qu’une bonne administration de la justice, des décisions juridictionnelles devenues définitives après épuisement des voies de recours disponibles ou après expiration des délais prévus pour ces recours ne puissent plus être remises en cause ( 32 ).

47.

C’est ainsi, par exemple, que, dans l’arrêt du 6 octobre 2009, Asturcom Telecomunicaciones ( 33 ), la Cour a jugé, plus particulièrement, que les règles nationales fixant un délai de deux mois, à l’expiration duquel, en l’absence d’un recours en annulation, une sentence arbitrale devient définitive et acquiert ainsi l’autorité de la chose jugée, est conforme au principe d’effectivité, en soulignant que ce principe ne saurait être étendu jusqu’à suppléer intégralement à la passivité totale d’un consommateur concerné qui n’a introduit aucune action pour faire valoir ses droits.

48.

À l’inverse, dans l’arrêt du 18 février 2016, Finanmadrid EFC ( 34 ), la Cour a jugé que la réglementation nationale mettant en œuvre le principe de l’autorité de la chose jugée dans le contexte de la procédure d’injonction de payer allait à l’encontre du principe d’effectivité, étant donné que la décision de l’autorité clôturant cette procédure acquérait l’autorité de la chose jugée, ce qui rendait impossible le contrôle des clauses abusives au stade de l’exécution d’une injonction, du seul fait que le consommateur n’avait pas formé opposition à l’injonction dans le délai prévu à cet effet et qu’il existait un risque non négligeable qu’il ne le fasse pas.

L’arrêt Gutiérrez Naranjo

49.

En ce qui concerne les conséquences découlant de la constatation du caractère abusif d’une clause contractuelle, la Cour a jugé que, en vertu de l’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13, il incombe au juge national d’écarter l’application des clauses abusives afin qu’elles ne produisent pas d’effets contraignants à l’égard du consommateur, sauf si le consommateur s’y oppose ( 35 ). Le juge national est tenu de tirer toutes les conséquences qui, selon le droit national, découlent de la constatation du caractère abusif de la clause afin d’atteindre le résultat fixé par cette disposition ( 36 ).

50.

À cet égard, il convient de souligner que, dans l’arrêt Gutiérrez Naranjo ( 37 ), la Cour a jugé que l’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13 fait obstacle à une jurisprudence, telle que celle établie par l’arrêt du 9 mai 2013, qui limite dans le temps les effets restitutoires de l’annulation d’une clause abusive aux montants indument payés au titre de cette clause après que la décision constatant le caractère abusif de ladite clause a été prononcée. La Cour a plus particulièrement jugé qu’une clause contractuelle déclarée abusive doit être considérée, en principe, comme n’ayant jamais existé, de sorte qu’elle ne saurait avoir d’effet à l’égard du consommateur. Partant, l’obligation pour le juge national d’écarter une clause contractuelle abusive imposant le paiement de sommes qui se révèlent indues emporte, en principe, un effet restitutoire correspondant à l’égard de ces mêmes sommes. La Cour a souligné que le droit national ne peut porter atteinte à la substance du droit que les consommateurs tirent de l’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13 de ne pas être liés par une clause abusive.

51.

Il découle donc de la jurisprudence que je viens de rappeler que la directive 93/13 n’impose pas aux États membres d’adopter un système procédural particulier en vue du contrôle d’office du caractère abusif d’une clause par les juridictions nationales, pour autant qu’ils respectent leurs obligations au titre du droit de l’Union, y compris les principes d’équivalence et d’effectivité. En outre, selon la jurisprudence de la Cour, si le consommateur ne jouit pas d’une protection absolue, les principes procéduraux régissant l’examen du caractère abusif des clauses au titre de cette directive n’ont pas davantage un caractère absolu. Comme le montrent les arrêts mentionnés aux points 47, 48 et 50 des présentes conclusions, la Cour adopte une approche équilibrée en ce qui concerne l’interaction entre les règles de procédure nationales et les exigences de la directive 93/13, tout en s’assurant que ces règles ne sapent pas le système de protection des consommateurs établi par cette directive.

52.

C’est à la lumière des principes ainsi développés dans la jurisprudence de la Cour qu’il convient d’examiner les circonstances de la présente affaire.

Application des principes développés dans la jurisprudence de la Cour aux circonstances de la présente affaire

53.

Il convient de noter d’emblée que, alors que les gouvernements tchèque, espagnol, italien et norvégien considèrent que le principe de l’autorité de la chose jugée est en jeu dans la présente affaire, L et la Commission ne partagent pas cette position. Il découle de la décision de renvoi que, même si le principe de l’autorité de la chose jugée n’est pas mentionné dans la question, la juridiction de renvoi ne semble pas moins préoccupée par les règles de procédure nationales qui ont une portée semblable à celle de l’autorité de la chose jugée (voir point 21 des présentes conclusions). Selon une jurisprudence constante, le juge national est seul compétent pour interpréter et appliquer le droit national ( 38 ). Par conséquent, même si mon analyse se concentre sur les principes de procédure nationaux soulevés dans la question, à savoir, le principe dispositif, le principe de congruence et l’interdiction de la reformatio in peius, je ne vois aucune raison qu’elle ne trouve pas à s’appliquer en ce qui concerne les règles de procédure nationales relatives à l’autorité de la chose jugée si la juridiction de renvoi devait estimer qu’elles sont en jeu dans les circonstances de la présente affaire.

54.

En ce qui concerne le principe d’équivalence, la Commission fait valoir qu’il existe une jurisprudence constante de la Cour constitutionnelle et de la Cour suprême admettant que l’application d’office des règles d’ordre public constitue une exception aux principes procéduraux en cause, alors que Unicaja Banco et le gouvernement espagnol ont une position différente (voir points 26, 28 et 31 des présentes conclusions). Au vu de la jurisprudence de la Cour mentionnée au point 44 des présentes conclusions et du fait que l’article 6 de la directive 93/13 constitue une disposition équivalente à une règle nationale d’ordre public, il s’ensuit que, si, en vertu du droit national, ces règles sont considérées comme une exception à l’application des principes de procédure nationaux en cause, le juge national saisi de l’appel doit donner d’office plein effet à l’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13 sans être entravé par ces principes ( 39 ). C’est donc à la juridiction de renvoi qu’il incombe de vérifier si la jurisprudence nationale trouve à s’appliquer dans le litige au principal et, si tel est le cas, il me semble que l’application de ces principes procéduraux nationaux qui empêchent L d’exercer son droit d’invoquer la jurisprudence de la Cour, en ce qui concerne les droits qu’elle tire de la directive 93/13, enfreindrait le principe d’équivalence.

55.

En ce qui concerne le principe d’effectivité, il existe, selon moi, de solides indications, fondées sur la jurisprudence de la Cour, que l’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13, lu à la lumière de ce principe, fait obstacle à l’application des principes de procédure nationaux en cause dans les circonstances de la présente affaire.

56.

Il est exact que L n’a pas interjeté appel ou formé un appel incident contre le jugement de première instance imposant une limitation dans le temps des effets restitutoires pour les montants perçus en vertu de la clause abusive et que, en vertu de la jurisprudence mentionnée au point 45 des présentes conclusions, la passivité totale du consommateur peut restreindre la portée du principe d’effectivité. Il convient toutefois de souligner que, dans les circonstances de la présente affaire, le fait qu’un consommateur, tel que L, n’ait pas formé de recours dans le délai approprié peut être imputé au fait que, lorsque la Cour a prononcé l’arrêt Gutiérrez Naranjo – qui fait apparaître clairement que la jurisprudence établie par l’arrêt du 9 mai 2013 était contraire à l’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13 –, le délai dans lequel il était possible d’interjeter appel ou de former un appel incident en vertu du droit national était déjà arrivé à expiration.

57.

Selon moi, dans une telle situation, on peut difficilement blâmer un consommateur, tel que L, pour n’avoir pas interjeté appel ou formé un appel incident dans les délais appropriés en vue de contester la jurisprudence établie par l’arrêt du 9 mai 2013, recours qui ne lui aurait pas permis d’obtenir gain de cause. Le fait que, comme l’indiquent Unicaja Banco et le gouvernement espagnol, le droit national prévoit une possibilité d’ajuster la condamnation aux dépens à payer par la partie concernée ne me convainc pas davantage, étant donné l’existence de cette jurisprudence nationale. De même, contrairement à ce que prétend Unicaja Banco, le fait que L a bénéficié des conseils juridiques de son avocat et qu’il semble qu’elle était au courant que l’arrêt Gutiérrez Naranjo allait être rendu ne change rien à cette analyse. Comme l’a indiqué la Cour, le fait qu’un consommateur est représenté par un avocat n’a pas d’incidence sur l’obligation incombant au juge national s’agissant d’examiner le caractère abusif de clauses contractuelles au titre de la directive 93/13 ( 40 ). Il convient en outre d’ajouter que l’avocat général Mengozzi, dans ses conclusions dans l’affaire Gutiérrez Naranjo, présentées le 13 juillet 2016 ( 41 ), était arrivé à une conclusion différente de celle à laquelle la Cour est parvenue dans cette affaire et qu’il peut ainsi avoir renforcé le sentiment que cette jurisprudence nationale était compatible avec la directive 93/13, avant que l’arrêt soit prononcé.

58.

Dans ces circonstances, il convient donc de considérer, comme le note la Commission, que l’existence de la jurisprudence nationale établie par l’arrêt du 9 mai 2013, en combinaison avec l’application des principes de procédure nationaux en cause, a eu pour résultat que L était privée des moyens procéduraux lui permettant de faire valoir ses droits au titre de la directive 93/13. De plus, comme l’indique L, la conclusion selon laquelle ces principes de procédure nationaux font obstacle à ce que le juge national saisi d’un appel ordonne d’office la restitution de tous les montants indûment versés par un consommateur au titre d’une clause abusive, conformément à l’arrêt Gutiérrez Naranjo, impliquerait qu’un consommateur dans la situation de L n’aurait aucune possibilité d’être remboursé intégralement et que la banque conserverait les montants indûment payés au titre de la clause abusive. À cet égard, comme la Cour le souligne dans cet arrêt, le droit national ne saurait être appliqué d’une façon telle qu’il porte atteinte à la substance du droit conféré au consommateur, en vertu de l’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13, de ne pas être lié par une clause abusive (voir point 50 des présentes conclusions).

59.

Il convient également de noter que les circonstances de la présente affaire diffèrent, selon moi, de celles qui ont donné lieu à l’arrêt du 11 mars 2020, Lintner ( 42 ). Dans cet arrêt, la Cour a jugé en substance, suivant mes conclusions dans cette affaire, que l’examen d’office des clauses abusives au titre de la directive 93/13 n’exige pas du juge national qu’il écarte en particulier le principe dispositif pour couvrir toutes les clauses du contrat, même celles qui ne font pas partie de l’objet du litige. Dans la présente affaire, en revanche, L a d’emblée introduit un recours en vue du remboursement de la totalité du montant indûment payé au titre de la clause abusive et cette demande a donc continué à faire partie de l’objet de l’action (voir points 13 et 25 des présentes conclusions).

60.

En outre, l’approche de la Cour dans l’arrêt du 25 novembre 2008, Heemskerk et Schaap ( 43 ), ne me semble pas trouver à s’appliquer dans la présente affaire. Cet arrêt concerne l’interprétation de certaines mesures de l’Union se rapportant de manière générale aux restitutions à l’exportation sur des produits agricoles. La décision de la Cour selon laquelle le juge national n’est pas tenu d’appliquer d’office la réglementation de l’Union lorsque cela aurait pour effet d’écarter le principe procédural national de l’interdiction de la reformatio in peius n’a donc pas vocation à s’appliquer dans le contexte particulier où il s’agit d’assurer la protection effective des consommateurs au titre de la directive 93/13 ( 44 ), comme c’est le cas dans la présente affaire.

61.

Il convient par conséquent de considérer que les principes procéduraux nationaux en cause vont à l’encontre du principe d’effectivité, puisqu’ils rendent impossible ou excessivement difficile d’assurer la protection conférée au consommateur par la directive 93/13.

62.

J’arrive donc à la conclusion que l’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13, lu à la lumière du principe d’effectivité, fait obstacle à l’application des principes de procédure nationaux en cause dans les circonstances de la présente affaire.

Conclusion

63.

Compte tenu des considérations qui précèdent, je propose à la Cour de répondre comme suit à la question préjudicielle posée par le Tribunal Supremo (Cour suprême, Espagne) :

L’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs doit, à la lumière du principe d’effectivité, être interprété en ce sens qu’il s’oppose à l’application des principes procéduraux nationaux que sont le principe dispositif, le principe de congruence et l’interdiction de la reformatio in peius, qui empêchent la juridiction nationale saisie de l’appel interjeté par une banque contre un jugement limitant dans le temps la restitution des sommes indument payées par le consommateur en vertu d’une clause « plancher » ultérieurement déclarée nulle d’ordonner la restitution totale de ces sommes.


( 1 ) Langue originale : l’anglais.

( 2 ) JO 1993, L 95, p. 29.

( 3 ) C‑154/15, C‑307/15 et C‑308/15, ci-après l’« arrêt Gutiérrez Naranjo , EU:C:2016:980. Voir point 50 des présentes conclusions.

( 4 ) Euribor est l’abréviation de Euro Interbank Offered Rate. Les taux Euribor sont fondés sur les taux d’intérêt moyens auxquels les banques s’empruntent des fonds en euros les unes aux autres.

( 5 ) Note sans pertinence pour la version en langue française des présentes conclusions.

( 6 ) C‑455/06, EU:C:2008:650.

( 7 ) C‑511/17, EU:C:2020:188.

( 8 ) La Commission fait référence à l’arrêt du 10 mars 2008 (no 41/2008) et à la jurisprudence qui y est citée.

( 9 ) La Commission fait référence aux arrêts du 20 juin 2008 (no 3257/2008) et du 16 septembre 2009 (no 5696/2009).

( 10 ) Voir, à cet égard, mes conclusions dans l’affaire Lintner (C‑511/17, EU:C:2019:1141, point 43).

( 11 ) Voir, à cet égard, Muñoz-Perea Piñar, D., « Ámbito del principio de congruencia a la luz de la jurisprudencia de la Sala Primera del Tribunal Supremo », Noticias Jurídicas, 2020.

( 12 ) Voir, à cet égard, conclusions de l’avocate générale Trstenjak dans l’affaire Les Éditions Albert René/OHMI (C‑16/06 P, EU:C:2007:728, points 35 et 36).

( 13 ) Voir arrêt du 20 avril 2021, Repubblika (C‑896/19, EU:C:2021:311, point 40).

( 14 ) Voir, à cet égard, arrêt du 10 septembre 2014, Kušionová (C‑34/13, EU:C:2014:2189, point 47) ; voir également conclusions de l’avocat général Szpunar dans l’affaire Finanmadrid EFC (C‑49/14, EU:C:2015:746, points 83 et 84).

( 15 ) Voir, à cet égard, conclusions de l’avocat général Szpunar dans l’affaire Finanmadrid EFC (C‑49/14, EU:C:2015:746, points 85 à 97). Voir également, par exemple, van Duin, A., « Metamorphosis? The Role of Article 47 of the EU Charter of Fundamental Rights in Cases Concerning National Remedies and Procedures under Directive 93/13/EEC », Journal of European Consumer and Market Law, vol. 6, 2017, p. 190 à 198.

( 16 ) Voir arrêt du 10 juin 2021, BNP Paribas Personal Finance (C‑776/19 à C‑782/19, EU:C:2021:470, point 29).

( 17 ) Voir, notamment, arrêts du 14 mars 2013, Aziz (C‑415/11, EU:C:2013:164, en particulier point 59) ; du 10 septembre 2014, Kušionová (C‑34/13, EU:C:2014:2189, en particulier points 45, 47 et 66), ainsi que du 21 décembre 2016, Biuro podróży  Partner  (C‑119/15, EU:C:2016:987, points 23 à 47) ; comparer avec arrêt du 27 février 2014, Pohotovosť (C‑470/12, EU:C:2014:101, points 36 à 57).

( 18 ) Voir, notamment, arrêts du 21 février 2013, Banif Plus Bank (C‑472/11, EU:C:2013:88, points 29 à 36) ; du 17 juillet 2014, Sánchez Morcillo et Abril García (C‑169/14, EU:C:2014:2099, points 21 à 51), et du 29 avril 2021, Bank BPH (C‑19/20, EU:C:2021:341, points 91 à 99) ; comparer avec ordonnance du 16 juillet 2015, Sánchez Morcillo et Abril García (C‑539/14, EU:C:2015:508, points 23 à 50).

( 19 ) Voir arrêt Gutiérrez Naranjo (points 42, 75 et 76).

( 20 ) Voir arrêt du 27 janvier 2021, Dexia Nederland (C‑229/19 et C‑289/19, EU:C:2021:68, point 57). Voir également vingt-et-unième considérant de la directive 93/13.

( 21 ) Voir arrêt du 9 juillet 2020, Raiffeisen Bank et BRD Groupe Société Générale (C‑698/18 et C‑699/18, EU:C:2020:537, point 52).

( 22 ) Voir arrêts du 27 juin 2000, Océano Grupo Editorial et Salvat Editores (C‑240/98 à C‑244/98, EU:C:2000:346, point 25), et du 26 mars 2019, Abanca Corporación Bancaria et Bankia (C‑70/17 et C‑179/17, EU:C:2019:250, point 49).

( 23 ) Voir arrêts du 9 novembre 2010, VB Pénzügyi Lízing (C‑137/08, EU:C:2010:659, point 48), et du 11 mars 2020, Lintner (C‑511/17, EU:C:2020:188, point 25).

( 24 ) Voir arrêts du 4 juin 2009, Pannon GSM (C‑243/08, EU:C:2009:350, point 32), et du 4 juin 2020, Kancelaria Medius (C‑495/19, EU:C:2020:431, point 37).

( 25 ) Voir arrêt du 30 mai 2013, Jőrös (C‑397/11, EU:C:2013:340, point 29).

( 26 ) Voir arrêt du 20 septembre 2018, EOS KSI Slovensko (C‑448/17, EU:C:2018:745, point 40).

( 27 ) Voir arrêt du 17 mai 2018, Karel de Grote – Hogeschool Katholieke Hogeschool Antwerpen (C‑147/16, EU:C:2018:320, point 35).

( 28 ) Voir arrêt du 30 mai 2013, Jőrös (C‑397/11, EU:C:2013:340, point 30).

( 29 ) Voir arrêt du 22 avril 2021, Profi Credit Slovakia (C‑485/19, EU:C:2021:313, point 53).

( 30 ) Voir arrêt du 1er octobre 2015, ERSTE Bank Hungary (C‑32/14, EU:C:2015:637, point 62).

( 31 ) Voir arrêt Gutiérrez Naranjo e.a. (point 68).

( 32 ) Voir arrêt du 26 janvier 2017, Banco Primus (C‑421/14, EU:C:2017:60, point 46).

( 33 ) C‑40/08, EU:C:2009:615, points 34 à 48.

( 34 ) C‑49/14, EU:C:2016:98, points 45 à 55.

( 35 ) Voir arrêt du 3 mars 2020, Gómez del Moral Guasch (C‑125/18, EU:C:2020:138, point 58).

( 36 ) Voir arrêt du 25 novembre 2020, Banca B. (C‑269/19, EU:C:2020:954, point 43).

( 37 ) Voir arrêt Gutiérrez Naranjo (points 61 à 75). Pour une discussion approfondie, voir, par exemple, Leskinen, C., et de Elizalde, F., « The control of terms that define the essential obligations of the parties under the Unfair Contract Terms Directive: Gutiérrez Naranjo », Common Market Law Review, vol. 55, no 5, 2018, p. 1595 à 1618.

( 38 ) Voir arrêt du 9 juillet 2020, Raiffeisen Bank et BRD Groupe Société Générale (C‑698/18 et C‑699/18, EU:C:2020:537, point 46).

( 39 ) Il convient de noter que la Cour a admis que l’obligation de procéder à l’examen d’office du caractère abusif de clauses contractuelles au titre de la directive 93/13 constitue une norme procédurale pesant sur les juridictions nationales. Voir arrêt du 7 novembre 2019, Profi Credit Polska (C‑419/18 et C‑483/18, EU:C:2019:930, point 74). Le fait, mis en avant par Unicaja Banco et le gouvernement espagnol, que la jurisprudence nationale concernerait les règles d’ordre public de nature procédurale ne saurait donc en soi faire obstacle à son application dans la présente affaire.

( 40 ) Voir, à cet égard, arrêt du 11 mars 2020, Lintner (C‑511/17, EU:C:2020:188, point 40), et mes conclusions dans la même affaire (C‑511/17, EU:C:2019:1141, points 65 à 69).

( 41 ) Voir conclusions de l’avocat général Mengozzi dans les affaires jointes Gutiérrez Naranjo e.a. (C‑154/15, C‑307/15 et C‑308/15, EU:C:2016:552, en particulier points 38 à 76).

( 42 ) C‑511/17, EU:C:2020:188, points 28 à 34. Voir, également, mes conclusions dans la même affaire (C‑511/17, EU:C:2019:1141, points 49 à 53).

( 43 ) C‑455/06, EU:C:2008:650, points 44 à 48. Comparer avec arrêt du 13 février 2014, Maks Pen (C‑18/13, EU:C:2014:69, point 37).

( 44 ) Voir, à cet égard, arrêt du 7 juin 2007, van der Weerd e.a. (C‑222/05 à C‑225/05, EU:C:2007:318, points 39 et 40).