ARRÊT DE LA COUR (cinquième chambre)

22 décembre 2017 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Procédure préjudicielle d’urgence – Coopération policière et judiciaire en matière pénale – Mandat d’arrêt européen – Décision-cadre 2002/584/JAI – Procédures de remise entre États membres – Conditions d’exécution – Motifs de non-exécution facultative – Article 4 bis, paragraphe 1, issu de la décision-cadre 2009/299/JAI – Mandat délivré aux fins de l’exécution d’une peine privative de liberté – Notion de “procès qui a mené à la décision” – Portée – Personne ayant été définitivement condamnée à une peine privative de liberté à l’issue d’une procédure qui s’est déroulée en sa présence – Peine à l’exécution de laquelle il a ultérieurement été sursis pour partie et sous certaines conditions – Procédure subséquente ayant abouti à la révocation du sursis en raison du non-respect de ces conditions – Procédure de révocation s’étant déroulée en l’absence de l’intéressé »

Dans l’affaire C‑571/17 PPU,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Rechtbank Amsterdam (tribunal d’Amsterdam, Pays-Bas), par décision du 28 septembre 2017, parvenue à la Cour le même jour, dans la procédure relative à l’exécution d’un mandat d’arrêt européen émis à l’encontre de

Samet Ardic,

LA COUR (cinquième chambre),

composée de M. J. L. da Cruz Vilaça, président de chambre, MM. E. Levits, A. Borg Barthet, Mme M. Berger et M. F. Biltgen (rapporteur), juges,

avocat général : M. M. Bobek,

greffier : Mme M. Ferreira, administrateur principal,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 22 novembre 2017,

considérant les observations présentées :

pour l’Openbaar Ministerie, par M. K. van der Schaft et Mme U. E. A. Weitzel, en qualité d’agents,

pour M. Ardic, par Mes T. O. M. Dieben, L. J. Woltring et J. W. Ebbink, advocaten,

pour le gouvernement néerlandais, par M. J. Langer et Mme M. K. Bulterman, en qualité d’agents,

pour le gouvernement allemand, par MM. T. Henze et M. Hellmann, en qualité d’agents,

pour l’Irlande, par Mme G. Hodge, en qualité d’agent, assistée de Mme G. Mullan, BL,

pour la Commission européenne, par M. R. Troosters et Mme S. Grünheid, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 20 décembre 2017,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 4 bis, paragraphe 1, de la décision-cadre 2002/584/JAI du Conseil, du 13 juin 2002, relative au mandat d’arrêt européen et aux procédures de remise entre États membres (JO 2002, L 190, p. 1), telle que modifiée par la décision-cadre 2009/299/JAI du Conseil, du 26 février 2009 (JO 2009, L 81, p. 24) (ci-après la « décision-cadre 2002/584 »).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre de l’exécution, aux Pays-Bas, d’un mandat d’arrêt européen émis par la Staatsanwaltschaft Stuttgart (parquet de Stuttgart, Allemagne) à l’encontre de M. Samet Ardic en vue de l’exécution, en Allemagne, de deux peines privatives de liberté.

Le cadre juridique

Le droit international

3

Sous l’intitulé « Droit à un procès équitable », l’article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950 (ci-après la « CEDH ») stipule :

« 1.   Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle. […]

2.   Toute personne accusée d’une infraction est présumée innocente jusqu’à ce que sa culpabilité ait été légalement établie.

3.   Tout accusé a droit notamment à :

a)

être informé, dans le plus court délai, dans une langue qu’il comprend et d’une manière détaillée, de la nature et de la cause de l’accusation portée contre lui ;

b)

disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense ;

c)

se défendre lui-même ou avoir l’assistance d’un défenseur de son choix et, s’il n’a pas les moyens de rémunérer un défenseur, pouvoir être assisté gratuitement par un avocat d’office, lorsque les intérêts de la justice l’exigent ;

d)

interroger ou faire interroger les témoins à charge et obtenir la convocation et l’interrogation des témoins à décharge dans les mêmes conditions que les témoins à charge ;

e)

se faire assister gratuitement d’un interprète, s’il ne comprend pas ou ne parle pas la langue employée à l’audience. »

Le droit de l’Union

La Charte

4

Les articles 47 et 48 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci‑après la « Charte ») font partie du titre VI de celle-ci, intitulé « Justice ».

5

Aux termes de l’article 47 de la Charte, intitulé « Droit à un recours effectif et à accéder à un tribunal impartial » :

« Toute personne dont les droits et libertés garantis par le droit de l’Union ont été violés a droit à un recours effectif devant un tribunal dans le respect des conditions prévues au présent article.

Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable par un tribunal indépendant et impartial, établi préalablement par la loi. Toute personne a la possibilité de se faire conseiller, défendre et représenter.

[...] »

6

Les explications relatives à la charte des droits fondamentaux (JO 2007, C 303, p. 17) précisent, à propos de l’article 47, deuxième alinéa, de la Charte, que cette disposition correspond à l’article 6, paragraphe 1, de la CEDH.

7

L’article 48 de la Charte, intitulé « Présomption d’innocence et droits de la défense », dispose :

« 1.   Tout accusé est présumé innocent jusqu’à ce que sa culpabilité ait été légalement établie.

2.   Le respect des droits de la défense est garanti à tout accusé. »

8

Les explications mentionnées au point 6 du présent arrêt précisent à cet égard :

« L’article 48 est le même que l’article 6, paragraphes 2 et 3, de la CEDH [...]

[...]

Conformément à l’article 52, paragraphe 3, ce droit a le même sens et la même portée que le droit garanti par la CEDH. »

9

L’article 52 de la Charte, intitulé « Portée et interprétation des droits et des principes », énonce :

« [...]

3.   Dans la mesure où la présente Charte contient des droits correspondant à des droits garantis par la [CEDH], leur sens et leur portée sont les mêmes que ceux que leur confère ladite convention. Cette disposition ne fait pas obstacle à ce que le droit de l’Union accorde une protection plus étendue.

[...]

7.   Les explications élaborées en vue de guider l’interprétation de la présente Charte sont dûment prises en considération par les juridictions de l’Union et des États membres. »

Les décisions-cadres 2002/584 et 2009/299

10

L’article 1er de la décision-cadre 2002/584, intitulé « Définition du mandat d’arrêt européen et obligation de l’exécuter », prévoit :

« 1.   Le mandat d’arrêt européen est une décision judiciaire émise par un État membre en vue de l’arrestation et de la remise par un autre État membre d’une personne recherchée pour l’exercice de poursuites pénales ou pour l’exécution d’une peine ou d’une mesure de sûreté privatives de liberté.

2.   Les États membres exécutent tout mandat d’arrêt européen, sur la base du principe de reconnaissance mutuelle et conformément aux dispositions de la présente décision-cadre.

3.   La présente décision-cadre ne saurait avoir pour effet de modifier l’obligation de respecter les droits fondamentaux et les principes juridiques fondamentaux tels qu’ils sont consacrés par l’article 6 [UE]. »

11

Les articles 3, 4 et 4 bis de ladite décision-cadre énoncent, de façon exhaustive, les motifs de non-exécution obligatoire et facultative du mandat d’arrêt européen.

12

La décision-cadre 2009/299 précise les motifs sur la base desquels l’autorité judiciaire d’exécution d’un État membre peut refuser d’exécuter le mandat d’arrêt européen lorsque la personne concernée n’a pas comparu à son procès.

13

Aux termes de l’article 1er de la décision-cadre 2009/299, intitulé « Objectifs et champ d’application » :

« 1.   Les objectifs de la présente décision-cadre sont de renforcer les droits procéduraux des personnes faisant l’objet d’une procédure pénale, tout en facilitant la coopération judiciaire en matière pénale et en particulier en améliorant la reconnaissance mutuelle des décisions judiciaires entre les États membres.

2.   La présente décision-cadre n’a pas pour effet de modifier l’obligation de respecter les droits fondamentaux et les principes juridiques fondamentaux tels qu’ils sont consacrés par l’article 6 du traité, y compris le droit de la défense des personnes faisant l’objet d’une procédure pénale, ni celle de les faire respecter par les autorités judiciaires des États membres.

3.   La présente décision-cadre établit des règles communes relatives à la reconnaissance et/ou à l’exécution dans un État membre (État membre d’exécution) de décisions judiciaires émises par un autre État membre (État membre d’émission) à l’issue d’une procédure à laquelle l’intéressé n’a pas comparu en personne [...] »

14

L’article 4 bis de la décision-cadre 2002/584, inséré par l’article 2 de la décision-cadre 2009/299, est intitulé « Décisions rendues à l’issue d’un procès auquel l’intéressé n’a pas comparu en personne ». Son paragraphe 1 est libellé comme suit :

« L’autorité judiciaire d’exécution peut également refuser d’exécuter le mandat d’arrêt européen délivré aux fins d’exécution d’une peine ou d’une mesure de sûreté privatives de liberté, si l’intéressé n’a pas comparu en personne au procès qui a mené à la décision, sauf si le mandat d’arrêt européen indique que l’intéressé, conformément aux autres exigences procédurales définies dans la législation nationale de l’État membre d’émission :

a)

en temps utile,

i)

soit a été cité à personne et a ainsi été informé de la date et du lieu fixés pour le procès qui a mené à la décision, soit a été informé officiellement et effectivement par d’autres moyens de la date et du lieu fixés pour ce procès, de telle sorte qu’il a été établi de manière non équivoque qu’il a eu connaissance du procès prévu ;

et

ii)

a été informé qu’une décision pouvait être rendue en cas de non-comparution ;

ou

b)

ayant eu connaissance du procès prévu, a donné mandat à un conseil juridique, qui a été désigné soit par l’intéressé soit par l’État, pour le défendre au procès, et a été effectivement défendu par ce conseil pendant le procès ;

ou

c)

après s’être vu signifier la décision et avoir été expressément informé de son droit à une nouvelle procédure de jugement ou à une procédure d’appel, à laquelle l’intéressé a le droit de participer et qui permet de réexaminer l’affaire sur le fond, en tenant compte des nouveaux éléments de preuve, et peut aboutir à une infirmation de la décision initiale :

i)

a indiqué expressément qu’il ne contestait pas la décision ;

ou

ii)

n’a pas demandé une nouvelle procédure de jugement ou une procédure d’appel dans le délai imparti ;

d)

n’a pas reçu personnellement la signification de la décision, mais :

i)

la recevra personnellement sans délai après la remise et sera expressément informé de son droit à une nouvelle procédure de jugement ou à une procédure d’appel, à laquelle l’intéressé a le droit de participer et qui permet de réexaminer l’affaire sur le fond, en tenant compte des nouveaux éléments de preuve, et peut aboutir à une infirmation de la décision initiale ;

et

ii)

sera informé du délai dans lequel il doit demander une nouvelle procédure de jugement ou une procédure d’appel, comme le mentionne le mandat d’arrêt européen concerné. »

15

L’article 8, paragraphe 1, de la décision-cadre 2002/584 a la teneur suivante :

« Le mandat d’arrêt européen contient les informations suivantes, présentées conformément au formulaire figurant en annexe :

a)

l’identité et la nationalité de la personne recherchée ;

b)

le nom, l’adresse, le numéro de téléphone et de télécopieur et l’adresse électronique de l’autorité judiciaire d’émission ;

c)

l’indication de l’existence d’un jugement exécutoire, d’un mandat d’arrêt ou de toute autre décision judiciaire exécutoire ayant la même force entrant dans le champ d’application des articles 1er et 2 ;

d)

la nature et la qualification légale de l’infraction, notamment au regard de l’article 2 ;

e)

la description des circonstances de la commission de l’infraction, y compris le moment, le lieu et le degré de participation de la personne recherchée à l’infraction ;

f)

la peine prononcée, s’il s’agit d’un jugement définitif, ou l’échelle de peines prévue pour l’infraction par la loi de l’État membre d’émission ;

g)

dans la mesure du possible, les autres conséquences de l’infraction. »

16

L’article 15 de cette décision-cadre, intitulé « Décision sur la remise », prévoit :

« 1.   L’autorité judiciaire d’exécution décide, dans les délais et aux conditions définis dans la présente décision-cadre, la remise de la personne.

2.   Si l’autorité judiciaire d’exécution estime que les informations communiquées par l’État membre d’émission sont insuffisantes pour lui permettre de décider la remise, elle demande la fourniture d’urgence des informations complémentaires nécessaires, en particulier en relation avec les articles 3 à 5 et 8, et peut fixer une date limite pour leur réception, en tenant compte de la nécessité de respecter les délais fixés à l’article 17.

3.   L’autorité judiciaire d’émission peut, à tout moment, transmettre toutes les informations additionnelles utiles à l’autorité judiciaire d’exécution. »

Le droit national

Le droit néerlandais

17

L’Overleveringswet (loi relative à la remise), du 29 avril 2004 (Stb. 2004, no 195), transpose la décision-cadre 2002/584 dans le droit néerlandais.

18

L’article 12 de cette loi est libellé comme suit :

« La remise n’est pas autorisée lorsque le mandat d’arrêt européen est destiné à mettre à exécution un jugement, alors que le prévenu n’a pas comparu en personne à l’audience qui a mené audit jugement, sauf si le mandat d’arrêt européen indique que, conformément aux exigences procédurales de l’État membre d’émission :

a)

le prévenu a été cité en temps utile et à personne et a ainsi été informé de la date et du lieu fixés pour l’audience qui a mené à la décision, ou a été informé officiellement et effectivement par d’autres moyens de la date et du lieu fixés pour cette audience, de telle sorte qu’il a été établi sans équivoque qu’il a eu connaissance de l’audience prévue, et a été informé qu’une décision pouvait être rendue en cas de non-comparution ; ou

b)

le prévenu était informé de l’audience et a donné mandat pour assurer sa défense à un avocat de son choix ou désigné par l’État et cet avocat l’a défendu à l’audience ; ou

c)

le prévenu, après s’être vu signifier la décision et avoir été expressément informé de son droit à une nouvelle procédure de jugement ou à une procédure d’appel, à laquelle il a le droit de participer et qui permet de réexaminer l’affaire sur le fond, en tenant compte des nouveaux éléments de preuve, et peut aboutir à une réformation de la décision initiale :

a indiqué expressément qu’il ne contestait pas la décision ; ou

n’a pas demandé une nouvelle procédure de jugement ou une procédure d’appel dans le délai imparti ; ou

d)

le prévenu n’a pas reçu personnellement la signification de la décision, mais :

la recevra personnellement sans délai après sa remise et sera expressément informé de son droit à une nouvelle procédure de jugement ou à une procédure d’appel, à laquelle l’intéressé a le droit de participer et qui permet de réexaminer l’affaire sur le fond, en tenant compte des nouveaux éléments de preuve, et peut aboutir à une infirmation de la décision initiale ;

sera informé du délai dans lequel il doit demander une nouvelle procédure de jugement ou une procédure d’appel, comme le mentionne le mandat d’arrêt européen concerné. »

Le droit allemand

19

L’article 56a du Strafgesetzbuch (code pénal, ci-après le « StGB ») dispose :

« 1.   Le tribunal fixe la durée de la période de mise à l’épreuve. Elle ne peut excéder cinq années ni être inférieure à deux années.

2.   La période de mise à l’épreuve commence lorsque la décision sur le sursis à l’exécution de la peine a acquis force de chose jugée. Elle peut être réduite ensuite à la durée minimale ou portée avant son expiration à la durée maximale. »

20

Aux termes de l’article 56b du StGB :

« 1.   Le tribunal peut imposer à la personne condamnée des conditions servant à réparer le tort causé. La personne condamnée ne peut pas se voir soumise à des exigences insurmontables.

2.   Le tribunal peut imposer à la personne condamnée de réparer selon ses moyens le dommage causé par son fait, de verser une somme d’argent à un établissement d’utilité publique, lorsque la nature de l’acte et la personnalité de l’auteur s’y prêtent, d’accomplir des prestations d’utilité publique ou de verser une somme d’argent au Trésor.

[...] »

21

L’article 56c du StGB est ainsi libellé :

« 1.   Le tribunal impose à la personne condamnée des instructions pour la durée de la période de mise à l’épreuve lorsque celle-ci a besoin d’aide pour ne plus commettre d’infraction. La personne condamnée ne peut se voir imposer à ce titre des exigences insurmontables touchant à son mode de vie.

2.   Le tribunal peut notamment ordonner à la personne condamnée de se conformer à des injonctions portant sur le séjour, la formation, le travail ou le temps libre ou sur l’organisation de ses moyens économiques, de se présenter à des moments déterminés au tribunal ou à un autre endroit, de ne pas contacter, fréquenter, employer, former ni héberger la victime ou certaines personnes ou des personnes d’un certain groupe susceptibles de lui donner l’occasion ou de l’inciter à commettre de nouvelles infractions, de ne pas posséder, faire remettre ou garder certains objets susceptibles de lui donner l’occasion ou de l’inciter à commettre de nouvelles infractions ou de s’acquitter d’obligations alimentaires.

[...] »

22

L’article 56d du StGB énonce :

« 1.   Lorsqu’il est opportun de le faire pour l’empêcher de commettre des infractions, le tribunal place la personne condamnée sous le contrôle et la direction d’un agent de probation pour toute la durée de la période de mise à l’épreuve ou pour une partie de celle-ci.

2.   Le tribunal donnera en règle générale l’instruction visée au paragraphe 1 lorsqu’il sursoit à l’exécution d’une peine privative de liberté de plus de neuf mois et que la personne condamnée n’a pas encore atteint l’âge de vingt-sept ans.

3.   L’agent de probation encadre et assiste la personne condamnée. En concertation avec le tribunal, il surveille le respect des conditions et instructions ainsi que des offres et promesses et fait rapport sur le mode de vie de la personne condamnée aux intervalles que le tribunal fixe. L’agent de probation avise le tribunal des méconnaissances flagrantes ou persistantes des conditions, instructions, offres ou promesses.

[...] »

23

Sous l’intitulé « Révocation du sursis », l’article 56f du StGB prévoit :

« 1.   Le tribunal révoque le sursis si la personne condamnée commet une infraction au cours de la période de mise à l’épreuve et montre ainsi que l’attente qui a présidé au sursis à l’exécution de la peine a été déçue, méconnaît de manière flagrante ou persistante des instructions ou persiste à se soustraire au contrôle et à la direction de l’agent de probation, donnant ainsi des raisons de craindre une récidive, ou enfreint de manière flagrante ou persistante des conditions. […]

2.   Le tribunal ne révoque cependant pas le sursis s’il suffit d’imposer des conditions ou instructions supplémentaires, notamment de placer la personne condamnée sous le contrôle d’un agent de probation, ou de prolonger la période de mise à l’épreuve ou de contrôle. Dans le second cas de figure, la période de mise à l’épreuve ne peut pas être prolongée de plus de la moitié de la période de mise à l’épreuve initialement imposée.

[...] ».

24

Aux termes de l’article 57 du StGB, intitulé « Sursis à l’exécution du solde de la durée d’une peine privative de liberté limitée dans le temps » :

« 1.   Lorsque les deux tiers de la peine infligée ont été purgés avec un minimum de deux mois, le tribunal sursoit à l’exécution du solde de la durée d’une peine privative de liberté limitée dans le temps avec mise à l’épreuve en considérant si les intérêts de la sécurité publique peuvent le justifier et avec l’accord de la personne condamnée. Le tribunal statuera en considérant en particulier la personnalité de la personne condamnée, ses antécédents, les circonstances qui ont entouré l’acte qu’elle a commis, l’importance du bien juridiquement protégé qui se trouverait menacé en cas de récidive, le comportement de la personne condamnée durant l’exécution de la peine, ses conditions de vie et les effets que l’on doit attendre d’un sursis pour celle-ci.

2.   Dès que la moitié de la durée d’une peine privative de liberté limitée dans le temps a été purgée, avec cependant un minimum de six mois, le tribunal peut surseoir à l’exécution du solde avec mise à l’épreuve lorsque la personne condamnée purge pour la première fois une peine privative de liberté et que celle-ci ne dépasse pas deux ans ou que l’appréciation globale de l’acte commis, de la personnalité de la personne condamnée et son évolution au cours de l’exécution de la peine atteste l’existence de circonstances particulières et que les autres conditions du paragraphe 1 sont remplies.

3.   Les articles 56a à 56e s’appliquent mutatis mutandis ; même si elle est réduite ultérieurement, la période de mise à l’épreuve ne peut pas être inférieure à la durée du solde de la peine. Lorsque la personne condamnée a purgé une année au moins de sa peine avant le sursis à l’exécution du solde avec mise à l’épreuve, le tribunal la place en principe sous le contrôle et la direction d’un agent de probation pour toute la durée de la période de mise à l’épreuve ou pour une partie de celle-ci.

4.   Dans la mesure où une peine privative de liberté est réglée par imputation, elle est réputée purgée au sens des paragraphes 1 à 3.

5.   Les articles 56f et 56g s’appliquent mutatis mutandis. Le tribunal révoque également le sursis à l’exécution d’une peine lorsque, dans l’intervalle entre la condamnation et la décision sur le sursis, la personne condamnée a commis une infraction que le tribunal n’a pas pu prendre en considération pour des raisons matérielles au moment où il a statué sur le sursis à l’exécution et qui aurait conduit à refuser le sursis si elle avait été prise en considération ; est qualifié de condamnation le jugement dans lequel les constats de fait au fond ont pu être examinés pour la dernière fois.

6.   Le tribunal peut s’abstenir de surseoir à l’exécution du solde de la durée d’une peine privative de liberté limitée dans le temps avec mise à l’épreuve lorsque la personne condamnée donne des indications insuffisantes ou fausses sur l’endroit où se trouvent des objets confisqués en tant que produits de l’infraction.

[…] »

25

Sous l’intitulé « Rétablissement dans l’état antérieur lorsque le droit d’être entendu n’a pas été accordé », l’article 33a du Strafprozeßordnung (code de procédure pénale, ci‑après le « StPO ») prévoit :

« Lorsque le tribunal a statué au mépris du droit d’une partie d’être entendue, d’une manière qui a eu une incidence sur la décision, et que l’ordonnance n’est pas susceptible de recours ni d’aucune autre voie de droit, il rétablit d’office ou sur demande la procédure par ordonnance dans l’état où elle se trouvait avant l’adoption de la décision pour autant que la partie s’en trouve encore lésée. L’article 47 s’applique mutatis mutandis. »

26

L’article 35 du StPO, intitulé « Communication », a la teneur suivante :

« 1.   Les décisions rendues en présence de la personne concernée lui sont communiquées par le prononcé. Une copie lui en sera délivrée à sa demande.

2.   Les autres décisions sont communiquées par notification. Si la communication de la décision ne fait pas courir de délai, une simple communication sans forme particulière suffit.

3.   La personne qui ne se trouve pas en liberté peut demander que la pièce notifiée lui soit lue. »

27

Sous l’intitulé « Procédure de notification », l’article 37 du StPO énonce :

« 1.   Les procédures par notification sont régies mutatis mutandis par les règles du code de procédure civile.

2.   Lorsque la notification destinée à une partie se fait à plusieurs personnes habilitées à la recevoir, le délai se calcule à partir de la dernière notification faite.

[…] »

28

Aux termes de l’article 40 du StPO, intitulé « Notification publique » :

« 1.   La notification publique est admise lorsqu’une notification à un prévenu auquel une citation à comparaître à l’audience principale n’a pas encore été signifiée ne peut pas être faite en Allemagne dans les formes prescrites et que l’application des règles régissant les notifications à l’étranger apparaît irréalisable ou vouée d’avance à l’échec. La notification est réputée accomplie après deux semaines d’affichage de l’avis.

2.   Si la citation à comparaître à l’audience principale a déjà été signifiée au prévenu, la notification publique est admise à son égard lorsqu’il n’est pas possible de faire une notification en Allemagne dans les formes prescrites.

3.   La notification publique est admise dans la procédure de l’appel formé par le prévenu dès qu’il n’est pas possible de faire une notification à une adresse à laquelle la dernière notification a été faite ou que le prévenu a déclarée en dernier lieu. »

29

Conformément à l’article 311 du StPO, intitulé « Recours immédiat » :

« 1.   Le recours immédiat est régi par les règles particulières suivantes.

2.   Le recours doit être introduit dans la semaine ; le délai commence à courir à la communication (article 35) de la décision.

3.   Le tribunal n’est pas compétent pour modifier sa décision entreprise par recours. Il admet néanmoins le recours lorsqu’il a exploité au détriment du requérant des faits ou des résultats de preuve sur lesquels celui-ci n’a pas encore été entendu et que les dires ultérieurs du requérant l’amènent à estimer le recours fondé. »

30

Sous l’intitulé « Décision ultérieure sur le sursis à l’exécution d’une peine avec mise à l’épreuve ou sur l’admonestation », l’article 453 du StPO dispose :

« 1.   Les décisions ultérieures relatives au sursis à l’exécution d’une peine avec mise à l’épreuve ou à l’admonestation (articles 56a à 56g, 58, 59a, 59b du StGB) sont prises par le tribunal sans audience de plaidoiries par voie d’ordonnance. Le ministère public et le prévenu doivent être entendus. L’article 246 a, paragraphe 2, et l’article 454, paragraphe 2, quatrième phrase, s’appliquent mutatis mutandis. Lorsque le tribunal doit statuer sur la révocation d’un sursis à l’exécution d’une peine pour méconnaissance des conditions ou instructions, il donnera à la personne condamnée l’occasion d’être entendue oralement. Lorsqu’un agent de probation a été désigné, le tribunal l’informe s’il envisage de statuer sur la révocation du sursis à l’exécution d’une peine ou sur la remise de peine ; le tribunal l’informera de ce qu’il a appris dans d’autres procédures pénales lorsque cela est opportun au vu de l’objectif du contrôle de la mise à l’épreuve.

2.   Les décisions visées au paragraphe 1 sont susceptibles de recours. Celui-ci ne peut être tiré que de l’illégalité d’une injonction ou de la prorogation ultérieure de la période de mise à l’épreuve. La révocation du sursis, la remise de peine, la révocation de la remise, la condamnation à la peine réservée et la déclaration de s’en tenir à l’avertissement (articles 56f, 56g, 59b du StGB) peuvent être entrepris dans un recours immédiat. »

Le litige au principal et la question préjudicielle

31

Il ressort de la décision de renvoi que, le 13 juin 2017, la juridiction de renvoi, en l’occurrence le Rechtbank Amsterdam (tribunal d’Amsterdam, Pays-Bas), a été saisie par l’officier van justitie bij de Rechtbank (ministère public près le tribunal, Pays-Bas) d’une demande visant à l’exécution d’un mandat d’arrêt européen émis le 9 mai 2017 par la Staatsanwaltschaft Stuttgart (parquet de Stuttgart).

32

Ce mandat d’arrêt européen tend à l’arrestation et à la remise de M. Ardic, ressortissant allemand résidant aux Pays-Bas, aux fins de l’exécution en Allemagne de deux peines privatives de liberté d’une durée chacune d’un an et huit mois, prononcées par des jugements du 4 mars 2009 et du 10 novembre 2010, devenus définitifs, rendus respectivement par l’Amtsgericht Böblingen (tribunal de district de Böblingen, Allemagne) et l’Amtsgericht Stuttgart-Bad Cannstatt (tribunal de district de Stuttgart-Bad Cannstatt, Allemagne), à l’issue de procès où l’intéressé a comparu en personne.

33

Il ressort de la décision de renvoi que, après que M. Ardic a purgé une partie de ces deux peines, les juridictions compétentes allemandes ont prononcé le sursis à l’exécution du restant de celles-ci. Toutefois, par des décisions du 4 avril et du 18 avril 2013, l’Amtsgericht Stuttgart-Bad Cannstatt (tribunal de district de Stuttgart-Bad Cannstatt) a révoqué lesdits sursis et ordonné l’exécution du solde desdites peines, soit 338 et 340 jours, au motif que l’intéressé avait persisté à ne pas respecter les conditions prescrites et à se soustraire au contrôle et à la direction de son agent de probation ainsi qu’au contrôle des tribunaux.

34

La juridiction de renvoi infère des mentions figurant sur le mandat d’arrêt européen en cause au principal que M. Ardic n’a pas comparu aux procédures ayant conduit auxdites décisions de révocation.

35

Ledit mandat d’arrêt européen mentionne en outre que les décisions de révocation en cause au principal n’ont fait l’objet que d’une notification publique au sens de l’article 40 du StPO, de telle sorte que M. Ardic devra se voir accorder le droit d’être entendu a posteriori par rapport à ces décisions, sans que cela affecte cependant leur caractère exécutoire.

36

M. Ardic a confirmé qu’il n’avait pas comparu aux procédures qui ont mené aux décisions de révocation en cause au principal et a déclaré que, s’il avait eu connaissance de la date et du lieu desdites procédures, il aurait comparu à celles-ci pour s’efforcer de convaincre les juges allemands de ne pas procéder à ces révocations.

37

Selon la juridiction de renvoi, les juridictions allemandes doivent révoquer le sursis notamment si la personne condamnée persiste à se soustraire au contrôle et à la direction de l’agent de probation ou à ne pas respecter les conditions énoncées. Lesdites juridictions doivent en revanche s’abstenir de procéder à la révocation du sursis si, en substance, il suffit d’imposer des conditions supplémentaires ou de prolonger la période de mise à l’épreuve.

38

Il ressort des décisions de révocation en cause au principal que l’Amtsgericht Stuttgart-Bad Cannstatt (tribunal de district de Stuttgart-Bad Cannstatt) a constaté que l’imposition de conditions supplémentaires ou la prolongation de la période probatoire n’étaient pas suffisantes et que la révocation des sursis était conforme au principe de proportionnalité.

39

La juridiction de renvoi en conclut que, lorsqu’il statue sur la révocation, le juge allemand dispose d’une marge d’appréciation lui permettant de prendre en considération la situation ou la personnalité de l’intéressé.

40

Dans ce contexte, cette juridiction relève que, dans son arrêt du 10 août 2017, Zdziaszek (C‑271/17 PPU, EU:C:2017:629), la Cour a opéré une distinction entre les mesures qui modifient le quantum d’une peine privative de liberté infligée et celles relatives aux modalités d’exécution d’une telle peine. Au point 85 de cet arrêt, la Cour a en effet indiqué que, selon la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, l’article 6, paragraphe 1, de la CEDH ne trouve pas à s’appliquer à des mesures relatives aux modalités d’exécution d’une peine privative de liberté, « notamment à celles ayant trait à la mise en liberté provisoire ».

41

Or, en l’occurrence, les décisions de révocation en cause au principal n’auraient pas modifié le quantum des peines privatives de liberté infligées à M. Ardic, ce dernier devant en effet purger la durée totale de ces peines, déduction faite de la durée déjà accomplie.

42

De l’avis de la juridiction de renvoi, il ressort effectivement de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme que les questions relatives à l’exécution des peines ne concernent pas le bien‑fondé d’une accusation en matière pénale au sens de l’article 6, paragraphe 1, de la CEDH (Cour EDH, 17 septembre 2009, Enea c. Italie CE:ECHR:2009:0917JUD007491201, § 97, et 23 octobre 2012, Ciok c. Pologne, CE:ECHR:2012:1023DEC000049810, § 38).

43

Cette approche concorderait avec la jurisprudence de cette même Cour européenne des droits de l’homme relative au terme « condamné » au sens de l’article 7, paragraphe 1, de la CEDH, jurisprudence selon laquelle ce terme serait étroitement lié à la notion de « [décision sur le] bien-fondé [d’une] accusation en matière pénale » au sens de l’article 6, paragraphe 1, de la CEDH. En effet, cette juridiction aurait jugé que les affaires concernant l’exécution des peines ne relèveraient pas non plus d’une telle condamnation (Cour EDH, 10 juillet 2003, Grava c. Italie, CE:ECHR:2003:0710JUD004352298, § 51, et 23 octobre 2012, Giza c. Pologne, CE:ECHR:2012:1023DEC000199711, § 36).

44

La juridiction de renvoi poursuit en faisant observer que l’arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme du 3 avril 2012, Boulois c. Luxembourg (CE:ECHR:2012:0403JUD003757504), auquel la Cour s’est référée au point 85 de l’arrêt du 10 août 2017, Zdziaszek (C‑271/17 PPU, EU:C:2017:629), ainsi que les autres arrêts de cette même Cour européenne des droits de l’homme, auxquels cette dernière juridiction a fait référence au § 87 du premier arrêt, auraient concerné des détenus qui avaient engagé une procédure concernant respectivement l’octroi d’un congé afin de pouvoir quitter temporairement la prison, la mainlevée de la détention provisoire, le placement dans un établissement à haute sécurité et le bénéfice d’une amnistie.

45

La juridiction de renvoi précise encore que la Commission européenne des droits de l’homme a considéré qu’une procédure relative à la révocation du sursis à l’exécution d’une peine privative de liberté ou à la révocation d’une mise en liberté conditionnelle ne relève pas du champ d’application de l’article 6, paragraphe 1, de la CEDH. En effet, il ne s’agirait pas, dans le cadre de telles procédures, de décider des contestations sur les droits et obligations de caractère civil ou du bien‑fondé d’une accusation en matière pénale (Commission EDH, 5 octobre 1967, X. c. République fédérale d’Allemagne, CE:ECHR:1967:1005DEC000242865 ; 6 décembre 1977, X. c. Suisse, CE:ECHR:1977:1206DEC000764876, et 9 mai 1994, Sampson c. Chypre, CE:ECHR:1994:0509DEC001977492).

46

La juridiction de renvoi en déduit que l’article 6, paragraphe 1, de la CEDH ne s’applique pas aux décisions de révocation telles que celles en cause au principal.

47

Néanmoins, il n’en résulterait pas nécessairement que ces décisions ne relèvent pas non plus du champ d’application de l’article 4 bis, paragraphe 1, de la décision‑cadre 2002/584.

48

En effet, d’une part, de telles décisions ne seraient pas de même nature que celles en cause dans l’affaire ayant conduit à l’arrêt du 10 août 2017, Zdziaszek (C‑271/17 PPU, EU:C:2017:629).

49

D’autre part, si l’article 47, deuxième alinéa, de la Charte correspond effectivement à l’article 6, paragraphe 1, de la CEDH, de sorte que le sens et la portée des droits garantis par la première de ces dispositions doivent être les mêmes que ceux que leur confère la CEDH, le droit de l’Union pourrait cependant, conformément à l’article 52, paragraphe 3, de la Charte, accorder une protection plus étendue que celle qui découle dudit article 6, paragraphe 1.

50

À cet égard, la juridiction de renvoi relève que, selon la jurisprudence de la Cour, l’article 4 bis de la décision-cadre 2002/584 vise à garantir un niveau de protection élevé (arrêts du 24 mai 2016, Dworzecki, C‑108/16 PPU, EU:C:2016:346, point 37, et du 10 août 2017, Tupikas, C‑270/17 PPU, EU:C:2017:628, point 58).

51

En outre, il serait possible de soutenir qu’une décision de révocation d’un sursis à l’exécution d’une peine privative de liberté a, en raison de ses conséquences sur la liberté individuelle, autant d’importance pour la personne condamnée qu’un « jugement prononçant une peine globale » qui conduit à une nouvelle détermination du niveau de peines privatives de liberté prononcées, de sorte que cette personne devrait, pour cette raison, pouvoir exercer ses droits de la défense lors d’une procédure susceptible de mener à une révocation du sursis et dans le cadre de laquelle le juge dispose d’une marge d’appréciation pour adopter cette décision (voir, par analogie, arrêt du 10 août 2017, Zdziaszek, C‑271/17 PPU, EU:C:2017:629, point 88).

52

En définitive, bien que le point 85 de l’arrêt du 10 août 2017, Zdziaszek (C‑271/17 PPU, EU:C:2017:629), tende à indiquer que les décisions de révocation d’un sursis ne relèvent pas de l’article 4 bis, paragraphe 1, de la décision-cadre 2002/584, la juridiction de renvoi fait observer qu’une telle circonstance ne saurait constituer, compte tenu des considérations qui précèdent, un motif suffisant pour juger de manière autonome que cette disposition ne trouve effectivement pas à s’appliquer en l’occurrence.

53

C’est dans ces conditions que le Rechtbank Amsterdam (tribunal d’Amsterdam) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante :

« Si la personne réclamée a été définitivement déclarée coupable dans le cadre d’une procédure qui s’est déroulée en sa présence et a été condamnée à une peine privative de liberté dont il a été sursis à l’exécution sous conditions, la procédure ultérieure dans le cadre de laquelle le juge, en l’absence de la personne réclamée, ordonne la révocation de ce sursis pour cause de non-respect des conditions et de soustraction au contrôle et à la direction d’un agent de reclassement constitue‑t‑elle un “procès qui a mené à la décision” au sens de l’article 4 bis de la décision-cadre [2002/584] ? »

Sur la procédure préjudicielle d’urgence

54

La juridiction de renvoi a demandé que le présent renvoi préjudiciel soit soumis à la procédure préjudicielle d’urgence prévue à l’article 107 du règlement de procédure de la Cour.

55

À l’appui de sa demande, cette juridiction invoque le fait que M. Ardic se trouve actuellement en détention aux Pays-Bas, dans l’attente de la suite à réserver à l’exécution du mandat d’arrêt européen en cause au principal, émis contre lui par les autorités compétentes de la République fédérale d’Allemagne.

56

La juridiction de renvoi expose en outre qu’elle ne pourrait prendre de décision à cet égard avant que la Cour ait statué sur la présente demande de décision préjudicielle. La réponse de la Cour à la question posée aurait dès lors une incidence directe et déterminante sur la durée de la détention de M. Ardic aux Pays-Bas en vue de sa remise éventuelle en exécution du mandat d’arrêt européen en cause au principal.

57

À cet égard, il convient de constater, en premier lieu, que le présent renvoi préjudiciel porte sur l’interprétation de la décision-cadre 2002/584 qui relève des domaines visés au titre V de la troisième partie du traité FUE, relatif à l’espace de liberté, de sécurité et de justice. Ce renvoi est, par conséquent, susceptible d’être soumis à la procédure préjudicielle d’urgence.

58

En second lieu, quant au critère relatif à l’urgence, il importe, conformément à une jurisprudence constante de la Cour, de prendre en considération la circonstance que la personne concernée dans l’affaire au principal est actuellement privée de liberté et que son maintien en détention dépend de la solution du litige au principal. Par ailleurs, la situation de la personne concernée est à apprécier telle qu’elle se présente à la date de l’examen de la demande visant à obtenir que le renvoi préjudiciel soit soumis à la procédure préjudicielle d’urgence (arrêts du 10 août 2017, Tupikas, C‑270/17 PPU, EU:C:2017:628, point 45 et jurisprudence citée, ainsi que du 10 août 2017, Zdziaszek, C‑271/17 PPU, EU:C:2017:629, point 72 et jurisprudence citée).

59

Or, en l’occurrence, d’une part, il est constant que, à cette date, M. Ardic était privé de liberté. D’autre part, le maintien en détention de ce dernier dépend de l’issue de l’affaire au principal, la mesure de détention dont il fait l’objet ayant été ordonnée, selon les explications fournies par la juridiction de renvoi, dans le cadre de l’exécution du mandat d’arrêt européen en cause au principal.

60

Dans ces conditions, la cinquième chambre de la Cour a décidé, le 12 octobre 2017, sur proposition du juge rapporteur, l’avocat général entendu, de faire droit à la demande de la juridiction de renvoi visant à soumettre le présent renvoi préjudiciel à la procédure préjudicielle d’urgence.

Sur la question préjudicielle

61

À titre liminaire, il y a lieu de relever que, en l’occurrence, si M. Ardic a comparu en personne aux procès ayant mené aux jugements qui l’ont définitivement condamné à des peines privatives de liberté, il est constant que les décisions de révocation du sursis en cause au principal, intervenues par la suite, ont été adoptées par défaut.

62

Dans ces conditions, la question posée par la juridiction de renvoi doit être comprise comme visant, en substance, à déterminer si, dans l’hypothèse où, comme dans l’affaire au principal, l’intéressé a comparu en personne au procès pénal ayant abouti à la décision juridictionnelle qui l’a définitivement déclaré coupable d’une infraction et lui a, de ce fait, infligé une peine privative de liberté à l’exécution de laquelle il a ultérieurement été sursis pour partie moyennant le respect de certaines conditions, la notion de « procès qui a mené à la décision », au sens de l’article 4 bis, paragraphe 1, de la décision-cadre 2002/584, doit être interprétée en ce sens qu’elle couvre également une procédure ultérieure de révocation de ce sursis fondée sur la violation desdites conditions durant la période de mise à l’épreuve.

63

En vue de répondre à cette question, il convient de rappeler, en premier lieu, que la notion de « procès qui a mené à la décision », au sens de l’article 4 bis, paragraphe 1, de la décision-cadre 2002/584, doit faire l’objet d’une interprétation autonome et uniforme au sein de l’Union, indépendamment des qualifications et des règles de fond ainsi que de procédure, par nature divergentes, en matière pénale, dans les différents États membres (voir, en ce sens, arrêt du 10 août 2017, Tupikas, C‑270/17 PPU, EU:C:2017:628, points 65, 67 et 76).

64

En second lieu, la Cour a déjà eu l’occasion de juger que cette notion doit être comprise comme désignant la procédure qui a conduit à la décision judiciaire ayant définitivement condamné la personne dont la remise est sollicitée dans le cadre de l’exécution d’un mandat d’arrêt européen (arrêt du 10 août 2017, Tupikas, C‑270/17 PPU, EU:C:2017:628, point 74).

65

Dans l’hypothèse où le procès pénal a comporté plusieurs instances ayant donné lieu à des décisions successives, la Cour a jugé que ladite notion fait référence à la dernière instance de ce procès au cours de laquelle une juridiction, après avoir examiné l’affaire en fait comme en droit, a statué de façon définitive sur la culpabilité de l’intéressé et l’a condamné à une peine privative de liberté (voir, en ce sens, arrêt du 10 août 2017, Tupikas, C‑270/17 PPU, EU:C:2017:628, points 81, 83, 89, 90 et 98).

66

La Cour a encore précisé que ladite notion recouvre également une procédure subséquente à l’issue de laquelle est rendue une décision judiciaire modifiant de façon définitive le niveau d’une ou de plusieurs peines prononcées antérieurement, pour autant que l’autorité qui a adopté cette dernière décision a bénéficié à cet égard d’une marge d’appréciation (voir, en ce sens, arrêt du 10 août 2017, Zdziaszek, C‑271/17 PPU, EU:C:2017:629, points 83, 90 et 96).

67

Il résulte de ce qui précède que l’article 4 bis, paragraphe 1, de la décision-cadre 2002/584 doit être interprété en ce sens que la notion de « décision » qui y est visée se réfère à la ou aux décisions juridictionnelles relatives à la condamnation pénale de l’intéressé, c’est-à-dire à celle ou celles par lesquelles il a été statué de manière définitive, après un examen en fait et en droit de l’affaire, sur la culpabilité de ce dernier et, le cas échéant, sur la peine privative de liberté qui lui est infligée.

68

En l’occurrence, il convient de déterminer si une décision de révocation d’un sursis à l’exécution d’une peine privative de liberté infligée antérieurement est de nature à pouvoir être assimilée, pour les besoins de l’application de ladite disposition, à une décision telle que celle circonscrite au point précédent.

69

À cet égard, il importe de rappeler que la décision-cadre 2002/584 a pour objet, par l’instauration d’un système simplifié et efficace de remise des personnes condamnées ou soupçonnées d’avoir enfreint la loi pénale, de faciliter et d’accélérer la coopération judiciaire en vue de contribuer à réaliser l’objectif assigné à l’Union de devenir un espace de liberté, de sécurité et de justice en se fondant sur le degré de confiance élevé qui doit exister entre les États membres, conformément au principe de reconnaissance mutuelle (voir, en ce sens, arrêts du 26 février 2013, Melloni, C‑399/11, EU:C:2013:107, points 36 et 37, ainsi que du 5 avril 2016, Aranyosi et Căldăraru, C‑404/15 et C‑659/15 PPU, EU:C:2016:198, points 75 et 76).

70

À cette fin, ladite décision-cadre consacre, à son article 1er, paragraphe 2, la règle selon laquelle les États membres sont tenus d’exécuter tout mandat d’arrêt européen sur la base du principe de reconnaissance mutuelle et conformément aux dispositions de cette même décision-cadre. Sauf dans des circonstances exceptionnelles, les autorités judiciaires d’exécution ne peuvent donc refuser d’exécuter un tel mandat que dans les cas, exhaustivement énumérés, de non-exécution prévus par la décision-cadre 2002/584 et l’exécution du mandat d’arrêt européen ne saurait être subordonnée qu’à l’une des conditions qui y sont limitativement énumérées. Par conséquent, alors que l’exécution du mandat d’arrêt européen constitue le principe, le refus d’exécution est conçu comme une exception qui doit faire l’objet d’une interprétation stricte (arrêt du 10 août 2017, Tupikas, C‑270/17 PPU, EU:C:2017:628, point 50 et jurisprudence citée).

71

S’agissant plus particulièrement de l’article 4 bis de la décision-cadre 2002/584, inséré par l’article 2 de la décision-cadre 2009/299, il tend à limiter la possibilité de refuser d’exécuter le mandat d’arrêt européen en énumérant, de façon précise et uniforme, les conditions dans lesquelles la reconnaissance et l’exécution d’une décision rendue à l’issue d’un procès auquel la personne concernée n’a pas comparu en personne ne peuvent pas être refusées (arrêt du 10 août 2017, Tupikas, C‑270/17 PPU, EU:C:2017:628, point 53 et jurisprudence citée).

72

En vertu de cette disposition, l’autorité judiciaire d’exécution est tenue de procéder à l’exécution d’un mandat d’arrêt européen, nonobstant l’absence de l’intéressé au procès qui a mené à la décision, dès lors que l’existence de l’une des circonstances visées au paragraphe 1, sous a), b), c) ou d), de celle-ci est vérifiée (arrêt du 10 août 2017, Tupikas, C‑270/17 PPU, EU:C:2017:628, point 55).

73

Ainsi, ladite disposition vise à améliorer la coopération judiciaire en matière pénale, en procédant à l’harmonisation des conditions d’exécution des mandats d’arrêt européens délivrés aux fins d’exécution des décisions rendues par défaut, ce qui est de nature à faciliter la reconnaissance mutuelle des décisions judiciaires entre les États membres. Dans le même temps, cette disposition renforce les droits procéduraux des personnes faisant l’objet d’une procédure pénale, en leur garantissant un niveau élevé de protection au moyen du plein respect de leurs droits de la défense qui dérivent du droit à un procès équitable, tel que consacré notamment à l’article 6 de la CEDH (voir, en ce sens, arrêts du 26 février 2013, Melloni, C‑399/11, EU:C:2013:107, point 51, et du 10 août 2017, Tupikas, C‑270/17 PPU, EU:C:2017:628, points 58 à 60).

74

À cet effet, la Cour veille à ce que l’article 4 bis, paragraphe 1, de la décision-cadre 2002/584 soit interprété et appliqué de manière conforme aux exigences de cet article 6 de la CEDH et de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme y relative (voir, en ce sens, arrêts du 10 août 2017, Tupikas, C‑270/17 PPU, EU:C:2017:628, points 78 à 80, et du 10 août 2017, Zdziaszek, C‑271/17 PPU, EU:C:2017:629, points 87 à 89).

75

Or, si la décision judiciaire définitive portant condamnation de la personne concernée, y compris celle fixant la peine privative de liberté à purger, relève pleinement dudit article 6 de la CEDH, il ressort de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme que cette disposition ne trouve pas en revanche à s’appliquer à des questions relatives aux modalités d’exécution ou d’application d’une telle peine privative de liberté (voir, en ce sens, Cour EDH, 3 avril 2012, Boulois c. Luxembourg, CE:ECHR:2012:0403JUD003757504, § 87 ; 25 novembre 2014, Vasilescu c. Belgique, CE:ECHR:2014:1125JUD006468212, § 121, et 2 juin 2015, Pacula c. Belgique CE:ECHR:2015:0602DEC006849512, § 47).

76

Il n’en va différemment que dans le cas où, à la suite d’une décision ayant statué sur la culpabilité de la personne intéressée et ayant condamné celle-ci à une peine privative de liberté, une nouvelle décision judiciaire vient modifier soit la nature, soit le quantum de la peine antérieurement prononcée, ce qui est le cas lorsqu’une peine d’emprisonnement est remplacée par une mesure d’expulsion (Cour EDH, 15 décembre 2009, Gurguchiani c. Espagne, CE:ECHR:2009:1215JUD001601206, § 40, 47 et 48) ou lorsque la durée de la détention infligée auparavant est augmentée (Cour EDH, 9 octobre 2003, Ezeh et Connors c. Royaume-Uni, CE:ECHR:2003:1009JUD003966598).

77

À la lumière des éléments qui précèdent, il y a donc lieu de considérer que, pour les besoins de l’article 4 bis, paragraphe 1, de la décision‑cadre 2002/584, la notion de « décision » qui y est énoncée ne couvre pas une décision relative à l’exécution ou à l’application d’une peine privative de liberté antérieurement prononcée, sauf lorsque cette décision a pour objet ou pour effet de modifier soit la nature soit le quantum de ladite peine et que l’autorité l’ayant rendue a bénéficié à cet égard d’une marge d’appréciation (voir, en ce sens, arrêts du 10 août 2017, Tupikas, C‑270/17 PPU, EU:C:2017:628, points 78 à 80, ainsi que du 10 août 2017, Zdziaszek, C‑271/17 PPU, EU:C:2017:629, points 85, 90 et 96).

78

S’agissant plus particulièrement des décisions de révocation du sursis à l’exécution de peines privatives de liberté prononcées antérieurement, telles que celles en cause au principal, il ressort du dossier à la disposition de la Cour que, en l’occurrence, ces dernières décisions n’ont affecté ni la nature ni le quantum des peines privatives de liberté infligées par les jugements antérieurs de condamnation définitive de l’intéressé, lesquels constituent le fondement du mandat d’arrêt européen dont les autorités allemandes sollicitent l’exécution aux Pays‑Bas.

79

En effet, les procédures ayant abouti auxdites décisions de révocation n’ont pas eu pour objet de procéder au réexamen des affaires quant au fond mais ont porté sur les seules conséquences que, du point de vue de l’application des peines initialement infligées et à l’exécution desquelles il avait été, par la suite, partiellement sursis moyennant le respect de certaines conditions, il y avait lieu d’attacher à la circonstance que la personne condamnée ne s’était pas conformée auxdites conditions durant la période de mise à l’épreuve.

80

Dans ce cadre, en vertu de la réglementation nationale pertinente, la juridiction compétente avait seulement à déterminer si une pareille circonstance justifiait que le condamné soit effectivement tenu de purger, pour partie voire dans sa totalité, les peines privatives de liberté qui avaient été fixées initialement et à l’exécution desquelles il avait été, par la suite, partiellement sursis. Ainsi que M. l’avocat général l’a relevé au point 71 de ses conclusions, si cette juridiction a bénéficié, à cet égard, d’une marge d’appréciation, cette marge a concerné non pas le niveau ou la nature des peines infligées à l’intéressé, mais uniquement le point de savoir si les sursis devaient être révoqués ou pouvaient être maintenus, assortis le cas échéant de conditions supplémentaires.

81

Ainsi, les décisions de révocation du sursis, telles que celles en cause au principal, ont pour seul effet que la personne concernée doit tout au plus purger le restant de la durée de la peine telle qu’elle lui avait été infligée initialement. Dès lors que, comme dans l’affaire au principal, le sursis est révoqué dans sa totalité, la condamnation produit de nouveau tous ses effets et la détermination du quantum de la peine restant à exécuter procède d’une opération purement arithmétique, le nombre de jours d’emprisonnement déjà accomplis étant simplement déduit de la peine totale telle que prononcée par le jugement définitif de condamnation.

82

Dans ces conditions, et au regard de ce qui a été dit au point 77 du présent arrêt, les décisions de révocation du sursis, telles que celles en cause au principal, ne sont pas couvertes par l’article 4 bis, paragraphe 1, de la décision-cadre 2002/584, puisque ces décisions laissent inchangées les peines prononcées par des décisions de condamnation devenues définitives en ce qui concerne tant leur nature que leur niveau.

83

S’il ne peut être contesté qu’une mesure de révocation d’un sursis est de nature à affecter la situation de la personne concernée, il n’en demeure pas moins que cette dernière ne saurait ignorer les conséquences qu’une violation des conditions auxquelles est subordonné le bénéfice d’un tel sursis est susceptible d’entraîner.

84

Au surplus, en l’occurrence, c’est précisément le fait que l’intéressé a quitté le territoire allemand, en violation d’une condition à laquelle l’octroi du sursis avait été expressément subordonné, qui a conduit à l’impossibilité pour les autorités allemandes compétentes de lui notifier personnellement l’information relative à l’introduction de procédures en vue d’une possible révocation des sursis antérieurement accordés et, partant, à l’adoption en son absence des décisions de révocation en cause au principal.

85

Néanmoins, même dans le cas où, comme dans l’affaire au principal, une personne condamnée a fait l’objet d’une décision de révocation d’un sursis adoptée à l’issue d’une procédure à laquelle elle n’a pas comparu, cette personne n’est pas dépourvue de tout droit, dans la mesure où, ainsi qu’il ressort de la réglementation nationale pertinente, elle dispose notamment de la faculté d’être entendue a posteriori par le juge et où ce dernier est tenu de déterminer si, à la lumière de cette audition, la décision de révocation du sursis doit être modifiée.

86

En tout état de cause, dans le cadre de l’article 4 bis, paragraphe 1, de la décision-cadre 2002/584, le critère pertinent susceptible d’être uniformément appliqué est celui fondé sur la nature de la « décision » qui y est visée, ainsi qu’il ressort des points 75 à 77 du présent arrêt.

87

Par ailleurs, et ainsi qu’il a déjà été indiqué au point 70 du présent arrêt, une interprétation plus large de la notion de « décision », au sens de l’article 4 bis, paragraphe 1, de la décision-cadre 2002/584, que celle énoncée au point 77 de ce même arrêt risquerait de compromettre l’efficacité du mécanisme du mandat d’arrêt européen.

88

Il convient encore d’ajouter que l’interprétation à laquelle la Cour a procédé audit point 77 implique seulement qu’une décision, qui ne porte que sur l’exécution ou l’application d’une peine privative de liberté définitivement infligée à l’issue du procès pénal et qui n’affecte ni la déclaration de culpabilité ni la nature ou le niveau de cette peine, ne relève pas du champ d’application de l’article 4 bis, paragraphe 1, de la décision-cadre 2002/584, de sorte que l’absence de l’intéressé au cours de la procédure qui a conduit à cette décision ne saurait constituer un motif valable pour refuser l’exécution du mandat d’arrêt européen.

89

En revanche, comme M. l’avocat général l’a relevé aux points 76 et 77 de ses conclusions, et ainsi qu’il ressort d’ailleurs explicitement de l’article 1er, paragraphe 2, de la décision-cadre 2009/299, cette interprétation ne signifie aucunement que les États membres seraient affranchis de l’obligation de respecter les droits fondamentaux et les principes juridiques fondamentaux tels qu’ils sont consacrés à l’article 6 TUE, y compris le droit de la défense des personnes faisant l’objet d’une procédure pénale, ni de celle de faire respecter lesdits droits et principes par leurs autorités judiciaires.

90

Une telle obligation conforte, précisément, le degré de confiance élevé qui doit exister entre les États membres et, partant, le principe de reconnaissance mutuelle sur lequel est fondé le mécanisme du mandat d’arrêt européen. En effet, ledit principe repose sur la confiance réciproque entre les États membres quant au fait que leurs ordres juridiques nationaux respectifs sont en mesure de fournir une protection équivalente et effective des droits fondamentaux reconnus au niveau de l’Union (voir, en ce sens, arrêts du 30 mai 2013, F., C‑168/13 PPU, EU:C:2013:358, points 49 et 50, ainsi que du 5 avril 2016, Aranyosi et Căldăraru, C‑404/15 et C‑659/15 PPU, EU:C:2016:198, points 77 et 78).

91

Dans ce contexte et dans l’optique d’une coopération judiciaire efficace en matière pénale, les autorités judiciaires d’émission et d’exécution doivent faire pleinement usage des instruments prévus notamment à l’article 8, paragraphe 1, et à l’article 15 de la décision-cadre 2002/584, de façon à favoriser la confiance mutuelle à la base de cette coopération.

92

Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de répondre à la question posée que, dans l’hypothèse où l’intéressé a comparu en personne au procès pénal ayant abouti à la décision juridictionnelle qui l’a définitivement déclaré coupable d’une infraction et lui a, de ce fait, infligé une peine privative de liberté à l’exécution de laquelle il a ultérieurement été sursis pour partie moyennant le respect de certaines conditions, la notion de « procès qui a mené à la décision », au sens de l’article 4 bis, paragraphe 1, de la décision-cadre 2002/584, doit être interprétée en ce sens qu’elle ne vise pas une procédure subséquente de révocation de ce sursis fondée sur la violation desdites conditions durant la période de mise à l’épreuve, pour autant que la décision de révocation adoptée à l’issue de cette procédure ne modifie ni la nature ni le niveau de la peine initialement prononcée.

Sur les dépens

93

La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

 

Par ces motifs, la Cour (cinquième chambre) dit pour droit :

 

Dans l’hypothèse où l’intéressé a comparu en personne au procès pénal ayant abouti à la décision juridictionnelle qui l’a définitivement déclaré coupable d’une infraction et lui a, de ce fait, infligé une peine privative de liberté à l’exécution de laquelle il a ultérieurement été sursis pour partie moyennant le respect de certaines conditions, la notion de « procès qui a mené à la décision », au sens de l’article 4 bis, paragraphe 1, de la décision-cadre 2002/584/JAI du Conseil, du 13 juin 2002, relative au mandat d’arrêt européen et aux procédures de remise entre États membres, telle que modifiée par la décision-cadre 2009/299/JAI du Conseil, du 26 février 2009, doit être interprétée en ce sens qu’elle ne vise pas une procédure subséquente de révocation de ce sursis fondée sur la violation desdites conditions durant la période de mise à l’épreuve, pour autant que la décision de révocation adoptée à l’issue de cette procédure ne modifie ni la nature ni le niveau de la peine initialement prononcée.

 

Signatures


( *1 ) Langue de procédure : le néerlandais.