ARRÊT DE LA COUR (troisième chambre)

17 janvier 2019 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Politique étrangère et de sécurité commune – Mesures restrictives prises en raison de la situation en Libye – Chaîne de contrats conclus dans le but d’émettre une garantie bancaire au profit d’une entité inscrite sur une liste de gel de fonds – Paiement de frais en vertu de contrats de contre-garantie – Règlement (UE) no 204/2011 – Article 5 – Notion de “fonds mis à la disposition d’une entité mentionnée à l’annexe III du règlement no 204/2011” – Article 12, paragraphe 1, sous c) – Notion de “demande à titre de garantie” – Notion de “personne ou entité agissant pour le compte d’une personne visée à l’article 12, paragraphe 1, sous a) ou b)” »

Dans l’affaire C‑168/17,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par la Kúria (Cour suprême, Hongrie), par décision du 23 mars 2017, parvenue à la Cour le 3 avril 2017, dans la procédure

SH

contre

TG,

en présence de :

UF,

LA COUR (troisième chambre),

composée de M. M. Vilaras (rapporteur), président de la quatrième chambre, faisant fonction de président de la troisième chambre, MM. J. Malenovský, L. Bay Larsen, M. Safjan et D. Šváby, juges,

avocat général : M. P. Mengozzi,

greffier : M. R. Schiano, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 23 avril 2018,

considérant les observations présentées :

pour SH, par Mes J. Burai-Kovács et G. Stanka, ügyvédek, ainsi que par M. Á. Mohay, jogi iroda vezetője,

pour TG, par Mes B. Kutasi et Á. Szenczy, ügyvédek, ainsi que par Me E. Rosenfeld, avocat,

pour UF, par Mes Z. Völgyesiné Hontvári et A. Szerencsés, ügyvédek,

pour le gouvernement hongrois, par MM. G. Koós et M. Z. Fehér, en qualité d’agents,

pour le gouvernement allemand, par MM. T. Henze et D. Klebs, en qualité d’agents,

pour le gouvernement italien, par Mme G. Palmieri, en qualité d’agent, assistée de M. P. Gentili, avvocato dello Stato,

pour la Commission européenne, par MM. L. Havas et E. Paasivirta, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 3 octobre 2018,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation, premièrement, de l’article 5, de l’article 9 et de l’article 12, paragraphe 1, du règlement (UE) no 204/2011 du Conseil, du 2 mars 2011, concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Libye (JO 2011, L 58, p. 1), deuxièmement, de l’article 12, paragraphe 1, de ce règlement, dans sa version résultant du règlement (UE) no 45/2014 du Conseil, du 20 janvier 2014 (JO 2014, L 16, p. 1), et, troisièmement, de l’article 17, paragraphe 1, du règlement (UE) 2016/44 du Conseil, du 18 janvier 2016, concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Libye et abrogeant le règlement (UE) no 204/2011 (JO 2016, L 12, p. 1).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant deux banques hongroises, SH et TG, porté devant la Kúria (Cour suprême, Hongrie), ayant pour objet le paiement par SH à TG, d’une part, de frais de garantie engagés dans le cadre d’une garantie bancaire accordée par une banque libyenne, à savoir Sahara Bank, à un maître d’ouvrages libyen, le Libyan Housing and Infrastructure Board (Conseil libyen du logement et de l’infrastructure, ci-après le « HIB »), et, d’autre part, de frais au titre de la contre-garantie accordée par TG à Sahara Bank.

Le cadre juridique

Le droit international

3

Eu égard aux violations flagrantes et systématiques des droits de l’homme commises en Libye, le Conseil de sécurité des Nations unies a, le 26 février 2011, adopté, sur le fondement de l’article 41 du chapitre VII de la Charte des Nations unies, la résolution 1970 (2011), qui instaure des mesures restrictives à l’encontre de cet État.

4

Aux termes des points 17 et 21 de cette résolution, le Conseil de sécurité des Nations unies :

« 17.Décide que tous les États Membres doivent geler immédiatement tous les fonds, autres avoirs financiers et ressources économiques se trouvant sur leur territoire qui sont en la possession ou sous le contrôle direct ou indirect des individus ou entités désignés dans l’annexe II à la présente résolution ou désignés par le Comité créé en application du paragraphe 24 ci-après, ou de tout individu ou entité agissant pour le compte ou sur les ordres de ceux-ci, ou de toute entité en leur possession ou sous leur contrôle, et décide en outre que tous les États Membres doivent veiller à empêcher que leurs nationaux ou aucune personne ou entité se trouvant sur leur territoire ne mettent à la disposition des individus ou entités désignés dans l’annexe II à la présente résolution ou aux individus désignés par le Comité aucuns fonds, avoirs financiers ou ressources économiques ;

[...]

21. Décide que les mesures prévues au paragraphe 17 ci-dessus n’interdisent pas à toute personne ou entité désignée d’effectuer des paiements au titre d’un contrat passé avant l’inscription de cette personne ou entité sur la liste, dès lors que les États concernés se sont assurés que le paiement n’est pas reçu directement ou indirectement par une personne ou entité visée au paragraphe 17 ci-dessus, et que ces États ont signifié au Comité leur intention d’effectuer ou de recevoir de tels paiements ou d’autoriser, selon qu’il conviendrait, le déblocage à cette fin de fonds, avoirs financiers et ressources économiques, dix jours ouvrables avant cette autorisation ».

Le droit de l’Union

La décision 2011/137/PESC

5

Afin de mettre en œuvre la résolution 1970 (2011), le Conseil de l’Union européenne a adopté la décision 2011/137/PESC, du 28 février 2011, concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Libye (JO 2011, L 58, p. 53).

6

L’article 6, paragraphes 1 et 2, de cette décision prévoit :

« 1.   Sont gelés tous les fonds, autres avoirs financiers et ressources économiques qui sont en la possession ou sous le contrôle, direct ou indirect :

a)

des personnes et entités figurant sur la liste de l’annexe II de la résolution 1970 (2011) [...] et des autres personnes et entités désignées par le Conseil de sécurité ou le comité conformément au point 22 de la résolution 1970 (2011) [...], ou des individus ou entités agissant pour leur compte ou sur leurs ordres, ou d’entités se trouvant en leur possession ou sous leur contrôle, visés à l’annexe III ;

b)

des personnes et entités ne relevant pas de l’annexe III qui ordonnent, contrôlent ou dirigent de toute autre manière les violations graves des droits de l’homme contre des personnes se trouvant en Libye, ou qui en sont complices, y compris en préparant, commandant, ordonnant ou conduisant des attaques, en violation du droit international, y compris des bombardements aériens, contre des populations ou des installations civiles, ou en étant complices, ou des individus ou entités agissant en leur nom ou sur leurs instructions, ou d’entités se trouvant en leur possession ou sous leur contrôle, visés à l’annexe IV ;

2.   Aucun fonds, ni aucun autre avoir financier ou ressource économique n’est mis à la disposition, directement ou indirectement, des personnes physiques ou morales ou des entités visées au paragraphe 1. »

7

Selon l’article 7 de ladite décision :

« Il n’est fait droit à aucune demande, y compris une demande d’indemnisation ou une autre demande de ce type, telle qu’une demande de compensation ou une demande à titre de garantie, présentée par des personnes désignées ou entités énumérées à l’annexe I, II, III ou IV ou toute autre personne ou entité en Libye, y compris le gouvernement libyen, ou par toute personne ou entité agissant par l’intermédiaire ou pour le compte de l’une de ces personnes ou entités, à l’occasion de tout contrat ou toute opération dont l’exécution aurait été affectée, directement ou indirectement, en tout ou en partie, par des mesures décidées en application de la résolution 1970 (2011) [...], y compris des mesures prises par l’Union ou tout État membre conformément aux décisions pertinentes du Conseil de sécurité ou à des mesures relevant de la présente décision et aux exigences de leur mise en œuvre ou en rapport avec celle-ci. »

Le règlement no 204/2011

8

Sur le fondement de la décision 2011/137, le Conseil a adopté le règlement no 204/2011, entré en vigueur le 3 mars 2011.

9

Aux termes des considérants 1 et 2 de ce règlement :

« (1)

Conformément à la résolution 1970 (2011) [...], la décision 2011/137 [...] prévoit un embargo sur les armes, une interdiction du matériel susceptible d’être utilisé à des fins de répression interne ainsi que des restrictions à l’admission et le gel des fonds et des ressources économiques de personnes et d’entités impliquées dans de graves violations des droits de l’homme en Libye, y compris en participant à des attaques, en violation du droit international, contre des populations et installations civiles. Ces personnes physiques ou morales et entités sont énumérées dans les annexes de ladite décision.

(2)

Certaines de ces mesures entrent dans le champ d’application du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne et une action réglementaire au niveau de l’Union est donc nécessaire pour en assurer la mise en œuvre, notamment pour garantir leur application uniforme par les opérateurs économiques de tous les États membres. »

10

L’article 1er dudit règlement dispose :

« Aux fins du présent règlement, on entend par :

a)

“fonds”, les actifs financiers et les avantages économiques de toute nature, et notamment, mais non exclusivement :

[...]

v)

le crédit, le droit à compensation, les garanties, les garanties de bonne exécution ou autres engagements financiers ;

vi)

les lettres de crédit, les connaissements, les contrats de vente ;

[...]

b)

“gel des fonds”, toute action visant à empêcher tout mouvement, transfert, modification, utilisation ou manipulation de fonds qui aurait pour conséquence un changement de leur volume, de leur montant, de leur localisation, de leur propriété, de leur possession, de leur nature, de leur destination ou toute autre modification qui pourrait en permettre l’utilisation, y compris la gestion de portefeuilles ;

c)

“ressources économiques”, les avoirs de toute nature, corporels ou incorporels, mobiliers ou immobiliers, qui ne sont pas des fonds, mais qui peuvent être utilisés pour obtenir des fonds, des biens ou des services ;

d)

“gel des ressources économiques”, toute action visant à empêcher leur utilisation pour l’obtention de fonds, de biens ou de services de quelque manière que ce soit, y compris, mais non exclusivement, leur vente, leur location ou leur mise sous hypothèque ;

[...] »

11

L’article 5 du même règlement est libellé comme suit :

« 1.   Tous les fonds et ressources économiques appartenant à, en possession de, détenus ou contrôlés par les personnes physiques ou morales, entités ou organismes énumérés aux annexes II et III sont gelés.

2.   Aucuns fonds ni ressources économiques ne sont mis, directement ou indirectement, à la disposition des personnes physiques ou morales, entités ou organismes énumérés aux annexes II et III, ni utilisés à leur profit.

3.   La participation volontaire et délibérée à des activités ayant pour objet ou pour effet direct ou indirect de contourner les mesures visées aux paragraphes 1 et 2 est interdite. »

12

Selon l’article 9, paragraphe 1, du règlement no 204/2011 :

« L’article 5, paragraphe 2, ne s’applique pas au versement sur les comptes gelés :

[...]

b)

de paiements dus en vertu de contrats, d’accords ou d’obligations souscrits avant la date à laquelle la personne physique ou morale, l’entité ou l’organisme visé à l’article 5 a été désigné par le comité des sanctions, le Conseil de sécurité ou le Conseil,

sous réserve que ces [...] paiements soient gelés conformément à l’article 5, paragraphe 1. »

13

L’article 12 de ce règlement énonce :

« Il n’est fait droit à aucune demande, y compris une demande d’indemnisation ou toute autre demande de ce type, telle qu’une demande de compensation ou une demande à titre de garantie, présentée par le gouvernement libyen, ou par toute personne ou entité agissant par l’intermédiaire ou pour le compte de celui-ci, à l’occasion de tout contrat ou toute opération dont l’exécution aurait été affectée, directement ou indirectement, en tout ou en partie, par des mesures décidées en application de la résolution 1970 (2011) [...], y compris des mesures prises par l’Union ou tout État membre conformément aux décisions pertinentes du Conseil de sécurité ou à des mesures relevant du présent règlement et aux exigences de leur mise en œuvre ou en rapport avec celle-ci. »

Le règlement no 45/2014

14

L’article 1er du règlement no 45/2014 a modifié l’article 12 du règlement no 204/2011 dans les termes suivants :

« 1.   Il n’est fait droit à aucune demande liée à tout contrat ou à toute opération dont l’exécution a été affectée, directement ou indirectement, en totalité ou en partie, par les mesures instituées en vertu du présent règlement, y compris à des demandes d’indemnisation ou à toute autre demande de ce type, telle qu’une demande de compensation ou une demande à titre de garantie, en particulier une demande visant à obtenir la prorogation ou le paiement d’une garantie ou d’une contre-garantie, notamment financière, qu’elle qu’en soit la forme, présentée par :

a)

des personnes, des entités ou des organismes désignés énumérés à l’annexe II ou III ;

b)

toute autre personne ou entité ou tout autre organisme libyen, y compris le gouvernement libyen ;

c)

toute personne, toute entité ou tout organisme agissant par l’intermédiaire ou pour le compte de l’une des personnes ou entités ou de l’un des organismes visés [sous] a) ou b).

[...] »

15

La modification apportée à l’article 12 du règlement no 204/2011 est entrée en vigueur le 22 janvier 2014.

Le règlement 2016/44

16

Aux termes de l’article 17, paragraphe 1, du règlement 2016/44, entré en vigueur le 20 janvier 2016 :

« Il n’est fait droit à aucune demande liée à tout contrat ou à toute opération dont l’exécution a été affectée, directement ou indirectement, en totalité ou en partie, par les mesures instituées en vertu du présent règlement, y compris à des demandes d’indemnisation ou à toute autre demande de ce type, telle qu’une demande de compensation ou une demande à titre de garantie, en particulier une demande visant à obtenir la prorogation ou le paiement d’une garantie ou d’une contre-garantie, notamment financière, qu’elle qu’en soit la forme, présentée par :

a)

des personnes, des entités ou des organismes désignés énumérés à l’annexe II ou III ;

b)

toute autre personne ou entité ou tout autre organisme libyen, y compris le gouvernement libyen ;

c)

toute personne, toute entité ou tout organisme agissant par l’intermédiaire ou pour le compte de l’une des personnes ou entités ou de l’un des organismes visés au point a) ou b). »

Les faits à l’origine du litige au principal et les questions préjudicielles

17

Le 7 juillet 2009, le HIB et UF, une entreprise hongroise de construction, ont conclu un contrat portant sur la réalisation par cette dernière d’infrastructures publiques dans la région de Zawya (Lybie). Le HIB a exigé qu’UF constitue des garanties bancaires, devant être fournies par une banque libyenne, afin de garantir, d’une part, l’exécution de ses obligations en contrepartie de l’acompte reçu (garantie de restitution d’acompte) et, d’autre part, la réalisation des travaux de construction (garantie de bonne fin).

18

Tout en acceptant de fournir les garanties demandées par le HIB, Sahara Bank a exigé d’UF que celle-ci lui fournisse une contre-garantie devant être accordée par une banque hongroise.

19

Le 16 octobre 2009, UF et une banque hongroise, SH, ont conclu un contrat de contre-garantie de restitution d’acompte et un contrat de contre-garantie de bonne fin, par lesquels SH s’engageait à émettre des contre-garanties au bénéfice d’une autre banque hongroise, TG, laquelle était mandatée par SH afin de fournir à Sahara Bank la contre-garantie et le crédit documentaire que celle-ci exigeait. En conséquence, les 20 novembre et 16 décembre 2009, SH a émis au bénéfice de TG, respectivement, une contre-garantie de restitution d’acompte pour un montant de 69499610 dinars libyens (LYD) (environ 49251000 euros), venant à échéance le 14 septembre 2013, et une contre-garantie de bonne fin pour un montant de 9266615 LYD (environ 6567000 euros), venant à échéance le 15 juillet 2014.

20

Les 24 novembre et 17 décembre 2009, TG a émis au bénéfice de Sahara Bank, respectivement, une contre-garantie de restitution d’acompte, venant à échéance le 30 août 2013, et une lettre de crédit irrévocable, venant à échéance le 30 juin 2014, Sahara Bank émettant alors les garanties bancaires exigées par le HIB.

21

En contrepartie du service rendu par TG pour l’émission de ces garanties, SH s’est engagée à payer à celle-ci, trimestriellement et par anticipation, une rémunération de 1,30 % par an, et à lui rembourser les frais et les coûts exposés par Sahara Bank, ainsi que ses coûts de financement et les intérêts de retard éventuellement applicables.

22

Le règlement d’exécution (UE) no 233/2011 du Conseil, du 10 mars 2011, mettant en œuvre l’article 16, paragraphe 2, du règlement no 204/2011 (JO 2011, L 64, p. 13), a ajouté le nom du HIB à la liste figurant à l’annexe III de ce dernier règlement à compter du 11 mars 2011.

23

Le règlement d’exécution (UE) no 272/2011 du Conseil, du 21 mars 2011, mettant en œuvre l’article 16, paragraphe 2, du règlement no 204/2011 (JO 2011, L 76, p. 32), a ajouté le nom de Sahara Bank à la liste figurant à l’annexe III de ce dernier règlement à compter du 22 mars 2011. Ce nom a été supprimé de cette liste le 2 septembre 2011, en application du règlement d’exécution (UE) no 872/2011 du Conseil, du 1er septembre 2011, mettant en œuvre l’article 16, paragraphe 2, du règlement no 204/2011 (JO 2011, L 227, p. 3).

24

À partir du 2 septembre 2011 et jusqu’au 16 juillet 2013, TG a versé à Sahara Bank les frais dus au titre du contrat de contre-garantie conclu avec cette dernière.

25

Le 29 novembre 2012, Sahara Bank a tenté, à la demande du HIB, d’actionner la contre-garantie de restitution d’acompte émise par TG. Celle-ci a, toutefois, refusé d’agir, en invoquant l’illégalité de la demande. À cet égard, par une ordonnance définitive du 22 avril 2013, la Fővárosi Ítélőtábla (cour d’appel régionale de Budapest-Capitale, Hongrie) a interdit un tel paiement tant que le nom du HIB serait inscrit sur la liste figurant à l’annexe III du règlement no 204/2011.

26

Le 20 décembre 2012, SH et TG ont signé un mémorandum d’accord, par lequel elles constataient qu’il ne pourrait être fait droit à aucune demande de paiement de la garantie de restitution d’acompte aussi longtemps que le HIB ferait l’objet de mesures restrictives. SH y indiquait son intention de ne payer les frais de contre-garantie de restitution d’acompte et de contre-garantie de bonne fin auxquels pouvaient prétendre TG et, par son intermédiaire, Sahara Bank, qu’à la condition que le HIB ne fasse plus l’objet de telles mesures avant les échéances de ces deux contre-garanties. SH s’engageait à verser sur un compte de dépôt les frais non encore payés à cette date et les frais ultérieurs, le déblocage de la somme ainsi versée devant être effectué selon les conditions prévues dans un contrat de dépôt conclu entre les parties et une banque dépositaire (ci-après le « contrat de dépôt »).

27

Ce même 20 décembre 2012, SH, TG et cette banque dépositaire ont conclu le contrat de dépôt, en vertu duquel les sommes liées aux contre-garanties accordées par SH à TG étaient déposées et conservées, tout comme les intérêts qu’elles produisaient.

28

Les parties au contrat de dépôt ont prévu que les sommes déposées seraient versées à SH dans le cas où le nom du HIB ne serait pas supprimé de la liste figurant à l’annexe III du règlement no 204/2011 avant les dates d’échéance des contre-garanties émises par SH. Alternativement, elles ont prévu que, dans le cas où le nom du HIB serait supprimé de la liste figurant à l’annexe III du règlement no 204/2011 avant ces dates, les sommes déposées reviendraient à TG.

29

Après le 20 décembre 2012, SH a versé sur ledit compte de dépôt les frais dus à TG au titre des contre-garanties émises par celle-ci.

30

La contre-garantie de restitution d’acompte émise par SH est arrivée à échéance le 14 septembre 2013 sans que le nom du HIB ait été retiré de la liste figurant à l’annexe III du règlement no 204/2011.

31

À la suite de la modification opérée par le règlement no 45/2014, entrée en vigueur le 22 janvier 2014, l’article 12, paragraphe 1, sous b), du règlement no 204/2011 interdit de faire droit à une demande liée à un contrat ou à une opération dont l’exécution a été affectée par les mesures instituées en vertu de ce règlement, présentée, notamment, par toute personne ou entité ou tout autre organisme libyen.

32

Par le règlement d’exécution (UE) no 74/2014 du Conseil, du 28 janvier 2014, mettant en œuvre l’article 16, paragraphe 2, du règlement no 204/2011 (JO 2014, L 26, p. 1), le nom du HIB a été supprimé de la liste figurant à l’annexe III de ce dernier règlement, avec effet au 29 janvier 2014.

33

Le 31 janvier 2014, SH a demandé à la banque dépositaire de libérer en sa faveur le montant déposé, au motif que la contre-garantie de restitution d’acompte émise par elle était arrivée à échéance au cours de la période pendant laquelle le nom du HIB était inscrit sur la liste figurant à l’annexe III du règlement no 204/2011. TG a refusé de procéder à la déclaration nécessaire à la libération du dépôt, prévue par le contrat de dépôt, au motif que les conditions d’une telle libération n’étaient pas remplies.

34

SH a, en conséquence, saisi le juge de première instance afin d’obtenir que le dépôt en cause soit libéré. De son côté, TG a présenté une demande reconventionnelle en paiement d’une somme de 2072321,18 euros, représentant les frais qu’elle estimait lui être dus dans le cadre de l’exécution des contrats la liant à SH et les frais de contre-garantie payés par elle à Sahara Bank.

35

Le juge de première instance a fait droit à la demande de SH, mais il a condamné cette dernière à payer la somme de 1352713,04 euros à TG. Il a, en effet, considéré que les frais dus en application des contrats de contre-garantie conclus entre SH et TG ne relevaient pas du règlement no 204/2011, puisqu’il s’agissait de la contrepartie d’une prestation fournie par une personne morale hongroise. En revanche, il a estimé que les frais de garantie versés par TG à Sahara Bank relevaient du règlement no 204/2011 et que TG ne pouvait donc en réclamer le remboursement à SH.

36

Le juge d’appel a réformé le jugement de première instance et a rejeté dans sa totalité la demande reconventionnelle, en se fondant sur le fait que les parties au litige avaient modifié, par le contrat de dépôt, les stipulations des contrats de contre-garantie en ce qui concerne le droit de percevoir les frais qui y sont liés et l’échéance de ce droit. Il en résultait que, puisque le nom du HIB n’avait pas été supprimé de la liste figurant à l’annexe III du règlement no 204/2011 avant l’échéance des contre-garanties, TG n’avait pas droit au paiement des différents frais. Ce juge a ajouté que, même en l’absence d’une modification des contrats, TG n’aurait pas eu droit à ce paiement au motif que les mesures restrictives imposées par la réglementation de l’Union avaient un caractère contraignant, TG ne pouvant pas fournir de garantie à une entité frappée par ces mesures et ne pouvant donc avoir droit à la couverture des frais liés à une telle garantie. Les frais de garantie payés par TG à Sahara Bank auraient indirectement servi à l’exécution d’une obligation au profit du HIB, relevant du champ d’application du règlement no 204/2011.

37

TG a formé un pourvoi devant la Kúria (Cour suprême) contre la décision de rejet de sa demande reconventionnelle. Elle soutient que le juge d’appel a interprété de manière erronée les articles 5 et 12 du règlement no 204/2011, au motif que le champ d’application de cet article 5 ne s’étendait qu’aux entités figurant sur la liste des sanctions, sur laquelle le nom de Sahara Bank n’était plus inscrit, et que, pendant la période pertinente, ledit article 12 ne concernait que les autorités libyennes. TG relève que les frais de garantie qui lui reviennent ainsi que ceux versés à Sahara Bank sont des frais bancaires, qu’ils ne constituent pas une garantie et que leur paiement ne sert pas les intérêts du HIB.

38

Tant SH qu’UF, partie intervenante au litige au principal au soutien de SH, demandent à la juridiction de renvoi de confirmer le jugement d’appel, puisque, selon elles, seul importe que, parmi les opérateurs de la chaîne de contrats signés entre les parties, le nom de l’un d’entre eux, en l’occurrence celui du HIB, soit inscrit sur la liste figurant à l’annexe III du règlement no 204/2011.

39

La juridiction de renvoi distingue la garantie, constituée afin de garantir l’exécution d’une obligation, et les frais de garantie, qui représentent la contrepartie de la prestation consistant en l’obligation de garantie. Selon elle, la libération de la garantie bancaire au profit du HIB, si elle avait eu lieu, aurait constitué un paiement interdit par le règlement no 204/2011.

40

Elle constate que la demande reconventionnelle de TG se divise en deux parties, l’une consistant à demander le remboursement des frais de garantie qu’elle a payés à Sahara Bank et l’autre se rapportant aux frais qu’elle était en droit de réclamer à SH en vertu des contrats de contre-garantie conclus entre elles.

41

La juridiction de renvoi considère que, afin de répondre à cette demande, il convient de déterminer si le paiement de frais de garantie peut être considéré comme étant un paiement indirect de fonds en rapport, sous quelque forme que ce soit, avec la garantie bancaire. En outre, il conviendrait de déterminer si, en réclamant ce paiement, TG peut être considérée comme étant une personne agissant pour le compte d’une personne, d’une entité ou d’un organisme soumis aux mesures restrictives du règlement no 204/2011. Elle s’interroge également sur l’éventuelle application de l’article 9 de ce règlement, qui prévoit des exceptions aux mesures de gel des fonds et des ressources économiques.

42

Elle constate qu’il conviendrait de statuer sur le fondement du droit national si la demande de paiement des différents frais de garantie formulée par TG ne relevait pas, en tout ou en partie, du règlement no 204/2011. Si le paiement de ces frais devait être qualifié de paiement indirect, au sens de ce règlement, sans que la règle d’exception prévue à l’article 9 puisse jouer, il conviendrait alors de rejeter la demande reconventionnelle.

43

La juridiction de renvoi considère que les différents contrats en cause sont étroitement liés, puisqu’ils ont été conclus dans le seul but de constituer une garantie bancaire au profit du HIB, et qu’ils ne peuvent être traités comme faisant naître des obligations autonomes, indépendantes les unes des autres.

44

Elle note que, si le paiement des frais de garantie relève du champ d’application d’un règlement instituant des mesures restrictives, il conviendra de déterminer quel règlement est applicable, à savoir le règlement no 204/2011, qui était en vigueur à la date de l’expiration des contre-garanties, ou le règlement 2016/44, qui est entré en vigueur alors que le litige était déjà pendant devant les juridictions hongroises et que le décompte de ces frais n’était pas définitivement effectué.

45

Dans ces conditions, la Kúria (Cour suprême) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1)

Le champ d’application du règlement no 204/2011 et du règlement 2016/44 s’étend-il aux obligations suivantes de paiement des frais de garantie sur la base de contrats de contre-garantie dans une chaîne de contrats conclus dans le but d’émettre une garantie bancaire au profit du [HIB] :

a)

lorsqu’une banque établie dans l’Union européenne, au titre d’un contrat de contre-garantie, est tenue de payer des frais à une banque libyenne qui figure sur la liste [...] de l’annexe III du règlement no 204/2011 ;

b)

lorsqu’une banque établie dans l’Union [...], au titre d’un contrat de contre-garantie, est tenue de payer des frais à une banque libyenne qui ne figure pas sur la liste [...] de l’annexe III du règlement no 204/2011, mais que la garantie bancaire a été émise au profit du HIB, qui figure sur [cette liste] ;

c)

lorsque, dans la période suivant la modification du règlement no 204/2011 par le règlement no 45/2014, le règlement no 204/2011 interdit les paiements directs ou indirects à toute entité libyenne ;

d)

lorsque l’obligation de paiement des frais de garantie repose sur un contrat de contre-garantie conclu dans le cadre d’une chaîne de contrats conclus en vue de l’émission d’une garantie bancaire au profit du HIB et dans le cadre de la relation entre deux banques établies dans l’Union [...] ;

e)

lorsque le décompte relatif aux frais de garantie intervient après l’expiration de la durée des garanties, dans le cadre d’une procédure contentieuse, après l’entrée en vigueur du règlement 2016/44.

2)

Si l’obligation de paiement des frais de garantie exposée [dans la première question, sous a) et b),] relève du champ d’application du règlement [no 204/2011], faut-il considérer comme des fonds utilisés directement ou indirectement au profit de personnes morales, entités ou organismes figurant à l’annexe III du règlement no 204/2011 les frais de garantie payés à une banque libyenne – ayant figuré elle aussi un certain temps sur la liste [...] de l’annexe III – en vue de l’émission d’une garantie de remboursement d’acompte et d’une garantie de bonne fin au profit du HIB ?

3)

Dans la période suivant la modification du règlement no 204/2011 par le règlement no 45/2014 ([première question, sous c)]), faut-il interpréter l’article 12, paragraphe 1, sous b), du règlement no 204/2011 en ce sens qu’on peut considérer que constituent directement ou indirectement une demande à titre de garantie les frais et les coûts réclamés par une banque libyenne et payés par une banque établie dans l’Union [...] au titre d’un contrat de contre-garantie ?

4)

Faut-il considérer comme une personne ou une entité visée à l’article 12, paragraphe 1, [sous] c) du règlement no 204/2011, modifié par le règlement no 45/2014 – personne ou entité agissant par l’intermédiaire ou pour le compte ou au profit de l’une des personnes, entités ou organismes visés [sous] a) ou b) de l’article 12, paragraphe 1, [sous] c), précité –, une banque établie dans l’Union [...] qui est tenue de payer des frais de garantie à une entité libyenne en vertu d’un contrat de contre-garantie conclu dans le cadre d’une chaîne de contrats conclus en vue de l’émission d’une garantie bancaire au profit du HIB ([première question, sous d)]) ? Peut-on considérer que constituent directement ou indirectement une demande à titre de garantie les frais de garantie réclamés par cette banque à une autre banque établie dans l’Union [...] ?

5)

Un paiement quelconque est-il lié à la règle d’exception prévue à l’article 9 du règlement no 204/2011 ?

6)

Dans la mesure où le décompte relatif aux frais de garantie intervient après l’entrée en vigueur du règlement [2016/44], abrogeant le règlement no 204/2011[...], mais contenant des règles en substance identiques au règlement antérieur ([première question, sous e)]), ce règlement 2016/44 trouve-t-il à s’appliquer s’agissant de statuer sur le litige entre les parties et faut-il interpréter l’article 17, paragraphe 1, sous b), de ce règlement en ce sens qu’on peut considérer que constituent directement ou indirectement une demande à titre de garantie les frais et les coûts réclamés par une banque libyenne et payés par une banque établie dans l’Union [...] en vertu d’un contrat de contre-garantie ? Faut-il considérer comme une personne ou une entité visées à l’article 17, paragraphe 1, [sous] c) de ce règlement – personne ou entité agissant par l’intermédiaire ou pour le compte ou au profit de l’une des personnes ou entités ou de l’un des organismes visés à l’article 17, paragraphe 1, [sous] a) ou b), du même règlement – une banque établie dans l’Union [...] qui est tenue de payer des frais de garantie à une entité libyenne en vertu d’un contrat de contre-garantie conclu dans le cadre d’une chaîne de contrats conclus en vue de l’émission d’une garantie bancaire au profit du HIB ? Peut-on considérer que constituent directement ou indirectement une demande à titre de garantie les frais de garantie réclamés par cette banque à une autre banque établie dans l’Union [...] ? »

Sur les questions préjudicielles

Observations liminaires

46

Selon la juridiction de renvoi, la solution du litige au principal dépend, notamment, du point de savoir si le règlement no 204/2011 s’applique aux frais dus au titre de contrats émis à des fins de contre-garantie d’un contrat de garantie bancaire dont le bénéficiaire a fait l’objet de mesures restrictives en vertu de ce règlement.

47

Or, les différentes questions préjudicielles se recoupant sur plusieurs plans, elles doivent être regroupées et reformulées, afin d’apporter à la juridiction de renvoi les réponses les plus précises possibles.

48

Dès lors, il doit être considéré que la juridiction de renvoi s’interroge, en substance, sur l’application à une situation telle que celle en cause au principal, premièrement, de l’article 5, paragraphe 2, du règlement no 204/2011, qui interdit que des fonds ou des ressources économiques soient mis, directement ou indirectement, à la disposition de personnes dont le nom est inscrit sur la liste figurant à l’annexe III de ce règlement, deuxièmement, de l’article 12 dudit règlement, qui interdit de faire droit à toute demande liée à tout contrat ou à toute opération affectés par des mesures instituées au titre du même règlement, troisièmement, de l’article 9 du règlement no 204/2011, qui prévoit des exceptions à l’article 5, paragraphe 2, et, quatrièmement, de l’article 17, paragraphe 1, du règlement 2016/44, qui a remplacé l’article 12 du règlement no 204/2011.

Sur l’article 5, paragraphe 2, du règlement no 204/2011

49

La juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 5, paragraphe 2, du règlement no 204/2011 doit être interprété en ce sens qu’il s’applique dans une situation telle que celle en cause au principal, dans laquelle des frais dus au titre de contrats de contre-garantie doivent être payés, premièrement, par une banque de l’Union à une banque libyenne dont le nom est inscrit sur la liste figurant à l’annexe III de ce règlement, deuxièmement, par une banque de l’Union à une banque libyenne dont le nom n’est plus inscrit sur cette liste, lorsque la garantie bancaire accordée par la banque libyenne bénéficie à une entité qui figure sur ladite liste, et, troisièmement, par une banque de l’Union à une autre banque de l’Union.

50

En vertu de l’article 5, paragraphe 2, du règlement no 204/2011, aucun fonds ni ressources économiques ne sont mis, directement ou indirectement, à la disposition des personnes physiques ou morales, des entités ou des organismes énumérés aux annexes II et III de ce règlement, ni utilisés à leur profit.

51

Il convient de relever que l’interdiction de mise à disposition de fonds ou de ressources économiques à une personne inscrite sur une liste de personnes visées par des mesures restrictives, prévue à ladite disposition, est libellée de manière particulièrement large, ce qu’atteste l’emploi des termes « directement ou indirectement », et englobe, par conséquent, tout acte dont l’accomplissement est nécessaire, selon le droit national applicable, pour permettre à cette personne d’obtenir effectivement le pouvoir de disposer pleinement des fonds ou des ressources économiques concernés (voir, en ce sens, arrêts du 11 octobre 2007, Möllendorf et Möllendorf-Niehuus, C‑117/06, EU:C:2007:596, points 50 et 51 ; du 29 juin 2010, E et F, C‑550/09, EU:C:2010:382, points 66 et 74, ainsi que du 21 décembre 2011, Afrasiabi e.a., C‑72/11, EU:C:2011:874, points 39 et 40).

52

Ce libellé large et non équivoque trouve à s’appliquer ainsi à toute mise à disposition d’une ressource économique et donc également à un acte qui procède de l’exécution d’un contrat synallagmatique et qui a été consenti en échange du paiement d’une contrepartie économique (arrêt du 11 octobre 2007, Möllendorf et Möllendorf-Niehuus, C‑117/06, EU:C:2007:596, point 56).

53

Par ailleurs, il découle de la jurisprudence de la Cour que la notion de « fonds et ressources économiques » revêt également un sens large, qui couvre les avoirs de toute nature acquis par quelque moyen que ce soit (voir, par analogie, arrêt du 29 juin 2010, E et F, C‑550/09, EU:C:2010:382, point 69).

54

En premier lieu, la juridiction de renvoi envisage l’hypothèse selon laquelle une banque de l’Union devrait payer à une banque libyenne, dont le nom est inscrit sur la liste figurant à l’annexe III du règlement no 204/2011, des frais dus au titre d’un contrat de contre-garantie.

55

Si le litige au principal porte sur le paiement des frais dus au titre d’un contrat de contre-garantie conclu entre deux banques européennes, l’hypothèse envisagée au point précédent pourrait néanmoins avoir une influence sur la solution de ce litige, dans la mesure où il n’est pas exclu que le paiement des frais de contre-garantie, demandé par TG, porte également sur les frais de garantie exposés par Sahara Bank au titre de la période pendant laquelle le nom de celle-ci a été inscrit sur la liste figurant à l’annexe III de ce règlement.

56

En l’occurrence, la banque libyenne en cause dans la procédure au principal, à savoir Sahara Bank, était inscrite sur ladite liste du 22 mars au 2 septembre 2011, de sorte que seul ledit règlement est pertinent à cet égard.

57

Or, le seul fait que des sommes d’argent doivent être payées à une telle banque, à quelque titre que ce soit, fait entrer cette opération dans le champ d’application de l’article 5, paragraphe 2, du même règlement, dès lors que, au sens de cette disposition, une telle opération consiste à mettre directement des fonds à la disposition d’une personne dont le nom est inscrit sur la liste figurant à l’annexe III du règlement no 204/2011.

58

En outre, ainsi que l’a relevé M. l’avocat général au point 34 de ses conclusions, la circonstance que ces paiements s’inscrivent dans le cadre d’une transaction caractérisée par un équilibre économique entre la prestation et la contrepartie de celle-ci et constituent des actes d’exécution d’un contrat conclu avant l’entrée en vigueur du règlement no 204/2011 ne permet pas en soi de les exclure du champ d’application de ce règlement et des interdictions qu’il prévoit (voir, en ce sens, arrêt du 11 octobre 2007, Möllendorf et Möllendorf-Niehuus, C‑117/06, EU:C:2007:596, points 49 ainsi que 62).

59

En deuxième lieu, la juridiction de renvoi s’interroge sur la possible application du règlement no 204/2011 à des paiements relatifs à des frais dus au titre d’un contrat de contre-garantie, effectués par une banque de l’Union à une banque libyenne, après que le nom de cette dernière a été supprimé de la liste figurant à l’annexe III de ce règlement.

60

De tels paiements ne sauraient constituer une mise à disposition directe de fonds au sens de l’article 5, paragraphe 2, dudit règlement, puisque le nom du bénéficiaire de ces fonds n’est pas inscrit sur la liste figurant à ladite annexe III ni d’ailleurs sur la liste figurant à l’annexe II du même règlement, également visée par l’interdiction formulée à cette disposition.

61

Pour autant, lesdits paiements pourraient constituer une mise à disposition indirecte de fonds en faveur d’une personne dont le nom est inscrit sur la liste figurant à l’annexe III du règlement no 204/2011 comme, en l’occurrence, le HIB, bénéficiaire des garanties bancaires qui sont à l’origine des contrats de contre-garantie en cause au principal, dont le nom était inscrit sur cette liste du 11 mars 2011 au 29 janvier 2014, à savoir, notamment, après la suppression du nom de Sahara Bank de ladite liste.

62

Néanmoins, pour que des fonds puissent être considérés comme étant mis indirectement à la disposition d’une personne dont le nom est inscrit sur la liste figurant à l’annexe III de ce règlement, il est nécessaire qu’ils puissent être reversés à cette personne ou que cette dernière détienne le pouvoir de disposer de ces fonds, notamment eu égard à l’existence de liens juridiques ou financiers entre le bénéficiaire des fonds et une telle personne.

63

En l’occurrence, les frais dus à Sahara Bank par TG représentent la contrepartie des garanties bancaires émises au profit du HIB, dans un contexte où celles-ci auraient dû être supportées par une banque hongroise, à savoir par SH. En raison de leur nature, ces frais ne sont donc pas destinés à être reversés au HIB. En outre, il ne ressort aucunement des éléments du dossier soumis à la Cour que le HIB serait lié à Sahara Bank par des liens tels que ceux décrits au point précédent. Il appartiendra, cependant, à la juridiction de renvoi de vérifier si tel est bien le cas.

64

Enfin, les paiements par une banque de l’Union des frais dus à une banque libyenne, au titre d’un contrat de contre-garantie, ne sauraient être considérés, au sens de l’article 5, paragraphe 2, du règlement no 204/2011, comme étant utilisés au profit d’une personne dont le nom est inscrit sur la liste figurant à l’annexe III de ce règlement que si, sur le fondement du contrat de garantie bancaire et des contrats de contre-garantie, ces paiements permettaient, directement ou indirectement, au bénéficiaire de la garantie bancaire, inscrit sur l’une de ces listes, d’obtenir l’exécution de celle-ci.

65

Tel serait notamment le cas dans l’hypothèse dans laquelle le droit pour le bénéficiaire de la garantie bancaire de demander l’exécution de celle‑ci dépendait, en tout ou en partie, du versement des frais dus au titre de l’un des contrats de contre-garantie. Dans cette mesure, les paiements au titre de ces frais pourraient être regardés comme étant utilisés au profit d’une personne dont le nom est inscrit sur la liste figurant à l’annexe III dudit règlement.

66

Il appartiendra, toutefois, à la juridiction de renvoi de procéder aux vérifications nécessaires de nature à exclure que les paiements effectués par une banque de l’Union, à savoir par TG, à une banque libyenne, en l’occurrence à Sahara Bank, relatifs à des frais dus au titre d’un contrat de contre-garantie, soient, eu égard aux éléments de réponse apportés aux points 64 et 65 du présent arrêt, utilisés au profit du HIB.

67

En troisième lieu, les paiements effectués par une banque de l’Union à une autre banque de l’Union relatifs à des frais dus au titre d’un contrat de contre-garantie, dont une partie consiste à rembourser les frais payés par cette dernière à une banque libyenne dans le cadre d’un autre contrat de contre-garantie, ne sauraient, en principe, relever du champ d’application de l’article 5, paragraphe 2, du règlement no 204/2011, en tant que fonds mis directement à la disposition d’une personne dont le nom est inscrit sur la liste figurant à l’annexe III de ce règlement.

68

En ce qui concerne la mise à disposition indirecte de fonds à une telle personne ou l’utilisation par celle-ci de ces fonds, les considérations exposées aux points 61 à 66 du présent arrêt trouvent à s’appliquer.

69

Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, l’article 5, paragraphe 2, du règlement no 204/2011 doit être interprété en ce sens :

qu’il s’applique dans une situation telle que celle en cause au principal, dans laquelle des frais dus au titre d’un contrat de contre-garantie doivent être payés par une banque de l’Union à une banque libyenne dont le nom est inscrit sur la liste figurant à l’annexe III de ce règlement, et

qu’il ne s’applique pas, en principe, dans une situation telle que celle en cause au principal, dans laquelle des frais dus au titre d’un contrat de contre-garantie doivent être payés par une banque de l’Union à une banque libyenne dont le nom n’est plus inscrit sur la liste figurant à l’annexe III dudit règlement ou par une banque de l’Union à une autre banque de l’Union, lorsque la garantie bancaire accordée par la banque libyenne bénéficie à une entité qui figure sur cette liste, à moins qu’un tel paiement ne conduise, en raison des liens juridiques ou financiers existant entre la banque bénéficiaire de ce paiement et l’entité figurant sur ladite liste, à une mise à disposition indirecte des frais en question au profit de cette entité.

Sur l’article 12 du règlement no 204/2011

70

La juridiction de renvoi demande, en substance si, dans une situation telle que celle en cause au principal, l’article 12 du règlement no 204/2011 doit être interprété en ce sens que, tant dans sa version initiale que dans celle issue du règlement no 45/2014, il s’applique lorsque des frais dus au titre de contrats de contre-garantie doivent être payés, premièrement, par une banque de l’Union à une banque libyenne inscrite sur la liste figurant à l’annexe III de ce règlement, deuxièmement, par une banque de l’Union à une banque libyenne qui ne figure pas sur cette liste lorsque la garantie bancaire accordée par la banque libyenne bénéficie à une entité qui figure sur ladite liste, et, troisièmement, par une banque de l’Union à une autre banque de l’Union.

71

En substance, l’article 12 du règlement no 204/2011, tant dans sa version initiale que dans celle résultant du règlement no 45/2014, interdit de faire droit à toute demande qui est liée à tout contrat ou à toute opération affectés par des mesures instituées au titre de ce règlement.

72

Il convient de souligner que le mécanisme d’interdiction prévu audit article 12 repose sur trois éléments.

73

Premièrement, l’exécution d’un contrat ou d’une opération doit avoir été affectée, directement ou indirectement, en tout ou en partie, par les mesures instituées par le règlement no 204/2011. Ainsi, un contrat ou une opération doit avoir fait l’objet de mesures restrictives en vertu de ce règlement pour que l’article 12 de celui-ci puisse être mis en œuvre.

74

Deuxièmement, l’article 12 dudit règlement interdit de faire droit à toute demande liée à un tel contrat ou à une telle opération, par exemple, une demande d’indemnisation, une demande de compensation ou une demande à titre de garantie. Par son caractère général et la nature exemplative de la liste des demandes qu’il mentionne, introduite par l’expression « y compris », cet article 12 englobe tout type de demande liée à un contrat ou à une opération.

75

Troisièmement, les demandes auxquelles il est interdit de faire droit doivent être présentées, selon la version initiale de l’article 12 du règlement no 204/2011, par le gouvernement libyen ou toute personne ou entité agissant par son intermédiaire ou pour son compte, et, selon sa version issue du règlement no 45/2014, par, notamment, toute personne ou entité ou tout autre organisme libyen non énumérés à l’annexe II ou à l’annexe III du règlement no 204/2011.

76

Dans ce contexte, il y a lieu de constater que le paiement de frais dus au titre de contrats de contre-garantie par un premier contre-garant au garant ou par un second contre-garant au premier contre-garant ne saurait, en principe, être exclu du champ d’application de l’article 12 du règlement no 204/2011.

77

En effet, d’une part, l’exécution d’un contrat de contre-garantie peut être affectée par les mesures instituées par ce règlement si le bénéficiaire de cette contre-garantie voit son nom inscrit sur la liste figurant à l’annexe III dudit règlement, comme, en l’occurrence, Sahara Bank pour la période allant du 22 mars au 2 septembre 2011, ou si le bénéficiaire de la garantie, elle-même contre-garantie, voit son nom inscrit sur cette liste, comme, en l’occurrence, le HIB pour la période allant du 11 mars 2011 au 29 janvier 2014.

78

D’autre part, une demande de paiement de frais dus au titre d’un contrat de contre-garantie constitue une demande « à l’occasion de tout contrat » ou une demande « liée à tout contrat », au sens de l’article 12 du règlement no 204/2011, respectivement dans sa version initiale et dans sa version issue du règlement no 45/2014.

79

Pour autant, afin qu’une telle demande soit interdite par l’article 12 du règlement no 204/2011, elle doit nécessairement émaner de l’une des personnes énumérées à cet article.

80

En tant qu’elle porte sur des frais dus au titre d’un contrat par lequel une banque de l’Union contre-garantit une banque libyenne, une demande de paiement entre dans le champ d’application de l’article 12 de ce règlement, dans sa version initiale, à la condition que la banque libyenne puisse être considérée comme étant une entité agissant pour le compte du gouvernement libyen, seule catégorie visée à cet article dont une telle banque peut en l’occurrence faire partie.

81

À cet égard, il appartiendra à la juridiction de renvoi de procéder aux vérifications nécessaires afin de déterminer s’il est possible de considérer Sahara Bank comme agissant pour le compte du gouvernement libyen.

82

S’agissant de l’article 12, paragraphe 1, sous b), du règlement no 204/2011, issu du règlement no 45/2014, il trouverait à s’appliquer dans une situation telle que celle en cause au principal, puisque la banque libyenne contre-garantie par la banque de l’Union est bien une personne, une entité ou tout autre organisme libyen non énumérés à l’annexe II ou à l’annexe III de ce règlement, visés par cette disposition.

83

Néanmoins, il y a lieu de relever qu’il ressort des éléments du dossier soumis à la Cour que les derniers paiements effectués par TG à Sahara Bank, en vertu du contrat de contre-garantie qui liait ces dernières, ont eu lieu le 16 juillet 2013, de sorte que l’appréciation du point de savoir si l’article 12 du règlement no 204/2011 s’applique à ces paiements devra être opérée au regard de la version initiale de cet article.

84

En tant que la demande de paiement porte sur des frais dus au titre d’un contrat par lequel une banque de l’Union contre-garantit une autre banque de l’Union, il ne saurait, en revanche, être considéré que, eu égard au libellé de l’article 12 de ce règlement, dans sa version initiale, cette dernière banque soit regardée comme agissant pour le compte du gouvernement libyen. En effet, elle perçoit ces frais sur le fondement des stipulations d’un contrat dont l’objet est uniquement de contre-garantir une garantie bancaire accordée à une banque libyenne.

85

L’application de l’article 12 dudit règlement, dans sa version issue du règlement no 45/2014, n’est possible que si la banque de l’Union qui demande le paiement de frais dus au titre d’un contrat de contre-garantie à une autre banque de l’Union est une personne visée à l’article 12, paragraphe 1, sous c), du règlement no 204/2011, qui concerne une personne, une entité ou un organisme agissant pour le compte de l’une des personnes, des entités ou de l’un des organismes visés à ce même paragraphe 1, sous a) ou b). Il est donc nécessaire que cette banque de l’Union agisse soit pour le compte d’une personne dont le nom est inscrit sur la liste figurant à l’annexe III de ce règlement, tel le HIB dans l’affaire en cause au principal, soit pour le compte d’une personne, d’une entité ou d’un organisme libyen, soit pour le compte du gouvernement libyen.

86

Or, dans une chaîne contractuelle constituée d’une garantie bancaire et de deux contre-garanties, il ne saurait, en principe, être considéré que, lorsqu’une banque de l’Union perçoit des frais dus au titre d’un contrat de contre-garantie la liant à une autre banque de l’Union, elle agit pour le compte du garant ou du bénéficiaire de la garantie bancaire. En effet, un contrat de contre-garantie, tel que celui en cause au principal, est un contrat conclu entre un donneur d’ordre et un contre-garant, par lequel celui-ci s’engage unilatéralement et irrévocablement à payer une somme déterminée à un bénéficiaire, à première demande de ce dernier, sans que la relation juridique qui sous-tend ce contrat soit examinée. Le paiement des frais dus au titre d’un contrat de contre-garantie par le donneur d’ordre au contre-garant a ainsi pour seul objet de rémunérer ce dernier pour la prestation qu’il a fournie au donneur d’ordre en émettant la contre-garantie. En recevant ce paiement, le contre-garant ne peut donc être considéré comme agissant pour le compte du garant ou du bénéficiaire de la garantie bancaire ainsi contre-garantie.

87

Par conséquent, l’article 12 du règlement no 204/2011 doit être interprété en ce sens que :

dans sa version initiale, il s’applique lorsque des frais dus au titre de contrats de contre-garantie doivent être payés par une banque de l’Union à une banque libyenne inscrite sur la liste figurant à l’annexe III de ce règlement ainsi que par une banque de l’Union à une banque libyenne qui ne figure pas sur cette liste, lorsque la garantie bancaire accordée par la banque libyenne bénéficie à une entité qui figure sur ladite liste, à la condition que la banque libyenne soit considérée comme étant une entité agissant pour le compte du gouvernement libyen, ce qu’il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier ;

dans sa version issue du règlement no 45/2014, il ne s’applique pas lorsque des frais dus au titre de contrats de contre-garantie doivent être payés par une banque de l’Union à une banque libyenne inscrite sur la liste figurant à l’annexe III de ce règlement ainsi que par une banque de l’Union à une banque libyenne qui ne figure pas sur cette liste, lorsque la garantie bancaire accordée par la banque libyenne bénéficie à une entité qui figure sur ladite liste, dès lors que ces frais ont été payés avant l’entrée en vigueur dudit règlement, et

tant dans sa version initiale que dans sa version issue du règlement no 45/2014, il ne s’applique pas lorsque des frais dus au titre de contrats de contre-garantie doivent être payés par une banque de l’Union à une autre banque de l’Union.

Sur l’article 9 du règlement no 204/2011

88

La juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 9 du règlement no 204/2011 doit être interprété en ce sens qu’il peut trouver à s’appliquer aux paiements de frais tels que ceux dus au titre des différents contrats en cause au principal.

89

Selon cet article 9, l’article 5, paragraphe 2, du même règlement ne s’applique pas au versement sur les comptes gelés de paiements dus en vertu de contrats, d’accords ou d’obligations souscrits avant la date à laquelle une personne physique ou morale, une entité ou un organisme visé à cet article 5 a été désigné par le comité des sanctions, le Conseil de sécurité ou le Conseil, à la condition toutefois que ces paiements soient gelés conformément à l’article 5, paragraphe 1, dudit règlement.

90

Ainsi, seuls sont visés par les dispositions de l’article 9 du règlement no 204/2011 les paiements effectués à des personnes dont le nom est inscrit sur la liste figurant à l’annexe II de ce règlement ou sur celle figurant à l’annexe III de celui-ci.

91

En l’occurrence, le bénéficiaire de la garantie bancaire, à savoir le HIB, n’a reçu aucun paiement au titre du contrat de garantie bancaire dont il bénéficie depuis l’inscription de son nom sur la liste figurant à l’annexe III du règlement no 204/2011. En outre, la banque garante, en l’occurrence Sahara Bank, n’a été payée de ses frais de constitution de cette garantie par la banque contre-garante, à savoir TG, qu’au cours de la période où son nom n’était pas inscrit sur la liste figurant à cette annexe.

92

Dans de telles circonstances, l’article 9 de ce règlement ne saurait donc trouver à s’appliquer.

93

Par conséquent, l’article 9 du règlement no 204/2011 doit être interprété en ce sens qu’il ne peut pas trouver à s’appliquer aux paiements de frais tels que ceux dus au titre des différents contrats en cause au principal.

Sur l’article 17, paragraphe 1, du règlement 2016/44

94

La juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 17, paragraphe 1, du règlement 2016/44 doit être interprété en ce sens qu’il s’applique dans une situation telle que celle en cause au principal, dans laquelle le décompte définitif des frais de contre-garantie dus par une banque de l’Union à une autre banque de l’Union intervient après l’entrée en vigueur de ce règlement.

95

Aux termes de son article 26, le règlement 2016/44 est entré en vigueur le jour suivant celui de sa publication au Journal officiel de l’Union européenne, soit le 20 janvier 2016.

96

Il convient de relever que les dispositions de l’article 17, paragraphe 1, de ce règlement correspondent, en substance, à celles de l’article 12, paragraphe 1, du règlement no 204/2011, dans sa version issue du règlement no 45/2014.

97

En l’occurrence, les paiements effectués par TG au profit de Sahara Bank ont tous eu lieu sous l’empire du règlement no 204/2011 et ne peuvent se voir appliquer les dispositions du règlement 2016/44.

98

En revanche, les paiements relatifs aux frais dus au titre du contrat de contre-garantie liant SH et TG relèvent de ce règlement 2016/44, dès lors que le décompte définitif et le paiement subséquent de ces frais n’avaient pas encore eu lieu à la date de l’entrée en vigueur dudit règlement.

99

Par conséquent, l’article 17, paragraphe 1, du règlement 2016/44 doit être interprété en ce sens qu’il s’applique aux frais de contre-garantie dus par une banque de l’Union à une autre banque de l’Union dans une situation telle que celle en cause au principal, dans laquelle le décompte définitif intervient après l’entrée en vigueur de ce règlement.

Sur les dépens

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La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

 

Par ces motifs, la Cour (troisième chambre) dit pour droit :

 

1)

L’article 5, paragraphe 2, du règlement (UE) no 204/2011 du Conseil, du 2 mars 2011, concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Libye, doit être interprété en ce sens :

qu’il s’applique dans une situation telle que celle en cause au principal, dans laquelle des frais dus au titre d’un contrat de contre-garantie doivent être payés par une banque de l’Union européenne à une banque libyenne dont le nom est inscrit sur la liste figurant à l’annexe III de ce règlement, et

qu’il ne s’applique pas, en principe, dans une situation telle que celle en cause au principal, dans laquelle des frais dus au titre d’un contrat de contre-garantie doivent être payés par une banque de l’Union à une banque libyenne dont le nom n’est plus inscrit sur la liste figurant à l’annexe III dudit règlement ou par une banque de l’Union à une autre banque de l’Union, lorsque la garantie bancaire accordée par la banque libyenne bénéficie à une entité qui figure sur cette liste, à moins qu’un tel paiement ne conduise, en raison des liens juridiques ou financiers existant entre la banque bénéficiaire de ce paiement et l’entité figurant sur ladite liste, à une mise à disposition indirecte des frais en question au profit de cette entité.

 

2)

L’article 12 du règlement no 204/2011 doit être interprété en ce sens que :

dans sa version initiale, il s’applique lorsque des frais dus au titre de contrats de contre-garantie doivent être payés par une banque de l’Union européenne à une banque libyenne inscrite sur la liste figurant à l’annexe III de ce règlement ainsi que par une banque de l’Union à une banque libyenne qui ne figure pas sur cette liste, lorsque la garantie bancaire accordée par la banque libyenne bénéficie à une entité qui figure sur ladite liste, à la condition que la banque libyenne soit considérée comme étant une entité agissant pour le compte du gouvernement libyen, ce qu’il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier ;

dans sa version issue du règlement (UE) no 45/2014 du Conseil, du 20 janvier 2014, il ne s’applique pas lorsque des frais dus au titre de contrats de contre-garantie doivent être payés par une banque de l’Union à une banque libyenne inscrite sur la liste figurant à l’annexe III de ce règlement ainsi que par une banque de l’Union à une banque libyenne qui ne figure pas sur cette liste, lorsque la garantie bancaire accordée par la banque libyenne bénéficie à une entité qui figure sur ladite liste, dès lors que ces frais ont été payés avant l’entrée en vigueur dudit règlement, et

tant dans sa version initiale que dans sa version issue du règlement no 45/2014, il ne s’applique pas lorsque des frais dus au titre de contrats de contre-garantie doivent être payés par une banque de l’Union à une autre banque de l’Union.

 

3)

L’article 9 du règlement no 204/2011 doit être interprété en ce sens qu’il ne peut pas trouver à s’appliquer aux paiements de frais tels que ceux dus au titre des différents contrats en cause au principal.

 

4)

L’article 17, paragraphe 1, du règlement (UE) 2016/44 du Conseil, du 18 janvier 2016, concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Libye et abrogeant le règlement (UE) no 204/2011, doit être interprété en ce sens qu’il s’applique aux frais de contre-garantie dus par une banque de l’Union européenne à une autre banque de l’Union dans une situation telle que celle en cause au principal, dans laquelle le décompte définitif intervient après l’entrée en vigueur de ce règlement.

 

Signatures


( *1 ) Langue de procédure : le hongrois.