ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

20 juillet 2017 (*)

« FEAGA et Feader – Dépenses exclues du financement – Dépenses effectuées par la Belgique – Restitutions à l’exportation – Absence de récupération résultant de négligences imputables à un organisme d’un État membre – Non-épuisement de toutes les voies de recours possibles – Proportionnalité »

Dans l’affaire T‑287/16,

Royaume de Belgique, représenté initialement par M. J.-C. Halleux et Mme M. Jacobs, puis par Mmes Jacobs, L. Van den Broeck et J. Van Holm, en qualité d’agents, assistés de Mes É. Grégoire et J. Mariani, avocats,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par MM. A. Bouquet et P. Ondrůšek, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande fondée sur l’article 263 TFUE et tendant à l’annulation de la décision d’exécution (UE) 2016/417 de la Commission, du 17 mars 2016, écartant du financement de l’Union européenne certaines dépenses effectuées par les États membres au titre du Fonds européen agricole de garantie (FEAGA) et du Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader) (JO 2016, L 75, p. 16), en tant qu’elle écarte dudit financement à l’égard du Royaume de Belgique la somme de 9 601 619,00 euros,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre),

composé de MM. M. Prek, président, F. Schalin et Mme M. J. Costeira (rapporteur), juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

 Sur les restitutions pour l’exportation en Ouzbékistan et les exportations frauduleuses (1992-1993)

1        En 1992, la société Générale Sucrière, aux droits de laquelle a succédé la société Saint-Louis Sucre, a vendu un total de 24 000 tonnes de sucre aux sociétés Metelmann et Sucre Export. Selon les contrats de vente, ce sucre était destiné à l’exportation hors de l’Union européenne.

2        Les sociétés Metelmann et Sucre Export ont, par l’intervention de deux intermédiaires, revendu 6 000 tonnes dudit sucre aux sociétés Proud Trading et Shawline Offshore. Les contrats de vente prévoyaient également que le sucre était destiné à un pays tiers, hors de l’Union, et devait quitter le territoire de l’Union sans retard après son chargement.

3        La société Saint-Louis Sucre a chargé les sociétés Belgian Bunkering and Stevedoring et Manufert, devenue la société Manuport Services, des opérations de réception et de chargement à bord des navires du sucre ainsi que des opérations documentaires annexes.

4        Le chargement des navires, à partir du port d’Anvers (Belgique) et à destination de l’Ouzbékistan, a eu lieu entre le 20 janvier et le 29 mars 1993.

5        La société Manuport Services a procédé, pour le compte de la société Saint-Louis Sucre, aux opérations documentaires et a transmis les déclarations d’exportation à l’organisme payeur compétent, à savoir le Bureau d’intervention et de restitution belge (BIRB), alors dénommé l’Office central des contingents et licences (Belgique). Sur la base de ces déclarations, la société Saint-Louis Sucre a obtenu du BIRB le versement d’avances, à valoir sur les restitutions à l’exportation auxquelles elle aurait droit. Ces avances ont été acquises à la société Saint-Louis Sucre, au titre des restitutions à l’exportation, lorsque la preuve a été apportée que le sucre avait effectivement quitté le territoire douanier de l’Union.

6        Par la suite, il a été découvert que, en réalité, les 6 000 tonnes de sucre revendues par les sociétés Metelmann et Sucre Export aux sociétés Proud Trading et Shawline Offshore avaient, après avoir quitté la Belgique via le port d’Anvers, été détournées de leur destination initiale et réimportées frauduleusement sur le territoire de l’Union, en Espagne via le port de Guernica, sur la base d’un document falsifié. La société Saint-Louis Sucre a spontanément informé le BIRB de la découverte de ces réimportations frauduleuses.

 Sur la procédure pénale (1994-2004)

7        Les exportations frauduleuses ont fait l’objet d’une procédure pénale. Des poursuites pénales ont ainsi été engagées à l’encontre des deux individus qui avaient agi en tant qu’intermédiaires entre, d’une part, les sociétés Metelmann et Sucre Export et, d’autre part, les sociétés Shawline Offshore et Proud Trading. Par un arrêt du hof van beroep te Antwerpen (cour d’appel d’Anvers, Belgique) du 22 octobre 2003, confirmant un jugement du rechtbank van eerste aanleg te Antwerpen (tribunal de première instance d’Anvers, Belgique) du 21 juin 2001, ces deux individus ont été condamnés pénalement pour faux en écritures, usage de faux et escroquerie.

8        Dans le cadre de cette procédure pénale, le BIRB ainsi que les sociétés Saint-Louis Sucre, Metelmann, Sucre Export et Manuport Services se sont constitués parties civiles contre lesdits individus et ont obtenu leur condamnation de principe à des dommages et intérêts évalués, à titre provisionnel, à 1 cent pour avoir commis une fraude au préjudice de ces parties.

9        Cette condamnation pénale et civile est devenue définitive par arrêt de la Cour de cassation (Belgique) du 22 juin 2004 rejetant les pourvois formés par ces deux individus [Cour de cassation - arrêt N-20040622-19 (P.03.1620.N) du 22 juin 2004].

 Sur la procédure civile de récupération (1994-1997 et 1997-2012)

10      Le 16 mars 1994, ayant eu connaissance des exportations frauduleuses, le BIRB a réclamé à la société Saint-Louis Sucre le remboursement d’une somme d’un montant de 167 020 445 francs belges (BEF), correspondant à 4 140 328,68 euros, après avoir établi un décompte rectificatif des restitutions, au motif que les lots de sucre déclarés à l’exportation à Anvers par cette société et dont la preuve de sortie du territoire douanier de l’Union avait été apportée par les documents de contrôle (formulaires T5) avaient été réintroduits dans l’Union sous le couvert de documents (formulaires T2L) falsifiés.

11      La société Saint-Louis Sucre a marqué son désaccord sur la demande en restitution du BIRB, estimant qu’elle n’était pas responsable des exportations frauduleuses.

12      Par lettres des 19 novembre 1996 et 13 février 1997, le BIRB a maintenu sa réclamation, considérant que le sucre en cause n’avait jamais été exporté.

13      Le BIRB ayant réitéré sa demande de paiement de la somme au principal, assortie des intérêts échus depuis le 16 avril 1994, la société Saint-Louis Sucre s’est résolue, le 16 mai 1997, à lui payer, sous toutes réserves et sans reconnaissance préjudiciable, la somme de 5 133 087,54 euros, ce qui lui a permis d’arrêter le cours des intérêts. Ce montant correspond à la somme réclamée par le BIRB et aux intérêts échus pour la période du 16 avril 1994 au 16 mai 1997.

14      À la suite de la réception de ce paiement, le Royaume de Belgique a versé au FEAGA (Fonds européen agricole de garantie) une somme de 4 106 470,28 euros, correspondant à 80 % de la somme payée par la société Saint-Louis Sucre. Il a conservé les 20 % restants, à savoir la somme de 1 026 617,52 euros, conformément au règlement (CEE) n° 595/91 du Conseil, du 4 mars 1991, concernant les irrégularités et la récupération des sommes indûment versées dans le cadre du financement de la politique agricole commune ainsi que l’organisation d’un système d’information dans ce domaine, et abrogeant le règlement (CEE) n° 283/72 (JO 1991, L 67, p. 11).

15      Le 18 juin 1997, la société Saint-Louis Sucre a engagé une procédure civile devant le tribunal de première instance de Bruxelles (Belgique) afin de récupérer auprès du BIRB cette somme de 5 133 087,54 euros, augmentée des intérêts moratoires, des intérêts judiciaires et des dépens.

16      Par un jugement du 20 mars 2008, c’est-à-dire après avoir attendu l’issue de la procédure pénale, le tribunal de première instance de Bruxelles a fait droit au recours de la société Saint-Louis Sucre et a condamné le BIRB à rembourser la somme de 5 133 087,54 euros, augmentée des intérêts moratoires, des intérêts judiciaires et des dépens (Tribunal de première instance de Bruxelles – jugement n° 67/04/08 1997/10941/A du 20 mars 2008).

17      Le BIRB a interjeté appel contre ce jugement devant la cour d’appel de Bruxelles (Belgique), en lui demandant de réformer celui-ci et de ne pas faire droit à la demande originaire de la société Saint-Louis Sucre. À titre subsidiaire, le BIRB a demandé à cette juridiction de poser trois questions préjudicielles à la Cour sur l’interprétation du règlement (CEE) n° 3665/87 de la Commission, du 27 novembre 1987, portant modalités communes d’application du régime des restitutions à l’exportation pour les produits agricoles (JO 1987, L 351, p. 1).

18      Par l’arrêt du 3 mai 2012, signifié le 29 juin 2012, la cour d’appel de Bruxelles a confirmé le jugement du tribunal de première instance de Bruxelles du 20 mars 2008. En conséquence, elle a condamné le BIRB à payer à la société Saint-Louis Sucre la somme de 10 114 003,39 euros au principal, correspondant à la somme de 5 133 087,54 euros assortie des intérêts à compter du 1er juin 1997, augmentée des intérêts moratoires échus depuis le 7 mars 2011, des intérêts judiciaires et des dépens. Par ailleurs, cette juridiction a jugé, après analyse de la réglementation de l’Union et de la jurisprudence qui y est relative, qu’il n’y avait pas lieu de poser de question préjudicielle à la Cour (Cour d’appel de Bruxelles 2008 AR 1774 du 29 juin 2012).

19      À la suite de l’arrêt du 3 mai 2012, le BIRB a sollicité l’avis d’un avocat à la Cour de cassation, comme l’exige la procédure belge, en vue d’introduire un pourvoi devant la Cour de cassation.

20      Le 25 septembre 2012, l’avocat à la Cour de cassation consulté par le BIRB sur les perspectives d’un pourvoi en cassation a rendu son avis. Sur la base d’un examen approfondi du dossier, en ce compris une analyse de la jurisprudence de l’Union, cet avocat a conclu, dans cet avis, à « l’impossibilité de critiquer avec des chances appréciables de succès devant la Cour de cassation l’arrêt [de la cour d’appel de Bruxelles du 3 mai 2012] examiné en tant qu’il condamne le BIRB au paiement de la somme de 10 114 003,39 euros ». À la suite dudit avis négatif, le BIRB a décidé de ne pas passer outre et s’est abstenu d’introduire un pourvoi en cassation. Le BIRB a payé à la société Saint-Louis Sucre la somme à laquelle il avait été condamné, à savoir la somme totale de 10 659 055,85 euros.

 Sur la mise à la charge du FEAGA de la somme de 9 601 619,85 euros (2012 à 2016)

21      Le 4 juillet 2012, le BIRB a annoncé à la Commission européenne que, à la suite de l’arrêt du 3 mai 2012 de la cour d’appel de Bruxelles, le montant auquel il avait été condamné, lequel était immédiatement exécutable même en cas de pourvoi en cassation, serait porté à la charge du FEAGA.

22      Par lettre du 13 novembre 2012, le BIRB a informé la Commission que, en vertu de l’article 32, paragraphe 5, quatrième alinéa, du règlement (CE) n° 1290/2005 du Conseil, du 21 juin 2005, relatif au financement de la politique agricole commune (JO 2005, L 209, p. 1), il mettait à la charge du FEAGA la somme qu’il avait dû payer à la société Saint-Louis Sucre, à savoir 10 659 055,85 euros, correspondant à la somme de 10 114 003,39 euros au principal, majorée des intérêts depuis le 7 mars 2011, de laquelle étaient déduites, d’une part, la somme de 1 026 617,52 euros, représentant les 20 % conservés en 1997 par le Royaume de Belgique sur le montant de 5 133 087,54 euros et, d’autre part, la somme relative aux frais de justice s’élevant à 30 818,48 euros. En conséquence, la dépense de 9 601 619,85 euros a été portée à la charge du FEAGA comme recette affectée négative lors de l’apurement comptable de 2012.

23      Dans la déclaration annuelle pour l’année 2012, le BIRB a ainsi inclus une correction positive d’un montant de 9 601 619,85 euros.

24      Par décision d’exécution C(2016) 1543 final de la Commission, du 17 mars 2016, relative à l’apurement des comptes de certains organismes payeurs en Belgique et en Allemagne en ce qui concerne les dépenses financées par le FEAGA pour l’exercice financier 2012, ce montant ajusté a, après les vérifications comptables, été pris en compte par l’Union au titre de l’exercice financier 2012. Par ce biais, ledit montant a donc été payé au Royaume de Belgique.

 Sur la procédure administrative de correction financière (2013 à 2016)

25      À la suite de la mise à la charge du FEAGA de la somme de 9 601 619,85 euros, la Commission a entamé, par la lettre du 27 mars 2013, la procédure d’apurement de conformité portant la référence CEB/2013/003BE. La Commission a contesté la demande de prise en charge par le FEAGA sur deux points, à savoir, premièrement, la décision de ne pas utiliser toutes les voies de recours possibles, en l’occurrence l’introduction d’un pourvoi en cassation pour récupérer la somme en cause auprès de la société Saint-Louis Sucre et, deuxièmement, la mise à la charge des intérêts après l’année 1997.

26      Par lettre du 23 mai 2013, le BIRB a contesté ces deux points, en se fondant sur l’article 32, paragraphe 5, quatrième alinéa, du règlement n° 1290/2005. Dans cette lettre de réponse, le BIRB a soutenu que, même si l’article 267 TFUE imposait à la Cour de cassation un renvoi à titre préjudiciel en interprétation, tout pourvoi en cassation n’aurait pas entraîné automatiquement un tel renvoi devant la Cour, puisque la jurisprudence de cette dernière admet l’absence de renvoi, notamment dans le cadre de la théorie dite « de l’acte clair ». Le BIRB a, par ailleurs, cité l’avis négatif de l’avocat à la Cour de cassation et expliqué le rôle spécial dévolu aux avocats à la Cour de cassation. Le BIRB en a conclu qu’il n’y avait pas eu de choix quant à l’opportunité de ne pas former le pourvoi en cassation, mais bien une impossibilité.

27      Dans la lettre du 6 août 2014, la Commission a maintenu sa position. Néanmoins, afin de tenter de parvenir à un accord sur les mesures à prendre, le BIRB a été invité à une réunion bilatérale, en vertu de l’article 11, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 885/2006 de la Commission, du 21 juin 2006, portant modalités d’application du règlement n° 1290/2005 du Conseil en ce qui concerne l’agrément des organismes payeurs et autres entités ainsi que l’apurement des comptes du FEAGA et du Feader (JO 2006, L 171, p. 90).

28      Cette réunion bilatérale s’est tenue le 13 octobre 2014. À la suite de cette réunion, le Royaume de Belgique a fourni, par lettre du 17 octobre 2014, figurant à l’annexe A.7 de la requête, un complément d’information confirmant que, en ce qui concerne les lots de sucre en cause, il n’y avait pas eu de preuves d’arrivée à destination fournies, puisque ces lots déclarés à l’exportation à Anvers par la société Saint-Louis Sucre, et dont la preuve de sortie du territoire douanier de l’Union avait été apportée par les documents de contrôle (formulaires T5), avaient été réintroduits dans l’Union, en Espagne, sous le couvert de documents (formulaires T2L) falsifiés. En outre, cette lettre comportait en annexe une lettre du 20 janvier 1994, dans laquelle les autorités belges avaient admis le caractère indu des restitutions.

29      Par lettre du 1er décembre 2014, la Commission a, en vertu de l’article 11, paragraphe 1, du règlement n° 885/2006, adressé le procès-verbal de ladite réunion bilatérale et invité le Royaume de Belgique, d’une part, à envoyer un récapitulatif chronologique accompagné d’un examen des éventuelles similitudes avec l’enquête portant la référence CEB/2014/003/BE et impliquant la société SGS et, d’autre part, à examiner en détail le rôle des tiers responsables, à savoir les sociétés intermédiaires Sucre Export, Manuport Services et Metelmann ainsi que la société SGS, et à expliquer les raisons pour lesquelles le BIRB n’avait pas envisagé de recouvrer les fonds auprès de ces intermédiaires plutôt qu’auprès des bénéficiaires.

30      Par lettre du 21 janvier 2015, le Royaume de Belgique a adressé les éléments de réponse demandés dans la lettre du 1er décembre 2014. Il a retracé l’historique de l’affaire en insistant sur le fait que les sociétés Saint-Louis Sucre, Sucre Export, Manuport Services et Metelmann étaient toutes des victimes de la fraude commise par les deux individus condamnés, et non des co-auteurs ou des complices. Il a, en outre, estimé que l’absence de responsabilité civile de la société Saint-Louis Sucre couvrait également l’absence de responsabilité civile des autres sociétés qui étaient intervenues. S’agissant de la comparaison avec le cas faisant l’objet de l’enquête portant la référence CEB/2014/003/BE, il a expliqué que les irrégularités de la société SGS étaient incontestables.

31      Dans la communication du 12 juin 2015, au titre des articles 10 et 11 du règlement n° 885/2006, la Commission a maintenu la position selon laquelle le Royaume de Belgique ne s’était pas conformé aux exigences du droit de l’Union pour l’exercice 2012, au motif que les autorités belges n’avaient pas épuisé toutes les voies de recours possibles afin de récupérer le montant en cause, ce qui aurait pu permettre l’examen par la Cour de la question préjudicielle concernant la société Saint-Louis Sucre et que, partant, le BIRB n’avait pas le droit de récupérer auprès du FEAGA ces paiements effectués au titre des restitutions à l’exportation, conformément à l’article 32, paragraphe 8, sous a), du règlement n° 1290/2005. En conséquence, ladite communication indiquait qu’il serait proposé d’exclure du financement de l’Union la somme de 9 601 619 euros.

32      Sur la base d’un rapport sommaire du 22 février 2016, la Commission a adopté, le 17 mars 2016, la décision d’exécution (UE) 2016/417 écartant du financement de l’Union européenne certaines dépenses effectuées par les États membres au titre du FEAGA et du Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader) (JO 2016, L 75, p. 16), laquelle écarte du financement de l’Union, à l’égard du Royaume de Belgique, la somme de 9 601 619 euros (ci-après la « décision attaquée »). Cette décision a été notifiée au Royaume de Belgique le 18 mars 2016.

 Procédure et conclusions des parties

33      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 30 mai 2016, le Royaume de Belgique a introduit le présent recours.

34      Le mémoire en défense de la Commission a été déposé au greffe du Tribunal le 8 septembre 2016.

35      La réplique a été déposée au greffe du Tribunal le 25 octobre 2016.

36      La duplique a été déposée au greffe du Tribunal le 30 novembre 2016.

37      Le Tribunal (deuxième chambre) a décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure.

38      Le Royaume de Belgique conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        à titre principal, annuler la décision attaquée ;

–        à titre subsidiaire, annuler partiellement la décision attaquée en ce qu’elle inclut la somme de 4 106 470,02 euros dont a déjà bénéficié le FEAGA préalablement ;

–        condamner la Commission aux dépens.

39      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner le Royaume de Belgique aux dépens.

 En droit

40      À l’appui de son recours, le Royaume de Belgique invoque deux moyens. Le premier moyen est tiré de la violation de l’article 31, paragraphe 1, et de l’article 32, paragraphe 8, du règlement n° 1290/2005, au motif que la Commission n’a pas démontré que la dépense effectuée par le BIRB n’était pas conforme au droit de l’Union et que l’absence de récupération ou l’irrégularité avait pour origine une irrégularité ou une négligence imputable au BIRB. Le second moyen, soulevé à titre subsidiaire, est tiré de la violation de l’article 31, paragraphe 2, du règlement n° 1290/2005 et du principe de proportionnalité, au motif que le montant écarté ne correspond pas à l’importance de la non-conformité constatée et qu’il n’a pas été tenu compte du préjudice financier causé à l’Union.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 31, paragraphe 1, et de l’article 32, paragraphe 8, du règlement n° 1290/2005

41      Par son premier moyen, le Royaume de Belgique reproche à la Commission d’avoir violé l’article 31, paragraphe 1, et l’article 32, paragraphe 8, du règlement n° 1290/2005, au motif que celle-ci n’a pas démontré que la dépense effectuée par le BIRB n’était pas conforme au droit de l’Union et que l’absence de récupération ou l’irrégularité avait pour origine une irrégularité ou une négligence imputable à cet organisme. Il soutient, en substance, que le BIRB n’a pas commis d’irrégularités ou de négligences dans le cadre de la procédure de recouvrement des aides indûment payées à la société Saint-Louis Sucre, au sens de l’article 32, paragraphe 8, du règlement n° 1290/2005.

42      À cet égard, le Royaume de Belgique fait valoir que le BIRB s’est non seulement constitué partie civile dans le cadre d’une procédure pénale, mais qu’il a également réclamé et obtenu, dès 1994, le paiement des restitutions à l’exportation indûment versées. Ce serait au terme de la procédure civile se concluant par l’arrêt du 3 mai 2012 de la cour d’appel de Bruxelles que le BIRB se serait heurté à un avis négatif d’un avocat à la Cour de cassation concernant les chances de succès d’un pourvoi en cassation. Dès lors, le Royaume de Belgique considère qu’il ne peut être reproché au BIRB de ne pas avoir fait toute diligence afin d’obtenir la récupération desdites restitutions.

43      Le Royaume de Belgique souligne également qu’il n’y avait aucune possibilité de se pourvoir en cassation. Il précise que, en vue d’introduire un recours devant la Cour de cassation, le BIRB avait sollicité l’avis d’un avocat portant le titre légal d’avocat à la Cour de cassation, conformément aux règles de la procédure judiciaire belge. Ces règles exigeraient que seuls les avocats possédant un tel titre aient le pouvoir d’introduire des pourvois en matière civile devant cette juridiction. Ces avocats, en nombre limité et revêtant la qualité d’officier ministériel tout en étant des avocats à part entière, assureraient un filtrage des causes déférées à ladite juridiction, en écartant celles qui ne se prêtent pas au contrôle de légalité ou qui ne peuvent pas donner lieu à cassation, de sorte à prévenir son engorgement. Le rôle desdits avocats serait dès lors important, ceux-ci devant déconseiller l’introduction d’un pourvoi lorsqu’ils estiment que celui-ci ne présente pas de chance d’aboutir.

44      Le Royaume de Belgique indique que, en pratique, l’avocat à la Cour de cassation examine le dossier de son client de manière approfondie, afin de déterminer si la décision concernée rendue en dernier ressort est susceptible de critiques au regard des moyens, énumérés limitativement par la loi, pouvant être invoqués devant la Cour de cassation, notamment celui pris d’une contravention à la loi. Après cet examen, trois hypothèses se présenteraient : premièrement, l’avis de cet avocat serait positif, auquel cas il rédigerait un projet de pourvoi ; deuxièmement, l’avis serait négatif et il déconseillerait à son client de former un pourvoi ; troisièmement, ledit avocat aurait un doute quant aux chances de succès, auquel cas il laisserait le choix à son mandant de tenter sa chance ou d’arrêter la procédure. Le Royaume de Belgique précise que, en cas d’avis négatif, si le client souhaite passer outre cet avis, il peut rédiger lui-même la requête en pourvoi et demander à l’avocat de la signer. Il ajoute, toutefois, que cette pratique est marginale, puisque l’avocat à la Cour de cassation ainsi mandaté doit signer une requête en y apposant la mention « sur réquisition et sur projet », ce qui signalerait à ladite juridiction qu’il a été forcé de signer la requête dont il ne soutient pas le contenu.

45      Le Royaume de Belgique rappelle que, en l’espèce, l’avocat à la Cour de cassation sollicité par le BIRB a rendu un avis négatif quant aux chances de succès d’un pourvoi devant la Cour de cassation, au terme d’un examen approfondi du dossier, en ayant à sa disposition l’intégralité des actes de procédure et des pièces. Selon le Royaume de Belgique, l’avis serait négatif à plus d’un titre. Il argue que cet avocat a procédé à une analyse détaillée du raisonnement suivi par l’arrêt du 3 mai 2012 de la cour d’appel de Bruxelles et a conclu son avis en déclarant que cette juridiction avait « indiqué de manière détaillée les raisons pour lesquelles elle [considérait] être tenue par l’interprétation, donnée par la Cour [dans l’]arrêt [du 11 janvier 2007, Vonk Dairy Products (C‑279/05, EU:C:2007:18)], des articles 4 et 5 du règlement n° 3665/87, rejetant de la sorte les [conclusions] contraires exposées [par le BIRB] ».

46      Enfin, le Royaume de Belgique allègue que, en application des principes énoncés dans l’arrêt du 6 octobre 1982, Cilfit e.a. (283/81, EU:C:1982:335), tout pourvoi introduit devant la Cour de cassation n’aurait pas entraîné de façon automatique un renvoi préjudiciel devant la Cour.

47      La Commission conteste ces arguments et conclut au rejet du moyen.

48      Il convient, à titre préliminaire, de rappeler que, s’agissant des obligations incombant aux États membres dans le cadre de l’organisation commune des marchés agricoles, il ressort de l’article 3 du règlement n° 1290/2005, devenu, en substance, l’article 4 du règlement (UE) n° 1306/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 17 décembre 2013, relatif au financement, à la gestion et au suivi de la politique agricole commune et abrogeant les règlements (CEE) n° 352/78, (CE) n° 165/94, (CE) n° 2799/98, (CE) n° 814/2000, (CE) n° 1200/2005 et (CE) n° 485/2008 du Conseil (JO 2013, L 347, p. 549 ; rectifié par JO 2016, L 130, p. 13), que ne peuvent être prises en charge par le FEAGA que les opérations effectuées en conformité avec les règles de l’Union. Il résulte de l’article 9, paragraphe 1, du règlement n° 1290/2005, devenu, en substance, l’article 58, paragraphe 1, du règlement n° 1306/2013, que ces États prennent toutes les dispositions législatives, réglementaires et administratives nationales ainsi que toute autre mesure nécessaire pour s’assurer de la réalité et de la régularité des opérations financées par le FEAGA, pour prévenir et poursuivre les irrégularités et pour récupérer les sommes perdues à la suite d’irrégularités ou de négligences (voir, en ce sens, arrêt du 10 octobre 2012, Grèce/Commission, T‑158/09, non publié, EU:T:2012:530, points 64 et 65 et jurisprudence citée).

49      Or, si les autorités nationales restent libres de choisir les mesures et les voies de recours qu’elles jugent appropriées pour la protection des intérêts financiers de l’Union et, notamment, pour le recouvrement des créances de l’Union, cette liberté ne saurait aucunement affecter la rapidité, la bonne organisation et le caractère complet des contrôles et des enquêtes requis à ces fins. En outre, s’il appartient à la Commission de justifier une décision constatant l’absence ou les défaillances des contrôles mis en œuvre par l’État membre concerné, lorsqu’elle refuse de mettre à la charge du FEAGA certaines dépenses au motif qu’elles ont été provoquées par des infractions à la réglementation de l’Union imputables à un État membre, il appartient à ce dernier de démontrer que les conditions sont réunies pour obtenir le financement refusé par la Commission. Ces principes sont également applicables lorsque la Commission considère que l’État membre ne s’est pas acquitté de l’obligation de vérifier correctement les différentes opérations ou de procéder avec diligence à la récupération des aides indûment perçues par les bénéficiaires (voir, en ce sens, arrêt du 10 octobre 2012, Grèce/Commission, T‑158/09, non publié, EU:T:2012:530, points 66 et 67 et jurisprudence citée).

50      À cet égard, il convient de rappeler que, en vertu de l’article 31, paragraphe 1, du règlement n° 1290/2005, devenu, en substance, l’article 52, paragraphe 1, du règlement n° 1306/2013, la Commission décide d’écarter du financement de l’Union les montants mis à la charge du budget de l’Union lorsqu’elle constate que les restitutions fixées pour l’exportation des produits agricoles vers les pays tiers n’ont pas été effectuées conformément aux règles de l’Union. En particulier, il ressort de l’article 32, paragraphe 8, sous a), du règlement n° 1290/2005, devenu, en substance, l’article 54, paragraphe 5, sous c), du règlement n° 1306/2013, que la Commission peut adopter une telle décision lorsqu’elle constate que les irrégularités ou l’absence de récupération résultent d’irrégularités ou de négligences imputables à l’administration ou à un service ou organisme d’un État membre.

51      C’est à la lumière des considérations qui précèdent qu’il convient d’examiner les arguments du Royaume de Belgique.

52      En l’occurrence, il importe d’emblée de relever qu’il est constant et reconnu par les parties que les restitutions à l’exportation en cause sont indues, même si le Royaume de Belgique mentionne, au stade tardif de la réplique, que la question du caractère indu des restitutions est contestée par la société Saint-Louis Sucre. En conséquence, en vertu de l’article 9, paragraphe 1, sous a), iii), du règlement n° 1290/2005, devenu, en substance, l’article 58, paragraphe 1, sous e), du règlement n° 1306/2013, il incombait au Royaume de Belgique de procéder à la récupération de ces restitutions à l’exportation indues, ce qui explique la procédure de recouvrement entamée dès 1994 par le BIRB et même le souhait de celui-ci de former un pourvoi devant la Cour de cassation contre l’arrêt défavorable du 3 mai 2012 de la cour d’appel de Bruxelles, lequel s’est heurté à l’avis négatif de l’avocat à la Cour de cassation qui l’a dissuadé de poursuivre cette procédure devant cette dernière juridiction, de sorte que ladite récupération n’a pu finalement être effectuée.

53      Considérant que cette absence de récupération résultait d’irrégularités ou de négligences imputables au BIRB, au sens de l’article 32, paragraphe 8, sous a), du règlement n° 1290/2005, devenu, en substance, l’article 54, paragraphe 5, sous c), du règlement n° 1306/2013, la Commission a adopté la décision attaquée qui écarte du financement de l’Union la dépense en cause.

54      Le Royaume de Belgique conteste, en substance, que des irrégularités ou des négligences puissent être imputées au BIRB pour ne pas avoir épuisé toutes les voies de recours possibles dans le cadre de la procédure de recouvrement. Il soutient qu’il n’y avait aucune possibilité de former un pourvoi devant la Cour de cassation à la suite de l’avis négatif de l’avocat à la Cour de cassation mandaté, de sorte qu’il ne saurait être reproché au BIRB de ne pas avoir déployé toute la diligence requise à cet égard.

55      Il appartient dès lors au Tribunal de contrôler la légalité de la décision attaquée et, en particulier, d’apprécier si la Commission a commis une erreur de droit en considérant que l’absence de récupération des restitutions à l’exportation résultait d’irrégularités ou de négligences imputables au BIRB, au sens de l’article 32, paragraphe 8, sous a), du règlement n° 1290/2005, devenu, en substance, l’article 54, paragraphe 5, sous c), du règlement n° 1306/2013. Pour cela, il y a lieu de déterminer si, eu égard à la situation de l’espèce, le fait de ne pas avoir formé un pourvoi devant la Cour de cassation constitue une irrégularité ou une négligence imputables au BIRB, au sens de ladite disposition. Il convient ainsi d’apprécier si les autorités belges ont adéquatement réagi à la situation provoquée par l’avis négatif de l’avocat à la Cour de cassation, lequel semble les avoir dissuadées d’introduire un tel recours.

56      À cet égard, il ressort clairement des explications fournies par le Royaume de Belgique et, en particulier, de l’exposé de l’avocat à la Cour de cassation du 28 juillet 2015, figurant à l’annexe A.11 de la requête, que, même si cela est exceptionnel, il est néanmoins possible de former un pourvoi devant la Cour de cassation à la suite d’un avis négatif émis par un avocat portant le titre légal d’avocat à la Cour de cassation. En effet, la décision d’introduire un tel recours reviendrait en définitive au mandant, lequel pourrait ainsi passer outre un tel avis, rédiger lui-même la requête en pourvoi et demander à cet avocat de la signer. Il s’ensuit que les autorités belges n’étaient pas dans l’impossibilité de se pourvoir en cassation, celles-ci ayant le choix de poursuivre la procédure de recouvrement et d’épuiser ainsi toutes les voies de recours prévues dans leur législation interne en vue de la récupération.

57      Il convient donc de constater que, en s’abstenant de se pourvoir en cassation contre l’arrêt du 3 mai 2012 de la cour d’appel de Bruxelles qui a refusé de poser les questions préjudicielles sur l’interprétation du règlement n° 3665/87 qu’avait sollicitées le BIRB, alors même qu’il en avait la possibilité, le Royaume de Belgique a rendu absolument impossible que ces questions soient posées à la Cour par la Cour de cassation, qui est, en principe, tenue de la saisir, conformément à l’article 267 TFUE. En effet, seule l’introduction d’un recours devant la Cour de cassation aurait pu permettre à la Cour d’examiner les questions concernant le paiement des restitutions à l’exportation par la voie du renvoi préjudiciel et aurait ainsi pu aboutir à la récupération de la dépense en cause.

58      Le Royaume de Belgique soutient, à cet égard, que tout pourvoi introduit devant la Cour de cassation n’aurait pas entraîné de façon automatique un renvoi préjudiciel devant la Cour, en application des principes énoncés dans l’arrêt du 6 octobre 1982, Cilfit e.a. (283/81, EU:C:1982:335).

59      Même si cette affirmation n’est pas inexacte, il n’en demeure pas moins, ainsi qu’il ressort de l’arrêt du 6 octobre 1982, Cilfit e.a. (283/81, EU:C:1982:335), que seule la Cour de cassation, en sa qualité de juridiction nationale dont les décisions ne sont pas susceptibles d’un recours juridictionnel de droit interne, était habilitée, en l’espèce, à constater l’existence d’une des éventualités visées dans ledit arrêt pour ne pas devoir déférer à son obligation de saisine, conformément à l’article 267 TFUE. Or, en s’abstenant de former un recours en cassation, le BIRB a nécessairement privé la Cour de cassation de la possibilité d’opérer un tel constat.

60      En tout état de cause, le Royaume de Belgique ne pourrait pas se prévaloir du rôle de « filtre » des avocats à la Cour de cassation pour faire échec aux règles de droit de l’Union, notamment au devoir des juridictions suprêmes de poser des questions préjudicielles, conformément aux principes énoncés dans l’arrêt du 6 octobre 1982, Cilfit e.a. (283/81, EU:C:1982:335). En effet, si une telle possibilité était admise, cela reviendrait à déléguer à ces avocats l’examen des éventuelles questions de droit de l’Union et, en particulier, le contrôle de l’accès à la procédure préjudicielle de l’article 267 TFUE. Or, le droit de l’Union n’a pas attribué auxdits avocats la compétence de « filtrer » les questions préjudicielles et, en aucun cas, ceux-ci ne pourraient être considérés comme étant eux-mêmes des juridictions au sens dudit article.

61      Il ressort de la jurisprudence que les États membres doivent assurer un contrôle efficace et diligent du respect des conditions d’octroi des aides et procéder avec diligence à la récupération des aides indûment perçues par les bénéficiaires. Le cadre réglementaire applicable ne se satisfait pas de n’importe quelle tentative de vérification ou de recouvrement des sommes indûment versées à n’importe quel moment, mais requiert une tentative pleine et prompte avec le recours, en temps utile, à tous les moyens de vérification et de recouvrement à la disposition de l’État membre, dont les services sont tenus d’agir avec la diligence nécessaire afin d’atteindre le but recherché, qui n’est autre que la protection des intérêts financiers de l’Union par le recouvrement des sommes indûment versées aux opérateurs économiques. Les éventuelles démarches tardives, partielles, nulles ou inefficaces ne suffisent pas à exonérer l’État membre de sa responsabilité et à le faire échapper à l’imputation des conséquences financières du non-recouvrement (voir, en ce sens, arrêt du 10 octobre 2012, Grèce/Commission, T‑158/09, non publié, EU:T:2012:530, point 80).

62      Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que, en s’abstenant de former un pourvoi devant la Cour de cassation contre l’arrêt du 3 mai 2012 de la cour d’appel de Bruxelles, le Royaume de Belgique n’a pas eu recours à tous les moyens qu’il avait à sa disposition et, partant, n’a pas agi avec la diligence nécessaire afin de récupérer les sommes litigieuses. Il s’ensuit que l’absence de récupération en cause résulte d’une négligence qui lui est imputable.

63      En conséquence, il ne saurait être reproché à la Commission d’avoir violé l’article 31, paragraphe 1, du règlement n° 1290/2005, devenu, en substance, l’article 52, paragraphe 1, du règlement n° 1306/2013, et l’article 32, paragraphe 8, sous a), du règlement n° 1290/2005, devenu, en substance, l’article 54, paragraphe 5, sous c), du règlement n° 1306/2013, de sorte qu’il y a lieu de rejeter le premier moyen.

 Sur le second moyen, tiré de la violation de l’article 31, paragraphe 2, du règlement n° 1290/2005 et du principe de proportionnalité

64      Par son second moyen, le Royaume de Belgique soutient, en substance, que la décision attaquée a violé l’article 31, paragraphe 2, du règlement n° 1290/2005 et le principe de proportionnalité, au motif que la somme de 9 601 619,00 euros, visée dans ladite décision, ne correspond pas à l’importance de la non-conformité avec le droit de l’Union constatée et qu’il n’a pas été tenu compte du préjudice financier causé à l’Union.

65      En particulier, le Royaume de Belgique fait valoir que, après avoir obtenu, le 16 mai 1997, le paiement d’une somme de 5 133 087,54 euros provenant de la société Saint-Louis Sucre, il a immédiatement versé au FEAGA un montant de 4 106 470,02 euros, correspondant à 80 % de la somme payée par cette société. Ultérieurement, à la suite de l’arrêt du 3 mai 2012 de la cour d’appel de Bruxelles condamnant le BIRB à payer une somme de 10 659 055,87 euros à ladite société, il indique avoir porté à la charge du FEAGA une dépense de 9 601 619,85 euros. Dès lors, selon le Royaume de Belgique, le préjudice financier causé à l’Union n’est pas de 9 601 619 euros, puisqu’il avait déjà versé au FEAGA un montant de 4 106 470,02 euros en mai 1997. La décision attaquée ferait ainsi supporter deux fois la même dépense aux autorités belges.

66      La Commission conteste ces arguments et conclut au rejet du présent moyen.

67      Il convient de rappeler que, en vertu de l’article 31, paragraphe 2, du règlement n° 1290/2005, devenu, en substance, l’article 52, paragraphe 2, du règlement n° 1306/2013, la Commission évalue les montants à écarter au vu, notamment, de l’importance de la non-conformité constatée. La Commission tient compte de la nature et de la gravité de l’infraction ainsi que du préjudice financier causé à l’Union.

68      Force est de constater que, en l’espèce, la Commission a correctement évalué les montants à écarter du financement de l’Union et que les prétentions du Royaume de Belgique procèdent, en réalité, d’une compréhension erronée des faits.

69      En effet, ainsi que l’expose clairement la Commission dans le mémoire en défense, sans avoir été contredite par le Royaume de Belgique dans la réplique, ce dernier a omis le fait que, à l’origine, en 1992 et en 1993, les restitutions versées à la société Saint-Louis Sucre avaient bien été supportées par le budget de l’Union. Ainsi, le versement d’une somme de 4 106 470,02 euros au FEAGA opéré en mai 1997 n’a fait que dûment neutraliser la prise en charge initiale. S’agissant de la dépense de 9 601 619,85 euros mise à la charge du FEAGA par le Royaume de Belgique à la suite de l’arrêt du 3 mai 2012 de la cour d’appel de Bruxelles, elle a, par décision du 17 mars 2016, été supportée par le budget de l’Union et la décision attaquée du même jour vient correctement neutraliser cette prise en charge.

70      Il s’ensuit que, contrairement à ce que prétend le Royaume de Belgique dans la requête, la décision attaquée ne fait pas supporter deux fois la même dépense aux autorités belges. Partant, il ne saurait être reproché à la Commission d’avoir commis une violation de l’article 31, paragraphe 2, du règlement n° 1290/2005, devenu, en substance, l’article 52, paragraphe 2, du règlement n° 1306/2013, et du principe de proportionnalité.

71      En conséquence, le second moyen doit être rejeté ainsi que le recours dans son intégralité.

 Sur les dépens

72      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Le Royaume de Belgique ayant succombé, il y a lieu de le condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la Commission.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Le Royaume de Belgique est condamné aux dépens.

Prek

Schalin

Costeira

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 20 juillet 2017.

Le greffier

 

Le président

E. Coulon A. M. Collins


*      Langue de procédure : le français.