ORDONNANCE DU VICE-PRÉSIDENT DE LA COUR

16 juin 2016 (*)

« Pourvoi – Ordonnance de référé – Environnement – Protection des consommateurs – Règlement fixant les limites maximales applicables aux résidus de guazatine – Demande de sursis à exécution – Rejet – Défaut d’urgence »

Dans l’affaire C‑170/16 P(R),

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 57, deuxième alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 24 mars 2016,

ICA Laboratories Close Corp.,

ICA International Chemicals (Proprietary) Ltd,

ICA Developments (Proprietary) Ltd,

établies à Century City (Afrique du Sud), représentées par Mes K. Van Maldegem, R. Crespi et P. Sellar, avocats,

parties requérantes,

l’autre partie à la procédure étant:

Commission européenne, représentée par MM. X. Lewis et P. Ondrůšek, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg

partie défenderesse en première instance,

LE VICE-PRÉSIDENT DE LA COUR,

l’avocat général, M. M. Wathelet, entendu,

rend la présente

Ordonnance

1        Par leur pourvoi, ICA Laboratories Close Corp, ICA International Chemicals (Proprietary) Ltd et ICA Developments (Proprietary) Ltd demandent l’annulation de l’ordonnance du président du Tribunal de l’Union européenne du 29 février 2016, ICA Laboratories e.a./Commission (T‑732/15 R, non publiée, ci-après l’« ordonnance attaquée », EU:T:2016:129), par laquelle celui-ci a rejeté leur demande de sursis à exécution du règlement (UE) n° 2015/1910 de la Commission, du 21 octobre 2015, modifiant les annexes III et V du règlement (CE) n° 396/2005 du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne les limites maximales applicables aux résidus de guazatine présents dans ou sur certains produits (JO 2015, L 280, p. 2, ci-après le « règlement litigieux »).

 Les antécédents du litige, la procédure devant le Tribunal et l’ordonnance attaquée

2        La présente affaire s’inscrit dans un cadre juridique fixé, notamment, d’une part, par la directive 91/414/CEE du Conseil, du 15 juillet 1991, concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques (JO 1991, L 230, p. 1) et le règlement (CE) n° 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil, du 21 octobre 2009, concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques et abrogeant les directives 79/117/CEE et 91/414 (JO 2009, L 309, p. 1) ainsi que, d’autre part, par le règlement (CE) n° 396/2005 du Parlement européen et du Conseil, du 23 février 2005, concernant les limites maximales applicables aux résidus de pesticides présents dans ou sur les denrées alimentaires et les aliments pour animaux d’origine végétale et animale et modifiant la directive 91/414 (JO 2005, L 70, p. 1), modifié à plusieurs reprises.

3        En vertu du régime instauré par la directive 91/414 et par le règlement n° 1107/2009, un produit phytopharmaceutique ne peut être mis sur le marché d’un État membre que si, d’une part, la substance active qu’il contient a été préalablement évaluée au niveau de l’Union européenne et inscrite sur la liste de l’annexe I de ladite directive et, d’autre part, ce produit a été ensuite évalué et enregistré au niveau dudit État membre.

4        La substance active guazatine est un fongicide de contact dans lequel les agrumes sont trempés après la récolte ou qui est pulvérisé sur les agrumes sur la chaîne de conditionnement. Elle permet de contrôler la « pourriture amère », une maladie qui touche les agrumes, en particulier ceux en provenance d’Afrique du Sud et destinés à l’Union.

5        Cette substance, qui avait déjà été commercialisée sur le marché de l’Union au cours de l’année 1991, a été notifiée et évaluée dans le cadre de la troisième phase du programme de réexamen prévu par le régime transitoire de la directive 91/414. Ensuite, par décisions 2008/934/CE, du 5 décembre 2008, concernant la non-inscription de certaines substances actives à l’annexe I de la directive 91/414/CEE du Conseil et le retrait des autorisations de produits phytopharmaceutiques contenant ces substances (JO 2010, L 333, p. 11) et 2010/455/UE, du 13 août 2010, modifiant les décisions 2008/934/CE et 2008/941/CE en ce qui concerne la durée de validité des autorisations et le délai de grâce dans les cas où le notifiant a soumis une demande selon la procédure accélérée prévue par le règlement (CE) n° 33/2008 (JO 2008, L 216, p. 19), la Commission a, en substance, prévu la non-inscription de la guazatine à l’annexe I de la directive 91/414, ordonné aux États membres de retirer au plus tard le 31 décembre 2011 les autorisations accordées aux produits phytopharmaceutiques contenant ladite substance et fixé au 31 mars 2012 l’expiration du délai de grâce accordé par un État membre pour l’élimination, l’entreposage, la mise sur le marché et l’utilisation des stocks existants de produits phytopharmaceutiques contenant ladite substance.

6        S’agissant des limites maximales applicables aux résidus de pesticides (ci-après les « LMR »), le règlement (CE) n° 149/2008 de la Commission, du 29 janvier 2008, modifiant le règlement n° 396/2005 pour y ajouter les annexes II, III et IV fixant les limites maximales applicables aux résidus des produits figurant à son annexe I (JO 2008, L 58, p. 1) a fixé pour la guazatine une LMR provisoire de 5 mg/kg en ce qui concerne son utilisation sur les agrumes.

7        À la suite de la non-inscription de la guazatine à l’annexe I de la directive 91/414, la Commission a demandé à l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) de procéder, conformément à l’article 12, paragraphe 1, du règlement n° 396/2005, à une révision des LMR existantes pour la guazatine.

8        Au cours de l’année 2010, l’EFSA a publié ses conclusions relatives à l’examen par les pairs de l’évaluation des risques liés à la substance active guazatine, dans lesquelles elle a relevé plusieurs lacunes dans les données en ce qui concerne l’identité de la substance active et un manque d’informations appropriées sur la toxicologie chez les mammifères.

9        Au mois de mai 2013, l’EFSA a rendu un avis motivé dans lequel elle recommandait d’abaisser la LMR provisoire pour la guazatine de 5 mg/kg à 0,05 mg/kg en ce qui concerne son utilisation sur les agrumes.

10      Entretemps, au mois de novembre 2012, les requérantes ont déposé une demande de tolérance à l’importation, en vertu de l’article 6, paragraphes 2 et 4, du règlement n° 396/2005, concernant l’utilisation de la guazatine sur les agrumes. Une telle demande visait à obtenir, ainsi qu’il ressort de l’article 3, sous g), dudit règlement, la fixation d’une LMR pour des « produits importés afin de répondre aux besoins du commerce international lorsque [soit] l’utilisation de la substance active dans un produit phytopharmaceutique, en ce qui concerne un produit donné, n’est pas autorisée dans [l’Union], pour des raisons autres que de santé publique pour un produit et un usage déterminés, [soit] une limite différente se justifie parce que la LMR [au sein de l’Union] existante a été fixée pour des raisons autres que de santé publique pour un produit et un usage déterminés ».

11      Conformément à l’article 8 du règlement n° 396/2005, cette demande de tolérance à l’importation a été évaluée par l’État membre rapporteur, à savoir le Royaume-Uni, qui, dans son rapport d’évaluation, recommandait de fixer la LMR à 4 mg/kg.

12      Au mois d’août 2014, l’EFSA, après avoir examiné la demande de tolérance et le rapport d’évaluation du Royaume-Uni, a recommandé, aux termes d’un second un avis motivé, de ne pas suivre la proposition de l’État membre rapporteur, mais de fixer la LMR à 0,05 mg/kg, au motif que les données disponibles n’étaient pas suffisantes pour exclure tout risque pour le consommateur européen. Elle a transmis cet avis à la Commission ainsi qu’aux États membres et l’a rendu public.

13      Au mois d’octobre 2014, les requérantes ont présenté à la Commission une demande de contrôle administratif, au titre de l’article 13 du règlement n° 396/2005, mais, par décision du 20 mars 2015, cette institution a rejeté toutes les critiques formulées concernant le second avis de l’EFSA et a conclu qu’il n’existait aucune raison de l’inviter à retirer cet avis.

14      Le 21 octobre 2015, la Commission a adopté le règlement litigieux par lequel elle a fixé la LMR pour la guazatine à 0,05 mg/kg en ce qui concerne son utilisation sur les agrumes. Ce règlement est applicable depuis le 13 mai 2016, étant précisé toutefois que l’ancienne LMR continue de s’appliquer aux denrées ou aux aliments qui ont été produits dans le respect de la législation avant cette date, sauf les pamplemousses et les oranges.

15      Le 14 décembre 2015, les requérantes ont introduit devant le Tribunal un recours visant à l’annulation du règlement litigieux. À l’appui de ce recours, elles reprochent à la Commission, notamment, d’avoir commis des erreurs manifestes d’appréciation, dans la mesure où, d’une part, les premier et second avis de l’EFSA sur lesquels repose le règlement litigieux n’étayent pas l’affirmation selon laquelle la fixation de la LMR de la guazatine à 5 mg/kg ou 4 mg/kg ne constitue pas une mesure appropriée et, d’autre part, aucun de ces avis ne conclut à un quelconque risque pour le consommateur. En outre, l’EFSA et la Commission auraient violé l’obligation de prendre en considération l’ensemble des informations scientifiques et techniques disponibles.

16      Le 18 décembre 2015, les requérantes ont introduit une demande en référé visant à obtenir le sursis à exécution du règlement litigieux.

17      Le 29 février 2016, le président du Tribunal a adopté l’ordonnance attaquée. Celui-ci, dans le cadre de son appréciation de l’urgence, après avoir constaté que les préjudices invoqués avaient un caractère financier et que l’impact du règlement litigieux devait dès lors être apprécié par rapport à la puissance financière du groupe formé par l’ensemble des requérantes (ci-après le « groupe ICA »), a, tout d’abord, considéré, aux points 45 à 47 de l’ordonnance attaquée, que, à défaut pour les requérantes d’avoir fourni les éléments permettant au juge des référés d’avoir une image fidèle et globale de la situation financière du groupe ICA, l’octroi des mesures provisoires demandées ne saurait être justifié au regard ni de la prétendue mise en péril de l’existence de ce groupe ni d’un prétendu amoindrissement significatif des parts de marché. Au demeurant, le président du Tribunal a considéré, premièrement, aux points 48 à 51 de l’ordonnance attaqué, que compte tenu de la perte de chiffre d’affaire avancée, le groupe ICA ne serait pas mis en péril, deuxièmement, aux points 52 à 55 de l’ordonnance attaquée, que les requérantes n’avaient pas démontré que des obstacles de nature structurelle ou juridique les empêcheraient de reconquérir une partie appréciable des parts de marchés prétendument perdues et, troisièmement, aux points 56 à 60 de l’ordonnance attaquée, que, en tout état de cause, les préjudices prétendument causés par le règlement litigieux, eu égard au caractère hautement réglementé du marché en cause, résultaient en réalité de la politique commerciale choisie par les requérantes.

18      Ayant dès lors considéré, au point 61 de l’ordonnance attaquée, que la condition de l’urgence faisait défaut, le président du Tribunal a rejeté la demande en référé des requérantes, sans se prononcer ni sur le fumus boni juris ni sur la mise en balance des intérêts.

 La procédure devant la Cour et les conclusions des parties

19      Les requérantes demandent à la Cour :

–        D’une part, d’ordonner le sursis à exécution de l’ordonnance attaquée et du règlement litigieux avec effet immédiat, avant que la Commission ne soumette ses observations et jusqu’à ce que la Cour se prononce sur le présent pourvoi ;

–        D’autre part, d’annuler l’ordonnance attaquée ainsi que, à titre principal, d’ordonner le sursis à exécution du règlement litigieux et « toutes les mesures de redressement provisoires nécessaires » jusqu’à ce que le Tribunal se prononce sur le recours en annulation au principal, et, à titre subsidiaire, de renvoyer l’affaire devant le Tribunal afin qu’il se prononce sur la demande en référé ;

–        de condamner la Commission aux dépens de la procédure, y compris ceux exposés devant le Tribunal.

20      La Commission demande à la Cour de rejeter le pourvoi et de condamner les requérantes aux dépens.

 Sur la demande en référé

21      Par le premier chef de conclusions mentionné au point 19 de la présente ordonnance, les requérantes visent à obtenir, sur le fondement des articles 278 et 279 TFUE, le sursis à exécution de l’ordonnance attaquée et du règlement litigieux jusqu’à ce que la Cour se prononce sur le présent pourvoi.

22      Or, il convient de rappeler que, conformément à l’article 160, paragraphes 3 et 4, du règlement de procédure de la Cour, de telles demandes doivent, d’une part, spécifier l’objet du litige, les circonstances établissant l’urgence ainsi que les moyens de fait et de droit justifiant à première vue l’octroi de la mesure provisoire auquel elles concluent et, d’autre part, être présentées par acte séparé.

23      Force est de constater que la demande des requérantes non seulement n’a pas été introduite par acte séparé, mais qu’elle se limite à énoncer lesdites conclusions, sans qu’aucun élément ne soit présenté à leur appui.

24      Dans ces conditions, la demande en référé des requérantes doit être déclarée manifestement irrecevable.

 Sur le pourvoi

25      Les requérantes soulèvent sept moyens au soutien de leur pourvoi.

 Sur le cinquième moyen, tiré d’une erreur dans l’appréciation de la responsabilité des requérantes

 Argumentation des parties

26      Par leur cinquième moyen, qu’il convient d’examiner en premier lieu, les requérantes, visant les points 50 et 56 à 60 de l’ordonnance attaquée, font grief au président du Tribunal [confidentiel] et, troisièmement, d’avoir estimé que l’abaissement de la LMR pour la guazatine semblait inéluctable en ignorant le fait qu’elles avaient utilisé tous les mécanismes réglementaires à leur disposition pour maintenir une LMR provisoire plus élevée pour cette substance. En outre, les requérantes allèguent que la jurisprudence sur laquelle s’appuie le président du Tribunal soit se réfère à un contexte factuel non comparable au cas d’espèce, soit permet de conclure qu’elles ont fait preuve de la diligence requise, contrairement à ce qu’en a déduit le président du Tribunal. En effet, si les entreprises en cause dans cette jurisprudence étaient restées passives et n’avaient donc pas montré le degré de diligence requis, les requérantes, en revanche, auraient, notamment, introduit une demande de tolérance à l’importation.

27      La Commission conteste l’argumentation des requérantes.

 Appréciation de la Cour

28      Afin de statuer sur ce moyen, il y a lieu de rappeler que, au point 49 de l’ordonnance attaquée, le président du Tribunal a considéré que le marché des produits phytopharmaceutiques est un marché hautement réglementé, sans que cela ait été contesté par les requérantes.

29      Or, la Cour a déjà jugé, s’agissant du marché des médicaments à usage humain, que dans le cadre d’un marché hautement réglementé et susceptible d’une intervention rapide des autorités compétentes lorsque des risques pour la santé publique apparaissent, pour des raisons qui ne sont pas toujours prévisibles, il incombe aux entreprises concernées, sauf à devoir supporter elles-mêmes le préjudice résultant d’une telle intervention, de se prémunir contre les conséquences de celle-ci par une politique appropriée [voir, en ce sens, notamment, ordonnance du président de la Cour du 11 avril 2001, Commission/Bruno Farmaceutici e.a., C‑474/00 P(R), EU:C:2001:219, points 108 et 109].

30      En l’occurrence, le président du Tribunal s’est limité à déduire des circonstances de l’espèce que la politique librement choisie par les requérantes ne pouvait pas être considérée comme étant appropriée.

31      À cet égard, il a en effet constaté, au point 57 de l’ordonnance attaquée, que dès l’adoption de la directive 91/414 prévoyant, soit dans le courant de l’année 1991, l’évaluation de tous les produits phytopharmaceutiques en vue de leur maintien ou non sur le marché, les requérantes devaient être conscientes de la possibilité que serait adoptée une décision d’interdiction de la guazatine et prendre en compte cette possibilité parmi les risques qu’une entreprise opérant sur le marché phytopharmaceutique doit normalement supporter. En outre, le président du Tribunal a également constaté, au point 58 de ladite ordonnance, que, premièrement, en 2008, la mise sur le marché de la guazatine et des produits phytopharmaceutiques contenant cette substance a été interdite dans l’Union, deuxièmement, toujours en 2008, une LMR purement provisoire a été fixée à 5 mg/kg pour la guazatine en ce qui concerne son utilisation sur les agrumes, troisièmement, dans le courant de l’année 2010, l’EFSA a publié des conclusions relevant plusieurs lacunes dans les données concernant l’identité de la guazatine ainsi qu’un manque d’informations appropriées concernant la toxicologie de cette substance chez les mammifères et, quatrièmement, au cours de l’année 2013, l’EFSA a également publié un avis recommandant d’abaisser la LMR provisoire pour la guazatine à 0,05 mg/kg en ce qui concerne son utilisation sur les agrumes.

32      Ainsi, c’est sur la base d’une appréciation des circonstances de l’espèce, dont la réalité n’a d’ailleurs pas été remise en question par les requérantes, que le président du Tribunal a déduit qu’il était raisonnable de s’attendre à un abaissement de la LMR provisoire de la guazatine pour son utilisation sur les agrumes.

33      [confidentiel]

34      [confidentiel]

35      Au demeurant, à supposer même que les moyens évoqués par le président du Tribunal afin de réduire ce risque – à savoir, l’élaboration et la production de substances actives autres que la guazatine ainsi que le développement de substances de remplacement – ne soient pas praticables, comme le prétendent les requérantes, cela ne remet aucunement en cause le caractère inapproprié aux circonstances de l’espèce, au sens de la jurisprudence de la Cour mentionnée au point 29 de la présente ordonnance [confidentiel].

36      De même, est sans pertinence en l’espèce, l’argument des requérantes selon lequel, contrairement aux parties en cause dans les affaires ayant donné lieu aux arrêts cités par le président du Tribunal et qui se sont vues refuser les mesures provisoires qu’elles sollicitaient en raison d’un manque de diligence tiré de leur passivité, un tel grief ne peut leur être opposé dans le cadre de la présente affaire, dans la mesure où elles ont notamment formé une demande de tolérance à l’importation. En effet, il suffit de relever à cet égard que le président du Tribunal a considéré que les requérantes ont manqué de diligence en raison non pas de leur passivité [confidentiel].

37      C’est dès lors sans commettre d’erreur de droit que le président du Tribunal a, au point 60 de l’ordonnance attaquée, jugé que [confidentiel], elles devaient supporter les prétendues conséquences préjudiciables qu’a entraîné pour elles l’adoption du règlement litigieux.

38      Eu égard aux considérations qui précèdent, il y a lieu de d’écarter le cinquième moyen comme étant non fondé.

 Sur les deuxième à quatrième ainsi que sixième et septième moyens

 Arguments des parties

39      Par leur deuxième moyen, les requérantes font valoir que le président du Tribunal a, aux points 42 à 44 et 51 de l’ordonnance attaquée, commis des erreurs de droit s’agissant de l’appréciation du caractère grave et irréparable du préjudice financier qu’elles prétendent subir en raison du règlement litigieux. En particulier, il aurait considéré à tort que l’impact de ce règlement devait être apprécié au regard non pas de la mise en péril de l’existence de la seule société ICA Developments (Proprietary), mais de la puissance financière du groupe ICA, y compris de ses actionnaires.

40      Par leurs troisième et quatrième moyens, les requérantes reprochent au président du Tribunal d’avoir, aux points 45 et 46 de l’ordonnance attaquée, commis des erreurs de droit tenant à un défaut d’examen approprié et complet des éléments de preuves qu’elles ont fournis en ce qui concerne le caractère grave et irréparable du préjudice qu’elles prétendent subir en raison du règlement litigieux, ainsi qu’à un défaut de motivation du rejet de ces éléments de preuve.

41      Par leur sixième moyen, les requérantes reprochent au président du Tribunal d’avoir considéré à tort, aux points 53 et 54 de l’ordonnance attaquée [confidentiel].

42      Enfin, par leur septième moyen, les requérantes font valoir que, au point 55 de l’ordonnance attaquée, le président du Tribunal, dans le cadre de son appréciation du caractère irréparable du préjudice allégué, a commis une erreur de droit en considérant que des campagnes publicitaires permettraient de surmonter la mauvaise publicité engendrée par le règlement litigieux, à moins que les requérantes ne démontrent l’existence d’obstacles de nature structurelle ou juridique entravant l’efficacité de telles campagnes.

43      La Commission conteste l’argumentation des requérantes.

 Appréciation de la Cour

44      Il résulte des points 28 à 38 de la présente ordonnance que c’est à bon droit que le président du Tribunal a jugé que, en l’espèce, les requérantes doivent supporter le préjudice prétendument subi en raison du règlement litigieux, nonobstant l’éventuel caractère grave et irréparable de ce préjudice.

45      Par conséquent, les deuxième à quatrième, sixième et septième moyens, qui visent uniquement l’appréciation du caractère grave et irréparable du préjudice prétendument subi par les requérantes, sont dirigés contre des considérations surabondantes de l’ordonnance attaquée, de sorte que même si ces moyens devaient être jugés fondés, cela n’entraînerait pas pour autant l’annulation de ladite ordonnance.

46      Par conséquent, lesdits moyens doivent être écartés comme étant inopérants.

 Sur le premier moyen

47      Par leur premier moyen, les requérantes reprochent au président du Tribunal d’avoir dénaturé des faits qui lui étaient soumis en considérant, dans le cadre de l’examen de l’urgence, au point 34 de l’ordonnance attaquée, qu’elles avaient déploré « le caractère désastreux [du règlement litigieux] pour les conditions de vie de plusieurs milliers de familles et d’employés sud-africains », alors que la pièce de procédure déposée par les requérantes, censée contenir pareille affirmation, n’y fait aucunement référence. Tout au plus, les requérantes auraient-elles fait mention, dans leur demande de mesures provisoires, des effets extrêmement graves sur le secteur de la culture des agrumes et sur les emplois qui en dépendent, au seul titre de la mise en balance des intérêts.

48      La Commission conteste ce moyen.

49      À cet égard, il suffit de relever que, à supposer même que le président du Tribunal ait dénaturé le contenu de la pièce de procédure en question, une telle erreur n’aurait aucune conséquence sur le dispositif de l’ordonnance attaquée.

50      En effet, d’une part, même s’il devait apparaître que, de fait, les requérantes n’ont pas soulevé l’argument selon lequel le règlement litigieux était de nature à entraîner des effets négatifs sur des tiers, la circonstance que le président du Tribunal l’ait rejeté n’aurait manifestement aucun impact sur la position des requérantes.

51      D’autre part, s’il devait apparaître que le président du Tribunal a, dans le cadre de son appréciation de l’urgence, dénaturé le contenu d’une pièce de procédure aux termes de laquelle les requérantes soulevaient un moyen au soutien de leur appréciation de la mise en balance des intérêts, le moyen pris d’une telle dénaturation revêt un caractère inopérant, étant donné que, en tout état de cause, le président du Tribunal a, ainsi qu’il résulte du point 61 de l’ordonnance attaquée, rejeté la demande de sursis à exécution pour défaut d’urgence, sans procéder à cette mise en balance.

52      Le premier moyen doit, dès lors, être écarté comme étant inopérant.

53      Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent qu’il y a lieu de rejeter le pourvoi dans son ensemble.

 Sur les dépens

54      En vertu de l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure de la Cour, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, dudit règlement, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

55      La Commission ayant conclu à la condamnation des requérantes et celles-ci ayant succombé en tous leurs moyens, il y a lieu de condamner celles-ci aux dépens exposés dans le cadre de la présente procédure de pourvoi.

Par ces motifs, le vice-président de la Cour ordonne :

1)      Le pourvoi est rejeté.

2)      ICA Laboratories Close Corp., ICA International Chemicals (Proprietary) Ltd et ICA Developments (Proprietary) Ltd sont condamnées aux dépens de la procédure de pourvoi.

Signatures


* Langue de procédure : l’anglais.