CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

MME JULIANE KOKOTT

présentées le 31 mai 2018 ( 1 )

Affaires jointes C‑626/15 et C‑659/16

Commission européenne

contre

Conseil de l’Union européenne

« Recours en annulation – Choix de la base juridique appropriée – Compétence exclusive, partagée ou complémentaire de l’Union européenne – Action de l’Union seule au sein d’un organisme international ou participation des États membres à ses côtés – Conservation des ressources biologiques marines – Pêche – Protection de l’environnement – Recherche – Aires marines protégées (AMP) – Antarctique – Mer de Weddell et mer de Ross – Décision du Comité des représentants permanents (Coreper) – Acte attaquable »

I. Introduction

1.

Très régulièrement, des conflits surgissent au niveau de l’Union européenne au sujet de la question de savoir si l’Union doit participer seule ou conjointement avec ses États membres aux débats et aux prises de décision dans le cadre d’organismes internationaux. La polémique concerne toujours la base juridique, dans les traités fondateurs de l’Union, sur laquelle repose l’action extérieure de celle-ci.

2.

Ces questions de compétence sont des questions de pouvoir qui font l’objet de litiges passionnés depuis des décennies. Il s’agit, d’une part, de définir le degré de complexité que doit présenter le processus interne de prise de décision au niveau de l’Union et, d’autre part, de déterminer qui peut prendre place, pour l’Europe, à la table des négociations internationales. À cet égard, les positions semblent s’être durcies de manière très sensible depuis l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne.

3.

L’espèce concerne des mesures de protection des mers en Antarctique, et notamment la création de plusieurs aires marines protégées (AMP), qui est discutée depuis quelques années dans le cadre des réunions annuelles de la Commission pour la conservation de la faune et de la flore marines de l’Antarctique (CCAMLR).

4.

Sur le fond, la Commission européenne, le Conseil de l’Union européenne et les États membres souhaitent unanimement contribuer de manière active à la protection des mers en Antarctique. Toutefois, sur le plan formel, le Conseil et les États membres insistent sur le fait que les mesures de sauvegarde des mers relèvent de la politique de l’environnement et donc du domaine des compétences partagées [article 4, paragraphe 2, sous e), TFUE]. C’est pourquoi ils estiment que l’Union et les États membres doivent nécessairement agir conjointement sur la scène internationale. En revanche, la Commission considère qu’il s’agit d’une mesure de conservation des ressources biologiques de la mer dans le cadre de la politique commune de la pêche (PCP) [article 3, paragraphe 1, sous d), TFUE], qui relève des compétences exclusives de l’Union et qui n’autorise donc pas les États membres à agir à l’extérieur, aux côtés des institutions de l’Union. Le débat porte également sur la question de savoir si une compétence externe exclusive implicite est née pour l’Union dans ce domaine, conformément à la jurisprudence AETR ( 2 ) (article 3, paragraphe 2, TFUE), ainsi que sur le rôle que joue en l’espèce la politique de la recherche, qui fait partie des compétences complémentaires de l’Union (article 4, paragraphe 3, TFUE).

5.

Concrètement, dans la présente affaire, la Commission conteste deux décisions du Conseil relatives à la participation de l’Union aux 34e et 35e réunions annuelles de la CCAMLR de 2015 et 2016 (ci-après les « décisions litigieuses ») :

dans l’affaire C‑626/15, la Commission conteste une décision du 11 septembre 2015, contenue dans la conclusion du président du Comité des représentants permanents (Coreper), approuvant la soumission à la CCAMLR, à l’occasion de sa 34e réunion annuelle de 2015, au nom de l’Union et de ses États membres, d’un document de réflexion concernant la création d’une AMP dans la mer de Weddell (ci-après la « décision de 2015 ») ( 3 ) ;

dans l’affaire C‑659/16, la Commission conteste la décision du Conseil du 10 octobre 2016 concernant l’établissement de la position de l’Union pour la 35e réunion annuelle de la CCAMLR de 2016 (ci-après la « décision de 2016 ») ( 4 ). Cette décision concerne également la création de quatre AMP et de zones spéciales d’étude scientifique dans les mers de l’Antarctique, y compris l’AMP de la mer de Weddell déjà examinée en 2015 et une AMP en mer de Ross.

6.

L’arrêt de la Cour dans ces deux affaires ajoutera une pierre à l’édifice complexe des compétences externes de l’Union et de ses États membre, dont l’architecture a été définie par le traité de Lisbonne. En particulier, la présente affaire offre une opportunité de préciser si l’existence d’une compétence partagée entre l’Union et ses États membres requiert forcément une action conjointe (mixte) de l’Union et de ses États membres dans les organismes internationaux ou si l’Union peut aussi, ou même doit, agir seule vis-à-vis de l’extérieur. Dans l’affaire C‑626/16, il conviendra également d’examiner au préalable la question des circonstances dans lesquelles des décisions du Coreper constituent des actes attaquables au sens de l’article 263 TFUE. L’affaire relative à l’accord de partenariat avec la République du Kazakhstan (C‑244/17), dans laquelle nous présentons également nos conclusions aujourd’hui, porte sur des problématiques tout à fait différentes concernant la majorité requise au sein du Conseil pour l’adoption de décisions présentant certains liens avec la politique étrangère et de sécurité commune.

II. Le cadre juridique

A.   Le droit de l’Union

7.

En droit de l’Union, le cadre juridique dans lequel s’inscrit la présente affaire est en premier lieu déterminé par les articles 2, 3 et 4 TFUE ainsi que par l’article 4, paragraphe 1, et l’article 5, paragraphe 2, TUE. Les articles 191 et 192 TFUE sont également pertinents. En outre, il convient de renvoyer aux règles fondamentales dans le domaine de la PCP, telles qu’elles sont prévues par le règlement (UE) no 1380/2013 ( 5 ).

8.

L’article 1er du règlement no 1380/2013 délimite le champ d’application de la PCP comme suit :

« 1.   La [PCP] couvre :

a)

la conservation des ressources biologiques de la mer, ainsi que la gestion des pêcheries et des flottes qui exploitent ces ressources ;

[…]

2.   La PCP couvre les activités visées au paragraphe 1 lorsqu’elles sont menées :

[…]

c)

par des navires de pêche de l’Union en dehors des eaux de l’Union ; ou

d)

par des ressortissants des États membres, sans préjudice de la responsabilité principale de l’État du pavillon. »

9.

L’article 2 du règlement no 1380/2013 définit les objectifs de la PCP comme suit :

« 1.   La PCP garantit que les activités de pêche et d’aquaculture soient durables à long terme sur le plan environnemental […].

2.   La PCP applique l’approche de précaution en matière de gestion des pêches et vise à faire en sorte que l’exploitation des ressources biologiques vivantes de la mer rétablisse et maintienne les populations des espèces exploitées au-dessus des niveaux qui permettent d’obtenir le rendement maximal durable.

[…]

3.   La PCP met en œuvre l’approche écosystémique de la gestion des pêches afin de faire en sorte que les incidences négatives des activités de pêche sur l’écosystème marin soient réduites au minimum et vise à faire en sorte que les activités d’aquaculture et de pêche permettent d’éviter la dégradation du milieu marin.

[…]

5.   La PCP vise en particulier à :

[…]

j)

être cohérente avec la législation environnementale de l’Union […] »

10.

En ce qui concerne les objectifs de la politique extérieure de la pêche de l’Union, l’article 28, paragraphe 1, du règlement no 1380/2013 prévoit ce qui suit :

« En vue d’assurer l’exploitation, la gestion et la conservation durables des ressources biologiques de la mer et de l’environnement marin, l’Union mène ses relations extérieures dans le domaine de la pêche dans le respect de ses obligations internationales et de ses objectifs généraux, ainsi que des objectifs et principes énoncés aux articles 2 et 3. »

B.   Le droit international public

11.

En droit international public, les dispositions de la convention sur la conservation de la faune et de la flore marines de l’Antarctique (convention de Canberra) sont pertinentes et il convient également de renvoyer au traité sur l’Antarctique.

1. La convention de Canberra

12.

La convention de Canberra ( 6 ) a été conclue le 20 mai 1980 à Canberra (Australie) et est entrée en vigueur le 7 avril 1982. Outre l’Union, douze de ses États membres ( 7 ) sont parties à cette convention, ainsi que 23 États tiers.

13.

L’article I de la convention Canberra dispose ce qui suit :

« 1.   La présente Convention s’applique aux ressources marines vivantes de la zone située au sud du 60° degré de latitude Sud et aux ressources marines vivantes de la zone comprise entre cette latitude et la convergence antarctique qui font partie de l’écosystème marin antarctique.

2.   L’expression “ressources marines vivantes de l’Antarctique” désigne les populations de poissons à nageoires, de mollusques, de crustacés et de toutes les autres espèces d’organismes vivants, y compris les oiseaux, qui se trouvent au sud de la convergence antarctique.

3.   L’expression “écosystème marin antarctique” désigne l’ensemble des rapports de ces ressources marines vivantes de l’Antarctique entre elles et avec leur milieu physique.

[…] »

14.

Les dispositions de l’article II de la convention Canberra sont les suivantes :

« 1.   La présente Convention a pour objectif la conservation des ressources marines vivantes de l’Antarctique.

2.   Aux fins de la Convention, le terme “conservation” comprend la notion d’utilisation rationnelle.

3.   Dans la zone d’application de la Convention, les captures et les activités connexes se font conformément aux dispositions de la Convention et aux principes de conservation suivants :

(a)

prévenir la diminution de la taille de toute population exploitée en deçà du niveau nécessaire au maintien de la stabilité du recrutement. À cette fin, il ne sera pas permis que ce volume descende en deçà du niveau proche de celui qui assure l’accroissement maximum annuel net de la population ;

(b)

maintenir les rapports écologiques entre les populations exploitées, dépendantes ou associées des ressources marines vivantes de l’Antarctique et reconstituer leurs populations exploitées aux niveaux définis à l’alinéa (a) ;

[…]. »

15.

L’article III de la convention de Canberra règle son rapport avec le traité sur l’Antarctique :

« Les Parties contractantes, qu’elles soient ou non parties au Traité sur l’Antarctique, conviennent de ne pas mener dans la zone du Traité sur l’Antarctique d’activités qui aillent à l’encontre des principes et des objectifs de ce Traité […] »

16.

En outre, les dispositions de l’article V de la convention de Canberra sont les suivantes :

« 1.   Les Parties contractantes qui ne sont pas parties au Traité sur l’Antarctique reconnaissent les obligations et les responsabilités particulières des Parties consultatives au Traité sur l’Antarctique quant à la protection et la préservation de l’environnement dans la zone de ce Traité.

2.   Les Parties contractantes qui ne sont pas parties au Traité sur l’Antarctique conviennent d’appliquer dans leurs activités dans la zone couverte par ce Traité, le cas échéant et en temps opportun, les mesures convenues pour la protection de la faune et de la flore de l’Antarctique et les autres mesures qui ont été recommandées par les Parties consultatives dans l’exercice de leurs responsabilités quant à la protection de l’environnement antarctique contre toute forme d’ingérence humaine nuisible.

[…] »

17.

L’article VII de la convention de Canberra institue la CCAMLR, à laquelle l’article IX de ladite convention confie notamment les missions suivantes :

« 1.   La Commission a pour fonction de mettre en œuvre les objectifs et les principes définis à l’article II. À cette fin :

[…]

(f)

elle élabore des mesures de conservation […]

[…].

2.   Les mesures de conservation visées à l’alinéa 1 (f) portent sur :

[…]

(g)

l’ouverture ou la fermeture de zones, secteurs ou sous-secteurs à des fins d’étude scientifique ou de conservation, y compris celle de zones spéciales destinées à la protection et à l’étude scientifique ;

[…] »

18.

Outre l’Union, huit de ses États membres sont actuellement membres de la CCAMLR ( 8 ).

2. Le traité sur l’Antarctique

19.

Le traité sur l’Antarctique a été signé le 1er décembre 1959, à Washington, D. C. (États-Unis d’Amérique). Trois États membres de l’Union ont, en tant que signataires du traité sur l’Antarctique, le statut de parties à ce traité ( 9 ). Neuf autres États membres de l’Union ont le statut de parties consultatives au traité ( 10 ) et huit autres États membres ont le statut de parties non consultatives au traité ( 11 ).

20.

L’article IX, paragraphe 1, du traité sur l’Antarctique dispose ce qui suit :

« 1.   Les représentants des Parties contractantes […] se réuniront […] à des intervalles et en des lieux appropriés, en vue d’échanger des informations, de se consulter sur des questions d’intérêt commun concernant l’Antarctique, d’étudier, formuler et recommander à leurs gouvernements des mesures destinées à assurer le respect des principes et la poursuite des objectifs du présent Traité, et notamment des mesures

[…]

(f)

relatives à la protection et à la conservation de la faune et de la flore dans l’Antarctique. »

21.

L’article VI du traité sur l’Antarctique définit son champ d’application territorial comme suit :

« Les dispositions du présent Traité s’appliquent à la région située au sud du 60° degré de latitude Sud, y compris toutes les plates-formes glaciaires […] »

III. Le contexte des litiges

22.

La CCAMLR s’est fixé pour objectif de mettre en place un réseau d’AMP en Antarctique, objectif qui est expressément soutenu par l’Union.

23.

Dans ce contexte, en vue de préparer la participation de l’Union aux futures réunions annuelles de la CCAMLR, le Conseil a établi, en 2014, sur le fondement de l’article 218, paragraphe 9, TFUE, une « position pluriannuelle », qui prévoit notamment une « procédure simplifiée » pour la prise de décision par le Conseil en ce qui concerne la position à adopter par l’Union dans le cadre de la CCAMLR sur des questions relevant de la PCP ( 12 ). En vertu de cette procédure, avant chaque réunion annuelle de la CCAMLR, les services de la Commission transmettent les documents pertinents aux instances préparatoires du Conseil. En pratique, les services de la Commission communiquent ces documents soit au groupe de travail « Pêche » du Conseil, soit au Coreper.

A.   L’affaire C‑626/15

24.

Le 31 août 2015, les services de la Commission ont transmis au groupe de travail « Pêche » du Conseil, en application de la procédure simplifiée, un document informel (non-paper) auquel était joint un projet de « document de réflexion sur une future proposition d’aire marine protégée dans la mer de Weddell» ( 13 ).

25.

Les services de la Commission ont proposé que ce document de réflexion soit soumis à la CCAMLR [plus précisément au comité scientifique placé auprès de la CCAMLR ( 14 )] au nom de l’Union seule, car il relevait, selon eux, du domaine de la PCP.

26.

Lors de sa réunion du 5 septembre 2015, le groupe de travail du Conseil a approuvé le contenu du document réflexion, mais a considéré qu’il relevait du domaine de la politique de l’environnement, raison pour laquelle il a jugé nécessaire que ce document soit présenté au comité scientifique de la CCAMLR au nom de l’Union et de ses États membres. Le dossier a été renvoyé au Coreper.

27.

Le Coreper a examiné ce dossier au cours de sa réunion du 11 septembre 2015. Après un échange de vues, le président du Coreper a constaté qu’il existait un consensus quant au contenu du document de réflexion et que ce dernier devait être soumis à la CCAMLR à l’occasion de sa 34e réunion annuelle. Il a en outre constaté qu’il avait été décidé de soumettre ce document à la CCAMLR au nom de l’Union et de ses États membres.

28.

Dans une déclaration inscrite au procès-verbal de la réunion, la Commission a protesté contre ce dernier point. Elle s’est certes déclarée prête à soumettre le document de réflexion à la CCAMLR au nom de l’Union et de ses États membres, comme l’avait décidé le Coreper, mais elle s’est expressément réservé le droit de saisir la justice.

B.   L’affaire C‑659/16

29.

Le 30 août 2016, les services de la Commission ont, de nouveau en application de la procédure simplifiée, transmis un document informel (non-paper) au groupe de travail « Pêche » du Conseil. Le 6 septembre 2016, ce document a été complété par quatre projets de propositions de création ou de soutien à la création d’AMP en Antarctique, à savoir l’AMP dans la mer de Weddell, déjà évoquée en 2015 ( 15 ), une AMP dans la mer de Ross ( 16 ), une AMP dans l’Est-Antarctique, et, enfin, un ensemble de zones spéciales destinées à l’étude scientifique sur le recul de plates-formes glaciaires ( 17 ).

30.

Les services de la Commission ont proposé que ces documents soient soumis à la CCAMLR au nom de l’Union seule, car ils relevaient, à leurs yeux, de la PCP. En vue de respecter les délais applicables à la soumission de propositions à l’occasion des réunions annuelles de la CCAMLR, la Commission a parallèlement déposé lesdits documents auprès du secrétariat de la CCAMLR, au nom de l’Union seule.

31.

À l’occasion de ses réunions des 15 et 22 septembre 2016, le groupe de travail du Conseil a examiné le contenu du document de réflexion et celui des quatre propositions, et il en a approuvé le contenu le 22 septembre 2016, en considérant toutefois que ces documents relevaient de la politique de l’environnement, de sorte qu’ils devaient être soumis à la CCAMLR au nom de l’Union et de ses États membres. En outre, le groupe de travail a estimé que la procédure simplifiée n’était pas applicable dans ce cas, car l’objet de celle-ci était limité aux questions de la PCP. Le dossier a par la suite été transmis au Coreper, puis au Conseil.

32.

Le 10 octobre 2016, à Luxembourg, le Conseil a, à l’occasion de sa 3 487e session, approuvé la décision de la Commission de soumettre le document de réflexion et les quatre propositions à la CCAMLR au nom de l’Union. Il a en outre décidé que ces documents établissaient la position devant être prise par l’Union lors de 35e réunion annuelle de la CCAMLR.

33.

Dans une déclaration inscrite au procès-verbal de la réunion, la Commission a insisté sur le fait que lesdits documents relevaient du domaine des compétences exclusives de l’Union en matière de conservation des ressources biologiques de la mer. La Commission s’est certes déclarée prête à informer le secrétariat de la CCAMLR du fait que le dépôt desdits documents devait être considéré comme effectué au nom de l’Union et de ses États membres ( 18 ), mais elle s’est expressément réservé la possibilité d’exercer des voies de recours.

34.

En 2016, à l’occasion de sa 35e réunion annuelle, la CCAMLR a décidé de donner suite à deux des propositions présentées et soutenues par l’Union, à savoir l’établissement d’une AMP dans la mer de Ross et la création de plusieurs zones spéciales d’étude scientifique. En outre, la CCAMLR a décidé de poursuivre les discussions sur les deux autres propositions de l’Union – notamment en ce qui concerne l’éventuelle création d’une AMP dans la mer de Weddell.

IV. La procédure devant la Cour et les conclusions des parties

35.

Avec les affaires C‑626/15 et C‑659/16, la Cour est désormais saisie de deux recours en annulation conformément à l’article 263, deuxième alinéa, TFUE, opposant la Commission au Conseil. Dans ce contexte, le Conseil bénéficie du soutien de plusieurs États membres.

A.   L’affaire C‑626/15

36.

Dans l’affaire C‑626/15, la Commission a, par une requête du 23 novembre 2015, introduit un recours en annulation de la décision de 2015.

37.

Conformément à l’article 131, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour, le président de la Cour a autorisé la République fédérale d’Allemagne, la République hellénique, le Royaume d’Espagne, la République française, le Royaume des Pays-Bas, la République portugaise, la République de Finlande, le Royaume de Suède ainsi que le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord à intervenir au soutien du Conseil dans cette affaire.

38.

Dans l’affaire C‑626/15, la Commission demande à la Cour :

d’annuler partiellement la décision 2015, en ce que le Conseil a imposé que le document de réflexion soit soumis au nom de l’Union et de ses États membres au lieu d’être soumis au nom de l’Union seule, et

de condamner le Conseil aux dépens.

39.

Pour sa part, le Conseil, qui est soutenu par les neuf parties intervenantes, conclut à ce que la Cour :

rejette le recours tendant à l’annulation partielle du document de réflexion comme étant irrecevable et, en tout état de cause, non fondé ( 19 ), et

condamne la Commission aux dépens ( 20 ).

B.   L’affaire C‑659/16

40.

Dans l’affaire C‑659/16, la Commission a, par une requête du 20 décembre 2016, introduit un recours en annulation de la décision de 2016.

41.

Conformément à l’article 131, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour, le président de la Cour a autorisé le Royaume de Belgique, la République fédérale d’Allemagne, le Royaume d’Espagne, la République française, le Grand-Duché de Luxembourg, le Royaume des Pays-Bas, la République portugaise, la République de Finlande, le Royaume de Suède ainsi que le Royaume-Uni à intervenir au soutien du Conseil dans cette affaire.

42.

Dans l’affaire C‑659/16, la Commission demande à la Cour :

d’annuler partiellement la décision de 2016 en ce qu’elle établit une position à prendre au nom de l’Union et de ses États membres, au lieu de l’Union seule, et

de condamner le Conseil aux dépens.

43.

Pour sa part, le Conseil, qui est soutenu par les dix parties intervenantes, conclut à ce que la Cour :

rejette le recours tendant à l’annulation partielle de la décision attaquée comme étant non fondé et

condamne la Commission aux dépens ( 21 ).

C.   La procédure ultérieure devant la Cour

44.

Les deux recours de la Commission ont fait l’objet d’échanges de mémoires devant la Cour. Le 10 janvier 2017, le président de la Cour a autorisé le Conseil, dans l’affaire C‑626/15, à produire des éléments de preuve supplémentaires. Par décision du 10 février 2017, le président de la Cour a, en outre, suspendu l’affaire C‑626/15 jusqu’à la clôture de la phase écrite de la procédure dans l’affaire C‑659/16. Par ailleurs, par une décision de ce même jour, le président de la Cour a joint les affaires C‑626/15 et C‑659/16 aux fins de la phase orale de la procédure, ainsi que de l’arrêt mettant fin à l’instance.

45.

L’audience conjointe aux deux affaires, à laquelle ont participé la Commission, le Conseil ainsi que les parties intervenantes au soutien de ce dernier, à l’exception du Royaume de Belgique, du Grand-Duché de Luxembourg, du Royaume des Pays-Bas et de la République de Finlande, s’est tenue le 13 mars 2018.

46.

En conséquence d’une demande présentée par le Conseil dans l’affaire C‑626/15, la Cour siège en grande chambre dans cette affaire, conformément à l’article 16, troisième alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne. En vertu de l’article 29, paragraphe 1, de son règlement de procédure, la Cour a décidé que les affaires jointes C‑626/15 et C‑659/16 devaient être attribuées à une même formation de jugement.

V. La recevabilité du recours dans l’affaire C‑626/15

47.

La question de la recevabilité du recours de la Commission occupe une place importante dans l’affaire C‑626/15. En effet, contrairement à ce qui est le cas dans l’affaire C‑659/16, le Conseil et de nombreuses parties intervenantes contestent avec véhémence que la décision de 2015 attaquée par la Commission dans l’affaire C‑626/15 puisse faire l’objet d’un recours en annulation au sens de l’article 263 TFUE. À cet égard, ils invoquent essentiellement deux arguments : premièrement, il s’agirait d’une simple décision du Coreper et pas d’une décision du Conseil ; deuxièmement, cette décision ne produirait pas d’effets juridiques obligatoires.

A.   L’imputabilité de la décision attaquée au Conseil

48.

Il ne fait aucun doute qu’en tant que tel le Coreper n’est pas une institution de l’Union investie de compétences par le traité et qu’il constitue un organe auxiliaire du Conseil assurant, pour ce dernier, des tâches de préparation et d’exécution ( 22 ) (article 240, paragraphe 1, première phrase, TFUE).

49.

Le fait que le Coreper ne puisse adopter que certaines décisions de procédure (article 240, paragraphe 1, seconde phrase, TFUE et article 19, paragraphe 7, du règlement intérieur du Conseil) et ne soit sinon pas habilité à exercer le pouvoir décisionnel qui revient, d’après les traités, au Conseil ( 23 ), ne soustrait toutefois en rien ses actes à un contrôle par les juridictions de l’Union. Les actes du Coreper doivent plutôt être imputés au Conseil. Si les agissements du Coreper sont illégaux, le Conseil doit en répondre devant les juridictions de l’Union. L’idée de protection juridique complète et de contrôle juridictionnel entier en ce qui concerne tous les actes des institutions, des organes et des organismes de l’Union, qui est sous-jacente à l’article 263 TFUE, milite en faveur d’une telle approche.

50.

Il est vrai qu’il existe, dans de nombreux cas, un instrument juridique distinct du Conseil, qui a seulement été préparé par le Coreper. Le contrôle juridictionnel s’attache alors à cet acte du Conseil, et les actes préparatoires du Coreper ne peuvent faire l’objet d’un recours en justice autonome.

51.

Il en va toutefois autrement lorsque, exceptionnellement, seul le Coreper intervient, alors qu’au niveau des ministres le Conseil reste inactif. En effet, dans ce cas, les actes du Coreper constituent déjà le terme de la procédure en question ( 24 ) et fixent définitivement la position du Conseil en tant qu’institution de l’Union ( 25 ). Tel était le cas des actes de 2015, à l’origine de l’affaire C‑626/15. En conséquence, la décision de 2015 doit, en tant qu’acte juridique imputable au Conseil, pouvoir faire l’objet d’un contrôle juridictionnel par le juge de l’Union.

B.   Les effets juridiques de la décision de 2015

52.

Il ressort d’une jurisprudence constante que sont considérées comme des « actes attaquables » au sens de l’article 263 TFUE toutes les dispositions adoptées par les institutions de l’Union, quelle qu’en soit la forme, qui visent à produire des effets de droit obligatoires ( 26 ).

53.

Pour déterminer si l’acte attaqué produit (ou doit produire) de tels effets, il y a lieu de s’attacher à sa substance ( 27 ), qui doit être appréciée en fonction de critères objectifs, tels que, au premier chef, le contenu de cet acte, mais également le contexte de son adoption, ainsi que les pouvoirs de son auteur ( 28 ). L’intention de l’auteur de l’acte présente également une importance ( 29 ), à condition qu’elle puisse être déterminée de manière objective.

54.

Contrairement à ce que semble penser le Conseil, le débat ne porte pas sur la question de savoir si le document de réflexion transmis à la CCAMLR est attaquable en tant que tel. Il convient plutôt de déterminer si la décision du Coreper de 2015 de transmettre ce document de réflexion à la CCAMLR au nom de l’Union et de ses États membres produit des effets juridiques obligatoires et peut donc être qualifiée d’acte attaquable au sens de l’article 263 TFUE.

55.

En ce qui concerne tout d’abord le contenu de la décision de 2015, celle-ci prévoit que le document de réflexion sur la création d’une AMP dans la mer de Weddell est soumis à la CCAMLR au nom de l’Union et de ses États membres, conjointement, et non au nom de l’Union seule. Ce constat suggère fortement que la décision de 2015 a produit des effets juridiques, car elle restreignait la marge de manœuvre de la Commission dans le cadre de sa participation à la 34e réunion annuelle de la CCAMLR en 2015. En particulier, cette décision interdisait à la Commission de faire usage de sa compétence de représentation extérieure de l’Union (article 17, paragraphe 1, sixième phrase, TUE) d’une autre manière que dans le cadre d’une action conjointe avec les représentants des États membres.

56.

En ce qui concerne le contexte dans lequel s’inscrit la décision de 2015, il convient de renvoyer à la position pluriannuelle adoptée par le Conseil en 2014 ( 30 ). Cette dernière attribue expressément aux« instances préparatoires » du Conseil un pouvoir d’examen et de décision, qui vise à fixer la position de l’Union, dans le cadre d’une « procédure simplifiée », sur certaines questions abordées dans les réunions annuelles de la CCAMLR. Le document de réflexion litigieux dans l’affaire C‑626/15 a été soumis au Coreper spécifiquement dans le cadre de cette procédure simplifiée. Cette circonstance milite également en faveur de l’hypothèse selon laquelle la décision de 2015 a produit des effets juridiques obligatoires.

57.

Enfin, il en va de même pour ce qui a trait à l’intention de l’auteur de l’acte : il est constant entre les parties qu’avec sa décision de 2015 le Coreper voulait déterminer la position concrète que les représentants de l’Union devaient adopter sur la scène internationale, à l’occasion de la 34e réunion annuelle de la CCAMLR.

58.

Dans ces conditions, il convient de partir du principe que la décision de 2015 devait produire, et a produit, des effets juridiques obligatoires.

C.   Les contre-arguments du Conseil et de certaines parties intervenantes

59.

Le Conseil et certaines parties intervenantes essayent de contester l’existence d’un acte attaquable dans l’affaire C‑626/15 en invoquant essentiellement deux contre-arguments.

1. Les facultés de la Commission et du Conseil en vertu des articles 16 et 17 TUE

60.

Premièrement, ces parties soutiennent qu’en vertu de l’article 16, paragraphe 1, seconde phrase, TUE il appartient au Conseil de définir la politique de l’Union, également et justement en ce qui concerne son action extérieure et la représentation extérieure de l’Union qui est assurée par la Commission en vertu de l’article 17, paragraphe 1, sixième phrase, TUE ( 31 ).

61.

Toutefois, cette argumentation est inopérante. En effet, l’existence – nullement contestée – d’un pouvoir du Conseil conformément à l’article 16, paragraphe 1, seconde phrase, TUE n’exclut en rien que les dispositions que le Conseil prend à l’égard de l’action extérieure de l’Union sur cette base produisent des effets juridiques et soient attaquables devant les juridictions de l’Union. Bien au contraire, il est manifeste que de telles dispositions confèrent des effets juridiques à la décision en cause, ce qui en fait un acte attaquable conformément à l’article 263 TFUE.

2. La définition des positions de l’Union conformément à l’article 218, paragraphe 9, TFUE

62.

Deuxièmement, le Conseil et certains États membres soutiennent que la décision de 2015 est dépourvue d’effets juridiques, car elle ne définit aucune position de l’Union au sens de l’article 218, paragraphe 9, TFUE. Ce point de vue est justifié par la circonstance que, lors de la 34e réunion annuelle de la CCAMLR, il était prévu non pas de prendre une décision formelle sur la création d’une AMP dans la mer de Weddell, mais simplement d’examiner le document de réflexion litigieux en vue de préparer une éventuelle décision future à cet égard.

63.

Cette argumentation ne convainc pas non plus, et ce pour deux raisons.

64.

D’une part, l’article 218, paragraphe 9, TFUE doit être interprété au sens large ( 32 ). Une position de l’Union au sens de cette disposition doit être établie non seulement lorsque, dans un organisme international, une décision concrète relative à l’adoption d’un acte ayant des effets juridiques est imminente, mais également lorsque l’Union souhaite, devant un tel organisme, ouvrir un débat susceptible de conduire à l’adoption d’un acte produisant des effets juridiques, ou prendre part à un tel débat ( 33 ). L’objectif de l’article 218, paragraphe 9, TFUE est en effet de garantir que l’Union parle d’une seule voix tout au long du processus décisionnel de l’organisme international en cause et que ses contributions à ce processus soient autorisées par ses institutions compétentes.

65.

D’autre part, le Conseil peut juger souhaitable d’établir une position commune de l’Union dans le cadre d’un organisme international en dehors des domaines visés à l’article 218, paragraphe 9, TFUE, pour ainsi dire sur une base volontaire. Dans un tel cas, cette position est contraignante et requiert une coopération loyale des autres institutions de l’Union (article 13, paragraphe 2, seconde phrase, TUE) et des États membres (article 4, paragraphe 3, TUE, et article 191, paragraphe 4, première phrase, TFUE).

66.

Par conséquent, même si l’on voit, dans la décision de 2015, non pas une définition contraignante d’une position de l’Union au sens de l’article 218, paragraphe 9, TFUE, mais seulement une fixation volontaire d’une position commune, en dehors du champ d’application de l’article 218, paragraphe 9, TFUE, en vue de l’ouverture de débats dans le cadre d’un organisme international, les effets juridiques pertinents de cette décision sont indéniables. Cela est d’autant plus vrai que le dépôt du document de réflexion de manière conjointe, par l’Union et ses États membres, a amené la CCAMLR et les autres États parties à la convention de Canberra à croire que l’éventuelle création d’une AMP dans la mer de Weddell ne relevait pas de la compétence exclusive de l’Union ou que l’Union ne pouvait en tout cas pas agir seule à cet égard. Cela suffit pour considérer qu’il existe des effets juridiques au sens de l’article 263 TFUE ( 34 ).

D.   Conclusion intermédiaire

67.

En fin de compte, la décision de 2015 constitue donc un acte attaquable au sens de l’article 263 TFUE. Il s’ensuit que le recours de la Commission dans l’affaire C‑626/15 est recevable.

VI. Le bien-fondé des recours dans les affaires C‑626/15 et C‑659/16

68.

Les recours dans les affaires C‑626/15 et C‑659/16 sont fondés s’il s’avère que, dans les décisions litigieuses, le Conseil a exhorté à tort la Commission à soumettre à la CCAMLR, au nom de l’Union et de ses États membres, les documents et les positions en cause au sujet des projets d’AMP. Autrement dit, il convient de déterminer si l’Union pouvait aussi participer seule, en son nom propre – c’est-à-dire sans implication des États membres – aux débats et à la prise de décision au sein de la CCAMLR, comme la Commission l’avait proposé.

69.

La Commission reproche au Conseil d’avoir méconnu la compétence exclusive de l’Union sur la scène internationale en insistant sur une action commune de l’Union et de ses États membres. À cet égard, elle invoque deux moyens, aussi bien dans l’affaire C‑626/15 que dans l’affaire C‑659/16. D’une part, le Conseil aurait méconnu la compétence exclusive de l’Union en matière de conservation des ressources biologiques de la mer dans le cadre de la PCP, conformément à l’article 3, paragraphe 1, sous d), TFUE (premier moyen) et, d’autre part, le Conseil aurait méconnu l’existence d’une compétence exclusive de l’Union, conformément à l’article 3, paragraphe 2, troisième cas de figure, TFUE, en raison du risque d’atteinte à des règles communes ou d’altération de leur portée (jurisprudence AETR, second moyen).

70.

Le sort de ces deux moyens dépend en fin de compte de la question de savoir quelle était la base juridique matérielle pertinente pour les décisions litigieuses et si celle-ci permet à l’Union d’agir seule dans le cadre de la CCAMLR, voire requiert que l’Union agisse seule dans ce cadre. En vertu du principe des compétences d’attribution (article 5, paragraphe 1, première phrase, et paragraphe 2, TUE, lu en combinaison avec article 4, paragraphe 1, TUE), une telle base juridique s’impose tant pour l’action interne que pour l’action extérieure de l’Union ( 35 ). Le choix de la base juridique appropriée revêt une importance de nature constitutionnelle ( 36 ).

A.   Premier moyen : article 3, paragraphe 1, sous d), TFUE

71.

Par son premier moyen, la Commission fait essentiellement valoir que seule l’Union était compétente pour les documents à soumettre à la CCAMLR ainsi que pour les questions examinées en ce qui concerne les projets de création d’AMP à l’occasion des réunions annuelles de cet organisme de 2015 et de 2016, car tous ces documents et toutes ces questions portaient sur la conservation des ressources biologiques de la mer dans le cadre de la PCP et relevaient donc du domaine d’une compétence exclusive de l’Union, conformément à l’article 3, paragraphe 1, sous d), TFUE.

72.

Des mesures de conservation des ressources biologiques de la mer sont en effet prévues dans le cadre de la PCP [article 1er, paragraphe 1, sous a), du règlement no 1380/2013]. Ces mesures de conservation ne doivent pas nécessairement se limiter aux eaux de l’Union et peuvent aussi s’appliquer en dehors de ces eaux, en tant qu’élément de la politique extérieure de la pêche, dans la mesure où elles concernent les activités de navires de pêche de l’Union ou de ressortissants des États membres [article 1er, paragraphe 2, sous c) et d), ainsi qu’article 28 du règlement no 1380/2013] ( 37 ).

73.

Cependant, la PCP ne constitue en aucune manière le seul rattachement possible pour des mesures de l’Union en matière de conservation des ressources biologiques de la mer. Historiquement, elle était certes souvent la sedes materiae des mesures de conservation à prendre au niveau de l’Union ( 38 ). Toutefois, comme le montre une simple lecture de l’article 3, paragraphe 1, sous d), TFUE ( 39 ), les traités font aujourd’hui une différenciation expresse entre les mesures de conservation des ressources biologiques de la mer adoptées dans le cadre de la PCP et les mesures de conservation des ressources biologiques de la mer adoptées dans le cadre d’autres politiques de l’Union.

74.

Dans ces conditions, il n’est pas surprenant que le Conseil et les parties intervenantes soutiennent que les AMP envisagées dans le cadre de la CCAMLR relèvent non pas de la PCP, mais plutôt de la politique de l’environnement et, éventuellement, de la recherche, qui sont des domaines dans lesquels les compétences sont partagées entre l’Union et les États membres [article 4, paragraphe 1, TFUE, lu en combinaison avec l’article 4, paragraphe 2, sous e), et le paragraphe 3 de ce même article].

75.

Les parties adverses exposent leurs arguments respectifs avec une verve étonnante. Le Conseil et certaines des parties intervenantes reprochent en filigrane à la Commission de tout mettre en œuvre pour empêcher que les États membres agissent sur la scène internationale, tandis que la Commission reproche au Conseil de vouloir trouver à tout prix des fondements juridiques permettant toujours aux États membres d’agir aux côtés de l’Union.

76.

À cet égard, nous nous permettons d’indiquer que le choix de la base juridique ne doit s’attacher qu’à des éléments objectifs susceptibles de contrôle juridictionnel, parmi lesquels figurent, notamment, le but et le contenu de la décision litigieuse ( 40 ), ainsi que le contexte dans lequel celle-ci s’insère ( 41 ).

77.

En revanche, les appréciations subjectives et les projets politiques généraux des acteurs impliqués sont dépourvus de toute importance au regard du choix de la base juridique ( 42 ). Dans le contexte de la détermination de la base juridique d’un acte de l’Union dans le domaine de l’action extérieure, le fait, pour le Conseil, d’essayer d’empêcher une action de l’Union seule et de permettre aux États membres de participer aux côtés de l’Union pourrait même constituer un détournement de pouvoir au sens de l’article 263, deuxième alinéa, TFUE.

78.

De même, la base juridique qui a été retenue pour l’adoption d’autres actes de l’Union présentant, le cas échéant, des caractéristiques similaires ou un lien étroit avec les décisions litigieuses est dépourvue de pertinence ( 43 ) (par exemple l’approbation de la convention de Canberra au nom de la Communauté économique européenne et la participation de cette dernière ou de l’Union à des décisions antérieures de la CCAMLR). En effet, conformément à une jurisprudence constante, une simple pratique du Conseil n’est pas susceptible de déroger à des règles des traités et ne peut, par conséquent, créer un précédent liant les institutions de l’Union ( 44 ).

1. La nécessité d’une approche axée sur le centre de gravité de la mesure

79.

La présente affaire illustre de manière particulièrement tangible le fait que le projet de création d’AMP en Antarctique présente des liens aussi bien avec la conservation des ressources biologiques de la mer dans le cadre de la PCP qu’avec les domaines de l’environnement et de la recherche réglementés par le TFUE. En effet, d’une part, les AMP envisagées dans le cadre de la CCAMLR ont pour finalité la conservation des ressources marines vivantes de l’Antarctique ainsi que la recherche sur celles-ci (article II, paragraphe 1, de la convention de Canberra), c’est-à-dire un objectif de politique environnementale et, le cas échéant, de politique de la recherche, et, d’autre part, elles doivent permettre une utilisation rationnelle de ces ressources (article II, paragraphe 2, de la convention de Canberra) et donc, en particulier, une pêche à caractère durable.

80.

En conséquence, l’Union pourrait théoriquement fonder sa participation à la création des AMP projetées aussi bien sur la base de ses compétences en matière de politique de l’environnement [titre XX TFUE ( 45 )] et, le cas échéant, de politique de la recherche (titre XIX TFUE) que sur sa compétence en matière de conservation des ressources biologiques de la mer dans le cadre de la PCP (titre III TFUE), l’exercice de ladite compétence devant à son tour, conformément à la clause horizontale de l’article 11 TFUE, prendre en considération, de manière déterminante, les exigences de la protection de l’environnement et mettre en œuvre une approche écosystémique (article 2, paragraphe 3, du règlement no 1380/2013).

81.

Dans une telle situation, dans laquelle plusieurs bases juridiques entrent en ligne de compte, il convient, en vertu d’une jurisprudence constante rendue en ce qui concerne aussi bien l’action interne que l’action externe de l’Union, d’adopter une approche fondée sur le centre de gravité de la mesure. Ainsi, si un acte poursuit une double finalité – comme en l’espèce – ou s’il a une double composante et que l’une de celles-ci est identifiable comme principale ou prépondérante, tandis que l’autre n’est qu’accessoire, cet acte doit alors être fondé sur une seule base juridique, à savoir celle exigée par la finalité ou la composante principale ou prépondérante. Ce n’est qu’à titre tout à fait exceptionnel qu’une mesure doit être fondée simultanément sur plusieurs bases juridiques, à savoir lorsque l’acte poursuit à la fois plusieurs finalités ou a plusieurs composantes qui sont liées de façon indissociable, sans que l’une soit accessoire par rapport à l’autre ( 46 ).

82.

Comme nous l’avons fait observer à une autre occasion ( 47 ), cette approche axée sur le centre de gravité de la mesure ne doit pas, sur le plan de la délimitation verticale des compétences, conduire à une extension des compétences de l’Union au détriment de celles des États membres, car cela reviendrait en effet à contourner le principe d’attribution des compétences (article 5, paragraphe 1, première phrase, et paragraphe 2, TUE, en combinaison avec article 4, paragraphe 1, TUE). Néanmoins, elle s’applique directement en ce qui concerne la délimitation horizontale des compétences, c’est-à-dire dans un cas de figure où il est établi que l’Union dispose de compétences pour toutes les composantes de la mesure qu’elle envisage et où seule se pose la question du choix correct, parmi lesdites compétences, de celle qu’il convient d’utiliser.

83.

Tel est le cas dans la présente affaire : il est absolument incontestable que l’Union dispose de compétences dans les domaines de l’environnement, de la recherche et de la conservation des ressources biologiques de la mer dans le cadre de la PCP qui, prises ensemble, suffisent certainement à participer, dans le cadre de la CCAMLR, à toutes les mesures qui font l’objet des décisions litigieuses – à savoir les débats et la prise de décision en ce qui concerne la création de différentes AMP en Antarctique. Les parties s’opposent seulement sur la question de savoir où, parmi ces compétences de l’Union, se situe le centre de gravité des mesures en cause, avec toutes les conséquences qui en découlent pour la problématique de la présence autonome des États membres sur la scène internationale, aux côtés de l’Union.

2. Le rôle subalterne de la recherche dans le cadre des AMP

84.

En ce qui concerne tout d’abord la recherche, celle-ci a, à nos yeux, seulement joué un rôle subalterne dans toutes les mesures envisagées par la CCAMLR, qui font l’objet des décisions litigieuses.

85.

Il est incontestable que les AMP projetées en Antarctique visaient également à permettre une meilleure étude de leurs écosystèmes marins. La recherche est ainsi évoquée de façon récurrente dans les documents litigieux ( 48 ). Les activités de recherche prévues ne constituent toutefois pas une fin en soi, mais servent l’objectif prioritaire de conservation des ressources biologiques marines de l’Antarctique que s’est fixé la CCAMLR conformément aux dispositions de la convention de Canberra et du traité sur l’Antarctique. La recherche dans le cadre des AMP projetées présente donc une véritable orientation de politique environnementale et doit en fin de compte être vue comme une mesure auxiliaire servant la protection de l’environnement.

86.

Il en va de même, dans le cadre de la décision de 2016, des zones spéciales destinées à l’étude scientifique sur le recul de plates-formes glaciaires. Certes, la désignation expresse de ces zones comme étant « destinées à l’étude scientifique » pourrait indiquer, au premier abord, que le volet de la recherche est en tout cas primordial dans ces zones. Toutefois, à y regarder de plus près, il apparaît qu’il s’agit également, dans ces zones spéciales, d’étudier les écosystèmes et les forces de la nature en vue d’une meilleure protection du climat ainsi que de la flore et de la faune dans l’Antarctique. En conséquence, le centre de gravité de la mesure réside également dans la protection de l’environnement et non dans la recherche en tant que telle.

87.

Dans l’ensemble, les aspects scientifiques doivent être vus comme accessoires dans les décisions litigieuses, de telle sorte qu’il n’y avait pas lieu de fonder l’adoption de celles-ci sur une base juridique liée à la politique de la recherche, seule ou en combinaison avec d’autres fondements juridiques.

3. La prépondérance de l’aspect environnemental par rapport aux liens avec la pêche

88.

En l’espèce, la délimitation entre la politique de l’environnement et la PCP constitue le centre d’intérêt. Cette question, à laquelle les parties aux affaires C‑626/15 et C‑659/16 accordent à juste titre une attention toute particulière, n’a jusqu’à aujourd’hui été abordée par la jurisprudence que de manière marginale ( 49 ) et, en conséquence, aucun critère viable et clair n’a encore pu être développé. La Cour a seulement établi qu’une mesure ne saurait relever du domaine de l’environnement en raison du seul fait qu’elle tient compte d’exigences environnementales, car celles-ci doivent être prises en compte dans tous les domaines politiques, eu égard à la clause transversale de l’actuel article 11 TFUE ( 50 ). En outre, la Cour a rappelé que les dispositions des traités sur la politique de l’environnement laissent entières les compétences que l’Union détient en vertu d’autres dispositions des traités ( 51 ).

89.

La Cour a eu l’occasion, jusqu’à aujourd’hui, d’examiner bien plus souvent la question de savoir comment les compétences des institutions de l’Union dans le domaine de la politique commerciale commune (article 207, paragraphe 1, TFUE) doivent être délimitées par rapport à ses compétences dans d’autres domaines, notamment en matière de politique de l’environnement (article 192 TFUE) ( 52 ). En vertu d’une jurisprudence constante, il ne suffit pas qu’un acte de l’Union soit susceptible d’avoir certaines implications sur les échanges avec un ou plusieurs États tiers pour conclure que cet acte doit être rangé dans la catégorie de ceux qui relèvent de la politique commerciale commune ; en revanche, un tel acte de l’Union relève de la politique commerciale commune s’il porte spécifiquement sur les échanges commerciaux en ce qu’il est essentiellement destiné à promouvoir, à faciliter ou à régir ces échanges et a des effets directs et immédiats sur ceux-ci ( 53 ).

90.

Ces critères peuvent également servir, mutatis mutandis, de lignes directrices pour la délimitation à effectuer en l’espèce entre la PCP et la politique de l’environnement. En application de ces critères, il ne suffit pas qu’un acte de l’Union puisse avoir certaines implications sur la pêche pour qu’il relève de la PCP. Au contraire, un tel acte ne peut être considéré comme une mesure relevant véritablement du domaine de la PCP que si :

elle concerne spécifiquement les activités de pêche, car elle est essentiellement destinée à les promouvoir, à les faciliter ou à les régir, et

elle produit des effets directs et immédiats sur les activités de pêche.

91.

En revanche, un acte de l’Union ne saurait être considéré comme relevant de la politique de l’environnement au seul motif qu’il prend en compte les exigences de la protection de l’environnement, comme cela devrait toujours être le cas en vertu de l’article 11 TFUE, et il ne peut être considéré comme tel que si la protection de l’environnement en constitue le centre de gravité.

92.

Si l’on examine le but, le contenu et le contexte ( 54 ) des décisions litigieuses à la lumière de ces critères, il est indéniable que les AMP projetées en Antarctique produisent des effets directs et immédiats sur les activités de pêche, eu égard aux interdictions et aux restrictions qu’elles comportent à cet égard. Toutefois, aucune de ces AMP ne vise primordialement à promouvoir, à faciliter ou, seulement, à réglementer la pêche ; au contraire, la pêche est totalement interdite pour plusieurs décennies dans certaines zones en conséquence d’une série de mesures de politique environnementale, alors que, dans d’autres zones, elle n’est tolérée que dans certaines limites.

93.

Le but principal des AMP projetées est de conserver, d’étudier et de protéger les écosystèmes, la biodiversité et les habitats en Antarctique, ainsi que de lutter contre les effets dommageables du changement climatique sur cette région extrêmement importante pour le climat mondial ( 55 ). Les espèces animales à protéger ne se limitent en rien à celles qui font l’objet de la pêche commerciale et elles incluent, par exemple, des oiseaux (y compris les pingouins) et des mammifères marins (tels que les phoques et les cétacés).

94.

En ce qui concerne le contenu, s’il est vrai que les dispositions du projet de la CCAMLR portant création des différentes AMP mettent fortement l’accent sur la réglementation des activités des navires de pêche, elles le font toutefois dans le sens d’une interdiction étendue de la pêche, qui n’est autorisée qu’exceptionnellement, dans quelques petites zones, sous des conditions strictes ( 56 ). Il convient par ailleurs de souligner que lesdites dispositions ne se limitent en rien aux activités de pêche ; elles interdisent également, par exemple, le dépôt ou le déversement de déchets ( 57 ). Des recherches sont en outre prévues sur la manière dont les écosystèmes se développent dans des zones des AMP ouvertes à la pêche et des zones des AMP fermées à la pêche ( 58 ), ce qui ne constitue pas une authentique mesure de PCP.

95.

Le contexte dans lequel s’inscrivent les AMP projetées n’est pas non plus marqué par la seule PCP, mais inclut des considérations générales de politique de l’environnement. Certes, dans la convention de Canberra, la pêche joue un rôle bien plus important que dans d’autres accords internationaux liés au traité sur l’Antarctique, tels que le protocole de Madrid relatif à la protection de l’environnement ( 59 ). Comme la Commission le souligne à juste titre, la réglementation de la pêche en vue d’une utilisation rationnelle des ressources biologiques de la mer en Antarctique – également en tant que source de protéines – présente une importance non négligeable dans le cadre de la convention de Canberra (voir article II, paragraphes 2 et 3, de la convention de Canberra ( 60 )). Néanmoins, les parties à la convention de Canberra – et donc les membres de la CCAMLR qui décident de la création d’AMP en Antarctique – portent également une responsabilité dépassant la simple sphère économique quant à la protection de l’environnement de l’Antarctique contre toute forme d’ingérence humaine nuisible [voir article V, paragraphe 2, de la convention de Canberra, lu en combinaison avec l’article IX, paragraphe 1, sous f), du traité sur l’Antarctique ( 61 )]. Il ne fait pas de doute que de telles ingérences humaines peuvent également se produire en dehors de la pêche : le Conseil mentionne à très juste titre les éventuels forages en vue de l’extraction des richesses du sous-sol. Il nous semble par ailleurs envisageable qu’il puisse être question, tôt ou tard, d’ériger des éoliennes.

96.

Dans ces conditions, les AMP projetées dans l’Antarctique, sur lesquelles portent les décisions litigieuses, sont de véritables projets de politique environnementale et non des mesures de conservation dans le cadre de la PCP.

97.

Il se peut que, comme le souligne la Commission, les exigences de la protection de l’environnement jouent aussi un rôle important dans le cadre de la PCP et qu’elles aient conduit à l’adoption d’une approche écosystémique orientée sur la durabilité (article 2 du règlement no 1380/2013), comme l’exige la clause horizontale de l’article 11 TFUE. Cependant, eu égard à leur centre de gravité, les AMP de l’Antarctique sur lesquelles portent les décisions litigieuses apparaissent non pas comme des mesures de politique de la pêche incluant des considérations de politique environnementale, mais comme des mesures de protection de l’environnement produisant des effets – particulièrement sensibles – sur la pêche.

98.

C’est donc à juste titre que le Conseil a fondé les décisions litigieuses non pas sur les compétences de l’Union en matière de conservation des ressources biologiques de la mer dans le cadre de la PCP, mais sur la seule politique de l’environnement.

99.

En conséquence, la présente affaire se différencie nettement de l’affaire pendante Deutscher Naturschutzring ( 62 ), dans laquelle le litige concerne non pas la création d’une AMP dans son ensemble, mais seulement des mesures ponctuelles de mise en œuvre des conditions applicables à la pêche dans la zone protégée en question. Il est opportun de fonder de telles mesures de mise en œuvre sur les bases juridiques applicables à la politique de la pêche et d’en fonder d’autres, présentant un caractère de politique environnementale plus marqué, sur la politique de l’environnement.

4. Le sort du premier moyen de la Commission en cas d’identification d’une base juridique différente de celle privilégiée par la Commission

100.

Compte tenu des considérations exposées ci-dessus, l’argumentation de la Commission en vertu de laquelle la base matérielle des décisions litigieuses réside dans la compétence de l’Union en matière de conservation des ressources biologiques de la mer dans le cadre de la PCP ne saurait donc être accueillie ; c’est au contraire l’approche du Conseil et des parties intervenantes, en vertu de laquelle il convenait de faire appel aux compétences de l’Union en matière de politique de l’environnement, qui s’impose.

101.

Il serait toutefois prématuré de rejeter le premier moyen dans les affaires C‑626/15 et C‑659/16 au seul motif que la Commission y invoque à tort la compétence exclusive de l’Union en matière de conservation des ressources biologiques de la mer dans le cadre de la PCP [article 3, paragraphe 1, sous d), TFUE]. En effet, le véritable grief, bien plus fondamental, que soulève la Commission dans son premier moyen est autre : comme il découle des considérations qu’elle invoque aussi bien par écrit qu’oralement, la Commission critique le fait que le Conseil l’aurait obligée, dans les décisions litigieuses, à déposer les documents litigieux auprès de la CCAMLR conjointement au nom de l’Union et de ses États membres, alors qu’une action au nom de la seule Union aurait été possible et suffisante.

102.

Comme nous le montrerons ci-dessous, ce grief capital de la Commission subsiste même si les décisions litigieuses relèvent de la politique de l’environnement, conformément à la position défendue par le Conseil et par les parties intervenantes, et non de la PCP, qu’a privilégiée la Commission. En effet, il n’existait aucune nécessité juridique d’une participation des États membres aux côtés de l’Union dans le cadre d’une action conjointe au sein de la CCAMLR (voir section a) et il n’y avait pas de place pour une participation volontaire des États membres (voir section b).

103.

Le principe ne ultra petita n’empêche pas la Cour d’accueillir le premier moyen invoqué dans les affaires C‑626/15 et C‑659/16 avec une motivation différente de celle avancée par la Commission. En effet, le juge n’est pas la « bouche des parties» ( 63 ). Par conséquent, il ne saurait être tenu par les seuls arguments invoqués par les parties au soutien de leurs prétentions, sauf à se voir contraint, le cas échéant, de fonder sa décision sur des considérations juridiques erronées ( 64 ).

a) L’absence de nécessité juridique d’une participation des États membres

104.

En vertu de l’article 4, paragraphe 1, TFUE, lu en combinaison avec l’article 4, paragraphe 2, sous e), TFUE, la politique de l’environnement fait partie des compétences partagées, dont ni l’Union ni les États membres n’ont le monopole. Néanmoins, l’existence d’une compétence partagée n’induit pas nécessairement que, sur le plan extérieur, l’Union doive toujours agir conjointement avec ses États membres, l’action externe de l’Union dépendant alors nécessairement de la participation des États membres à ses côtés.

105.

L’avocat général Szpunar a résumé les choses de manière tout à fait juste ( 65 ) : la « compétence partagée » et l’« accord mixte » (ou, pour ce qui touche à la présente affaire, l’« action externe conjointe ») sont deux questions distinctes ( 66 ).

106.

Il se peut que l’Union jouisse d’une compétence externe exclusive, conformément à l’article 3, paragraphe 1 ou paragraphe 2, TFUE, dans la plupart des cas dans lesquels elle agit seule sur la scène internationale. L’existence d’une telle compétence exclusive ne constitue toutefois pas une condition sine qua non pour que l’Union seule – c’est-à-dire sans les États membres à ses côtés – puisse conclure des accords internationaux avec des États tiers ou agir dans des organismes internationaux.

107.

C’est en ce sens que la Cour a expressément rejeté, dans son récent arrêt COTIF, relatif aux transports internationaux ferroviaires, l’approche en vertu de laquelle il n’existerait pas de compétences externes de l’Union dans un domaine dans lequel les compétences sont partagées entre l’Union et ses États membres, à moins que ces compétences partagées soient devenues, par l’effet du mécanisme de l’article 3, paragraphe 2, TFUE (c’est-à-dire, en substance, en application de la jurisprudence AETR), des compétences exclusives ( 67 ). Il ressort en outre de ce même arrêt que l’Union peut conclure seule des accords internationaux même si ceux-ci s’inscrivent dans un domaine relevant de la compétence partagée, à condition que la majorité requise à cet effet puisse être réunie au sein du Conseil ( 68 ).

108.

Une action conjointe de l’Union et de ses États membres sur la scène internationale n’est nécessaire que si l’Union seule ne dispose pas de compétences, à caractère exclusif ou partagé, suffisantes pour agir seule en relation avec des États tiers ou des organismes internationaux. Ce n’est que dans la mesure où l’Union ne dispose pas de compétences propres suffisantes que la participation des États membres à ses côtés est requise sur le plan international ( 69 ).

109.

Cela n’était toutefois pas nécessaire en l’espèce : dans le présent cas de figure, l’Union disposait incontestablement, sur la base de ses facultés en matière de politique de l’environnement, de compétences propres suffisantes pour participer seule aux débats et à la prise de décision en ce qui concerne la création d’AMP en Antarctique dans le cadre de la CCAMLR. Même après avoir été interrogés à ce sujet, le Conseil et les parties intervenantes n’ont pas pu mentionner une seule mesure en relation avec ces AMP pour laquelle l’Union n’aurait pas disposé de la compétence requise en l’espèce.

110.

C’est donc à bon droit que la Commission soutient que, même si l’on considère que les décisions litigieuses relèvent des compétences partagées dans le domaine de la politique de l’environnement, il n’était pas nécessaire, en droit, que les documents litigieux et les positions litigieuses soient soumis à la CCAMLR conjointement au nom de l’Union et de ses États membres.

b) Exclusion de la participation volontaire de certains États membres

111.

Il reste à déterminer si, eu égard au recours aux compétences de l’Union en matière de politique environnementale, une action volontaire des États membres aux côtés de l’Union est possible dans le cadre de la CCAMLR. Toutefois, cela ne peut raisonnablement pas concerner tous les États membres, mais uniquement ceux d’entre eux qui sont eux-mêmes membres de la CCAMLR ( 70 ), car seuls ces derniers prennent part aux débats et à la prise de décision au sein de la CCAMLR.

112.

L’article 2, paragraphe 2, TFUE, qui décrit le mode de fonctionnement des compétences partagées entre l’Union et ses États membres, devrait constituer le point de départ des réflexions à ce sujet. Eu égard à son libellé, cette disposition s’applique non seulement aux activités législatives, mais aussi, de manière tout à fait générale, à l’adoption d’actes juridiquement contraignants, et elle peut donc être appliquée à des décisions dans le domaine de l’action extérieure de l’Union, telles que celles en cause en l’espèce.

113.

En vertu de l’article 2, paragraphe 2, TFUE, les compétences partagées sont caractérisées par le fait que les États membres ne peuvent exercer leur compétence que dans la mesure où l’Union n’a pas exercé la sienne (article 2, paragraphe 2, deuxième phrase, TFUE) ; les États membres peuvent exercer à nouveau leur compétence dans la mesure où l’Union a décidé de cesser d’exercer la sienne (article 2, paragraphe 2, troisième phrase, TFUE).

114.

Malgré les affirmations en sens contraire de certaines parties à la procédure à l’occasion de l’audience, il n’existe pas, en l’espèce, d’éléments objectifs et vérifiables indiquant que le Conseil ne souhaitait pas exercer les compétences existantes de l’Union en matière d’environnement ( 71 ). Bien au contraire : la décision litigieuse de 2015 autorise expressément la Commission, sur la base de la politique de l’environnement, à soumettre un document de réflexion à la CCAMLR, à l’occasion de sa 34e réunion annuelle de 2015, (aussi) au nom de l’Union. Sur la base, également, de la politique de l’environnement, la décision litigieuse de 2016 porte formellement adoption d’une position que l’Union doit défendre à l’occasion de la 35e réunion annuelle de la CCAMLR de 2016. Il ne peut donc tout simplement pas être affirmé que le Conseil n’aurait pas fait usage de la compétence de l’Union en matière d’environnement dans les deux décisions litigieuses.

115.

En l’espèce, il n’existe pas non plus d’éléments objectifs et vérifiables en ce sens que, dans les décisions litigieuses, le Conseil n’aurait exercé que partiellement les compétences de l’Union en matière d’environnement pour des raisons d’ordre politique. En l’absence d’obligation juridique d’agir, le Conseil aurait tout à fait pu décider, en l’espèce, que l’Union ne ferait pas entièrement usage de ses compétences dans le domaine de l’environnement. Toutefois, le Conseil a manifestement choisi une autre voie. Les décisions litigieuses avaient en effet chacune pour objet l’ensemble des mesures afférentes à la création des AMP en cause qui devaient faire l’objet des débats ou d’une décision dans le cadre des réunions annuelles de la CCAMLR de 2015 et 2016. Les décisions litigieuses ne font apparaître à aucun endroit que l’Union renoncerait à l’exercice de ses compétences en matière de politique de l’environnement en ce qui concerne une partie bien déterminée des mesures envisagées dans le cadre de la CCAMLR ( 72 ) et en laisserait la responsabilité aux États membres.

116.

Le choix du Conseil, dans les décisions litigieuses, de finalement se prononcer pour une action conjointe dans le cadre de la CCAMLR, au nom de l’Union et de ses États membres, nous semble imputable exclusivement au fait que le Conseil a tout simplement, et à tort, assimilé les compétences partagées et l’action conjointe ( 73 ), mais pas au fait qu’il manquait des compétences à l’Union pour des éléments concrets des mesures à débattre ou à décider dans le cadre de la CCAMLR ou que l’Union ne voulait délibérément pas exercer certains aspects de ses compétences.

117.

Dans ces conditions, il convient de partir du principe que l’Union non seulement disposait d’une compétence en matière de politique de l’environnement en ce qui concerne toutes les mesures devant être débattues ou décidées dans le cadre de la CCAMLR, mais a également exercé celle-ci pleinement et entièrement. En conséquence, conformément à l’article 2, paragraphe 2, deuxième phrase, TFUE, les États membres ne pouvaient pas exercer leurs propres compétences en ce qui concerne les mêmes aspects, fût-ce par une participation aux côtés de l’Union dans le cadre de la CCAMLR.

118.

Par ailleurs, ce constat n’est pas remis en question par l’article 191, paragraphe 4, TFUE.

119.

L’article 191, paragraphe 4, second alinéa, TFUE précise certes que la compétence des États membres pour négocier dans les instances internationales et conclure des accords internationaux n’est pas affectée. Toutefois, comme le met en évidence le libellé de cette disposition [« L’alinéa précédent ne préjuge pas de la compétence des États membres…» ( 74 )], les États membres ne se voient garantir une compétence externe en matière d’environnement qu’en ce qui concerne les aspects visés à l’article 191, paragraphe 4, premier alinéa, TFUE, c’est-à-dire les « modalités de la coopération » avec les organisations internationales compétentes et les pays tiers. La présente affaire ne concerne cependant pas cette question. En effet, les décisions litigieuses ont pour objet non pas les « modalités de la coopération » entre l’Union et la CCAMLR, mais des mesures concrètes de droit matériel en vue de la création d’AMP en Antarctique.

120.

L’article 191, paragraphe 4, second alinéa, TFUE ne fait apparaître aucune réserve générale de compétence plus étendue en faveur des États membres dans le domaine de l’environnement. Les compétences en matière d’environnement perdraient sinon leur caractère de compétences partagées entre l’Union et les États membres au sens de l’article 2, paragraphe 2, TFUE et de l’article 4, paragraphe 1, TFUE, lu en combinaison avec le paragraphe 2, sous e), de ce même article et deviendraient de simples compétences parallèles, qui peuvent être exercées à tout moment tant par l’Union que par les États membres – ou par les deux conjointement, le cas échéant. Cela ne serait toutefois pas compatible avec la volonté des auteurs des traités selon laquelle les principes de la jurisprudence AETR ne sont expressément pas affectés par l’article 191, paragraphe 4, second alinéa, TFUE (ancien article 130 R, paragraphe 4, second alinéa, CEE) ( 75 ), ce qui serait impossible dans le cas de figure de compétence parallèles.

121.

On pourrait tout au plus envisager que certains États membres souhaitent, sur la base de l’article 193 TFUE, se soumettre, au niveau international, à des normes environnementales plus strictes que l’Union et désirent, au regard de cet objectif, participer en leur propre nom aux débats et aux décisions d’organismes internationaux ( 76 ). À cet égard, il n’existe toutefois pas non plus d’éléments objectifs et vérifiables en l’espèce. Au contraire, il existait un consensus entre les institutions de l’Union et les États membres au sujet du contenu des mesures de création d’AMP envisagées dans le cadre de la CCAMLR

122.

Une participation volontaire de certains États membres aux côtés de l’Union sur la base de l’article 4, paragraphe 3, TFUE n’est pas non plus possible en l’espèce. Cette disposition précise certes que, notamment dans le domaine de la recherche, les États membres ne sont pas empêchés d’exercer leur compétence, même lorsque l’Union prend ses propres mesures. Toutefois, comme nous l’avons déjà expliqué ( 77 ), les débats et les mesures en vue de la création d’AMP dans le cadre de la CCAMLR, qui sont substantiellement en cause en l’espèce, ne relèvent pas du domaine de la recherche. Cela n’exclut évidemment pas le fait que les États membres puissent participer, seuls ou aux côtés de l’Union, à d’autres mesures devant être débattues ou adoptées dans le cadre de la CCAMLR, dont le centre de gravité se situe dans le domaine de la recherche.

123.

Enfin, il convient encore d’observer que certains États membres ont des intérêts territoriaux en Antarctique, en dehors du champ d’application des traités fondateurs de l’Union et des politiques de l’Union ( 78 ). Il n’est pas exclu qu’en vue de la protection de ces intérêts les États membres en question participent en leur nom propre, aux côtés de l’Union, aux débats et aux décisions dans le cadre de la CCAMLR, à condition que les intérêts respectifs soient concrètement indiqués. En l’espèce, il n’existe toutefois pas d’indices objectifs et vérifiables à cet égard. Les décisions litigieuses, qui laissaient à tous les États membres, et pas seulement à certains d’entre eux, la possibilité de participer à la CCAMLR aux côtés de l’Union, vont également manifestement au-delà de ce qui serait nécessaire aux fins de la protection des intérêts territoriaux susmentionnés.

5. Conclusion intermédiaire

124.

En fin de compte, le premier moyen de la Commission dans les affaires C‑626/15 et C‑659/16 doit entraîner l’annulation des décisions litigieuses dans la mesure où celles-ci prévoient que, dans le cadre la CCAMLR, l’Union soumettra non pas seule les documents de réflexion et les positions en cause, mais seulement de manière conjointe, au nom de l’Union et de ses États membres.

B.   Le second moyen : l’article 3, paragraphe 2, TFUE

125.

Par son second moyen, la Commission reproche au Conseil d’avoir méconnu la compétence externe exclusive de l’Union prévue à l’article 3, paragraphe 2, TFUE. Elle estime que les décisions litigieuses affectent des règles communes et en altèrent la portée au sens de l’article 3, paragraphe 2, in fine, TFUE, qui a codifié la jurisprudence AETR ( 79 ).

126.

Ce second moyen n’est invoqué qu’à titre subsidiaire. Étant donné que les considérations que nous avons exposées ci-dessus nous conduisent déjà à faire droit au premier moyen invoqué par la Commission aux fins de l’annulation des décisions litigieuses, ce n’est que par souci d’exhaustivité que nous examinerons brièvement le second moyen.

127.

D’une part, la Commission invoque le fait que les mesures de création d’AMP envisagées dans le cadre de la CCAMLR pourraient affecter la position pluriannuelle du Conseil de 2014 concernant la position à adopter par l’Union au sein de la CCAMLR ( 80 ).

128.

À ce sujet, il suffit d’observer que, eu égard, déjà, à son intitulé, cette position pluriannuelle ne vaut que pour les questions du domaine de la PCP. Toutefois, comme nous l’avons indiqué ( 81 ), les décisions litigieuses relèvent non pas de la PCP, mais de la politique de l’environnement, et une altération de la position pluriannuelle de 2014 est donc exclue d’emblée.

129.

D’autre part, la Commission invoque le fait que les mesures de création d’AMP envisagées dans le cadre de la CCAMLR pourraient porter atteinte au règlement (CE) no 600/2004 ( 82 ) ainsi qu’au règlement (CE) no 601/2004 ( 83 ).

130.

En effet, le premier de ces règlements prévoit des mesures techniques et le second des mesures de contrôle applicables aux activités de pêche dans la zone de la convention de Canberra. Il est donc manifeste que les éventuelles restrictions ou interdictions de pêche, qui, en tant qu’élément des AMP envisagées dans l’Antarctique, font l’objet des décisions litigieuses, pourraient conduire à une atteinte des règlements susmentionnés ou à une altération de leur portée. Il convient de rappeler qu’il ressort de la jurisprudence pertinente qu’il suffit, pour qu’il existe un tel risque d’atteinte ou d’altération de la portée, que les mesures à débattre et à adopter au niveau international relèvent du champ d’application des règles communes existantes au niveau de l’Union ( 84 ), sans qu’une contradiction de fond doive nécessairement exister entre ces mesures et ces règles ( 85 ).

131.

Il convient toutefois de prendre en considération le fait que, dans le cadre des décisions litigieuses, la réglementation de la pêche présente une importance secondaire et ne constitue qu’une part des mesures envisagées de la CCAMLR aux fins de la création d’AMP en Antarctique.

132.

Même si, en vertu de l’article 3, paragraphe 2, in fine, TFUE, l’Union devait ainsi disposer d’une compétence externe exclusive en ce qui concerne les mesures régies par les règlements no 600/2004 et no 601/2004, cette compétence exclusive ne pourrait servir de base juridique que ponctuellement, pour certains aspects des décisions litigieuses, et ne permettrait pas de fonder l’ensemble des mesures prévues par ces décisions.

133.

Par conséquent, au cas où le second moyen soulevé dans les affaires C‑626/15 et C‑659/16 serait déterminant, il conviendrait de le rejeter comme dépourvu de fondement.

C.   Le maintien des effets des décisions litigieuses

134.

Si la Cour prononce l’annulation partielle des décisions litigieuses, comme je l’ai proposé à l’issue de l’examen du premier moyen, la question se pose alors de savoir si les effets des parties annulées de ces décisions doivent être maintenus conformément à l’article 264, second alinéa, TFUE.

135.

La Commission observe à juste titre qu’une telle annulation partielle n’affecte les décisions litigieuses que dans la mesure où celles-ci prévoient une action commune de l’Union et de ses États membres dans le cadre de la CCAMLR. L’action de l’Union dans le cadre des 34e et 35e réunions annuelles de la CCAMLR ne se voit pas privée de base juridique et le contenu des documents de réflexion et des positions soumis à la CCAMLR par l’Union n’est pas non plus affecté.

136.

Toutefois, du point de vue du droit de l’Union, l’annulation partielle des décisions litigieuses prive de légitimité la participation des États membres, aux côtés de l’Union, aux 34e et 35e réunions annuelles de la CCAMLR. Comme certains États membres de l’Union ont effectivement participé à des décisions de la CCAMLR dans le cadre desdites réunions annuelles, et notamment à la décision de création d’une AMP dans la mer de Ross, des doutes pourraient se poser, sur le plan international, quant à la portée des obligations de droit international public prises, respectivement, par l’Union et par ses États membres.

137.

Dans ces conditions, afin d’éviter toute incertitude juridique, nous invitons la Cour à maintenir les effets des parties annulées des décisions litigieuses, conformément à l’article 264, second alinéa, TFUE.

D.   Les dépens

138.

Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure de la Cour de justice, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens s’il est conclu en ce sens. Il découle de la solution que nous proposons que le Conseil doit en fin de compte succomber dans les deux affaires et, étant donné que la Commission a conclu en ce sens dans ces affaires, le Conseil doit être condamné aux dépens dans les deux affaires. Toutefois, conformément à l’article 140, paragraphe 1, du règlement de procédure de la Cour de justice, les États membres qui sont intervenus aux litiges au soutien du Conseil supportent leurs propres dépens dans chacune des affaires dans lesquelles ils sont intervenus.

VII. Conclusion

139.

Au vu des considérations qui précèdent, nous proposons à la Cour de statuer comme suit :

1)

Dans l’affaire C‑626/15, la décision du Comité des représentants permanents du 11 septembre 2015 approuvant la soumission d’un document de réflexion concernant la création d’une aire marine protégée dans la mer de Weddell à l’occasion de la 34e réunion annuelle de la Commission pour la conservation de la faune et de la flore marines de l’Antarctique est annulée dans la mesure où elle prévoit que ce document de réflexion doit être déposé au nom de l’Union et de ses États membres au lieu de l’Union seule.

2)

Dans l’affaire C‑659/16, la décision du Conseil de l’Union européenne du 10 octobre 2016 concernant l’établissement de la position de l’Union pour la 35e réunion annuelle de la Commission pour la conservation de la faune et de la flore marines de l’Antarctique est annulée dans la mesure où elle prévoit que cette position doit être présentée au nom de l’Union et de ses États membres au lieu de l’Union seule.

3)

Les effets des éléments annulés des décisions litigieuses sont maintenus.

4)

Le Conseil de l’Union européenne est condamné, dans les deux affaires, à supporter ses propres dépens et ceux exposés par la Commission européenne.

5)

Le Royaume de Belgique, la République fédérale d’Allemagne, la République hellénique, le Royaume d’Espagne, la République française, le Grand-Duché de Luxembourg, le Royaume des Pays-Bas, la République portugaise, la République de Finlande, le Royaume de Suède ainsi que le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord supportent leurs propres dépens dans chacune des affaires dans lesquelles ils sont intervenus.


( 1 ) Langue originale : l’allemand.

( 2 ) La jurisprudence AETR (accord européen sur les transports routiers) trouve ses origines dans l’arrêt du 31 mars 1971, Commission/Conseil (AETR, 22/70, EU:C:1971:32, points 15 à 19) ; une synthèse plus récente peut être trouvée dans l’avis 1/03 (nouvelle convention de Lugano), du 7 février 2006 (EU:C:2006:81, points 114 à 133).

( 3 ) Le contenu de cette décision est repris dans le compte rendu sommaire du 23 septembre 2015 de la 2554e réunion du Coreper (document du Conseil 11837/15, point 65, p. 19 et 20, et document du Conseil 11644/1/15/REV).

( 4 ) Cette décision a été adoptée sur la base d’une note point « I/A » (document du Conseil 12523/16). Le contenu de la position à défendre par l’Union résulte du document du Conseil 12445/16.

( 5 ) Règlement du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2013 relatif à la politique commune de la pêche, modifiant les règlements (CE) no 1954/2003 et (CE) no 1224/2009 du Conseil et abrogeant les règlements (CE) no 2371/2002 et (CE) no 639/2004 du Conseil et la décision 2004/585/CE du Conseil (JO 2013, L 354, p. 22).

( 6 ) Approuvée au nom de la Communauté économique européenne par la décision du Conseil 81/691/CEE, du 4 septembre 1981, concernant la conclusion de la convention sur la conservation de la faune et la flore marines de l’Antarctique (JO 1981, L 252, p. 26).

( 7 ) Il s’agit du Royaume de Belgique, de la République de Bulgarie, de la République fédérale d’Allemagne, de la République hellénique, du Royaume d’Espagne, de la République française, de la République italienne, du Royaume des Pays-Bas, de la République de Pologne, de la République de Finlande, du Royaume de Suède et du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord.

( 8 ) Il s’agit du Royaume de Belgique, de la République fédérale d’Allemagne, du Royaume d’Espagne, de la République française, de la République italienne, de la République de Pologne, du Royaume de Suède et du Royaume-Uni.

( 9 ) Il s’agit du Royaume de Belgique, de la République française et du Royaume-Uni.

( 10 ) Il s’agit de la République de Bulgarie, de la République tchèque, de la République fédérale d’Allemagne, du Royaume d’Espagne, de la République italienne, du Royaume des Pays-Bas, de la République de Pologne, de la République de Finlande et du Royaume de Suède.

( 11 ) Il s’agit du Royaume de Danemark, de la République d’Estonie, de la République hellénique, de la Hongrie, de la République d’Autriche, de la République portugaise et de la République slovaque.

( 12 ) Décision du Conseil, du 11 juin 2014, concernant la position à adopter, au nom de l’Union européenne, au sein de la Commission pour la conservation de la faune et de la flore marines de l’Antarctique (CCAMLR) (document du Conseil 10840/14). La « procédure simplifiée » est établie à l’annexe II de cette décision.

( 13 ) La mer de Weddell a été baptisée du nom de son découvreur britannique, James Weddell, et elle couvre une superficie de plus de 2,5 millions de km2, avec une profondeur pouvant atteindre 5000 m.

( 14 ) En vertu de l’article XIV de la convention de Canberra, le comité scientifique est un organe consultatif placé auprès de la CCAMLR.

( 15 ) Point 24 des présentes conclusions.

( 16 ) La mer de Ross a été baptisée du nom de son découvreur britannique, James Clark Ross, et elle couvre une superficie d’environ 1,55 million de km2, avec une profondeur pouvant atteindre 1200 m.

( 17 ) Par souci de simplicité, nous emploierons la notion d’« AMP » pour faire référence à toutes ces zones.

( 18 ) Le 12 octobre 2016, la Commission a adapté en ce sens les documents soumis au secrétariat de la CCAMLR.

( 19 ) La République fédérale d’Allemagne, la République hellénique, le Royaume d’Espagne, la République française, la République de Finlande, le Royaume de Suède ainsi que le Royaume-Uni concluent à ce que le recours de la Commission soit rejeté comme étant irrecevable et, subsidiairement, comme étant dépourvu de fondement. Le Royaume des Pays-Bas et la République portugaise demandent que le recours de la Commission soit rejeté comme étant non fondé.

( 20 ) La République hellénique, la République de Finlande, la République portugaise, le Royaume de Suède ainsi que le Royaume-Uni n’ont pas pris position sur la question des dépens.

( 21 ) La République de Finlande, la République portugaise, le Royaume de Suède ainsi que le Royaume-Uni n’ont pas pris position sur la question des dépens.

( 22 ) Arrêt du 19 mars 1996, Commission/Conseil (FAO, C‑25/94, EU:C:1996:114, point 26).

( 23 ) Arrêt du 19 mars 1996, Commission/Conseil (FAO, C‑25/94, EU:C:1996:114, point 27).

( 24 ) En ce sens, voir arrêt du 11 novembre 1981, IBM/Commission (60/81, EU:C:1981:264, point 11), en ce qui concerne la procédure administrative de la Commission.

( 25 ) En ce sens, voir arrêts du 11 novembre 1981, IBM/Commission (60/81, EU:C:1981:264, point 10), et du 17 juillet 2008, Athinaïki Techniki/Commission (C‑521/06 P, EU:C:2008:422, point 42), en ce qui concerne, dans les deux cas, la procédure administrative de la Commission.

( 26 ) Arrêts du 31 mars 1971, Commission/Conseil (AETR, 22/70, EU:C:1971:32, point 42) ; du 2 mars 1994, Parlement/Conseil (Règlement financier ACP, C‑316/91, EU:C:1994:76, point 8) ; du 19 mars 1996, Commission/Conseil (FAO, C‑25/94, EU:C:1996:114, point 29) ; du 13 octobre 2011, Deutsche Post et Allemagne/Commission (C‑463/10 P et C‑475/10 P, EU:C:2011:656, point 36), et du 25 octobre 2017, Slovaquie/Commission (Ressources propres, C‑593/15 P et C‑594/15 P, EU:C:2017:800, point 46).

( 27 ) Arrêts du 17 juillet 2008, Athinaïki Techniki/Commission (C‑521/06 P, EU:C:2008:422, point 42), et du 25 octobre 2017, Slovaquie/Commission (Ressources propres, C‑593/15 P et C‑594/15 P, EU:C:2017:800, point 47).

( 28 ) Arrêt du 25 octobre 2017, Slovaquie/Commission (Ressources propres, C‑593/15 P et C‑594/15 P, EU:C:2017:800, point 47).

( 29 ) Arrêts du 17 juillet 2008, Athinaïki Techniki/Commission (C‑521/06 P, EU:C:2008:422, point 42).

( 30 ) Voir point 23 des présentes conclusions.

( 31 ) Pour ce qui est de la délimitation de ces deux compétences du Conseil et de la Commission, voir arrêt du 28 juillet 2016, Conseil/Commission (Contribution financière de la Confédération suisse, C‑660/13, EU:C:2016:616).

( 32 ) Voir, en ce sens, arrêt du 7 octobre 2014, Allemagne/Conseil (Vigne et vin, C‑399/12, EU:C:2014:2258, point 63), en vertu duquel des recommandations d’une instance internationale relèvent du champ d’application de l’article 218, paragraphe 9, TFUE si elles ont vocation à influencer le contenu de la réglementation que doit adopter le législateur de l’Union.

( 33 ) Voir, en ce sens, arrêt du 7 octobre 2014, Allemagne/Conseil (Vigne et vin, C‑399/12, EU:C:2014:2258, point 65), en vertu duquel l’article 218, paragraphe 9, TFUE s’applique « indépendamment du point de savoir si les actes concernés […] seront, en définitive, effectivement soumis au vote de l’instance compétente ».

( 34 ) Voir, en ce sens, arrêt du 19 mars 1996, Commission/Conseil (FAO, C‑25/94, EU:C:1996:114, points 35 et 37).

( 35 ) Avis 2/94 (adhésion de la Communauté à la CEDH [convention européenne des droits de l’homme]), du 28 mars 1996 (EU:C:1996:140, point 24), et arrêt du 5 décembre 2017, Allemagne/Conseil (COTIF, C‑600/14, EU:C:2017:935, point 44 in fine).

( 36 ) Avis 2/00 (protocole de Cartagena sur la prévention des risques biotechnologiques), du 6 décembre 2001 (EU:C:2001:664, point 5), ainsi qu’arrêts du 14 juin 2016, Parlement/Conseil (Tanzanie, C‑263/14, EU:C:2016:435, point 42), et du 5 décembre 2017, Allemagne/Conseil (COTIF, C‑600/14, EU:C:2017:935, point 80).

( 37 ) À cet égard, voir, également, arrêts du 14 juillet 1976, Kramer e.a. (3/76, 4/76 et 6/76, EU:C:1976:114, point 31), et du 24 novembre 1993, Mondiet (C‑405/92, EU:C:1993:906, point 12).

( 38 ) Voir jurisprudence mentionnée à la note de bas de page 37. Voir, également, arrêt du 5 mai 1981, Commission/Royaume-Uni (Mesures de conservation dans le domaine de la pêche maritime, 804/79, EU:C:1981:93).

( 39 ) En vertu de l’article 3, paragraphe 1, sous d), TFUE, la compétence exclusive de l’Union dans le domaine de la conservation des ressources biologiques de la mer ne s’applique que « dans le cadre de la [PCP] ». En écho à cette disposition, l’article 4, paragraphe 1, TFUE, lu en combinaison avec l’article 4, paragraphe 2, sous d), met en évidence l’existence d’une compétence partagée entre l’Union et les États membres dans le domaine de l’agriculture et de la pêche, « à l’exclusion de la conservation des ressources biologiques de la mer ».

( 40 ) Arrêts du 11 juin 1991, Commission/Conseil (Dioxyde de titane, C‑300/89, EU:C:1991:244, point 10), et du 14 juin 2016, Parlement/Conseil (Tanzanie, C‑263/14, EU:C:2016:435, point 43), ainsi qu’avis 1/15 (accord PNR [données des dossiers passagers] UE-Canada), du 26 juillet 2017 (EU:C:2017:592, point 76).

( 41 ) Arrêts du 26 septembre 2013, Royaume-Uni/Conseil (Extension de règles de droit social à l’EEE, C‑431/11, EU:C:2013:589, point 48) ; du 27 février 2014, Royaume-Uni/Conseil (Extension de règles de droit social à la Confédération suisse, C‑656/11, EU:C:2014:97, point 50), et du 18 décembre 2014, Royaume-Uni/Conseil (Extension de règles de droit social à la Turquie, C‑81/13, EU:C:2014:2449, point 38).

( 42 ) En ce sens, voir notamment avis 2/00 (protocole de Cartagena sur la prévention des risques biotechnologiques), du 6 décembre 2001 (EU:C:2001:664, point 22).

( 43 ) Arrêts du 10 janvier 2006, Commission/Conseil (Convention de Rotterdam, C‑94/03, EU:C:2006:2, point 50) ; du 24 juin 2014, Parlement/Conseil (Maurice, C‑658/11, EU:C:2014:2025, point 48), et du 18 décembre 2014, Royaume-Uni/Conseil (Extension de règles de droit social à la Turquie, C‑81/13, EU:C:2014:2449, point 36).

( 44 ) Arrêt du 23 février 1988, Royaume-Uni/Conseil (Substances à effet hormonal, 68/86, EU:C:1988:85, point 24) ; avis 1/94 [accords annexés à l’accord OMC (Organisation mondiale du commerce)], du 15 novembre 1994 (EU:C:1994:384, point 52), et arrêt du 25 octobre 2017, Commission/Conseil (CMR-15) (C‑687/15, EU:C:2017:803, point 42).

( 45 ) La jurisprudence n’est pas tout à fait uniforme en ce qui concerne la délimitation précise des compétences externes de l’Union dans le domaine de la politique de l’environnement. Dans l’avis 2/00 (protocole de Cartagena sur la prévention des risques biotechnologiques), du 6 décembre 2001 (EU:C:2001:664, point 44), la Cour a fait appel à l’article 175 CE, qui correspond à l’actuel article 192 TFUE. En revanche, dans son récent arrêt du 5 décembre 2017, Allemagne/Conseil (COTIF, C‑600/14, EU:C:2017:935, point 65), la Cour a jugé que l’Union « est investie […] d’une compétence externe explicite, en vertu de l’article 191, paragraphe 1, quatrième tiret, TFUE » dans le domaine de l’environnement. Dans l’arrêt du 30 mai 2006, Commission/Irlande (Usine MOX de Sellafield, C‑459/03, EU:C:2006:345, points 90 à 92), la Cour reconnaît expressément l’existence d’une compétence externe de l’Union en matière de protection du milieu marin, qui résulte de la lecture conjointe de l’article 175 CE et du dernier tiret de l’article 174, paragraphe 1, CE (actuels article 192 et article 191, paragraphe 1, dernier tiret, TFUE). Toutefois, en l’espèce, il n’y a pas lieu, en fin de compte, de déterminer si c’est l’article 191 TFUE, l’article 192 TFUE, ou une combinaison de ces deux articles qui doit s’appliquer, car la compétence est partagée entre l’Union et ses États membres dans chaque cas de figure, conformément à l’article 4, paragraphe 1, TFUE, lu en combinaison avec l’article 4, paragraphe 2, sous e), TFUE.

( 46 ) Avis 2/00 (protocole de Cartagena sur la prévention des risques biotechnologiques), du 6 décembre 2001 (EU:C:2001:664, point 23), ainsi qu’arrêts du 11 juin 2014, Commission/Conseil (Accord-cadre avec les Philippines, C‑377/12, EU:C:2014:1903, point 34), et du 14 juin 2016, Parlement/Conseil (Tanzanie, C‑263/14, EU:C:2016:435, point 44).

( 47 ) Voir nos conclusions dans l’affaire Commission/Conseil (Vietnam, C‑13/07, EU:C:2009:190, point 113).

( 48 ) Voir, à titre d’exemple, considérant 14 du projet de mesure de conservation de la CCAMLR concernant la création d’une AMP dans la mer de Weddell, joint en annexe A.2-B à la requête dans l’affaire C‑659/16 : « la recherche et la surveillance en relation avec les objectifs de l’AMP dans la mer de Weddell font partie intégrante de la gestion de cette AMP ». En outre, les dispositions S 11 et S 12 de la section 3 de ce projet définissent des objectifs spécifiques de recherche et les dispositions de sa section 7 décrivent en détail les modalités d’autorisation et d’exécution des activités de recherche.

( 49 ) Voir, notamment, arrêt du 24 novembre 1993, Mondiet (C‑405/92, EU:C:1993:906), ainsi que les conclusions de l’avocat général Wahl dans l’affaire pendante Deutscher Naturschutzring, Dachverband der deutschen Natur- und Umweltschutzverbände e.V. (C‑683/16, EU:C:2018:38).

( 50 ) Arrêts du 29 mars 1990, Grèce/Conseil (Tchernobyl, C‑62/88, EU:C:1990:153, point 20), et du 24 novembre 1993, Mondiet (C‑405/92, EU:C:1993:906, point 27).

( 51 ) Arrêts du 29 mars 1990, Grèce/Conseil (Tchernobyl, C‑62/88, EU:C:1990:153, point 19), et du 24 novembre 1993, Mondiet (C‑405/92, EU:C:1993:906, point 26).

( 52 ) En ce qui concerne spécifiquement la délimitation entre la politique commerciale commune et la politique de l’environnement, voir arrêt du 29 mars 1990, Grèce/Conseil (C‑62/88, EU:C:1990:153) ; avis 2/00 (protocole de Cartagena sur la prévention des risques biotechnologiques), du 6 décembre 2001 (EU:C:2001:664), ainsi qu’arrêts du 12 décembre 2002, Commission/Conseil (Energy Star, C‑281/01, EU:C:2002:761), et du 10 janvier 2006, Commission/Conseil (Convention de Rotterdam, C‑94/03, EU:C:2006:2).

( 53 ) Arrêts du 18 juillet 2013, Daiichi Sankyo et Sanofi-Aventis Deutschland (C‑414/11, EU:C:2013:520, point 51), et du 22 octobre 2013, Commission/Conseil (Services à accès conditionnel, C‑137/12, EU:C:2013:675, point 57) ; avis 2/15 (accord de libre-échange avec Singapour), du 16 mai 2017 (EU:C:2017:376, point 36), ainsi qu’arrêt du 25 octobre 2017, Commission/Conseil (Arrangement de Lisbonne révisé, C‑389/15, EU:C:2017:798, point 49).

( 54 ) Au sujet de l’importance du but, du contenu et du contexte de l’acte en cause, voir point 76 des présentes conclusions.

( 55 ) Voir, par exemple, considérant 8 du projet de mesure de conservation de la CCAMLR concernant la création d’une AMP dans la mer de Weddell (précité à la note de bas de page 48), qui exprime le souhait de « garantir que les zones vulnérables face aux effets du changement climatique et aux impacts des activités humaines soient protégées en reconnaissance de leur importance scientifique et environnementale globale et régionale ». Le considérant 9 de ce même projet souligne en outre que « la mer de Weddell dispose d’écosystèmes en grande partie intacts ainsi que d’une faune et d’une flore marine diversifiées, et elle présente une importance cruciale pour la circulation océanique globale ainsi que pour le climat de la planète et constitue également une zone privilégiée pour l’étude des effets sur les écosystèmes, de la résilience et de la capacité d’adaptation aux changements climatiques et à l’acidification de l’océan, à l’abri des impacts des activités humaines telles que la pêche ». Dans le cadre des dispositions G 1 à G 6 sur les objectifs généraux de l’AMP, qui figurent dans la section 3 de ce projet, il est de nouveau essentiellement question de protection des écosystèmes, de la biodiversité, des habitats ainsi que des effets du changement climatique.

( 56 ) Voir, par exemple, section 5 du projet de mesure de conservation de la CCAMLR concernant la création d’une AMP dans la mer de Weddell (précité à la note de bas de page 48), qui énumère les « activités restreintes, prohibées et contrôlées », et dont la disposition no 4 prévoit la règle générale suivante : « les activités de pêche sont interdites ».

( 57 ) Voir, par exemple, la disposition no 5 de la section 5 du projet de mesure de conservation de la CCAMLR concernant la création d’une AMP dans la mer de Weddell (précité à la note de bas de page 48) : « Le rejet ou le dépôt de déchets ou d’autres matières et le déversement d’eaux usées […] sont interdits ».

( 58 ) Voir, par exemple, la section 2.3 du projet de « plan de gestion de l’AMP de la mer Weddell », qui se trouve en annexe du projet de mesure de conservation de la CCAMLR concernant la création d’une AMP dans la mer de Weddell (précité à la note de bas de page 48) : « La zone d’étude en matière de pêche comprend des zones de pêche et des zones de référence non ouvertes à la pêche en vue d’améliorer la compréhension des effets sur l’écosystème de pêche à la palangre […] ».

( 59 ) Protocole au traité sur l’Antarctique relatif à la protection de l’environnement, signé à Madrid le 4 octobre 1991.

( 60 ) Voir, également, deuxième considérant de la convention de Canberra, qui met en relief la concentration de la faune et de la flore dans les eaux de l’Antarctique, et l’intérêt accru que soulèvent les possibilités offertes par l’utilisation de ces ressources comme source de protéines.

( 61 ) À cet égard, voir, de nouveau, préambule de la convention de Canberra, qui, d’une part, souligne en bonne place « l’importance de la protection de l’environnement et de la préservation de l’intégrité de l’écosystème des mers qui entourent l’Antarctique » (premier considérant) et qui, d’autre part, met en exergue « les responsabilités particulières des Parties consultatives au Traité sur l’Antarctique quant à la protection et à la préservation du milieu antarctique, et en particulier les responsabilités que leur confère le paragraphe 1(f) de l’article IX du Traité sur l’Antarctique en matière de protection et de conservation de la faune et [de] la flore dans l’Antarctique » (sixième considérant).

( 62 ) À cet égard, voir conclusions de l’avocat général Wahl dans l’affaire Deutscher Naturschutzring, Dachverband der deutschen Natur- und Umweltschutzverbände e.V. (C‑683/16, EU:C:2018:38).

( 63 ) Voir, en particulier, conclusions de l’avocat général Léger dans l’affaire Parlement/Gutiérrez de Quijano y Lloréns (C‑252/96 P, EU:C:1998:157, point 36).

( 64 ) Voir, en ce sens, ordonnance du 27 septembre 2004, UER/M6 e.a. (C‑470/02 P, EU:C:2004:565, point 69), et arrêt du 21 septembre 2010, Suède e.a./API et Commission (C‑514/07 P, C‑528/07 P et C‑532/07 P, EU:C:2010:541, point 65).

( 65 ) Conclusions de l’avocat général Szpunar dans l’affaire Allemagne/Conseil (COTIF, C‑600/14, EU:C:2017:296, point 83 et intitulé qui le précède).

( 66 ) Voir, en ce sens, arrêt du 30 mai 2006, Commission/Irlande (Usine MOX de Sellafield, C‑459/03, EU:C:2006:345, point 93).

( 67 ) Arrêt du 5 décembre 2017, Allemagne/Conseil (COTIF, C‑600/14, EU:C:2017:935, point 61).

( 68 ) À cet égard, voir arrêt du 5 décembre 2017, Allemagne/Conseil (COTIF, C‑600/14, EU:C:2017:935, point 68). La Cour y relativise les considérations exposées peu auparavant dans son avis 2/15 (accord de libre-échange avec Singapour), du 16 mai 2017 (EU:C:2017:376, point 244, lu en combinaison avec le point 243), dans lequel elle partait encore du principe qu’une obligation d’un accord international relevant d’une compétence partagée entre l’Union et les États membres « ne saurait être approuvée par l’Union seule ».

( 69 ) Tel était par exemple le cas lors de la conclusion de certains aspects réglementaires des accords annexés à l’accord OMC, pour lesquels la politique commerciale commune, telle que définie à l’époque, ne constituait pas une base juridique suffisante [avis 1/94 (accords annexés à l’accord OMC), du 15 novembre 1994 (EU:C:1994:384)]. Il en va également ainsi en ce qui concerne l’actuel projet d’accord de libre-échange avec Singapour [avis 2/15 (accord de libre-échange avec Singapour), du 16 mai 2017 (EU:C:2017:376)].

( 70 ) Pour plus de détails, voir point 18 des présentes conclusions.

( 71 ) Il découle des arrêts du 30 mai 2006, Commission/Irlande (Usine MOX de Sellafield, C‑459/03, EU:C:2006:345, notamment point 96), et du 5 décembre 2017, Allemagne/Conseil (COTIF, C‑600/14, EU:C:2017:935, point 68, seconde phrase), que l’Union peut décider, au cas par cas, de ne pas exercer pleinement, mais seulement partiellement, les pouvoirs dont elle dispose dans un domaine relevant des compétences partagées, afin de permettre aux États membres d’agir de manière autonome.

( 72 ) On pourrait par exemple penser à la protection de certaines espèces animales expressément visées ou à la mise en œuvre de certaines mesures en ce qui concerne la recherche sur le recul des plates-formes glaciaires.

( 73 ) Voir points 104 à 110 des présentes conclusions.

( 74 ) Nous soulignons.

( 75 ) À cet égard voir, la déclaration no 10 annexée à l’acte final de la conférence intergouvernementale, qui a adopté le traité de Maastricht signé le 7 février 1992 (Déclaration relative aux articles 109, 130 R et 130 Y du traité instituant la Communauté européenne, JO 1992, C 191, p. 100) : « La Conférence considère que les dispositions de l’article 109 paragraphe 5, de l’article 130 R, paragraphe 4, deuxième alinéa, et de l’article 130 Y n’affectent pas les principes résultant de l’arrêt rendu par la Cour de justice dans l’affaire AETR ».

( 76 ) En ce qui concerne des AMP telles que celles en cause en l’espèce, il est par exemple envisageable que certains États membres souhaitent s’engager, en droit international public, à renoncer à toute activité humaine dans les eaux de l’Antarctique, au lieu de se contenter des limitations envisagées par l’Union.

( 77 ) Voir ci-dessus, points 84 à 87 des présentes conclusions.

( 78 ) À savoir la République française et le Royaume-Uni.

( 79 ) Arrêts du 4 septembre 2014, Commission/Conseil (Protection des droits des organismes de radiodiffusion, C‑114/12, EU:C:2014:2151, points 64 à 67), et du 26 novembre 2014, Green Network (C‑66/13, EU:C:2014:2399, points 27 et 28).

( 80 ) Voir point 23 des présentes conclusions.

( 81 ) Voir notamment points 88 à 98 des présentes conclusions.

( 82 ) Règlement (CE) du Conseil du 22 mars 2004 établissant certaines mesures techniques applicables aux activités de pêche dans la zone de la convention sur la conservation de la faune et de la flore marines de l’Antarctique (JO 2004, L 97, p. 1).

( 83 ) Règlement (CE) du Conseil du 22 mars 2004 fixant certaines mesures de contrôle applicables aux activités de pêche dans la zone de la convention sur la conservation de la faune et de la flore marines de l’Antarctique, et abrogeant les règlements (CEE) no 3943/90, (CE) no 66/98 et (CE) no 1721/1999 (JO 2004, L 97, p. 16).

( 84 ) À cet égard, voir avis 1/13 (adhésion d’États tiers à la convention de La Haye), du 14 octobre 2014 (EU:C:2014:2303, point 71) ; arrêt du 26 novembre 2014, Green Network (C‑66/13, EU:C:2014:2399, point 29) ; ainsi qu’avis 3/15 (traité de Marrakech sur l’accès aux œuvres publiées), du 14 février 2017 (EU:C:2017:114, point 105), et 2/15 (accord de libre-échange avec Singapour), du 16 mai 2017 (EU:C:2017:376, point 181).

( 85 ) À cet égard, voir avis 2/91 [convention no 170 de l’OIT (Organisation internationale du travail)], du 19 mars 1993 (EU:C:1993:106, points 25 et 26) ; 1/13 (adhésion d’États tiers à la convention de La Haye), du 14 octobre 2014 (EU:C:2014:2303, point 86) ; 3/15 (traité de Marrakech sur l’accès aux œuvres publiées), du 14 février 2017 (EU:C:2017:114, point 113), et 2/15 (accord de libre-échange avec Singapour), du 16 mai 2017 (EU:C:2017:376, point 201).