CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

MME ELEANOR SHARPSTON

présentées le 19 janvier 2017 ( 1 )

Affaire C‑436/15

Lietuvos Respublikos aplinkos ministerijos Aplinkos projektų valdymo agentūra

contre

UAB « Alytaus regiono atliekų tvarkymo centras »

[demande de décision préjudicielle du Lietuvos vyriausiasis administracinis teismas (Cour suprême administrative, Lituanie)]

«Protection des intérêts financiers de l’Union européenne — Irrégularités dans le cas de paiements issus des fonds de l’Union fondés sur des instruments structurels destinés aux États candidats à l’adhésion — Article 3, paragraphe 1, du règlement (CE, Euratom) no 2988/95 — Délai de prescription — Notion de “programme pluriannuel” — Notion d’irrégularités continues ou répétées»

1. 

La présente demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 3, paragraphe 1, du règlement (CE, Euratom) no 2988/95 du Conseil relatif à la protection des intérêts financiers des Communautés européennes ( 2 ). La juridiction de renvoi sollicite des orientations, notamment, quant au sens de l’expression « programme pluriannuel » visée à l’article 3, paragraphe 1, deuxième alinéa, de ce règlement. Elle souhaite vérifier si le financement d’un projet de construction d’un système de traitement des déchets pour la région d’Alytus relève de cette notion et, dans l’affirmative, comment le délai prévu par cette disposition doit s’appliquer.

2. 

Sur le fondement des règles régissant les concours au titre du Fonds de cohésion et des mesures adoptées pour apporter un appui aux pays candidats, la Commission européenne a adopté une décision approuvant un soutien financier à ce projet antérieurement à l’adhésion de la Lituanie à l’Union européenne. La demande de décision préjudicielle a été présentée dans le cadre d’un litige entre la Lietuvos Respublikos aplinkos ministerijos Aplinkos projektų valdymo agentūra (l’agence de gestion des projets environnementaux auprès du ministère de l’environnement lituanien, ci-après l’« AGPE ») et l’UAB « Alytaus regiono atliekų tvarkymo centras » (centre de traitement des déchets de la région d’Alytus, l’entreprise privée créée pour gérer le centre de traitement des déchets, ci-après l’« entreprise »).

Cadre juridique

Le traité sur l’Union européenne

3.

Une des missions de la Commission au titre de l’article 17, paragraphe 1, TUE est d’exécuter le budget de l’Union et de gérer les programmes.

Le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne

4.

L’article 312, paragraphe 1, TFUE dispose, notamment, que le budget annuel de l’Union respecte le cadre financier pluriannuel qui prévoit les montants maximum annuels (les « plafonds ») qui peuvent être dépensés pour différentes politiques (« rubriques ») lors de chaque exercice d’une période donnée (actuellement de 2014 à 2020). Le Fonds de cohésion créé au titre de l’article 177 TFUE contribue financièrement à la réalisation de projets dans le domaine de l’environnement et dans celui des réseaux transeuropéens en matière d’infrastructures des transports ( 3 ).

Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne

5.

L’article 41 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne ( 4 ) garantit, notamment, le droit de toute personne de voir ses affaires traitées dans un délai raisonnable par les institutions de l’Union.

Le règlement no 2988/95

6.

L’objectif principal du règlement no 2988/95 est de protéger les intérêts financiers de l’Union tels qu’énoncés dans le budget général de l’Union exécuté par la Commission conformément au principe de bonne gestion financière ( 5 ). Dans ce cadre, les considérants indiquent que : i) plus de la moitié des dépenses de l’Union est versée aux bénéficiaires par l’intermédiaire des États membres ; ii) il importe de combattre dans tous les domaines les atteintes aux intérêts financiers de l’Union ; et que iii) sur le fondement du droit de l’Union, la Commission et les États membres doivent contrôler l’utilisation des moyens budgétaires de l’Union aux fins prévues ( 6 ).

7.

L’article 1er, paragraphe 1, prévoit que, aux fins de la protection des intérêts financiers de l’Union européenne, une réglementation générale relative à des contrôles homogènes et à des mesures et des sanctions administratives portant sur des irrégularités au regard du droit de l’Union est adoptée. L’article 1er, paragraphe 2, définit une « irrégularité » comme « toute violation d’une disposition du droit [de l’Union] résultant d’un acte ou d’une omission d’un opérateur économique qui a, ou aurait, pour effet de porter préjudice au budget général [de l’Union] ou à des budgets gérés par [celle]-ci, soit par la diminution ou la suppression de recettes provenant des ressources propres perçues directement pour le compte [de l’Union], soit par une dépense indue ».

8.

L’article 3, paragraphe 1, dispose :

« Le délai de prescription des poursuites est de quatre ans à partir de la réalisation de l’irrégularité visée à l’article 1er, paragraphe 1. Toutefois, les réglementations sectorielles peuvent prévoir un délai inférieur qui ne saurait aller en deçà de trois ans.

Pour les irrégularités continues ou répétées, le délai de prescription court à compter du jour où l’irrégularité a pris fin. Pour les programmes pluriannuels, le délai de prescription s’étend en tout cas jusqu’à la clôture définitive du programme.

La prescription des poursuites est interrompue par tout acte, porté à la connaissance de la personne en cause, émanant de l’autorité compétente et visant à l’instruction ou à la poursuite de l’irrégularité. Le délai de prescription court à nouveau à partir de chaque acte interruptif.

Toutefois, la prescription est acquise au plus tard le jour où un délai égal au double du délai de prescription arrive à expiration sans que l’autorité compétente ait prononcé une sanction, sauf dans les cas où la procédure administrative a été suspendue conformément à l’article 6, paragraphe 1 [ ( 7 )]. »

9.

L’article 3, paragraphe 3, autorise les États membres à conserver la possibilité d’appliquer un délai de prescription plus long que celui de quatre ans visé à l’article 3, paragraphe 1.

Le Fonds de cohésion

10.

En décembre 2001, lorsque la Commission avait adopté une décision approuvant un soutien financier au projet de création d’un système de gestion des déchets de la région d’Alytus ( 8 ), les règles du règlement (CE) no 1164/94 du Conseil instituant le Fonds de cohésion ( 9 ) étaient en vigueur. L’aide financière aux pays candidats était régie par le règlement (CE) no 1267/1999 du Conseil établissant un instrument structurel de préadhésion ( 10 ).

Le règlement no 1164/94

11.

Le règlement (CE) no 1164/94 visait, notamment, à assurer, dans l’intérêt d’une bonne gestion du Fonds de cohésion (ci-après le « Fonds »), le recours à des méthodes efficaces d’évaluation, de suivi et de contrôle concernant les interventions communautaires, en prévoyant les mesures à prendre en cas d’irrégularité ou de non-satisfaction de l’une des conditions prévues lors de l’approbation du concours dudit Fonds ( 11 ).

12.

L’article 1er, paragraphe 1, de ce règlement a créé le Fonds. L’article 1er, paragraphe 3, a permis au Fonds de contribuer au financement de projets, de stades de projet ou de groupes de projets liés à une stratégie visible qui forment un ensemble cohérent. Conformément à l’article 2, paragraphe 1, le Fonds devait fournir une contribution financière à des projets « […] dans le domaine de l’environnement et dans celui des réseaux transeuropéens d’infrastructures de transport dans les États membres […] ». La Lituanie est devenue éligible à un concours du Fonds à compter de la date de son adhésion à l’Union européenne (le 1er mai 2004) jusqu’au 31 décembre 2006, sur le fondement l’article 2, paragraphe 5 ( 12 ).

13.

L’article 3 était intitulé « Actions éligibles ». Sur le fondement de l’article 3, paragraphe 1, des projets environnementaux qui ont contribué à la réalisation des objectifs du traité, notamment des projets s’inscrivant dans le cadre des priorités attribuées à la politique communautaire de l’environnement en vertu du cinquième programme de politique et d’action en matière d’environnement et de développement durable, constituaient des mesures à l’égard desquelles le Fonds pouvait fournir une aide (des « mesures du Fonds de cohésion »). Une aide financière pouvait également être allouée pour des études préparatoires liées aux projets éligibles et pour des mesures d’appui technique, comme des campagnes de publicité et d’information, en vertu de l’article 3, paragraphe 2.

14.

En vertu de l’article 4, des ressources financières devaient être allouées au Fonds pour la période de 2000 à 2006. Les projets devaient être approuvés conformément aux règles prévues à l’article 10. Les projets à financer au titre du Fonds devaient être arrêtés par la Commission en accord avec l’État membre bénéficiaire ayant présenté la demande d’aide, comme le prévoyait l’article 10, paragraphes 1 et 2. Les décisions de la Commission qui approuvaient, notamment, les projets, déterminaient le montant de l’aide financière et prévoyaient le plan de financement avec toutes les dispositions et conditions nécessaires à la mise en œuvre de ces projets conformément à l’article 10, paragraphe 6. Les éléments essentiels de ces décisions étaient publiés au Journal Officiel des Communautés européennes sur le fondement l’article 10, paragraphe 7.

15.

L’article 11, paragraphe 1, indiquait que les crédits d’engagement (c’est-à-dire des promesses juridiquement contraignantes de dépenser des sommes qui ne seraient pas nécessairement versées lors du même exercice mais qui pouvaient être déboursées sur plusieurs exercices financiers) inscrits au budget sont octroyés sur la base des décisions portant approbation des actions concernées, conformément à l’article 10. L’aide liée aux mesures du Fonds de cohésion faisait l’objet d’engagements, en règle générale, par tranches annuelles. Toutefois, dans des cas appropriés, la Commission pouvait procéder à l’engagement du montant total de l’aide octroyée lorsqu’elle adoptait la décision octroyant l’aide (article 11, paragraphe 2).

16.

Les contrôles financiers que les États membres devaient mener étaient prévus à l’article 12, paragraphe 1. Ils comprenaient les mesures suivantes :

« […]

d)

certifier que les déclarations de dépenses présentées à la Commission sont exactes et s’assurer qu’elles procèdent de systèmes de comptabilité basés sur des pièces justificatives susceptibles d’être vérifiées ;

e)

prévenir et détecter les irrégularités, […]

f)

présenter à la Commission, lors de la clôture de chaque projet, stade de projet ou groupe de projets, une déclaration établie par une personne ou un service fonctionnellement indépendant de l’autorité désignée. […]

[…] »

17.

L’article 16 bis, paragraphe 1, a été inséré par l’Acte d’adhésion. Il prévoyait que : « Les mesures qui, à la date d’adhésion [de la Lituanie] ont fait l’objet de décisions de la Commission en matière d’aide dans le cadre du [règlement no 1267/1999] […] et dont la mise en œuvre n’a pas été achevée à cette date sont considérées comme approuvées par la Commission en vertu du présent règlement. Sauf stipulation contraire figurant aux points 2 et 5, les dispositions régissant la mise en œuvre des mesures approuvées conformément au présent règlement s’appliquent à ces mesures ».

18.

Les dispositions d’application du règlement no 1164/94 étaient prévues dans l’annexe II, qui comprenait une série d’articles désignés sous les lettres « A » à « K ». Un « projet » était défini à l’article A, paragraphe 2, sous a), de l’annexe II comme : « un ensemble de travaux, économiquement indivisibles, qui remplissent une fonction technique précise et qui visent des objectifs clairement identifiés permettant d’apprécier si ce projet remplit le critère prévu à l’article 10, paragraphe 5, premier tiret» ( 13 ).

19.

Conformément à l’article C, paragraphe 1, les engagements budgétaires devaient être effectués sur la base des décisions de la Commission approuvant les actions concernées. Les engagements pour les projets environnementaux d’une durée égale ou supérieure à deux ans étaient généralement réalisés par tranches annuelles. Les engagements relatifs à la première tranche annuelle avaient lieu lorsque la décision octroyant le concours communautaire était adoptée par la Commission. Les engagements relatifs aux tranches annuelles ultérieures étaient fondés sur le plan de financement initial ou révisé de la mesure et avaient lieu en principe au début de chaque exercice budgétaire [article C, paragraphe 2, sous a)]. Les modalités d’engagement étaient spécifiées dans les décisions de la Commission approuvant les actions concernées (article C, paragraphe 4).

20.

Selon l’article D, paragraphe 1, « le paiement du concours financier est effectué conformément aux engagements budgétaires et est adressé à [l’autorité nationale compétente]. Les paiements peuvent revêtir la forme d’acomptes, de paiements intermédiaires ou de paiements du solde. Les paiements intermédiaires et les paiements du solde se réfèrent aux dépenses effectivement payées, qui doivent être justifiées par des factures acquittées ou des pièces comptables de valeur probante équivalente ». Sur le fondement l’article D, paragraphe 2, sous d), le paiement du solde du concours de l’Union, calculé sur la base des dépenses certifiées et effectivement payées, devait être versé à l’autorité nationale compétente à condition que certaines conditions soient remplies, notamment qu’un rapport final sur le projet ait été soumis à la Commission dans les six mois de son achèvement [en vertu de l’article D, paragraphe 2, sous d), troisième tiret]. Si ce rapport n’était pas soumis à la Commission dans les dix-huit mois suivant la date limite indiquée dans la décision octroyant le concours pour l’achèvement des travaux et des paiements, la part du concours correspondant au solde du projet était annulée en vertu de l’article D, paragraphe 3 ( 14 ).

21.

L’article D, paragraphe 5, autorisait qu’un paiement soit opéré à l’autorité ou l’organisme désigné par les États membres, en règle générale au plus tard deux mois après réception d’une demande de paiement recevable ( 15 ).

22.

Les autorités des États membres étaient obligées en vertu de l’article G, paragraphe 3, de l’annexe II, de conserver les pièces justificatives pendant un délai de trois ans à la suite du paiement du solde par la Commission. Sur le fondement l’article H, paragraphe 1, de l’annexe II, la Commission était soumise à l’obligation d’appliquer des corrections financières si elle concluait qu’une irrégularité avait eu lieu en ce qui concerne le concours du Fonds.

Le règlement no 1267/1999

23.

À l’époque des faits, un Instrument structurel de préadhésion (ci-après l’« ISPA »), sous la forme du règlement no 1267/1999, faisait partie de la stratégie de préadhésion de la Communauté. Il suivait l’approche du Fonds de cohésion. Les objectifs suivants, exposés dans les considérants du règlement no 1267/1999 sont particulièrement importants. En premier lieu, la stratégie de préadhésion incluait des dispositions pour un instrument visant à l’alignement des pays candidats sur les normes d’infrastructures communautaires et prévoyant une contribution financière pour « des mesures en matière d’environnement et en matière d’infrastructure de transport ». En deuxième lieu, le concours de la Communauté au titre de l’ISPA a facilité la reprise par les pays candidats de l’acquis communautaire dans le domaine de l’environnement et contribué à un développement durable. En troisième lieu, dans l’intérêt de la bonne gestion du concours communautaire octroyé au titre de l’ISPA, il était nécessaire de prévoir des méthodes efficaces d’appréciation, de suivi, d’évaluation et de contrôle des opérations, et donc des mesures à prendre en cas d’irrégularités ou de non-respect des conditions prévues lors de l’octroi du concours au titre de l’ISPA ( 16 ).

24.

L’article 1er, paragraphe 1, du règlement no 1267/1999 a établi l’ISPA.

25.

L’article 2 était intitulé « Mesures éligibles ». L’article 2, paragraphe 1, prévoyait que le concours communautaire au titre de l’ISPA incluait des projets qui sont techniquement et financièrement indépendants dans, par exemple, « […] l[e] domain[e] de l’environnement […] ». L’article 2, paragraphe 2, sous a), autorisait que des concours soient apportés au titre de l’ISPA pour permettre aux pays bénéficiaires de se conformer aux exigences de l’acquis communautaire en matière d’environnement et aux objectifs des partenariats pour l’adhésion ( 17 ). Un concours communautaire dans le cadre de l’ISPA a été octroyé de 2000 à 2006 ( 18 ).

26.

La Commission était en mesure d’arrêter des décisions concernant les mesures qui devaient être financées au titre de l’ISPA sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, conformément à la procédure prévue à l’article 14 ( 19 ).

27.

L’article 8, paragraphe 1, prévoyait que la Commission exécute les dépenses au titre de l’ISPA conformément aux dispositions du règlement financier ( 20 ) sur la base du protocole financier établi entre elle et le pays bénéficiaire. Les dispositions concernant les engagements et les paiements à l’article 8, paragraphe 1, sous a), du règlement no 1267/1999 ont reproduit les dispositions de l’article C, paragraphe 2, de l’annexe II au règlement no 1164/94.

28.

En vertu de l’article 9, paragraphe 1, la Commission devait inviter les pays bénéficiaires à contrôler la bonne exécution des mesures financées par la Communauté, à prévenir les irrégularités et à récupérer les fonds perdus à la suite d’une irrégularité ou d’une négligence ( 21 ). Sur le fondement de l’article 9, paragraphe 5, la Commission devait veiller à assurer le respect des principes de bonne gestion financière, en tenant compte notamment des éléments figurant à l’annexe III du règlement no 1267/1999. Parmi ces éléments figurait l’exigence de désigner une entité centrale par le biais de laquelle s’opérait le transfert des fonds communautaires octroyés au titre de l’ISPA. Les autorités responsables devaient conserver toutes les pièces justificatives concernant les dépenses relatives à un projet pendant une période de cinq ans à compter du dernier versement relatif à un projet. Enfin, le protocole financier établi entre la Commission et chaque pays bénéficiaire devait comporter des dispositions relatives aux corrections financières afférentes aux irrégularités ( 22 ).

La décision 2002/89/CE

29.

Les partenariats pour l’adhésion définissent le cadre du processus d’adhésion. Ils exposent les principaux domaines prioritaires dans lesquels les pays candidat doivent accomplir des progrès ainsi que les détails de l’aide de préadhésion ( 23 ). Chaque pays candidat élabore également un programme national d’adoption de l’acquis de l’Union. Les principes, priorités, objectifs intermédiaires et conditions pour la Lituanie étaient exposés dans l’annexe à la décision 2002/89/CE du Conseil ( 24 ). Le point 4 de l’annexe, intitulé « Priorités et objectifs intermédiaires », indiquait à l’égard de l’environnement que ces objectifs comprenaient un « [achèvement de] la transposition de l’acquis » et que l’on devait « poursuivre la mise en œuvre de l’acquis, notamment en ce qui concerne […] la gestion des déchets […] »

Le règlement no 1386/2002

30.

En vertu de l’article 4 du règlement (CE) no 1386/2002 de la Commission, du 29 juillet 2002, fixant les modalités d’application du règlement no 1164/94 du Conseil en ce qui concerne les systèmes de gestion et de contrôle et la procédure de mise en œuvre des corrections financières relatifs au concours du Fonds de cohésion ( 25 ), les systèmes de contrôle pertinents comprenaient des procédures pour vérifier la réalité des dépenses déclarées et la réalisation du projet concerné.

31.

L’article 8, paragraphe 2, sous b), i), prévoyait qu’avant de certifier une déclaration de dépenses [conformément à l’article 12, paragraphe 1, sous d) du règlement no 1164/94 et de l’article D, paragraphe 2, sous d), quatrième tiret, de l’annexe II dudit règlement], l’autorité de paiement s’assurait que, notamment, la déclaration de dépenses ne comprenait que les dépenses qui avaient été réellement effectuées pendant la période d’éligibilité telle que définie dans la décision de la Commission octroyant le concours et qu’elles étaient justifiées par des factures acquittées ou des pièces comptables de valeur probante équivalente.

Le règlement no 16/2003

32.

Le règlement (CE) no 16/2003 de la Commission ( 26 ) avait établi des règles communes pour déterminer l’éligibilité des dépenses dans le cadre des actions au titre du Fonds de cohésion, comme l’indiquait son article 1er. L’organisme responsable de la mise en œuvre était l’organisme public ou privé responsable de l’organisation des appels d’offres liés à un projet, tel que désigné par la décision de la Commission relative à l’octroi d’un concours du Fonds de cohésion prévu par l’article 2.

33.

L’article 4 indiquait que toute dépense effectuée par l’organisme responsable de la mise en œuvre devait être fondée sur des contrats, des conventions ou des documents juridiquement contraignants. Des pièces justificatives appropriées devaient être produites.

34.

L’article 5, paragraphe 1, disposait :

« Les dépenses à prendre en compte pour le paiement du concours communautaire doivent être effectivement encourues pendant la période d’éligibilité telle que définie dans la décision de la Commission [accordant une aide issue du Fonds], conformément à l’article 8, paragraphe 2, point b), du [règlement no 1386/2002], et être directement liées au projet. Elles doivent se rapporter à des paiements certifiés par l’État membre et effectivement exécutés par lui-même ou pour son compte […] et qui sont justifiés par des factures acquittées ou des pièces comptables de valeur probante équivalente.

Par “pièce comptable de valeur probante équivalente”, on entend tout document détenu par l’organisme responsable de la mise en œuvre qui justifie que l’écriture comptable donne une image fidèle et loyale des transactions effectivement réalisées, conforme aux pratiques comptables généralement admises. »

35.

Sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, une dépense encourue était éligible à compter de la date à laquelle la Commission avait reçu la demande de concours complète. En vertu de l’article 7, paragraphe 2, le début de la période d’éligibilité était fixé dans la décision de la Commission approuvant le projet. Conformément à l’article 8, la date de fin d’éligibilité (qui était fixée dans la décision de la Commission) concernait les paiements exécutés par l’organisme responsable de la mise en œuvre ( 27 ).

36.

L’article 23, paragraphe 1, prévoyait que les dépenses relatives à l’achat ou à la construction d’installations destinées à être fixées à demeure étaient éligibles à condition de figurer dans l’inventaire des équipements durables de l’organisme responsable de la mise en œuvre du projet et d’être traitées comme dépenses en capital selon les conventions comptables généralement admises.

Lignes directrices relatives à la clôture des projets relevant du Fonds de cohésion et des anciens projets ISPA 2000-2006

37.

Les lignes directrices relatives à la clôture des projets relevant du Fonds de cohésion et des anciens projets ISPA 2000-2006 (ci-après les « lignes directrices relatives à la clôture ») ( 28 ) s’appliquent à tous les projets relevant du Fonds de cohésion et anciens projets ISPA adoptés après le 1er janvier 2000. L’expression « clôture des projets » est définie comme désignant « le règlement financier des engagements [de l’Union européenne] restant à liquider par le paiement du solde de l’engagement à l’autorité désignée ou l’émission d’une note de débit et le dégagement de tout solde ». Le document ajoute ensuite que la clôture n’affecte en rien l’obligation faite à l’organisme responsable et aux autorités nationales de tenir à disposition toutes les pièces justificatives relatives aux dépenses et aux contrôles au cours des trois années suivant le paiement du solde par la Commission.

Les faits, la procédure et les questions préjudicielles

38.

L’AGPE est l’organisme chargé de mettre en œuvre le développement d’un système de gestion des déchets pour la région d’Alytus en Lituanie (ci-après le « projet » ou le « projet de construction »). Elle est la défenderesse en première instance (la requérante au pourvoi devant la juridiction de renvoi) et était le pouvoir adjudicateur aux fins de passer des contrats de marchés publics relatifs au projet de construction. L’entreprise est la requérante en première instance (la défenderesse devant la juridiction de renvoi) et la bénéficiaire finale du concours octroyé par la Commission.

39.

Le 13 décembre 2001, la Commission a adopté une décision d’octroi d’un concours pour le projet de construction (ci-après la « décision ISPA initiale »). Elle a également signé le protocole financier concerné (ci-après le « protocole financier ») à la même date. La Lituanie a signé ce document le 14 mars 2002. En vertu du protocole financier, le 31 décembre 2004 a été retenu comme date de fin du projet et les paiements opérés par l’AGPE pour la mise en œuvre du projet devaient être achevés au plus tard le 31 décembre 2006. Le rapport d’audit public qui devait être présenté afin que la Commission verse le solde du concours financier devait être présenté par les autorités lituaniennes à la Commission six mois au plus tard après cette date.

40.

Le 10 novembre 2004, l’AGPE et l’entreprise ont signé l’accord de mise en œuvre du programme de cohésion de l’ISPA concernant la répartition des tâches et responsabilités entre l’AGPE et l’entreprise relative à l’administration des ressources du Fonds de cohésion pour mettre en œuvre le projet de construction. Le 27 décembre 2004, la Commission a adopté une décision modifiant le protocole financier en ajoutant, notamment, le paragraphe suivant à l’article 2 : « 5. Les dépenses liées au projet sont éligibles jusqu’au 31 décembre 2008 ». L’article 2 du protocole financier est en conséquence modifié comme suit : « Date de fin : le 31 décembre 2008 ».

41.

La demande de concours du Fonds de cohésion a été présentée par le ministère des Finances et l’AGPE. En sa qualité de pouvoir adjudicateur, l’AGPE a organisé un appel d’offres relatif au projet. Entre le 22 avril 2004 et le 6 décembre 2006, l’AGPE, l’entreprise et certains autres contractants privés ont signé des contrats de marchés publics ( 29 ).

42.

Le 17 décembre 2009, l’office national d’audit Lituanien a élaboré le rapport d’audit public.

43.

Le 28 mars 2013, l’AGPE a publié quatre « conclusions » concernant l’éligibilité de certains postes de dépenses du projet au titre des contrats de marchés publics, fondées sur le fait que l’entreprise n’avait pas justifié l’acquisition d’actifs à long terme et à court terme selon les articles 5, paragraphe 1, et 23 du règlement no 16/2003 et l’article 8, paragraphe 2, sous b), du règlement no 1386/2002 (ci-après les « règlements d’exécution »). Le 29 mars 2013, le directeur de l’AGPE a adopté des décisions (ci-après les « décisions attaquées ») par lesquelles l’entreprise s’est vue imposer de rembourser les fonds déclarés inéligibles à un concours.

44.

Le 31 mai 2013, le ministère des Finances lituanien a présenté à la Commission une demande de paiement du projet final mis à jour réclamant le solde final de 826069,28 euros. Le ministère des Finances a informé la Commission que, en raison d’une procédure juridictionnelle en instance liée au projet de construction, des dépenses de 40276,31 euros susceptibles d’être éventuellement inéligibles n’avaient pas été soustraites de la demande de paiement finale du projet mis à jour.

45.

Le 5 novembre 2013, l’entreprise a engagé une procédure visant l’annulation des décisions attaquées. Il a été fait droit à ce recours en première instance au motif que le délai de prescription quadriennal prévu à l’article 3, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement no 2988/95 s’appliquait. Du fait que le délai de prescription a été considéré comme ayant commencé le 31 décembre 2008 (la date de fin du projet telle que définie à l’article 2 du protocole financier révisé), il s’ensuivait qu’il avait expiré le 31 décembre 2012, avant que les décisions attaquées n’aient été adoptées.

46.

L’AGPE a formé un pourvoi contre cette décision devant la juridiction de renvoi le 28 mai 2014. Par lettre du 14 juillet 2014, le ministère des Finances a présenté à la Commission une mise à jour du rapport du projet (du 17 décembre 2009), avec la déclaration de clôture (les deux documents dataient du 25 juin 2014) ( 30 ).

47.

Lors de la procédure d’appel, la juridiction de renvoi a rendu une ordonnance invitant l’AGPE et l’entreprise à fournir des informations et des données relatives à l’achèvement du projet avec des précisions et des arguments relatifs à l’application du règlement no 2988/95. La juridiction de renvoi a observé que, notamment, les éléments suivants étaient peu clairs : i) la date d’achèvement du projet ; ii) le solde restant qui était impayé et le moment où il devait être versé ; et iii) le sens des termes « programme », « mesure » et « projet » qui étaient utilisés de manière interchangeable dans le(s) document(s) produit(s) devant la juridiction de renvoi.

48.

En réponse à cette ordonnance, l’AGPE a fourni à la juridiction de renvoi de nouveaux éléments factuels. Cette agence a notamment produit une lettre du 30 avril 2015 du ministère des Finances. Cette dernière indiquait que le solde restant du projet n’avait pas été perçu de la part de la Commission.

49.

Dans la procédure devant la juridiction de renvoi, l’AGPE soutient que le projet n’a pas encore été finalisé et que le délai de prescription prévu à l’article 3, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement no 2988/95 n’a pas commencé à courir. Elle se réfère également à la définition de la « clôture des projets » donnée au point 37 ci-dessus.

50.

Par lettre du 26 juin 2015, la Commission a clos le projet. Elle a conclu qu’un total de 106225, 67 euros constituait les dépenses inéligibles. La Commission a ensuite indiqué que : « […] en raison du fait qu’il existe des dépenses en excédent suffisantes, les dépenses irrégulières n’exerceront pas d’incidence sur le calcul du paiement final. En ce qui concerne le budget de l’Union européenne, il peut donc être mis fin à l’examen des cas d’irrégularité. Le solde des engagements [du Fonds de cohésion] sera versé en totalité» ( 31 ).

51.

La juridiction de renvoi a décidé qu’afin de résoudre le litige dans la procédure au principal, elle avait besoin des éclaircissements de la Cour pour répondre à la question de savoir si le soutien financier apporté par la Communauté au projet de construction relevait de la notion de « programme pluriannuel » aux fins de l’article 3, paragraphe 1, deuxième alinéa, du règlement no 2988/95, si le délai de prescription prévu à l’article 3, paragraphe 1, du règlement no 2988/95 s’appliquait dans la procédure au principal et, le cas échéant, s’il avait expiré. Elle a donc saisi la Cour, le 10 juillet 2015, des questions préjudicielles suivantes :

« 1)

Que convient-il de considérer comme un “programme pluriannuel” au sens de l’article 3, paragraphe 1, du règlement [no 2988/95] ?

2)

Un projet, tel que [le projet] correspond-il à la notion de “programme pluriannuel” définie à l’article 3, paragraphe 1, du règlement [no 2988/95] ?

3)

En cas de réponse affirmative à la deuxième question, à partir de quel moment doit-on calculer le début du délai de prescription des poursuites prévu à l’article 3, paragraphe 1, du règlement [no 2988/95] ? »

52.

Des observations écrites ont été présentées par les gouvernements grec et lituanien et par la Commission, l’ensemble de ces parties ayant également présenté des observations orales à l’audience du 7 septembre 2016.

Appréciation

Observations préliminaires

53.

La décision ISPA initiale fut adoptée le 13 décembre 2001 et le protocole financier fut signé le 14 mars 2002. Le projet a donc été lancé avant l’adhésion de la Lituanie à l’Union européenne le 1er mai 2004. Cependant, du fait que le projet de construction n’avait pas été achevé à cette date, les règles régissant sa clôture et notamment le règlement financier – le paiement du solde de l’engagement exceptionnel du budget de l’Union à l’AGPE – sont régies par les dispositions relatives au Fonds de cohésion du règlement no 1164/94 ( 32 ).

54.

Ensuite, s’agissant des contrats de marchés publics ( 33 ), la juridiction de renvoi indique qu’elle a constaté que l’entreprise n’avait pas fourni les documents prouvant que les dépenses avaient été réellement encourues (lors de la période d’éligibilité définie dans la décision ISPA initiale) conformément aux articles 5, paragraphe 1, et 23, paragraphe 1, du règlement no 16/2003, lus conjointement avec l’article 8, paragraphe 2, sous b), du règlement no 1386/2002 ( 34 ).

55.

L’entreprise est un opérateur économique aux fins de l’article 1er, paragraphe 2, du règlement no 2988/95 ( 35 ). Une absence de certification des dépenses telle qu’exigée par les règlements d’exécution constitue une violation du droit de l’Union qui « […] a ou aurait pour effet de porter préjudice au budget général [de l’Union] […] »

56.

L’article 12, paragraphe 1, sous d), du règlement no 1164/94 impose à la déclaration de dépenses d’être exacte et de garantir qu’elle peut être étayée par des systèmes de comptabilité fondés sur des pièces justificatives vérifiables. En outre, concernant la clôture des projets, l’article D, paragraphe 2, sous d), de l’annexe II de ce règlement indique que le solde du concours de l’Union est calculé sur la base des dépenses certifiées et effectivement payées.

57.

Il est constant que le délai de prescription des anciens projets ISPA ou des projets relevant du Fonds de cohésion n’est pas régi par des règles sectorielles spécifiques. Je considère donc que le défaut de certification des dépenses de l’entreprise relatives aux contrats de marchés publics conformément aux règlements d’exécution constitue une irrégularité au sens de l’article 1er, paragraphe 2, du règlement no 2988/95. Par conséquent, les règles qui gouvernent la mise en œuvre du délai de prescription prévu à l’article 3, paragraphe 1, dudit règlement s’appliquent.

Première et deuxième questions

58.

Par sa première question, la juridiction de renvoi demande des explications concernant l’interprétation de l’expression « programme pluriannuel » à l’article 3, paragraphe 1, deuxième alinéa, du règlement no 2988/95. La deuxième question vise à établir si le projet correspond à un tel programme aux fins de cette disposition. Ces questions comportant entre elles des liens étroits, je les examinerai ensemble.

59.

J’estime qu’en l’absence d’une définition d’un « programme pluriannuel » dans le règlement no 2988/95, il convient de commencer par examiner cette expression compte tenu du cadre dans lequel elle est utilisée et des objectifs du règlement ( 36 ).

60.

L’expression « programme pluriannuel » n’est pas familière. Elle m’évoque plutôt un libellé technique susceptible d’être utilisé pour une programmation financière dans un domaine tel que celui du budget de l’Union.

61.

Dans ce contexte, la notion de programme pluriannuel devrait être distinguée du cadre financier pluriannuel (mentionné à l’article 312 TFUE) ( 37 ). L’expression générale « programme pluriannuel » désigne la large gamme des politiques de l’Union qui sont mises en œuvre au moyen de fonds qui apportent une aide financière aux bénéficiaires par l’intermédiaire des États membres. Le Fonds de cohésion et les anciens projets ISPA sont des exemples de ces « programmes ». Qu’en est-il de l’adjectif qualificatif « pluriannuel » ?

62.

La Commission soutient que le terme « pluriannuel » concerne une période d’une durée supérieure à une année.

63.

Même si cette considération doit être vraie, il me semble que, aux fins de l’article 3, paragraphe 1, du règlement no 2988/95, la période en cause devrait être d’au moins deux années. Tout d’abord, une période d’une année comportant une partie de l’année suivante s’inscrit moins aisément dans le cadre de la notion de durée « pluriannuelle ». D’autre part, cette considération est illustrée par le régime législatif concernant l’affectation des engagements budgétaires ( 38 ). En vertu du règlement no 1164/94, les engagements budgétaires destinés, notamment, aux projets réalisés sur deux années ou plus étaient en règle générale répartis en tranches annuelles. Les engagements relatifs à la première tranche annuelle étaient effectués lorsque la décision octroyant le concours était adoptée par la Commission. Les engagements relatifs aux tranches annuelles ultérieures étaient fondés sur le protocole financier du projet concerné ( 39 ). Ce modèle des engagements budgétaires est décrit dans la proposition de la Commission en vue d’établir un Instrument des politiques structurelles de préadhésion comme un « système plus simple et efficace » qui s’applique à l’égard des « projets pluriannuels» ( 40 ).

64.

Le terme « programme » est suffisamment large par sa portée pour couvrir à la fois la sphère politique de l’Union (la stratégie ISPA et le Fonds de cohésion) et les mesures, comme les projets de construction, mises en place dans les États membres pour mettre en œuvre ces politiques.

65.

Les deux types de programmes sont-ils envisagés par l’article 3, paragraphe 1, deuxième alinéa, du règlement no 2988/95 ?

66.

Selon moi, ils ne le sont pas.

67.

L’article 1er, paragraphe 2, de ce règlement définit une irrégularité comme une violation d’une disposition du droit de l’Union résultant d’un acte ou d’une omission d’un opérateur économique qui a ou aurait pour effet de porter préjudice au budget de l’Union. Il s’agit d’une référence aux mesures qui sont introduites pour mettre en œuvre les politiques de l’Union dans les États membres en octroyant une aide aux bénéficiaires. L’entreprise dans la procédure au principal est un exemple du type de bénéficiaire qui est envisagé.

68.

Les premier, deuxième et troisième considérants du règlement no 2988/95 renforcent la conception selon laquelle la notion de « programme pluriannuel » mentionnée à l’article 3, paragraphe 1, deuxième alinéa, concerne des projets créés pour mettre en œuvre les politiques de l’Union ( 41 ). C’est à l’égard de ces projets que les fonds de l’Union gérés par les autorités compétentes des États membres sont versés aux bénéficiaires.

69.

Le règlement no 2988/95 joue un rôle sur ce plan. Selon moi, il ne vise pas le niveau auquel le cadre financier pluriannuel fixe les dépenses pour l’ensemble des programmes politiques de l’Union, y compris le Fonds de cohésion.

70.

La juridiction de renvoi demande notamment si les termes « mesures » et « projet » entrent dans la définition du programme pluriannuel à l’article 3, paragraphe 1, deuxième alinéa, du règlement no 2988/95.

71.

Selon moi, les deux termes sont régis par la notion de « programme pluriannuel ».

72.

En ce qui concerne le Fonds de cohésion, l’article 1er, paragraphe 3, du règlement no 1164/94 confirme qu’une aide peut être allouée à des projets, des étapes de projets ou des groupes de projets. L’article 3 présente les actions qui sont éligibles à une aide. Il découle de l’article 3, paragraphe 2, qu’une aide est possible non seulement pour des projets, mais aussi pour des mesures accessoires, comme des études préparatoires liées aux projets éligibles et des mesures d’appui technique, y compris la publicité et les campagnes d’information ( 42 ).

73.

Le terme « mesures » possède donc un sens plus large que le terme « projets » au sein du régime législatif du règlement no 1164/94. Il couvre les projets, les étapes de projets et les groupes de projets, ainsi que les mesures accessoires énumérées à l’article 3, paragraphe 2, de ce règlement ( 43 ).

74.

Selon la juridiction de renvoi, les termes « mesure », « projet » et « programme » ont été utilisés de manière interchangeable dans la décision ISPA initiale, la décision modificative du 27 décembre 2004 et le protocole financier. Une cohérence terminologique dans ces documents aurait contribué à en faciliter la compréhension. Cela dit, il ressort de la législation que tant les termes « mesure » et « projet » relèvent de la notion de « programme » aux fins de l’article 3, paragraphe 1, du règlement no 2988/95.

75.

En ce qui concerne la question de savoir si le projet de construction en cause dans la procédure au principal relève de la notion de « programme pluriannuel » au sens de cette disposition, il me semble qu’il en fait partie pour les raisons suivantes.

76.

D’une part, il constitue un projet environnemental aux fins des articles 2, paragraphe 1, et 3, paragraphe 1, du règlement no 1164/94 [voir également l’article A, paragraphe 2, sous a), de l’annexe II]. La nature du projet en cause – mettre en place un système de gestion des déchets pour la région d’Alytus – est compatible avec les exigences de l’article 2, paragraphe 2, du règlement no 1267/1999, dans la mesure où ce projet permettait à la Lituanie de respecter l’acquis environnemental de l’Union, notamment en ce qui concerne la gestion des déchets, et les objectifs de son partenariat d’adhésion ( 44 ).

77.

D’autre part, le projet a été établi conformément aux articles 7, paragraphe 1, et 8, paragraphe 1, du règlement no 1267/1999. Dans la décision ISPA initiale du 13 décembre 2001, la date de fin du projet de construction était estimée au 31 décembre 2004. Par conséquent, il devait être réalisé sur une période de trois ans (à laquelle s’ajoute un délai supplémentaire de deux ans au cours duquel les paiements devaient être effectués). Cependant, la Commission a adopté le 27 décembre 2004 une décision qui a modifié le protocole financier en indiquant que la date de fin estimée du projet de construction était le 31 décembre 2008. Sur le fondement de l’article 8, paragraphe 1, sous a), du règlement no 1267/1999, des engagements auraient été effectués, par tranches annuelles, au cours de la période s’étendant de cette décision à la date de fin du projet. Il existait donc des engagements sur la période qui s’étendait de la décision ISPA initiale du 13 décembre 2001 au 31 décembre 2008. Il s’agissait manifestement d’une période pluriannuelle.

78.

Enfin, afin d’être éligible à une aide de l’Union européenne au titre du règlement no 1267/1999, le projet de construction devait être d’une envergure suffisante pour exercer un impact significatif en matière de protection environnementale ( 45 ). Ces éléments, conjointement avec le délai fixé dans les décisions de la Commission approuvant le concours et le protocole financier (tel que modifié), confirment que le projet de construction s’inscrit dans le cadre de la notion de programme pluriannuel.

79.

D’après moi, si un concours communautaire a été octroyé en vertu du règlement no 1267/1999 pour un projet qui : i) constitue une mesure éligible aux fins de l’article 2, paragraphe 2, de ce règlement ; ii) a été établi sur le fondement d’une décision de la Commission et d’un protocole financier qui étaient convenus entre la Commission et les autorités compétentes de l’État membre concerné ; et iii) a été réalisé sur une période d’au moins deux ans, ce projet relève de la notion de programme pluriannuel aux fins de l’article 3, paragraphe 1, deuxième alinéa, du règlement no 2988/95. Partant, sous réserve de vérification par la juridiction de renvoi qu’un projet tel que le développement d’un système de gestion des déchets de la région d’Alytus, en Lituanie, respecte ces conditions, un projet de ce type est en mesure de constituer un programme pluriannuel en vertu du règlement no 2988/95.

Troisième question

Remarques générales

80.

Si l’aménagement d’un système de gestion des déchets de la région d’Alytus relève de la notion de programme pluriannuel aux fins de l’article 3, paragraphe 1, deuxième alinéa, du règlement no 2988/95, la juridiction de renvoi demande par sa troisième question quel moment constitue le début du délai de prescription en vertu de cette disposition.

81.

Dans le cadre de la répartition des compétences entre les juridictions de l’Union et les juridictions nationales en vertu de l’article 267 TFUE, il appartient en principe à ces dernières de vérifier que les conditions factuelles entraînant l’application d’une norme de l’Union sont réunies dans l’affaire pendante devant elle, la Cour, statuant sur renvoi préjudiciel, pouvant, le cas échéant, apporter des précisions s’efforçant de guider la juridiction nationale dans son interprétation ( 46 ). Par conséquent, il appartient à la Cour de donner au juge national une réponse utile qui lui permette de trancher le litige dont il est saisi. Dans cette optique, il incombe, le cas échéant, à la Cour de reformuler les questions qui lui sont soumises ( 47 ). Il appartient à la juridiction nationale d’établir les faits qui ont donné lieu au litige au principal et d’en tirer les conséquences pour la décision qu’elle est appelée à rendre.

82.

Il ressort de l’ordonnance de renvoi que la juridiction de renvoi souhaite établir comment le délai de prescription prévu à l’article 3, paragraphe 1, s’applique à la problématique en cause dans la procédure au principal. Il découle de ma conclusion au point 79 ci-dessus que je considère que le projet de construction est effectivement un programme pluriannuel au sens de cette disposition. L’article 3, paragraphe 1, deuxième alinéa, du règlement no 2988/95 dispose : « [...] Pour les programmes pluriannuels, le délai de prescription s’étend en tout cas jusqu’à la clôture définitive du programme ». Il est donc nécessaire d’interpréter l’expression « clôture définitive » afin d’établir comment ce délai de prescription s’applique ici. Par ailleurs, le libellé de cette disposition identifie la fin du délai de prescription comme étant l’évènement déterminant dans le cas des programmes pluriannuels, plutôt que le début de ce délai.

83.

Une réponse à la question de la juridiction de renvoi s’agissant du moment devant être considéré comme constituant le point de départ du délai de prescription ne peut donc pas déterminer si le directeur de l’AGPE a adopté les décisions attaquées avant l’expiration du délai de prescription dans le cas d’un programme pluriannuel au sens de l’article 3, paragraphe 1, deuxième alinéa, du règlement no 2988/95. Il est nécessaire d’adopter une approche plus large de la question 3 en établissant comment le délai de prescription prévu à l’article 3, paragraphe 1, du règlement no 2988/95 s’applique à l’irrégularité en cause dans la procédure au principal. En outre, afin de fournir à la juridiction de renvoi une réponse plus complète, j’examinerai également comment il convient de classer l’irrégularité ou les irrégularités en cause dans la procédure au principal et comment le délai de prescription fixé à l’article 3, paragraphe 1, peut s’appliquer dans les circonstances spécifiques de l’affaire (voir points 86 à 95 ci-après).

84.

Ensuite, il ressort de l’ordonnance de renvoi que le cadre factuel du litige devant la juridiction de renvoi demeure incertain. Les dates et l’enchaînement des évènements qui ont abouti à la clôture du projet en cause ont été établis. Cependant, il n’apparaît pas clairement dans l’ordonnance de renvoi que les autorités lituaniennes aient conclu des accords avec la Commission à l’égard de la clôture du projet prévoyant que la communication tardive des documents obligatoires serait acceptable ni (le cas échéant) qu’un tel accord respecterait les règles prévues par le règlement no 1164/94 et les lignes directrices relatives à la clôture ( 48 ).

85.

J’examinerai l’application du délai de prescription prévu à l’article 3, paragraphe 1, du règlement no 2988/95 à la lumière de ces éléments.

L’article 3, paragraphe 1, du règlement no 2988/95

86.

Selon une jurisprudence constante de la Cour, le règlement no 2988/95 introduit une « réglementation générale relative à des contrôles homogènes et à des mesures et des sanctions administratives portant sur des irrégularités au regard du droit de [l’Union] » et ce, afin de « combattre dans tous les domaines les atteintes aux intérêts financiers de [l’Union]» ( 49 ).

87.

Le délai de prescription visé à l’article 3, paragraphe 1, du règlement no 2988/95 tend à assurer la sécurité juridique des opérateurs économiques ( 50 ). Ce principe exige notamment que les droits et les obligations de l’opérateur économique vis-à-vis de l’autorité nationale ne soient pas indéfiniment susceptibles d’être remis en cause ; un délai de prescription doit être applicable à la poursuite d’une telle irrégularité ; ce délai doit être fixé à l’avance ; et les règles doivent être suffisamment prévisibles pour l’opérateur économique concerné ( 51 ).

88.

L’article 3, paragraphe 1, du règlement no 2988/95 établit un délai de prescription des poursuites de quatre ans à compter de la réalisation de l’irrégularité pour ce que je désigne des « irrégularités distinctes ». En cas d’irrégularité continue ou répétée, le délai de prescription des poursuites dure quatre ans à compter du jour où l’irrégularité a pris fin ( 52 ). Une irrégularité est « continue » lorsque l’omission à l’origine de la violation de la disposition du droit de l’Union concerné se poursuit ( 53 ). Une irrégularité est « répétée », au sens de cette disposition lorsqu’elle est commise par un opérateur qui tire des avantages économiques d’un ensemble d’opérations similaires qui enfreignent la même disposition du droit de l’Union ( 54 ). Les irrégularités distinctes doivent être suffisamment liées chronologiquement afin d’être considérées comme étant des irrégularités répétées. Un tel lien chronologique existe lorsque la durée séparant chaque irrégularité de la précédente demeure inférieure au délai de prescription général de quatre ans ( 55 ). Selon le régime de l’article 3, paragraphe 1, le délai de prescription général est de quatre ans. Cela dit, il me semble que, (même si l’irrégularité, ou les irrégularités, en cause dans la procédure au principal ne relèvent pas de la notion de programme pluriannuel) en l’absence des précisions factuelles nécessaires, la Cour n’est pas en mesure d’apporter davantage d’orientations sur la question de savoir si des irrégularités continues ou répétées ont été commises dans l’affaire au principal.

89.

Un délai de prescription spécifique est prévu pour les programmes pluriannuels. En l’espèce, le délai court jusqu’à ce que le programme soit « définitivement clôturé ». Partant, l’expression « le délai de prescription » à l’article 3, paragraphe 1, deuxième alinéa, du règlement no 2988/95 peut être lue comme signifiant que le délai de prescription des programmes pluriannuels est généralement de quatre ans, mais qu’il s’étend en tout état de cause jusqu’à ce que le programme en cause soit définitivement clôturé lorsque ce programme s’étend au-delà d’une période de quatre ans. Du fait que le règlement no 2988/95 prévoit des règles générales qui s’appliquent (aux programmes pluriannuels) dans tout un ensemble de secteurs, il n’est pas surprenant que le législateur n’ait pas prévu un nombre d’années précis.

90.

Cette interprétation me semble correspondre au but spécifique de la règle fixé à l’article 3, paragraphe 1, deuxième alinéa, du règlement no 2988/95 concernant les programmes pluriannuels. Pour ces derniers, l’application du délai de prescription n’est pas déterminée par le moment où l’irrégularité est commise ni par celui où elle prend fin. Le délai de prescription ne se limite pas non plus à une période de quatre ans. À la différence de la situation relative aux irrégularités distinctes et aux irrégularités continues ou répétées, le délai de prescription des programmes pluriannuels dépend de la clôture définitive du programme en cause. Partant, il peut courir plus longtemps que le délai général de quatre ans.

91.

La Cour a dit pour droit, à l’égard de la notion d’« acte visant à l’instruction ou à la poursuite de l’irrégularité » au sens de l’article 3, paragraphe 1, troisième alinéa, du règlement no 2988/95, que les délais de prescription ne rempliraient pas la fonction d’assurer la sécurité juridique et qu’une telle fonction ne serait pas pleinement remplie si ce délai pouvait être interrompu par tout acte de contrôle d’ordre général de l’administration nationale sans rapport avec des soupçons d’irrégularités touchant des opérations circonscrites avec suffisamment de précision ( 56 ). Par conséquent, l’article 3, paragraphe 1, troisième alinéa, du règlement no 2988/95 doit être interprété en ce sens qu’un acte doit circonscrire avec suffisamment de précision les opérations sur lesquelles portent les soupçons d’irrégularités pour constituer un acte interruptif au sens de cette disposition ( 57 ).

92.

À mon sens, le rapport d’audit public du 17 décembre 2009 est d’une nature trop générale pour constituer un tel acte.

93.

L’article 3, paragraphe 1, quatrième alinéa, du règlement no 2988/95 fixe une limite absolue aux recours relatifs à une irrégularité. Cette prescription est acquise au plus tard le jour où un délai égal au double de celui prévu au premier alinéa de cette même disposition arrive à expiration sans que l’autorité compétente ait prononcé une sanction, sauf dans le cas où la procédure administrative a été suspendue conformément à l’article 6, paragraphe 1, de ce règlement ( 58 ). Le quatrième alinéa de l’article 3, paragraphe 1, dudit règlement contribue ainsi à renforcer la sécurité juridique des opérateurs économiques en empêchant que la prescription des poursuites afférentes à une irrégularité puisse être indéfiniment retardée par des actes interruptifs répétés ( 59 ).

94.

La juridiction de renvoi n’ayant pas indiqué que les faits de l’affaire au principal donnent lieu à des irrégularités continues ou répétées ou que cette affaire concerne des actes interruptifs répétés, l’article 3, paragraphe 1, quatrième alinéa, du règlement no 2988/95 n’est pas pertinent ici.

95.

La Cour a également examiné dans le passé si les délais de prescription étaient proportionnés, notamment en appréciant les délais de formation d’un recours selon les règles nationales dans le cadre de l’article 3, paragraphe 3, du règlement no 2988/95. Elle a déclaré qu’un délai de prescription « […] doit, notamment, ne pas aller manifestement au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre l’objectif de protection des intérêts financiers de l’Union […]» ( 60 ).

Les programmes pluriannuels

96.

Je considère que le projet de construction en cause ici est un programme pluriannuel. Le délai de prescription doit donc être établi selon l’article 3, paragraphe 1, deuxième alinéa, du règlement no 2988/95.

97.

Que signifie l’expression « le délai de prescription s’étend en tout cas jusqu’à la clôture définitive du programme » ?

98.

Le gouvernement lituanien a soutenu dans ses observations écrites que l’ensemble des 53 projets dans les secteurs de l’environnement et des transports soutenus initialement par l’ISPA (et tombant ensuite sous l’égide du Fonds de cohésion) sont des programmes pluriannuels. Le projet en cause fait partie de ce groupe de mesures. Il a donc soutenu que le délai de prescription prévu à l’article 3, paragraphe 1, deuxième alinéa, du règlement no 2988/95 s’étend jusqu’à la clôture de l’ensemble des 53 projets. Comme certains de ces projets ne sont pas encore finis, le délai de prescription continue à s’étendre. Je ferai référence à cette hypothèse en la désignant comme l’« option 1 ».

99.

La Lituanie a changé sa position au cours de la phase orale de la procédure. Elle a convenu qu’il ne serait pas nécessaire de démontrer que l’ensemble des 53 projets étaient clos pour que le délai de prescription prévu à l’article 3, paragraphe 1, premier alinéa, soit considéré comme définitivement expiré.

100.

J’estime que la Lituanie avait raison de modifier sa position, car l’option 1 n’est pas compatible avec l’utilisation du terme « programme » dans cette disposition pour se rapporter au projet ou à la mesure en cause plutôt qu’à la politique plus large de l’Union consistant à apporter une aide de préadhésion à des projets d’infrastructure majeurs. Elle n’est pas non plus compatible avec l’apport d’une sécurité juridique aux opérateurs économiques, un principe qui sous-tend la mise en œuvre du délai de prescription prévu à l’article 3, paragraphe 1. Les opérateurs économiques participant à de tels projets doivent être en mesure de savoir quelles opérations sont définitives et lesquelles peuvent faire l’objet d’un recours. Un délai de prescription qui prend fin lorsque des projets d’infrastructures où l’opérateur économique ne participe pas et sur lesquels il ne peut exercer aucune influence viennent à échéance ne saurait à mon sens être compatible avec la sécurité juridique.

101.

La Commission soutient que la date à laquelle ses services terminent un projet correspond à la clôture définitive d’un programme pluriannuel. En l’espèce, cette clôture a été opérée par la lettre du 26 juin 2015. J’y ferai référence en la désignant comme l’« option 2 ».

102.

Je ne partage pas le point de vue de la Commission.

103.

Il me semble que l’option 2 laisserait à la Commission une marge d’appréciation importante pour déterminer la clôture définitive d’un projet au sens de l’article 3, paragraphe 1, deuxième alinéa, du règlement no 2988/95. Cette interprétation serait incompatible avec le niveau de sécurité juridique exigé pour préserver les intérêts des opérateurs économiques. Elle pourrait les exposer à une longue période d’incertitude et risque de les placer dans une situation où ils ne seraient pas en mesure de prouver que les transactions en cause étaient légales ( 61 ). Elle pourrait de même être éventuellement perçue comme encourageant (ou en tout état de cause ne décourageant pas) des pratiques dilatoires au sein de l’administration de la Commission. Ce qui serait incompatible avec le principe de proportionnalité, car le délai de prescription ne serait pas déterminé par la nécessité de protéger les intérêts financiers de l’Union, mais plutôt par le rythme de l’activité administrative. Cela serait également contraire à l’article 41 de la Charte, qui garantit que les affaires d’une personne soient traitées dans un délai raisonnable, ainsi qu’aux objectifs des règles de clôture du règlement no 1164/94 et aux lignes directrices relatives à la clôture.

104.

Je rejette par conséquent l’option 2.

105.

Il est difficile d’indiquer le moment précis où un projet de construction se termine, car un certain nombre d’étapes et procédures différentes mènent à son achèvement ( 62 ). Néanmoins, la Cour doit fournir une interprétation qui correspond au libellé et aux objectifs du règlement no 2988/95 et est en même temps compatible avec le règlement no 1164/94 (car le projet de construction est régi par les règles spécifiques de ce dernier).

106.

Ainsi, il est nécessaire d’interpréter les règles régissant notamment le paiement du solde du concours financier prévues à l’annexe II du règlement no 1164/94 (et par les lignes directrices relatives à la clôture) conjointement avec l’expression « le programme est définitivement clôturé » de l’article 3, paragraphe 1, deuxième alinéa, du règlement no 2988/95 d’une manière cohérente et compatible.

107.

La décision de la Commission approuvant le concours financier a défini le montant de l’aide, le plan de financement et l’ensemble des conditions ainsi que la date de fin estimée d’un projet, qui était également la date de fin d’éligibilité des dépenses en vertu du règlement no 1164/94 ( 63 ). Les éléments essentiels de cette décision devaient être publiés au Journal officiel ( 64 ). Les règles du Fonds de cohésion prévoyaient des contrôles (article 12, paragraphe 1) et exigeaient que les documents obligatoires soient soumis à la Commission. Le régime général prévu à l’article D, paragraphe 2, sous d), de l’annexe II du règlement no 1164/94 fait apparaître que le rapport final devait être soumis à la Commission dans les six mois de la date limite pour la réalisation des travaux et des dépenses [article D, paragraphe 2, sous d), troisième tiret] ou au plus tard dans les 18 mois de la date finale de la réalisation des travaux et des paiements telle que fixée par la décision octroyant le concours (article D, paragraphe 3). La Commission était censée procéder au paiement final à l’autorité nationale compétente au plus tard deux mois après réception d’une demande de paiement recevable (article D, paragraphe 5). Les autorités nationales étaient ensuite tenues de conserver toutes les pièces justificatives à la disposition de la Commission pendant trois ans (article G, paragraphe 3).

108.

Ces règles ne permettent pas d’identifier un calendrier précis de la clôture des projets. La situation variera en fonction des circonstances de l’affaire. Il me semble néanmoins que le lien entre la procédure de clôture au titre du règlement no 1164/94 et la clôture définitive d’un projet aux fins de l’article 3, paragraphe 1, deuxième alinéa, du règlement no 2988/95 permet d’identifier une autre option, que je désignerai l’« option 3 ».

109.

Afin d’établir si un projet relevant du Fonds de cohésion (ou un ancien projet ISPA) est considéré comme étant définitivement clôturé, il est en premier lieu nécessaire de déterminer si les autorités nationales compétentes ont présenté une demande de paiement recevable à la Commission pour le projet concerné. En deuxième lieu, la décision de la Commission approuvant le concours et la date de fin prévue par le protocole financier devraient être pris en compte. En troisième lieu, il est nécessaire d’établir si le rapport final a été soumis à la Commission conformément à l’article D, paragraphe 2, sous d), deuxième tiret, ou à l’article D, paragraphe 3, de l’annexe II du règlement no 1164/94. En quatrième lieu, la Commission a en règle générale deux mois après réception d’une demande recevable pour verser le solde. En cinquième lieu, à moins qu’il n’en soit disposé autrement, les documents relatifs au projet doivent être conservés pendant trois ans pour permettre à la Commission de réaliser tous les contrôles financiers ( 65 ). À l’issue de cette période, le projet est considéré comme étant définitivement clôturé.

110.

L’option 3 me semble marquer la fin ou, selon le libellé du règlement no 2988/95, la « clôture » d’un projet. Cette approche est compatible avec les obligations générales incombant à la Commission, au titre de l’article 17, paragraphe 1, TUE, d’exécuter le budget et de gérer les programmes, et notamment avec son obligation, en vertu du règlement no 1164/94, de réaliser des contrôles et de mettre en œuvre des corrections financières (articles G et H de l’annexe II de ce règlement). L’option 3 permet également aux États membres de respecter leurs obligations. Parmi celles-ci figurent la réalisation des contrôles financiers nécessaires, la détection des irrégularités, la démonstration que le projet a été mis en œuvre de manière appropriée et l’obtention du paiement du solde en vertu de ce règlement ( 66 ).

111.

Alors qu’il est indubitablement vrai qu’il est plus facile pour des opérateurs économiques d’être avisés d’un délai de prescription qui se caractérise en s’étendant sur une durée définie (par exemple de quatre ans) et est déclenché par un évènement précis, ce modèle ne se prête pas facilement à une notion telle que celle d’un programme pluriannuel, laquelle est intrinsèquement fluide. La date de fin d’un tel programme peut seulement être estimée à son début. Je considère que l’option 3 apporte en fait une sécurité juridique suffisante. Elle garantit que les droits des opérateurs économiques ne puissent pas être indéfiniment contestés. Le délai de prescription est établi en référence au règlement no 1164/94 et ses paramètres sont donc fixés en avance et suffisamment prévisibles par l’opérateur économique concerné. Les programmes pluriannuels sont des réalisations de grande envergure. Ils sont donc susceptibles de concerner des opérateurs économiques importants et sophistiqués dont on peut escompter qu’ils aient une certaine connaissance des règles et des procédures pertinentes, ou y aient accès. L’option 3 peut même avoir l’avantage d’encourager les opérateurs économiques à veiller à communiquer en temps opportun aux autorités compétentes de l’État membre les éléments nécessaires à la compilation des documents de clôture dans le cadre des règles légales.

112.

D’après moi, l’option 3 est proportionnée dans la mesure où elle suit les règles prévues par le règlement no 1164/94, qui garantissent que les États membres et la Commission respectent leurs obligations respectives au titre de ce règlement. Un délai de prescription qui tient compte de la date de fin du projet en cause, la présentation du rapport final et une demande de paiement recevable, conjointement avec le délai de deux mois permettant à la Commission de procéder au paiement, ainsi qu’un délai de trois ans lors duquel des corrections financières sont susceptibles d’être apportées, correspond aux règles que le législateur a introduites pour protéger les intérêts financiers de l’Union et ne va pas au-delà de ce qui est nécessaire à cette fin.

113.

Que se produit-il si une demande recevable n’est pas soumise par l’État membre à la Commission (par exemple, si le rapport final est soumis à la Commission après la période de 18 mois prévue à l’article D, paragraphe 3, de l’annexe II au règlement no 1164/94 – ce qui a pu être le cas en l’espèce – ou n’est pas adressé du tout) ( 67 ) ? Je considère que dans ces circonstances, il est ensuite nécessaire de prendre en compte la date de fin du projet dans le protocole financier et la décision de la Commission approuvant le projet. La date limite de 18 mois après la présentation par l’organisme national compétent de la date finale de réalisation des travaux et des paiements en vertu de l’article D, paragraphe 3, de l’annexe II au règlement no 1164/94 devrait dès lors être utilisé comme substitut à la présentation réelle du rapport final. Dans une telle hypothèse, sur le fondement de cette disposition, le paiement du solde devrait en tout état de cause être annulé et la Commission devrait établir s’il est approprié d’appliquer une correction financière. Il semble exister une lacune dans la disposition législative dans la mesure où les États membres sont soumis à une obligation de conserver les documents pendant trois ans à la suite du paiement final, mais aucun calendrier correspondant n’est précisé dans l’hypothèse où ce paiement ne serait pas opéré. Cependant, il serait incompatible avec le principe de sécurité juridique que la Commission dispose d’une période indéfinie lors de laquelle elle peut vérifier la situation. Il serait de même curieux que le délai approprié soit inférieur aux trois années prévues à l’article G, paragraphe 3, de l’annexe II du règlement no 1164/94. J’estime donc que ce délai de trois ans devrait également être prévu lorsqu’une demande recevable n’a pas été soumise à la Commission par l’État membre concerné.

114.

L’achèvement des travaux de construction semblerait marquer la fin naturelle d’un projet de construction (ci-après l’« option 4 »). Est-il envisageable que l’option 4 soit préférable à l’option 3 ?

115.

Je pense que la réponse est négative.

116.

D’une part, les règles du Fonds de cohésion comportent des dispositions précises en matière de clôture de projets ( 68 ), mais il n’existe pas de règles similaires établissant le moment où le projet de construction est achevé. L’absence de telles dispositions suggère qu’il existerait une absence de transparence ainsi que de sécurité juridique si l’achèvement du projet de construction devait être considéré comme la clôture définitive.

117.

D’autre part, il est plus cohérent avec les objectifs généraux du règlement no 2988/95 que la clôture du projet, plutôt que le moment où les travaux de construction sont achevés, constitue une « clôture ». Même si un objectif du règlement no 2988/95 est d’apporter une sécurité juridique aux opérateurs économiques, son but essentiel est de protéger les intérêts financiers de l’Union européenne au moyen de la poursuite des irrégularités au travers de l’ensemble de la gamme des politiques de l’Union ( 69 ). Par conséquent, en ce qui concerne l’application du délai de prescription, la question pertinente est de savoir quand les crédits de l’Union quittent le budget.

118.

J’adhère donc à la considération que l’achèvement des travaux de construction ne constitue pas une quatrième option crédible.

119.

Les dispositions du règlement no 1164/94 établissent un degré de sécurité juridique. Cependant, la manière selon laquelle elles opèrent va varier selon les circonstances de l’affaire.

120.

En l’espèce, la juridiction de renvoi a fourni certains détails relatifs à la décision ISPA initiale ( 70 ). Cependant, la Cour ne dispose quasiment d’aucune information sur ce qui s’est passé après la révision du protocole financier opérée par la décision du 27 décembre 2004 de la Commission, en dehors du fait que la date de fin révisée du projet de construction est devenue le 31 décembre 2008. Sur le fondement de l’article D, paragraphe 3, de l’annexe II au règlement no 1164/94, le rapport final aurait dû être soumis à la Commission pour le 30 juin 2010 au plus tard (dans le délai de 18 mois prévu par l’article D, paragraphe 3, de l’annexe II du règlement no 1164/94). Il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier le moment où les paiements effectués par l’AGPE devaient être opérés. L’ordonnance de renvoi est muette sur ce point. La Cour ne sait pas non plus si une demande de paiement recevable a été introduite : sinon, le délai de deux mois qui aurait amené le terme du délai au 31 août 2010 ne s’appliquerait pas. Le délai de trois ans prévu à l’article G, paragraphe 3, de l’annexe II de ce règlement doit ensuite être intégré dans le calcul, afin de permettre à la Commission d’accomplir son obligation de mener des contrôles et établir s’il convient d’imposer des corrections financières.

121.

Il en découle que le délai de prescription aurait expiré au plus tôt le 31 août 2013 si une demande de paiement recevable avait été présentée. Il aurait pris fin le 30 juin 2013 si une telle demande n’avait pas été introduite. En tout état de cause, même si la date à laquelle l’AGPE devait s’acquitter des paiements n’était pas reportée au-delà du 31 décembre 2008, les décisions attaquées du 29 mars 2013 relèveraient du délai de prescription.

122.

On ignore si les autorités lituaniennes et la Commission avaient conclu un accord qui leur aurait permis de présenter les documents obligatoires nettement plus tard que la date de fin du 31 décembre 2008 fixée dans le protocole financier modifié ( 71 ). On ignore de même si, le cas échéant, un tel accord aurait été compatible avec le règlement no 1164/94. La Commission n’a pas annulé le paiement du solde pour défaut de soumission du rapport final conformément à l’article D, paragraphe 3, de l’annexe II de ce règlement. Elle n’a pas non plus déclenché le mécanisme de correction financière. Il appartient à la juridiction de renvoi d’établir et de vérifier les accords entre la Commission et les autorités lituaniennes concernant la clôture du projet en cause.

123.

Je considère donc que, sous réserve de vérification des circonstances factuelles par la juridiction de renvoi, le 30 juin 2013 devrait être considéré comme la date la plus proche à laquelle le projet a pu avoir été définitivement clôturé et que les décisions attaquées avaient dès lors été adoptées dans le délai de prescription prévu à l’article 3, paragraphe 1, deuxième alinéa, du règlement no 2988/95.

124.

Afin de se prononcer sur l’application du délai de prescription aux fins de l’article 3, paragraphe 1, du règlement no 2988/95 dans le cas d’un programme pluriannuel qui concerne un ancien projet ISPA régi par les dispositions de l’annexe II du règlement no 1164/94, il est donc nécessaire d’établir : i) si une demande de paiement recevable a été présentée dans le cadre de l’article D, paragraphe 5, par les autorités nationales compétentes de l’État membre concerné à la Commission ; ii) la date finale de réalisation des travaux et des paiements, telle que définie dans la décision de la Commission octroyant le concours et le protocole financier l’accompagnant ; iii) si le rapport final exigé par l’article D, paragraphe 2, sous d), a été soumis à la Commission ; iv) si le délai de deux mois prévu à l’article D, paragraphe 5, a expiré ; et v) si un délai de trois ans (à moins qu’il n’en soit décidé autrement en vertu de l’article G, paragraphe 3) a expiré à la suite du versement par la Commission du solde afférent au projet. Partant, s’agissant d’un projet tel que l’aménagement d’un système de gestion des déchets pour la région d’Alytus en Lituanie, il appartient à la juridiction de renvoi d’établir ces éléments et, compte tenu de ses constatations, de déterminer si le programme pluriannuel relatif à ce projet a été définitivement clôturé le 30 juin 2013 ou à une date ultérieure.

Conclusion

125.

Compte tenu de l’ensemble des considérations qui précèdent, Je suggère donc à la Cour de répondre comme suit à la question posée par le Lietuvos vyriausiasis administracinis teismas (Cour administrative suprême de Lituanie) :

1)

Lorsqu’un concours financier communautaire a été octroyé en vertu du règlement (CE) no 1267/1999 du Conseil du 21 juin 1999 établissant un instrument structurel de préadhésion pour un projet qui :

constitue une mesure éligible aux fins de l’article 2, paragraphe 2, de ce règlement ;

a été établi sur le fondement d’une décision de la Commission et d’un protocole financier ayant fait l’objet d’un accord entre la Commission et les autorités compétentes de l’Etat membre concerné ; et

a été réalisé sur une période d’au moins deux ans,

un tel projet relève de la notion de programme pluriannuel aux fins de l’article 3, paragraphe 1, deuxième alinéa, du règlement (CE, Euratom) no 2988/95 du Conseil, du 18 décembre 1995, relatif à la protection des intérêts financiers des Communautés européennes. Partant, sous réserve de vérification par la juridiction de renvoi qu’un projet comme l’aménagement d’un système de gestion des déchets pour la région d’Alytus, Lituanie, remplit ces conditions, un projet de ce type est en mesure de constituer un programme pluriannuel en vertu du règlement no 2988/95.

2)

Afin de déterminer le point de départ du délai de prescription aux fins de l’article 3, paragraphe 1, du règlement no 2988/95 dans le cas d’un programme pluriannuel qui concerne un ancien projet ISPA régi par les dispositions de l’annexe II du règlement (CE) no 1164/94 du Conseil, du 16 mai 1994, instituant le Fonds de cohésion, la juridiction de renvoi doit vérifier :

si une demande de paiement recevable a été présentée, dans le cadre de l’article D, paragraphe 5, par les autorités nationales compétentes de l’État membre concerné à la Commission ;

la date finale de réalisation des travaux et des paiements, telle que définie dans la décision de la Commission octroyant le concours et le protocole financier l’accompagnant ;

si le rapport final exigé par l’article D, paragraphe 2, sous d), a été soumis à la Commission ;

si le délai de deux mois prévu à l’article D, paragraphe 5, a expiré ; et

si un délai de trois ans (à moins qu’il n’en soit décidé autrement en vertu de l’article G, paragraphe 3) a expiré à la suite du versement par la Commission du solde afférent au projet.

Par conséquent, en ce qui concerne un projet tel que l’aménagement d’un système de gestion des déchets pour la région d’Alytus en Lituanie, il appartient à la juridiction de renvoi d’établir ces éléments et, compte tenu de ses constatations, de déterminer si le programme pluriannuel relatif à ce projet est définitivement clôturé le 30 juin 2013 ou à une date ultérieure.


( 1 ) Langue originale: l’anglais.

( 2 ) Règlement du 18 décembre 1995 (JO 1995, L 312, p. 1).

( 3 ) En substance, la politique de l’Union en matière de cohésion économique et sociale vise en particulier à réduire l’écart entre les niveaux de développement des territoires de l’Union et à traiter « le retard des régions les moins favorisées ». Voir, à cet égard, article 174 TFUE.

( 4 ) JO 2010, C 83, p. 389, ci-après la « Charte ».

( 5 ) Voir premier considérant du règlement no 2988/95.

( 6 ) Voir considérants 2, 3 et 13 du règlement no 2988/95.

( 7 ) En vertu de l’article 6, paragraphe 1, l’imposition des sanctions pécuniaires, telles que les amendes administratives, peut être suspendue par décision de l’autorité compétente si une procédure pénale a été ouverte contre la personne en cause et porte sur les mêmes faits. La suspension de la procédure administrative suspend le délai de prescription prévu à l’article 3.

( 8 ) Dans les présentes conclusions, je ferai référence à cette période comme l’« époque des faits ».

( 9 ) Règlement du Conseil du 16 mai 1994 (JO 1994, L 130, p. 1). Ce règlement, tel que modifié par les règlements (CE) no 1264/1999 (JO 1999, L 161, p. 57) et (CE) no 1265/1999 du Conseil (JO 1999, L 161, p. 62), s’appliquait aux projets qui étaient mis en œuvre dans les États membres à l’époque des faits. Le règlement no 1164/94 a été abrogé par le règlement (CE) no 1083/2006 du Conseil, du 11 juillet 2006, portant dispositions générales sur le Fonds européen de développement régional, le Fonds social européen et le Fonds de cohésion, et abrogeant le règlement (CE) no 1260/1999 (JO 2006, L 210, p. 25). Pour bien situer les choses, je devrais souligner que le règlement no 1260/1999 prévoyait des dispositions générales sur les Fonds structurels, à savoir le Fonds européen de développement régional, le Fonds social européen, le Fonds européen d’orientation et de garantie agricole, section « orientation », et l’Instrument financier d’orientation de la pêche, ainsi que l’indique l’article 2, paragraphe 1, de ce règlement. Les concours financiers au titre des Fonds structurels ne sont pas en cause en l’espèce. Les dispositions transitoires prévues à l’article 105 du règlement no 1083/2006 précisaient que ce règlement n’affectait pas la poursuite ni la modification d’un projet cofinancé par le Fonds de cohésion approuvé par la Commission sur la base du règlement no 1164/94.

( 10 ) Règlement du 21 juin 1999 (JO 1999, L 161, p. 73), tel que modifié par les règlements (CE) no 2382/2001 du Conseil du 4 décembre 2001 (JO 2001, L 323, p. 1) et (CE) no 2500/2001 du Conseil du 17 décembre 2001 (JO 2001, L 342, p. 1), s’appliquait à l’époque des faits. Le règlement no 1267/1999 a été par la suite abrogé par le règlement (CE) no 1085/2006 du Conseil, du 17 juillet 2006, établissant un instrument d’aide de préadhésion (IAP) (JO 2006, L 210, p. 82). Voir également points 23 à 28 ci-après.

( 11 ) Voir vingt-septième considérant du règlement no 1164/94.

( 12 ) L’article 2, paragraphe 5, a été intégré dans le règlement no 1164/94 par l’acte relatif aux conditions d’adhésion à l’Union européenne de la République tchèque, de la République d’Estonie, de la République de Chypre, de la République de Lettonie, de la République de Lituanie, de la République de Hongrie, de la République de Malte, de la République de Pologne, de la République de Slovénie et de la République slovaque, et aux adaptations des traités sur lesquels est fondée l’Union européenne (ci-après l’« Acte d’adhésion ») (JO 2003, L 236, p. 33).

( 13 ) L’article 10, paragraphe 5, premier tiret, prévoyait les critères à retenir pour garantir la haute qualité des projets qui obtenaient le bénéfice de concours financiers.

( 14 ) Les documents qui devaient être soumis à la Commission conformément à l’article D, paragraphe 2, sous d), de l’annexe II étaient : i) une demande de paiement (deuxième tiret) ; ii) le rapport final (troisième tiret) ; iii) une attestation confirmant les dépenses (quatrième tiret) ; et iv) une déclaration de clôture qui inclut le rapport de clôture [cinquième tiret lu en combinaison avec l’article 12, paragraphe 1, sous f)]. Dans les présentes conclusions, je ferai collectivement référence à ces documents comme les « documents obligatoires ».

( 15 ) Je comprends l’expression « une demande de paiement recevable » visée à l’article D, paragraphe 5, comme visant une demande dûment accompagnée par les documents obligatoires, notamment ceux mentionnés au point 20 et à la note de bas de page 14 ci-dessus.

( 16 ) Considérants 4, 7 et 14.

( 17 ) Voir point 29 ci-après.

( 18 ) Voir article 3.

( 19 ) L’article 14 prévoyait que la Commission est assistée par un comité constitué de représentants des États membres et présidé par le représentant de la Commission.

( 20 ) Le règlement financier, du 21 décembre 1977, applicable au budget général des Communautés européennes (JO 1977, L 356, p. 1) était en vigueur lorsque la Commission a adopté la décision ISPA initiale.

( 21 ) Article 9, paragraphe 1, sous b), c) et d).

( 22 ) Voir points 1, 4 et 5 de l’annexe III au règlement no 1267/1999.

( 23 ) Voir points 14 et 15 des conclusions de la Présidence du Conseil européen de Luxembourg du 12 et 13 décembre 1997.

( 24 ) Décision du Conseil, du 28 janvier 2002, concernant les principes, priorités, objectifs intermédiaires et conditions du partenariat pour l’adhésion de la Lituanie (JO 2002, L 44, p. 54), voir article 1er.

( 25 ) (JO 2002, L 201, p. 5). Ce règlement a été abrogé par le règlement (CE) no 1828/2006 de la Commission, du 8 décembre 2006, établissant les modalités d’exécution du règlement (CE) no 1083/2006 du Conseil portant dispositions générales sur le Fonds européen de développement régional, le Fonds social européen et le Fonds de cohésion, et du règlement (CE) no 1080/2006 du Parlement européen et du Conseil relatif au Fonds européen de développement régional (JO 2006, L 371, p. 1).

( 26 ) Règlement (CE) no 16/2003 de la Commission, du 6 janvier 2003, portant modalités particulières d’exécution du règlement no 1164/94 en ce qui concerne l’éligibilité des dépenses dans le cadre des actions cofinancées par le Fonds de cohésion (JO 2003, L 2, p. 7). Ce règlement a été abrogé par le règlement no 1828/2006 à partir du 16 janvier 2007.

( 27 ) Pour davantage de précisions concernant la décision de la Commission approuvant les projets, voir points 14 et 26 ci-dessus.

( 28 ) Communication à la Commission de Mme Hübner SEC(2007), version finale du 23 avril 2008.

( 29 ) Les contractants privés sont les entreprises (UAB) Alkesta, Skirnuva avec Parama et Dzūkijos statyba. Je ferai référence aux contrats qui ont été conclus comme les « contrats de marchés publics ».

( 30 ) À la suite de la communication de ces nouvelles informations, l’AGPE a mené une nouvelle enquête sur les irrégularités concernant les dépenses du projet déclarées à la Commission, et deux séries de recours la concernant étaient toujours en instance lorsque la juridiction de renvoi a décidé de présenter la demande de décision préjudicielle en l’espèce. L’ordonnance de renvoi indique, cependant, que ces autres recours ne concernent pas les questions en cause dans la procédure au principal.

( 31 ) J’utilise le terme « dépenses en excédent » (« overbooking »), tel qu’utilisé dans la lettre de la Commission du 26 juin 2015, comme visant les dépenses qui sont encourues au-delà des limites éligibles.

( 32 ) Voir article 16 bis du règlement no 1164/94. En ce qui concerne la clôture des projets, voir les lignes directrices relatives à la clôture mentionnées au point 37 ci‑dessus. Alors que la décision ISPA initiale a été adoptée en vertu du règlement no 1267/1999, je me réfère aux dispositions du règlement no 1164/94 dans mon analyse car ce sont les règles de ce dernier, notamment les dispositions d’application prévues à l’annexe II, qui régissent la clôture du projet en cause au principal. Je ne ferai par conséquent référence aux dispositions du règlement no 1267/1999 que si cela mérite davantage de précision.

( 33 ) Voir point 41 et note de bas de page 29 ci-dessus.

( 34 ) Voir les conclusions visées au point 43 ci-dessus.

( 35 ) En tant que destinataire des crédits du budget de l’Union, l’entreprise peut être considérée comme étant un opérateur économique aux fins du règlement no 2988/95. Voir, par exemple, arrêt du 21 décembre 2011, Chambre de commerce et d’industrie de l’Indre (C‑465/10, EU:C:2011:867, point 45).

( 36 ) Voir arrêt du 16 juillet 2015, Maïstrellis (C‑222/14, EU:C:2015:473, point 30 et jurisprudence citée).

( 37 ) L’article 312, paragraphe 1, TFUE indique que le cadre financier pluriannuel : i) vise à assurer l’évolution ordonnée des dépenses de l’Union dans la limite de ses ressources propres ; ii) est établi pour une période d’au moins cinq années ; et iii) doit être respecté par le budget annuel de l’Union. Il ne s’agit pas du budget. La notion de cadre financier pluriannuel a été introduite dans les traités, le 1er décembre 2009, par le traité de Lisbonne. Le règlement (UE, Euratom) no 966/2012 du Parlement européen et du Conseil, du 25 octobre 2012, relatif aux règles financières applicables au budget général de l’Union et abrogeant le règlement (CE, Euratom) no 1605/2002 du Conseil (JO 2012, L 298, p. 1) a introduit des dispositions complémentaires afin d’aligner le règlement financier sur les changements consacrés par le traité de Lisbonne [voir la proposition de la Commission de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif aux règles financières applicables au budget annuel de l’Union COM(2010) 815 final]. À mon sens, le cadre financier pluriannuel est un outil de programmation financière et de discipline budgétaire qui vise à assurer que les dépenses de l’Union soient prévisibles et se confinent dans les limites convenues.

( 38 ) Des promesses juridiquement contraignantes de dépenser des crédits qui ne seront pas nécessairement versés au cours du même exercice mais peuvent être déboursés sur plusieurs exercices financiers. Voir article 11 du règlement no 1164/94 mentionné au point 15 ci-dessus.

( 39 ) Voir article C, paragraphe 2, sous a), de l’annexe II au règlement no 1164/94.

( 40 ) Proposition de règlement (CE) de la Commission établissant un instrument structurel de pré-adhésion du 18 mars 1998, COM(1998) 138 final, p. 7.

( 41 ) Voir point 6 ci-dessus.

( 42 ) Voir l’article 3, paragraphe 2, premier et deuxième tirets, du règlement no 1164/94. Voir de même la définition du « projet » à l’article A, paragraphe 2, de l’annexe II de ce règlement.

( 43 ) Voir, par exemple, article C, paragraphe 1, de l’annexe II du règlement no 1164/94 concernant les engagements budgétaires.

( 44 ) Voir point 4 de l’annexe à la décision 2002/89, qui indique sous le titre « Environnement » qu’achever la transposition de l’acquis en matière d’environnement, notamment par sa mise en œuvre en ce qui concerne la gestion des déchets, faisait partie des priorités et des objectifs intermédiaires qui étaient identifiés dans le partenariat pour l’adhésion de la Lituanie.

( 45 ) Voir article 2, paragraphe 2, du règlement no 1267/1999.

( 46 ) Voir arrêt du 11 novembre 2010, Danosa (C‑232/09, EU:C:2010:674, points 33 et 34 et jurisprudence citée).

( 47 ) Voir, notamment, arrêt du 17 janvier 2013, Hewlett-Packard Europe (C‑361/11, EU:C:2013:18, point 35).

( 48 ) Voir point 47 ci-dessus.

( 49 ) Voir arrêt du 11 juin 2015, Pfeifer & Langen (C‑52/14, EU:C:2015:381, point 20 et jurisprudence citée). Voir également le troisième considérant du règlement no 2988/95.

( 50 ) Voir arrêt du 11 juin 2015, Pfeifer & Langen (C‑52/14, EU:C:2015:381, point 24).

( 51 ) Voir arrêt du 5 mai 2011, Ze Fu Fleischhandel et Vion Trading (C‑201/10 et C‑202/10, EU:C:2011:282, point 32 et jurisprudence citée).

( 52 ) Voir arrêt du 11 juin 2015, Pfeifer & Langen (C‑52/14, EU:C:2015:381, point 21).

( 53 ) Voir arrêt du 2 décembre 2004, José Peix/Commission (C‑226/03 P, EU:C:2004:768, point 17).

( 54 ) Voir arrêt du 11 juin 2015, Pfeifer & Langen (C‑52/14, EU:C:2015:381, point 49 et jurisprudence citée).

( 55 ) Voir arrêt du 11 juin 2015, Pfeifer & Langen (C‑52/14, EU:C:2015:381, point 52).

( 56 ) Voir arrêt du 11 juin 2015, Pfeifer & Langen (C‑52/14, EU:C:2015:381, points 41 à 43). Souligné par mes soins.

( 57 ) Voir arrêt du 11 juin 2015, Pfeifer & Langen (C‑52/14, EU:C:2015:381, point 47).

( 58 ) Voir arrêt du 11 juin 2015, Pfeifer & Langen (C‑52/14, EU:C:2015:381, point 63).

( 59 ) Voir arrêt du 11 juin 2015, Pfeifer & Langen (C‑52/14, EU:C:2015:381, point 64).

( 60 ) Voir arrêt du 5 mai 2011, Ze Fu Fleischhandel et Vion Trading (C‑201/10 et C‑202/10, EU:C:2011:282, point 38 et jurisprudence citée).

( 61 ) Voir arrêt du 11 juin 2015, Pfeifer & Langen (C‑52/14, EU:C:2015:381, point 68).

( 62 ) Voir Cour des comptes européenne, L’instrument structurel de préadhésion (ISPA) 2000-2006, rapport spécial no 12/2008, point 27.

( 63 ) Voir article 10, paragraphe 6, du règlement no 1164/94 et article 8 du règlement no 16/2003.

( 64 ) Article 10, paragraphe 7, du règlement no 1164/94.

( 65 ) Voir point 113 ci-après.

( 66 ) Voir, par exemple, article 12, paragraphe 1, sous e) et f), du règlement no 1164/94. Elle permet également aux États membres de jouer leur rôle en vertu de l’article 1er, paragraphe 1, du règlement no 2988/95.

( 67 ) Voir annexe 3 des lignes directrices relatives à la clôture.

( 68 ) Voir point 37 ci-dessus.

( 69 ) Voir point 6 ci-dessus.

( 70 ) Voir points 42 à 44.

( 71 ) La juridiction de renvoi indique dans son ordonnance de renvoi que, le 14 juillet 2014, le ministère des Finances a présenté à la Commission un rapport d’audit public mis à jour avec une déclaration de clôture mise à jour.