ORDONNANCE DE LA COUR (sixième chambre)

6 septembre 2016 (*)

« Pourvoi – Marque de l’Union européenne – Article 181 du règlement de procédure de la Cour – Pourvoi manifestement irrecevable ou manifestement non fondé »

Dans l’affaire C‑237/14 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 13 mai 2014,

Lidl Stiftung & Co. KG, établie à Neckarsulm (Allemagne), représentée par Mes M. Wolter, M. Kefferpütz et A. K. Marx, Rechtsanwälte,

partie requérante,

l’autre partie à la procédure étant :

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par M. L. Rampini, en qualité d’agent,

partie défenderesse en première instance,

LA COUR (sixième chambre),

composée de M. A. Arabadjiev, président de chambre, MM. J.‑C. Bonichot et E. Regan (rapporteur), juges,

avocat général : M. P. Mengozzi,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de statuer par voie d’ordonnance motivée, conformément à l’article 181 du règlement de procédure de la Cour,

rend la présente

Ordonnance

1        Par son pourvoi, Lidl Stiftung & Co. KG demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 27 février 2014, Lidl Stiftung/OHMI – Lídl Music (LIDL express) (T‑225/12, non publié, ci‑après l’« arrêt attaqué », EU:T:2014:94), par lequel celui‑ci a rejeté son recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 21 mars 2012 (R 2379/2010-1), relative à une procédure d’opposition entre Lídl Music spol. s r.o. et Lidl Stiftung (ci‑après la « décision litigieuse »).

 Le cadre juridique

 Le règlement (CE) n° 207/2009

2        L’article 8, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), dispose :

« Sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement :

[...]

b)      lorsqu’en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire dans lequel la marque antérieure est protégée ; le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure. »

3        L’article 15 de ce règlement, intitulé « Usage de la marque de l’Union européenne », prévoit, à son paragraphe 1 :

« Si, dans un délai de cinq ans à compter de l’enregistrement, la marque de l’Union européenne n’a pas fait l’objet par le titulaire d’un usage sérieux dans l’Union pour les produits ou les services pour lesquels elle est enregistrée, ou si un tel usage a été suspendu pendant un délai ininterrompu de cinq ans, la marque de l’Union européenne est soumise aux sanctions prévues au présent règlement, sauf juste motif pour le non-usage.

Sont également considérés comme usage au sens du premier alinéa :

a)      l’usage de la marque de l’Union européenne sous une forme qui diffère par des éléments n’altérant pas le caractère distinctif de la marque dans la forme sous laquelle celle-ci a été enregistrée ;

[...] »

4        L’article 42, paragraphes 2 et 3, dudit règlement dispose :

« 2.      Sur requête du demandeur, le titulaire d’une marque de l’Union européenne antérieure qui a formé opposition apporte la preuve que, au cours des cinq années qui précèdent la publication de la demande de marque de l’Union européenne, la marque de l’Union européenne antérieure a fait l’objet d’un usage sérieux dans l’Union pour les produits ou les services pour lesquels elle est enregistrée et sur lesquels l’opposition est fondée, ou qu’il existe de justes motifs pour le non-usage, pour autant qu’à cette date la marque antérieure était enregistrée depuis cinq ans au moins. À défaut d’une telle preuve, l’opposition est rejetée. Si la marque de l’Union européenne antérieure n’a été utilisée que pour une partie des produits ou des services pour lesquels elle est enregistrée, elle n’est réputée enregistrée, aux fins de l’examen de l’opposition, que pour cette partie des produits ou services.

3.      Le paragraphe 2 s’applique aux marques nationales antérieures visées à l’article 8, paragraphe 2, point a), étant entendu que l’usage dans l’Union est remplacé par l’usage dans l’État membre où la marque nationale antérieure est protégée. »

5        En vertu de l’article 166 du même règlement, le règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), a été abrogé, mais les références faites au règlement abrogé s’entendent comme faites au règlement n° 207/2009.

 Le règlement no 2868/95

6        Intitulée « Preuve de l’usage », la règle 22 du règlement (CE) n° 2868/95 de la Commission, du 13 décembre 1995, portant modalités d’application du règlement n° 40/94 (JO 1995, L 303, p. 1), tel que modifié par le règlement (CE) n° 1041/2005 de la Commission, du 29 juin 2005 (JO 2005, L 172, p. 4) (ci-après le « règlement n° 2868/95 »), prévoit, à ses paragraphes 3 et 4 :

« 3.      Les indications et les preuves à produire afin de prouver l’usage de la marque comprennent des indications sur le lieu, la durée, l’importance et la nature de l’usage qui a été fait de la marque antérieure pour les produits et services pour lesquels elle est enregistrée et sur lesquels l’opposition est fondée, ces indications devant être fournies, preuves à l’appui, conformément au paragraphe 4.

4.      Les preuves sont produites conformément aux règles 79 et 79 bis et se limitent, en principe, à la production de pièces justificatives comme, par exemple, des emballages, des étiquettes, des barèmes de prix, des catalogues, des factures, des photographies, des annonces dans les journaux, ainsi qu’aux déclarations écrites visées à l’article 76, paragraphe 1, point f), du règlement. »

 Les antécédents du litige

7        Les antécédents du litige, tels qu’ils ont été exposés par le Tribunal aux points 1 à 15 de l’arrêt attaqué, peuvent être résumés comme suit.

8        Le 9 avril 2008, Lidl Stiftung a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’EUIPO, en vertu du règlement n° 40/94.

9        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif suivant :

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10      Le 23 septembre 2008, Lídl Music a formé opposition au titre de l’article 42 du règlement n° 40/94 (correspondant à l’article 41 du règlement n° 207/2009), à l’enregistrement de ladite marque.

11      L’opposition ainsi formée était notamment fondée sur la marque tchèque figurative antérieure (ci‑après la « marque antérieure »), qui se présente comme suit :

                  Image not found

12      Les motifs invoqués à l’appui de cette opposition étaient ceux visés à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 [correspondant à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009].

13      À la suite de la demande de Lidl Stiftung, Lídl Music a produit divers documents afin de prouver l’usage sérieux de la marque antérieure, au sens de l’article 42, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 207/2009.

14      Par une décision du 12 novembre 2010, la division d’opposition de l’EUIPO a accueilli ladite opposition pour tous les produits contestés, sur le fondement de la marque antérieure.

15      Le 30 novembre 2010, Lidl Stiftung a formé, auprès de l’EUIPO, un recours contre cette décision de la division d’opposition.

16      Le 21 mars 2012, la première chambre de recours de l’EUIPO (ci-après la « chambre de recours ») a adopté la décision litigieuse, par laquelle elle a rejeté ce recours.

 La procédure devant le Tribunal et l’arrêt attaqué

17      Par une requête déposée au greffe du Tribunal le 29 mai 2012, Lidl Stiftung a introduit un recours tendant à l’annulation de la décision litigieuse.

18      À l’appui de son recours, Lidl Stiftung a invoqué trois moyens, tirés en substance, premièrement, de la violation des dispositions combinées de l’article 15, paragraphe 1, et de l’article 42, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 207/2009 ainsi que de la règle 22, paragraphes 3 et 4, du règlement n° 2868/95, au motif que la chambre de recours a conclu à tort à l’existence d’un usage sérieux au sens de ces dispositions, deuxièmement, de la violation de l’article 15, paragraphe 1, second alinéa, sous a), du règlement n° 207/2009, lu en combinaison avec l’article 42, paragraphes 2 et 3, du même règlement, au motif que la chambre de recours a considéré à tort que l’usage de la marque antérieure sous une forme différente de la forme enregistrée constituait un usage sérieux au sens de l’article 15, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009, et, troisièmement, de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, au motif que la chambre de recours a conclu à tort à l’existence d’un risque de confusion entre les marques en conflit.

19      Par l’arrêt attaqué, le Tribunal a rejeté le recours dans son entièreté.

 Les conclusions devant la Cour

20      Par son pourvoi, Lidl Stiftung demande à la Cour :

–        d’annuler l’arrêt attaqué ;

–        dans l’hypothèse où le recours serait favorablement accueilli, d’annuler la décision litigieuse, conformément aux conclusions présentées par elle devant le Tribunal, et

–        de condamner l’EUIPO aux dépens afférents aux procédures devant le Tribunal et devant la Cour.

21      L’EUIPO demande à la Cour de rejeter le recours dans son intégralité et de condamner Lidl Stiftung à supporter les dépens qu’il a exposés.

 Sur le pourvoi

22      En vertu de l’article 181 de son règlement de procédure, lorsqu’un pourvoi est, en tout ou en partie, manifestement irrecevable ou manifestement non fondé, la Cour peut, à tout moment, sur proposition du juge rapporteur, l’avocat général entendu, décider de rejeter ce pourvoi totalement ou partiellement par voie d’ordonnance motivée.

23      Il y a lieu de faire application de cette disposition en l’espèce.

24      À l’appui de son pourvoi, Lidl Stiftung présente trois moyens.

 Sur le premier moyen, tiré d’une violation des dispositions combinées de l’article 42, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 207/2009 ainsi que de la règle 22, paragraphes 3 et 4, du règlement n° 2868/95, lues en combinaison avec l’article 15, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009

25      Par son premier moyen, la requérante soutient que le Tribunal a méconnu le fait que la chambre de recours a fondé ses appréciations relatives à l’usage sérieux de la marque antérieure uniquement sur des éléments qui ne fournissent, tout au plus, que des indications concernant le lieu, la durée et l’importance de l’usage de cette marque, mais qui n’apportent aucune preuve solide et objective en ce qui concerne la nature de cet usage, même si ces éléments sont examinés en combinaison avec les autres éléments de preuve. Le Tribunal aurait commis une erreur de droit en constatant que la chambre de recours pouvait, à juste titre, considérer que les factures et les trois photographies non datées présentées par Lídl Music, dont deux photographies seulement illustrent les termes « Lidl Music », suffisaient à prouver l’usage sérieux de la marque antérieure. Au cours de la procédure, Lídl Music n’aurait pas démontré que ces photographies représentent la marque antérieure telle qu’elle aurait été utilisée sur les instruments de musique en République tchèque au cours de la période pertinente. Il ne pourrait être remédié à cette absence de preuve par la présentation de photographies en lien avec quelques factures, même si ces éléments concernent tant la période pertinente que le lieu pertinent.

26      Il y a lieu de constater que, par le premier moyen du pourvoi, sous couvert d’une violation de certaines dispositions du règlement n° 207/2009 ainsi que du règlement n° 2868/95, la requérante vise, en réalité, ainsi que le fait valoir à bon droit l’EUIPO, à remettre en cause l’appréciation des éléments de preuve effectuée par le Tribunal lors de son examen de la nature de l’usage de la marque antérieure, sans qu’il soit allégué une quelconque dénaturation de ces éléments.

27      Or, il convient de rappeler qu’il résulte de l’article 256 TFUE ainsi que de l’article 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne que le pourvoi est limité aux questions de droit. Le Tribunal est, dès lors, seul compétent pour constater et apprécier les faits pertinents ainsi que pour apprécier les éléments de preuve. L’appréciation de ces faits et de ces éléments de preuve ne constitue donc pas, sous réserve du cas de leur dénaturation, une question de droit soumise, comme telle, au contrôle de la Cour dans le cadre d’un pourvoi (arrêt du 17 mars 2016, Naazneen Investments/OHMI, C‑252/15 P, non publié, EU:C:2016:178, point 59 et jurisprudence citée).

28      Partant, le premier moyen du pourvoi doit être écarté comme étant manifestement irrecevable.

 Sur le deuxième moyen, tiré d’une violation des dispositions combinées de l’article 15, paragraphe 1, sous a), et de l’article 42, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 207/2009

29      Par son deuxième moyen, la requérante soutient que le Tribunal a commis une erreur de droit en jugeant, au point 53 de l’arrêt attaqué, que la chambre de recours avait, à juste titre, considéré que l’usage de la marque illustrée par les photographies produites n’était pas de nature à altérer le caractère distinctif de la marque antérieure telle qu’enregistrée et permettait donc de répondre aux exigences d’un usage sérieux, au sens des dispositions combinées de l’article 15, paragraphe 1, sous a), et de l’article 42, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 207/2009.

30      En procédant de la sorte, le Tribunal aurait méconnu le caractère dérogatoire de l’article 15, paragraphe 1, sous a), de ce règlement, qui doit, selon la requérante, faire l’objet d’une interprétation stricte. En principe, les dispositions combinées de l’article 42, paragraphes 2 et 3, et de l’article 15, paragraphe 1, dudit règlement exigeraient que la marque invoquée à l’appui de l’opposition ait été utilisée dans la forme sous laquelle elle a été enregistrée. Ce ne serait qu’à titre de dérogation que l’article 15, paragraphe 1, sous a), du même règlement prévoirait que « l’usage de la marque de l’Union européenne sous une forme qui diffère par des éléments n’altérant pas le caractère distinctif de la marque dans la forme sous laquelle celle-ci a été enregistrée » est, sous certaines conditions, considéré comme un usage, au sens de l’article 15, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009.

31      La requérante soutient, par conséquent, que l’article 15, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 207/2009 exige une appréciation de chaque élément de la marque antérieure dans la forme sous laquelle elle a été enregistrée, au regard de son impact sur le caractère distinctif de cette marque.

32      Le Tribunal aurait méconnu cette exigence en se fondant, au point 52 de l’arrêt attaqué, sur l’hypothèse erronée selon laquelle « les éléments figuratifs de la marque antérieure telle qu’enregistrée se limitent à la présentation stylistique de deux éléments verbaux », étant donné que cette marque contient, de manière additionnelle et distincte des éléments verbaux, un cercle contenant la lettre « L » sous une forme stylisée. En n’appréciant pas l’impact de cet élément sur le caractère distinctif de la marque antérieure telle qu’enregistrée, le Tribunal n’aurait pas tenu compte de l’ensemble des éléments de cette marque. Ledit élément ne serait pas négligeable ou secondaire par rapport aux éléments verbaux, mais exercerait une influence pertinente sur le caractère distinctif de la marque antérieure telle qu’enregistrée, dans son ensemble.

33      Par ailleurs, la lettre « M », représentée en plus grands caractères et comportant des points à ses sommets, exercerait également une influence sur le caractère distinctif de la marque antérieure telle qu’enregistrée.

34      Il serait constant que la marque représentée sur les photographies produites ne contient aucun desdits éléments figuratifs de la marque antérieure telle qu’enregistrée.

35      Enfin, la requérante fait valoir que, s’agissant des marques complexes, composées d’éléments verbaux et figuratifs, l’absence, dans la forme utilisée de la marque, d’un élément figuratif ayant un caractère distinctif de la marque telle qu’enregistrée, altère nécessairement le caractère distinctif global de celle‑ci, même si les éléments verbaux apparaissent dans la marque sous sa forme utilisée. Dans le cas contraire, le caractère distinctif d’une marque complexe telle qu’enregistrée serait apprécié différemment, au regard de l’article 15, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 207/2009 et au regard de l’article 8, paragraphe 1, sous b), de ce règlement, alors que ce dernier exigerait une appréciation cohérente du caractère distinctif de la marque antérieure.

36      L’EUIPO estime que le deuxième moyen du pourvoi est irrecevable, étant donné que la requérante tend à obtenir de la Cour une nouvelle appréciation des faits et des éléments de preuve. Il ajoute que ce moyen est, en tout état de cause, manifestement non fondé.

37      En premier lieu, dans la mesure où la requérante reproche au Tribunal d’avoir méconnu le caractère dérogatoire de l’article 15, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 207/2009, il convient de constater que cet argument doit être écarté comme manifestement non fondé.

38      Tout d’abord, contrairement à ce que suggère la requérante, il ressort des points 42, 46 et 50 à 53 de l’arrêt attaqué que le Tribunal a apprécié l’argument présenté par Lidl Stiftung en première instance, selon lequel les éléments figuratifs de la marque antérieure sous la forme dans laquelle elle a été enregistrée ne peuvent être qualifiés de négligeables, mais ont pour effet de modifier le caractère distinctif de la marque antérieure, aux fins, précisément, de déterminer si les conditions d’application de l’article 15, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009 étaient ou non remplies.

39      Ensuite, au point 52 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a constaté, dans le cadre de son appréciation souveraine des faits, que les éléments figuratifs de la marque antérieure telle qu’enregistrée se limitent à la présentation stylistique de deux éléments verbaux. Selon le Tribunal, ces éléments décoratifs ne jouent pas un rôle important dans l’impression d’ensemble du signe et n’ont pas de contenu sémantique intrinsèque qui donnerait à la marque un caractère distinctif ou désignerait les produits concernés.

40      Enfin, le Tribunal a conclu, au point 53 de l’arrêt attaqué, que ces éléments figuratifs sont négligeables et ne sont pas, dès lors, susceptibles d’altérer le caractère distinctif de la marque antérieure.

41      Si, certes, au point 52 de l’arrêt attaqué, le Tribunal n’a pas spécifiquement énuméré chacun des éléments figuratifs évoqués à ce point, il ressort néanmoins d’une lecture d’ensemble des points 42 à 53 de cet arrêt et, en particulier, des points 42 et 46 de celui‑ci, dans lesquels le Tribunal a fait référence à l’argumentation de Lidl Stiftung à cet égard, qu’il a considéré, implicitement, mais nécessairement, le cercle contenant la lettre « l » stylisée comme faisant partie de ladite présentation stylistique des deux éléments verbaux de la marque antérieure.

42      Le fait que l’appréciation du Tribunal, en particulier la conclusion à laquelle il est parvenu au point 53 de l’arrêt attaqué, vise l’ensemble des éléments figuratifs de la marque antérieure ressort également du point 76 de cet arrêt, dans lequel le Tribunal a constaté, notamment, que la lettre « l », entourée d’un cercle, constitue bien l’un des éléments figuratifs de la marque antérieure.

43      Au demeurant, le fait que le Tribunal est parvenu à une conclusion différente de celle de Lidl Stiftung en ce qui concerne les conditions d’application de l’article 15, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 207/2009 ne saurait, en soi, démontrer que celui-ci a commis une erreur de droit.

44      En second lieu, dans la mesure où Lidl Stiftung vise à démontrer que les éléments figuratifs de la marque antérieure exercent une influence déterminante sur le caractère distinctif de cette marque telle qu’enregistrée, il suffit de constater que, par cette argumentation, la requérante vise, en réalité, à demander à la Cour une nouvelle appréciation des faits et des éléments de preuve sans pour autant démontrer, ni même alléguer, une quelconque dénaturation de ceux‑ci. Ladite argumentation doit, dès lors, être écartée comme étant manifestement irrecevable.

45      Il s’ensuit que l’argumentation exposée au point 35 de la présente ordonnance doit être écartée pour les mêmes motifs, dès lors qu’elle se fonde sur la prémisse, non démontrée, selon laquelle lesdits éléments figuratifs de la marque antérieure influencent le caractère distinctif de celle‑ci.

46      Par conséquent, il y a lieu d’écarter le deuxième moyen du pourvoi comme étant, en partie, manifestement irrecevable et, en partie, manifestement non fondé.

 Sur le troisième moyen, tiré d’une violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009

47      Par son troisième moyen, la requérante fait valoir que le Tribunal a interprété l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 de manière erronée en constatant, au point 84 de l’arrêt attaqué, que la chambre de recours était en droit de conclure qu’il existe un risque de confusion, au sens de cette disposition, entre les marques en conflit. Si le Tribunal a rappelé, à bon droit, aux points 67, 70 et 71 de l’arrêt attaqué, la jurisprudence pertinente à cet égard, il n’aurait pas tenu compte de cette jurisprudence lors de son appréciation de la question de savoir s’il existe, en l’espèce, un risque de confusion.

48      La requérante considère que le Tribunal a commis une erreur de droit en constatant, au point 81 de l’arrêt attaqué, que la conclusion de la chambre de recours selon laquelle il existe une similitude entre les marques en conflit, car l’élément dominant dans chacune d’elles est le mot « lidl », doit être confirmée, dès lors que cette conclusion ne tient pas compte de manière appropriée des autres éléments de la marque antérieure.

49      Lors de son appréciation de la similitude des signes en conflit, le Tribunal aurait méconnu, notamment, le fait que l’appréciation de celle‑ci ne peut être effectuée sur la seule base de l’élément verbal dominant, si l’élément figuratif ne peut être considéré comme entièrement négligeable. À cet égard, le Tribunal n’aurait, en outre, pas pris en compte que, ainsi qu’il ressortirait des points 42 à 44 de l’arrêt du 20 septembre 2007, Nestlé/OHMI (C‑193/06 P, non publié, EU:C:2007:539), le fait qu’un élément ne soit pas négligeable ne signifie pas qu’il soit dominant et, dans le même sens, le fait qu’un élément ne soit pas dominant ne signifie pas qu’il soit négligeable.

50      Ce serait donc à tort que le Tribunal aurait constaté, en premier lieu, au point 75 de l’arrêt attaqué, que les éléments figuratifs de la marque dont l’enregistrement est demandé seront perçus comme un cadre décoratif dans lequel est placé l’élément verbal « lidl », dès lors que, lors de son examen de l’apparence visuelle de cette marque, il n’aurait pas tenu compte du fait que celle‑ci contient des éléments supplémentaires, à savoir le mot « express », qui comprend un « x » de couleur rouge, et est placé dans un rectangle jaune, des lignes précédant le mot « express » et un « i » accentué de couleur rouge dans le mot « LiDL ». Étant donné que, selon une jurisprudence établie, le consommateur percevrait normalement la marque comme un tout et ne se livrerait pas à un examen de ses différents détails, l’appréciation de celle-ci devrait être fondée sur son impression globale.

51      En deuxième lieu, le Tribunal aurait jugé de manière erronée, audit point 75 de l’arrêt attaqué, que les consommateurs seront davantage frappés par le mot « lidl » et devront se fonder sur celui-ci, plutôt que sur le mot « music » ou sur le cadre décoratif susmentionné, pour identifier l’origine commerciale ou industrielle des produits en cause. Le mot « music » ferait partie de la marque antérieure et non de la marque dont l’enregistrement est demandé.

52      En troisième lieu, la requérante reproche au Tribunal d’avoir constaté, au point 76 de l’arrêt attaqué, que les éléments figuratifs de la marque antérieure n’influencent pas les éléments véritablement distinctifs de la marque, dès lors qu’il est évident, selon elle, que lesdits éléments, notamment le cercle contenant la lettre « L » sous une forme stylisée, ont une telle influence. Les éléments figuratifs en couleur de la marque dont l’enregistrement est demandé seraient également adéquats pour indiquer l’origine commerciale des produits ou des services.

53      En quatrième et dernier lieu, la requérante soutient que c’est à tort que le Tribunal a jugé, au point 80 de l’arrêt attaqué, qu’il est impossible d’effectuer une comparaison conceptuelle des marques en conflit. En effet, celles-ci seraient différentes sur le plan conceptuel étant donné que les termes « LIDL MUSIC » font référence au résultat artistique de l’utilisation d’instruments de musique et que les termes « LiDL express » font référence à la rapidité.

54      La requérante soutient qu’un consommateur tchèque moyen percevra les différences entre les deux marques en conflit au moment de l’achat d’un instrument de musique, en particulier en raison des éléments figuratifs différents de la marque antérieure et de la composition différente desdites marques.

55      L’EUIPO fait valoir que le troisième moyen du pourvoi est irrecevable, étant donné que la requérante tente d’obtenir de la Cour une nouvelle appréciation des faits et des éléments de preuve. Il soutient que ce moyen est, en tout état de cause, manifestement non fondé.

56      Il convient de rejeter d’emblée comme étant manifestement non fondé l’argument exposé au point 51 de la présente ordonnance. En effet, s’il est vrai que le Tribunal a fait référence, au point 75 de l’arrêt attaqué, au mot « music » plutôt qu’au mot « express », il s’agit, à l’évidence, d’une erreur de plume qui ne saurait en aucun cas entraîner l’annulation de l’arrêt attaqué. À cet égard, il suffit de relever qu’il ressort d’une lecture d’ensemble de cet arrêt et, notamment, de son point 80, que le Tribunal était parfaitement conscient des différentes composantes des marques en conflit.

57      S’agissant de l’argumentation exposée aux points 48 à 50, 53 et 54 de la présente ordonnance, il convient de relever que, sous le couvert d’arguments tirés d’erreurs de droit prétendument commises par le Tribunal, la requérante demande à la Cour une nouvelle appréciation des faits en vue de la substituer à celle effectuée par le Tribunal.

58      En effet, tout d’abord, il ressort de l’argumentation résumée au point 50 de la présente ordonnance que les prétendues erreurs de droit visées par l’argumentation résumée aux points 48 et 49 de la présente ordonnance ne sauraient être constatées que par une appréciation du caractère distinctif des différents éléments des marques en conflit qui diverge de celle effectuée par le Tribunal. Or, une telle appréciation relève manifestement de celle des faits.

59      Ensuite, quant à l’argumentation évoquée au point 53 de la présente ordonnance, la requérante demande à la Cour de constater une erreur d’appréciation prétendument commise par le Tribunal lors de la comparaison conceptuelle des signes en conflit. Or, d’une part, une telle appréciation relève de celle des faits et, d’autre part, cette prétendue erreur ne saurait être constatée, ici encore, que par une appréciation du caractère distinctif des différents éléments des signes en conflit qui diverge de celle effectuée par le Tribunal.

60      Enfin, les arguments exposés aux points 52 et 54 de la présente ordonnance tendant également à ce que la Cour constate un caractère distinctif des éléments des marques en conflit qui diverge de celui constaté par le Tribunal, l’ensemble de cette argumentation doit être écartée comme étant manifestement irrecevable.

61      Il convient, par conséquent, d’écarter le troisième moyen du pourvoi comme étant, en partie, manifestement irrecevable et, en partie, manifestement non fondé.

62      Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que le pourvoi doit être rejeté.

 Sur les dépens

63      Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure de la Cour, rendu applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, de ce règlement, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. L’EUIPO ayant conclu à la condamnation de Lidl Stiftung aux dépens et celle-ci ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de la condamner aux dépens.

Par ces motifs, la Cour (sixième chambre) ordonne :

1)      Le pourvoi est rejeté.

2)      Lidl Stiftung & Co. KG est condamnée aux dépens.

Signatures


* Langue de procédure : l’anglais.