Affaire C‑252/14

Pensioenfonds Metaal en Techniek

contre

Skatteverket

(demande de décision préjudicielle,

introduite par le Högsta förvaltningsdomstolen)

«Renvoi préjudiciel — Libre circulation des capitaux — Article 63 TFUE — Imposition de revenus de fonds de pension — Différence de traitement entre les fonds de pension résidents et les fonds de pension non-résidents — Imposition forfaitaire des fonds de pension résidents sur la base d’un rendement fictif — Retenue à la source appliquée aux revenus issus de dividendes perçus par les fonds de pension non-résidents — Comparabilité»

Sommaire – Arrêt de la Cour (première chambre) du 2 juin 2016

  1. Libre circulation des capitaux et liberté des paiements – Restrictions – Législation fiscale – Imposition des dividendes – Réglementation nationale soumettant les dividendes distribués à des fonds de pension non-résidents à un traitement différent de celui réservé aux dividendes distribués à des fonds de pension résidents – Critères de comparaison de la situation des résidents et des non-résidents en vue d’établir l’existence d’une restriction

    (Art. 63 TFUE)

  2. Libre circulation des capitaux et liberté des paiements – Restrictions – Interdiction – Dérogations – Interprétation stricte – Portée

    (Art. 63 TFUE et 65, § 1 et 3, TFUE)

  3. Libre circulation des capitaux et liberté des paiements – Restrictions – Législation fiscale – Imposition des dividendes – Réglementation nationale soumettant les dividendes distribués à des fonds de pension non-résidents à un traitement différent de celui réservé aux dividendes distribués à des fonds de pension résidents – Admissibilité – Conditions – Possibilité de prise en compte, dans le calcul de l’assise financière, des frais professionnels liés à la perception des dividendes, réservée aux seuls fonds de pension résidents – Inadmissibilité

    (Art. 63 TFUE)

  1.  S’agissant de déterminer si un traitement différencié de l’imposition des dividendes versés aux fonds de pension selon la qualité de résident ou non de ces derniers conduit à un traitement désavantageux des fonds de pension non-résidents par rapport aux fonds de pension résidents et constitue, dès lors, une restriction à la libre circulation des capitaux, la période à retenir, aux fins de la comparaison des charges fiscales pesant sur les dividendes versés aux résidents et aux non-résidents, est celle qui est prise en compte pour les dividendes versés aux résidents. À cet égard, un éventuel traitement désavantageux des dividendes versés à des fonds de pension non-résidents pendant une année fiscale ne saurait être compensé par un traitement éventuellement avantageux de ces derniers pendant d’autres années fiscales. Il s’ensuit que l’appréciation de l’existence d’un éventuel traitement désavantageux des dividendes versés aux fonds de pension non-résidents doit être effectuée pour chaque exercice fiscal, pris individuellement.

    (cf. points 33, 37, 39, 41)

  2.  Voir le texte de la décision.

    (cf. points 45-49)

  3.  L’article 63 TFUE doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à une législation nationale en vertu de laquelle les dividendes distribués par une société résidente font l’objet d’une retenue à la source lorsque ces dividendes sont versés à un fonds de pension non-résident et, lorsque ces dividendes sont versés à un fonds de pension résident, d’une imposition calculée forfaitairement sur la base d’un rendement fictif visant à correspondre, au fil du temps, à l’imposition de tous les revenus du capital selon le régime du droit commun. Toutefois, il s’oppose à ce que les fonds de pension bénéficiaires non-résidents ne puissent pas prendre en compte les éventuels frais professionnels directement liés à la perception des dividendes, lorsque la méthode de calcul de l’assiette d’imposition des fonds de pension résidents prévoit une telle prise en compte, ce qu’il appartient au juge national de vérifier.

    À cet égard, l’imposition frappant les fonds de pension résidents a un objet différent de celle appliquée aux fonds de pension non-résidents. Ainsi, alors que les premiers sont imposés sur la totalité de leurs revenus, calculés sur la base de leurs actifs minorés de leurs dettes, à laquelle est appliqué un taux de rendement forfaitaire, indépendamment de la perception effective des dividendes au cours de l’exercice fiscal concerné, les seconds sont imposés sur les dividendes perçus dans l’État membre de la société distributrice au cours de cet exercice. En effet, dans le cadre du régime des pensions de retraite, dont font partie les fonds de pension, la législation nationale relative à l’imposition desdits fonds vise à introduire une imposition neutre et indépendante de la conjoncture de différents types d’actifs ainsi que de toutes les formes d’épargne retraite concernés. Afin d’atteindre un tel objectif, l’ensemble des actifs d’un fonds de pension résident est soumis annuellement à une imposition forfaitaire, reflétant le rendement de ces actifs, indépendamment de la perception d’un revenu généré par lesdits actifs, en particulier de la perception des dividendes. Une telle imposition des revenus des fonds de pension résidents est exercée par l’État membre concerné en sa qualité d’État de résidence de ces fonds de pension, disposant à ce titre d’un pouvoir d’imposition sur leurs revenus globaux. En revanche, en ce qui concerne les fonds de pension non-résidents dans cet État membre, ce dernier ne dispose, conformément à une convention bilatérale préventive de la double imposition, que d’un pouvoir d’imposition des revenus générés par les actifs de ces fonds qui se trouvent sur son territoire. En raison de ce pouvoir d’imposition limité en ce qui concerne les fonds de pension non-résidents, l’État membre concerné ne peut pas imposer l’ensemble des actifs de ces fonds de pension.

    Dans ces conditions, l’objectif poursuivi par une telle législation nationale consistant à appliquer une imposition neutre et indépendante de la conjoncture de différents types d’actifs ainsi que de toutes les formes d’épargne retraite concernées, qui suppose que les fonds de pension soient imposés sur l’ensemble de leurs actifs, ne peut être atteint s’agissant des fonds de pension non-résidents. Cet objectif, qui suppose également que les fonds de pension soient imposés annuellement et indépendamment de la distribution de dividendes, ne saurait non plus être atteint par l’imposition des dividendes perçus par les fonds de pension non-résidents conformément à la méthode forfaitaire, en se fondant, pour calculer l’impôt dû, sur la valeur des actifs sous-jacents, dès lors que les fonds de pension non-résidents ne peuvent, en tout état de cause, être imposés que lorsque des dividendes leur sont distribués. Il s’ensuit que, au regard de l’objectif poursuivi par ladite législation nationale, ainsi que de son objet et de son contenu, un fonds de pension non-résident ne se trouve pas dans une situation comparable à celle d’un fonds de pension résident. Toutefois, en ce qui concerne les frais professionnels directement liés à une activité ayant généré des revenus imposables dans un État membre, les résidents et les non-résidents de ce dernier sont placés dans une situation comparable. À cet égard, il appartient au juge national de vérifier si la méthode d’imposition appliquée aux fonds de pension résidents permet, par le calcul de l’assiette d’imposition desdits fonds et, en particulier, par la prise en compte de leurs dettes dans le calcul de l’assise financière, de prendre en compte d’éventuels frais professionnels directement liés à la perception des dividendes. Si tel était le cas, la prise en compte de tels frais devrait également être admise pour les fonds de pension non-résidents.

    (cf. points 52-56, 58-60, 63-66 et disp.)