ARRÊT DE LA COUR (quatrième chambre)

6 octobre 2015 ( *1 )

«Renvoi préjudiciel — Règlement (CE, Euratom) no 2988/95 — Protection des intérêts financiers de l’Union européenne — Articles 1er, paragraphe 2, et 3, paragraphe 1, premier alinéa — Récupération d’une restitution à l’exportation — Délai de prescription — Point de départ (dies a quo) — Acte ou omission de l’opérateur économique — Réalisation du préjudice — Infraction continue — Infraction ponctuelle»

Dans l’affaire C‑59/14,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Finanzgericht Hamburg (tribunal des finances, Allemagne), par décision du 13 décembre 2013, parvenue à la Cour le 7 février 2014, dans la procédure

Firma Ernst Kollmer Fleischimport und -export

contre

Hauptzollamt Hamburg-Jonas,

LA COUR (quatrième chambre),

composée de M. L. Bay Larsen, président de chambre, Mme K. Jürimäe (rapporteur), MM. J. Malenovský, M. Safjan et Mme A. Prechal, juges,

avocat général: M. P. Cruz Villalón,

greffier: M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

considérant les observations présentées:

pour Firma Ernst Kollmer Fleischimport und -export, par Me D. Ehle, Rechtsanwalt,

pour le gouvernement grec, par M. I. Chalkias et Mme E. Leftheriotou, en qualité d’agents,

pour la Commission européenne, par MM. J. Baquero Cruz et P. Rossi ainsi que par Mme B. Eggers, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 11 juin 2015,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation des articles 1er, paragraphe 2, et 3, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement (CE, Euratom) no 2988/95 du Conseil, du 18 décembre 1995, relatif à la protection des intérêts financiers des Communautés européennes (JO L 312, p. 1).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Firma Ernst Kollmer Fleischimport und -export au Hauptzollamt Hamburg-Jonas (bureau principal des douanes de Hambourg-Jonas, ci-après le «Hauptzollamt») au sujet du remboursement de restitutions à l’exportation.

Le cadre juridique

Le règlement no 2988/95

3

L’article 1er du règlement no 2988/95 dispose:

«1.   Aux fins de la protection des intérêts financiers des Communautés européennes, est adoptée une réglementation générale relative à des contrôles homogènes et à des mesures et des sanctions administratives portant sur des irrégularités au regard du droit communautaire.

2.   Est constitutive d’une irrégularité toute violation d’une disposition du droit communautaire résultant d’un acte ou d’une omission d’un opérateur économique qui a ou aurait pour effet de porter préjudice au budget général des Communautés ou à des budgets gérés par celles-ci, soit par la diminution ou la suppression de recettes provenant des ressources propres perçues directement pour le compte des Communautés, soit par une dépense indue.»

4

L’article 3, paragraphe 1, de ce règlement prévoit:

«Le délai de prescription des poursuites est de quatre ans à partir de la réalisation de l’irrégularité visée à l’article 1er, paragraphe 1. Toutefois, les réglementations sectorielles peuvent prévoir un délai inférieur qui ne saurait aller en deçà de trois ans.

Pour les irrégularités continues ou répétées, le délai de prescription court à compter du jour où l’irrégularité a pris fin. [...]

[...]»

5

L’article 4 dudit règlement concerne les mesures administratives tendant à la répétition des avantages indûment obtenus. L’article 5 du même règlement énonce les sanctions administratives auxquelles peuvent conduire les irrégularités intentionnelles ou causées par négligence.

Le règlement (CEE) no 565/80

6

En vertu de l’article 5, paragraphe 1, du règlement (CEE) no 565/80 du Conseil, du 4 mars 1980, relatif au paiement à l’avance des restitutions à l’exportation pour les produits agricoles (JO L 62, p. 5), avant son abrogation par le règlement (CE) no 1713/2006 de la Commission, du 20 novembre 2006, supprimant le préfinancement des restitutions à l’exportation en ce qui concerne les produits agricoles (JO L 321, p. 11), «à la demande de l’intéressé, un montant égal à la restitution à l’exportation est payé dès que les produits ou marchandises sont mis sous le régime douanier de l’entrepôt ou de la zone franche en vue de leur exportation dans un délai déterminé».

7

L’article 6 de ce règlement prévoyait:

«Le bénéfice des régimes prévus au présent règlement est subordonné à la constitution d’une caution garantissant le remboursement d’un montant égal à celui qui a été payé, majoré d’un montant supplémentaire.

Sans préjudice des cas de force majeure cette caution reste totalement ou partiellement acquise:

dans les cas où le remboursement n’a pas été effectué lorsque l’exportation n’a pas eu lieu dans le délai visé à l’article 4 paragraphe 1 et à l’article 5 paragraphe 1

ou

s’il avère qu’il n’existe aucun droit à la restitution, ou qu’il existait un droit à une restitution d’un montant inférieur.»

Le règlement (CEE) no 3665/87

8

L’article 17, paragraphe 1, du règlement (CEE) no 3665/87 de la Commission, du 27 novembre 1987, portant modalités communes d’application de régime des restitutions à l’exportation pour les produits agricoles (JO L 351, p. 1), avant son abrogation par le règlement (CE) no 800/1999 de la Commission, du 15 avril 1999, portant modalités communes d’application du régime des restitutions à l’exportation pour les produits agricoles (JO L 102, p. 11), était libellé comme suit:

«Le produit doit avoir été importé en l’état dans le pays tiers ou dans l’un des pays tiers pour lequel la restitution est prévue dans les douze mois suivant la date d’acceptation de la déclaration d’exportation [...]»

9

L’article 18, paragraphe 1, de ce règlement disposait:

«La preuve de l’accomplissement des formalités douanières de mise à la consommation est apportée:

a)

par la production du document douanier ou de sa copie ou photocopie; cette copie ou photocopie doit être certifiée conforme, soit par l’organisme qui a visé le document original, soit par les services officiels du pays tiers concerné, soit par les services officiels d’un des États membres

ou

b)

par la production du certificat de dédouanement établi sur un formulaire conforme au modèle figurant à l’annexe II; ce formulaire doit être rempli dans une ou plusieurs langues officielles de la Communauté et dans une langue en usage dans le pays tiers concerné

[...]»

Le litige au principal et les questions préjudicielles

10

Par décisions prises au cours des années 1992 et 1993, le Hauptzollamt a, par voie d’avance, octroyé à la requérante au principal des restitutions à l’exportation, contre constitution d’une garantie, conformément aux articles 5, paragraphe 1, et 6 du règlement no 565/80. Ces avances concernaient plusieurs lots de viande bovine entreposés en vue de leur exportation.

11

Par lettre du 10 août 1993, la requérante au principal a transmis au Hauptzollamt la déclaration en douane no 79/239, délivrée par les autorités douanières jordaniennes le 9 mars 1993. Cette déclaration certifiait la mise à la consommation, en Jordanie, d’un lot de viande bovine exporté par la requérante au principal. Les 30 avril 1996 et 4 mars 1998, le Hauptzollamt a procédé à la libération des garanties que celle-ci avait constituées.

12

Du 28 février au 14 mars 1998, l’Office européen de lutte antifraude (OLAF) a effectué une mission d’inspection au cours de laquelle il est apparu que la déclaration en douane délivrée par les autorités jordaniennes avait été annulée avant la perception des droits à l’importation et le lot de viande bovine concerné avait en réalité été réexporté en Irak.

13

Par décision du 23 septembre 1999, le Hauptzollamt a ordonné la récupération d’un montant s’élevant à 103289,89 euros. À la suite d’une réclamation formée par la requérante au principal contre la décision de récupération, cette somme a été ramenée à 59545,70 euros, par décision du 26 septembre 2011. La réclamation a été rejetée pour le surplus, par décision du 23 janvier 2012.

14

Le 5 février 2012, la requérante au principal a introduit un recours, auprès du Finanzgericht Hamburg, par lequel elle demande l’annulation des trois décisions précitées. Elle fait valoir que le droit à répétition est prescrit. Selon elle, en vertu de l’article 3, paragraphe 1, du règlement no 2988/95, le délai de prescription court à compter non pas de la libération de la garantie, mais de la réalisation de l’irrégularité. En effet, l’article 1er, paragraphe 2, de ce règlement rattacherait la notion d’«irrégularité» à un acte ou à une omission d’un opérateur économique. Il conviendrait, par conséquent, de se fonder sur la date de production de la déclaration en douane délivrée par les autorités jordaniennes, à savoir le 10 août 1993, pour déterminer si l’action en répétition de l’indu est prescrite.

15

La juridiction de renvoi tend à considérer que le délai de prescription court, indépendamment du moment de la réalisation du préjudice, à compter de l’acte ou de l’omission de l’opérateur économique constitutive d’une violation d’une disposition du droit de l’Union. Une telle interprétation résulterait du libellé des articles 1er, paragraphe 2, et 3, paragraphe 1, du règlement no 2988/95. En effet, d’une part, le libellé de l’article 1er, paragraphe 2, de ce règlement indiquerait que le législateur de l’Union, qui a retenu l’emploi du conditionnel lors de la rédaction de cette disposition, ne rattache pas la notion d’«irrégularité» à la réalisation d’un préjudice, dès lors que le comportement d’un opérateur économique peut aussi constituer une irrégularité lorsqu’il «aurait» pour effet de porter préjudice au budget de l’Union. D’autre part, il découlerait du libellé de l’article 3, paragraphe 1, premier alinéa, dudit règlement, qui fait référence à la «réalisation de l’irrégularité», que le législateur de l’Union a entendu rattacher le début du délai de prescription non pas à l’«apparition», mais à la «réalisation» de l’irrégularité, soit à un comportement de l’opérateur économique qui doit consister en une violation d’une disposition du droit de l’Union.

16

La juridiction de renvoi est néanmoins d’avis que, dans les cas dans lesquels la violation de dispositions du droit de l’Union n’a été décelée qu’après la réalisation du préjudice, la question de la détermination du début du délai de prescription pourrait faire l’objet d’une appréciation différente. En effet, il pourrait être considéré que la notion d’«irrégularité», visée à l’article 1er, paragraphe 2, du règlement no 2988/95, suppose la réunion de deux conditions, à savoir, d’une part, un comportement de l’opérateur économique et, d’autre part, un préjudice en résultant.

17

Dans l’hypothèse où le délai de prescription prévu à l’article 3, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement no 2988/95 ne commencerait à courir qu’à la date de la réalisation du préjudice, la juridiction de renvoi se demande si le «préjudice», au sens de l’article 1er, paragraphe 2, du règlement no 2988/95, naît dès le paiement du montant de l’avance correspondant à la restitution à l’exportation ou seulement à la date de l’octroi définitif de la restitution à l’exportation, par la libération de la garantie.

18

Dans ces circonstances, le Finanzgericht Hamburg a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

«1)

L’irrégularité nécessaire pour que coure le délai de prescription prévu à l’article 3, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement no 2988/95, définie à l’article 1er, paragraphe 2, du même règlement, suppose-t-elle, de surcroît, dans le cas où la violation d’une disposition du droit de l’Union n’a été détectée qu’après la réalisation d’un préjudice, outre un acte ou une omission de l’opérateur économique, qu’il ait été porté préjudice au budget général de l’Union ou à des budgets gérés par celle-ci, de sorte que le délai de prescription ne court qu’à partir de la réalisation du préjudice, ou bien le délai de prescription court-il, indépendamment de la date de la réalisation du préjudice, dès l’acte ou l’omission de l’opérateur économique constitutif d’une violation d’une disposition du droit de l’Union?

2)

Dans la mesure où il est répondu à la première question que le délai de prescription ne court qu’à partir de la réalisation du préjudice:

un ‘préjudice’, au sens de l’article 1er, paragraphe 2, du règlement no 2988/95, est-il réalisé – dans le contexte de la récupération d’une restitution à l’exportation définitivement octroyée – dès qu’un montant égal à la restitution à l’exportation a été payé à l’exportateur, conformément à l’article 5, paragraphe 1, du règlement no 565/80, sans que la garantie visée à l’article 6 de ce règlement ait encore été libérée, ou n’est-il réalisé qu’au moment de la libération de la garantie ou de l’octroi définitif de la restitution à l’exportation?»

Sur les questions préjudicielles

Sur la première question

19

Par sa première question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si, dans des circonstances telles que celles en cause au principal où la violation d’une disposition du droit de l’Union n’a été détectée qu’après la réalisation d’un préjudice, les articles 1er, paragraphe 2, et 3, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement no 2988/95 doivent être interprétés en ce sens que le délai de prescription commence à courir à partir de la date de la réalisation du préjudice au budget de l’Union ou à des budgets gérés par celle-ci ou bien que ce délai commence à courir indépendamment de cette date, dès l’acte ou l’omission d’un opérateur économique constituant une violation du droit de l’Union.

20

À titre liminaire, il convient, d’une part, de rappeler que la règle de prescription quadriennale prévue à l’article 3, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement no 2988/95 est, en l’absence de réglementation sectorielle de l’Union ou de réglementation nationale prévoyant un régime de prescription spécifique, applicable aux irrégularités portant atteinte aux intérêts financiers de l’Union (voir, en ce sens, arrêt Pfeifer & Langen, C‑564/10, EU:C:2012:190, points 39 et 40 ainsi que jurisprudence citée).

21

D’autre part, il importe de relever que l’article 3, paragraphe 1, du règlement no 2988/95 est applicable en l’occurrence, quand bien même les faits en cause au principal remontent aux années 1992 et 1993. En effet, la Cour a déjà jugé que le délai de prescription prévu par cette disposition s’applique à des irrégularités commises avant l’entrée en vigueur de ce règlement (voir, en ce sens, arrêt Josef Vosding Schlacht-, Kühl- und Zerlegebetrieb e.a., C‑278/07 à C‑280/07, EU:C:2009:38, point 34).

22

Selon une jurisprudence constante de la Cour, pour déterminer la portée de dispositions du droit de l’Union, en l’occurrence les articles 1er, paragraphe 2, et 3, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement no 2988/95, il y a lieu de tenir compte à la fois de leurs termes, de leur contexte et de leurs finalités (arrêt Angerer, C‑477/13, EU:C:2015:239, point 26 et jurisprudence citée).

23

Conformément à la lettre de l’article 3, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement no 2988/95, le délai de prescription des poursuites est de quatre ans à partir de la réalisation de l’irrégularité. L’article 1er, paragraphe 2, de ce règlement définit la notion d’«irrégularité» comme se rapportant à toute violation d’une disposition du droit de l’Union résultant d’un acte ou d’une omission d’un opérateur économique qui a ou aurait pour effet de porter préjudice au budget général de l’Union ou à des budgets gérés par celle-ci.

24

La réalisation d’une irrégularité, qui fait courir le délai de prescription, suppose donc la réunion de deux conditions, à savoir un acte ou une omission d’un opérateur économique, constituant une violation du droit de l’Union, ainsi qu’un préjudice, ou un préjudice potentiel, porté au budget de l’Union.

25

Dans des circonstances, telles que celles en cause au principal, où la violation du droit de l’Union a été détectée après la réalisation du préjudice, le délai de prescription commence à courir à partir de la réalisation de l’irrégularité, c’est-à-dire à partir du moment où tant l’acte ou l’omission d’un opérateur économique constituant une violation du droit de l’Union que le préjudice porté au budget de l’Union ou aux budgets gérés par celle-ci sont survenus.

26

Une telle conclusion est conforme à l’objectif du règlement no 2988/95 qui, en vertu de son article 1er, paragraphe 1, tend à la protection des intérêts financiers de l’Union. En effet, le dies a quo se situe à la date de l’événement, survenant en dernier lieu, à savoir soit à la date de la réalisation du préjudice, lorsque ce préjudice se réalise après l’acte ou l’omission constituant une violation du droit de l’Union, soit à la date de cet acte ou de cette omission, lorsque l’avantage en cause a été octroyé avant ledit acte ou ladite omission. La poursuite de l’objectif de protection des intérêts financiers de l’Union est dès lors facilitée.

27

En outre, cette conclusion n’est pas remise en cause par l’argument du gouvernement grec, selon lequel le dies a quo se situerait au jour de la découverte, par les autorités compétentes, de l’irrégularité. En effet, cet argument se heurte à la jurisprudence de la Cour, selon laquelle la date à laquelle les autorités ont pris connaissance d’une irrégularité est sans influence sur le point de départ du délai de prescription (arrêt Pfeifer & Langen, C‑52/14, EU:C:2015:381, point 67).

28

Au demeurant, selon la jurisprudence de la Cour, l’administration a une obligation générale de diligence dans la vérification de la régularité des paiements effectués par elle-même et qui pèsent sur le budget de l’Union (arrêt Ze Fu Fleischhandel GmbH et Vion Trading, C‑201/10 et C‑202/10, EU:C:2011:282, point 44). Admettre que le dies a quo correspond au jour de la découverte de l’irrégularité en cause irait à l’encontre de cette obligation de diligence.

29

Eu égard aux considérations qui précèdent, il y a lieu de répondre à la première question que les articles 1er, paragraphe 2, et 3, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement no 2988/95 doivent être interprétés en ce sens que, dans des circonstances telles que celles en cause au principal où la violation d’une disposition du droit de l’Union n’a été détectée qu’après la réalisation d’un préjudice, le délai de prescription commence à courir à partir du moment où tant l’acte ou l’omission d’un opérateur économique constituant une violation du droit de l’Union que le préjudice porté au budget de l’Union ou aux budgets gérés par celle-ci sont survenus.

Sur la seconde question

30

Par sa seconde question, la juridiction de renvoi s’interroge sur le moment auquel un «préjudice», au sens de l’article 1er, paragraphe 2, du règlement no 2988/95, se réalise, dans des circonstances telles que celles en cause au principal.

31

Avant de répondre à cette question, il convient de rappeler la chronologie des faits en cause dans l’affaire au principal. Dans un premier temps, au cours des années 1992 et 1993, la requérante au principal s’est vu octroyer, par voie d’avance, un montant égal à la restitution à l’exportation, conformément à l’article 5, paragraphe 1, du règlement no 565/80. Dans un deuxième temps, le 10 août 1993, la requérante au principal a présenté une déclaration en douane délivrée par les autorités jordaniennes, destinée à prouver l’accomplissement des formalités douanières de mise à la consommation en Jordanie, conformément aux articles 17, paragraphe 3, et 18, paragraphe 1, du règlement no 3665/87. Dans un troisième temps, les 30 avril 1996 et 4 mars 1998, les garanties constituées au moment de l’octroi de l’avance, conformément à l’article 6 du règlement no 565/80, ont été libérées.

32

Dans de telles circonstances, il y a lieu de relever qu’un «préjudice», au sens de l’article 1er, paragraphe 2, du règlement no 2988/95, se réalise à la date à laquelle la décision d’octroyer définitivement l’avantage concerné, en l’occurrence les restitutions à l’exportation, est prise. En effet, c’est à partir de ce moment qu’il existe effectivement un préjudice porté au budget de l’Union. Ce préjudice ne saurait être considéré comme existant avant la date de l’octroi définitif de cet avantage, sous peine d’admettre que le délai de prescription pour récupérer ce même avantage puisse déjà courir à un moment où celui-ci n’a pas encore été accordé.

33

Eu égard aux considérations qui précèdent, il y a lieu de répondre à la seconde question que l’article 1er, paragraphe 2, du règlement no 2988/95 doit être interprété en ce sens que, dans des circonstances telles que celles en cause au principal, un préjudice est réalisé dès que la décision d’octroyer la restitution à l’exportation à l’exportateur concerné a été prise.

Sur les dépens

34

La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

 

Par ces motifs, la Cour (quatrième chambre) dit pour droit:

 

1)

Les articles 1er, paragraphe 2, et 3, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement (CE, Euratom) no 2988/95 du Conseil, du 18 décembre 1995, relatif à la protection des intérêts financiers des Communautés européennes doivent être interprétés en ce sens que, dans des circonstances telles que celles en cause au principal où la violation d’une disposition du droit de l’Union n’a été détectée qu’après la réalisation d’un préjudice, le délai de prescription commence à courir à partir du moment où tant l’acte ou l’omission d’un opérateur économique constituant une violation du droit de l’Union que le préjudice porté au budget de l’Union ou aux budgets gérés par celle-ci sont survenus.

 

2)

L’article 1er, paragraphe 2, du règlement no 2988/95 doit être interprété en ce sens que, dans des circonstances telles que celles en cause au principal, un préjudice est réalisé dès que la décision d’octroyer la restitution à l’exportation à l’exportateur concerné a été prise.

 

Signatures


( *1 ) Langue de procédure: l’allemand.