ORDONNANCE DE LA COUR (huitième chambre)

8 mai 2013 (*)

«Pourvoi – Article 181 du règlement de procédure de la Cour – Marque communautaire – Règlement (CE) n° 40/94 – Article 8, paragraphe 1, sous b) – Risque de confusion – Marque verbale ZYDUS – Opposition du titulaire de la marque communautaire ZIMBUS – Refus partiel d’enregistrement par la chambre de recours de l’OHMI»

Dans l’affaire C‑268/12 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 23 mai 2012,

Cadila Healthcare Ltd, établie à Ahmedabad (Inde), représentée par M. S. Malynicz, barrister,

partie requérante,

les autres parties à la procédure étant:

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. A. Folliard-Monguiral, en qualité d’agent,

partie défenderesse en première instance,

Novartis AG, établie à Bâle (Suisse), représentée par Me N. Hebeis, Rechtsanwalt,

partie intervenante en première instance,

LA COUR (huitième chambre),

composée de M. E. Jarašiūnas, président de chambre, MM. A. Ó Caoimh et C. G. Fernlund (rapporteur), juges,

avocat général: Mme J. Kokott,

greffier: M. A. Calot Escobar,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de statuer par voie d’ordonnance motivée, conformément à l’article 181 du règlement de procédure de la Cour,

rend la présente

Ordonnance

1        Par son pourvoi, Cadila Healthcare Ltd (ci-après «Cadila Healthcare») demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 15 mars 2012, Cadila Healthcare/OHMI – Novartis (ZYDUS) (T‑288/08, ci-après l’«arrêt attaqué»), par lequel celui-ci a rejeté son recours tendant à l’annulation de la décision de la deuxième chambre de recours de l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI) du 7 mai 2008 (affaire R 1092/2007-2), relative à une procédure d’opposition entre Novartis AG (ci-après «Novartis») et Cadila Healthcare (ci-après la «décision litigieuse»).

 Le cadre juridique

2        Sous l’intitulé «Motifs relatifs de refus», l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), dispose:

«Sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement:

[...]

b)      lorsqu’en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque antérieure et en raison de l’identité et de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire dans lequel la marque antérieure est protégée; le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.»

3        L’article 113 du règlement de procédure du Tribunal prévoit:

«Le Tribunal peut à tout moment, d’office, les parties entendues, statuer sur les fins de non-recevoir d’ordre public ou constater que le recours est devenu sans objet et qu’il n’y a plus lieu de statuer [...]»

 Les faits à l’origine du litige

4        Le 18 juillet 2003, Cadila Healthcare a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’OHMI, en vertu du règlement n° 40/94.

5        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal «ZYDUS».

6        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent notamment de la classe 5 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, en particulier, à la description suivante:

«Produits pharmaceutiques, vétérinaires et hygiéniques; substances diététiques à usage médical; désinfectants; fongicides.»

7        Le 3 août 2004, Novartis, intervenante en première instance, a formé opposition à l’encontre de l’enregistrement de la marque en cause pour tous les produits visés par la demande d’enregistrement.

8        L’opposition était fondée sur la marque communautaire verbale antérieure ZIMBUS, déposée le 29 août 2001 et enregistrée le 6 février 2003, sous le numéro 2 356 954, pour les produits pharmaceutiques relevant de la classe 5 au sens dudit arrangement de Nice.

9        Les motifs invoqués à l’appui de l’opposition étaient ceux visés à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94.

10      Par décision du 31 mai 2007, la division d’opposition de l’OHMI a fait droit à la demande d’opposition en ce qui concerne les produits pharmaceutiques, vétérinaires et hygiéniques et les fongicides, mais l’a rejetée en ce qui concerne les substances diététiques à usage médical et les désinfectants.

11      Le 13 juillet 2007, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI contre cette décision.

12      Par la décision litigieuse, la deuxième chambre de recours de l’OHMI a partiellement accueilli le recours, en ce qui concerne les fongicides, et a donc annulé la décision de la division d’opposition dans la mesure où elle rejetait la demande d’enregistrement en tant que marque communautaire pour ces produits.

13      En revanche, ladite chambre de recours a confirmé la décision de la division d’opposition dans la mesure où elle faisait droit à l’opposition pour les produits pharmaceutiques, vétérinaires et hygiéniques.

 Le recours devant le Tribunal et l’arrêt attaqué

14      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 25 juillet 2008, Cadila Healthcare a introduit un recours tendant à l’annulation de la décision litigieuse. À l’appui de ce recours, elle invoquait un moyen unique, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94. Elle reprochait à la deuxième chambre de recours de l’OHMI d’avoir, à tort, jugé que les produits vétérinaires et les produits hygiéniques visés par la marque dont l’enregistrement est demandé étaient identiques ou très semblables aux produits pharmaceutiques couverts par la marque antérieure. Elle contestait l’existence d’une similitude phonétique et d’un risque de confusion entre les marques en conflit.

15      Par lettre déposée au greffe du Tribunal le 13 septembre 2011, Cadila Healthcare a demandé au Tribunal de constater qu’il n’y avait plus lieu à statuer au motif que, depuis le 29 août 2011, la marque antérieure n’était plus en vigueur, faute pour Novartis d’avoir renouvelé son enregistrement. Tant l’OHMI que Novartis se sont opposés à cette demande de non-lieu à statuer.

16      Par l’arrêt attaqué, le Tribunal a rejeté le recours introduit par Cadila Healthcare.

17      S’agissant de la demande de non-lieu à statuer, le Tribunal a jugé, aux points 21 à 23 de l’arrêt attaqué:

«21      Il est constant entre les parties que [Novartis] n’a pas présenté de demande de renouvellement de l’enregistrement de la marque antérieure dans le délai de six mois prévu par la première phrase de l’article 47, paragraphe 3, du règlement [n° 40/94], soit avant le 31 août 2011. Toutefois, [Novartis] ayant encore la possibilité de présenter une telle demande, et d’acquitter les taxes requises, dans le délai supplémentaire de six mois visé à la troisième phrase de la même disposition, expirant en l’espèce le 1er mars 2012, ce n’est que si, à cette dernière date, elle n’a pas fait usage de cette possibilité qu’il pourra être définitivement considéré que ledit enregistrement est arrivé à expiration le 29 août 2011. Or, il ne ressort pas du dossier que [Novartis] a, ou non, agi en ce sens.

22      En tout état de cause, même s’il devait apparaître que l’enregistrement de la marque antérieure a expiré le 29 août 2011, il ne saurait être conclu que le présent recours est devenu sans objet. Ce ne serait, en effet, qu’à compter de cette dernière date que cette marque n’aurait plus les effets prévus par le règlement n° 40/94 [...] et non pour la période antérieure à propos de laquelle se prononce la décision [litigieuse] [voir, par analogie, arrêt du Tribunal du 4 novembre 2008, Group Lottuss/OHMI – Ugly (COYOTE UGLY), T‑161/07, non publié au Recueil, points 49 et 50]. En conséquence, il ne saurait être tenu compte d’un éventuel non-renouvellement de la marque antérieure pour apprécier la légalité de la décision [litigieuse]. Le recours introduit dans la présente affaire concerne bien une marque antérieure qui produisait des effets au moment où a été adoptée ladite décision.

23      Partant, il y a lieu de rejeter la demande de non-lieu à statuer.»

18      S’agissant de la similitude des signes, le Tribunal a jugé, aux points 51 à 57 de l’arrêt attaqué, que les marques en conflit doivent être considérées comme globalement similaires en raison d’un certain degré de similitude sur le plan visuel, d’une forte similitude phonétique, à tout le moins dans certaines langues de l’Union, telles que les langues espagnole et portugaise, alors même qu’elles n’ont pas de signification sur le plan conceptuel.

19      Sur la similitude visuelle, le Tribunal a jugé, aux points 52 et 53 de l’arrêt attaqué:

«52      Ensuite, il y a lieu de constater que la marque ZIMBUS et la marque ZYDUS se composent d’un seul mot comportant presque le même nombre de lettres, à savoir, respectivement, six et cinq. Ces marques commencent par la même lettre ‘z’ et finissent par le même groupe de lettres ‘us’. Par ailleurs, ainsi que le relève à juste titre [Novartis], les lettres ‘b’ (dans le cas de la marque antérieure) et ‘d’ (dans le cas de la marque demandée), qui précèdent directement ledit groupe de lettres, sont, elles-mêmes, très ressemblantes. À cet égard, il convient de rappeler qu’il ressort de la jurisprudence que, s’agissant des signes verbaux relativement brefs, les éléments de début et de fin du signe sont aussi importants que les éléments centraux de celui-ci [voir arrêt du Tribunal du 16 septembre 2009, Hipp & Co/OHMI – Laboratorios Ordesa (Bebimil), T‑221/06, non publié au Recueil, point 47, et la jurisprudence citée]. Dès lors, sur le plan visuel, la seule différence notable existant entre les marques en conflit réside dans la présence, entre leur lettre initiale et leurs trois lettres finales, des lettres ‘i’ et ‘m’ (dans le cas de la marque antérieure) et de la lettre ‘y’ (dans le cas de la marque demandée). Il convient de considérer, dans le cadre de l’appréciation visuelle d’ensemble des marques en conflit, que cette différence n’est toutefois pas suffisante pour écarter toute similitude visuelle entre ces marques. À ce propos, il y a lieu de rappeler que le consommateur est réputé n’avoir que rarement la possibilité de procéder à une comparaison directe des différentes marques, mais doit se fier à l’image imparfaite de celles-ci qu’il a gardée en mémoire (arrêt de la Cour du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C‑342/97, Rec. p. I‑3819, point 26).

53      Partant, il y a lieu de considérer que, ainsi que la division d’opposition l’avait d’ailleurs constaté dans sa décision du 31 mai 2007, il existe un certain degré de similitude sur le plan visuel entre les marques en conflit.»

20      Aux points 54 et 55 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a jugé, s’agissant de la similitude phonétique:

«54      En deuxième lieu, en ce qui concerne la comparaison phonétique des marques en conflit, tout d’abord, il doit être relevé que celles-ci comptent chacune deux syllabes. Ensuite, il y a lieu de constater que, dans de nombreuses langues de l’Union, dont l’espagnol et le portugais, les lettres ‘i’ et ‘y’ se prononcent de façon identique, de sorte que les marques en conflit commencent par le même son ‘zi’. Bien plus, ainsi que le relève à juste titre l’OHMI, il y a lieu de considérer que les premières syllabes de ces marques, à savoir, respectivement, ‘zim’ et ‘zy’, sont très proches sur le plan phonétique dans la mesure où le son produit par la lettre ‘m’ qui est présente à la fin de la première syllabe de la marque antérieure est absorbé par celui produit par la consonne ‘b’, qui suit directement ladite lettre et est plus audible. Le fait que la lettre ‘m’ n’est pas présente dans la première syllabe de la marque demandée ne saurait donc remettre en cause la conclusion de la chambre de recours selon laquelle les marques en conflit sont similaires sur le plan phonétique. Enfin, il convient de constater que ces marques finissent par le même son ‘us’. Il est vrai que le groupe de lettres ‘us’ est précédé de la lettre ‘b’, dans le cas de la marque antérieure, et de la lettre ‘d’, dans le cas de la marque demandée, et que ces deux dernières lettres se prononcent de manière différente. Toutefois, comme le fait valoir à bon droit l’OHMI, cette différence passera inaperçue pour la plupart des consommateurs, dès lors qu’elle affecte la seconde syllabe de chacune des marques en conflit, sur laquelle ne porte pas l’accent tonique. En effet, notamment en espagnol et en portugais, lorsqu’un mot ne comporte que deux syllabes, l’accent tonique porte en règle générale sur la première de celles-ci. En l’espèce, les consommateurs se souviendront donc davantage du fait que les marques en conflit ont un début et une fin très similaires.

55      Par conséquent, il convient de conclure, à l’instar de la chambre de recours, qu’il existe entre les marques en conflit une forte similitude phonétique, à tout le moins dans certaines langues de l’Union, telles que l’espagnol et le portugais.»

21      En ce qui concerne l’appréciation du risque de confusion, le Tribunal, au point 62 de l’arrêt attaqué, a jugé que la deuxième chambre de recours de l’OHMI n’a pas commis d’erreur de droit en considérant qu’il existait un risque de confusion entre les marques en conflit. Aux points 63 à 66 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a jugé:

«63      Les considérations qui précèdent ne sont pas remises en cause par l’argument de la requérante selon lequel, étant donné que les produits pharmaceutiques et les produits hygiéniques ne seraient généralement pas achetés oralement, la similitude des marques en conflit sur le plan phonétique aurait une importance réduite.

64      Certes, selon la jurisprudence, dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, les aspects visuel, phonétique ou conceptuel des signes en conflit n’ont pas toujours le même poids et il importe alors d’analyser les conditions objectives dans lesquelles les marques peuvent se présenter sur le marché [arrêts du Tribunal du 3 juillet 2003, Alejandro/OHMI – Anheuser-Busch (BUDMEN), T‑129/01, Rec. p. II‑2251, point 57, et du 6 octobre 2004, New Look/OHMI – Naulover (NLSPORT, NLJEANS, NLACTIVE et NLCollection), T‑117/03 à T‑119/03 et T‑171/03, Rec. p. II‑3471, point 49]. L’importance des éléments de similitude ou de différence entre les signes en conflit peut dépendre, notamment, des caractéristiques intrinsèques de ceux-ci ou des conditions de commercialisation des produits ou des services que ceux-ci désignent. Si les produits désignés par les marques en cause sont normalement vendus dans des magasins en libre-service où le consommateur choisit lui-même le produit et doit, dès lors, se fier principalement à l’image de la marque appliquée sur ce produit, une similitude visuelle des signes sera, en règle générale, d’une plus grande importance. Si, en revanche, le produit est surtout vendu oralement, il sera normalement attribué plus de poids à une similitude phonétique des signes (arrêt NLSPORT, NLJEANS, NLACTIVE et NLCollection, précité, point 49).

65      En l’espèce, il convient de considérer que les consommateurs concernés sont confrontés tant de manière visuelle que de manière phonétique aux marques désignant les produits en cause. Aucun élément ne permet d’attribuer un poids prépondérant à l’aspect visuel ou, au contraire, à l’aspect phonétique dans l’appréciation globale du risque de confusion. En effet, dans certains cas, ces produits sont vendus en libre-service dans des établissements commerciaux (soit des pharmacies, soit des supermarchés, soit encore des magasins spécialisés) en étant placés sur des rayons, où ils peuvent être examinés par les consommateurs. Dans d’autres cas, par exemple lorsqu’il s’agit de produits pharmaceutiques ou vétérinaires exclusivement délivrés sur ordonnance ou de produits en vente libre, mais rangés dans un endroit non directement accessible au public, les achats interviennent avec l’assistance d’un professionnel et impliquent une référence verbale aux marques concernées.

66      En tout état de cause, à supposer même que les produits en cause – en ce compris les produits vétérinaires, que la requérante ne vise pas par l’argument présentement examiné – soient habituellement achetés sans que le nom de la marque doive être prononcé et que l’aspect visuel revête, de ce fait, plus d’importance dans l’appréciation globale du risque de confusion, la conclusion de la chambre de recours selon laquelle un tel risque existe resterait pleinement fondée dès lors que, ainsi qu’il a été constaté aux points 52 et 53 ci-dessus, les marques en conflit présentent précisément également un certain degré de similitude sur le plan visuel.»

 Les conclusions des parties devant la Cour

22      Cadila Healthcare conclut à l’annulation de l’arrêt attaqué ainsi qu’à la condamnation de l’OHMI et de Novartis aux dépens.

23      L’OHMI et Novartis concluent au rejet du pourvoi et à la condamnation de Cadila Healthcare aux dépens.

 Sur le pourvoi

24      En vertu de l’article 181 de son règlement de procédure, lorsque le pourvoi est, en tout ou en partie, manifestement irrecevable ou manifestement non fondé, la Cour peut, à tout moment, sur proposition du juge rapporteur, l’avocat général entendu, décider de rejeter totalement ou partiellement ce pourvoi par voie d’ordonnance motivée.

25      Il y a lieu de faire application de cette disposition en l’espèce.

26      À l’appui de son pourvoi, Cadila Healthcare invoque en substance deux moyens. Le premier moyen est tiré d’une violation de l’article 113 du règlement de procédure du Tribunal. Le second moyen est pris de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94.

 Sur le premier moyen

 Argumentation des parties

27      Cadila Healthcare reproche au Tribunal de ne pas avoir constaté le non-lieu à statuer. Il ressortirait du point 21 de l’arrêt attaqué que le délai pour présenter une demande de renouvellement de l’enregistrement de la marque antérieure ZIMBUS a expiré le 1er mars 2012. La marque antérieure aurait donc définitivement cessé d’exister lorsque le Tribunal a statué. La marque antérieure étant devenue caduque en cours d’instance, le Tribunal aurait dû constater le non-lieu à statuer, à l’instar de ce qui a été jugé dans certaines affaires.

28      La requérante estime que le Tribunal aurai dû, d’office, entre le 1er mars 2012 et le prononcé de l’arrêt attaqué, inviter les parties à préciser si Novartis avait renouvelé l’enregistrement de sa marque et, dans la négative, faire droit à la demande de non-lieu à statuer. Elle soutient que le Tribunal ne pouvait justifier sa position en invoquant, au point 22 de l’arrêt attaqué, l’arrêt Group Lottuss/OHMI – Ugly (COYOTE UGLY), précité. En effet, cet arrêt porterait sur la date à laquelle le titulaire d’une marque enregistrée peut être déclaré déchu de ses droits pour non-usage, conformément aux dispositions de l’article 43, paragraphe 2, du règlement n° 40/94 qui prévoit expressément un délai et un cadre dans lesquels un déposant peut se défendre lors d’une procédure d’opposition en invoquant l’absence d’usage de la marque antérieure. Or, il n’existerait aucune règle équivalente concernant le non-renouvellement d’une marque antérieure et ses conséquences pour la procédure d’opposition.

29      Selon l’OHMI, l’article 113 du règlement de procédure du Tribunal permet à ce dernier de déclarer un recours sans objet, sans toutefois l’y obliger ni lui prescrire les mesures à prendre. Le Tribunal ne pourrait annuler ou réformer une décision pour des motifs apparus ultérieurement à son adoption. La marque antérieure étant valide à la date de la décision litigieuse, ce serait légitimement que le Tribunal a conclut, au point 22 de l’arrêt attaqué, qu’«il ne saurait être tenu compte d’un éventuel non-renouvellement de la marque antérieure pour apprécier la légalité de la décision [litigieuse]».

30      Novartis souligne que son intérêt à ce que la marque ZYDUS ne soit pas enregistrée perdure. Cet intérêt pourrait reposer sur le fait qu’elle est titulaire d’une marque voisine, voire identique, à la marque antérieure désormais caduque. Novartis estime ainsi qu’elle doit pouvoir invoquer la décision de la deuxième chambre de recours de l’OHMI selon laquelle il existe un risque de confusion.

 Appréciation de la Cour

31      L’objet du litige doit perdurer, tout comme l’intérêt à agir, jusqu’au prononcé de la décision juridictionnelle sous peine de non-lieu à statuer, ce qui suppose que le recours soit susceptible, par son résultat, de procurer un bénéfice à la partie qui l’a intenté (arrêt du 7 juin 2007, Wunenburger/Commission, C‑362/05 P, Rec. p. I‑4333, point 42 et jurisprudence citée).

32      Pour rejeter l’exception de non-lieu à statuer soulevée par Cadila Healthcare, le Tribunal a jugé, au point 22 de l’arrêt attaqué, que le litige avait conservé son objet. Le Tribunal a, en substance, considéré que l’éventuelle caducité de la marque antérieure était sans incidence sur l’appréciation de la légalité de la décision litigieuse dès lors que celle-ci a été adoptée alors que cette marque produisait des effets.

33      La caducité de la marque antérieure, survenue après l’introduction du recours, n’a pas privé de son objet ni de ses effets la décision litigieuse. En outre, l’appréciation contenue dans cette décision, selon laquelle il existe un risque de confusion entre les marques ZYDUS et ZIMBUS en ce qui concerne les produits pharmaceutiques, vétérinaires ou hygiéniques, continuait de produire ses effets au moment où le Tribunal a prononcé l’arrêt attaqué. C’est donc sans commettre d’erreur de droit que le Tribunal a jugé, au point 22 de l’arrêt attaqué, que le recours n’était pas devenu sans objet.

34      Contrairement à ce qu’a fait valoir Cadila Healthcare, il n’incombait pas au Tribunal, avant de statuer sur le litige, d’interroger les parties sur le renouvellement de la marque antérieure. En revanche, Cadila Healthcare, en sa qualité de requérante en première instance disposait, si elle estimait que l’objet du litige avait disparu, de la faculté de se désister.

35      Il découle de ce qui précède que le premier moyen n’est manifestement pas fondé.

 Sur le second moyen

 Argumentation des parties

36      Le second moyen s’articule en trois branches. Par la première, Cadila Healthcare soutient que le Tribunal a manifestement dénaturé les faits et les éléments de preuve, lorsque, aux points 54 et 55 de l’arrêt attaqué, il a constaté une forte similitude phonétique des marques en conflit dans les langues telles que les langues espagnole et portugaise. Ces éléments seraient contredits par un rapport d’expert produit par Cadila Healthcare au cours de la procédure en première instance, rapport qui n’aurait jamais été contesté par Novartis.

37      Par la deuxième branche du second moyen, Cadila Healthcare reproche au Tribunal d’avoir, au point 52 de l’arrêt attaqué, mal appliqué sa propre jurisprudence selon laquelle, lors de la comparaison visuelle de deux marques relativement brèves, les éléments centraux des signes en conflit peuvent revêtir exactement la même importance que les éléments de début et de fin de ces signes [arrêts du Tribunal du 20 avril 2005, Krüger/OHMI – Calpis (CALPICO), T‑273/02, Rec. p. II‑1271, point 39, et du 21 octobre 2008, Aventis Pharma/OHMI – Nycomed (PRAZOL), T‑95/07, point 43]. Au point 52 de l’arrêt attaqué, le Tribunal aurait appliqué cette jurisprudence de manière erronée en jugeant que, pour des signes brefs, les éléments de début et de fin sont plus importants que les éléments centraux.

38      Par la troisième branche du second moyen, Cadila Healthcare soutient que le Tribunal a eu tort de considérer que l’usage verbal des marques en conflit donne lieu à un risque de confusion. Elle critique le Tribunal pour avoir, au point 65 de l’arrêt attaqué, considéré qu’il existait des situations dans lesquelles les marques en conflit pouvaient faire l’objet d’un usage verbal, notamment lorsque les produits que ces marques désignent sont en vente libre. Ce serait en effet sur cette base que le Tribunal a constaté la «forte» similitude phonétique des marques en conflit donnant lieu à un risque de confusion. Or, ces constatations seraient erronées et dénatureraient des faits notoirement connus. En effet, un consommateur ne pourrait disposer seul d’un produit pharmaceutique qui n’est pas directement accessible, mais devrait avoir recours à l’intervention d’un professionnel. Dans toutes les situations impliquant un usage verbal desdites marques, une personne bien informée serait présente pour aider le consommateur lors de son achat, ce qui limiterait ainsi la possibilité de toute confusion en raison d’une similitude phonétique des marques en cause.

39      L’OHMI et Novartis considèrent, en substance, que le second moyen, pris en ses première et deuxième branches, est irrecevable dans la mesure où il revient à demander à la Cour de procéder à une nouvelle appréciation des faits.

40      L’OHMI soutient que le second moyen, pris en sa troisième branche, est irrecevable et/ou inopérant. Il serait en tout état de cause non fondé, ce dont Novartis convient.

 Appréciation de la Cour

41      Conformément aux articles 256, paragraphe 1, TFUE et 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, le pourvoi est limité aux questions de droit. Le Tribunal est seul compétent pour constater et apprécier les faits pertinents ainsi que pour apprécier les éléments de preuve. L’appréciation des faits et des éléments de preuve ne constitue donc pas, sous réserve du cas de leur dénaturation, une question de droit soumise, comme telle, au contrôle de la Cour dans le cadre d’un pourvoi (voir, notamment, arrêts du 19 septembre 2002, DKV/OHMI, C‑104/00 P, Rec. p. I‑7561, point 22, et du 18 décembre 2008, Les Éditions Albert René/OHMI, C‑16/06 P, Rec. p. I‑10053, point 68).

42      S’agissant des première et deuxième branches du second moyen, il est vrai que Cadila Healthcare a pris soin de se référer à une question de droit, à savoir la prétendue méconnaissance par le Tribunal de sa propre jurisprudence relative à la comparaison visuelle de marques verbales relativement brèves, et d’invoquer la dénaturation d’un rapport d’expertise versé au dossier et qui démontrerait l’absence de similitude phonétique en langues espagnole et portugaise des marques en conflit.

43      Toutefois, ces critiques visent en réalité à contester les appréciations de nature factuelle souverainement effectuées par le Tribunal aux points 52, 54 et 55 de l’arrêt attaqué dans le cadre de son contrôle sur les degrés de similitude visuelle et phonétique des marques en conflit.

44      En effet, s’agissant des arguments de Cadila Healthcare dirigés contre le point 52 de l’arrêt attaqué, il ressort de celui-ci que «la seule différence notable existant entre les marques en conflit réside dans la présence, entre leur lettre initiale et leurs trois lettres finales, des lettres ‘i’ et ‘m’ (dans le cas de la marque antérieure) et de la lettre ‘y’ (dans le cas de la marque demandée). Il convient de considérer, dans le cadre de l’appréciation visuelle d’ensemble des marques en conflit, que cette différence n’est toutefois pas suffisante pour écarter toute similitude visuelle entre ces marques». Or, ces appréciations que Cadila Healthcare conteste en invoquant une prétendue erreur de droit portent en réalité sur des éléments factuels, de telle sorte qu’elles ne relèvent pas du contrôle de la Cour dans le cadre d’un pourvoi.

45      Quant à l’argument relatif à une dénaturation de preuve, il y a lieu de rappeler que le Tribunal a estimé, au point 55 de l’arrêt attaqué, qu’il «existe entre les marques en conflit une forte similitude phonétique, à tout le moins dans certaines langues de l’Union, telles que l’espagnol et le portugais». Cette conclusion repose sur les constatations opérées au point 54 de l’arrêt attaqué, selon lesquelles les marques en conflit commencent par des syllabes qui «sont très proches sur le plan phonétique» et «finissent par le même son ‘us’», de telle sorte que «les consommateurs se souviendront donc davantage du fait que les marques en conflit ont un début et une fin très similaires». Ces constatations opérées par le Tribunal sont d’ordre purement factuel et ne relèvent pas, en tant que telles, du contrôle de la Cour dans le cadre d’un pourvoi.

46      En outre, le rapport dont Cadila Healthcare invoque la dénaturation par le Tribunal se borne à inventorier et à décrire la prononciation ainsi que les différences phonologiques et phonétiques des marques en conflit dans les langues espagnole, allemande, anglaise, française, italienne et portugaise. Cadila Healthcare cherche ainsi non pas à démontrer que le Tribunal a dénaturé ce rapport en en altérant le sens clair, mais à contester la validité des appréciations factuelles opérées par le Tribunal sur l’importance des similitudes phonétiques qu’il a constatée.

47      Le second moyen, pris en ses première et deuxième branches, est donc manifestement irrecevable.

48      Quant à la troisième branche du second moyen, celle-ci vise à remettre en cause les appréciations factuelles opérées par le Tribunal au point 65 de l’arrêt attaqué. Cette troisième branche est donc également manifestement irrecevable.

49      Il en résulte que le second moyen doit être rejeté comme manifestement irrecevable.

50      Eu égard à ce qui précède, il y a lieu de rejeter le pourvoi comme en partie manifestement irrecevable et en partie manifestement non fondé.

 Sur les dépens

51      Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure de la Cour, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, du même règlement, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Novartis et l’OHMI ayant conclu à la condamnation de la requérante et celle-ci ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de la condamner aux dépens.

Par ces motifs, la Cour (huitième chambre) ordonne:

1)      Le pourvoi est rejeté.

2)      Cadila Healthcare Ltd est condamnée aux dépens.

Signatures


* Langue de procédure: l’anglais.