Affaire C‑546/11

Dansk Jurist- og Økonomforbund

contre

Indenrigs- og Sundhedsministeriet

(demande de décision préjudicielle, introduite par la Højesteret)

«Égalité de traitement en matière d’emploi et de travail — Interdiction des discriminations fondées sur l’âge — Directive 2000/78/CE — Article 6, paragraphes 1 et 2 — Refus de versement d’un traitement de mise en disponibilité aux fonctionnaires qui ont atteint l’âge de 65 ans et sont éligibles au bénéfice d’une pension de retraite»

Sommaire – Arrêt de la Cour (deuxième chambre) du 26 septembre 2013

  1. Politique sociale – Égalité de traitement en matière d’emploi et de travail – Directive 2000/78 – Champ d’application – Traitement de mise en disponibilité destiné aux fonctionnaires ayant été licenciés en raison de la suppression de leur poste – Avantage actuel en espèces, payé aux fonctionnaires en raison de l’emploi de ces derniers – Inclusion

    [Art. 157, § 2, TFUE; directive du Conseil 2000/78, 13e considérant et art. 3, § 1, c), et 3]

  2. Politique sociale – Égalité de traitement en matière d’emploi et de travail – Directive 2000/78 – Interdiction de discrimination fondée sur l’âge – Exception – Régimes professionnels de sécurité sociale fixant les âges d’adhésion ou d’admissibilité aux prestations de retraite ou d’invalidité – Portée – Traitement de mise en disponibilité destiné aux fonctionnaires ayant été licenciés en raison de la suppression de leur poste – Exclusion

    (Directive du Conseil 2000/78, art. 6, § 2)

  3. Politique sociale – Égalité de traitement en matière d’emploi et de travail – Directive 2000/78 – Interdiction de discrimination fondée sur l’âge – Réglementation nationale excluant les fonctionnaires éligibles au bénéfice d’une pension de retraite du bénéfice du traitement de mise en disponibilité destiné aux fonctionnaires ayant été licenciés en raison de la suppression de leur poste – Justification tirée de la poursuite d’objectifs légitimes – Admissibilité – Proportionnalité – Inadmissibilité

    (Directive du Conseil 2000/78, art. 2, § 1, et 6, § 1)

  1.  La directive 2000/78, portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail, doit être interprétée en ce sens qu’elle inclut dans son champ d’application, compte tenu de l’article 3, paragraphes 1, sous c), et 3, de cette directive, lu en combinaison avec le considérant 13 de celle-ci, les rémunérations au sens de l’article 157, paragraphe 2, TFUE. Un traitement de mise à disponibilité destiné à des fonctionnaires qui ont été licenciés en raison de la suppression de leur poste représentant un avantage actuel en espèces, payé par l’employeur aux fonctionnaires en raison de l’emploi de ces derniers, constitue, par conséquent, une rémunération au sens de l’article 157, paragraphe 2, TFUE et relève, dès lors, du champ d’application de la directive 2000/78.

    (cf. points 25, 27, 29, 30, 44)

  2.  L’article 6, paragraphe 2, de la directive 2000/78, portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail, doit être interprété en ce sens qu’il n’a vocation à s’appliquer qu’aux prestations de retraites et d’invalidité relevant d’un régime professionnel de sécurité sociale.

    En effet, dès lors que cette disposition permet aux États membres de prévoir une exception au principe de non-discrimination fondée sur l’âge, elle doit faire l’objet d’une interprétation restrictive. Le libellé de l’article 6, paragraphe 2, ainsi que l’économie générale et la finalité de la directive 2000/78 corroborent le fait que cette disposition n’a vocation à s’appliquer que dans les cas qui y sont limitativement énumérés.

    Dès lors qu’un traitement de mise en disponibilité destiné à des fonctionnaires ayant été licenciés en raison de la suppression de leur poste ne constitue ni une prestation de retraite, ni une prestation d’invalidité au sens de l’article 6, paragraphe 2, de la directive 2000/78, cette dernière disposition ne trouve pas à s’appliquer à une telle prestation.

    (cf. points 39-41, 43-45, disp. 1)

  3.  Les articles 2 et 6, paragraphe 1, de la directive 2000/78, portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail, doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une réglementation nationale en vertu de laquelle les fonctionnaires qui ont atteint l’âge leur permettant de percevoir une pension de retraite ne peuvent, en raison de ce seul fait, bénéficier d’un traitement de mise en disponibilité destiné aux fonctionnaires qui ont été licenciés en raison de la suppression de leur poste.

    Certes, la finalité consistant à assurer la disponibilité des fonctionnaires et à leur assurer une protection en cas de suppression de leur poste, tout en limitant le bénéfice du traitement de mise en disponibilité aux seuls fonctionnaires qui ont besoin d’une protection et qui respectent leur obligation de disponibilité, relève de la catégorie des objectifs légitimes de politique d’emploi et du marché du travail, au sens de l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2000/78. Par ailleurs, l’octroi du bénéfice du traitement de mise en disponibilité aux seuls fonctionnaires qui ne sont pas éligibles au bénéfice d’une pension de retraite n’apparaît pas déraisonnable au regard de la finalité poursuivie par le législateur, ni manifestement inappropriée pour atteindre les objectifs légitimes invoqués. Toutefois, une réglementation nationale qui exclut automatiquement du bénéfice du traitement de mise en disponibilité tant les fonctionnaires souhaitant partir à la retraite, et qui, par conséquent, vont effectivement percevoir une pension de retraite, que ceux qui souhaitent poursuivre leur carrière professionnelle au sein de l’administration publique au-delà de leur soixante-cinquième anniversaire, au seul motif que ces derniers fonctionnaires pourraient, en raison notamment de leur âge, disposer d’une telle pension, va au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre les objectifs poursuivis. En effet, une telle mesure peut obliger les fonctionnaires qui souhaitent rester sur le marché du travail à accepter une pension de retraite d’un montant réduit par rapport à celui auquel ils pourraient prétendre en demeurant actifs jusqu’à un âge avancé.

    De surcroît, les objectifs légitimes poursuivis par cette réglementation paraissent susceptibles d’être atteints par des moyens moins contraignants, mais tout aussi appropriés. Ainsi, des dispositions qui limiteraient le bénéfice du traitement de mise en disponibilité aux seuls fonctionnaires qui ont renoncé temporairement au bénéfice d’une pension de retraite afin de poursuivre leur activité professionnelle, tout en prévoyant, dans le cas où ces derniers refuseraient d’occuper un poste de remplacement approprié, des mesures visant à sanctionner les abus, permettraient de s’assurer que ce traitement ne bénéficie qu’aux fonctionnaires qui sont effectivement disponibles pour occuper un poste de remplacement.

    (cf. points 51, 58, 66, 67, 69, 72, 74, disp. 2)


Affaire C‑546/11

Dansk Jurist- og Økonomforbund

contre

Indenrigs- og Sundhedsministeriet

(demande de décision préjudicielle, introduite par la Højesteret)

«Égalité de traitement en matière d’emploi et de travail — Interdiction des discriminations fondées sur l’âge — Directive 2000/78/CE — Article 6, paragraphes 1 et 2 — Refus de versement d’un traitement de mise en disponibilité aux fonctionnaires qui ont atteint l’âge de 65 ans et sont éligibles au bénéfice d’une pension de retraite»

Sommaire – Arrêt de la Cour (deuxième chambre) du 26 septembre 2013

  1. Politique sociale — Égalité de traitement en matière d’emploi et de travail — Directive 2000/78 — Champ d’application — Traitement de mise en disponibilité destiné aux fonctionnaires ayant été licenciés en raison de la suppression de leur poste — Avantage actuel en espèces, payé aux fonctionnaires en raison de l’emploi de ces derniers — Inclusion

    [Art. 157, § 2, TFUE; directive du Conseil 2000/78, 13e considérant et art. 3, § 1, c), et 3]

  2. Politique sociale — Égalité de traitement en matière d’emploi et de travail — Directive 2000/78 — Interdiction de discrimination fondée sur l’âge — Exception — Régimes professionnels de sécurité sociale fixant les âges d’adhésion ou d’admissibilité aux prestations de retraite ou d’invalidité — Portée — Traitement de mise en disponibilité destiné aux fonctionnaires ayant été licenciés en raison de la suppression de leur poste — Exclusion

    (Directive du Conseil 2000/78, art. 6, § 2)

  3. Politique sociale — Égalité de traitement en matière d’emploi et de travail — Directive 2000/78 — Interdiction de discrimination fondée sur l’âge — Réglementation nationale excluant les fonctionnaires éligibles au bénéfice d’une pension de retraite du bénéfice du traitement de mise en disponibilité destiné aux fonctionnaires ayant été licenciés en raison de la suppression de leur poste — Justification tirée de la poursuite d’objectifs légitimes — Admissibilité — Proportionnalité — Inadmissibilité

    (Directive du Conseil 2000/78, art. 2, § 1, et 6, § 1)

  1.  La directive 2000/78, portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail, doit être interprétée en ce sens qu’elle inclut dans son champ d’application, compte tenu de l’article 3, paragraphes 1, sous c), et 3, de cette directive, lu en combinaison avec le considérant 13 de celle-ci, les rémunérations au sens de l’article 157, paragraphe 2, TFUE. Un traitement de mise à disponibilité destiné à des fonctionnaires qui ont été licenciés en raison de la suppression de leur poste représentant un avantage actuel en espèces, payé par l’employeur aux fonctionnaires en raison de l’emploi de ces derniers, constitue, par conséquent, une rémunération au sens de l’article 157, paragraphe 2, TFUE et relève, dès lors, du champ d’application de la directive 2000/78.

    (cf. points 25, 27, 29, 30, 44)

  2.  L’article 6, paragraphe 2, de la directive 2000/78, portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail, doit être interprété en ce sens qu’il n’a vocation à s’appliquer qu’aux prestations de retraites et d’invalidité relevant d’un régime professionnel de sécurité sociale.

    En effet, dès lors que cette disposition permet aux États membres de prévoir une exception au principe de non-discrimination fondée sur l’âge, elle doit faire l’objet d’une interprétation restrictive. Le libellé de l’article 6, paragraphe 2, ainsi que l’économie générale et la finalité de la directive 2000/78 corroborent le fait que cette disposition n’a vocation à s’appliquer que dans les cas qui y sont limitativement énumérés.

    Dès lors qu’un traitement de mise en disponibilité destiné à des fonctionnaires ayant été licenciés en raison de la suppression de leur poste ne constitue ni une prestation de retraite, ni une prestation d’invalidité au sens de l’article 6, paragraphe 2, de la directive 2000/78, cette dernière disposition ne trouve pas à s’appliquer à une telle prestation.

    (cf. points 39-41, 43-45, disp. 1)

  3.  Les articles 2 et 6, paragraphe 1, de la directive 2000/78, portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail, doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une réglementation nationale en vertu de laquelle les fonctionnaires qui ont atteint l’âge leur permettant de percevoir une pension de retraite ne peuvent, en raison de ce seul fait, bénéficier d’un traitement de mise en disponibilité destiné aux fonctionnaires qui ont été licenciés en raison de la suppression de leur poste.

    Certes, la finalité consistant à assurer la disponibilité des fonctionnaires et à leur assurer une protection en cas de suppression de leur poste, tout en limitant le bénéfice du traitement de mise en disponibilité aux seuls fonctionnaires qui ont besoin d’une protection et qui respectent leur obligation de disponibilité, relève de la catégorie des objectifs légitimes de politique d’emploi et du marché du travail, au sens de l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2000/78. Par ailleurs, l’octroi du bénéfice du traitement de mise en disponibilité aux seuls fonctionnaires qui ne sont pas éligibles au bénéfice d’une pension de retraite n’apparaît pas déraisonnable au regard de la finalité poursuivie par le législateur, ni manifestement inappropriée pour atteindre les objectifs légitimes invoqués. Toutefois, une réglementation nationale qui exclut automatiquement du bénéfice du traitement de mise en disponibilité tant les fonctionnaires souhaitant partir à la retraite, et qui, par conséquent, vont effectivement percevoir une pension de retraite, que ceux qui souhaitent poursuivre leur carrière professionnelle au sein de l’administration publique au-delà de leur soixante-cinquième anniversaire, au seul motif que ces derniers fonctionnaires pourraient, en raison notamment de leur âge, disposer d’une telle pension, va au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre les objectifs poursuivis. En effet, une telle mesure peut obliger les fonctionnaires qui souhaitent rester sur le marché du travail à accepter une pension de retraite d’un montant réduit par rapport à celui auquel ils pourraient prétendre en demeurant actifs jusqu’à un âge avancé.

    De surcroît, les objectifs légitimes poursuivis par cette réglementation paraissent susceptibles d’être atteints par des moyens moins contraignants, mais tout aussi appropriés. Ainsi, des dispositions qui limiteraient le bénéfice du traitement de mise en disponibilité aux seuls fonctionnaires qui ont renoncé temporairement au bénéfice d’une pension de retraite afin de poursuivre leur activité professionnelle, tout en prévoyant, dans le cas où ces derniers refuseraient d’occuper un poste de remplacement approprié, des mesures visant à sanctionner les abus, permettraient de s’assurer que ce traitement ne bénéficie qu’aux fonctionnaires qui sont effectivement disponibles pour occuper un poste de remplacement.

    (cf. points 51, 58, 66, 67, 69, 72, 74, disp. 2)