Affaire C‑441/11 P
Commission européenne
contre
Verhuizingen Coppens NV
«Pourvoi — Concurrence — Ententes — Articles 81 CE et 53 de l’accord EEE — Marché des services de déménagements internationaux en Belgique — Entente consistant en trois accords particuliers — Infraction unique et continue — Défaut de preuve de la connaissance, par un participant à un accord particulier, des autres accords particuliers — Annulation partielle ou intégrale de la décision de la Commission — Articles 263 TFUE et 264 TFUE»
Sommaire – Arrêt de la Cour (quatrième chambre) du 6 décembre 2012
Recours en annulation — Arrêt d’annulation — Portée — Annulation partielle d’un acte du droit de l’Union — Condition — Annulation, dans son intégralité, d’une décision de la Commission qualifiant une entente globale d’infraction unique et continue et infligeant une amende, malgré la reconnaissance de la responsabilité de l’entreprise requérante pour une partie des comportements anticoncurrentiels — Inadmissibilité
(Art. 81, § 1, CE; art. 264, al. 1, TFUE)
Ententes — Interdiction — Infractions — Accords et pratiques concertées constitutifs d’une infraction unique — Imputation d’une responsabilité à une entreprise pour l’ensemble de l’infraction — Conditions
(Art. 81, § 1, CE)
Pourvoi — Pourvoi jugé bien fondé — Règlement du litige au fond par la Cour
(Statut de la Cour de justice, art. 61, al. 1)
Concurrence — Procédure administrative — Décision de la Commission constatant une infraction unique — Preuve de la participation d’une entreprise à la charge de la Commission — Portée de la charge probatoire
(Art. 81, § 1, CE)
Ententes — Interdiction — Infractions — Preuve — Charge incombant à la Commission — Preuve apportée par un certain nombre d’indices et de coïncidences attestant de l’existence et de la durée d’un comportement anticoncurrentiel continu — Absence de preuve concernant certaines périodes déterminées de la période globale considérée — Absence d’incidence
(Art. 81, § 1, CE)
Ententes — Participation d’une entreprise à des initiatives anticoncurrentielles — Caractère suffisant, pour engager la responsabilité de l’entreprise, d’une approbation tacite sans distanciation publique ni dénonciation aux autorités compétentes
(Art. 81, § 1, CE)
Concurrence — Amendes — Montant — Contrôle juridictionnel — Compétence de pleine juridiction — Portée — Limite — Respect du principe de non-discrimination
(Art. 261 TFUE; règlement du Conseil no 1/2003, art. 23, § 2, al. 2, 3 et 31; communication de la Commission 2006/C 210/02)
Procédure juridictionnelle — Dépens — Condamnation de la partie gagnante à supporter ses propres dépens ainsi qu’une partie de ceux des requérants
(Règlement de procédure de la Cour, art. 138, § 1 et 3, et 184, § 1 et 2)
Le seul fait que le Tribunal considère qu’un moyen invoqué par la partie requérante au soutien de son recours en annulation est fondé ne lui permet pas d’annuler automatiquement l’acte attaqué dans son intégralité. En effet, une annulation intégrale ne saurait être retenue lorsqu’il apparaît de toute évidence que ledit moyen, visant uniquement un aspect spécifique de l’acte contesté, n’est susceptible d’asseoir qu’une annulation partielle. Toutefois, l’annulation partielle d’un acte du droit de l’Union n’est possible que pour autant que les éléments dont l’annulation est demandée sont séparables du reste de l’acte. Il n’est pas satisfait à cette exigence lorsque l’annulation partielle d’un acte aurait pour effet de modifier la substance de celui-ci, ce qui doit être apprécié sur le fondement d’un critère objectif et non d’un critère subjectif lié à la volonté politique de l’autorité qui a adopté l’acte en cause.
S’agissant d’une décision de la Commission qualifiant une entente globale d’infraction unique et continue, il n’est possible de diviser une telle décision que si, d’une part, l’entreprise requérante a été mise en mesure, au cours de la procédure administrative, de comprendre qu’il lui était également reproché chacun des comportements la composant, et donc de se défendre sur ce point, et si, d’autre part, ladite décision est suffisamment claire à cet égard. Il s’ensuit que, si le juge de l’Union constate que la Commission n’a pas établi à suffisance de droit qu’une entreprise, lors de sa participation à l’un des comportements anticoncurrentiels composant une infraction unique et continue, avait connaissance des autres comportements anticoncurrentiels adoptés par les autres participants à l’entente dans la poursuite des mêmes objectifs ou pouvait raisonnablement les prévoir et était prête à en accepter le risque, il doit en tirer comme seule conséquence que cette entreprise ne peut se voir imputer la responsabilité de ces autres comportements et, partant, de l’infraction unique et continue dans son ensemble et que la décision attaquée doit être considérée comme non fondée dans cette seule mesure.
Dans de telles conditions, le Tribunal commet une erreur de droit lorsqu’il prononce l’annulation, dans son intégralité, d’une décision de la Commission qualifiant une entente globale d’infraction unique et continue en tant qu’elle concerne une entreprise, alors que la participation de cette dernière à une partie de l’entente et le fait que cette participation peut en elle-même constituer une violation de l’article 81 CE ne sont pas remis en cause par le Tribunal.
(cf. points 37, 38, 46, 47, 54)
Voir le texte de la décision.
(cf. points 41-44)
Voir le texte de la décision.
(cf. points 55, 56)
Afin d’établir la participation d’une entreprise à la mise en œuvre d’une infraction unique, la Commission doit prouver que cette entreprise entendait contribuer par son propre comportement aux objectifs communs poursuivis par l’ensemble des participants et qu’elle avait connaissance des comportements infractionnels envisagés ou mis en œuvre par d’autres entreprises dans la poursuite des mêmes objectifs, ou qu’elle pouvait raisonnablement les prévoir et qu’elle était prête à en accepter le risque.
La Commission ne satisfait pas à ces exigences lorsqu’elle prétend pouvoir présumer une telle connaissance par une entreprise en considérant, notamment, que cette dernière ne nie pas avoir été informée de l’accord concerné et que, en outre, la Commission admet expressément que sa décision ne repose pas sur des éléments de preuve spécifiques sur ce point.
(cf. points 60, 66)
Dans la plupart des cas, l’existence d’une pratique ou d’un accord anticoncurrentiel doit être inférée d’un certain nombre de coïncidences et d’indices qui, considérés ensemble, peuvent constituer, en l’absence d’une autre explication cohérente, la preuve d’une violation des règles de la concurrence.
De tels indices et coïncidences permettent, lorsqu’ils sont évalués globalement, de révéler non seulement l’existence de comportements ou d’accords anticoncurrentiels, mais également la durée d’un comportement anticoncurrentiel continu et la période d’application d’un accord conclu en violation des règles de concurrence. S’agissant de l’absence de preuve quant à l’existence d’un accord au cours de certaines périodes déterminées ou, tout au moins, quant à sa mise en œuvre par une entreprise au cours d’une période donnée, il convient de rappeler que le fait qu’une telle preuve n’a pas été apportée pour certaines périodes déterminées ne fait pas obstacle à ce que l’infraction soit regardée comme constituée durant une période globale plus étendue que celles-ci dès lors qu’une telle constatation repose sur des indices objectifs et concordants. Dans le cadre d’une infraction s’étendant sur plusieurs années, le fait que les manifestations de l’entente interviennent à des périodes différentes, pouvant être séparées par des laps de temps plus ou moins longs, demeure sans incidence sur l’existence de cette entente, pour autant que les différentes actions qui font partie de cette infraction poursuivent une seule finalité et s’inscrivent dans le cadre d’une infraction à caractère unique et continu.
(cf. points 70-72)
Voir le texte de la décision.
(cf. point 73)
Voir le texte de la décision.
(cf. points 79-82)
Voir le texte de la décision.
(cf. points 83-85)