ORDONNANCE DE LA COUR (quatrième chambre)

11 mars 2010 (*)

«Article 104, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement de procédure – Directive 85/337/CE – Évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l’environnement – Directive 96/61 – Prévention et réduction intégrées de la pollution – Participation du public au processus décisionnel en matière d’environnement – Droit de faire appel des décisions d’autorisation de projets susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement»

Dans l’affaire C‑24/09,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 234 CE, introduite par le Högsta domstolen (Suède), par décision du 13 janvier 2009, parvenue à la Cour le 19 janvier 2009, dans la procédure

Djurgården-Lilla Värtans Miljöskyddsförening

contre

AB Fortum Värme samägt med Stockholms stad,

LA COUR (quatrième chambre),

composée de M. J.‑C. Bonichot (rapporteur), président de chambre, Mme C. Toader, MM. K. Schiemann, P. Kūris et L. Bay Larsen, juges,

avocat général: Mme E. Sharpston,

greffier: M. R. Grass,

la Cour se proposant de statuer par voie d’ordonnance motivée conformément à l’article 104, paragraphe 3, premier alinéa, de son règlement de procédure,

l’avocat général entendu,

rend la présente

Ordonnance

1        La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de dispositions de la directive 85/337/CEE du Conseil, du 27 juin 1985, concernant l’évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l’environnement (JO L 175, p. 40), telle que modifiée par la directive 2003/35/CE du Parlement européen et du Conseil, du 26 mai 2003 (JO L 156, p. 17, ci-après la «directive 85/337»), et de la directive 96/61/CE du Conseil, du 24 septembre 1996, relative à la prévention et à la réduction intégrées de la pollution (JO L 257, p. 26), telle que modifiée par la directive 2003/35 (ci-après la «directive 96/61»), ultérieurement codifiée par la directive 2008/1/CE du Parlement européen et du Conseil, du 15 janvier 2008, relative à la prévention et à la réduction intégrées de la pollution (JO L 24, p. 8).

2        Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant le Djurgården-Lilla Värtans Miljöskyddsförening (association pour la protection de l’environnement de Djurgården-Lilla Värtan, ci-après le «Miljöskyddsförening») à AB Fortum Värme samägt med Stockholms stad.

 Le cadre juridique

 La réglementation de l’Union

 La directive 2003/35

3        L’article 1er de la directive 2003/35 est libellé comme suit:

«La présente directive vise à contribuer à la mise en œuvre des obligations découlant de la convention d’Aarhus [sur l’accès à l’information, la participation du public au processus décisionnel et l’accès à la justice en matière d’environnement, approuvée au nom de la Communauté européenne par la décision 2005/370/CE du Conseil, du 17 février 2005 (JO L 124, p. 1)], en particulier:

a)      en prévoyant la participation du public lors de l’élaboration de certains plans et programmes relatifs à l’environnement;

b)      en améliorant la participation du public et en prévoyant des dispositions relatives à l’accès à la justice dans les directives 85/337/CEE et 96/61/CE du Conseil.»

 La directive 85/337

4        L’article 1er, paragraphe 2, de la directive 85/337 prévoit:

«Au sens de la présente directive, ont entend par:

[…]

public:

une ou plusieurs personnes physiques ou morales et, conformément à la législation ou à la pratique nationales, les associations, organisations ou groupes constitués par ces personnes;

public concerné:

le public qui est touché ou qui risque d’être touché par les procédures décisionnelles en matière d’environnement visées à l’article 2, paragraphe 2, ou qui a un intérêt à faire valoir dans ce cadre; aux fins de la présente définition, les organisations non gouvernementales qui œuvrent en faveur de la protection de l’environnement et qui remplissent les conditions pouvant être requises en droit interne sont réputées avoir un intérêt.»

5        Aux termes de l’article 2 de la directive 85/337:

«1.      Les États membres prennent les dispositions nécessaires pour que, avant l’octroi de l’autorisation, les projets susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement, notamment en raison de leur nature, de leurs dimensions ou de leur localisation, soient soumis à une procédure de demande d’autorisation et à une évaluation en ce qui concerne leurs incidences. Ces projets sont définis à l’article 4.

2.      L’évaluation des incidences sur l’environnement peut être intégrée dans les procédures existantes d’autorisation des projets dans les États membres ou, à défaut, dans d’autres procédures ou dans celles à établir pour répondre aux objectifs de la présente directive.

[…]»

6        L’article 6 de la directive 85/337 est ainsi rédigé:

«[…]

2.      À un stade précoce des procédures décisionnelles en matière d’environnement visées à l’article 2, paragraphe 2, et au plus tard dès que ces informations peuvent raisonnablement être fournies, les informations suivantes sont communiquées au public par des avis au public ou d’autres moyens appropriés tels que les moyens de communication électroniques lorsqu’ils sont disponibles:

a)      la demande d’autorisation;

b)      le fait que le projet fait l’objet d’une procédure d’évaluation des incidences sur l’environnement et que, le cas échéant, l’article 7 est applicable;

c)      les coordonnées des autorités compétentes pour prendre la décision, de celles auprès desquelles peuvent être obtenus des renseignements pertinents, de celles auxquelles des observations ou questions peuvent être adressées ainsi que des précisions sur les délais de transmission des observations ou des questions;

d)      la nature des décisions possibles ou, lorsqu’il existe, le projet de décision;

e)      une indication concernant la disponibilité des informations recueillies en vertu de l’article 5;

f)      une indication de la date et du lieu où les renseignements pertinents seront mis à la disposition du public et des moyens par lesquels ils le seront;

g)      les modalités précises de la participation du public prévues au titre du paragraphe 5 du présent article.

3.      Les États membres veillent à ce que soient mis, dans des délais raisonnables, à la disposition du public concerné:

a)      toute information recueillie en vertu de l’article 5;

b)      conformément à la législation nationale, les principaux rapports et avis adressés à l’autorité ou aux autorités compétentes au moment où le public concerné est informé conformément au paragraphe 2 du présent article;

c)      conformément à la directive 2003/4/CE du Parlement européen et du Conseil du 28 janvier 2003 concernant l’accès du public à l’information en matière d’environnement [(JO L 41, p. 26)], les informations autres que celles visées au paragraphe 2 du présent article qui sont pertinentes pour la décision en vertu de l’article 8 et qui ne deviennent disponibles qu’après que le public concerné a été informé conformément au paragraphe 2 du présent article.

4.      À un stade précoce de la procédure, le public concerné se voit donner des possibilités effectives de participer au processus décisionnel en matière d’environnement visé à l’article 2, paragraphe 2, et, à cet effet, il est habilité à adresser des observations et des avis, lorsque toutes les options sont envisageables, à l’autorité ou aux autorités compétentes avant que la décision concernant la demande d’autorisation ne soit prise.

5.      Les modalités précises de l’information du public (par exemple, affichage dans un certain rayon ou publication dans la presse locale) et de la consultation du public concerné (par exemple, par écrit ou par enquête publique) sont déterminées par les États membres.

6.      Des délais raisonnables sont prévus à chacune des différentes étapes afin que suffisamment de temps soit disponible pour informer le public et permettre au public concerné de se préparer et de participer effectivement à la prise de décision sur l’environnement en vertu des dispositions du présent article.»

7        L’article 10 bis de la directive 85/337 est ainsi rédigé:

«Les États membres veillent, conformément à leur législation nationale pertinente, à ce que les membres du public concerné:

a)      ayant un intérêt suffisant pour agir, ou sinon

b)      faisant valoir une atteinte à un droit, lorsque le droit administratif procédural d’un État membre impose une telle condition,

puissent former un recours devant une instance juridictionnelle ou un autre organe indépendant et impartial établi par la loi pour contester la légalité, quant au fond ou à la procédure, des décisions, des actes ou omissions relevant des dispositions de la présente directive relatives à la participation du public.

Les États membres déterminent à quel stade les décisions, actes ou omissions peuvent être contestés.

Les États membres déterminent ce qui constitue un intérêt suffisant pour agir ou une atteinte à un droit, en conformité avec l’objectif visant à donner au public concerné un large accès à la justice. À cette fin, l’intérêt de toute organisation non gouvernementale, répondant aux exigences visées à l’article 1er, paragraphe 2, est réputé suffisant aux fins du point a) du présent article. De telles organisations sont aussi réputées bénéficier de droits susceptibles de faire l’objet d’une atteinte aux fins du point b) du présent article.

Le présent article n’exclut pas la possibilité d’un recours préalable devant une autorité administrative et n’affecte en rien l’obligation d’épuiser toutes les voies de recours administratif avant d’engager des procédures de recours juridictionnel dès lors que la législation nationale prévoit une telle obligation.

Ces procédures doivent être régulières, équitables, rapides et d’un coût non prohibitif.

Afin d’accroître l’efficacité des dispositions du présent article, les États membres veillent à ce qu’une information pratique soit mise à la disposition du public concernant l’accès aux voies de recours administratif et juridictionnel.»

 La directive 96/61

8        La directive 2003/35 a apporté à la directive 96/61 des modifications correspondant à celles apportées à la directive 85/337.

9        L’article 2, points 13 et 14, de la directive 96/61 donne des définitions des notions de «public» et de «public concerné» qui correspondent en substance à celles qui figurent dans la directive 85/337 et qui ont été reprises à l’article 2, points 14 et 15, de la directive 2008/1.

10      Les dispositions de l’article 15 bis de la directive 96/61 ont en substance la même teneur que celles de l’article 10 bis de la directive 85/337 et ont été reprises à l’article 16 de la directive 2008/1.

 La réglementation nationale

11      Les dispositions relatives à l’évaluation des incidences sur l’environnement figurent au chapitre 6 du code de l’environnement. Elles prévoient notamment que quiconque souhaite se livrer à une activité soumise à autorisation doit se concerter avec le länsstryrelsen (préfecture), autorité de contrôle, et les particuliers susceptibles d’être spécialement concernés. À cette occasion, il appartient à ladite autorité de se prononcer sur le point de savoir si l’activité projetée est susceptible d’avoir des incidences notables sur l’environnement. Si elle décide que tel est le cas, la concertation doit être étendue à d’autres organes de l’État ainsi qu’aux communes, au public et aux organisations susceptibles d’être concernés.

12      Le droit de former un recours est régi par les articles 12 et 13 du chapitre 16 du code de l’environnement. Le droit de recours des parties à une procédure juridictionnelle ainsi que de certaines organisations et autorités est traité aux articles 12 et suivants dudit chapitre. Ledit article 13 dispose qu’une association à but non lucratif peut, sous certaines conditions qu’il détermine, former un recours contre les jugements et les décisions en matière d’autorisation, d’approbation ou de dispense rendus en vertu du code de l’environnement.

13      Ce même article 13 exige qu’une telle association remplisse trois conditions, à savoir qu’elle ait pour objet, en vertu de ses statuts, la protection de la nature ou de l’environnement, qu’elle ait exercé son activité pendant au moins trois ans en Suède et qu’elle compte au moins 2 000 adhérents.

 Le litige au principal et les questions préjudicielles

14      Par décision du 7 novembre 2007, la Miljödomstolen vid Nacka tingsrätt (chambre des affaires environnementales du tribunal local de Nacka) a octroyé à AB Fortum Värme samägt med Stockholms stad une autorisation de construire et d’exploiter une centrale de cogénération chauffée au biocarburant. Le Miljöskyddsförening a fait appel de cette décision devant le miljööverdomstol (cour d’appel pour l’environnement). Cet appel a été rejeté au motif que l’association ne satisfaisait pas à l’exigence selon laquelle une association à but non lucratif doit compter au moins 2 000 membres pour pouvoir faire appel de décisions et de jugements visés par le code de l’environnement suédois, énoncée au chapitre 16, article 13, de ce code.

15      Le Miljöskyddsförening a formé un pourvoi contre cette dernière décision devant le Högsta domstolen (Cour suprême). Celui-ci, dans sa décision de renvoi, remarque que la Cour a certes déjà été amenée à interpréter la portée des dispositions de la directive 85/337 relatives au droit d’accès à la justice dans le cadre de l’affaire C-263/08. Il estime cependant nécessaire de clarifier également l’interprétation qu’il convient de donner des dispositions correspondantes de la directive 96/61.

16      Dans ce contexte, le Högsta domstolen a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

«1)      La disposition de l’article 10 bis de la directive 85/337 […] – selon laquelle le public concerné a, sous certaines conditions, le droit de former un recours devant une instance juridictionnelle ou un autre organe indépendant et impartial établi par la loi pour contester la légalité, quant au fond ou à la procédure, d’une décision – implique-t-elle qu’il existe également une exigence selon laquelle le public concerné a le droit de former un recours à l’encontre de la décision d’une juridiction relative à une […] autorisation dans un cas où [ledit public] a eu la possibilité de participer au traitement de la question concernée par ladite juridiction et de s’exprimer auprès de celle-ci?

2)      Si la première question reçoit une réponse positive: les articles 1er, paragraphe 2, 6, paragraphe 4, et 10 bis de la directive 85/337 […] doivent-ils être interprétés en ce sens que des exigences différentes peuvent être prévues en droit national en ce qui concerne le public concerné visé [auxdits articles] 6, paragraphe 4, d’une part, et […] 10 bis, d’autre part, avec pour conséquence qu’une association de protection de l’environnement établie localement qui a le droit de participer au processus décisionnel visé [audit] article 6, paragraphe 4, en ce qui concerne un projet susceptible d’avoir des incidences notables sur l’environnement dans le secteur où [cette] association agit ne dispose pas du droit de recours visé audit article 10 bis […] dans la mesure où le nombre de ses membres est inférieur au nombre minimal fixé par le droit national?

3)      La disposition de l’article 15 bis de la directive 96/61 […] – selon laquelle le public concerné a, sous certaines conditions, le droit de former un recours devant une instance juridictionnelle ou un autre organe indépendant et impartial établi par la loi pour contester la légalité, quant au fond ou à la procédure, d’une décision – implique-t-elle qu’il existe une exigence selon laquelle le public concerné a le droit de former un recours à l’encontre de la décision d’une juridiction relative à une […] autorisation dans un cas où [ledit public] a eu la possibilité de participer au traitement de la question concernée par la juridiction et de s’exprimer auprès de celle ci?

4)      Si la troisième question reçoit une réponse positive: les articles 2, point 14, et 15 bis de la directive 96/61 […] doivent-ils être interprétés en ce sens qu’il est possible de prévoir en droit interne des exigences en matière d’accès à la justice ayant pour conséquence qu’une association de protection de l’environnement établie localement qui a le droit de participer au processus décisionnel concernant un projet susceptible d’avoir des incidences notables sur l’environnement dans le secteur où ladite association agit ne dispose pas du droit de recours visé [audit] article 15 bis […] dans la mesure où le nombre de ses membres est inférieur au nombre minimal fixé par le droit national?»

 Sur les questions préjudicielles

17      En vertu de l’article 104, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement de procédure, lorsqu’une question posée à titre préjudiciel est identique à une question sur laquelle la Cour a déjà statué ou lorsque la réponse à une telle question peut être clairement déduite de la jurisprudence, la Cour peut à tout moment, après avoir entendu l’avocat général, statuer par voie d’ordonnance motivée.

 Sur les première et troisième questions

18      Par ses première et troisième questions, la juridiction de renvoi demande, en substance, si les articles 10 bis de la directive 85/337 et 15 bis de la directive 96/61 impliquent que les membres du public concerné puissent exercer un recours contre la décision par laquelle une instance, appartenant à l’organisation judiciaire d’un État membre, a statué sur une demande d’autorisation de projet alors même qu’ils ont eu la possibilité de participer à l’instruction de ladite demande en prenant part à la procédure devant ladite instance et de faire valoir leur position à cette occasion.

19      La première question, qui porte sur l’interprétation desdites dispositions de la directive 85/337, est identique à une question sur laquelle la Cour a entre-temps statué dans l’arrêt du 15 octobre 2009, Djurgården-Lilla Värtans Miljöskyddsförening (C‑263/08, non encore publié au Recueil).

20      À cet égard, il ressort de cet arrêt que les membres du public concerné, au sens des articles 1er, paragraphe 2, et 10 bis de la directive 85/337, doivent pouvoir exercer un recours contre la décision par laquelle une instance, appartenant à l’organisation judiciaire d’un État membre, a statué sur une demande d’autorisation de projet, quel que soit le rôle qu’ils ont pu jouer dans l’instruction de ladite demande en prenant part à la procédure devant ladite instance et en faisant valoir leur position à cette occasion (arrêt Djurgården-Lilla Värtans Miljöskyddsförening, précité, point 39 des motifs et point 2 du dispositif).

21      Il doit en aller de même s’agissant de la directive 96/61. En effet, d’une part, les articles 2, point 14, et 15 bis de la directive 96/61, dispositions reprises aux articles 2, point 15, et 16 de la directive 2008/1, ont, en substance, la même teneur que, respectivement, les articles 1er, paragraphe 2, et 10 bis de la directive 85/337. D’autre part, aucun motif qui pourrait être tiré de l’objet ou de la portée de la directive 96/61 n’est de nature à faire obstacle à ce que la Cour transpose, pour l’interprétation des dispositions concernées de cette dernière, l’interprétation qu’elle a dégagée pour les dispositions similaires de la directive 85/337.

22      La réponse à la troisième question posée, qui porte sur l’interprétation desdites dispositions de la directive 96/61, peut par suite être clairement déduite de la jurisprudence issue de l’arrêt Djurgården-Lilla Värtans Miljöskyddsförening, précité.

23      Par conséquent, il convient de répondre aux première et troisième questions posées que les membres du public concerné, au sens des articles 1er, paragraphe 2, et 10 bis de la directive 85/337 ainsi qu’au sens des articles 2, point 14, et 15 bis de la directive 96/61, ces dernières dispositions ayant été reprises aux articles 2, point 15, et 16 de la directive 2008/1, doivent pouvoir exercer un recours contre la décision par laquelle une instance, appartenant à l’organisation judiciaire d’un État membre, a statué sur une demande d’autorisation de projet, quel que soit le rôle qu’ils ont pu jouer dans l’instruction de ladite demande en prenant part à la procédure devant ladite instance et en faisant valoir leur position à cette occasion.

 Sur les deuxième et quatrième questions

24      Par ses deuxième et quatrième questions, la juridiction de renvoi demande, en substance, si, dans le cadre de la mise en œuvre des articles 6, paragraphe 4, et 10 bis de la directive 85/337 ainsi que des articles 2, point 14, et 15 bis de la directive 96/61, les États membres peuvent prévoir que de petites associations locales de protection de l’environnement ont la faculté de participer au processus décisionnel visé à l’article 2, paragraphe 2, de la directive 85/337 sans toutefois bénéficier du droit d’exercer un recours contre la décision prise au terme de ce processus.

25      La deuxième question, qui porte sur l’interprétation desdites dispositions de la directive 85/337, est identique à une question sur laquelle la Cour a entre-temps statué dans l’arrêt Djurgården-Lilla Värtans Miljöskyddsförening, précité.

26      À cet égard, il ressort de cet arrêt que, si la directive 85/337 prévoit que les membres du public concerné qui ont un intérêt suffisant à contester une opération ou aux droits desquels une opération peut préjudicier doivent pouvoir former un recours contre la décision qui l’autorise, cette directive ne permet nullement de limiter les possibilités de recours au motif que les personnes concernées ont déjà pu faire valoir leur point de vue lors de la phase de participation au processus décisionnel instituée par son article 6, paragraphe 4 (arrêt Djurgården-Lilla Värtans Miljöskyddsförening, précité, point 48).

27      Par ailleurs, la directive 85/337 concerne non pas exclusivement des opérations d’envergure régionale ou nationale, mais aussi des opérations de taille plus restreinte dont des associations locales sont mieux à même de se préoccuper (arrêt Djurgården-Lilla Värtans Miljöskyddsförening, précité, point 50).

28      Par suite, l’article 10 bis de la directive 85/337 s’oppose à une disposition d’une législation nationale qui réserve le droit d’exercer un recours contre une décision relative à une opération qui entre dans le champ d’application de cette directive aux seules associations de protection de l’environnement qui comptent au moins 2 000 adhérents (arrêt Djurgården-Lilla Värtans Miljöskyddsförening, précité, point 52 des motifs et point 3 du dispositif).

29      L’article 15 bis de la directive 96/61, repris à l’article 16 de la directive 2008/1, s’oppose également à une telle disposition. En effet, ledit article 15 bis a, en substance, la même teneur que l’article 10 bis de la directive 85/337 et aucun motif qui pourrait être tiré de l’objet ou de la portée de la directive 96/61 n’est de nature à faire obstacle à ce que la Cour transpose, pour l’interprétation de la disposition concernée de cette dernière, l’interprétation qu’elle a dégagée pour la disposition similaire de la directive 85/337.

30      La réponse à la quatrième question posée, qui porte sur l’interprétation des articles 2, point 14, et 15 bis de la directive 96/61, peut par suite être clairement déduite de la jurisprudence issue de l’arrêt Djurgården-Lilla Värtans Miljöskyddsförening, précité.

31      Par conséquent, il convient de répondre aux deuxième et quatrième questions posées que les articles 10 bis de la directive 85/337 et 15 bis de la directive 96/61, cette dernière disposition ayant été reprise à l’article 16 de la directive 2008/1, s’opposent à une disposition d’une législation nationale qui réserve le droit d’exercer un recours contre une décision relative à une opération qui entre dans le champ d’application, respectivement, des directives 85/337 et 96/61 aux seules associations de protection de l’environnement qui comptent au moins 2 000 adhérents.

 Sur les dépens

32      La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

Par ces motifs, la Cour (quatrième chambre) ordonne:

1)      Les membres du public concerné, au sens des articles 1er, paragraphe 2, et 10 bis de la directive 85/337/CEE du Conseil, du 27 juin 1985, concernant l’évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l’environnement, telle que modifiée par la directive 2003/35/CE du Parlement européen et du Conseil, du 26 mai 2003, ainsi qu’au sens des articles 2, point 14, et 15 bis de la directive 96/61/CE du Conseil, du 24 septembre 1996, relative à la prévention et à la réduction intégrées de la pollution, telle que modifiée par la directive 2003/35, ces dernières dispositions ayant été reprises aux articles 2, point 15, et 16 de la directive 2008/1/CE du Parlement européen et du Conseil, du 15 janvier 2008, relative à la prévention et à la réduction intégrées de la pollution, doivent pouvoir exercer un recours contre la décision par laquelle une instance, appartenant à l’organisation judiciaire d’un État membre, a statué sur une demande d’autorisation de projet, quel que soit le rôle qu’ils ont pu jouer dans l’instruction de ladite demande en prenant part à la procédure devant ladite instance et en faisant valoir leur position à cette occasion.

2)      Les articles 10 bis de la directive 85/337, telle que modifiée par la directive 2003/35, et 15 bis de la directive 96/61, telle que modifiée par la directive 2003/35, cette dernière disposition ayant été reprise à l’article 16 de la directive 2008/1, s’opposent à une disposition d’une législation nationale qui réserve le droit d’exercer un recours contre une décision relative à une opération qui entre dans le champ d’application, respectivement, des directives 85/337, telle que modifiée par la directive 2003/35, et 96/61, telle que modifiée par la directive 2003/35, aux seules associations de protection de l’environnement qui comptent au moins 2 000 adhérents.

Signatures


* Langue de procédure: le suédois.