Mots clés
Sommaire

Mots clés

1. Questions préjudicielles — Compétence de la Cour — Limites — Examen de la compatibilité d'une aide avec le marché commun — Exclusion

(Art. 88 CE et 234 CE)

2. Aides accordées par les États — Notion — Subventions versées à une entreprise chargée de l'exécution d'obligations de service public, en vertu d'une réglementation nationale prévoyant le versement d'acomptes avant l'approbation d'une convention

(Art. 87 CE)

Sommaire

1. La Cour n’est pas compétente pour statuer sur la compatibilité d’une mesure nationale avec le droit de l’Union. Elle ne saurait davantage se prononcer sur la compatibilité d’une aide d’État ou d’un régime d’aides avec le marché commun, l’appréciation de cette compatibilité relevant de la compétence exclusive de la Commission européenne, agissant sous le contrôle du juge de l’Union. La Cour n’est pas non plus compétente pour apprécier les faits au principal ou pour appliquer à des mesures ou à des situations nationales les règles de l’Union dont elle a donné l’interprétation, ces questions relevant de la compétence exclusive de la juridiction nationale.

Cependant, la Cour est compétente pour fournir à la juridiction de renvoi tous les éléments d’interprétation relevant du droit de l’Union qui peuvent permettre à celle-ci d’apprécier la conformité d’une mesure nationale avec ce droit en vue du jugement de l’affaire dont elle est saisie. En matière d’aides d’État, elle peut notamment fournir au juge de renvoi les éléments d’interprétation lui permettant de déterminer si une mesure nationale peut être qualifiée d’aide d’État au sens du droit de l’Union.

(cf. points 22, 24)

2. Le droit de l’Union doit être interprété en ce sens que des subventions versées à une entreprise chargée de l'exécution d'obligations de service public, en vertu d’une législation nationale prévoyant le versement d’acomptes avant l’approbation d’une convention, sans l'établissement préalable de critères précis et restrictifs, constituent des aides d’État si ces subventions sont susceptibles d’affecter les échanges entre États membres et faussent ou menacent de fausser la concurrence, ce qu'il incombe au juge national de vérifier.

Certes, lorsqu'une intervention étatique doit être considérée comme une compensation représentant la contrepartie des prestations effectuées par les entreprises bénéficiaires pour exécuter des obligations de service public, de sorte que ces entreprises ne profitent pas, en réalité, d’un avantage financier et que ladite intervention n’a donc pas pour effet de mettre ces entreprises dans une position concurrentielle plus favorable par rapport aux entreprises concurrentes, une telle intervention ne constitue pas une aide d’État au sens du droit de l’Union. Cependant, pour que, dans un cas concret, une telle compensation puisse échapper à la qualification d’aide d’État, un certain nombre de conditions doivent être réunies.

Premièrement, l’entreprise bénéficiaire d’une telle compensation doit effectivement être chargée de l’exécution d’obligations de service public et ces obligations doivent être clairement définies. Deuxièmement, les paramètres sur la base desquels est calculée la compensation doivent être préalablement établis de manière objective et transparente, afin d’éviter qu’elle ne comporte un avantage économique susceptible de favoriser l’entreprise bénéficiaire par rapport à des entreprises concurrentes. Troisièmement, la compensation ne saurait dépasser ce qui est nécessaire pour couvrir tout ou partie des coûts occasionnés par l’exécution des obligations de service public, en tenant compte des recettes y relatives ainsi que d’un bénéfice raisonnable pour l’exécution de ces obligations. Quatrièmement, ladite compensation doit être déterminée sur la base d’une analyse des coûts qu’une entreprise moyenne, bien gérée et adéquatement dotée de moyens nécessaires afin de pouvoir satisfaire aux exigences de service public requises, aurait encourus pour exécuter ces obligations, en tenant compte des recettes y relatives ainsi que d’un bénéfice raisonnable pour l’exécution de ces obligations.

Des subventions ne remplissant pas intégralement ces conditions ne peuvent pas échapper à la qualification d’aide d’État au sens du droit de l’Union. Le fait qu’elles ont été versées à titre d’acomptes, dans l’attente de l’approbation de conventions qui n’ont du reste été conclues et n’ont pris effet que de nombreuses années plus tard, est indifférent à cet égard. En effet, un tel fait ne fait pas disparaître l’avantage consenti à l’entreprise bénéficiaire ni les effets qu’un tel avantage peut produire sur la concurrence dès lors que l’ensemble des conditions susmentionnées n’est pas rempli.

Il incombe au juge national de vérifier si ces subventions sont susceptibles d’affecter les échanges entre États membres et faussent ou menacent de fausser la concurrence.

(cf. points 35-40, 44-45, 52 et disp.)