Affaire C-453/08

Panagiotis I. Karanikolas e.a.

contre

Ypourgos Agrotikis Anaptyxis kai Trofimon
et
Nomarchiaki Aftodioikisi Dramas, Kavalas, Xanthis

(demande de décision préjudicielle, introduite par le Symvoulio tis Epikrateias)

«Politique commune de la pêche — Pêche en Méditerranée — Règlement (CE) nº 1626/94 — Article 1er, paragraphes 2 et 3 — Interdiction de l’utilisation de certains types de filets de pêche — Mesures additionnelles ou allant au-delà des exigences minimales de ce règlement adoptées antérieurement à l’entrée en vigueur dudit règlement — Conditions de validité»

Sommaire de l'arrêt

Pêche — Conservation des ressources de la mer — Mesures techniques de conservation — Pêche en Méditerranée — Règlement nº 1626/94

(Règlement du Conseil nº 1626/94, art. 1er, § 2 et 3)

L’article 1er, paragraphes 2 et 3, du règlement nº 1626/94, prévoyant certaines mesures techniques de conservation des ressources de pêche en Méditerranée, tel que modifié par le règlement nº 2550/2000, doit être interprété en ce sens que, d’une part, l’entrée en vigueur de ce règlement est sans effet sur la validité d’une mesure nationale additionnelle d'interdiction adoptée avant cette entrée en vigueur et, d’autre part, il ne s’oppose pas à une telle mesure à condition que cette interdiction soit conforme à la politique commune de la pêche, que ladite mesure n’aille pas au-delà de ce qui est nécessaire à la réalisation de l’objectif poursuivi et qu’elle ne porte pas atteinte au principe de l’égalité de traitement.

(cf. point 58 et disp.)







ARRÊT DE LA COUR (deuxième chambre)

2 septembre 2010 (*)

«Politique commune de la pêche – Pêche en Méditerranée – Règlement (CE) n° 1626/94 – Article 1er, paragraphes 2 et 3 – Interdiction de l’utilisation de certains types de filets de pêche – Mesures additionnelles ou allant au-delà des exigences minimales de ce règlement adoptées antérieurement à l’entrée en vigueur dudit règlement – Conditions de validité»

Dans l’affaire C‑453/08,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 234 CE, introduite par le Symvoulio tis Epikrateias (Grèce), par décision du 3 septembre 2008, parvenue à la Cour le 17 octobre 2008, dans la procédure

Panagiotis I. Karanikolas e.a.

contre

Ypourgos Agrotikis Anaptyxis kai Trofimon,

Nomarchiaki Aftodioikisi Dramas, Kavalas, Xanthis,

en présence de:

Alieftikos Agrotikos Synetairismos gri-gri nomou Kavalas (Makedonia),

Panellinia Enosi Ploioktiton Mesis Alieias (PEPMA),

LA COUR (deuxième chambre),

composée de M. J. N. Cunha Rodrigues, président de chambre, Mme P. Lindh (rapporteur), MM. A. Rosas, A. Ó Caoimh et A. Arabadjiev, juges,

avocat général: M. J. Mazák,

greffier: Mme L. Hewlett, administrateur principal,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 19 novembre 2009,

considérant les observations présentées:

–        pour M. Karanikolas e.a., par Me A. Charokopou, dikigoros,

–        pour Alieftikos Agrotikos Synetairismos gri-gri nomou Kavalas (Makedonia), par Me M. Filippidou, dikigoros,

–        pour le gouvernement hellénique, par M. I. Chalkias et Mme A. Vasilopoulou, en qualité d’agents,

–        pour le gouvernement italien, par Mme I. Bruni, en qualité d’agent, assistée de M. F. Arena, avvocato dello Stato,

–        pour la Commission des Communautés européennes, par Mmes E. Tserepa-Lacombe et A. Szmytkowska, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 29 avril 2010,

rend le présent

Arrêt

1        La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 1er, paragraphes 2 et 3, du règlement (CE) n° 1626/94 du Conseil, du 27 juin 1994, prévoyant certaines mesures techniques de conservation des ressources de pêche en Méditerranée (JO L 171, p. 1), tel que modifié par le règlement (CE) n° 2550/2000 du Conseil, du 17 novembre 2000 (JO L 292, p. 7, ci-après le «règlement n° 1626/94»).

2        Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant M. Karanikolas et 18 autres pêcheurs ainsi que la coopérative des pêcheurs côtiers de Kavala à l’Ypourgos Agrotikis Anaptyxis kai Trofimon (ministère du Développement agricole et des Denrées alimentaires) et au Nomarchiaki Aftodioikisi Dramas, Kavalas, Xanthis (administration préfectorale de Drama-Kavala-Xanthi) à propos du refus de délivrance d’autorisations de pêche fondé sur une réglementation nationale interdisant la délivrance d’autorisations de pêche au moyen de petits filets tournants.

 Le cadre juridique

 La réglementation de l’Union

 Le règlement (CE) n° 2371/2002

3        L’article 1er du règlement (CE) n° 2371/2002 du Conseil, du 20 décembre 2002, relatif à la conservation et à l’exploitation durable des ressources halieutiques dans le cadre de la politique commune de la pêche (JO L 358, p. 59), intitulé «Champ d’application», est libellé ainsi:

«1.      La politique commune de la pêche couvre la conservation, la gestion et l’exploitation des ressources aquatiques vivantes, l’aquaculture, ainsi que la transformation et la commercialisation des produits de la pêche et de l’aquaculture, pour autant qu’elles soient pratiquées sur le territoire des États membres ou dans les eaux communautaires ou par des navires de pêche communautaires ou, sans préjudice de la responsabilité principale de l’État de pavillon, par des ressortissants des États membres.

2.      La politique commune de la pêche prévoit des mesures cohérentes concernant:

a)      la conservation, la gestion et l’exploitation des ressources aquatiques vivantes;

b)      la limitation des répercussions de la pêche sur l’environnement;

c)      les conditions d’accès aux eaux et aux ressources;

d)      la politique structurelle et la gestion de la capacité de la flotte;

e)      le contrôle et l’exécution;

f)      l’aquaculture;

g)      l’organisation commune des marchés, et

h)      les relations internationales.»

4        L’article 2 de ce règlement, intitulé «Objectifs», précise:

«1.      La politique commune de la pêche garantit une exploitation des ressources aquatiques vivantes qui crée les conditions de durabilité nécessaires tant sur le plan économique, environnemental qu’en matière sociale.

À cet effet, la Communauté applique l’approche de précaution en adoptant des mesures destinées à protéger et à conserver les ressources aquatiques vivantes, à permettre leur exploitation durable et à minimiser les répercussions des activités de pêche sur les écosystèmes marins. Elle a pour objectif la mise en œuvre progressive d’une approche de la gestion de la pêche fondée sur les écosystèmes. Elle s’efforce de contribuer à l’efficacité des activités de pêche dans un secteur de la pêche et de l’aquaculture économiquement viable et compétitif, en garantissant un niveau de vie équitable à ceux qui sont tributaires des activités de pêche et en tenant compte des intérêts des consommateurs.

2.      La politique commune de la pêche est sous-tendue par les principes suivants de bonne gouvernance:

a)      définition claire des responsabilités aux niveaux communautaire, national et local;

b)      processus décisionnel reposant sur des avis scientifiques sérieux et qui donne des résultats en temps opportun;

c)      large participation des intéressés à toutes les étapes de la politique, de la conception à la mise en œuvre;

d)      compatibilité avec les autres politiques communautaires, notamment les politiques environnementale, sociale, régionale et les politiques en matière de développement, de santé et de protection des consommateurs.»

5        L’article 4, paragraphe 1, dudit règlement est rédigé ainsi:

«Aux fins des objectifs visés à l’article 2, paragraphe 1, le Conseil arrête les mesures communautaires régissant l’accès aux zones et aux ressources et l’exercice durable des activités de pêche.»

 Le règlement n° 1626/94

6        Les deuxième, quatrième et huitième considérants du règlement n° 1626/94 énoncent:

«considérant, néanmoins, que le moment est venu de porter remède aux problèmes que connaissent actuellement les ressources en Méditerranée, en y introduisant un système de gestion harmonisée adapté à la réalité méditerranéenne, en tenant compte des réglementations nationales déjà en vigueur dans la région, tout en y apportant de façon équilibrée et, le cas échéant, progressivement, les adaptations rendues nécessaires par la protection des stocks;

[...]

considérant qu’il convient d’interdire les engins dont l’utilisation en Méditerranée contribue de manière excessive à la dégradation de l’environnement marin ou à celle de l’état des stocks; considérant qu’il convient de réserver une partie de la bande côtière aux engins les plus sélectifs utilisés par les petits pêcheurs; […]

[…]

considérant qu’il devrait rester possible d’appliquer des mesures nationales complétant ou dépassant les exigences minimales du régime mis en place par le présent règlement ou des mesures réglementant les relations entre les différents opérateurs du secteur de la pêche; que de telles mesures peuvent être maintenues ou instaurées, sous réserve de l’examen par la Commission de leur compatibilité avec le droit communautaire et de leur conformité avec la politique commune de la pêche».

7        L’article 1er de ce règlement est libellé ainsi:

«1.      Le présent règlement s’applique à toute activité de pêche ou toute activité connexe exercée sur le territoire et dans les eaux maritimes de la Méditerranée à l’est du méridien 5º 36′ de longitude ouest relevant de la souveraineté ou de la juridiction des États membres, à l’exception des lagunes et étangs. Il est également applicable à de telles activités exercées en Méditerranée en dehors de ces eaux par les navires communautaires.

2.      Les États membres dotés d’une façade méditerranéenne peuvent légiférer dans les domaines couverts par le paragraphe 1, y compris en matière de pêche non professionnelle, en adoptant des mesures additionnelles ou allant au-delà des exigences minimales du régime mis en place par le présent règlement, qui sont compatibles avec le droit communautaire et conformes à la politique commune de la pêche.

En adoptant ces mesures, les États membres veillent à la préservation des espèces et des environnements fragiles ou menacés [...]

3.      La Commission est informée [...] de tout projet visant à introduire ou modifier des mesures nationales de conservation et de gestion des ressources.»

8        L’article 2, paragraphe 3, dudit règlement précise:

«L’utilisation de filets encerclants et traînants, mis à l’eau à l’aide d’une embarcation et manœuvrés du rivage (sennes de plage), est interdite à partir du 1er janvier 2002, sauf si le Conseil statuant à la majorité qualifiée sur proposition de la Commission, à la lumière des données scientifiques démontrant que leur utilisation ne comporte pas d’incidence négative pour les ressources, en décide autrement.»

9        L’article 3, paragraphes 1, 1 bis et 4, du même règlement énonce:

«1.      Il est interdit d’utiliser les chaluts, les sennes ou les filets similaires en deçà de la limite des 3 milles nautiques des côtes, ou de l’isobathe de 50 m lorsque cette profondeur est atteinte à une moindre distance, quel que soit le mode de remorquage ou de halage, sauf dérogation prévue par la législation nationale dans le cas où la bande côtière des 3 milles nautiques n’est pas comprise à l’intérieur des eaux territoriales des États membres.

Toutefois, tout engin de pêche employé à une distance de la côte inférieure à celle fixée par le premier alinéa conformément à la législation nationale en vigueur au 1er janvier 1994 peut être utilisé jusqu’au 31 décembre 2002, sauf si le Conseil statuant à la majorité qualifiée sur proposition de la Commission, à la lumière des données scientifiques démontrant que son utilisation ne comporte pas une incidence négative pour les ressources, en décide autrement.

1 bis. Il est interdit d’utiliser des engins de pêche aux conditions prévues au paragraphe 1, second alinéa, à l’exception du gangui, sauf si l’État membre concerné a pris des mesures garantissant que, pour ces activités de pêche:

–        l’interdiction prévue au paragraphe 3 n’est pas compromise,

–        la pêche n’interfère pas avec des activités de vaisseaux utilisant des engins autres que des chaluts, sennes ou autres filets remorqués,

–        la pêche est limitée à des espèces cibles non soumises à une taille minimale au débarquement, conformément à l’article 8,

–        la pêche est limitée de façon à ce que les captures d’espèces visées à l’annexe IV soient minimales,

–        les navires disposent de permis de pêche spéciaux délivrés conformément au règlement (CE) n° 1627/94 du Conseil du 27 juin 1994 établissant les dispositions générales relatives aux permis de pêche spéciaux [JO L 171, p. 7].

Ces mesures doivent être communiquées à la Commission avant le 31 décembre 2000.

[...]

4.      Il est interdit de caler tout type de filet tournant en deçà de la limite de 300 m des côtes ou de l’isobathe de 30 m lorsque cette profondeur est atteinte à une moindre distance.»

10      L’article 5, paragraphe 1, du règlement n° 1626/94 précise:

«Les États membres fixent les restrictions portant sur les caractéristiques techniques des principaux types d’engins de pêche conformément aux exigences minimales énoncées à l’annexe II.»

11      Aux termes de l’annexe II de ce règlement, la longueur de la nappe des filets tournants est limitée à 800 m et la hauteur de chute à 120 m.

12      L’article 6, paragraphe 1, dudit règlement énonce:

«Il est interdit d’utiliser et de conserver à bord des chaluts ou filets remorqués similaires, des filets droits ou des filets encerclants, à moins que leur maillage dans la partie du filet présentant le plus petit maillage ne soit égal ou supérieur à l’un des maillages minimaux énumérés à l’annexe III.

[...]»

13      L’annexe III du même règlement fixe le maillage minimal des filets tournants à 14 mm.

14      Le règlement n° 1626/94 a été abrogé par le règlement (CE) n° 1967/2006 du Conseil, du 21 décembre 2006 (JO L 409, p. 9).

 La réglementation nationale

15      Selon la juridiction de renvoi, la réglementation nationale en cause au principal a connu plusieurs étapes successives.

16      Le décret royal du 15 août 1958 portant réglementation de la pêche au moyen de petits filets tournants (FEK A’ 132) autorisait la pêche de toutes les espèces au moyen de petits filets tournants en imposant des dimensions maximales en longueur et en hauteur pour ces filets ainsi que des dimensions minimales pour leur maillage. Ce décret précisait également les périodes de l’année ainsi que les horaires pendant lesquels lesdits filets pouvaient être utilisés.

17      Le décret présidentiel 587/1984 (FEK A’ 210) a prévu que toutes les autorisations de pêche délivrées à des bateaux utilisant des petits filets tournants cessaient d’être valables après le 31 décembre 1986.

18      Le décret présidentiel 542/1985 (FEK A’ 191) a abrogé le décret présidentiel 587/1984 et a confirmé la fin de la validité des autorisations de pêcher avec des petits filets tournants après le 31 décembre 1986. Le décret présidentiel 542/1985 a, en outre, interdit pour l’avenir la délivrance d’autorisations de pêche aux bateaux utilisant des petits filets tournants.

19      Cette mesure d’interdiction a fait l’objet d’une exception temporaire. En effet, le décret présidentiel 526/1988 (FEK A’ 237) a exclu des dispositions du décret présidentiel 542/1985 les autorisations de pêche au moyen de filets à orphies (Belone belone). Ces autorisations n’étaient délivrées que pour la pêche des orphies et des balaous (Scomberesox saurus saurus) et restaient soumises au respect de conditions tenant aux caractéristiques du filet et aux périodes de pêche. Par la suite, le décret présidentiel 320/1997 (FEK A’ 224) a abrogé le décret présidentiel 526/1988 à compter du 31 décembre 1998 et a décidé qu’il était désormais interdit de délivrer des autorisations pour la pêche au moyen de filets à orphies et que toutes les autorisations délivrées à ce titre cessaient d’être valables après cette date.

20      Selon la juridiction de renvoi, il résulte de cette réglementation que l’octroi d’autorisations d’utiliser des petits filets tournants est interdite depuis le 1er janvier 1987 pour toutes les espèces de poissons et que la délivrance d’autorisations n’a été possible, pour les seuls orphies et balaous, qu’entre le 26 octobre 1988 et le 31 décembre 1998.

 Le litige au principal et les questions préjudicielles

21      L’engin de pêche dont il est question dans la réglementation nationale est un petit filet tournant. Ce type de filet est utilisé pour pêcher de petites espèces pélagiques telles que les maquereaux ou les sardines. La technique consiste à encercler le banc de poissons avec le filet et d’en refermer la partie inférieure à l’aide d’une coulisse pour le transformer en sac afin de retenir la totalité des poissons encerclés. En Grèce, il semble que plusieurs types de petits filets tournants sont utilisés par les pêcheurs, à savoir ceux pour les sardines et les aloses ainsi que ceux pour les orphies et les balaous. Les seconds sont moins longs, moins hauts et ont des mailles plus petites. Par ailleurs, il existe de grandes sennes utilisées pour pêcher la sardine, appelées «gri-gri», qui ne sont pas visées par la mesure d’interdiction.

22      Le 20 mai 2003, M. Karanikolas et 18 autres pêcheurs professionnels et propriétaires de bateaux de pêche demeurant à Kavala, ainsi que la coopérative des pêcheurs côtiers de Kavala, dont ils sont membres, ont demandé que leur soit accordée une autorisation de pêcher la sardine au moyen de petits filets tournants, sous réserve des restrictions et des caractéristiques contenues dans le règlement n° 1626/94.

23      Cette demande a été adressée au Nomarchiaki Aftodioikisi Dramas, Kavalas, Xanthis qui s’est informé sur la possibilité d’accorder de telles autorisations auprès de l’Ypourgos Agrotikis Anaptyxis kai Trofimon. Par l’acte n° 172603 du 8 août 2003, la direction de la pêche maritime de ce ministère a répondu qu’il était impossible de faire droit à ladite demande en raison de la mesure d’interdiction en cause au principal, laquelle constituait une mesure de pêche additionnelle au sens du règlement n° 1626/1994.

24      Cet acte a été notifié aux requérants au principal par l’acte n° 19/760 du 29 août 2003 de ladite administration préfectorale.

25      Les requérants au principal ont saisi la juridiction de renvoi aux fins d’annulation des actes nos 172603 et 19/760.

26      L’Alieftikos Agrotikos Synetairismos gri-gri nomou Kavalas (Makedonia) (coopérative agricole de pêche des propriétaires de bateaux dénommés «gri-gri» du département de Kavala) ainsi que la Panellinia Enosi Ploioktiton Mesis Alieias (PEPMA) (Union panhellénique des armateurs de pêche côtière) sont intervenues à l’instance.

27      Le Symvoulio tis Epikrateias considère que les États membres peuvent imposer des mesures additionnelles plus strictes que celles prévues par le règlement n° 1626/94 dans les zones maritimes relevant de leur souveraineté, afin de protéger les espèces sensibles ou menacées de la faune marine. Ces mesures ne sont pas limitées à la détermination de spécifications techniques plus strictes concernant les engins de pêche ou les périodes de pêche, mais peuvent comprendre aussi l’interdiction absolue d’utiliser certains engins de pêche. Cette juridiction estime, par ailleurs, que les interdictions d’utiliser certains engins de pêche imposées par des dispositions nationales adoptées avant l’entrée en vigueur du règlement n° 1626/94 ne sont pas remises en question par les dispositions ultérieures de ce règlement et que ces interdictions restent valables même si l’utilisation de ces engins n’est pas interdite par ledit règlement.

28      Le Symvoulio tis Epikrateias, doutant cependant de l’interprétation à donner au règlement n° 1626/94, a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

«1)      Un État membre peut-il, au sens de l’article 1er, paragraphe 2, du règlement n° 1626/94 [...], adopter des mesures additionnelles consistant dans l’interdiction absolue d’utiliser des engins de pêche dont l’usage est, en principe, autorisé conformément aux dispositions [de ce] règlement [...]?

2)      Est-il permis d’utiliser, au sens des dispositions du règlement n° 1626/94, dans la zone maritime d’un État membre doté d’une façade méditerranéenne, des engins de pêche non compris parmi ceux qui sont désignés comme étant, en principe, interdits à l’article 2, paragraphe 3, et à l’article 3, paragraphes 1 et 1 bis, de ce règlement et dont l’usage a été interdit avant l’entrée en vigueur dudit règlement par une disposition nationale?»

 Sur les questions préjudicielles

29      Par ses questions, qu’il convient de traiter ensemble, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 1er, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 1626/94 doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une mesure nationale qui, telle celle en cause au principal, interdit l’utilisation des petits filets tournants alors que, d’une part, cette mesure a été adoptée avant l’entrée en vigueur de ce règlement et, d’autre part, ledit règlement n’interdit pas l’usage de ce type de filets.

30      Afin de répondre à ces questions, il y a lieu de rechercher, dans un premier temps, si les dispositions du règlement n° 1626/94 permettent le maintien de «mesures additionnelles ou allant au-delà des exigences minimales du régime», mises en place par ce règlement, au sens de l’article 1er, paragraphe 2, dudit règlement. Dans un second temps, et dans l’affirmative, il conviendra de vérifier si la mesure nationale en cause au principal remplit les conditions figurant audit article 1er, paragraphe 2.

31      En ce qui concerne, en premier lieu, la possibilité de maintenir des mesures additionnelles après l’entrée en vigueur du règlement n° 1626/94, l’article 1er, paragraphe 3, de ce règlement précise que la Commission est informée de tout projet visant à introduire ou à modifier des mesures nationales de conservation et de gestion des ressources. Il résulte d’une interprétation littérale de cette disposition que l’obligation d’information de la Commission ne concerne que les mesures nationales adoptées ou modifiées après la date d’entrée en vigueur dudit règlement et non celles préexistantes à cette date.

32      Cette interprétation est corroborée, ainsi que M. l’avocat général l’a relevé au point 31 de ses conclusions, par le fait que le deuxième considérant du règlement n° 1626/94 précise qu’il convient d’introduire «un système de gestion harmonisée adaptée à la réalité méditerranéenne, en tenant compte des réglementations nationales déjà en vigueur dans la région».

33      Certes, il ressort du huitième considérant de ce règlement que des mesures nationales, complétant ou dépassant les exigences minimales du régime mis en place, peuvent être maintenues, sous réserve de l’examen par la Commission de leur compatibilité avec le droit de l’Union et de leur conformité avec la politique commune de la pêche.

34      Il résulte cependant des observations de la Commission que, d’une part, lorsqu’elle a préparé le règlement n° 1626/94, elle a pris en compte les mesures nationales existantes et, d’autre part, l’entrée en vigueur de ce règlement n’a pas affecté l’application de la mesure d’interdiction en cause au principal. Ainsi que M. l’avocat général l’a relevé au point 32 de ses conclusions, il résulte de l’exposé des motifs de la proposition de règlement (CEE) du Conseil, du 11 décembre 1992, portant harmonisation de certaines mesures techniques en vigueur en Méditerranée [COM(92) 533 final, JO 1993, C 5, p. 6], ayant abouti à l’adoption du règlement n° 1626/94, que, «à partir des quelque 400 textes législatifs communiqués par les quatre États membres à façade méditerranéenne, les services de la Commission se sont livrés à une étude comparative des dispositions appliquées en matière de pêche en Méditerranée, afin d’en extraire une essence réglementaire à mettre en œuvre au niveau communautaire».

35      L’article 1er, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 1626/94 doit, dès lors, être interprété en ce sens que l’entrée en vigueur de ce règlement est sans effet sur la validité d’une mesure nationale additionnelle adoptée avant cette entrée en vigueur. Toutefois, il est nécessaire que ces mesures soient conformes aux exigences énoncées audit article 1er, paragraphe 2.

36      En ce qui concerne, en second lieu, la qualification d’une mesure nationale en tant que «mesure additionnelle» au sens de l’article 1er, paragraphe 2, du règlement n° 1626/94, il ressort du libellé de cette disposition que les États membres dotés d’une façade méditerranéenne peuvent adopter des mesures additionnelles ou allant au-delà des exigences minimales du régime mis en place par ce règlement, qui sont compatibles avec le droit de l’Union et conformes à la politique commune de la pêche. En adoptant ces mesures, lesdits États membres veillent à la préservation des espèces et des environnements fragiles et menacés.

37      Afin de déterminer si la mesure d’interdiction d’utilisation des petits filets tournants en cause au principal est conforme aux exigences de l’article 1er, paragraphe 2, du règlement n° 1626/94, il convient d’abord de rechercher si ce type de filets figure ou non parmi ceux dont l’utilisation est interdite par ce règlement. Dans la négative, il y aura lieu, ensuite, de vérifier si cette mesure d’interdiction constitue une mesure allant au-delà des exigences mises en place par ledit règlement. Si tel est le cas, il sera nécessaire, conformément aux termes dudit article 1er, paragraphe 2, de rechercher si ladite mesure est compatible avec le droit de l’Union, si elle est conforme à la politique commune de la pêche et si, en l’adoptant, la République hellénique a veillé à la préservation des espèces et des environnements fragiles et menacés.

38      S’agissant de la question de savoir si les petits filets tournants figurent ou non parmi les engins de pêche dont l’utilisation est interdite par le règlement n° 1626/94, il résulte du libellé des articles 3, 5 et 6 dudit règlement, ces deux derniers articles lus en combinaison avec les annexes II et III du même règlement, que les filets tournants font l’objet non pas d’une interdiction absolue, mais de simples restrictions à leur utilisation. Il en résulte que les petits filets tournants ne figurent pas parmi les engins dont l’utilisation est interdite par le règlement n° 1626/94.

39      Quant à la question de savoir si l’interdiction d’utilisation des petits filets tournants constitue une mesure allant au-delà des exigences minimales du régime mis en place par le règlement n° 1626/94, il convient de relever qu’il ressort de l’article 3, paragraphe 4, de ce règlement que l’utilisation des filets tournants est interdite en deçà de la limite de 300 m des côtes ou de l’isobathe de 30 m lorsque cette profondeur est atteinte à une moindre distance. Par ailleurs, l’article 5, paragraphe 1, dudit règlement, lu en combinaison avec l’annexe II du même règlement, précise que, en ce qui concerne les filets tournants, la longueur maximale de la nappe est de 800 m et la hauteur maximale de chute est de 120 m. Enfin, l’article 6, paragraphe 1, du règlement n° 1626/94, lu en combinaison avec l’annexe III de ce règlement, interdit l’utilisation ou la conservation à bord de filets tournants dont le maillage est inférieur à 14 mm.

40      Il résulte de l’ensemble de ces considérations que, en application du règlement n° 1626/94, l’utilisation des filets tournants est autorisée à condition que cet engin soit utilisé au-delà de 300 m des côtes ou au-delà de l’isobathe de 30 m lorsque cette profondeur est atteinte à une moindre distance, que la longueur maximale de la nappe soit de 800 m, que la hauteur maximale de chute soit de 120 m et que le maillage soit supérieur à 14 mm. Dès lors, l’interdiction de délivrance d’autorisation d’utiliser des petits filets tournants, quels que soient leur lieu d’utilisation, la longueur de leur nappe, leur hauteur de chute ou la dimension de leur maillage, constitue une mesure allant au-delà des exigences mises en place par le règlement n° 1626/94, au sens de l’article 1er, paragraphe 2, de ce règlement.

41      S’agissant de la compatibilité de la mesure d’interdiction en cause au principal avec le droit de l’Union, et en particulier de sa conformité à la politique commune de la pêche, les requérants au principal font valoir plusieurs arguments. Tout d’abord, ils soutiennent que les sardines pêchées à l’aide des petits filets tournants n’ont représenté que 6 à 9 % de la quantité de sardines pêchées dans la région de Kavala et que seuls 30 navires utilisaient de tels filets dans cette région. Ensuite, cette interdiction d’utilisation des petits filets tournants ne serait applicable qu’aux petits bateaux et non aux grands, c’est-à-dire à ceux mesurant plus de 14 m. Or, les petits bateaux ne pouvant utiliser que des petits filets tournants, ladite mesure d’interdiction les priverait de toute possibilité de pêche. Le quatrième considérant du règlement n° 1626/94 prévoit qu’il convient de réserver une partie de la bande côtière aux engins les plus sélectifs utilisés par les petits pêcheurs, ce qui serait le cas du petit filet tournant. De simples mesures de restriction d’utilisation auraient été préférables. Enfin, cette même mesure ne serait pas limitée dans le temps, serait discriminatoire vis-à-vis des pêcheurs utilisant des petits filets tournants et aurait des incidences négatives sur leur activité.

42      Le gouvernement hellénique soutient que les petits filets tournants sont utilisés dans une zone côtière qui est une région de reproduction et de développement de certains organismes aquatiques ainsi que le lieu d’hivernage de certains poissons, dont les sardines. Or, les petits filets tournants auraient pour effet de détruire cet espace marin et les lieux de reproduction, ce qui affecterait les ressources halieutiques. Certaines espèces vivant dans ces zones seraient menacées d’extinction même si les sardines ne le sont pas. Ce gouvernement précise que l’interdiction de la pêche à l’aide de petits filets tournants n’empêche pas le développement de l’activité de pêche, car celle-ci reste possible avec d’autres engins pour lesquels des autorisations sont délivrées. La mesure d’interdiction en cause au principal serait donc justifiée, appropriée et proportionnée.

43      La Commission soutient que, pour s’assurer que la mesure d’interdiction en cause au principal est compatible avec la politique commune de la pêche en Méditerranée, il est nécessaire de vérifier si cette mesure, de par son caractère absolu, est proportionnée et efficace quant à l’objectif de conservation et de gestion des ressources aquatiques vivantes. Pour cela, il conviendrait de prendre en compte les aspects économiques, sociaux et environnementaux de manière équilibrée. Il y aurait lieu de vérifier si une grave pénurie de poissons côtiers a été constatée lors de l’adoption de la mesure d’interdiction en cause au principal, si l’interdiction absolue était la seule possibilité ou si d’autres mesures telles que la prévention de la pêche frauduleuse ou la limitation des captures auraient été aussi efficaces. Enfin, il conviendrait de vérifier si les opérateurs économiques, à savoir les petits pêcheurs côtiers et les utilisateurs de «gri-gri», ont été traités de façon égale. Il appartiendrait au juge national de procéder à ces vérifications au vu des éléments dont il dispose.

44      Lors de l’audience, la Commission a fait valoir que l’interdiction absolue lui semblait disproportionnée au regard du faible nombre de bateaux qui utilisent les petits filets tournants et de la modicité du pourcentage de captures réalisées avec ceux-ci. Elle estime qu’il suffirait de limiter l’utilisation de ce type de filets à un petit nombre de bateaux et pendant une certaine période de l’année. Il semblerait acquis que le stock de sardines n’est pas en danger, mais la Commission ignore si les autres espèces de poissons sont menacées par la pêche au moyen des petits filets tournants. Enfin, la Commission fait observer que la mesure d’interdiction en cause au principal date de l’année 1985 et qu’il faudrait que la situation soit examinée à nouveau au vu d’avis scientifiques.

45      Il convient de rappeler que, aux termes de l’article 2, paragraphe 1, du règlement n° 2371/2002, la «politique commune de la pêche garantit une exploitation des ressources aquatiques vivantes qui crée des conditions de durabilité nécessaires tant sur le plan économique, environnemental qu’en matière sociale. À cet effet, la Communauté applique l’approche de précaution en adoptant des mesures destinées à protéger et à conserver les ressources aquatiques vivantes, à permettre leur exploitation durable et à minimiser les répercussions des activités de pêche sur les écosystèmes marins».

46      Selon la juridiction de renvoi, le décret présidentiel 587/1984 a été adopté sur la base de l’avis 75 du conseil de la pêche, du 12 avril 1984. Il ressortirait de cet avis que l’interdiction des petits filets tournants a été jugée nécessaire car ces engins de pêche étaient utilisés dans une zone d’un ou deux milles à partir de la côte, zone qui forme un espace où se développent et se multiplient des organismes aquatiques et dans laquelle d’autres engins de pêche sont utilisés, ce qui avait conduit à une diminution des stocks. De même, selon les observations présentées par le gouvernement hellénique lors de l’audience, c’est dans cette zone que se reproduisent et se développent certains organismes aquatiques et qu’hivernent certains poissons tels que la sardine. Or, les petits filets tournants étaient utilisés pour la pêche de cette espèce de poissons dans ladite zone et cette utilisation aurait eu pour effet de détruire cet espace marin. L’interdiction de ces engins aurait donc eu pour objectif de prévenir la destruction voire l’extinction des ressources de cette région côtière.

47      Il ressort de ces explications que la mesure d’interdiction en cause au principal a été adoptée non pas en vue de protéger le stock de sardines, mais dans le but de préserver un environnement fragile et un écosystème marin. Le fait que seul un faible pourcentage du nombre total des sardines capturées dans la région de Kavala l’ait été au moyen de petits filets tournants n’est donc pas significatif pour apprécier la validité de cette mesure d’interdiction.

48      Il apparaît, en conséquence, que la mesure d’interdiction en cause au principal répond à l’approche de précaution que l’Union et les États membres doivent appliquer lorsqu’ils adoptent des mesures destinées à protéger et à conserver les ressources aquatiques vivantes, à permettre leur exploitation durable ou à minimiser les répercussions des activités de pêche sur les écosystèmes marins.

49      Cependant, pour que ladite mesure d’interdiction soit compatible avec le droit de l’Union et conforme à la politique commune de la pêche, elle devait respecter les principes de proportionnalité et de non-discrimination, lesquels font partie des principes généraux du droit de l’Union et trouvent leur expression dans le domaine de l’agriculture, y compris la pêche, à l’article 34, paragraphe 2, deuxième alinéa, CE (voir arrêt du 23 mars 2006, Unitymark et North Sea Fishermen’s Organisation, C‑535/03, Rec. p. I‑2689, point 53).

50      S’agissant du principe de proportionnalité, il est nécessaire que la mesure d’interdiction soit apte à réaliser l’objectif visé et qu’elle n’aille pas au-delà de ce qui est nécessaire pour l’atteindre (voir arrêt Unitymark et North Sea Fishermen’s Organisation, précité, point 56).

51      Il revient au juge national de vérifier si la mesure d’interdiction en cause au principal ne va pas au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre l’objectif recherché. Cette mesure édictant une interdiction absolue, il conviendra de rechercher si des mesures telles que, notamment, des restrictions à l’utilisation des petits filets tournants pendant certaines saisons ou à certaines heures de la journée ainsi que la limitation du nombre d’autorisations délivrées n’auraient pas été suffisantes pour parvenir à la préservation de l’écosystème de la zone côtière.

52      S’agissant du principe de non-discrimination, il convient de rappeler que ce principe exige que des situations comparables ne soient pas traitées de manière différente et que des situations différentes ne soient pas traitées de manière égale à moins qu’un tel traitement soit objectivement justifié (voir arrêt du 17 octobre 1995, Fishermen’s Organisations e.a., C‑44/94, Rec. p. I‑3115, point 46).

53      Il convient de relever que la mesure d’interdiction en cause au principal vise les autorisations de pêcher avec un certain type de filet et ne fait pas de distinction entre les différentes catégories d’utilisateurs de cet engin de pêche. En cela, cette mesure ne paraît pas contenir de disposition directement discriminatoire.

54      Il a été soutenu lors de l’audience que les petits bateaux de pêche côtière n’utilisent que des petits filets tournants et aucun autre engin et que ladite mesure d’interdiction les prive, de fait, de toute possibilité de pêche.

55      Cependant, la circonstance qu’un groupe particulier est plus fortement affecté qu’un autre par une mesure réglementaire n’implique pas nécessairement que celle-ci soit disproportionnée ou discriminatoire, dès lors que cette mesure vise à régler de manière globale un problème d’intérêt général (voir arrêt Unitymark et North Sea Fishermen’s Organisation, précité, point 63).

56      À cet égard, ainsi que M. l’avocat général l’a relevé au point 47 de ses conclusions, le fait que le quatrième considérant du règlement n° 1626/94 prévoit qu’il faut réserver une partie de la bande côtière aux engins les plus sélectifs utilisés par les petits pêcheurs ne fait pas obstacle, conformément à ce même considérant, à ce que soient interdits les engins dont l’utilisation contribue de manière excessive à la dégradation de l’environnement marin.

57      Dans la mesure où l’interdiction en cause au principal serait de nature à priver d’activité de pêche une catégorie de pêcheurs, il appartiendra au juge national de vérifier s’il existe des différences objectives entre les «gri-gri» et les petits filets tournants, quant à leurs caractéristiques et à leur utilisation, et que ces différences ont justifié l’interdiction des seconds et non celle des premiers.

58      Il résulte de l’ensemble de ces considérations qu’il convient de répondre aux questions posées que l’article 1er, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 1626/94 doit être interprété en ce sens que, d’une part, l’entrée en vigueur de ce règlement est sans effet sur la validité d’une mesure nationale additionnelle d’interdiction adoptée avant cette entrée en vigueur et, d’autre part, il ne s’oppose pas à une telle mesure à condition que cette interdiction soit conforme à la politique commune de la pêche, que ladite mesure n’aille pas au-delà de ce qui est nécessaire à la réalisation de l’objectif poursuivi et qu’elle ne porte pas atteinte au principe de l’égalité de traitement, ce qu’il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier.

 Sur les dépens

59      La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

Par ces motifs, la Cour (deuxième chambre) dit pour droit:

L’article 1er, paragraphes 2 et 3, du règlement (CE) n° 1626/94 du Conseil, du 27 juin 1994, prévoyant certaines mesures techniques de conservation des ressources de pêche en Méditerranée, tel que modifié par le règlement (CE) n° 2550/2000 du Conseil, du 17 novembre 2000, doit être interprété en ce sens que, d’une part, l’entrée en vigueur de ce règlement est sans effet sur la validité d’une mesure nationale additionnelle d’interdiction adoptée avant cette entrée en vigueur et, d’autre part, il ne s’oppose pas à une telle mesure à condition que cette interdiction soit conforme à la politique commune de la pêche, que ladite mesure n’aille pas au-delà de ce qui est nécessaire à la réalisation de l’objectif poursuivi et qu’elle ne porte pas atteinte au principe de l’égalité de traitement, ce qu’il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier.

Signatures


* Langue de procédure: le grec.