Parties
Motifs de l'arrêt
Dispositif

Parties

Dans l’affaire T‑326/07 R,

Cheminova A/S, établie à Harboøre (Danemark),

Cheminova Agro Italia Srl, établie à Rome (Italie),

Cheminova Bulgaria EOOD, établie à Sofia (Bulgarie),

Agrodan, SA, établie à Madrid (Espagne),

Lodi SAS, établie à Grand-Fougeray (France),

représentées par M es  C. Mereu et K. Van Maldegem, avocats,

parties requérantes,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par MM. B. Doherty et L. Parpala, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande de sursis à l’exécution de la décision 2007/389/CE de la Commission, du 6 juin 2007, concernant la non-inscription du malathion à l’annexe I de la directive 91/414/CEE du Conseil et le retrait des autorisations de produits phytopharmaceutiques contenant cette substance (JO L 146, p. 19), jusqu’au prononcé de l’arrêt au principal,

LE PRÉSIDENT DU TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

rend la présente

Ordonnance

Motifs de l'arrêt

Cadre juridique

1. La directive 91/414/CEE du Conseil, du 15 juillet 1991, concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques (JO L 230, p. 1, ci-après la « directive »), établit notamment le régime communautaire applicable à l’autorisation et au retrait de l’autorisation de mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques.

2. Le neuvième considérant de la directive énonce que les dispositions régissant l’autorisation de mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques doivent assurer un niveau élevé de protection, qui doit notamment éviter l’autorisation de mise sur le marché de produits phytopharmaceutiques dont les risques pour la santé, les eaux souterraines et l’environnement n’ont pas fait l’objet de recherches appropriées. Ce considérant indique également que l’objectif d’améliorer la production végétale ne doit pas porter préjudice à la protection de la santé humaine et de l’environnement.

3. L’article 2 de la directive définit les produits phytopharmaceutiques comme étant, notamment, les substances actives destinées à détruire les végétaux indésirables. Cet article définit les substances actives comme étant des substances ou micro-organismes exerçant une action générale ou spécifique sur les organismes nuisibles ou sur les végétaux, parties de végétaux ou produits végétaux.

4. L’article 4, paragraphe 1, de la directive prévoit que les États membres veillent à ce qu’un produit phytopharmaceutique soit autorisé uniquement si ses substances actives sont énumérées à l’annexe I de la directive.

5. Les substances actives qui ne sont pas inscrites à l’annexe I de la directive peuvent bénéficier, dans certaines conditions, d’un régime dérogatoire transitoire. Selon l’article 8, paragraphe 2, de la directive, un État membre pouvait, pendant une période de douze ans à compter de la date de notification de la directive, autoriser la mise sur son marché national de produits phytopharmaceutiques contenant des substances actives non visées à l’annexe I, qui étaient déjà sur le marché deux ans après la date de notification de la directive, soit le 25 juillet 1993. La Commission devait entamer un programme de travail pour l’examen graduel de ces substances actives. Par la suite, il pouvait être décidé que ladite substance serait ou non incluse à l’annexe I de la directive. Les États membres devaient assurer que les autorisations pertinentes, selon le cas, seraient accordées, retirées ou modifiées.

6. Conformément à ces dispositions, la Commission a entamé un programme de travail pour l’examen graduel des substances actives, dans le cadre duquel les parties intéressées souhaitant obtenir l’inscription d’une telle substance à l’annexe I devaient fournir à la Commission et aux États membres toutes les données nécessaires dans un délai déterminé.

7. Le règlement (CEE) n° 3600/92 de la Commission, du 11 décembre 1992, établissant les modalités de mise en œuvre de la première phase du programme de travail visé à l’article 8, paragraphe 2, de la directive (JO L 366, p. 10) a organisé la procédure d’évaluation pour une première série de substances en vue de leur inscription éventuelle à l’annexe I de la directive.

8. Ensuite, par son règlement (CE) nº 451/2000, du 28 février 2000, établissant les modalités de mise en œuvre des deuxième et troisième phases du programme de travail visé à l’article 8, paragraphe 2, de la directive (JO L 55, p. 25), la Commission a prévu l’évaluation d’une deuxième et d’une troisième série de substances actives en vue de leur inscription éventuelle à l’annexe I de la directive.

9. Parmi les substances actives faisant partie de la deuxième série figure le malathion – objet de la présente procédure –, un produit antiparasitaire utilisé, principalement dans l’agriculture, pour lutter contre divers insectes sur une vaste gamme de plantes agricoles et horticoles, ainsi que pour lutter contre les moustiques, les mouches et les insectes de maison.

10. La procédure instituée par le règlement nº 451/2000 débutait par une notification d’intérêt, prévue à son article 4, paragraphe 1, qui devait être adressée pour le 31 août 2000 au plus tard à l’État membre rapporteur désigné à l’annexe I du règlement, à savoir la République de Finlande pour le malathion, par le producteur souhaitant obtenir l’inscription à l’annexe I de la directive.

11. En vertu de l’article 6, paragraphe 1, du règlement nº 451/2000, il appartenait à chaque auteur d’une notification de transmettre à l’État membre rapporteur un dossier sommaire et un dossier complet, tels que définis à l’article 6, paragraphes 2 et 3, de ce même règlement.

12. Le délai pour la soumission de ces dossiers, ainsi que d’informations pertinentes pouvant contribuer à l’évaluation des substances actives, a été fixé au 30 avril 2002, en vertu des dispositions combinées de l’article 5, paragraphe 4, sous c) et d), du règlement nº 451/2000 et de l’article 2 du règlement (CE) nº 703/2001 de la Commission, du 6 avril 2001, fixant les substances actives des produits phytopharmaceutiques qui doivent être évaluées au cours de la deuxième phase du programme de travail visé à l’article 8, paragraphe 2, de la directive et modifiant la liste des États membres désignés comme rapporteurs pour ces substances (JO L 98, p. 6).

13. Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, du règlement nº 451/2000, l’État membre rapporteur était tenu de présenter à la Commission, au plus tard six mois après réception de tous les dossiers relatifs à une substance active, un rapport sur le caractère complet des dossiers transmis. Pour les substances actives faisant l’objet d’un dossier considéré comme complet, l’État membre rapporteur procédait à l’évaluation du dossier.

14. Conformément à l’article 8, paragraphe 1, du règlement nº 451/2000, dans sa rédaction initiale, l’État membre rapporteur devait présenter à la Commission, le plus rapidement possible et au plus tard douze mois après que le dossier avait été considéré comme complet, son rapport d’évaluation du dossier, qui contenait la recommandation d’inscrire la substance active à l’annexe I de la directive ou de ne pas l’inscrire.

15. Les dispositions de l’article 8 du règlement nº 451/2000 ont été modifiées par l’article 20 du règlement (CE) nº 1490/2002 de la Commission, du 14 août 2002, établissant des modalités supplémentaires de mise en œuvre de la troisième phase du programme de travail visé à l’article 8, paragraphe 2, de la directive et modifiant le règlement nº  451/2000 (JO L 224, p. 23), en ce sens qu’une étape procédurale supplémentaire a été introduite.

16. Ainsi, l’État membre rapporteur – tout en recommandant à la Commission d’inscrire la substance active à l’annexe I de la directive ou de ne pas l’inscrire – devait adresser un projet de rapport d’évaluation du dossier à l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) dans les meilleurs délais et au plus tard douze mois après que le dossier avait été jugé complet (article 8, paragraphe 1, du règlement nº 451/2000). À ce stade de la procédure, si la soumission de nouvelles études n’était, en principe, pas acceptée, l’État membre rapporteur pouvait inviter les auteurs de la notification à soumettre des données complémentaires, nécessaires à la clarification du dossier (article 8, paragraphe 2, du règlement nº 451/2000).

17. L’EFSA devait alors transmettre le projet de rapport d’évaluation de l’État membre rapporteur aux autres États membres et pouvait organiser une consultation d’experts (examen collégial). À ce stade de la procédure, la soumission de nouvelles études n’était pas acceptée ; toutefois, l’État membre rapporteur pouvait, en accord avec l’EFSA, inviter les auteurs de la notification à soumettre, dans des délais spécifiés, des données complémentaires que l’État membre rapporteur ou l’EFSA jugeait nécessaires à la clarification du dossier (article 8, paragraphe 5, du règlement nº 451/2000).

18. L’EFSA devait évaluer le projet de rapport d’évaluation de l’État membre rapporteur et transmettre à la Commission un avis sur la conformité de la substance active aux exigences de sécurité de la directive dans un délai d’un an après la réception dudit projet de rapport. Le cas échéant, l’EFSA pouvait formuler un avis sur les options considérées comme satisfaisant aux exigences de sécurité (article 8, paragraphe 7, du règlement nº 451/2000).

19. Au plus tard six mois après la réception de l’avis de l’EFSA, la Commission était tenue de proposer, selon le cas, une décision refusant l’inscription de la substance active à l’annexe I de la directive et visant le retrait, par les États membres, des autorisations de mise sur le marché de produits phytopharmaceutiques contenant cette substance ou une directive visant l’inscription de ladite substance à l’annexe I de la directive (article 8, paragraphe 8, du règlement nº 451/2000).

20. L’acte final devait être adopté conformément à la procédure dite de « comitologie » prévue par les dispositions combinées de la décision 1999/468/CE du Conseil, du 28 juin 1999, fixant les modalités de l’exercice des compétences d’exécution conférées à la Commission (JO L 184, p. 23), de l’article 19 de la directive et de l’article 2, sous b), du règlement nº 1490/2002, c’est-à-dire sur avis du comité permanent de la chaîne alimentaire et de la santé animale.

Faits à l’origine du litige

21. La requérante Cheminova A/S est une société danoise fondée en 1938 dont l’activité consiste principalement à fabriquer et à commercialiser des produits phytopharmaceutiques. Elle commercialise ses produits de deux manières : soit elle les vend sur le marché communautaire directement à des clients en utilisant ses propres autorisations nationales, soit elle choisit de les vendre par l’intermédiaire de filiales, telles Cheminova Agro Italia Srl, Cheminova Bulgaria EOOD et Agrodan, SA, requérantes dans la présente affaire, ou de clients. Dans ce second cas, ces filiales et clients peuvent également détenir des autorisations nationales. Les requérantes vendent, en outre, leurs produits à des clients situés sur des marchés non communautaires, en particulier en Amérique du Nord et en Afrique. Cheminova A/S, Cheminova Agro Italia, Cheminova Bulgaria et Agrodan (ci-après, prises ensemble, les « quatre requérantes Cheminova ») appartiennent à un groupe dont la société mère est Auriga Industries A/S, cette dernière n’exerçant pas d’activité commerciale propre.

22. La requérante Lodi SAS est une société française spécialisée dans la fabrication et la vente d’insecticides. Elle est titulaire, en France, d’autorisations de commercialisation pour plusieurs produits à base de malathion.

23. Le 24 août 2000, Cheminova A/S a notifié à la Commission son souhait d’obtenir l’inscription du malathion à l’annexe I de la directive. La Commission a accepté cette notification et inscrit le nom de Cheminova A/S dans la liste des « auteurs de notification ». Cheminova A/S a soumis à la République de Finlande, l’État membre rapporteur, ses dossiers sommaire et complet, en demandant une évaluation de l’utilisation pour quatre types de culture : pommes, fraises, alfalfa et plantes d’ornement (plantes sous serres). Le 28 octobre 2002, la République de Finlande a informé la Commission du caractère complet du dossier présenté par Cheminova A/S.

24. La République de Finlande a procédé à l’évaluation du malathion et, sans avoir demandé à Cheminova A/S de lui soumettre des données scientifiques complémentaires, a soumis son projet de rapport d’évaluation à l’EFSA le 2 février 2004 aux fins d’un examen collégial. Ce projet de rapport d’évaluation – qui recommandait l’inscription du malathion à l’annexe I de la directive en limitant son utilisation aux plantes ornementales sous serres – a fait l’objet d’un examen collégial par les États membres et l’EFSA. Cet examen a duré du 2 février 2004 au 13 janvier 2006, sans que l’EFSA ou la République de Finlande aient demandé à Cheminova A/S de soumettre des données scientifiques complémentaires. Pendant la période allant du 4 avril au 24 novembre 2005, Cheminova A/S a, de sa propre initiative, transmis des documents scientifiques relatifs au malathion à la République de Finlande et à l’EFSA.

25. Le 13 janvier 2006, l’EFSA a présenté à la Commission ses « conclusions relatives à l’examen collégial de l’évaluation du risque pesticide de la substance active malathion ». Ensuite, les États membres et la Commission ont procédé, au sein du comité permanent de la chaîne alimentaire et de la santé animale, à l’examen de la problématique. Les 17 mars et 31 juillet 2006, Cheminova A/S a encore transmis à la Commission des documents scientifiques relatifs au malathion. Le 29 septembre 2006, la Commission a établi son rapport d’examen du malathion dans lequel elle proposait de ne pas inscrire le malathion à l’annexe I de la directive.

26. Enfin, conformément à l’avis du comité permanent de la chaîne alimentaire et de la santé animale, la Commission a, le 6 juin 2007, adopté la décision 2007/389/CE, concernant la non-inscription du malathion à l’annexe I de la directive et le retrait des autorisations de produits phytopharmaceutiques contenant cette substance (JO L 146, p. 19, ci-après la « décision attaquée »), dont le dispositif se lit comme suit :

« Article premier

Le malathion n’est pas inscrit en tant que substance active à l’annexe I de la directive [...]

Article 2

Les États membres font en sorte :

a) que les autorisations de produits phytopharmaceutiques contenant du malathion soient retirées pour le 6 décembre 2007 ;

b) qu’aucune autorisation de produits phytopharmaceutiques contenant du malathion ne soit accordée ou reconduite à partir de la date de publication de la présente décision.

Article 3

Tout délai de grâce accordé par des États membres conformément aux dispositions de l’article 4, paragraphe 6, de la directive […] est le plus court possible et expire au plus tard le 6 décembre 2008.

Article 4

Les États membres sont destinataires de la présente décision. »

27. La non-inscription du malathion en tant que substance active à l’annexe I de la directive est justifiée dans la décision attaquée par le fait que, au cours de l’évaluation de cette substance active, un certain nombre de sujets de préoccupation ont été identifiés, à savoir la génotoxicité non exclue de l’isomalathion et les effets de certains métabolites toxicologiquement importants, ce qui n’aurait pas permis, sur la base des informations disponibles, de déterminer si le malathion satisfaisait aux conditions d’inscription à l’annexe I de la directive (considérant 5).

28. Ainsi, la décision attaquée expose que, en raison de la présence d’isomalathion dans le matériel technique, une impureté qui contribue de manière importante au profil de toxicité du malathion et dont la génotoxicité ne peut être exclue, aucune conclusion ne peut être tirée quant au risque pour les opérateurs, les travailleurs et les personnes présentes. Elle indique que, par ailleurs, sur la base des informations disponibles, il n’a pas été démontré que l’exposition estimée des consommateurs résultant de l’ingestion aiguë et chronique de cultures comestibles était acceptable, en raison des informations insuffisantes sur les effets de certains métabolites toxicologiquement importants (considérant 5).

29. En dépit des arguments avancés par Cheminova A/S (entre le 4 avril 2005 et le 31 juillet 2006) au regard de l’isomalathion et des métabolites, la Commission a estimé que les sujets de préoccupation subsistaient. Elle a considéré que les évaluations effectuées sur la base des informations fournies et examinées lors des réunions des experts de l’EFSA n’avaient pas démontré que, dans les conditions d’utilisation proposées, les produits phytopharmaceutiques contenant du malathion satisfaisaient, d’une manière générale, aux conditions fixées par la directive (considérant 6).

Procédure et conclusions des parties

30. Par requête déposée au greffe du Tribunal le 30 août 2007, les requérantes ont introduit un recours visant à l’annulation de la décision attaquée.

31. Par acte séparé, déposé au greffe du Tribunal le 5 septembre 2007, les requérantes ont introduit la présente demande en référé, dans laquelle elles concluent à ce qu’il plaise au président du Tribunal :

– surseoir à l’exécution de la décision attaquée ;

– adopter toute mesure provisoire appropriée ;

– condamner la Commission aux dépens.

32. Dans ses observations écrites déposées au greffe du Tribunal le 24 septembre 2007, la Commission conclut à ce qu’il plaise au président du Tribunal :

– rejeter la demande en référé ;

– condamner les requérantes aux dépens.

33. En date du 31 octobre 2007, le juge des référés a posé certaines questions aux parties, qui y ont répondu par écrit dans le délai imparti.

En droit

34. En vertu des dispositions combinées des articles 242 CE et 243 CE, d’une part, et de l’article 225, paragraphe l, CE, d’autre part, le Tribunal peut, s’il estime que les circonstances l’exigent, ordonner le sursis à l’exécution d’un acte attaqué devant lui ou prescrire les mesures provisoires nécessaires.

35. L’article 104, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal dispose que les demandes de mesures provisoires doivent spécifier l’objet du litige, les circonstances établissant l’urgence, ainsi que les moyens de fait et de droit justifiant à première vue (fumus boni juris) l’octroi de la mesure provisoire à laquelle elles concluent. Ainsi, le sursis à exécution et les mesures provisoires peuvent être accordés par le juge des référés s’il est établi que leur octroi est justifié à première vue en fait et en droit (fumus boni juris) et qu’ils sont urgents en ce sens qu’il est nécessaire, pour éviter un préjudice grave et irréparable aux intérêts du requérant, qu’ils soient édictés et sortent leurs effets dès avant la décision au principal. Ces conditions sont cumulatives, de sorte que les demandes de mesures provisoires doivent être rejetées dès lors que l’une d’elles fait défaut [ordonnance du président de la Cour du 14 octobre 1996, SCK et FNK/Commission, C‑268/96 P(R), Rec. p. I‑4971, point 30]. Le juge des référés procède également, le cas échéant, à la mise en balance des intérêts en présence (voir ordonnance du président de la Cour du 23 février 2001, Autriche/Conseil, C‑445/00 R, Rec. p. I‑1461, point 73, et la jurisprudence citée).

36. En outre, dans le cadre de cet examen d’ensemble, le juge des référés dispose d’un large pouvoir d’appréciation et reste libre de déterminer, au regard des particularités de l’espèce, la manière dont ces différentes conditions doivent être vérifiées ainsi que l’ordre de cet examen, dès lors qu’aucune règle de droit communautaire ne lui impose un schéma d’analyse préétabli pour apprécier la nécessité de statuer provisoirement [ordonnances du président de la Cour du 19 juillet 1995, Commission/Atlantic Container Line e.a., C‑149/95 P(R), Rec. p. I‑2165, point 23, et du 3 avril 2007, Vischim/Commission, C‑459/06 P(R), non publiée au Recueil, point 25].

37. Compte tenu des éléments du dossier et notamment des réponses des parties aux questions posées, le juge des référés estime qu’il dispose de tous les éléments nécessaires pour statuer sur la présente demande de mesures provisoires, sans qu’il soit utile d’entendre, au préalable, les parties en leurs explications orales.

Sur la recevabilité

Arguments des parties

38. La Commission estime que la demande en référé est irrecevable, car elle ne satisferait pas aux conditions formelles de l’article 104, paragraphes 2 et 3, du règlement de procédure. En effet, elle se limiterait, en substance, à renvoyer au texte très volumineux de la requête au principal et ne permettrait pratiquement pas, à elle seule, de comprendre les critiques dirigées contre la décision attaquée. Ainsi, les moyens soulevés dans la demande en référé afin d’établir le fumus boni juris seraient présentés en seulement neuf points, alors que la requête au principal en contiendrait 88 consacrés aux moyens d’annulation. Or, le juge des référés ne devrait pas prendre en considération des moyens qui n’ont pas été exposés dans la demande en référé elle-même.

39. La Commission ajoute qu’aucune des requérantes autres que Cheminova A/S n’est individuellement concernée, au sens de l’article 230, quatrième alinéa, CE, par la décision attaquée, qui constitue un acte d’application générale adressé aux seuls États membres. Ces autres requérantes seraient de simples vendeurs ou utilisateurs du produit en cause. Or, ainsi qu’il ressort de trois listes annexées aux observations de la Commission, il existerait de nombreux opérateurs autres que lesdites requérantes qui utilisent le malathion ou sont autorisés à le vendre. Par conséquent, le recours et, partant, la demande en référé devraient être déclarés irrecevables en ce qui concerne ces requérantes.

40. De l’avis des requérantes, le recours au principal est recevable, conformément à l’article 230, quatrième alinéa, CE, car il est dirigé contre un acte produisant des effets juridiques obligatoires qui les concernent directement et individuellement. Cheminova A/S en tant qu’auteur de la notification du malathion serait sans aucun doute recevable à agir dans le cadre du recours au principal. Or, lorsqu’il s’agit d’établir la recevabilité d’un seul et même recours introduit par plusieurs requérants et que le recours est recevable en ce qui concerne l’un d’entre eux, il n’y aurait pas lieu d’examiner la qualité pour agir des autres requérants [voir ordonnance du président du Tribunal du 19 juillet 2007, Du Pont de Nemours (France) e.a./Commission, T‑31/07 R, non encore publiée au Recueil, point 113, et la jurisprudence citée].

41. Par ailleurs, s’agissant des requérantes autres que Cheminova A/S, chacune d’entre elles serait recevable à agir dans le cadre du recours au principal, puisqu’elles détiennent toutes des autorisations nationales de commercialisation de produits phytopharmaceutiques à base de malathion, qui leur ont été accordées par les autorités compétentes des États membres. Dès lors qu’aucun autre opérateur ne pourrait désormais obtenir de telles autorisations de commercialisation, ces requérantes appartiendraient donc à un cercle fermé d’opérateurs. Toutes leurs autorisations leur seraient retirées le 6 décembre 2007 au plus tard en conséquence directe de la décision attaquée.

Appréciation du juge des référés

42. En vertu des dispositions de l’article 104, paragraphe 1, du règlement de procédure, une demande de mesures provisoires n’est recevable que si elle émane d’une partie à une affaire dont le Tribunal est saisi. Cette règle implique que le recours au principal, sur lequel se greffe la demande en référé, puisse être effectivement examiné par le Tribunal.

43. Selon une jurisprudence constante, la recevabilité du recours au principal ne doit pas, en principe, être examinée dans le cadre d’une procédure de référé sous peine de préjuger l’affaire au principal. Il peut, néanmoins, s’avérer nécessaire, lorsque l’irrecevabilité manifeste du recours au principal sur lequel se greffe la demande en référé est soulevée, d’établir l’existence de certains éléments permettant de conclure, à première vue, à la recevabilité d’un tel recours [ordonnance du président de la Cour du 12 octobre 2000, Federación de Cofradías de Pescadores de Guipúzcoa e.a./Conseil, C‑300/00 P(R), Rec. p. I‑8797, point 34 ; ordonnances du président du Tribunal du 15 janvier 2001, Stauner e.a./Parlement et Commission, T‑236/00 R, Rec. p. II‑15, point 42, et du 8 août 2002, VVG International e.a./Commission, T‑155/02 R, Rec. p. II‑3239, point 18].

44. Un tel examen de la recevabilité du recours au principal est nécessairement sommaire, compte tenu du caractère urgent de la procédure de référé (ordonnance Federación de Cofradías de Pescadores de Guipúzcoa e.a./Conseil, point 43 supra, point 35).

45. En effet, dans le cadre d’une demande en référé, la recevabilité du recours au principal ne peut être appréciée que de prime abord, la finalité étant d’examiner si le requérant produit des éléments suffisants qui justifient a priori de conclure que la recevabilité du recours au principal ne saurait être exclue. Le juge des référés ne doit déclarer cette demande irrecevable que si la recevabilité du recours au principal peut être totalement exclue. En effet, statuer sur la recevabilité au stade du référé lorsque celle-ci n’est pas, prima facie, totalement exclue reviendrait à préjuger la décision du Tribunal statuant au principal (ordonnances du président du Tribunal du 17 janvier 2001, Petrolessence et SG2R/Commission, T‑342/00 R, Rec. p. II‑67, point 17 ; du 19 décembre 2001, Government of Gibraltar/Commission, T‑195/01 R et T‑207/01 R, Rec. p. II‑3915, point 47, et du 7 juillet 2004, Região autónoma dos Açores/Conseil, T‑37/04 R, Rec. p. II‑2153, point 110).

46. En l’espèce, la Commission conteste que le recours au principal soit recevable. Il y a donc lieu de vérifier s’il existe des éléments permettant de conclure néanmoins, à première vue, à la recevabilité du recours au principal dans cette affaire.

47. À cet égard, il importe de constater, d’abord, que, tout en contestant que les requérantes autres que Cheminova A/S soient recevables à introduire le recours au principal, la Commission admet expressément cette recevabilité en ce qui concerne cette dernière. En effet, en sa qualité d’auteur de la notification du malathion ayant effectivement participé à la procédure d’évaluation d’une substance active prévue par la directive et bénéficiant des garanties procédurales prévues par la réglementation pertinente, il ne peut être exclu, à première vue, que Cheminova A/S soit directement et individuellement concernée par la décision attaquée, au sens de l’article 230, quatrième alinéa, CE, et que le recours au principal introduit par elle soit recevable [ordonnance Du Pont de Nemours (France) e.a./Commission, point 40 supra, point 112].

48. Dans ces circonstances, s’agissant d’un seul et même recours au principal, il n’y a prima facie pas lieu d’examiner la qualité pour agir des autres requérantes (voir, en ce sens, arrêts de la Cour du 24 mars 1993, CIRFS e.a./Commission, C‑313/90, Rec. p. I‑1125, point 31, et du Tribunal du 8 juillet 2003, Verband der freien Rohrwerke e.a./Commission, T‑374/00, Rec. p. II‑2275, point 57 ; voir également, en ce sens, arrêt du Tribunal du 6 juillet 1995, AITEC e.a./Commission, T‑447/93 à T‑449/93, Rec. p. II‑1971, point 82). Cette jurisprudence, fondée sur des considérations d’économie de procédure, est justifiée par la circonstance que, à supposer même que l’une ou l’autre de ces requérantes n’ait pas qualité pour agir, le Tribunal devrait néanmoins examiner au fond les moyens d’annulation présentés dans leur intégralité (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 9 juillet 2007, Sun Chemical Group e.a./Commission, T‑282/06, non encore publié au Recueil, point 52).

49. Force est de souligner, toutefois, que la jurisprudence mentionnée au point 48 ci-dessus, si elle est le cas échéant à prendre en considération dans le cadre de la procédure au principal, ne saurait trouver application pour ce qui est de la question de l’appréciation de l’urgence dans le cadre d’une procédure de référé.

50. En effet, selon une jurisprudence constante, l’urgence doit s’apprécier par rapport à la nécessité de statuer provisoirement, afin d’éviter qu’un préjudice grave et irréparable ne soit occasionné à la partie qui sollicite la mesure provisoire. Cette partie est tenue d’apporter la preuve qu’elle ne saurait attendre l’issue de la procédure au principal sans avoir à subir personnellement un préjudice qui entraînerait des conséquences graves et irréparables pour elle (ordonnances du président de la Cour du 15 juin 1987, Belgique/Commission, 142/87 R, Rec. p. 2589, point 23, et du 8 mai 1991, Belgique/Commission, C‑356/90 R, Rec. p. I‑2423, points 20 et 23).

51. Il s’ensuit que seule une partie, recevable à introduire le recours au principal sur lequel se greffe la demande en référé, peut être admise à établir l’urgence en faisant valoir qu’elle subirait personnellement un préjudice grave et irréparable si la mesure provisoire sollicitée n’était pas accordée. À défaut d’une telle restriction, il suffirait, pour obtenir une mesure provisoire, à des entreprises concernées par un acte communautaire de s’associer en formant un recours collectif en annulation, assorti d’une demande en référé, qui serait introduit par des requérants dont l’un seulement serait recevable au sens de l’article 230, quatrième alinéa, CE, tandis que les autres pourraient seulement démontrer être victime d’un préjudice grave et irréparable.

52. Dans le présent contexte, il y a donc lieu d’examiner si les requérantes autres que Cheminova A/S apparaissent prima facie manifestement irrecevables à demander au Tribunal l’annulation au principal de la décision attaquée.

53. Aux termes de l’article 230, quatrième alinéa, CE, toute personne physique ou morale peut former un recours contre les décisions qui, bien que prises sous l’apparence d’un règlement ou d’une décision adressée à une autre personne, la concernent directement et individuellement.

54. S’agissant de la question de savoir si les requérantes autres que Cheminova A/S sont, à première vue, individuellement concernées par la décision attaquée, dont les uniques destinataires sont les États membres (article 4 de la décision attaquée), force est de constater d’abord que la décision attaquée constitue prima facie un acte de portée générale en ce qu’elle s’applique à des situations déterminées objectivement et comporte des effets juridiques à l’égard de catégories de personnes envisagées de manière générale et abstraite. En effet, les articles 1 er à 3 de la décision attaquée concernent une substance active, le malathion, et les opérateurs économiques détenant des autorisations de commercialisation visées de manière générale et abstraite. Dès lors, au regard de ces dispositions et sous réserve de l’existence de caractéristiques qui leur sont particulières, ces opérateurs économiques sont prima facie affectés par la décision attaquée de la même manière et placés dans une situation identique.

55. Toutefois, il n’est pas exclu que, dans certaines circonstances, les dispositions de cet acte de portée générale puissent concerner individuellement certains d’entre eux (voir arrêts de la Cour du 16 mai 1991, Extramet Industrie/Conseil, C‑358/89, Rec. p. I‑2501, point 13 ; du 18 mai 1994, Codorníu/Conseil, C‑309/89, Rec. p. I‑1853, point 19, et du 25 juillet 2002, Unión de Pequeños Agricultores/Conseil, C‑50/00 P, Rec. p. I‑6677, point 36).

56. Selon une jurisprudence constante, une personne physique ou morale autre que le destinataire d’un acte ne saurait prétendre être concernée individuellement, au sens de l’article 230, quatrième alinéa, CE, que si elle est atteinte, par l’acte en cause, en raison de certaines qualités qui lui sont particulières ou d’une situation de fait qui la caractérise par rapport à toute autre personne et, de ce fait, l’individualise d’une manière analogue à celle dont le serait le destinataire de l’acte (arrêts de la Cour du 15 juillet 1963, Plaumann/Commission, 25/62, Rec. p. 197, 223 ; Codorníu/Conseil, point 55, supra, point 20 ; Unión de Pequeños Agricultores/Conseil, point 55, supra, point 36, et du 1 er avril 2004, Commission/Jégo-Quéré, C‑263/02 P, Rec. p. I‑3425, point 45).

57. À cet égard, la possibilité de déterminer, avec plus ou moins de précision, le nombre ou même l’identité des sujets de droit auxquels s’applique une mesure n’implique nullement que ces sujets doivent être considérés comme concernés individuellement par cette mesure, tant qu’il est constant que cette application s’effectue en vertu d’une situation objective de droit ou de fait définie par l’acte en cause (ordonnance de la Cour du 24 mai 1993, Arnaud e.a./Conseil, C‑131/92, Rec. p. I‑2573, point 13 ; voir, également, ordonnance de la Cour du 18 décembre 1997, Sveriges Betodlares et Henrikson/Commission, C‑409/96 P, Rec. p. I‑7531, point 37, et arrêt du Tribunal du 22 février 2000, ACAV e.a./Conseil, T‑138/98, Rec. p. II‑341, point 64).

58. En l’espèce, il semble que les requérantes autres que Cheminova A/S, loin d’être individualisées par des qualités qui leur seraient particulières, sont affectées au même titre que tous les autres vendeurs et utilisateurs du malathion se trouvant dans la même situation. La décision attaquée ne comporte aucun élément concret permettant de conclure qu’elle a été adoptée en tenant compte de la situation particulière des requérantes autres que Cheminova A/S. Il semble donc que c’est uniquement en raison de leur qualité objective d’opérateurs économiques visés par la décision attaquée que ces requérantes pourraient prétendre être affectées par celle-ci. Or, une telle atteinte n’est pas suffisante pour être individuellement concerné au sens de l’article 230, quatrième alinéa, CE. Aucun des arguments avancés en sens contraire par les requérantes ne permet de remettre en cause cette appréciation.

59. S’agissant de la circonstance que les requérantes autres que Cheminova A/S détiennent des autorisations nationales de commercialisation du malathion, il suffit de relever que la seule existence de tels droits de commercialisation, potentiellement remise en cause par la décision attaquée, n’est pas susceptible d’individualiser le titulaire dudit droit dès lors qu’il est constant que ce même droit est accordé, en application d’une règle générale et abstraite, à des opérateurs déterminés objectivement (voir, en ce sens, ordonnance du Tribunal du 28 novembre 2005, EEB e.a./Commission, T‑94/04, Rec. p. II‑4919, points 53 à 55). Or, la Commission a démontré, en produisant trois listes annexées à ses observations, qu’il existe de nombreuses entreprises autres que les requérantes qui, elles aussi, vendent et utilisent le malathion et qui disposent donc de droits de commercialisation au même titre que les requérantes. En réponse à une question posée par le juge des référés, les requérantes n’ont pas contesté la présence sur le marché de ces entreprises mentionnées par la Commission.

60. En réponse à une question posée par le juge des référés, les requérantes ont encore présenté des lettres accordant aux requérantes autres que Cheminova A/S l’accès à des données détenues par cette dernière, lettres qui étaient destinées à leur faciliter l’obtention d’autorisations nationales de commercialisation du malathion. Se référant à l’arrêt du Tribunal du 11 septembre 2002, Pfizer Animal Health/Conseil (T‑13/99, Rec. p. II‑3305, point 98), les requérantes soutiennent que ces lettres ont conféré des droits spécifiques analogues à celui dont pouvait se prévaloir l’entreprise requérante dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Codorníu/Conseil, point 55 supra (point 21).

61. À cet égard, il suffit de relever que les lettres d’accès en cause n’avaient ni pour but ni pour effet de conférer aux entreprises destinataires la position juridique spécifique qui était celle de Cheminova A/S. Se limitant à faciliter l’octroi d’autorisations nationales de commercialisation du malathion, leur port ée ne saurait excéder celle de ces autorisations elles-mêmes. Or, ainsi qu’il a été jugé au point 59 ci-dessus, celles-ci ne sont pas de nature à individualiser les requérantes autres que Cheminova A/S. Quant à la référence à l’arrêt Pfizer Animal Health/Conseil, point 60 supra, elle est dénuée de pertinence, étant donné que le recours dans l’affaire ayant donné lieu à cet arrêt n’a été déclaré recevable que compte tenu d’un ensemble d’éléments constitutifs d’une situation procédurale particulière qui caractérisait la requérante, à savoir, notamment, sa qualité de responsable de la première mise en circulation du produit concerné (arrêt Pfizer Animal Health/Conseil, précité, points 97, 98 et 105). Or, tel n’est pas le cas de la situation procédurale des requérantes autres que Cheminova A/S.

62. À supposer même que la décision attaquée soit susceptible de produire des effets différents selon chaque vendeur ou utilisateur concerné, cette circonstance ne saurait suffire pour démontrer que les requérantes autres que Cheminova A/S ont des qualités particulières ou se trouvent dans une situation de fait qui les caractérise par rapport aux opérateurs mentionnés dans les listes produites par la Commission. En effet, les requérantes n’ont pas précisé, dans la demande en référé, dans quelle mesure leurs droits de commercialisation seraient particulièrement affectés par les conséquences négatives de la décision attaquée, et ce d’une manière qui les distinguerait de tout autre opérateur de la catégorie en cause (voir, en ce sens, ordonnance du Tribunal du 11 septembre 2007, Fels-Werke e.a./Commission, T‑28/07, non publiée au Recueil, point 63).

63. Enfin, l’argumentation concernant l’appartenance des requérantes autres que Cheminova A/S à un cercle fermé d’entreprises condamnées à perdre leurs autorisations de commercialisation le 6 décembre 2007 au plus tard doit également être écartée. En effet, pour que l’existence d’un tel cercle puisse être un élément de nature à individualiser les particuliers en question au regard d’un acte de portée générale, il faut, selon une jurisprudence constante, que l’institution dont émane l’acte attaqué ait eu l’obligation de tenir compte, lors de l’adoption dudit acte, de la situation spécifique de ces particuliers (voir ordonnance Federación de Cofradías de Pescadores de Guipúzcoa e.a./Conseil et Commission, point 43 supra, point 46, et la jurisprudence citée ; arrêt du Tribunal du 15 décembre 1994, Unifruit Hellas/Commission, T‑489/93, Rec. p. II‑1201, point 25 ; ordonnance du Tribunal du 3 juin 1997, Merck e.a./Commission, T‑60/96, Rec. p. II‑849, point 58, et arrêt du Tribunal du 27 juin 2001, Andres de Dios e.a./Conseil, T‑166/99, Rec. p. II‑1857, point 54). Or, en l’espèce, une telle obligation n’était pas imposée à la Commission pour l’adoption de la décision attaquée.

64. Il résulte de ce qui précède que les requérantes autres que Cheminova A/S ne peuvent, à première vue, être considérées comme individuellement concernées par la décision attaquée. Ces requérantes ne sont donc pas recevables à arguer de leur propre situation individuelle pour établir l’urgence. Elles ne sont, en conséquence, pas non plus recevables à introduire la présente demande en référé.

65. Dans la mesure où la Commission soutient que la demande en référé ne satisfait pas aux conditions formelles de l’article 104, paragraphes 2 et 3, du règlement de procédure, il y a lieu de rappeler que, en vertu de cette disposition, la demande relative à des mesures provisoires doit spécifier, notamment, les moyens de fait et de droit justifiant à première vue l’octroi de la mesure à laquelle elle conclut et être présentée par acte séparé et dans les conditions prévues aux articles 43 et 44 du même règlement.

66. À cet égard, il est de jurisprudence bien établie qu’une demande en référé doit, à elle seule, permettre à la partie défenderesse de préparer ses observations et au juge des référés de statuer sur la demande, le cas échéant, sans autres informations à l’appui, les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels celle-ci se fonde devant ressortir d’une façon cohérente et compréhensible du texte même de la requête en référé (ordonnances du président du Tribunal Stauner e.a./Parlement et Commission, point 43 supra, point 34 ; du 7 mai 2002, Aden e.a./Conseil et Commission, T‑306/01 R, Rec. p. II‑2387, point 52 ; du 25 juin 2003, Schmitt/AER, T‑175/03 R, RecFP p. I‑A‑175 et II‑883, point 18, et du 23 mai 2005, Dimos Ano Liosion e.a./Commission, T‑85/05 R, Rec. p. II‑1721, point 37).

67. En l’occurrence, il y a lieu de constater que, si la demande en référé peut effectivement être considérée comme lacunaire en ce qui concerne les moyens avancés pour justifier l’existence d’un fumus boni juris, elle contient néanmoins des éléments qui permettent au juge des référés de les examiner. En effet, il en ressort que les requérantes font, en substance, valoir que la décision attaquée est dépourvue de fondement en ce qu’elle ne tiendrait pas compte de données scientifiques pertinentes que Cheminova A/S a présentées aux instances compétentes en temps utile. En outre, elles soulèvent une exception d’illégalité du règlement n° 1490/2002 en ce qu’il a permis l’intervention rétroactive de l’EFSA dans la procédure d’évaluation du malathion, alors que cette procédure avait déjà débuté.

68. Dans ces circonstances, il ne peut être considéré que la demande en référé méconnaît les conditions requises par l’article 104, paragraphe 2, du règlement de procédure. Il s’ensuit que cette demande est recevable en ce qui concerne Cheminova A/S.

Sur l’urgence

Arguments des parties

69. Selon les requérantes, l’urgence de faire droit à la présente demande résulte du fait que la décision attaquée leur occasionnera un préjudice grave et irréparable. Ce préjudice serait constitué par la perte de leurs autorisations de vente de produits à base de malathion, au plus tard le 6 décembre 2007, la perte de clients et la perte irréparable de parts de marché au bénéfice d’entreprises concurrentes qui seraient très puissantes et d’ores et déjà présentes sur le marché. En outre, la décision attaquée détruirait irrévocablement la réputation des principaux produits des quatre requérantes Cheminova. Enfin, la décision attaquée porterait atteinte à la réputation des autres marques commerciales, déjà anciennes, des requérantes sur le marché.

70. En ce qui concerne la charge de la preuve leur incombant, les requérantes se réfèrent à l’ordonnance du président de la Cour du 21 octobre 2003, Industrias Químicas del Vallés/Commission [C‑365/03 P(R), Rec. p. I‑12389, point 6], pour soutenir qu’il leur suffit d’établir qu’elles subiraient « probablement » un préjudice grave et irréparable parce qu’elles pourraient « difficilement offrir » des produits de substitution à leur clientèle et qu’elles « risquent » de perdre irrémédiablement des parts de marché, compte tenu des conditions de concurrence sur le marché en cause. Elles ajoutent que cette détermination du niveau d’exigence en matière de preuve a été confirmée par l’ordonnance Du Pont de Nemours (France) e.a./Commission, point 40 supra.

71. Par ailleurs, les requérantes n’auraient pas à démontrer qu’elles deviendraient probablement insolvables si le sursis à l’exécution de la décision attaquée n’était pas ordonné, mais il leur suffirait d’établir que, en l’absence d’une telle mesure, elles se trouveraient dans une situation susceptible « de modifier de manière irrémédiable [leurs] parts de marché » (ordonnances du président du Tribunal du 11 avril 2003, Solvay Pharmaceuticals/Conseil, T‑392/02 R, Rec. p. II‑1825, point 107, et du 5 août 2003, Industrias Químicas del Vallés/Commission, T‑158/03 R, Rec. p. II‑3041, point 69), ou verraient affecter leur « position sur le marché » ou leur réputation (ordonnance du président du Tribunal du 20 juillet 2000, Esedra/Commission, T‑169/00 R, Rec. p. II‑2951, point 45).

72. S’agissant du cas d’espèce, les requérantes indiquent que Cheminova A/S fabrique trois différents types de produits phytopharmaceutiques : des insecticides, des herbicides et des fongicides. Sur le marché des insecticides, elle commercialiserait différentes substances actives, dont notamment le malathion, le chlorpyriphos et le diméthoate.

73. Les principaux marchés en Europe sur lesquels Cheminova A/S commercialise le malathion, par l’intermédiaire de ses filiales Cheminova Agro Italia et Agrodan, seraient l’Italie et l’Espagne. Cheminova A/S vendrait également des produits à base de malathion à Cheminova Bulgaria et à ses filiales polonaise et du Royaume-Uni. En ce qui concerne d’autres États de la Communauté, Cheminova A/S commercialiserait ses produits directement auprès des clients.

74. Quant au caractère imminent et irréparable du préjudice, il serait évident du fait que, en vertu de la décision attaquée, les États membres devront retirer les autorisations de mise sur le marché de produits phytopharmaceutiques détenues par les quatre requérantes Cheminova au plus tard le 6 décembre 2007. Le retrait de ces autorisations entraînerait la perte irrémédiable de la totalité des parts de marché des requérantes et de leur clientèle en ce qui concerne le malathion, leur part sur le marché communautaire du malathion étant estimée à environ [ confidentiel ](1) .

75. Pour ce qui est de la substituabilité du malathion, aucune substance active ne serait identique à une autre, d’un point de vue technique. En l’absence d’une substituabilité parfaite, les clients des requérantes devraient tenir compte des caractéristiques techniques du produit de substitution avant de le choisir à la place du malathion. D’un point de vue juridique, les requérantes devraient disposer d’une autorisation nationale aux fins de l’utilisation et de la commercialisation d’une substance de remplacement. L’obtention de telles autorisations prenant du temps, il serait probable que le marché aura, entre-temps, été conquis par des entreprises concurrentes. L’introduction d’une nouvelle substance active par les requérantes prendrait environ dix années de recherche et de développement et serait financièrement très onéreuse. D’un point de vue commercial, il ne saurait raisonnablement être exigé des requérantes qu’elles distribuent les produits d’autres fabricants. D’un point de vue structurel, le marché pertinent se caractériserait par une concurrence de forte intensité, les requérantes étant confrontées à de puissants concurrents capables d’offrir non seulement des produits de substitution directe, mais des produits pour tous les besoins en matière de lutte contre les nuisibles, mauvaises herbes et maladies.

76. En ce qui concerne les produits en concurrence avec le malathion, les requérantes produisent un tableau comprenant 22 substances de substitution probables, dont le chlorpyrifos et l’abamectine, qui seraient commercialisées par de puissantes sociétés, telles Dow, Bayer, DuPont, Syngenta et BASF. Celles-ci disposeraient, d’une part, de produits de marque bien établis qui répondent aux besoins des clients auxquels les requérantes ne seraient plus autorisées à vendre des produits à base de malathion et, d’autre part, de ressources financières considérables destinées aux publicités nécessaires à l’accompagnement de ces ventes. Elles pourraient donc conquérir le marché perdu par les quatre requérantes Cheminova et consolider cette conquête.

77. Dans ce contexte, les requérantes se réfèrent à des déclarations de clients de Cheminova A/S selon lesquelles les principaux produits vers lesquels ces clients se tourneraient en l’absence du malathion seraient le chlorpyrifos, le phosmet et le diméthoate.

78. S’agissant d’un éventuel retour sur le marché du malathion, les requérantes se réfèrent à une étude réalisée auprès de certains de leurs principaux clients. Les neuf réponses reçues de clients établis dans six États membres de la Communauté corroboreraient la probabilité d’une perte irrémédiable de parts de marché et de clients.

79. S’agissant de la possibilité pour les quatre requérantes Cheminova de compenser la perte des produits à base de malathion en les remplaçant par d’autres produits de leur propre gamme, elles font valoir qu’une telle substitution ne sera possible qu’en ce qui concerne le chlorpyrifos-éthyl et le diméthoate.

80. Toutefois, leurs produits à base de chlorpyrifos et de diméthoate ne sauraient être considérés comme des produits de substitution de ceux à base de malathion. En effet, elles ne disposeraient pas des autorisations nationales nécessaires dans chacun des États membres dans lesquels elles opèrent actuellement. Dans ce contexte, un tableau démontrerait l’absence de correspondance avec les produits à base de diméthoate et de chlorpyrifos en Espagne, leur principal marché communautaire. Ainsi, seulement [ confidentiel ] % des utilisations perdues seraient théoriquement susceptibles d’être récupérées en Espagne par des ventes de produits de substitution figurant dans la gamme de produits des requérantes. Ce chiffre correspondrait à [ confidentiel ] % du chiffre d’affaires de la requérante Agrodan réalisé avec le malathion.

81. Rappelant que le malathion a été utilisé en toute sécurité sur le marché communautaire durant environ 40 ans, les requérantes ajoutent que la décision attaquée affecte leur réputation générale et la confiance dans le malathion. Elles subiraient une atteinte sérieuse sur un marché particulièrement sensible aux questions de santé et d’environnement, ce qui aurait de sérieuses conséquences se traduisant par des difficultés non seulement dans les relations commerciales avec la clientèle, mais également dans les relations avec les personnes qui ont investi en tant qu’actionnaires. En particulier, Cheminova A/S serait titulaire de la marque Fyfanon®™, enregistrée depuis 1969, qui représenterait l’essentiel de son activité de commercialisation du malathion depuis environ 40 ans. Cheminova A/S serait titulaire d’autres marques pertinentes de malathion, dont la réputation et le « good-will » seraient réduits à néant par la décision attaquée.

82. Les requérantes affirment encore que, si le malathion avait effectivement été inscrit à l’annexe I de la directive, l’article 13 de la directive aurait permis à Cheminova A/S, en tant qu’auteur de la notification, de refuser à ses concurrents et clients l’accès aux informations acquises – à un coût élevé – afin d’obtenir cette inscription. Normalement, l’accès de ces concurrents et clients auxdites informations – nécessaires à l’obtention des autorisations nationales pour le produit phytopharmaceutique en question – ne serait permis qu’en contrepartie d’un paiement calculé de façon à dédommager le notifiant des frais qu’il a supportés. Or, du fait de la non-inscription du malathion à l’annexe I de la directive, Cheminova A/S subirait un préjudice consistant en un refus du bénéfice des droits à la protection des données résultant d’une telle inscription.

83. S’agissant du caractère grave du préjudice causé par la décision attaquée, les requérantes indiquent que le chiffre d’affaires de la requérante Cheminova A/S, y compris celui réalisé par les requérantes Cheminova Agro Italia, Cheminova Bulgaria et Agrodan, représente environ [ confidentiel ] % du chiffre d’affaires total de l’ensemble du groupe pour 2006. Selon les requérantes, il ressort du rapport de Deloitte & Touche (joint en annexe à la demande en référé) que le chiffre d’affaires réalisé avec le malathion au cours de l’année calendaire 2006 s’est élevé à près de [ confidentiel ] millions d’euros, ce qui représente [ confidentiel ] % du chiffre d’affaires total des quatre requérantes Cheminova. [ confidentiel ] % de ce chiffre d’affaires aurait été réalisé sur le marché communautaire. Le montant total du chiffre d’affaires réalisé dans les pays affectés par la décision attaquée serait de près de [ confidentiel ] millions d’euros en 2006, ce qui représente [ confidentiel ] % du total du chiffre d’affaires réalisé avec le malathion.

84. Elles précisent que les ventes réalisées à l’intérieur de la Communauté seront perdues en raison du retrait des autorisations nationales. S’agissant des ventes réalisées dans des pays tiers, le rapport de Deloitte & Touche mettrait en évidence un préjudice à plusieurs titres. Ainsi, certains pays tiers suivraient la réglementation communautaire, de sorte que le refus d’inscription à l’annexe I de la directive d’une substance active entraînerait l’interdiction de cette substance dans ces pays, ce qui serait confirmé par le rapport de Phillips McDougall (joint en annexe à la demande en référé). De surcroît, conformément à l’article 5 de la convention de Rotterdam sur la procédure de consentement préalable en connaissance de cause applicable à certains produits chimiques et pesticides dangereux qui font l’objet d’un commerce international (JO 2003, L 63, p. 29), les États signataires seraient tenus de notifier les interdictions dans les 90 jours suivant leur adoption. Une telle notification pourrait aboutir à l’inscription de la substance à l’annexe III de la convention, avec pour effet que la substance en question est alors soumise à une procédure de consentement préalable en cas d’exportation hors de la Communauté. Or, la Commission aurait préparé une telle notification.

85. En outre, une décision de non-inscription telle la décision attaquée serait généralement suivie de la fixation de nouvelles teneurs maximales en résidus (ci-après les « TMR ») pour la substance en question dans les produits d’origine végétale. La fixation de telles TMR reviendrait en pratique à interdire les importations dans la Communauté de récoltes ou de produits traités avec du malathion hors de la Communauté. En toute hypothèse, l’incertitude pesant sur les TMR suffirait à susciter des doutes dans l’esprit de clients hors de la Communauté, ainsi que l’attesterait un courrier électronique reçu de la Fundecitrus, une organisation de cultivateurs d’agrumes au Brésil. Deloitte & Touche aurait pris ces éléments en compte dans l’évaluation du préjudice résultant de la perte de ventes de malathion hors de la Communauté.

86. Deloitte & Touche aurait également calculé un manque à gagner en raison de la croissance escomptée dans le cadre du « projet colza » : Cheminova A/S ayant envisagé de fournir du malathion au secteur du colza en 2009 au plus tard, il aurait été prévu que le « projet colza » augmenterait significativement le chiffre d’affaires et les bénéfices réalisés avec les produits à base de malathion. Deloitte & Touche aurait évalué ce manque à gagner à plus de [ confidentiel ] millions d’euros jusqu’en 2011.

87. En tenant compte de tous les éléments factuels nécessaires aux fins de l’appréciation de la gravité du préjudice, Deloitte & Touche aurait évalué le montant du préjudice total subi par les quatre requérantes Cheminova du fait de la décision attaquée à près de [ confidentiel ] millions d’euros.

88. S’agissant de la requérante Lodi, les requérantes affirment qu’elle subirait, elle aussi, un préjudice grave et irréparable si la mesure provisoire sollicitée n’était pas accordée.

89. La Commission estime que le préjudice allégué par les requérantes est de nature purement pécuniaire. Un tel préjudice ne saurait, en général, être regardé comme irréparable du fait qu’il peut faire l’objet d’une compensation financière ultérieure.

90. En ce qui concerne le caractère grave du préjudice allégué, la Commission reconnaît que la décision attaquée entraînera pour les requérantes une perte de leurs ventes, de leurs revenus et de leurs parts de marché. Toutefois, une part de marché ne serait pas un but en soi : l’entreprise ne pourrait en bénéficier que dans la mesure où elle lui apporte des profits. Pour apprécier le caractère grave ou non de la perte d’une part de marché, il conviendrait, par conséquent, de traduire cette part en des termes financiers, et ce eu égard à la taille financière de l’entreprise tout entière. Or, en l’espèce, une grande partie des ventes de malathion effectuées par les quatre requérantes Cheminova ne serait pas concernée par la décision attaquée, étant donné que seulement [ confidentiel ] % de leurs ventes de malathion seraient réalisés sur le marché communautaire.

91. Le préjudice pouvant être pris en considération ne s’élèverait qu’à [ confidentiel ] % du chiffre d’affaires du groupe Cheminova pour les trois prochaines années. Or, un tel préjudice ne saurait être qualifié de grave. À cet égard, la Commission renvoie à l’ordonnance du président de la Cour du 23 mai 1990, Cosmos-Tank e.a./Commission (C‑51/90 R et C‑59/90 R, Rec. p. I‑2167).

92. Selon la Commission, c’est à tort que les requérantes tiennent compte de pertes de ventes et de revenus postérieures à l’année 2010 dans le calcul du préjudice. En effet, ces pertes seraient trop lointaines pour justifier la mesure provisoire sollicitée. En outre, les requérantes mélangeraient les ventes fa ites sur le marché communautaire avec celles effectuées sur des marchés extracommunautaires. Or, la décision attaquée produirait ses effets seulement sur le marché communautaire et non dans des pays tiers.

93. En ce qui concerne le caractère irréparable du préjudice invoqué, la Commission fait observer que les requérantes auraient dû prouver que des obstacles de nature structurelle ou juridique les empêcheraient de reconquérir une fraction appréciable de leurs parts du marché à l’aide, notamment, de mesures appropriées de publicité. Or, elles n’apporteraient aucune preuve en ce sens, mais se limiteraient à affirmer que des concurrents détiennent des parts de marché élevées. Toutefois, cette circonstance ne serait pas, en soi, un obstacle de nature structurelle à la possibilité pour les requérantes de reconquérir leurs parts de marché.

94. La présente demande en référé serait, d’ailleurs, contradictoire en ce qui concerne les substances actives susceptibles de remplacer le malathion. Ainsi, les deux rapports présentés par les requérantes à l’appui de leur thèse parviendraient à des résultats diamétralement opposés. En outre, les témoignages de clients invoqués pour démontrer qu’un retour du malathion sur le marché ne sera guère possible ne permettraient nullement l’interprétation pessimiste qui en est faite par les requérantes. Au contraire, un tel retour apparaîtrait tout à fait réaliste.

95. Par ailleurs, les requérantes auraient admis que les substances susceptibles de remplacer le malathion ne peuvent pas se substituer à lui parfaitement. Cela démontrerait que, si le malathion était réintroduit sur le marché, il pourrait reconquérir sa part de marché grâce à ses caractéristiques intrinsèques. Par conséquent, la Commission estime que les requérantes n’ont pas prouvé qu’il y avait des obstacles insurmontables qui les empêcheraient de reconquérir une fraction appréciable du marché.

96. La Commission en conclut que l’urgence n’est pas établie en l’espèce.

Appréciation du juge des référés

97. Selon une jurisprudence constante, l’urgence doit s’apprécier par rapport à la nécessité de statuer provisoirement, afin d’éviter qu’un préjudice grave et irréparable ne soit occasionné à la partie qui sollicite la mesure provisoire. L’imminence du préjudice ne doit pas être établie avec une certitude absolue ; il suffit, particulièrement lorsque la réalisation du préjudice dépend de la survenance d’un ensemble de facteurs, qu’elle soit prévisible avec un degré de probabilité suffisant (voir ordonnance du président du Tribunal du 7 juin 2007, IMS/Commission, T‑346/06 R, non encore publiée au Recueil, points 121 et 123, et la jurisprudence citée). Toutefois, la partie qui s’en prévaut demeure tenue de prouver les faits qui sont censés fonder la perspective d’un préjudice grave et irréparable [ordonnance du président de la Cour du 14 décembre 1999, HFB e.a./Commission, C‑335/99 P(R), Rec. p. I‑8705, point 67 ; ordonnances du président du Tribunal du 15 novembre 2001, Duales System Deutschland/Commission, T‑151/01 R, Rec. p. II‑3295, point 188, et du 25 juin 2002, B/Commission, T‑34/02 R, Rec. p. II‑2803, point 86].

98. Il est également de jurisprudence bien établie qu’un préjudice d’ordre financier ne peut, sauf circonstances exceptionnelles, être regardé comme irréparable ou même difficilement réparable, dès lors qu’il peut normalement faire l’objet d’une compensation financière ultérieure [ordonnance du président de la Cour du 11 avril 2001, Commission/Cambridge Healthcare Supplies, C‑471/00 P(R), Rec. p. I‑2865, point 113 ; ordonnance du président du Tribunal du 15 juin 2001, Bactria/Commission, T‑339/00 R, Rec. p. II‑1721, point 94].

99. La mesure provisoire sollicitée ne se justifie que s’il apparaît que, en l’absence d’une telle mesure, le requérant se trouverait dans une situation susceptible de mettre en péril son existence avant l’intervention de l’arrêt mettant fin à la procédure au principal (ordonnance du président du Tribunal du 3 décembre 2002, Neue Erba Lautex/Commission, T‑181/02 R, Rec. p. II‑5081, point 84). L’imminence de la disparition du marché constituant effectivement un préjudice tant irrémédiable que grave, l’adoption de la mesure provisoire demandée apparaît justifiée dans une telle hypothèse.

100. S’il a également été tenu compte du fait que, en l’absence de la mesure provisoire sollicitée, les parts de marché du requérant seraient modifiées de manière irrémédiable [ordonnances du président du Tribunal du 30 juin 1999, Pfizer Animal Health/Conseil, T‑13/99 R, Rec. p. II‑1961, point 138 ; Solvay Pharmaceuticals/Conseil, point 71 supra, point 107, et Du Pont de Nemours (France) e.a./Commission, point 40 supra, point 175], il doit être précisé que ce cas de figure ne saurait être mis sur un pied d’égalité avec celui du risque de la disparition du marché et justifier l’adoption de la mesure provisoire demandée que si la modification irrémédiable des parts de marché présente aussi un caractère grave. Il ne suffit donc pas qu’une part de marché, aussi minime soit-elle, risque d’être irrémédiablement perdue, mais il importe que cette part de marché soit suffisamment importante. Un requérant qui se prévaut de la perte d’une telle part de marché doit démontrer, en outre, que la reconquête d’une fraction appréciable de celle-ci, notamment par des mesures appropriées de publicité, est impossible en raison d’obstacles de nature structurelle ou juridique (voir, en ce sens, ordonnance Commission/Cambridge Healthcare Supplies, point 98 supra, points 110 et 111, et ordonnance du président du Tribunal du 26 février 2007, Sumitomo Chemical Agro Europe/Commission, T‑416/06 R, non publiée au Recueil, points 59 et 60).

101. C’est à la lumière de ces considérations qu’il y a lieu d’examiner les éléments avancés par les requérantes pour établir que Cheminova A/S subira un préjudice grave et irréparable si le sursis à l’exécution de la décision attaquée n’est pas ordonné. Dans ce contexte, il importe de rappeler que l’argumentation relative aux requérantes Lodi, Cheminova Agro Italia, Cheminova Bulgaria et Agrodan doit être écartée de cet examen (voir point 64 ci-dessus).

102. Il convient de vérifier, tout d’abord, si le préjudice allégué peut être qualifié de grave au regard, notamment, de la taille et du chiffre d’affaires de l’entreprise ainsi que des caractéristiques du groupe auquel elle appartient [voir ordonnance Cosmos-Tank e.a./Commission, point 91 supra, point 26 ; ordonnance Du Pont de Nemours (France) e.a./Commission, point 40 supra, points 196 et 203, et la jurisprudence citée].

103. À cet égard, les requérantes indiquent que le chiffre d’affaires moyen au cours des trois années 2004, 2005 et 2006 du groupe auquel appartient Cheminova s’élevait à 5,248 milliards de couronnes danoises (DKK), soit plus de 700 millions d’euros. Selon les requérantes, la gravité du préjudice est établie, notamment, par le fait que le chiffre d’affaires réalisé avec le malathion au cours de l’année 2006 s’est élevé à près de [ confidentiel ] millions d’euros, « ce qui représente [ confidentiel ] % du chiffre d’affaires total des requérantes Cheminova ». Elles précisent que « [ confidentiel ] % de ce chiffre d’affaires a été réalisé sur le marché de l’Union européenne ».

104. Il en résulte que, selon les chiffres présentés par les requérantes, le préjudice annuel causé par la décision attaquée sur le marché communautaire s’élèverait à moins de 1 % du chiffre d’affaires de leur groupe.

105. Or, la valeur probante des éléments sur lesquels est fondé ce chiffre de moins de 1 % est nettement affaiblie par le fait que les chiffres fournis par les requérantes doivent être relativisés, et ce pour deux raisons.

106. D’une part, les pourcentages mentionnés dans la demande en référé ont été calculés par rapport au chiffre d’affaires réalisé par les quatre requérantes Cheminova, alors qu’ils auraient dû l’être par rapport à celui, plus important, du groupe auquel celles-ci appartiennent. D’autre part, ainsi qu’il a été jugé ci-dessus (points 64 et 101), seuls les éléments concernant Cheminova A/S peuvent être pris en considération pour établir l’urgence. Or, les données présentées dans la demande en référé sont relatives aux quatre requérantes Cheminova et ne permettent pas d’identifier les chiffres pertinents pour Cheminova A/S, alors que ces chiffres auraient dû figurer dans le texte même de la demande en référé (voir point 66 ci-dessus).

107. Il s’ensuit que les éléments chiffrés fournis par les requérantes concernant le préjudice subi sur le marché communautaire n’apparaissent pas suffisamment précis pour établir l’urgence pour Cheminova A/S.

108. À titre surabondant, en évaluant approximativement le préjudice annuel causé à la seule Cheminova A/S par la décision attaquée sur le marché communautaire, on arriverait à un ordre de grandeur considérablement inférieur à celui de moins de 1 % du chiffre d’affaires du groupe Cheminova.

109. Dans la mesure où les requérantes invoquent une diminution de leurs ventes dans des États non membres de la Communauté comme une conséquence de la décision attaquée du fait que certains pays tiers suivraient la réglementation communautaire, il convient de constater qu’un tel comportement n’est pas allégué en ce qui concerne le marché des États-unis et celui du Canada, sur lesquels les requérantes vendent, selon le rapport Deloitte & Touche, [ confidentiel ] % de leurs produits à base de malathion. Aux termes mêmes de ce rapport, ces deux marchés ne seront probablement pas du tout affectés par la non-inscription du malathion à l’annexe I de la directive. Par conséquent, le prétendu impact négatif de la décision attaquée sur les ventes dans des pays tiers est déjà considérablement réduit, selon les propres éléments fournis par les requérantes.

110. S’agissant des autres pays tiers dans lesquels elles prétendent commercialiser des produits à base de malathion, les requérantes n’ont pas établi que la mesure provisoire sollicitée, à supposer qu’elle soit accordée, empêcherait les autorités des pays concernés d’interdire la commercialisation du malathion sur leur territoire. Des lors, elles n’ont pas démontré que le sursis à l’exécution de la décision attaquée serait de nature à empêcher la réalisation du préjudice allégué. En tout état de cause, une telle interdiction de commercialiser le malathion serait la conséquence directe non pas de la décision attaquée, mais d’une décision prise par les autorités de chaque pays tiers dans l’exercice de leur pouvoir souverain (voir, en ce sens, ordonnance du 30 juin 1999, Pfizer Animal Health/Conseil, point 100 supra, point 160).

111. L’invocation par les requérantes de l’article 5 de la convention de Rotterdam (voir point 84 ci-dessus) n’est pas davantage de nature à établir, à suffisance de droit, que l’obligation d’information et de notification incombant à la Communauté en vertu de cette disposition puisse causer à Cheminova A/S un préjudice prévisible et chiffrable dans un pays tiers donné pendant la durée de la procédure au principal. Si les requérantes ont signalé que le malathion vient d’être inscrit, en vertu du règlement (CE) n o  1376/2007 de la Commission, du 23 novembre 2007, modifiant l’annexe I du règlement (CE) n o  304/2003 du Parlement européen et du Conseil concernant les exportations et importations de produits chimiques dangereux (JO L 307, p. 14), dans la partie 1 de l’annexe I de ce règlement n o  304/2003, qui met en œuvre la convention de Rotterdam, il suffit de constater que, aux termes de l’article 7, paragraphe 1, du règlement n o  304/2003, cette inscription a pour seule conséquence d’instaurer une obligation d’information vis-à-vis d’éventuels pays importateurs. Par conséquent, les requérantes n’ont pas démontré que le mécanisme de la convention de Rotterdam entraînerait directement et inévitablement des pertes de ventes de produits à base de malathion sur le marché de pays tiers déterminés. Au contraire, elles ont admis, en réponse à une question posée par le juge des référés, qu’il incombait au seul pays tiers de décider de l’importation ou non des produits concernés.

112. Les requérantes soutiennent encore qu’une décision de non-inscription, telle la décision attaquée, est généralement suivie de la fixation de nouvelles TMR pour la substance en question dans les produits d’origine végétale, ce qui reviendrait en pratique à interdire les importations dans la Communauté de récoltes ou de produits traités avec du malathion hors de la Communauté et susciterait des doutes dans l’esprit de clients des pays tiers. En réponse à une question posée par le juge des référés, elles ont précisé que le lien entre la décision attaquée et la fixation des TMR consistait en l’atteinte de la vente dans des pays tiers des produits à base de malathion.

113. À cet égard, s’agissant des prétendus effets négatifs de nouvelles TMR sur le commerce avec des pays tiers, il est constant que les requérantes vendent [ confidentiel ] % de leurs produits à base de malathion sur les marchés des États-unis et du Canada. Or, aux termes mêmes du rapport Deloitte & Touche, ces deux marchés ne seront probablement pas du tout affectés par la problématique des TMR. En ce qui concerne les autres marchés, il suffit de rappeler qu’il incombera aux seuls pays tiers concernés de décider de l’importation ou non des produits à base de malathion (voir points 110 et 111 ci-dessus).

114. De même, sur le marché communautaire, si la décision attaquée pouvait effectivement entraîner la fixation de nouvelles TMR pour le malathion, le préjudice prétendument subi à cause de ces TMR ne serait pas une conséquence directe de la décision attaquée. En effet, ainsi que les requérantes l’ont admis, la procédure communautaire de fixation des TMR est indépendante de la non-inscription du malathion à l’annexe I de la directive. Par ailleurs, les requérantes n’ont pas démontré, à suffisance de droit, que la non-inscription du malathion à l’annexe I de la directive reviendrait inéluctablement à interdire, en raison de nouvelles TMR plus strictes, les importations dans la Communauté de produits traités avec cette substance. Elles n’ont, notamment, pas exposé les raisons qui empêcheraient le législateur communautaire de fixer, en vue de faciliter les échanges internationaux, des « tolérances d’importation » permettant l’importation d’aliments et de produits d’origine végétale affectés des anciens TMR pour le malathion.

115. Il s’ensuit que les allégations des requérantes concernant la problématique des TMR sont dénuées de pertinence pour démontrer la gravité du préjudice prétendument causé à Cheminova A/S par la décision attaquée.

116. Dans la mesure où les requérantes se réfèrent à un « projet colza » dans le cadre duquel Cheminova A/S aurait envisagé de fournir du malathion au secteur du colza, en prévoyant d’augmenter significativement le chiffre d’affaires et les bénéfices réalisés avec ses produits à base de malathion, il suffit de relever que le manque à gagner invoqué dans ce contexte repose sur de pures espérances, la demande en référé ne faisant état d’aucun contrat, ou avant-contrat, de livraison signé ayant pour objet la mise en œuvre par Cheminova A/S de ce projet, dont l’exécution aurait été compromise par la décision attaquée. Le « projet colza » ne s’est donc pas encore concrétisé au point de pouvoir être considéré comme un acquis de Cheminova A/S.

117. Le préjudice invoqué en rapport avec le « projet colza » doit donc être qualifié d’hypothétique. Or, un préjudice de nature purement hypothétique, en ce qu’il dépend de la survenance d’événements futurs et incertains, ne saurait justifier l’octroi de mesures provisoires (ordonnances du président du Tribunal Government of Gibraltar/Commission, point 45 supra, point 101, et du 3 février 2004, Enviro Tech Europe et Enviro Tech International/Commission, T‑422/03 R, Rec. p. II‑469, point 65). Par conséquent, les allégations effectuées par les requérantes dans ce contexte ne sont pas davantage de nature à établir la gravité du préjudice prétendument causé à Cheminova A/S par la décision attaquée.

118. S’agissant du préjudice causé par la privation des droits à la protection des données prétendument conférée par l’article 13 de la directive, force est de constater que les requérantes se sont abstenues de chiffrer, dans la demande en référé, cet élément du préjudice résultant de la non-inscription du malathion à l’annexe I de la directive, sans pour autant soutenir qu’un tel chiffrage serait impossible. L’affirmation relative à la protection des données doit donc également être rejetée.

119. Il résulte de ce qui précède qu’aucun des éléments avancés pour établir la gravité du préjudice subi par Cheminova A/S ne peut être retenu.

120. En outre, ce préjudice, évalué approximativement à moins de 1 % du chiffre d’affaires du groupe Cheminova (voir point 108 ci-dessus), doit encore faire l’objet de déductions, étant donné que les requérantes ont admis être en mesure de compenser une partie de leurs ventes de produits à base de malathion par la vente d’autres produits qu’elles fabriquent ou qu’elles sont autorisées à commercialiser, en précisant que [ confidentiel ] % des utilisations perdues seraient susceptibles d’être récupérées en Espagne par des ventes de produits de substitution figurant dans la gamme de produits des requérantes.

121. Ces constatations suffisent pour conclure que le préjudice causé à Cheminova A/S par la décision attaquée s’élèverait, en tout état de cause, à nettement moins de 1 % du chiffre d’affaires du groupe Cheminova et ne saurait donc être considéré comme étant grave, sans même qu’il soit nécessaire d’identifier chacun des produits de substitution et les déductions à effectuer, ce qui serait d’ailleurs impossible en l’absence de chiffres se rapportant à Cheminova A/S seulement.

122. Cette conclusion n’est pas remise en cause par une appréciation de l’ensemble des circonstances factuelles invoquées par les requérantes, notamment la circonstance que Cheminova A/S a commencé à produire le malathion en 1968 sous la marque Fyfanon®™, est devenue, en 1991, le principal fabricant de malathion, a donc été présente sur le marché du malathion durant environ 40 années et bénéficie d’autorisations de commercialisation de produits phytopharmaceutiques à base de malathion pour de nombreux usages dans dix États membres de la Communauté. En effet, ces considérations historiques ne sauraient être prises en considération dès lors qu’il ne s’en dégage aucune donnée économique et financière chiffrée dont il pourrait être tenu compte pour évaluer le préjudice susceptible de justifier l’octroi d’une mesure provisoire.

123. Par ailleurs, les requérantes n’ont pas établi, à suffisance de droit, que le préjudice évalué approximativement ci-dessus puisse être considéré comme étant irréparable.

124. À cet égard, il suffit de constater que, si les requérantes soutiennent qu’elles risquent de perdre les parts de marché et la réputation acquises par le malathion dans la Communauté, elles n’ont pas réussi à établir, à suffisance de droit, qu’il serait impossible pour Cheminova A/S de reconquérir cette réputation et ces parts de marché perdues, dans l’hypothèse où la décision attaquée serait annulée à l’issue de la procédure au principal. En effet, les éléments du dossier en référé ne permettent pas de conclure que ces pertes seraient irrémédiables et qu’il ne serait pas possible pour le malathion de reconquérir sa position antérieure.

125. D’une part, les requérantes soulignent elles-mêmes qu’il sera impossible d’obtenir, d’un point de vue technique, une substituabilité du malathion qui soit parfaite et sans défaut. D’autre part, elles relèvent qu’un des principaux avantages de malathion est qu’il dispose d’un large spectre d’action et qu’il peut être vendu au cultivateur à un prix relativement modique. Enfin, elles ont expressément attiré l’attention sur les déclarations de trois organismes représentatifs de leur clientèle en Europe qui soulignent l’importance du malathion, son caractère indispensable dans la palette des outils chimiques destinés à combattre les insectes nuisibles et à éviter le développement de résistances, ainsi que les conséquences économiques néfastes de la non-inscription du malathion à l’annexe I de la directive.

126. Il s’ensuit que les qualités du malathion sont apparemment très appréciées de la clientèle des requérantes et qu’il n’existe pas de parfait produit de substitution. Ces éléments plaident aussi pour la possibilité d’un retour sur le marché du malathion dans l’hypothèse où la décision attaquée ne ferait pas l’objet d’un sursis à exécution et serait annulée par l’arrêt au principal.

127. Cette conclusion est confirmée par les résultats d’une étude réalisée auprès de certains de leurs principaux clients et portant sur l’éventualité d’un retour sur le marché du malathion à la suite d’une nouvelle autorisation de cette substance. En effet, aucun des clients questionnés n’a catégoriquement exclu toute possibilité d’une reconquête par le malathion des parts de marché perdues.

128. À cet égard, il convient de préciser que l’un des neuf clients a admis, sans réserves, la possibilité d’un retour sur le marché du malathion. Si un autre client a déclaré qu’un tel retour apparaissait difficile parce que le marché aurait été conquis en partie par d’autres produits, la force probante de cette réponse est affaiblie du fait qu’elle a été fournie par Lodi, partie requérante, qui ne saurait guère être qualifiée de source d’information objective, en ce qu’elle soutient précisément, dans le cadre de la présente procédure, qu’une reconquête par le malathion de sa position antérieure sera impossible. Un troisième client a répondu que, si les produits de substitution et le malathion étaient comparables en termes d’efficacité et de prix, il serait difficile d’imaginer que les agriculteurs réutilisent le malathion. Ce client a toutefois ajouté qu’il vendrait à nouveau le malathion en cas de retour sur le marché. Les autres clients ont envisagé un retour du malathion sur le marché sous des conditions tenant à l’efficacité du produit et à la compétitivité de son prix.

129. Or, les requérantes n’ont pas affirmé que le malathion était moins efficace que les produits de substitution qui auront conquis les parts de marché perdues en raison de la décision attaquée. S’agissant du niveau de prix, les requérantes ont elles-mêmes fait état d’une marge bénéficiaire relativement élevée sur certains de leurs produits à base de malathion, à savoir [ confidentiel ] %, ce qui pourrait leur permettre de pratiquer des baisses de prix afin de soutenir la réintroduction sur le marché de ces produits.

130. Il s’ensuit que, si une reconquête par le malathion des parts de marché perdues en raison de la décision attaquée peut être économiquement et financièrement assez onéreuse, un tel retour sur le marché, en ce compris le rétablissement de la réputation du malathion, n’apparaît pas impossible (voir, en ce sens, ordonnance du 30 juin 1999, Pfizer Animal Health/Conseil, point 100 supra, points 161 à 165).

131. Le préjudice prétendument subi par Cheminova A/S du fait de la décision attaquée ne saurait donc être considéré comme étant irréparable, sans qu’il soit nécessaire d’examiner les autres questions, notamment de substituabilité, soulevées dans le contexte de l’urgence.

132. Il résulte de tout ce qui précède que les requérantes ne démontrent pas, en l’état actuel, que Cheminova A/S subirait un préjudice grave et irréparable si le sursis à exécution demandé n’était pas octroyé.

133. En conséquence, la demande en référé doit être rejetée pour défaut d’urgence, sans qu’il soit nécessaire d’examiner si les autres conditions d’octroi du sursis à exécution sont remplies.

(1) .

(1) – Données confidentielles occultées.

Dispositif

Par ces motifs,

LE PRÉSIDENT DU TRIBUNAL

ordonne :

1) La demande en référé est rejetée.

2) Les dépens sont réservés.

Fait à Luxembourg, le 4 décembre 2007.