ARRÊT DU TRIBUNAL (huitième chambre)

3 septembre 2009 ( *1 )

«Produits phytopharmaceutiques — Substance active ‘malathion’ — Non-inscription à l’annexe I de la directive 91/414/CEE — Recours en annulation — Qualité pour agir — Recevabilité — Procédure d’évaluation — Évaluation par l’ EFSA — Exception d’illégalité — Article 20 du règlement (CE) no 1490/2002 — Présentation de nouvelles études — Article 8, paragraphes 2 et 5, du règlement (CE) no 451/2000 — Confiance légitime — Proportionnalité — Égalité de traitement — Principe de bonne administration — Droits de la défense — Principe de subsidiarité — Article 95, paragraphe 3, CE, article 4, paragraphe 1, et article 5, paragraphe 1, de la directive 91/414»

Dans l’affaire T-326/07,

Cheminova A/S, établie à Harboøre (Danemark),

Cheminova Agro Italia Srl, établie à Rome (Italie),

Cheminova Bulgaria EOOD, établie à Sofia (Bulgarie),

Agrodan, SA, établie à Madrid (Espagne),

Lodi SAS, établie à Grand-Fougeray (France),

représentées par Mes C. Mereu et K. Van Maldegem, avocats, et M. P. Sellar, solicitor,

parties requérantes,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par MM. B. Doherty et L. Parpala, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet l’annulation de la décision 2007/389/CE de la Commission, du 6 juin 2007, concernant la non-inscription du malathion à l’annexe I de la directive 91/414/CEE du Conseil et le retrait des autorisations de produits phytopharmaceutiques contenant cette substance (JO L 146, p. 19),

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (huitième chambre),

composé de Mme M. E. Martins Ribeiro (rapporteur), président, MM. S. Papasavvas et A. Dittrich, juges,

greffier: Mme K. Pocheć, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 15 janvier 2009,

rend le présent

Arrêt

Cadre juridique

1

La directive 91/414/CEE du Conseil, du 15 juillet 1991, concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques (JO L 230, p. 1), établit le régime communautaire applicable à l’autorisation et au retrait de l’autorisation de mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques.

2

L’article 2, point 1, de la directive 91/414 définit les produits phytopharmaceutiques comme étant les substances actives et les préparations contenant une ou plusieurs substances actives et qui sont destinées, notamment, à protéger les végétaux ou les produits végétaux contre tous les organismes nuisibles ou à prévenir leur action. L’article 2, point 4, de la directive 91/414 définit les substances actives comme étant des substances ou micro-organismes exerçant une action générale ou spécifique sur les organismes nuisibles ou sur les végétaux, parties de végétaux ou produits végétaux.

3

L’article 4, paragraphe 1, de la directive 91/414 prévoit:

«Les États membres veillent à ce qu’un produit phytopharmaceutique soit autorisé uniquement:

a)

si les substances actives sont énumérées à l’annexe I [de la directive 91/414] et si les conditions fixées à ladite annexe sont remplies […];

b)

s’il est établi, compte tenu des connaissances scientifiques et techniques, […] [que] iv) il n’a pas d’effet nocif direct ou indirect sur la santé humaine ou animale […] [et que] v) il n’a pas d’influence inacceptable sur l’environnement […]

[…]»

4

Aux termes de l’article 5, paragraphe 1, de la directive 91/414:

«Compte tenu de l’état des connaissances scientifiques et techniques, une substance active est inscrite à l’annexe I pour une période initiale ne pouvant excéder dix ans, s’il est permis d’escompter que les produits phytopharmaceutiques contenant cette substance active rempliront les conditions suivantes:

a)

leurs résidus consécutifs à une application conforme aux bonnes pratiques phytosanitaires n’ont pas d’effets nocifs sur la santé humaine ou animale ou sur les eaux souterraines ou d’influence inacceptable sur l’environnement et, dans la mesure où ils sont significatifs du point de vue toxicologique ou environnemental, peuvent être mesurés par des méthodes d’usage courant;

b)

leur utilisation consécutive à une application conforme aux bonnes pratiques phytosanitaires n’a pas d’effet nocif sur la santé humaine ou animale ou d’influence inacceptable sur l’environnement, conformément à l’article 4, paragraphe 1, [sous] b), iv) et v).»

5

Les substances actives qui ne sont pas inscrites à l’annexe I de la directive 91/414 peuvent bénéficier, dans certaines conditions, d’un régime dérogatoire transitoire. Selon l’article 8, paragraphe 2, de la directive 91/414, un État membre pouvait, pendant une période de douze ans à compter de la date de notification de la directive 91/414, autoriser la mise sur son marché national de produits phytopharmaceutiques contenant des substances actives non visées à l’annexe I, qui étaient déjà sur le marché deux ans après la date de notification de la directive 91/414, soit le 25 juillet 1993. La Commission des Communautés européennes devait entamer un programme de travail pour l’examen graduel de ces substances actives. Par la suite, il pouvait être décidé que ladite substance serait ou non incluse à l’annexe I de la directive 91/414. Les États membres devaient assurer que les autorisations pertinentes, selon le cas, seraient accordées, retirées ou modifiées.

6

La Commission a entamé un programme de travail pour l’examen graduel des substances actives, dans le cadre duquel les parties intéressées souhaitant obtenir l’inscription de telles substances à l’annexe I devaient fournir à la Commission et aux États membres toutes les données nécessaires dans un délai déterminé.

7

Le règlement (CEE) no 3600/92 de la Commission, du 11 décembre 1992, établissant les modalités de mise en œuvre de la première phase du programme de travail visé à l’article 8, paragraphe 2, de la directive 91/414 (JO L 366, p. 10), a organisé la procédure d’évaluation pour une première série de substances en vue de leur inscription éventuelle à l’annexe I de la directive 91/414.

8

Ensuite, par son règlement (CE) no 451/2000, du 28 février 2000, établissant les modalités de mise en œuvre des deuxième et troisième phases du programme de travail visé à l’article 8, paragraphe 2, de la directive 91/414 (JO L 55, p. 25), la Commission a prévu l’évaluation d’une deuxième et d’une troisième série de substances actives en vue de leur inscription éventuelle à l’annexe I de la directive 91/414.

9

Parmi les substances actives faisant partie de la deuxième série figure le malathion — objet de la présente procédure —, un produit antiparasitaire utilisé, principalement dans l’agriculture, pour lutter contre divers insectes sur une vaste gamme de plantes agricoles et horticoles, ainsi que pour lutter contre les moustiques, les mouches et les insectes de maison.

10

La procédure instituée par le règlement no 451/2000 débute par une notification d’intérêt, prévue à son article 4, paragraphe 1, qui devait être adressée, par le producteur souhaitant obtenir l’inscription à l’annexe I de la directive 91/414, pour le 31 août 2000 au plus tard, à l’État membre rapporteur (ci-après l’«EMR») désigné à l’annexe I dudit règlement, à savoir la République de Finlande en ce qui concerne le malathion.

11

En vertu de l’article 6, paragraphe 1, du règlement no 451/2000, il appartient à chaque auteur d’une notification de transmettre à l’EMR un dossier sommaire et un dossier complet, tels que définis à l’article 6, paragraphes 2 et 3, de ce même règlement.

12

Le délai pour la soumission de ces dossiers, ainsi que pour la soumission d’informations pertinentes pouvant contribuer à l’évaluation des substances actives, a été fixé au 30 avril 2002, en vertu des dispositions combinées de l’article 5, paragraphe 4, sous c) et d), du règlement no 451/2000 et de l’article 2 du règlement (CE) no 703/2001 de la Commission, du , fixant les substances actives des produits phytopharmaceutiques qui doivent être évaluées au cours de la deuxième phase du programme de travail visé à l’article 8, paragraphe 2, de la directive 91/414 et modifiant la liste des États membres désignés comme rapporteurs pour ces substances (JO L 98, p. 6).

13

Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, du règlement no 451/2000, l’EMR est tenu de présenter à la Commission, au plus tard six mois après réception de tous les dossiers relatifs à une substance active, un rapport sur le caractère complet des dossiers transmis. Pour les substances actives faisant l’objet d’un dossier considéré comme complet, l’EMR procède à l’évaluation du dossier.

14

Conformément à l’article 8, paragraphe 1, du règlement no 451/2000, dans sa rédaction initiale, l’EMR devait présenter à la Commission, le plus rapidement possible et au plus tard douze mois après que le dossier avait été considéré comme complet, son rapport d’évaluation du dossier, qui contenait la recommandation d’inscrire la substance active à l’annexe I de la directive 91/414 ou de ne pas l’inscrire.

15

Les dispositions de l’article 8 du règlement no 451/2000 ont été modifiées par l’article 20 du règlement (CE) no 1490/2002 de la Commission, du 14 août 2002, établissant des modalités supplémentaires de mise en œuvre de la troisième phase du programme de travail visé à l’article 8, paragraphe 2, de la directive 91/414 et modifiant le règlement no 451/2000 (JO L 224, p. 23), en accordant un rôle à l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA).

16

Ainsi, l’EMR — tout en recommandant à la Commission d’inscrire la substance active à l’annexe I de la directive 91/414 ou de ne pas l’inscrire — doit, conformément à l’article 8, paragraphe 1, du règlement no 451/2000, tel que modifié, adresser un projet de rapport d’évaluation (ci-après le «PRE») du dossier à l’EFSA «dans les meilleurs délais et au plus tard douze mois après que le dossier a été jugé complet». À ce stade de la procédure, l’article 8, paragraphe 2, du règlement no 451/2000, tel que modifié, prévoit que «la soumission de nouvelles études n’est [en principe] pas acceptée [mais que l’EMR] peut inviter les notifiants à soumettre des données complémentaires, nécessaires à la clarification du dossier [… et qu’il] définit alors un délai pour la soumission de ces informations».

17

Selon l’article 8, paragraphe 5, premier alinéa, du règlement no 451/2000, tel que modifié, «[l’EFSA] transmet le [PRE] du rapporteur aux États membres et peut organiser une consultation d’experts à laquelle participe l’[EMR]». À ce stade de la procédure, l’article 8, paragraphe 5, second alinéa, du règlement no 451/2000, tel que modifié, précise:

«Sans préjudice de l’article 7 de la directive 91/414 […], la soumission de nouvelles études ne sera pas acceptée. L’[EMR] peut, en accord avec l’[EFSA], inviter les notifiants à soumettre, dans des délais spécifiés, des données complémentaires que l’[EMR] ou l’[EFSA] juge nécessaires à la clarification du dossier.»

18

Conformément à l’article 8, paragraphe 7, du règlement no 451/2000, tel que modifié, «[l’EFSA] évalue le [PRE] du rapporteur et transmet à la Commission un avis sur la conformité de la substance active aux exigences de sécurité de la directive 91/414 […] dans un délai d’un an après la réception du [PRE] de l’[EMR]». En vertu de cette même disposition, «[l]e cas échéant, l’[EFSA] formule un avis sur les options considérées comme satisfaisant aux exigences de sécurité».

19

L’article 8, paragraphe 8, du règlement no 451/2000, tel que modifié, dispose que, «[a]u plus tard six mois après la réception de l’avis de l’[EFSA]», la Commission propose, selon le cas, un projet de directive visant l’inscription de ladite substance à l’annexe I de la directive 91/414 ou un projet de décision refusant l’inscription de la substance active à l’annexe I de la directive 91/414 et visant le retrait, par les États membres, des autorisations de mise sur le marché de produits phytopharmaceutiques contenant cette substance.

20

L’acte final est adopté conformément à la procédure dite de «comitologie» prévue par les dispositions combinées de la décision 1999/468/CE du Conseil, du 28 juin 1999, fixant les modalités de l’exercice des compétences d’exécution conférées à la Commission (JO L 184, p. 23), de l’article 19 de la directive 91/414 et de l’article 2, sous b), du règlement no 1490/2002, c’est-à-dire sur avis du comité permanent de la chaîne alimentaire et de la santé animale.

21

Enfin, la période de douze ans prévue à l’article 8, paragraphe 2, de la directive 91/414 a été prolongée par l’article 1er du règlement (CE) no 1335/2005 de la Commission, du 12 août 2005, modifiant le règlement (CE) no 2076/2002 et les décisions 2002/928/CE, 2004/129/CE, 2004/140/CE, 2004/247/CE et 2005/303/CE en ce qui concerne la période visée à l’article 8, paragraphe 2, de la directive 91/414 et le maintien de l’utilisation de certaines substances non énumérées à son annexe I (JO L 211, p. 6), jusqu’au pour les substances actives qui sont évaluées dans le cadre de la deuxième phase prévue au règlement no 451/2000.

Antécédents du litige

22

La requérante Cheminova A/S est une société danoise fondée en 1938 dont l’activité consiste principalement à fabriquer et à commercialiser des produits phytopharmaceutiques. Elle commercialise ses produits de deux manières: soit elle les vend sur le marché communautaire directement à des clients en utilisant ses propres autorisations nationales, soit elle choisit de les vendre par l’intermédiaire de filiales, telles Cheminova Agro Italia Srl, Cheminova Bulgaria EOOD et Agrodan, SA, également requérantes dans la présente affaire, ou de clients. Dans ce second cas, ces filiales et clients peuvent également détenir des autorisations nationales.

23

La requérante Lodi SAS est une société française spécialisée dans la fabrication et la vente d’insecticides. Elle est titulaire, en France, d’autorisations de commercialisation pour plusieurs produits à base de malathion.

24

Le 24 août 2000, Cheminova a notifié à la Commission son souhait d’obtenir l’inscription du malathion à l’annexe I de la directive 91/414. La Commission a accepté cette notification et inscrit le nom de Cheminova dans la liste des «auteurs de notification».

25

Le 25 avril 2002, Cheminova a soumis à l’EMR son dossier sommaire et son dossier complet (ci-après le «dossier notifié»), en demandant une évaluation de l’utilisation du malathion pour quatre types de culture: les pommes, les fraises, l’alfalfa (une plante fourragère destinée à l’alimentation animale) et les plantes d’ornement (les plantes sous serres). Le , l’EMR a informé la Commission du caractère complet du dossier présenté par Cheminova.

26

L’EMR a procédé à l’évaluation du malathion et a soumis le PRE à l’EFSA le 2 février 2004. Dans le PRE, l’EMR recommandait l’inscription du malathion à l’annexe I de la directive 91/414 en limitant son utilisation aux plantes d’ornement sous serres.

27

Le 15 avril 2004, une copie du PRE a été transmise à Cheminova par l’EFSA.

28

Le 14 juin 2004, Cheminova a reçu un message électronique d’un représentant de la coordination ou du groupe de travail réunissant les experts intervenant dans le cadre de l’examen collégial mené par l’EFSA (ci-après l’«EPCO»), lui indiquant que, «si [elle] souhait[ait] que de nouvelles informations soient prises en considération, [elle] dev[ait] solliciter l’accord préalable de l’EMR en vue de l’acceptation des nouvelles études» et que, «[s]i l’EMR accept[ait] les nouvelles études, ils préparer[aient] un addendum qui sera[it] examiné en temps voulu».

29

Le 15 janvier 2005, l’EMR a soumis à l’EFSA un addendum au PRE.

30

Au cours de l’examen collégial mené par l’EFSA, deux sujets de préoccupation ont en particulier été relevés, à savoir l’un lié à la présence d’isomalathion dans le malathion et l’autre relatif aux effets de certains métabolites présentant une importance du point de vue toxicologique.

31

L’isomalathion constitue une impureté du malathion. Lorsqu’un composé chimique est produit en usine, il contient, en effet, toujours une faible proportion d’autres substances ou d’impuretés. La génotoxicité de l’isomalathion concerne le risque que la substance cause un dommage génétique héréditaire aux êtres humains qui y sont exposés. Le terme «mutagène» recouvre les mêmes notions que le terme «génotoxique».

32

Un métabolite est un composé chimique qui est généré lorsqu’un premier composé chimique est modifié par des processus qui se produisent dans l’environnement et par le métabolisme d’organismes vivants. Par exemple, si le malathion est utilisé sur les cultures, il entrera dans la chaîne alimentaire humaine soit indirectement (par le biais de l’alimentation du bétail ou de l’eau potable), soit directement par le biais des aliments consommés par une personne. De plus, la plante elle-même créera, à partir du malathion, différents produits de dégradation chimique auxquels l’être humain ou les animaux seront également exposés.

33

Il ressort du procès-verbal de la réunion des experts de l’EPCO, du 21 février 2005 (EPCO 18), que la question du risque de génotoxicité de l’isomalathion a été soulevée au cours de ladite réunion et qu’un manque de données à ce propos a été constaté.

34

La question du desméthyl de malathion en tant que métabolite a été évoquée lors de la réunion des experts de l’EPCO, du 23 février 2005 (EPCO 19). Au point 3.3 du compte rendu de ladite réunion, il est mentionné que «le desméthyl de malathion ne peut pas être considéré comme moins toxique que le malathion» et que «la réunion a décidé d’inclure le desméthyl de malathion dans la définition des résidus aux fins de l’évaluation des risques». De surcroît, il a été décidé qu’il existait «un nouveau manque de données», que «le notifiant d[evait] fournir des données […] concernant les teneurs en desméthyl de malathion des [produits de base agricole] et des produits transformés, sauf s’il [était] établi que le desméthyl de malathion ne présente pas d’importance du point de vue toxicologique» et que «le notifiant [devait] fournir des données concernant les propriétés toxicologiques du desméthyl de malathion».

35

Le 3 mars 2005, un représentant de l’EMR a envoyé un courriel à Cheminova rédigé en ces termes:

«Je me demande si vous disposez d’informations disponibles concernant les niveaux de desméthyl de malathion dans différentes commodités, parce que, avec cette information on pourrait au moins évaluer ses niveaux d’ingestion alimentaire.»

36

S’agissant du risque de génotoxicité de l’isomalathion, un message électronique du 11 mars 2005, envoyé par un représentant de l’EMR à Cheminova, fait état de ce qui suit:

«[…]

Si la spécification de 0,2% d’isomalathion est acceptée (ce qui sera le cas, pour autant que je dispose des informations les plus récentes de l’EFSA), il faudra réaliser un nouveau test Ames avec du malathion comprenant le niveau maximal de l’ensemble des impuretés. Si le résultat de ce test Ames est positif, il faudra réaliser un test cytogénétique in vivo. Actuellement, selon l’EFSA, aucune étude supplémentaire ne peut être acceptée. En conséquence, les exigences d’études sont enregistrées en tant que manque de données.

[…]»

37

Le 24 juin 2005, Cheminova a fait parvenir à l’EMR une proposition portant sur un nouveau test Ames. Le , elle a transmis à l’EMR la nouvelle étude relative au test Ames et ses résultats. La conclusion de l’étude énonce que «[l]a substance d’essai a été considérée comme non mutagène dans les conditions du présent test».

38

Le 7 octobre 2005, Cheminova a transmis à l’EMR un rapport «destiné à répondre aux sujets de préoccupation relatifs au métabolite desméthyl de malathion».

39

Le 18 octobre 2005, l’EMR a envoyé un courriel à Cheminova par lequel il lui a confirmé que le résultat du nouveau test Ames soumis en août 2005 était «négatif», que l’étude était «acceptable» et que «[l]’évaluation de l’étude [serait] envoyée à l’EFSA».

40

Le 26 octobre 2005, l’EMR a soumis un nouvel addendum au PRE indiquant que «[l]e malathion technique n’était pas mutagène dans les conditions du [nouveau] test [Ames]» et que l’étude était «acceptable».

41

Par courrier électronique du 7 novembre 2005, Cheminova a demandé à l’EFSA que la question de la toxicité de l’isomalathion soit traitée au niveau des États membres, après l’inscription du malathion à l’annexe I de la directive 91/414. Elle a également fourni dans ledit courrier des explications au sujet de la toxicité du desméthyl de malathion.

42

Par courrier électronique du 24 novembre 2005, Cheminova a adressé à l’EMR une étude de toxicité portant sur le desméthyl de malathion.

43

Le 13 janvier 2006, l’EFSA a présenté à la Commission ses «conclusions relatives à l’examen collégial de l’évaluation des risques de la substance active malathion utilisée en tant que pesticide» (ci-après le «rapport de l’EFSA»).

44

Concernant les risques de génotoxicité, il est expliqué au point 2.4 du rapport de l’EFSA ce qui suit:

«Le malathion a fait l’objet d’un certain nombre d’études in vivo et in vitro.

Le test d’aberration chromosomique réalisé sur des lymphocytes humains ainsi que le test du lymphome réalisé sur des souris (les deux études remontent à 2001) ont été positifs, avec une teneur en isomalathion atteignant 0,14%. Un test UDS in vitro était négatif (0,2% d’isomalathion). Bien que le test Ames ait été négatif, un sujet de préoccupation relatif à la qualité a été évoqué, puisque aucune information sur la teneur en isomalathion n’avait été communiquée.

Une fréquence accrue de métaphases avec des aberrations chromosomiques a été observée en l’absence d’activation métabolique, dans le cadre du test d’aberration chromosomique réalisé sur des lymphocytes humains, mais cette fréquence accrue n’a plus été observée ultérieurement dans un deuxième test réalisé avec des concentrations moindres. Les deux tests in vivo réalisés sur des cultures de cellules somatiques étaient négatifs (la teneur en isomalathion s’élevait à 0,2%).

Les experts ont estimé que les résultats positifs observés lors des tests in vitro pouvaient être imputables à de l’isomalathion et à d’autres impuretés, comme certaines études publiées l’indiquent. Toutefois, les effets positifs évoqués dans les études publiées ont fait l’objet d’une discussion lors de la réunion: toutes les données disponibles corroborent la conclusion selon laquelle il n’y aurait pas de risque de génotoxicité in vivo. Le PRE ne fournit aucune information sur le risque de génotoxicité de l’isomalathion. En ce qui concerne une teneur en isomalathion de 0,03%, les experts sont convenus qu’il n’existait pas de risque de génotoxicité. Toutefois, si la demande portant sur une teneur en isomalathion de 0,2% était maintenue, la réunion no 20 de l’EPCO a débouché sur la conclusion qu’un nouveau test Ames serait nécessaire (avec une teneur en isomalathion de 0,2%) ou qu’il faudrait identifier un manque de données. Si cette étude aboutissait à un résultat positif, il ne serait pas possible de fixer de valeurs limites et un test secondaire, un test UDS, serait nécessaire. Un nouveau test Ames avec 0,2% d’isomalathion a été produit en août 2005 et évalué par l’EMR, mais il n’a fait l’objet d’aucun examen collégial.»

45

Dans la partie intitulée «Conclusions et recommandations», le rapport de l’EFSA énonce qu’«[i]l convient de satisfaire à un besoin de données imposant la réalisation d’études complémentaires relatives à la génotoxicité, ainsi que de démontrer l’absence de risque de génotoxicité afin de répondre (d’un point de vue toxicologique) à l’exigence d’un niveau d’isomalathion dans le matériel technique de 0,2%». En conséquence, selon le rapport de l’EFSA, «jusqu’à ce que l’absence de génotoxicité de l’isomalathion ait été démontrée, l’évaluation du risque pour l’opérateur ne saurait être considérée comme concluante».

46

S’agissant des métabolites, il est recensé dans le rapport de l’EFSA quatre composés de ce type pouvant être d’une importance toxicologique, à savoir l’acide monocarboxylique de malathion (ci-après le «MMCA»), l’acide dicarboxylique de malathion (ci-après le «MDCA»), le desméthyl de malathion et le malaoxon. Dans le rapport de l’EFSA, il est constaté qu’aucune étude n’a été fournie par Cheminova pour ce qui concerne le MMCA et le MDCA. De même, le rapport de l’EFSA énonce qu’«aucune étude n’a été fournie par le notifiant au sujet du desméthyl de malathion (DMM)». Or, l’EFSA souligne à cet égard que «le DMM a été identifié dans des études relatives au métabolisme des rats (à faible dose, dans les urines de sujets mâles) et [que] les experts ont conclu que, en l’absence de données expérimentales, le DMM ne pourrait pas être considéré comme moins toxique que le malathion».

47

En outre, le rapport de l’EFSA indique, quant aux résidus, ce qui suit:

«[…]

Peu avant la deuxième discussion consacrée au malathion dans le cadre de la réunion d’évaluation, le demandeur a fourni à l’EFSA un rapport indiquant qu’il semblerait que des données et informations supplémentaires aient été obtenues et transmises à l’EMR en octobre 2005. Il convient de relever que, dans ce rapport, le demandeur met également en doute les résultats publiés dans une étude de métabolisme antérieurement considérée comme valide, ce qui impliquerait une réévaluation de l’étude en question. Cependant, en raison de la transmission particulièrement tardive de ces données, elles n’ont été ni évaluées ni soumises à un examen collégial et leur recevabilité est incertaine. En conséquence, la conclusion de la section relative aux résidus ne s’y réfère pas.

[…]»

48

Le rapport de l’EFSA mentionne encore:

«Des informations complémentaires sur l’importance toxicologique des métabolites de malathion sont nécessaires. Concernant le risque d’exposition des consommateurs, des manques de données ont été identifiés par la réunion d’experts sur les résidus […] En raison d’un manque de données suffisantes concernant le risque et/ou l’exposition des consommateurs eu égard aux résidus résultant de l’usage du malathion sur les cultures destinées à l’alimentation humaine/animale, l’évaluation des risques pour les consommateurs ne peut pas être achevée.»

49

Enfin, le rapport de l’EFSA apporte la confirmation suivante:

«L’évaluation du risque alimentaire aigu et chronique pour les consommateurs ne peut être achevée. Une évaluation correcte du risque n’est possible qu’après réception de données comblant les lacunes dénoncées pour le desméthyl de malathion et le malaoxon. De plus, la pertinence des métabolites MMCA et MDCA pour le risque pour le consommateur est actuellement peu claire […]»

50

Par courrier du 6 février 2006, la Commission a informé Cheminova de la «possibilité de présenter des observations» sur le rapport de l’EFSA. Dans ce courrier, la Commission souligne que «compte tenu des stricts délais imposés par la législation et de la répartition des compétences entre l’EFSA et la Commission, il n’est pas possible, à ce stade de la procédure, de prendre en considération de nouvelles données ou études, ni d’accepter que les indications d’usage fassent l’objet de modifications de manière à différer de celles ayant fait l’objet de l’évaluation».

51

Par lettre du 17 mars 2006, Cheminova a répondu au courrier de la Commission du . Dans cette lettre, elle a répondu aux sujets de préoccupation liés à la présence d’isomalathion dans le malathion et aux effets de certains métabolites présentant une importance du point de vue toxicologique. Elle a également demandé à la Commission «de bien vouloir tenir compte des éléments qu[‘elle] apport[ait] en ce qui concerne ces nouvelles questions […] puisque cela ne retardera[it] pas significativement le réexamen». Le , Cheminova a envoyé à la Commission des observations reprenant les questions évoquées dans son courrier du .

52

Par lettre du 5 septembre 2006, la Commission a accusé réception des observations que Cheminova lui avait envoyées le . Après avoir rappelé que «[l]es conclusions de l’EFSA […] constituaient la base scientifique pour la décision finale pour chaque substance», elle a ajouté qu’elle «vérifi[ait] chaque substance selon ses caractéristiques propres, en tenant compte de la nature de tout sujet de préoccupation subsistant, le cas échéant, avant d’adopter une décision finale».

53

Le 28 septembre 2006, le comité permanent de la chaîne alimentaire et de la santé animale a rendu un avis favorable à la non-inscription du malathion à l’annexe I de la directive 91/414.

Décision attaquée

54

Conformément à l’avis du comité permanent de la chaîne alimentaire et de la santé animale, la Commission a, le 6 juin 2007, adopté la décision 2007/389/CE concernant la non-inscription du malathion à l’annexe I de la directive 91/414 et le retrait des autorisations de produits phytopharmaceutiques contenant cette substance (JO L 146, p. 19, ci-après la «décision attaquée»), dont le dispositif se lit comme suit:

«Article premier

Le malathion n’est pas inscrit en tant que substance active à l’annexe I de la directive 91/414 […]

Article 2

Les États membres font en sorte:

a)

que les autorisations de produits phytopharmaceutiques contenant du malathion soient retirées pour le 6 décembre 2007;

b)

qu’aucune autorisation de produits phytopharmaceutiques contenant du malathion ne soit accordée ou reconduite à partir de la date de publication de la présente décision.

Article 3

Tout délai de grâce accordé par des États membres conformément aux dispositions de l’article 4, paragraphe 6, de la directive 91/414 […] est le plus court possible et expire au plus tard le 6 décembre 2008.

Article 4

Les États membres sont destinataires de la présente décision.»

55

La non-inscription du malathion en tant que substance active à l’annexe I de la directive 91/414 est justifiée dans la décision attaquée aux considérants 5 et 6 de celle-ci comme suit:

«(5)

Un certain nombre de sujets de préoccupation ont été identifiés au cours de l’évaluation de cette substance active. En raison de la présence dans le matériel technique de niveaux variables d’isomalathion, impureté qui contribue de manière importante au profil de toxicité du malathion et dont la génotoxicité ne peut être exclue, aucune conclusion ne peut être tirée quant au risque pour les opérateurs, les travailleurs et les personnes présentes. Par ailleurs, sur la base des informations disponibles, il n’a pas été démontré que l’exposition estimée des consommateurs résultant de l’ingestion aiguë et chronique de cultures comestibles est acceptable, en raison des informations insuffisantes sur les effets de certains métabolites toxicologiquement importants. En conséquence, il n’a pas été possible, sur la base des informations disponibles, de déterminer si le malathion satisfaisait aux conditions d’inscription à l’annexe I de la directive 91/414 […]

(6)

La Commission a invité l’auteur de la notification à lui présenter ses observations concernant les résultats de l’examen collégial et à lui faire savoir s’il avait l’intention de continuer à demander l’inscription de la substance à l’annexe. L’auteur de la notification a présenté des observations qui ont été examinées attentivement. Toutefois, en dépit des arguments avancés par l’auteur de la notification, les sujets de préoccupation évoqués plus haut subsistaient, et les évaluations effectuées sur la base des informations fournies et examinées lors des réunions des experts de l’EFSA n’ont pas démontré que, dans les conditions d’utilisation proposées, les produits phytopharmaceutiques contenant du malathion devraient satisfaire, d’une manière générale, aux conditions fixées à l’article 5, paragraphe 1, [sous] a) et b), de la directive 91/414 […]»

Procédure et conclusions des parties

56

Par requête déposée au greffe du Tribunal le 30 août 2007, les requérantes ont introduit un recours visant à l’annulation de la décision attaquée.

57

Par acte séparé, déposé au greffe du Tribunal le 5 septembre 2007, les requérantes ont introduit, en vertu des articles 242 CE et 243 CE, une demande visant à ce qu’il soit sursis à l’exécution de la décision attaquée et à ce que soit adoptée toute mesure provisoire appropriée.

58

Par ordonnance du 4 décembre 2007, Cheminova e.a./Commission (T-326/07 R, Rec. p. II-4877), le président du Tribunal a rejeté cette demande et a réservé les dépens. Le , les requérantes ont introduit un pourvoi contre ladite ordonnance que le président de la Cour a rejeté par l’ordonnance du , Cheminova e.a./Commission [C-60/08 P(R), non publiée au Recueil].

59

Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (huitième chambre) a décidé d’ouvrir la procédure orale et, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 64 de son règlement de procédure, a demandé aux requérantes la production d’un document. Les requérantes y ont déféré dans le délai imparti.

60

Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions posées par le Tribunal lors de l’audience du 15 janvier 2009.

61

À l’audience, les parties, à la demande du Tribunal, ont déposé une version complète du rapport de l’EFSA. Le Tribunal a, en outre, autorisé la Commission à joindre un document au dossier, à savoir un message électronique de l’EMR à Cheminova du 11 avril 2005. Les requérantes n’ont pas soulevé d’objections contre le versement de ce document au dossier.

62

Les requérantes concluent à ce qu’il plaise au Tribunal:

déclarer le recours recevable et bien fondé ou, à défaut, joindre au fond la décision sur la recevabilité;

annuler la décision attaquée;

condamner la Commission aux dépens.

63

La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal:

rejeter le recours comme irrecevable ou, à titre subsidiaire, comme non fondé;

condamner les requérantes aux dépens.

Sur la recevabilité

Arguments des parties

64

Les requérantes soutiennent que leur recours est recevable.

65

La Commission estime que Cheminova, en tant que notifiant en vertu de la directive 91/414, est directement et individuellement concernée par la décision attaquée. Toutefois, les autres requérantes ne seraient pas individuellement concernées. En effet, la circonstance d’être vendeur ou utilisateur de malathion ne suffirait pas à les individualiser au sens de l’article 230, quatrième alinéa, CE. Le recours serait donc partiellement irrecevable.

Appréciation du Tribunal

66

Force est de constater d’abord que la décision attaquée est adressée aux États membres. Toutefois, comme le souligne la Commission, Cheminova doit être considérée comme ayant qualité pour agir au sens de l’article 230, quatrième alinéa, CE. En effet, en tant qu’auteur de la notification au titre de l’article 4, paragraphe 1, du règlement no 451/2000 visant à l’inscription de la substance active «malathion» à l’annexe I de la directive 91/414, elle est directement et individuellement concernée par la décision attaquée dans laquelle la Commission refuse ladite inscription.

67

Le recours est donc recevable dans la mesure où il est introduit par Cheminova.

68

Or, selon une jurisprudence bien établie, s’agissant d’un seul et même recours, il n’y a pas lieu d’examiner la qualité pour agir des autres requérantes (arrêt de la Cour du 24 mars 1993, CIRFS e.a./Commission, C-313/90, Rec. p. I-1125, point 31; arrêts du Tribunal du , Verband der freien Rohrwerke e.a./Commission, T-374/00, Rec. p. II-2275, point 57, et du , Sun Chemical Group e.a./Commission, T-282/06, Rec. p. II-2149, point 50).

69

Il n’y a donc pas lieu, pour des raisons d’économie de procédure, d’examiner séparément la recevabilité du recours formé par Cheminova Agro Italia, Cheminova Bulgaria, Agrodan et Lodi.

Sur le fond

70

Les requérantes invoquent à l’appui de leur recours une exception d’illégalité en vertu de l’article 241 CE et dix moyens d’annulation. L’exception est tirée de l’illégalité de l’article 20 du règlement no 1490/2002. Les moyens d’annulation sont pris respectivement, le premier, de l’absence de base scientifique objective de la décision attaquée, le deuxième, d’une violation de l’article 95 CE, de l’article 4, paragraphe 1, et de l’article 5, paragraphe 1, de la directive 91/414, le troisième, d’une violation du principe de protection de la confiance légitime, le quatrième, d’une violation du principe de proportionnalité, le cinquième, d’une violation de l’article 8, paragraphe 7, du règlement no 451/2000, le sixième, d’une violation du «principe de non-discrimination», le septième, d’une violation du principe de bonne administration, le huitième, d’une violation des droits de la défense, le neuvième, d’une violation du principe de subsidiarité et de l’article 5 CE, et le dixième, d’une violation de l’article 13 de la directive 91/414.

Sur l’exception d’illégalité de l’article 20 du règlement no 1490/2002

Arguments des parties

71

Les requérantes relèvent que l’article 20 du règlement no 1490/2002, qui a été adopté le 14 août 2002, a apporté une modification sensible à leurs droits procéduraux et est venu contrecarrer leurs attentes légitimes en modifiant l’article 8 du règlement no 451/2000 de manière à imposer l’intervention de l’EFSA dans l’évaluation des substances actives relevant de la deuxième phase du programme de travail (comme le malathion) et en demandant à l’EFSA de donner un avis sur la conformité de la substance active aux exigences de sécurité de la directive 91/414 et sur l’inscription de ladite substance à l’annexe I de cette directive. Elles rappellent à cet égard que Cheminova avait déjà procédé à la notification du malathion en août 2000 et transmis à l’EMR son dossier complet en avril 2002.

72

L’article 20 du règlement no 1490/2002 devrait être déclaré illégal et inapplicable aux requérantes dès lors que cette disposition aurait été appliquée avec effet rétroactif à la procédure d’évaluation du malathion en cours. À cet effet, les requérantes soulignent que ni la directive 91/414, ni le règlement no 451/2000, ni l’article 20 du règlement no 1490/2002 ne contiennent une quelconque explication qui permettrait de justifier que l’EFSA devait intervenir avec effet rétroactif dans des procédures d’évaluation en cours. En outre, la confiance légitime de Cheminova aurait été violée dès lors qu’elle n’aurait pas pu prévoir l’intervention d’un organe distinct, telle l’EFSA, dans la procédure d’évaluation et qu’elle n’aurait pas non plus pu prévoir l’examen collégial tardif du PRE.

73

Dans leur réplique, les requérantes font observer que, contrairement à ce que prétend la Commission, le règlement no 1490/2002 a ajouté à la procédure d’évaluation d’une substance active une étape supplémentaire d’examen collégial en imposant l’intervention d’un organe entièrement nouveau. Elles expliquent à cet effet que le règlement no 1490/2002 rend obligatoire une évaluation collégiale par un tiers — l’EFSA —, alors qu’une évaluation collégiale n’était que facultative sous l’empire des dispositions en vigueur antérieurement aux modifications apportées par le règlement no 1490/2002. De surcroît, l’examen collégial serait désormais réalisé par l’EFSA, un organisme totalement autonome, alors que, dans le régime antérieur, il aurait été réalisé par la Commission et les États membres sur une base ad hoc.

74

La Commission soutient que l’exception d’illégalité soulevée par les requérantes n’est pas fondée.

Appréciation du Tribunal

75

Il importe de rappeler d’abord que les dispositions de l’article 8 du règlement no 451/2000 ont été modifiées par l’article 20 du règlement no 1490/2002. Alors que, avant l’entrée en vigueur du règlement no 1490/2002, les substances actives étaient évaluées par l’EMR et la Commission, qui, conformément à l’article 8, paragraphe 3, deuxième alinéa, du règlement no 451/2000, «[pouvait] organiser une consultation d’experts d’un ou de plusieurs États membres», le règlement no 1490/2002 a accordé un rôle à l’EFSA dans l’évaluation des substances actives. Ainsi, conformément à l’article 8, paragraphe 1, du règlement no 451/2000, tel que modifié, l’EMR adresse, pour les substances actives pour lesquelles un dossier a été jugé complet, le PRE à l’EFSA qui, conformément à l’article 8, paragraphe 7, de ce même règlement, évalue celui-ci et transmet à la Commission un avis sur la conformité de la substance active aux exigences de sécurité de la directive 91/414.

76

Force est de constater que le règlement no 1490/2002 ne prévoit aucune application rétroactive de ses dispositions, et notamment de son article 20, visé par la présente exception d’illégalité. En effet, conformément à l’article 21 dudit règlement, celui-ci est entré en vigueur le septième jour suivant celui de sa publication au Journal officiel des Communautés européennes, à savoir le 28 août 2002, et ses dispositions ont été directement applicables à partir de cette date. Par ailleurs, il doit être constaté que, dans le cadre de la présente exception d’illégalité, les requérantes ne contestent pas la légalité de l’article 20 du règlement no 1490/2002 en tant que telle. Par leur argumentation, elles mettent en cause l’application prétendument illégale de cette disposition à la procédure d’évaluation du malathion en cours. L’exception d’illégalité soulevée par les requérantes ne saurait donc prospérer.

77

Dans la mesure où la présente exception d’illégalité pourrait être requalifiée en moyen d’annulation tiré de l’application illégale de l’article 20 du règlement no 1490/2002 à la procédure d’évaluation du malathion, il doit être rappelé que, certes, au moment où Cheminova a notifié à la Commission son souhait d’obtenir l’inscription du malathion à l’annexe I de la directive 91/414, à savoir le 24 août 2000, aucune intervention de l’EFSA n’était prévue par la réglementation applicable. Toutefois, au moment où son dossier a été jugé complet par l’EMR, à savoir le , et au moment où celui-ci a finalisé le PRE qu’il a adressé à l’EFSA le , les nouvelles dispositions de l’article 8 du règlement no 451/2000 étaient déjà d’application en sorte que, conformément auxdites dispositions lues conjointement avec l’article 21 du règlement no 1490/2002, l’EMR était tenu de communiquer le PRE à l’EFSA afin que cette dernière puisse évaluer si le malathion respectait les exigences de sécurité de la directive 91/414.

78

Les requérantes ne sauraient prétendre que l’application immédiate des nouvelles dispositions de l’article 8 du règlement no 451/2000 à des procédures d’évaluation de substances actives en cours était illégale.

79

En effet, il ressort d’une jurisprudence constante que, contrairement aux règles communautaires de droit matériel, qui doivent être interprétées comme ne visant pas, en principe, des situations acquises antérieurement à leur entrée en vigueur, les règles de procédure sont d’application directe (voir arrêt du Tribunal du 25 octobre 2007, SP/Commission, T-27/03, T-46/03, T-58/03, T-79/03, T-80/03, T-97/03 et T-98/03, Rec. p. II-4331, point 116, et la jurisprudence citée).

80

Or, les dispositions du règlement no 1490/2002, prévoyant l’intervention de l’EFSA dans la procédure d’évaluation des substances actives, constituent des règles de procédure qui, conformément à la jurisprudence citée au point précédent, sont d’application directe, sans qu’aucune motivation spécifique ne soit requise à cet égard dans le règlement no 1490/2002.

81

Enfin, s’agissant du grief tiré d’une violation du principe de protection de la confiance légitime, il y a lieu de rappeler que le droit de se prévaloir de la protection de la confiance légitime s’étend à tout particulier qui se trouve dans une situation de laquelle il ressort que l’administration communautaire, en lui fournissant des assurances précises, a fait naître chez lui des espérances fondées [arrêt de la Cour du 15 juillet 2004, Di Lenardo et Dilexport, C-37/02 et C-38/02, Rec. p. I-6911, point 70; arrêts du Tribunal du , Embassy Limousines & Services/Parlement, T-203/96, Rec. p. II-4239, point 74, et du , Enercon/OHMI (Convertisseur d’énergie éolienne), T-71/06, non publié au Recueil, point 36; voir également, en ce sens, arrêt de la Cour du , Atlanta/Communauté européenne, C-104/97 P, Rec. p. I-6983, point 52]. Dès lors que les requérantes ne prétendent même pas qu’elles auraient reçu des assurances précises de l’administration communautaire que les nouvelles règles de procédure prévoyant l’intervention de l’EFSA ne seraient pas appliquées à la procédure d’évaluation du malathion, le présent grief ne peut être accueilli.

82

Il résulte de tout ce qui précède que, à supposer même que la présente exception d’illégalité puisse être requalifiée en un moyen d’annulation, elle doit également être rejetée.

Sur le premier moyen, tiré de l’absence de base scientifique objective de la décision attaquée

Arguments des parties

83

Les requérantes font observer que la décision attaquée est fondée sur les conclusions scientifiques suivantes: celle selon laquelle la génotoxicité de l’isomalathion ne pourrait être exclue et celle selon laquelle il n’existerait pas suffisamment d’informations sur l’exposition des consommateurs par le biais de cultures, en ce qui concerne certains métabolites présentant une importance du point de vue toxicologique.

84

Or, aucune de ces deux conclusions ne serait corroborée par des preuves scientifiques.

85

En premier lieu, il résulterait tant d’une étude UDS réalisée in vivo, fournie en 2002 par Cheminova, que d’un test Ames de 2005 que la génotoxicité de l’isomalathion peut être exclue (voir point 37 ci-dessus). La décision attaquée serait «diamétralement opposée» aux conclusions du laboratoire qui aurait réalisé le test Ames et à l’examen de l’EMR qui aurait validé les résultats obtenus par ce laboratoire. En effet, par courrier électronique adressé à Cheminova, le 18 octobre 2005, l’EMR aurait confirmé que le résultat était «négatif» et aurait mis à jour le PRE par un addendum du , transmis le même jour à l’EFSA, dans lequel il aurait été souligné que le test Ames confirmait que le malathion dont la concentration en isomalathion ne dépasse pas 0,2% ne présentait pas de risque de génotoxicité.

86

Les requérantes rappellent l’historique du test Ames effectué en 2005. Il ressortirait du procès-verbal de la réunion d’experts de l’EPCO du 21 février 2005 (EPCO 18), que les experts avaient en effet considéré qu’«[i]l serait nécessaire de procéder à un nouveau test Ames si l’EPCO 20 [confirmait] que la teneur réaliste en isomalathion [était] de 0,2% (ou davantage)» et que «[s]i ce test se [révélait] positif, il ne [serait] pas possible de fixer de valeurs limites et un deuxième test [serait] nécessaire, un test UDS». Elles soulignent toutefois qu’un tel test UDS, réalisé sur des substances d’essai dont la concentration en isomalathion est de 0,2%, avait déjà été inclus dans le dossier notifié pour démontrer l’absence de risque de génotoxicité. La demande tendant à la réalisation d’un test Ames aurait donc été dépourvue de pertinence.

87

En effet, un résultat positif du test Ames n’aurait eu — d’un point de vue scientifique — pour seule conséquence que de rendre nécessaire la réalisation d’une étude UDS in vivo, étude qui aurait déjà été transmise par Cheminova dans le dossier notifié et qui, ainsi qu’il ressortirait du PRE et du rapport de l’EFSA, aurait déjà été examinée tant par l’EMR que par l’EFSA. Les résultats de cette étude, réalisée in vivo, auraient été négatifs, c’est-à-dire qu’ils confirmeraient les résultats de l’étude Ames concluant à l’absence de génotoxicité. L’EFSA serait également parvenue à cette conclusion dans son rapport, en énonçant que, «au total, le malathion ne fait pas apparaître, in vivo, de risque de génotoxicité».

88

En deuxième lieu, en ce qui concerne les métabolites, et notamment, le desméthyl de malathion, les requérantes affirment que deux sujets de préoccupation ont été soulevés par l’EMR et/ou l’EFSA après l’achèvement du PRE par l’EMR et sa transmission à l’EFSA le 2 février 2004. Le premier sujet de préoccupation aurait trait à la présence éventuelle de desméthyl de malathion, en tant que métabolite végétal, dans les cultures alimentaires. Des études réalisées sur des pommes auraient été fournies à l’EMR par Cheminova le . Le desméthyl de malathion aurait été identifié, dans cette étude, comme un métabolite. Toutefois, l’importance du point de vue toxicologique de ce métabolite ne pourrait pas faire l’objet de conclusions définitives au vu de cette étude. En outre, cette étude n’aurait pas été formellement requise aux fins de la procédure d’évaluation des risques, puisque Cheminova aurait fourni des études du métabolisme des plantes pour quatre types différents de cultures, ce qui serait considéré comme suffisant en vue de satisfaire ce besoin particulier d’informations.

89

Le second sujet de préoccupation aurait trait à l’éventuelle transformation du malathion au cours de la transformation industrielle ou domestique des cultures traitées. Afin d’y répondre, une étude simulant la transformation des cultures aurait été menée et portée à la connaissance de l’EMR en juin 2004, puis suivie par une explication en août 2004 (fournie en réponse à une question de l’EMR en juillet 2004). Une évaluation plus détaillée aurait été fournie à l’EMR par Cheminova le 19 novembre 2004.

90

Sur la base de ces études relatives aux deux sujets de préoccupation, l’EMR aurait rédigé un addendum au PRE et l’aurait transmis le 15 janvier 2005 pour examen à l’EFSA au cours des réunions d’experts de l’EPCO.

91

Les requérantes soulignent qu’un risque éventuel d’exposition des consommateurs peut être exclu s’agissant de deux usages pour lequel le malathion avait été notifié, à savoir les plantes d’ornement et l’alfalfa. En effet, les plantes d’ornement et l’alfalfa ne feraient pas l’objet d’une consommation humaine. La discussion relative à la définition des résidus et à l’exposition des consommateurs ne concernerait donc pas ces usages.

92

En admettant, dans le mémoire en défense, que le sujet de préoccupation lié à la toxicité des métabolites «rendrait impossible l’inscription du malathion à l’annexe I pour un usage sur les cultures comestibles», la Commission admettrait que ce sujet de préoccupation n’est pas pertinent s’agissant d’un des quatre usages pour lesquels l’inscription avait été sollicitée par Cheminova, à savoir l’utilisation sur les plantes d’ornement qui ne donnerait lieu à aucune exposition des consommateurs par le biais des cultures comestibles. Les requérantes rappellent à cet effet que l’EMR avait recommandé, dans le PRE, l’inscription du malathion spécifiquement pour cet usage.

93

Les requérantes font valoir que la Commission n’a pas pris en compte toutes les informations et les données produites par Cheminova au sujet des métabolites, et notamment, du desméthyl de malathion. En particulier, il n’aurait été nullement tenu compte ni du rapport de Cheminova, transmis le 7 octobre 2005 à l’EMR et «destiné à répondre aux sujets de préoccupation relatifs au métabolite desméthyl de malathion», ni des explications détaillées relatives aux données manquantes fournies par Cheminova à l’EFSA le , ni des études destinées à répondre aux points en suspens et aux manques de données identifiés lors de la réunion d’experts de l’EPCO (EPCO 19), soumises à l’EMR le . Les études pertinentes et les données transmises parviendraient à la conclusion suivante: premièrement, le desméthyl de malathion ne constituerait pas un métabolite important dans les fruits (pommes), de sorte qu’il n’y aurait pas lieu de l’inclure dans la définition des résidus du malathion sur cette base; deuxièmement, le desméthyl de malathion ne serait pas plus toxique que le malathion, de sorte qu’il n’y aurait pas lieu de l’inclure dans la définition des résidus du malathion sur la base de prétendues préoccupations d’ordre toxicologique.

94

À défaut pour la Commission d’avoir pris en compte l’ensemble des informations, des données et des études mentionnées aux points 85 à 93 ci-dessus, la constatation de l’insuffisance des informations dans les considérants de la décision attaquée manquerait en fait et serait dépourvue de motivation. Se référant à l’arrêt du Tribunal du 11 septembre 2002, Pfizer Animal Health/Conseil (T-13/99, Rec. p. II-3305, point 165), les requérantes concluent que, en l’absence de base scientifique objective et valable à l’appui de la conclusion scientifique selon laquelle le risque de génotoxicité de l’isomalathion ne peut être exclu et que les métabolites du malathion sont susceptibles de créer un risque d’exposition des consommateurs par le biais des cultures, la décision attaquée doit être annulée.

95

En troisième lieu, dans leur réplique, s’agissant du prétendu caractère incomplet du dossier notifié, les requérantes relèvent que l’EMR lui-même a déclaré le dossier complet. Conformément à l’article 7 du règlement no 451/2000, une telle déclaration impliquerait nécessairement que l’EMR aurait considéré que le dossier notifié comportait toutes les données requises en vertu de la directive 91/414 pour pouvoir procéder à l’évaluation de la substance active. En tout état de cause, en raison de cette déclaration, Cheminova aurait eu légitimement confiance dans le fait que toutes les données nécessaires avaient été fournies. Le fait que l’EMR aurait ensuite entamé l’évaluation du dossier notifié et finalement recommandé l’inscription — sans solliciter de données complémentaires — corroborerait le fait que le dossier notifié avait été considéré comme complet. Enfin, même si le dossier notifié avait été incomplet, une déclaration en sens contraire équivaudrait à un comportement contradictoire de la Commission justifiant la prolongation des délais en vue de compléter ce dossier.

96

En quatrième lieu, s’agissant de l’argument de la Commission selon lequel aucune demande n’aurait été formulée à Cheminova portant sur des données complémentaires et que celle-ci aurait réagi spontanément aux questions soulevées dans le cadre de l’évaluation collégiale, les requérantes soutiennent que la production de nouvelles données relatives à la génotoxicité de l’isomalathion et à la toxicité du desméthyl de malathion a fait l’objet d’une demande claire. Après avoir relevé les retards pris par l’EMR (plus de trois mois) pour soumettre le PRE à l’EFSA, puis par l’EFSA (environ un an) pour l’évaluation de la substance active, les requérantes relèvent que l’EPCO a, lors de la réunion du 21 février 2005, identifié un manque de données en ce qui concerne un risque de génotoxicité de l’isomalathion et a expressément sollicité des données complémentaires. Il ressortirait en effet du procès-verbal de cette réunion que «le manque de données concernant le risque de génotoxicité du malathion et une demande de réalisation d’un nouveau test Ames (avec une teneur en isomalathion de 0,2%) [avaient été] confirmés». Cette information aurait été communiquée à Cheminova par l’EMR le .

97

De même, lors de sa réunion du 23 février 2005, l’EPCO aurait identifié un manque de données en ce qui concerne le desméthyl de malathion. Le procès-verbal de cette réunion mentionnerait que «le notifiant [devait] fournir des données concernant les propriétés toxicologiques du desméthyl de malathion». L’EMR aurait ensuite adressé un courrier électronique à Cheminova le en lui indiquant que, «afin d’effectuer une évaluation de la consommation tenant compte du desméthyl de malathion, des informations relatives à diverses denrées alimentaires [étaient] nécessaires».

98

En ce qui concerne les préoccupations portant sur la génotoxicité de l’isomalathion, les requérantes auraient fait parvenir à l’EMR une proposition de test le 24 juin 2005. Les requérantes auraient alors réalisé le test et transmis les résultats à l’EMR le . Le , l’EMR aurait confirmé à Cheminova que le résultat était «négatif», que l’étude était «acceptable» et que «[l]’évaluation de l’étude [serait] envoyée à l’EFSA». L’EMR aurait ensuite modifié le PRE par un addendum du qui indiquerait que, «[c]onformément à la décision de l’EPCO 18, le notifiant [devait] réaliser un test Ames», que «[l]e notifiant a présenté une étude en août 2005» et que «[l]e malathion technique n’était pas mutagène dans les conditions du[dit] test».

99

L’EFSA n’aurait pas soumis le nouveau test Ames à un examen collégial. La décision attaquée omettrait également de tenir compte des résultats du nouveau test.

100

Pour ce qui concerne le desméthyl de malathion, les requérantes auraient fait parvenir à l’EMR une proposition de test le 4 avril 2005. Elles auraient adressé d’autres documents à ce sujet à l’EMR et à l’EFSA, respectivement en octobre et en novembre 2005. Le , les requérantes auraient soumis à l’EMR des études portant sur les sujets de préoccupation identifiés et démontrant que le desméthyl de malathion ne donnait pas lieu à préoccupation. Ces études n’auraient été évaluées ni par l’EMR ni par l’EFSA. La décision attaquée omettrait également de tenir compte de leurs résultats.

101

Selon les requérantes, l’EFSA et la Commission auraient dû tenir compte des données supplémentaires fournies par Cheminova dès lors que l’EMR et l’EFSA auraient considéré ces données comme nécessaires pour répondre aux deux sujets de préoccupation soulevés.

102

Les requérantes rappellent également dans leur réplique que le rapport de l’EFSA constitue, comme le reconnaîtrait d’ailleurs la Commission, la base scientifique de la décision attaquée. Toutefois, dans le cadre de sa défense, la Commission soulèverait une série de sujets de préoccupation qui n’auraient pas été mentionnés dans le rapport de l’EFSA. Le Tribunal devrait ignorer les sujets de préoccupation non cités dans ledit rapport. En tout état de cause, si la décision attaquée était fondée sur d’autres motifs que ceux qui y sont exposés, celle-ci serait entachée d’un défaut de motivation, en violation de l’article 253 CE.

103

La Commission soutient que le premier moyen doit être rejeté.

Appréciation du Tribunal

104

Il convient de constater que le rapport de l’EFSA constitue la base scientifique de la décision attaquée. En effet, la non-inscription du malathion à l’annexe I de la directive 91/414 est fondée, aux considérants 4 à 6 de la décision attaquée, sur les conclusions de l’EFSA. Ce point non contesté par les requérantes est d’ailleurs confirmé par la lettre de la Commission du 5 septembre 2006 adressée à Cheminova dans laquelle elle affirmait que les conclusions de l’EFSA «constituent la base scientifique pour la décision finale pour chaque substance».

105

Il ressort du considérant 5 de la décision attaquée que les conclusions de l’EFSA ont fait apparaître «[u]n certain nombre de sujets de préoccupation» qui justifieraient la non-inscription du malathion à l’annexe I de la directive 91/414. La Commission les identifie comme suit dans la décision attaquée. D’une part, compte tenu de «la présence dans le matériel technique de niveaux variables d’isomalathion, impureté qui contribue de manière importante au profil de toxicité du malathion et dont la génotoxicité ne peut être exclue», selon la Commission, «aucune conclusion ne peut être tirée [de la présence d’isomalathion] quant au risque pour les opérateurs, les travailleurs et les personnes présentes» (considérant 5 de la décision attaquée). D’autre part, «sur la base des informations disponibles, il n’a pas été démontré que l’exposition estimée des consommateurs résultant de l’ingestion aiguë et chronique de cultures comestibles est acceptable, en raison des informations insuffisantes sur les effets de certains métabolites toxicologiquement importants» (considérant 5 de la décision attaquée).

106

Aux fins d’examiner si les sujets de préoccupation identifiés dans la décision attaquée manquent, comme le prétendent les requérantes, de base scientifique objective et valable, il doit être rappelé que, ainsi qu’il ressort de ses cinquième, sixième et neuvième considérants, la directive 91/414 vise à l’élimination des entraves aux échanges intracommunautaires de produits phytopharmaceutiques, tout en maintenant un niveau élevé de protection de l’environnement et de la santé humaine et animale. Dans ce cadre, afin de pouvoir poursuivre efficacement l’objectif qui lui est assigné, et en considération des évaluations techniques complexes qu’elle doit opérer, un large pouvoir d’appréciation doit être reconnu à la Commission (arrêt de la Cour du 18 juillet 2007, Industrias Químicas del Vallés/Commission, C-326/05 P, Rec. p. I-6557, points 74 et 75).

107

L’exercice de ce pouvoir n’est toutefois pas soustrait au contrôle juridictionnel. En effet, il résulte d’une jurisprudence constante que, dans le cadre de ce contrôle, le juge communautaire doit vérifier le respect des règles de procédure, l’exactitude matérielle des faits retenus par la Commission, l’absence d’erreur manifeste dans l’appréciation de ces faits ou l’absence de détournement de pouvoir (voir arrêt Industrias Químicas del Vallés/Commission, point 106 supra, point 76, et la jurisprudence citée).

108

C’est au regard de cette jurisprudence qu’il y a lieu d’examiner successivement les arguments des requérantes concernant d’abord le risque lié à la présence de l’isomalathion dans le malathion, ensuite les effets de certains métabolites présentant une importance du point de vue toxicologique et, enfin, le caractère prétendument complet du dossier notifié ainsi que le défaut de motivation de la décision attaquée.

— Sur le premier sujet de préoccupation, lié à la présence de l’isomalathion dans le malathion

1. Sur le caractère opérant de l’argumentation des requérantes

109

Il doit être rappelé que l’isomalathion est une impureté se trouvant dans le malathion. En substance, les requérantes font valoir qu’il ressort de différents tests scientifiques que la génotoxicité de l’isomalathion peut être exclue. La Commission aurait donc commis une erreur manifeste d’appréciation en estimant, au considérant 5 de la décision attaquée, que «la génotoxicité [de l’isomalathion] ne peut être exclue».

110

Toutefois, il y a lieu de relever que le premier sujet de préoccupation identifié dans la décision attaquée ne concerne pas uniquement la génotoxicité de l’isomalathion. En effet, il ressort du considérant 5 de la décision attaquée que la Commission associe deux risques à la présence d’isomalathion, à savoir le fait que, premièrement, cette «impureté […] contribue de manière importante au profil de toxicité du malathion» et que, deuxièmement, «[sa] génotoxicité ne peut être exclue». Interrogées à l’audience, les deux parties ont confirmé cette lecture du contenu de la décision attaquée, ce dont il a été pris acte dans le procès-verbal d’audience.

111

S’agissant de la contribution de l’isomalathion au profil de toxicité du malathion, force est de constater que ce risque a été clairement identifié dans le rapport de l’EFSA, qui constitue la base scientifique de la décision attaquée. Le rapport de l’EFSA mentionne que «[q]uatre impuretés sont considérées comme pertinentes parmi lesquelles l’isomalathion pose un problème d’ordre toxicologique» et qu’«un des problèmes majeurs se rapporte à l’impact toxicologique de l’isomalathion sur le profil toxicologique du malathion». Le rapport de l’EFSA indique en outre que «le malathion auquel est ajouté 2% d’isomalathion est approximativement dix fois plus toxique que le malathion pur sans isomalathion». L’appréciation de l’impact toxicologique de l’isomalathion se complique encore par le fait que, comme il ressort du rapport de l’EFSA, «[l]a quantité d’isomalathion augmente même par le stockage du malathion en fonction du temps et de la température avec un facteur de 2 à 10».

112

Ainsi que cela ressortait déjà de la réunion de l’EPCO du 21 février 2005, «il [était] devenu évident que la toxicité du matériel technique augmente avec une augmentation d’isomalathion» et que «[d]avantage d’informations [étaient] requises à ce propos». De même, l’addendum au PRE produit par l’EMR le a apporté la confirmation que l’«[i]somalathion influen[çait] la toxicité orale aiguë du malathion de manière plus importante que celle à laquelle on pourrait s’attendre de sa contribution proportionnelle» et que «de petits ajouts d’isomalathion [avaient] conduit à une augmentation importante de la toxicité orale aiguë du malathion».

113

Si, certes, la contribution de l’isomalathion à la toxicité du malathion n’a pas été incluse dans les «zones de préoccupation critiques» identifiées dans le rapport de l’EFSA, il n’en reste pas moins que ledit rapport qualifie l’impact de l’isomalathion sur le profil toxicologique du malathion de «problème majeur» et l’inclut dans la liste des «points finaux» figurant en annexe dudit rapport.

114

En tout état de cause, comme il a été relevé au point 110 ci-dessus, au considérant 5 de la décision attaquée, la Commission a fondé son refus d’inscrire le malathion à l’annexe I de la directive 91/414, notamment, en se référant à la contribution importante de l’isomalathion au profil de toxicité du malathion.

115

Or, dans leur requête, les requérantes ne mettent pas en cause le fait que l’isomalathion contribue de manière importante au profil de toxicité du malathion. Comme elles l’ont reconnu à l’audience, elles se sont, en effet, limitées dans leur argumentation à contester la génotoxicité de l’isomalathion.

116

Dès lors que l’argumentation des requérantes concernant le premier sujet de préoccupation porte exclusivement sur la constatation selon laquelle la génotoxicité de l’isomalathion ne peut être exclue, il doit être considéré qu’elle est inopérante (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 14 mai 2002, Graphischer Maschinenbau/Commission, T-126/99, Rec. p. II-2427, points 49 à 51, et du , General Electric/Commission, T-210/01, Rec. p. II-5575, point 43). En effet, elle ne vise qu’une des deux constatations scientifiques sur lesquelles est fondé, dans la décision attaquée, le premier sujet de préoccupation.

117

Néanmoins, le Tribunal estime utile d’examiner, à titre surabondant, les arguments des requérantes mettant en cause la légalité de la décision attaquée en ce qu’elle conclut que la génotoxicité de l’isomalathion ne peut être exclue.

2. Sur la génotoxicité de l’isomalathion

118

Il y a lieu de relever que la limite de spécification de l’impureté «isomalathion» qui a été notifiée par Cheminova est de 0,2% dans la substance active «malathion». Les requérantes estiment que la génotoxicité du malathion avec une teneur en isomalathion de 0,2% peut être exclue en se référant à une étude UDS réalisée in vivo, qui était contenue dans le dossier notifié, et à un test Ames, qui a été communiqué à l’EMR en août 2005.

a) Sur la prétendue absence de prise en compte de l’étude UDS in vivo

119

Il importe d’examiner d’abord si les constatations faites dans le rapport de l’EFSA, qui constitue la base scientifique de la décision attaquée, autorisaient la Commission à en conclure que la génotoxicité de l’isomalathion ne peut être exclue.

120

Si, certes, il ressort du rapport de l’EFSA que, «[p]our ce qui concerne une teneur en isomalathion de 0,03%, les experts [étaient] convenus qu’il n’existait pas de risque de génotoxicité», il doit être constaté, sur la base du même rapport, qu’il n’était pas possible pour l’EFSA et la Commission de conclure à une absence de génotoxicité pour une spécification d’isomalathion de 0,2% sur la base des seuls éléments contenus dans le dossier notifié. Les études concernant la génotoxicité de l’isomalathion contenues dans le dossier notifié ne permettaient pas, en effet, de parvenir à des conclusions fiables pour un taux d’isomalathion de 0,2% dès lors que certaines études avaient été menées avec un pourcentage différent de cette impureté et que d’autres n’identifiaient même pas la teneur en isomalathion.

121

Ainsi, d’une part, le rapport de l’EFSA fait référence à deux tests de 2001 sur le malathion avec une teneur en isomalathion de 0,14% qui avaient donné des résultats positifs. Il s’agit des tests Edwards 2001 a et Edwards 2001 b mentionnés dans le compte rendu de la réunion de l’EPCO du 21 février 2005 (EPCO 18). D’autre part, il est indiqué dans le rapport de l’EFSA que, même si le résultat d’un test Ames de 1987 contenu dans le dossier notifié était négatif, celui-ci omettait de mentionner la teneur en isomalathion qui avait été prise en compte aux fins d’effectuer ledit test.

122

Enfin, le rapport de l’EFSA renferme la conclusion que «d’autres études sur la génotoxicité [devaient] être fournies et [qu’]un potentiel non génotoxique [devait] être démontré afin de pouvoir couvrir la spécification de 0,2% d’isomalathion dans le matériel technique», étant précisé que, «jusqu’à ce que l’absence de génotoxicité de l’isomalathion ait été démontrée, l’évaluation du risque pour l’opérateur (NEAO) ne saurait être considérée comme concluante».

123

Eu égard au fait que différents tests compris dans le dossier notifié avaient été effectués sur la base d’une spécification d’isomalathion qui ne correspondait pas à celle notifiée par Cheminova ou sur la base d’une spécification d’isomalathion inconnue, l’EFSA et la Commission ont pu conclure, sans commettre d’erreur manifeste d’appréciation, que la génotoxicité de l’isomalathion ne pouvait être exclue.

124

La prétendue absence de prise en compte du résultat du test UDS in vivo mentionné dans la liste des «Points finaux» annexée au rapport de l’EFSA, ainsi que dans le PRE, ne remet pas en cause cette conclusion.

125

En effet, il ressort des «Points finaux» du rapport de l’EFSA, ainsi que des déclarations de l’expert des requérantes à l’audience, que le test UDS in vivo en question a été réalisé sur des substances d’essai dont la concentration d’isomalathion était de 0,14%. Même si le résultat de ce test était négatif, en ce qu’il ne démontrait pas la génotoxicité de la substance, il ne peut en être déduit que l’EFSA et la Commission ont commis une erreur manifeste d’appréciation en considérant que la génotoxicité du malathion avec une concentration d’isomalathion de 0,2% ne pouvait être exclue.

126

L’argument tiré de la prétendue absence de prise en compte du résultat du test UDS in vivo doit donc être rejeté.

b) Sur la prétendue absence de prise en compte du test Ames de 2005

127

Il y a lieu de rappeler que, en août 2005, Cheminova a soumis à l’EMR un nouveau test Ames. Ce test présentait un résultat négatif en ce sens qu’il n’établissait pas de risque de génotoxicité pour une spécification d’isomalathion de 0,2%. Toutefois, avant d’examiner si le résultat de ce test démontre que la conclusion tirée dans la décision attaquée concernant la génotoxicité de l’isomalathion est entachée d’une erreur manifeste, il y a lieu de déterminer s’il existait, pour l’EFSA et la Commission, une obligation de prendre en compte le résultat dudit test.

Sur l’obligation de l’EFSA et de la Commission de prendre en compte le résultat du test Ames de 2005

128

En premier lieu, il doit être examiné si Cheminova était en droit, en août 2005, de soumettre à l’EMR un nouveau test Ames à un moment où l’évaluation de la substance active en question avait déjà été portée devant l’EFSA. En effet, l’EMR avait soumis le PRE à l’EFSA le 2 février 2004.

129

À cet égard, l’article 8 du règlement no 451/2000 établit, à deux reprises, dans ses paragraphes 2 et 5, que de «nouvelles études» ne sont, en principe, pas admises au moment où, respectivement, l’EMR et l’EFSA ont entamé l’évaluation de la substance active. Même si, selon lesdites dispositions, l’EMR, le cas échéant avec l’accord de l’EFSA lorsque le PRE a déjà été transmis à cette autorité, peut inviter le notifiant à soumettre dans des délais spécifiés, des données complémentaires que l’EMR ou l’EFSA jugent nécessaires à la clarification du dossier, ces dispositions ne prévoient pas une telle exception pour la soumission de nouvelles études.

130

Dès lors qu’il est constant entre les parties que le test Ames de 2005 constitue une nouvelle étude, ainsi que cela a été confirmé lors de l’audience, la soumission de celui-ci pendant la procédure d’évaluation du malathion était tardive, en vertu des dispositions précitées.

131

En deuxième lieu, les requérantes, se référant à l’arrêt Industrias Químicas del Vallés/Commission, point 106 supra, estiment que les autorités compétentes ne sauraient chercher à imposer «à la lettre» à Cheminova le respect des délais applicables alors qu’elles auraient elles-mêmes omis de respecter les délais qui leur auraient été impartis.

132

Il doit être rappelé que, dans l’affaire ayant conduit à l’arrêt Industrias Químicas del Vallés/Commission, point 106 supra, tant Industrias Químicas del Vallés (ci-après «IQV») que l’entreprise Syngenta avaient demandé l’inscription de la substance active concernée à l’annexe I de la directive 91/414. Toutefois, seule Syngenta avait soumis un dossier complet à l’EMR. Après que cette société s’était retirée de la procédure d’évaluation de la substance active concernée, IQV a reçu dans un premier temps des indications de l’EMR et de la Commission selon lesquelles toutes les informations disponibles, y compris les études contenues dans le dossier présenté par Syngenta, seraient utilisées aux fins de l’évaluation de la substance active et que, le cas échéant, les autorités compétentes lui demanderaient seulement de fournir des clarifications ou des données additionnelles (arrêt Industrias Químicas del Vallés/Commission, point 106 supra, point 79). Lorsque, ultérieurement, la Commission a demandé à IQV de produire un dossier complet, celle-ci s’est trouvée, selon la Cour, dans une situation imprévue et complexe, compte tenu notamment du temps et des efforts nécessaires à l’établissement des études scientifiques requises (arrêt Industrias Químicas del Vallés/Commission, point 106 supra, point 80). Selon la Cour, cette situation était due, au moins en partie, au comportement contradictoire des autorités compétentes (arrêt Industrias Químicas del Vallés/Commission, point 106 supra, point 84). Dans ces conditions, la Cour a jugé que la Commission avait commis une erreur manifeste d’appréciation en refusant d’accorder à IQV une prorogation du délai imparti pour la production des études faisant défaut dans son dossier et en décidant, par conséquent, de ne pas inscrire la substance active concernée à l’annexe I de la directive 91/414 au seul motif que la requérante n’avait pas présenté un dossier complet dans ledit délai (arrêt Industrias Químicas del Vallés/Commission, point 106 supra, point 88).

133

Il convient donc de déterminer si, en l’espèce, Cheminova s’est trouvée dans une situation imprévue et complexe due, au moins en partie, au comportement contradictoire des autorités compétentes. Les requérantes se réfèrent à des demandes qui auraient été adressées à Cheminova afin qu’elle dépose le nouveau test Ames. Dans ces conditions, le fait pour l’EFSA et la Commission de ne pas tenir compte du résultat dudit test constituerait un comportement contradictoire.

134

À cet égard, premièrement, il doit être relevé que Cheminova ne prétend pas qu’elle aurait reçu des assurances des autorités compétentes qu’elle pourrait bénéficier des éléments d’un dossier soumis par un autre notifiant aux fins de l’évaluation du malathion. Sa situation se distingue donc de celle d’IQV dans l’affaire ayant conduit à l’arrêt Industrias Químicas del Vallés/Commission, point 106 supra.

135

Deuxièmement, conformément à l’article 6, paragraphe 1, du règlement no 451/2000, le producteur souhaitant obtenir une inscription d’une substance active à l’annexe I de la directive 91/414 doit notifier à l’EMR un «dossier complet». Il appartenait donc à Cheminova de notifier un dossier complet concernant le malathion qui aurait permis à l’EMR, à l’EFSA et à la Commission d’effectuer une évaluation des effets nocifs du malathion au sens de l’article 5, paragraphe 1, de la directive 91/414, et notamment du risque de la génotoxicité de l’isomalathion à un pourcentage de 0,2% dans la substance active concernée.

136

Or, Cheminova, qui a inclus dans le dossier notifié des études concernant la génotoxicité de l’isomalathion qui ont été menées sur un échantillon comportant une teneur différente de celle prévue pour la substance active notifiée ou qui ne mentionnaient même pas le pourcentage d’isomalathion sur lequel portait l’étude, ne saurait être considérée comme s’étant trouvée dans une «situation imprévue et complexe» au sens de l’arrêt Industrias Químicas del Vallés/Commission, point 106 supra (point 80), lorsque, au cours de la période d’évaluation de la substance active concernée, les autorités compétentes ont constaté un manque de données à propos de la question du risque de génotoxicité de l’isomalathion.

137

Troisièmement, s’agissant du prétendu comportement contradictoire des autorités compétentes en ce qu’elles auraient adressé des demandes à Cheminova portant sur le dépôt d’un nouveau test Ames, il doit être rappelé que l’article 8 du règlement no 451/2000 énonce, à deux reprises, dans ses paragraphes 2 et 5, la règle selon laquelle de «nouvelles études» ne sont, en principe, pas admises postérieurement à la notification du dossier par le notifiant. Eu égard au libellé clair de ces dispositions, un éventuel comportement contradictoire des autorités compétentes postérieurement à la notification du dossier n’aurait pas été de nature à mettre le notifiant dans une «situation imprévisible et complexe» au sens de l’arrêt Industrias Químicas del Vallés/Commission, point 106 supra (point 80). En tant que notifiant de la substance active, Cheminova aurait dû, en effet, s’assurer du fait que toutes les études et données pertinentes aux fins de l’évaluation du malathion se trouvaient déjà dans le dossier notifié.

138

Dans ces conditions, l’argument tiré de l’arrêt Industrias Químicas del Vallés/Commission, point 106 supra, ne peut être accueilli.

139

En troisième lieu, il doit être souligné que, dans le cadre du présent moyen, les requérantes ne prétendent pas que l’attitude de l’EMR, de l’EFSA ou de la Commission aurait empêché Cheminova de soumettre le nouveau test Ames au cours de la procédure d’évaluation du malathion. Au contraire, il est constant que, malgré sa soumission tardive, l’EMR a évalué le test Ames que Cheminova avait soumis en août 2005 et que cette évaluation a été reprise dans un addendum au PRE qui a été communiqué à l’EFSA le 26 octobre 2005. Le rapport de l’EFSA prend, en outre, effectivement acte de l’existence du nouveau test Ames d’août 2005 et de l’évaluation qui en a été faite par l’EMR. Cependant, le rapport de l’EFSA fait état de ce que le nouveau test Ames n’a pas fait l’objet d’un examen collégial.

140

Les requérantes insistent sur le fait que l’EFSA aurait dû soumettre le nouveau test Ames à un examen collégial avant de rendre son avis à la Commission. Lors de l’audience, elles ont expliqué qu’une telle obligation pour l’EFSA résulterait des circonstances de l’espèce, et notamment des différentes demandes adressées à Cheminova au cours de la procédure d’évaluation du malathion tendant à ce qu’elle soumette un nouveau test Ames avec une spécification d’isomalathion de 0,2%.

141

Sur ce point, il convient de relever que l’examen collégial auquel se réfèrent les requérantes, ainsi que celles-ci l’ont précisé lors de l’audience, se rapporte à la «consultation d’experts» prévue à l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 451/2000, tel que modifié. Or, à supposer même qu’une demande ait été formulée par les autorités compétentes portant sur la soumission d’un nouveau test Ames, il n’existerait pour l’EFSA aucune obligation de soumettre cette étude — dont la soumission a en tout état de cause été tardive — à un examen collégial au titre de l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 451/2000, tel que modifié. En effet, cette disposition prévoit que l’EFSA «peut organiser une consultation d’experts», sans formuler aucune obligation à cet effet.

142

Eu égard, d’une part, à la soumission tardive du test Ames d’août 2005 et, d’autre part, au caractère facultatif de l’examen collégial prévu à l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 451/2000, tel que modifié, l’argumentation des requérantes relative à une prétendue absence de prise en compte du test Ames de 2005 doit donc être rejetée.

Sur l’incidence du résultat du test Ames de 2005 sur la légalité de la décision attaquée

143

À supposer même que l’EFSA ait dû soumettre le test Ames de 2005 à un examen collégial et que la Commission ait été obligée de tenir compte des résultats dudit test dans la décision attaquée, quod non, le Tribunal estime néanmoins utile d’examiner si, eu égard aux éléments contenus dans le dossier et à son contrôle restreint sur des évaluations techniques complexes (voir points 106 et 107 ci-dessus), le résultat dudit test démontre que les conclusions figurant dans le rapport de l’EFSA et dans la décision attaquée sont manifestement erronées ou manquent de base scientifique.

144

À cet égard, il doit être constaté que le fait que le résultat du test Ames d’août 2005 allait dans le sens voulu par les requérantes ne démontre pas, au-delà de tout doute raisonnable, que la génotoxicité de l’isomalathion pouvait être exclue.

145

En effet, d’une part, il importe de relever que l’EMR, dans son addendum au PRE du 26 octobre 2005, n’a pas exclu tout risque de génotoxicité pour l’isomalathion. L’EMR s’est limité à conclure, à la suite de l’examen du nouveau test Ames produit par Cheminova, que «le malathion technique n’était pas mutagène dans les conditions du[dit] test» et que l’étude était «acceptable».

146

D’autre part, il ressort du dossier que l’EFSA a estimé que les incertitudes quant à la génotoxicité de l’isomalathion n’étaient pas fonction du seul résultat d’un nouveau test Ames, suggéré par l’EPCO et effectué par Cheminova en août 2005. Il importe de relever à cet égard que, selon le rapport de l’EFSA «d’autres études concernant la génotoxicité [devaient] être fournies» afin de démontrer le «potentiel non génotoxique […] d’une spécification de 0,2% d’isomalathion». L’utilisation du pluriel semble indiquer que les résultats d’une seule nouvelle étude ne pouvaient pas être déterminants en tant que tels. En tout état de cause, ni l’EPCO ni l’EFSA n’ont à aucun moment affirmé qu’un résultat négatif d’un test Ames avec une spécification d’isomalathion de 0,2% écarterait à lui seul tout risque de génotoxicité. Il importe de rappeler à cet égard que le nouveau test Ames, qui a été suggéré par les experts et effectué par Cheminova, doit être mis en rapport avec la constatation que le test Ames de 1987 qui avait été inclus dans le dossier notifié et dont le résultat avait été négatif ne fournissait aucune information concernant la teneur en isomalathion. Toutefois, il n’a jamais été suggéré que le nouveau test Ames serait déterminant en tant que tel pour l’issue de l’évaluation de la génotoxicité du malathion.

147

Il ressort de tout ce qui précède que l’argumentation des requérantes relative au premier sujet de préoccupation doit être écartée.

— Sur le second sujet de préoccupation, lié aux effets de certains métabolites présentant une importance du point de vue toxicologique

148

Dans la décision attaquée, la Commission a considéré qu’«il n’a[vait] pas été démontré que l’exposition estimée des consommateurs résultant de l’ingestion aiguë et chronique de cultures comestibles [était] acceptable, en raison des informations insuffisantes sur les effets de certains métabolites toxicologiquement importants» (considérant 5 de la décision attaquée).

149

À cet égard, le rapport de l’EFSA mentionne différents métabolites présentant une importance du point de vue toxicologique. Il s’agit notamment du desméthyl de malathion, du malaoxon, du MMCA et du MDCA. Or, il ressort du rapport de l’EFSA que le dossier notifié par Cheminova ne contient aucune étude concernant le desméthyl de malathion, le MMCA et le MDCA. Le dossier relatif aux métabolites n’a ainsi pas permis à l’EFSA d’adopter une position à propos des effets des métabolites sur les consommateurs. C’est ainsi que, au point 3.3 du rapport de l’EFSA, il a été constaté ce qui suit:

«Il n’est actuellement pas possible d’achever l’évaluation du risque alimentaire aigu et chronique pour les consommateurs, et ce tant que l’importance toxicologique du desméthyl de malathion n’aura pas été clarifiée et que des données supplémentaires sur le desméthyl de malathion n’auront pas été fournies. En outre, l’importance des métabolites MMCA et MDCA est actuellement incertaine, en ce qui concerne l’exposition des consommateurs […]

Aux fins d’évaluer provisoirement les risques, il conviendrait de combiner un certain nombre d’hypothèses sur les propriétés toxicologiques et/ou les propriétés des résidus tels le desméthyl de malathion, le MMCA, le MDCA et le malaoxon.»

150

L’argument des requérantes selon lequel l’EFSA et/ou la Commission auraient dû tenir compte des informations qui n’étaient pas incluses dans le dossier notifié, mais qui ont été communiquées à un stade ultérieur par Cheminova à l’EMR et à l’EFSA, ne saurait être accueilli. En effet, indépendamment de la recevabilité éventuelle de ces informations au regard des dispositions de l’article 8, paragraphes 2 et 5, du règlement no 451/2000, force est de constater que les requérantes ne prétendent même pas que ces informations portaient sur l’ensemble des métabolites présentant une importance du point de vue toxicologique. En effet, dans leur requête et leur réplique, les requérantes ne font état que d’informations supplémentaires concernant le desméthyl de malathion que Cheminova aurait soumises, à l’exclusion des autres métabolites identifiés dans le rapport de l’EFSA, notamment le MMCA et le MDCA, et pour lesquels un manque de données a également été constaté dans ledit rapport. À la suite d’une question posée par le Tribunal à l’audience, les requérantes ont d’ailleurs reconnu que, au cours de la procédure d’évaluation du malathion, elles n’avaient pas fourni à l’EMR ou à l’EFSA des informations complémentaires relatives aux métabolites autres que le desméthyl de malathion.

151

Dans ces conditions, il est permis de considérer que, même si l’EFSA et la Commission avaient pris en compte l’ensemble des informations produites par Cheminova au cours de la procédure ayant précédé l’adoption de la décision attaquée, celle-ci n’aurait pas pu avoir un contenu différent dès lors que ces informations n’auraient, en tout état de cause, pas pu dissiper les doutes de l’EFSA et de la Commission quant aux risques pour les consommateurs liés aux effets de certains métabolites, et notamment du MMCA et du MDCA.

152

Enfin, quant à l’argument des requérantes selon lequel le sujet de préoccupation lié aux effets de certains métabolites ne pouvait pas justifier la non-inscription du malathion à l’annexe I de la directive 91/414 pour les plantes d’ornement, il convient de rappeler que deux sujets de préoccupation ont été identifiés dans la décision attaquée, l’un se rapportant à la présence d’isomalathion et l’autre relatif aux effets de certains métabolites présentant une importance du point de vue toxicologique. Or, il n’est pas contesté que le sujet de préoccupation lié à la présence d’isomalathion concerne tous les usages envisagés du malathion et donc également l’usage de cette substance active pour les plantes d’ornement. Eu égard à ce qui a été constaté aux points 109 à 147 ci-dessus, il doit donc être conclu que les requérantes n’ont pas démontré que la Commission aurait commis une erreur manifeste d’appréciation ou aurait fondé son appréciation sur des bases scientifiques erronées en décidant de ne pas inclure le malathion à l’annexe I de la directive 91/414 indépendamment de l’usage envisagé.

— Sur le caractère prétendument complet du dossier notifié et sur le prétendu défaut de motivation de la décision attaquée

153

En premier lieu, il doit être constaté que le grief des requérantes selon lequel la constatation par l’EMR du caractère complet du dossier notifié a pu créer chez Cheminova une confiance légitime que toutes les informations nécessaires pour l’évaluation de la substance active avaient été fournies (voir point 95 ci-dessus) est irrecevable en vertu de l’article 48, paragraphe 2, du règlement de procédure. En effet, il a été soulevé pour la première fois dans la réplique.

154

En tout état de cause, cet argument n’est pas fondé. Premièrement, conformément à l’article 6, paragraphe 1, du règlement no 451/2000, les notifiants doivent «soumettre à l’autorité désignée de l’[EMR,] pour toute substance active déterminée, le dossier complet prévu au paragraphe 3, y compris le dossier sommaire visé au paragraphe 2». En vertu de l’article 6, paragraphe 2, sous d), du règlement no 451/2000, le dossier sommaire comprend «un contrôle par le notifiant du caractère complet du dossier». Dans le système établi par le règlement no 451/2000, la responsabilité première de vérifier le caractère complet du dossier incombe ainsi au notifiant. Cela est confirmé par l’article 7, paragraphe 1, sous a), du règlement no 451/2000, qui dispose que l’EMR examine les dossiers et évalue «le ou les contrôles du caractère complet fournis par les notifiants».

155

Deuxièmement, eu égard à ce qui précède, le fait qu’un dossier a été déclaré complet par l’EMR au sens de l’article 6, paragraphe 1, du règlement no 451/2000 ne garantit pas nécessairement qu’il contient toutes les informations permettant à l’EMR, à l’EFSA et à la Commission de prendre position sur l’«effet nocif» de la substance active concernée, au sens de l’article 5, paragraphe 1, de la directive 91/414. Il convient de préciser à cet égard qu’un dossier qui contient les études et les rapports prévus à l’article 6, paragraphe 3, du règlement no 451/2000 sera considéré comme complet par l’EMR, ce qui n’exclut toutefois pas que l’une ou l’autre donnée puisse manquer pour permettre à l’EMR et/ou à l’EFSA d’effectuer leur évaluation scientifique de la substance active en cause. Pour cette raison, l’article 8, paragraphes 2 et 5, du règlement no 451/2000 prévoit la possibilité, respectivement, pour l’EMR et pour l’EFSA, de demander aux notifiants la soumission de données complémentaires nécessaires à la clarification du dossier. Toutefois, dès lors que le notifiant doit s’assurer du fait que le dossier soumis est complet, l’article 8, paragraphes 2 et 5, du règlement no 451/2000 ne prévoit aucune possibilité pour celui-ci de compléter son dossier de sa propre initiative.

156

En second lieu, s’agissant du grief tiré d’un prétendu défaut de motivation de la décision attaquée (voir point 102 ci-dessus), il doit être rappelé qu’il n’a été soulevé que dans l’hypothèse où la non-inscription du malathion serait fondée sur d’autres motifs que ceux exposés dans la décision attaquée. Dès lors qu’il n’existe aucune indication en ce sens, ce grief ne peut pas non plus être accueilli.

157

Il ressort de tout ce qui précède que le premier moyen doit être rejeté.

Sur le deuxième moyen, tiré d’une violation de l’article 95 CE, de l’article 4, paragraphe 1, et de l’article 5, paragraphe 1, de la directive 91/414

Arguments des parties

158

Les requérantes font valoir que la Commission n’a pas adopté la décision attaquée sur la base des données scientifiques les plus récentes. La Commission s’étant fondée sur l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 451/2000 pour refuser l’examen collégial de nouvelles données, la décision attaquée, adoptée en 2007, reposerait en effet sur des données scientifiques remontant à l’année 2004. En agissant ainsi, la Commission aurait violé l’article 95, paragraphe 3, CE et l’article 5, paragraphe 1, de la directive 91/414, qui «traduirait» le contenu de ladite disposition du traité. L’article 4, paragraphe 1, de la directive 91/414 ferait en outre référence, notamment, à l’obligation pour les États membres d’adopter des décisions pertinentes à l’égard des substances actives «compte tenu des connaissances scientifiques et techniques».

159

Même si l’article 43 du traité CE (devenu, après modification, article 37 CE) constitue la base légale formelle de la directive 91/414, les juridictions communautaires auraient confirmé que ladite directive poursuit le double objectif, d’une part, d’éliminer les entraves aux échanges intracommunautaires de produits végétaux et d’amélioration de la production végétale et, d’autre part, de protéger la santé humaine et animale, ainsi que l’environnement (arrêt de la Cour du 9 mars 2006, Zuid-Hollandse Milieufederatie et Natuur en Milieu, C-174/05, Rec. p. I-2443, point 30). Dans ces circonstances, la Commission serait tenue d’appliquer les règles qui sous-tendent la législation relative au marché intérieur, lorsqu’elle adopte des décisions au titre de la directive 91/414, et donc d’appliquer l’article 95 CE.

160

La directive 91/414 ne conférerait aucune marge d’appréciation à la Commission qui lui permettrait de déroger à l’obligation d’adopter les décisions pertinentes «compte tenu de l’état des connaissances scientifiques et techniques». La décision attaquée aurait donc dû être adoptée compte tenu de l’état des connaissances scientifiques et techniques au 8 juin 2007 (date de publication de la décision attaquée). Au soutien de leur argumentation, les requérantes se réfèrent aux arrêts de la Cour du , Greenham et Abel (C-95/01, Rec. p. I-1333, point 50), du , Alliance for Natural Health e.a. (C-154/04 et C-155/04, Rec. p. I-6451, point 73), et aux conclusions de l’avocat général M. Léger sous l’arrêt de la Cour du , Monsanto (C-306/98, Rec. p. I-3279, I-3281, points 98 et 102).

161

S’agissant du risque de génotoxicité de l’isomalathion, depuis la remise du dossier complet comprenant un test UDS négatif réalisé in vivo en 2002, depuis août 2005 par l’intermédiaire de l’EMR, depuis octobre 2005, par l’intermédiaire de l’EFSA, et, depuis mars 2006, directement par Cheminova, la Commission aurait été en possession de résultats d’études scientifiques qui établiraient sans équivoque que la teneur en isomalathion du malathion soumis au réexamen prévu par la directive 91/414 ne posait pas de problèmes de génotoxicité. En ignorant ces données scientifiques, la Commission n’aurait pas adopté la décision attaquée sur la base de l’état des connaissances et des dernières découvertes scientifiques, dès lors qu’elle comprendrait la conclusion selon laquelle «la génotoxicité [de l’isomalathion] ne peut être exclue».

162

En outre, au cours de la période allant de juin 2004 à mars 2006, l’EMR, l’EFSA et la Commission auraient disposé de données, d’études ainsi que d’analyses scientifiques et d’évaluations pertinentes qui auraient permis de répondre aux sujets de préoccupation relatifs au desméthyl de malathion. Toutefois, la Commission ne les aurait pas prises en considération.

163

Les requérantes concluent que, en ne prenant pas en considération les données qui lui ont été fournies par Cheminova, ni celles que cette dernière avait fournies à l’EFSA et à l’EMR, et ce bien avant l’expiration du délai du 30 septembre 2007 imposé par le règlement no 1335/2005, aux fins de l’évaluation des substances actives relevant de la deuxième phase, tel le malathion, la Commission aurait omis de tenir compte des données scientifiques les plus récentes, y compris de toute nouvelle évolution reposant sur des faits scientifiques. La décision attaquée n’aurait donc pas été adoptée «compte tenu de l’état des connaissances scientifiques et techniques» et violerait ainsi l’article 95 CE, l’article 4, paragraphe 1, et l’article 5, paragraphe 1, de la directive 91/414.

164

La Commission conclut au rejet du deuxième moyen.

Appréciation du Tribunal

165

L’article 5, paragraphe 1, sous b), de la directive 91/414 prévoit que, pour qu’une substance puisse être inscrite à l’annexe I de cette même directive, il doit être permis d’escompter que, compte tenu de l’état des connaissances scientifiques et techniques, l’utilisation des produits phytopharmaceutiques contenant la substance active en cause, consécutive à une application conforme aux bonnes pratiques phytosanitaires, n’a pas d’effet nocif sur la santé humaine ou animale et qu’elle n’a pas d’influence inacceptable sur l’environnement, conformément à l’article 4, paragraphe 1, sous b), iv) et v), de ladite directive.

166

Cette disposition, interprétée en liaison avec le principe de précaution, implique que, s’agissant de la santé humaine, l’existence d’indices sérieux qui, sans écarter l’incertitude scientifique, permettent raisonnablement de douter de l’innocuité d’une substance, s’oppose, en principe, à l’inscription de cette substance à l’annexe I de la directive 91/414. En effet, le principe de précaution tend à prévenir les risques potentiels (arrêt du Tribunal du 11 juillet 2007, Suède/Commission, T-229/04, Rec. p. II-2437, point 161).

167

Dans ces conditions, il n’y a pas lieu d’examiner si l’article 95, paragraphe 3, CE, qui prévoit que «[l]a Commission, dans ses propositions […] en matière de santé […] prend pour base un niveau élevé en tenant compte notamment de toute nouvelle évolution basée sur des faits scientifiques», est applicable lorsque la Commission adopte une décision de non-inscription d’une substance active à l’annexe I de la directive 91/414. En effet, force est de constater que les principes de l’article 95, paragraphe 3, CE sont repris dans l’article 5, paragraphe 1, de la directive 91/414, interprété en liaison avec le principe de précaution.

168

Selon les requérantes, lorsqu’elle a adopté la décision attaquée, la Commission a omis de tenir compte des données scientifiques les plus récentes. Elles se réfèrent en substance au «nouveau» test Ames communiqué par Cheminova à l’EMR, en août 2005, puis par ce dernier à l’EFSA et à la Commission, pour ce qui concerne la génotoxicité de l’isomalathion, d’une part, et aux informations communiquées par Cheminova à l’EMR, à l’EFSA et à la Commission, entre juin 2004 et mars 2006, pour ce qui concerne les métabolites, d’autre part.

169

À cet égard, premièrement, il y a lieu de relever qu’il ne saurait être déduit de la référence à l’article 5, paragraphe 1, de la directive 91/414 à l’«état des connaissances scientifiques et techniques» que des entreprises ayant notifié une substance active et qui sont confrontées à la probabilité d’une décision de non-inscription de cette substance à l’annexe I de la directive 91/414 devraient bénéficier de la possibilité de soumettre de nouvelles études et données aussi longtemps que des doutes concernant l’innocuité de ladite substance active persistent. Une telle interprétation de ladite disposition serait contraire à l’objectif d’un niveau élevé de protection de la santé humaine et animale ainsi que de l’environnement qui sous-tend l’article 5, paragraphe 1, de la directive 91/414 en ce qu’elle équivaudrait à accorder à la partie ayant notifié la substance active, qui a, d’une part, la charge de la preuve de son innocuité et, d’autre part, la meilleure connaissance de la substance en cause, un droit de veto à l’adoption d’une éventuelle décision de non-inscription de la substance en cause à l’annexe I de la directive 91/414.

170

Il doit encore être ajouté que, s’agissant de l’évaluation du malathion, les requérantes n’allèguent ni a fortiori ne démontrent que l’«état des connaissances scientifiques et techniques» aurait évolué depuis la notification du dossier à l’EMR. La circonstance d’avoir refait un test connu de longue date, à savoir le test Ames, ne saurait, en aucun cas, être assimilée à un changement dans l’«état des connaissances scientifiques et techniques». À défaut d’avoir démontré une nouvelle évolution dans les connaissances scientifiques concernant le malathion depuis la notification du dossier à l’EMR de nature à mettre en cause la fiabilité des informations contenues dans ledit dossier, l’argument des requérantes tiré d’une obligation de la Commission de tenir compte de l’«état des connaissances scientifiques et techniques» ne peut, en tout état de cause, prospérer.

171

Deuxièmement, à titre surabondant, à supposer même que la Commission ait été obligée, conformément à l’article 5, paragraphe 1, de la directive 91/414, de tenir compte de toutes les informations mentionnées au point 168 ci-dessus avant d’adopter la décision attaquée, les requérantes n’ont pas démontré que l’ensemble des éléments dont aurait disposé la Commission aurait permis d’écarter tout doute raisonnable à propos des effets nocifs du malathion. À cet égard, il suffit de se référer à l’analyse effectuée aux points 109 à 152 ci-dessus dans le cadre de l’examen du premier moyen.

172

Il résulte de tout ce qui précède que le deuxième moyen doit aussi être rejeté.

Sur le troisième moyen, tiré d’une violation du principe de protection de la confiance légitime

Arguments des parties

173

Les requérantes font valoir que Cheminova a obtenu l’assurance que les nouvelles données qu’elle produirait seraient évaluées et feraient l’objet d’un examen collégial à tout moment de la procédure de réexamen du malathion. Cette assurance aurait été précise et donnée par écrit. Elles se réfèrent à cet effet au message électronique du représentant de l’EPCO du 14 juin 2004 adressé à Cheminova qui ferait état de ce que, «[s]i [elle] souhait[ait] que de nouvelles informations soient prises en considération, [elle] dev[ait] solliciter l’accord préalable de l’EMR en vue de l’acceptation des nouvelles études» et de ce que, «[s]i l’EMR accept[ait] les nouvelles études, ils préparer[aient] un addendum qui sera[it] examiné en temps voulu». Cette assurance précise et écrite du représentant de l’EPCO serait, en outre, pleinement conforme à l’aide-mémoire concernant certains aspects des procédures d’évaluation de substance existantes en vue de leur éventuelle inscription à l’annexe I de la directive 91/414 dont le point 7 énoncerait que «[d]e nouvelles données devenant disponibles postérieurement à l’introduction de la monographie ne ser[aient] examinées lors des réunions d’examen collégial que si l’EMR a été en mesure d’évaluer ces données» et que «[t]outes les nouvelles données soumises lors d’une réunion ser[aient] reprises dans les comptes rendus des réunions telles qu’elles [avaie]nt été fournies», étant précisé que, «[s]’il n’a[vait] pas été possible d’examiner certaines données nouvelles, cela sera[it] mentionné dans le compte rendu».

174

En faisant application de ce qui précède au test Ames relatif à la génotoxicité de l’isomalathion, les requérantes relèvent que l’EMR a marqué son accord pour l’accepter après avoir transmis le PRE à l’EFSA, que l’EMR l’a évalué, qu’il a rédigé un addendum au PRE et qu’il l’a transmis à l’EPCO en octobre 2005. En d’autres termes, Cheminova et l’EMR auraient respecté chaque condition posée par le représentant de l’EPCO dans son message électronique du 14 juin 2004.

175

Le fait que ni l’EFSA (antérieurement l’EPCO) ni la Commission n’ait pris en compte les nouvelles données transmises au cours de la procédure d’examen collégial, et ce en dépit de l’assurance précise et écrite qu’elles le feraient et en dépit de la pratique ou des lignes directrices de la Commission à cet égard, signifierait que la confiance légitime de Cheminova n’a pas été respectée. Les requérantes ajoutent que si les données avaient été prises en considération et avaient fait l’objet d’un examen collégial, les conclusions scientifiques et la décision attaquée auraient été différentes.

176

Dans leur réplique, les requérantes rappellent que la procédure d’évaluation de substances actives prévue par la directive 91/414 est menée par deux autorités — l’EMR et l’EFSA — agissant au nom ou sous l’autorité de la Commission. La décision finalement adoptée par la Commission le serait sur le fondement de cette évaluation. Une assurance et/ou une demande émanant de l’une de ces autorités suffirait donc à susciter une confiance légitime. Or, les demandes de production de données supplémentaires de l’EMR et de l’EFSA ainsi que l’attitude ultérieure de l’EMR auraient fait naître chez Cheminova une confiance légitime dans le fait que les données seraient évaluées et prises en compte dans le cadre de la procédure d’évaluation.

177

Enfin, les requérantes ne seraient pas tenues dans le cadre du présent moyen de «produire des preuves» que la décision attaquée aurait été différente afin d’établir l’illégalité de ladite décision. Il suffirait qu’elles démontrent que la décision attaquée aurait pu avoir un contenu différent.

178

La Commission estime qu’elle n’a pas violé la confiance légitime de Cheminova et soutient que le troisième moyen doit être rejeté.

Appréciation du Tribunal

179

Selon une jurisprudence constante, le droit de se prévaloir de la protection de la confiance légitime s’étend à tout particulier qui se trouve dans une situation de laquelle il ressort que l’administration communautaire, en lui fournissant des assurances précises, a fait naître chez lui des espérances fondées (arrêt Di Lenardo et Dilexport, point 81 supra, point 70; arrêts Embassy Limousines & Services/Parlement, point 81 supra, point 74; voir, en ce sens, arrêt Atlanta/Communauté européenne, point 81 supra, point 52). Constituent de telles assurances, quelle que soit la forme sous laquelle ils sont communiqués, des renseignements précis, inconditionnels et concordants, émanant de sources autorisées et fiables (arrêt Convertisseur d’énergie éolienne, point 81 supra, point 36). En revanche, nul ne peut invoquer une violation de ce principe en l’absence d’assurances précises que lui aurait fournies l’administration (arrêts de la Cour du 24 novembre 2005, Allemagne/Commission, C-506/03, non publié au Recueil, point 58, et du , Belgique et Forum 187/Commission, C-182/03 et C-217/03, Rec. p. I-5479, point 147).

180

Il y a lieu de relever d’abord que dans le cadre de la procédure d’évaluation d’une substance active aux fins de son inscription ou non dans l’annexe I à la directive 91/414, qui est prévue à l’article 8 du règlement no 451/2000, l’EFSA évalue les effets nocifs de la substance concernée et adresse un avis scientifique sur ce point à la Commission. Il appartient ensuite à la Commission, et le cas échéant au Conseil, de prendre une décision définitive sur la substance active concernée. Eu égard au rôle ainsi attribué à l’EFSA dans la procédure d’évaluation d’une substance active, il pourrait être considéré que tant des assurances précises formulées par la Commission que celles formulées par l’EFSA au cours de la procédure d’évaluation d’une substance active sont susceptibles de fonder une confiance légitime chez le notifiant.

181

En revanche, et indépendamment de la question de savoir si des assurances précises formulées par l’EMR au cours de la procédure d’évaluation de la substance active en vue de la préparation du PRE pouvaient faire naître une confiance légitime chez le notifiant, il doit être relevé que le comportement de l’EMR, à un moment où le PRE a déjà été communiqué à l’EFSA et donc à un moment où la procédure d’évaluation a été reprise au niveau communautaire, ne peut plus être considéré comme étant de nature à fonder une telle confiance légitime et à affecter la légalité de la décision attaquée. Dès lors que, en l’espèce, le PRE a été communiqué à l’EFSA le 2 février 2004 et que les documents et comportements qui auraient fondé la confiance légitime de Cheminova sont tous postérieurs à cette date, seuls les documents et comportements émanant de l’EFSA et de la Commission doivent être examinés dans le cadre du présent moyen.

182

Or, il ne ressort d’aucun élément du dossier que l’EFSA ou la Commission auraient fourni à Cheminova une quelconque assurance susceptible de faire naître chez elle la confiance légitime que de nouvelles données qu’elle produirait au cours de la procédure d’évaluation du malathion seraient prises en considération.

183

Premièrement, s’agissant de l’attitude de l’EFSA au cours de la procédure, il y a lieu de relever que, contrairement à ce que prétendent les requérantes, le message électronique du 14 juin 2004 ne contient aucune assurance précise de la part de l’EFSA qu’elle procéderait à l’examen de toute nouvelle étude ou donnée soumise par Cheminova au cours de la procédure. En effet, tout au plus, l’EFSA y formule l’assurance qu’elle examinera l’éventuel addendum préparé par l’EMR. En outre, le contenu du courriel de Cheminova à l’EMR du fait apparaître que Cheminova n’avait reçu de la part de l’EFSA aucune assurance précise qu’elle évaluerait toute nouvelle étude ou donnée soumise. En effet, dans ce courriel, Cheminova prend acte «des récentes lignes directrices […] du groupe EPCO selon lesquelles le notifiant n’est pas autorisé à formuler de commentaires» et indique qu’elle serait «très reconnaissante si l’[EMR] pouvait considérer présenter» les informations supplémentaires à l’EFSA.

184

S’agissant, deuxièmement, de l’attitude de la Commission au cours de la procédure, il ressort du dossier et notamment de la lettre de la Commission à Cheminova du 6 février 2006 qu’elle n’a formulé aucune assurance que cette dernière pourrait déposer des études et données tout au long de la procédure d’évaluation. En effet, dans ladite lettre, la Commission précise qu’«il n’était pas possible à ce stade de la procédure, de prendre en considération de nouvelles données ou études».

185

En outre, l’aide-mémoire, qui date de 1998, ne saurait être considéré, ainsi que le souligne la Commission, comme susceptible de fonder une confiance légitime chez Cheminova s’agissant de la procédure prévue au règlement no 451/2000 et, en particulier à son article 8, tel qu’il a été modifié en 2002.

186

Troisièmement, et en tout état de cause, il doit être constaté que, dans leur argumentation, les requérantes se réfèrent, en substance, à l’absence de prise en compte du test Ames d’août 2005. À supposer même que l’EFSA ou la Commission aient donné des assurances précises au sujet de la prise en compte de ce nouveau test, quod non, ces assurances n’auraient pas pu fonder une confiance légitime chez Cheminova dès lors que l’article 8, paragraphes 2 et 5, du règlement no 451/2000 prévoit expressément que de nouvelles études ne sont, en principe, pas admises au moment où, respectivement, l’EMR ou l’EFSA ont entamé leur évaluation de la substance active (voir point 129 ci-dessus). En effet, il ressort de la jurisprudence que seules des assurances conformes aux normes applicables peuvent fonder une confiance légitime (arrêts du Tribunal du 30 juin 2005, Branco/Commission, T-347/03, Rec. p. II-2555, point 102, et du , Cementbouw Handel & Industrie/Commission, T-282/02, Rec. p. II-319, point 77).

187

Il ressort de tout ce qui précède que le troisième moyen doit être rejeté.

Sur le quatrième moyen, tiré d’une violation du principe de proportionnalité

Arguments des parties

188

Se référant à l’arrêt Industrias Químicas del Vallés/Commission, point 106 supra (points 76 et 77), et aux conclusions de l’avocat général M. Colomer sous cet arrêt (Rec. p. I-6560, point 77), les requérantes font valoir que, dans la présente espèce, la Commission a violé le principe de proportionnalité.

189

En premier lieu, il ressortirait de l’arrêt Industrias Químicas del Vallés/Commission, point 106 supra, que la directive 91/414 et le règlement no 451/2000, et notamment son article 8, paragraphe 5, n’imposent pas de délai à caractère péremptoire, s’agissant de la production de données par le notifiant. La Commission aurait dû, pour se conformer aux exigences du principe de proportionnalité, proroger, conformément à la demande de Cheminova, tout délai qu’elle entendait imposer afin de prendre en considération — et d’examiner — toute nouvelle donnée produite par cette requérante. En privilégiant le respect du délai de l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 451/2000, qui n’était en tout état de cause pas péremptoire, la Commission aurait omis d’examiner, avec soin et impartialité, tous les éléments pertinents du cas d’espèce, qui contrediraient les conclusions retenues dans la décision attaquée. Au contraire, en raison de l’absence de proportionnalité de l’approche de la Commission, l’interdiction du malathion entrée en vigueur à compter du 7 décembre 2007 aurait été fondée sur des données scientifiques remontant à 2004. L’attitude de la Commission serait d’autant plus contestable que les organes légalement mandatés en vue de procéder à l’examen auraient eux-mêmes omis de respecter les délais qui leur étaient imposés. Ainsi, l’EFSA aurait pris deux ans pour mener son examen collégial, alors que le délai de procédure qui était applicable n’aurait été que d’un an.

190

Les requérantes estiment que la prorogation du délai de l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 451/2000 aurait été justifiée en l’espèce. Premièrement, le délai de l’article 8, paragraphe 5, ne s’appliquerait «qu’au cours de l’examen collégial». Dans le cas du malathion, la conduite de cet examen collégial aurait pu être autorisée, à bon droit, du 2 février 2004 (date de réception du PRE) au . Or, s’agissant du malathion, l’examen en question se serait déroulé du au . Ni la Commission, en tant qu’autorité communautaire assumant la responsabilité d’ensemble de l’évaluation des risques du malathion, ni l’EFSA n’aurait le droit de refuser d’accepter de nouvelles données sur le fondement de l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 451/2000. Deuxièmement, la législation applicable imposerait à la Commission de mener le réexamen avant le . En d’autres termes, la Commission aurait disposé d’assez de temps pour examiner, «à titre confirmatif», les conclusions de l’EMR selon lesquelles l’isomalathion ne présenterait pas de risques de génotoxicité. Elles font observer à cet effet qu’un examen collégial du test Ames aurait pu être réalisé rapidement dès lors qu’une personne compétente pouvait y procéder en moins d’une journée. Troisièmement, Cheminova aurait obtenu une assurance précise, selon laquelle ses données nouvelles seraient examinées.

191

Dans leur réplique, premièrement, les requérantes font valoir que des demandes claires de production de nouvelles données ont été adressées. Ainsi, indépendamment du moment auquel ces demandes ont été effectuées au cours de la procédure, la Commission aurait dû prendre en compte les données qui avaient été produites en réponse à ces demandes. Deuxièmement, lorsque les autorités compétentes prolongent les délais «par convenance personnelle», il conviendrait d’adapter également l’ensemble de l’échéancier de la procédure d’évaluation. La directive 91/414 fixerait des délais aux fins de l’évaluation de substances actives non seulement pour les notifiants, mais également pour l’EMR, l’EFSA et la Commission. Or, les autorités compétentes ne sauraient chercher à imposer «à la lettre» à Cheminova le respect de délais applicables alors qu’elles auraient elles-mêmes omis de respecter les délais qui leur auraient été impartis. Ainsi, l’EFSA aurait dépassé de près d’un an le délai prévu à l’article 8, paragraphe 7, du règlement no 451/2000. Troisièmement, il serait possible de modifier les délais en fonction des circonstances du cas d’espèce. En effet, dans son arrêt Industrias Químicas del Vallés/Commission, point 106 supra, la Cour aurait considéré que, lorsque les autorités en charge de l’évaluation (c’est-à-dire l’EMR, l’EFSA et la Commission) placent l’auteur de la notification dans une situation imprévue et complexe en changeant de position au sujet des données présentées ou en demandant de nouvelles données sans lui octroyer un délai suffisant aux fins de la production de ces données, elles seraient tenues de prolonger les délais applicables. En l’espèce, Cheminova aurait été confrontée à un changement de circonstances (demande de données nouvelles) en contradiction avec l’attitude antérieure de l’EMR (décision reconnaissant le caractère complet du dossier). Les demandes de données auraient été adressées à Cheminova à un stade avancé de la procédure et après que le dossier notifié aurait été déclaré complet, mais celle-ci ne se serait pas vu offrir, par l’EFSA ou la Commission, la possibilité suffisante de fournir les données demandées. Dans ces conditions, la Commission ne saurait utilement faire valoir qu’une prolongation indéfinie du délai d’évaluation d’une substance active serait contraire à l’objectif poursuivi par la directive 91/414. Quatrièmement, la Commission aurait fondé la décision attaquée sur des données qui ne correspondraient plus à l’«état des connaissances scientifiques et techniques», et ce en violation de l’article 5, paragraphe 1, de la directive 91/414. Le «principe» prévu par cette disposition s’appliquerait, en effet, non seulement à la directive 91/414 elle-même, mais également à toutes les mesures adoptées par la Commission en vertu de cette «directive cadre», y compris la décision attaquée.

192

En second lieu, la Commission aurait violé le principe de proportionnalité dès lors qu’elle aurait pu adopter une décision moins restrictive que la décision attaquée qui aurait été aussi de nature à répondre aux préoccupations relatives à la santé humaine et/ou à l’environnement, sur la base de l’état des connaissances et des dernières découvertes scientifiques. Premièrement, la Commission aurait pu «retourner» les données nouvelles à l’EFSA aux fins de leur évaluation. En effet, la Commission aurait été en droit de renvoyer l’affaire à l’EFSA afin que les nouvelles données répondant aux sujets de préoccupation identifiés et soulevés par l’EFSA au cours de son examen collégial fassent, à leur tour, l’objet d’un examen collégial. Le seul délai qu’il conviendrait de respecter à cet effet serait le délai de douze ans prévu à l’article 8 de la directive 91/414, tel que prorogé par la Commission jusqu’au 30 septembre 2007. Deuxièmement, conformément à sa pratique, la Commission aurait pu choisir de soumettre à l’examen des États membres la question relative à la génotoxicité d’une concentration d’isomalathion allant jusqu’à 0,2% dans le produit «malathion technique» ainsi que la question relative au métabolite «desméthyl de malathion». À cet égard, Cheminova aurait adressé plusieurs demandes à la Commission, tendant à ce que celle-ci adopte cette approche proportionnée à l’égard du malathion (voir message électronique de Cheminova à la Commission du ). En d’autres termes, au lieu d’interdire le malathion en refusant de l’inscrire à l’annexe I de la directive 91/414, une réponse plus proportionnée aux sujets de préoccupation aurait été de permettre son inscription sous réserve de la production de données au niveau des États membres. Troisièmement, il serait disproportionné d’interdire le malathion en sachant qu’un simple examen collégial de ces données nouvelles aurait suffi à établir que la substance répondait aux critères de l’article 5, paragraphe 1, de la directive 91/414 et alors que les États membres auraient été en mesure d’effectuer cet examen et de prendre les décisions appropriées.

193

La Commission rétorque que le quatrième moyen doit être rejeté.

Appréciation du Tribunal

194

Selon une jurisprudence constante, le principe de proportionnalité, qui fait partie des principes généraux du droit communautaire, exige que les actes des institutions communautaires ne dépassent pas les limites de ce qui est approprié et nécessaire à la réalisation des objectifs légitimes poursuivis par la réglementation en cause, étant entendu que, lorsqu’un choix s’offre entre plusieurs mesures appropriées, il convient de recourir à la moins contraignante, et que les inconvénients causés ne doivent pas être démesurés par rapport aux buts visés (arrêt de la Cour du 18 novembre 1987, Maizena e.a., 137/85, Rec. p. 4587, point 15; arrêt Pfizer Animal Health/Conseil, point 94 supra, point 411).

195

Cependant, en matière agricole, le contrôle juridictionnel du principe de proportionnalité est particulier, en ce que la Cour et le Tribunal reconnaissent au législateur communautaire un pouvoir discrétionnaire qui correspond aux responsabilités politiques que les articles 34 CE à 37 CE lui attribuent dans ce domaine (arrêt de la Cour du 5 mai 1998, National Farmers’ Union e.a., C-157/96, Rec. p. I-2211, point 61). Par conséquent, seul le caractère manifestement inapproprié d’une mesure arrêtée en ce domaine, par rapport à l’objectif que l’institution compétente entend poursuivre, peut affecter la légalité d’une telle mesure (arrêt de la Cour du , Jippes e.a., C-189/01, Rec. p. I-5689, point 82; arrêts du Tribunal Pfizer Animal Health/Conseil, point 94 supra, point 412, et du , Alpharma/Conseil, T-70/99, Rec. p. II-3495, point 177).

196

En l’espèce, la décision attaquée est fondée sur la directive 91/414, qui, elle, a pour base juridique l’article 43 du traité CE (devenu, après modification, article 37 CE). Dans ces conditions, il doit être examiné si la décision attaquée est manifestement inappropriée pour atteindre l’objectif prévu par le système de réévaluation mis en place par cette directive, à savoir la protection de la santé humaine et animale ainsi que de l’environnement.

197

S’agissant du premier grief soulevé par les requérantes selon lequel la Commission, en privilégiant le respect du délai de l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 451/2000, aurait omis d’examiner, avec soin et impartialité, tous les éléments pertinents du cas d’espèce, et notamment les informations communiquées par Cheminova postérieurement à la notification du dossier à l’EMR, force est de constater qu’il ne concerne pas la proportionnalité de la mesure prise par la Commission. Il a déjà été procédé à l’examen partiel de ce grief dans le cadre du premier moyen (voir points 131 à 138 ci-dessus). Pour le surplus, le premier grief sera examiné dans le cadre des septième et huitième moyens dès lors qu’il porte en substance sur la prétendue violation par la Commission du principe de bonne administration et des droits de la défense de Cheminova au cours de la procédure précédant l’adoption de la décision attaquée. Il en est de même pour ce qui concerne le premier argument invoqué dans le cadre du second grief selon lequel la Commission aurait dû renvoyer l’affaire à l’EFSA afin que les nouvelles données communiquées par Cheminova fassent l’objet d’un examen collégial, qui doit être examiné dans le cadre du septième moyen.

198

Par les autres arguments invoqués dans le cadre du second grief, les requérantes soutiennent en substance que la Commission aurait dû adopter une mesure moins restrictive.

199

Dans la mesure où les requérantes prétendent que la Commission aurait pu choisir de soumettre à l’examen des États membres les sujets de préoccupation soulevés, il doit être constaté qu’un tel argument ne trouve aucun appui dans le cadre juridique applicable. En effet, au moment où la Commission intervient dans le cadre de l’évaluation de la substance active, l’EFSA a déjà, conformément à l’article 8, paragraphe 7, du règlement no 451/2000, formulé un avis sur la conformité de ladite substance aux exigences de sécurité de la directive 91/414. Or, à ce stade de la procédure, ni la directive 91/414 ni le règlement no 451/2000 ne prévoient une quelconque intervention des États membres aux fins de l’évaluation de la nocivité de la substance active. Il y a lieu de préciser à cet égard que, conformément à l’article 8, paragraphe 8, du règlement no 451/2000 et à l’article 19 de la directive 91/414, seule la Commission et, le cas échéant, le Conseil, sont compétents pour inscrire ou non une substance active à l’annexe I de la directive 91/414.

200

Enfin, dans la mesure où l’argumentation des requérantes doit être comprise en ce sens que la Commission aurait dû autoriser l’inscription en l’assortissant de conditions conformément à l’article 5, paragraphe 4, de la directive 91/414, il doit être rappelé que cette disposition a pour effet de permettre l’inscription de substances qui ne satisfont pas aux exigences de l’article 5, paragraphe 1, de cette même directive en imposant certaines restrictions qui écartent les utilisations problématiques de la substance en cause (arrêt Suède/Commission, point 166 supra, point 169).

201

Dès lors que l’article 5, paragraphe 4, de la directive 91/414 apparaît comme un tempérament à l’article 5, paragraphe 1, de la directive 91/414, il convient de l’interpréter à la lumière du principe de précaution. En conséquence, avant l’inscription d’une substance à l’annexe I de la directive 91/414, il doit être établi, au-delà de tout doute raisonnable, que les restrictions à l’utilisation de la substance en cause permettent d’assurer une utilisation de cette substance qui soit conforme aux exigences de l’article 5, paragraphe 1, de la directive 91/414 (arrêt Suède/Commission, point 166 supra, point 170). Toutefois, il doit être constaté que, dans le cadre du présent moyen, les requérantes ne précisent nullement les conditions que la Commission aurait pu imposer aux États membres qui auraient été de nature à assurer une utilisation du malathion conforme aux exigences de l’article 5, paragraphe 1, de la directive 91/414. En tout état de cause, une décision permettant l’inscription du malathion à l’annexe I de la directive 91/414 sous réserve de la production de données au niveau des États membres, ainsi que cela est suggéré par les requérantes, n’est pas de nature à écarter les utilisations problématiques de la substance en cause.

202

Enfin, il ressort de l’analyse du premier moyen que l’affirmation des requérantes selon laquelle il serait disproportionné d’interdire le malathion en sachant qu’un simple examen collégial de ces données nouvelles aurait suffi à établir que la substance répondait aux critères de l’article 5, paragraphe 1, de la directive 91/414 repose sur une prémisse erronée. Il n’a en effet pas été démontré que la prise en compte de l’ensemble des informations produites par Cheminova au cours de la procédure d’évaluation du malathion aurait pu dissiper tout doute raisonnable chez l’EFSA et la Commission à propos des effets nocifs de cette substance active.

203

Dans ces conditions, le présent moyen ne peut pas non plus être accueilli.

Sur le cinquième moyen, tiré d’une violation de l’article 8, paragraphe 7, du règlement no 451/2000

Arguments des parties

204

À titre subsidiaire, et dans la mesure où la Commission serait tenue de respecter des délais «impératifs», les requérantes font valoir que l’EFSA, qui a reçu le PRE le 2 février 2004, était tenue, conformément à l’article 8, paragraphe 7, du règlement no 451/2000, de transmettre à la Commission son rapport avant le . Or, l’EFSA aurait transmis ledit rapport à la Commission seulement le . L’EFSA, qui aurait ainsi transmis son rapport avec près d’un an de retard, aurait mené son évaluation et la majorité des réunions consacrées au malathion au cours d’une période (allant du au ) durant laquelle elle n’aurait pas été légalement habilitée à le faire et pour laquelle elle n’aurait pas disposé du mandat en bonne et due forme requis, délivré par la Commission ou une autre institution communautaire. L’EFSA aurait donc outrepassé ses compétences.

205

Dès lors que le rapport de l’EFSA aurait, conformément à l’article 8, paragraphe 8, du règlement no 451/2000, servi de base à la décision attaquée (considérant 4 de la décision attaquée), le vice de procédure dont serait affecté ledit rapport affecterait la légalité de la décision attaquée. En effet, si l’EFSA avait respecté le délai et l’échéance du 1er février 2005 (ou si la Commission avait imposé à l’EFSA de respecter ce délai de procédure), la décision attaquée aurait pu avoir un contenu différent, puisque le PRE rédigé par l’EMR (recommandant l’inscription du malathion) aurait dû servir de base à ladite décision. À défaut, la Commission aurait «retourné» le PRE à l’EFSA ou à un autre organe scientifique indépendant en vue de la réalisation ultérieure d’un examen collégial. Si elle avait procédé ainsi, cela aurait permis à l’EMR de porter à la connaissance de Cheminova tout éventuel sujet de préoccupation supplémentaire et cela aurait permis à cette requérante de disposer de davantage de temps pour étudier le PRE et réaliser de nouvelles études ou produire davantage de données confirmatives afin de répondre à tous les sujets de préoccupation en suspens.

206

La Commission conclut au rejet du cinquième moyen.

Appréciation du Tribunal

207

Il y a lieu de rappeler que, conformément à l’article 8, paragraphe 7, du règlement no 451/2000, l’EFSA évalue le PRE et transmet à la Commission un avis sur la conformité de la substance active aux exigences de sécurité de la directive 91/414 «dans un délai d’un an» après la réception du PRE. En l’espèce, il doit être constaté que l’EFSA n’a pas respecté ce délai. En effet, alors que l’EFSA a reçu le PRE le 2 février 2004, elle n’a transmis son avis à la Commission que le .

208

À supposer même que le délai de l’article 8, paragraphe 7, du règlement no 451/2000 soit impératif, le dépassement dudit délai n’affecterait la légalité de la décision attaquée que s’il était établi que, en l’absence de cette irrégularité, ladite décision aurait pu avoir un contenu différent (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 29 octobre 1980, van Landewyck e.a./Commission, 209/78 à 215/78 et 218/78, Rec. p. 3125, point 47; arrêt du Tribunal du , Degussa/Commission, T-279/02, Rec. p. II-897, point 416).

209

À cet égard, d’une part, il doit être rappelé que le dossier notifié ne contenait pas tous les éléments nécessaires pour permettre à l’EFSA d’évaluer les effets nocifs du malathion. D’autre part, il doit être relevé que l’EFSA n’est pas liée par le PRE. En effet, dans le cas contraire, l’intervention de l’EFSA serait dépourvue de sens. Or, si à la suite des échanges de vues et d’informations organisés au sein de l’EFSA pendant de nombreux mois, cette autorité n’est finalement pas parvenue, le 26 janvier 2006, à conclure à l’absence d’effets nocifs du malathion, elle n’aurait, a fortiori, eu égard au caractère insuffisant du dossier notifié, pas pu parvenir à un résultat différent si elle avait pris sa décision dans le délai d’un an à compter de la soumission du PRE.

210

Le présent moyen ne peut donc pas non plus être accueilli.

Sur le sixième moyen, tiré d’une violation du «principe de non-discrimination»

Arguments des parties

211

Les requérantes font valoir que les substances actives, qui sont soumises à une évaluation des risques dans le cadre du programme de travail transitoire mené par la Commission au titre de l’article 8, paragraphe 2, de la directive 91/414 et des règlements d’application, se trouvent toutes dans une situation identique. Après avoir relevé que, conformément à l’article 6, paragraphe 1, de la directive 91/414, l’inscription d’une substance active à l’annexe I de la directive 91/414 peut être soumise à certaines conditions, elles font observer que plusieurs substances ont été inscrites à l’annexe I de la directive 91/414 même si elles présentaient des risques de toxicité sur la base des données fournies, à condition toutefois que les substances soient soumises à des tests supplémentaires [voir la directive 2005/72/CE de la Commission, du 21 octobre 2005, modifiant la directive 91/414, en vue d’y inscrire les substances actives chlorpyriphos, chlorpyriphos-méthyl, mancozèbe, manèbe et métirame (JO L 279, p. 63); la directive 2006/16/CE de la Commission, du , modifiant la directive 91/414 en vue d’y inscrire la substance active oxamyl (JO L 36, p. 37); la directive 2007/25/CE de la Commission, du , modifiant la directive 91/414 en vue d’y inscrire les substances actives diméthoate, diméthomorphe, glufosinate, métribuzine, phosmet et propamocarbe (JO L 106, p. 34)].

212

La décision attaquée violerait le «principe de non-discrimination». En effet, il n’existerait aucun motif qui justifierait objectivement la distinction opérée aux fins de l’application de l’article 6, paragraphe 1, de la directive 91/414 à l’oxamyl, au mancozèbe et au manèbe, d’une part, et au malathion, d’autre part. L’absence de justification objective serait particulièrement flagrante, eu égard au fait que l’attention de la Commission aurait été attirée à maintes reprises sur des données répondant aux prétendus sujets de préoccupation scientifique et qui auraient aisément pu être transmises aux autorités compétentes des États membres aux fins de leur évaluation.

213

La Commission rétorque que le «principe de non-discrimination» n’a pas été violé et soutient que le sixième moyen doit dès lors être rejeté.

Appréciation du Tribunal

214

Il doit être rappelé que le principe d’égalité de traitement s’oppose à ce que des situations comparables soient traitées de manière différente et à ce que des situations différentes soient traitées de manière identique, à moins qu’un tel traitement ne soit objectivement justifié (arrêts de la Cour du 13 décembre 1984, Sermide, 106/83, Rec. p. 4209, point 28, et du , Hoche, C-174/89, Rec. p. I-2681, point 25; arrêt du Tribunal du , Groupe Danone/Commission, T-38/02, Rec. p. II-4407, point 453).

215

En l’espèce, les requérantes considèrent que, s’agissant des risques de nocivité, le malathion est comparable aux substances actives visées par les directives 2005/72, 2006/16 et 2007/25. La différence de traitement du malathion par rapport aux substances actives visées par lesdites directives qui, elles, ont été inscrites à l’annexe I de la directive 91/414 ne serait pas objectivement justifiée.

216

Le Tribunal relève qu’il ressort des directives 2005/72 (considérant 5), 2006/16 (considérant 4) et 2007/25 (considérant 4) que la Commission a constaté que les différents examens effectués avaient montré que les produits phytopharmaceutiques contenant les substances actives en cause pouvaient de manière générale être considérés comme satisfaisant aux exigences énoncées à l’article 5, paragraphe 1, sous a) et b), de la directive 91/414. Il a donc été procédé à l’inscription de ces substances actives à l’annexe I de ladite directive, à condition toutefois que des tests supplémentaires soient effectués de manière à confirmer l’évaluation des risques sur certains points.

217

En revanche, pour le malathion, la Commission n’a jamais constaté que les produits phytopharmaceutiques contenant cette substance active satisfaisaient aux exigences énoncées à l’article 5, paragraphe 1, sous a) et b), de la directive 91/414. Au contraire, elle a constaté, au considérant 6 de la décision attaquée, que «les évaluations effectuées sur la base des informations fournies et examinées lors des réunions des experts de l’[EFSA] n’[avaient] pas démontré que, dans les conditions d’utilisation proposées, les produits phytopharmaceutiques contenant du malathion devraient satisfaire, d’une manière générale, aux conditions fixées à l’article 5, paragraphe 1, [sous] a) et b), de la directive 91/414» (considérant 6 de la décision attaquée). Selon la Commission, «il n’a [donc] pas été possible, sur la base des informations disponibles, de déterminer si le malathion satisfaisait aux conditions d’inscription à l’annexe I de la directive 91/414» (considérant 5 de la décision attaquée).

218

Dès lors que l’évaluation des effets nocifs du malathion et celle des substances actives visées par les directives 2005/72, 2006/16 et 2007/25 avaient abouti à des résultats différents, la Commission a pu réserver un traitement différent au malathion et a donc pu décider, sans violer le principe d’égalité de traitement, de ne pas inscrire cette substance active à l’annexe I de la directive 91/414.

219

Partant, le présent moyen doit aussi être rejeté.

Sur le septième moyen, tiré d’une violation du principe de bonne administration

Arguments des parties

220

Les requérantes font valoir que la Commission a violé le principe de bonne administration, tel qu’il est consacré à l’article 211 CE, en omettant de veiller à ce que l’EMR et l’EFSA se prononcent dans les délais prescrits par la directive 91/414 (voir, par analogie, arrêt de la Cour du 21 novembre 1991, Technische Universität München, C-269/90, Rec. p. I-5469; arrêt Pfizer Animal Health/Conseil, point 94 supra). Elles relèvent que l’EMR a transmis le PRE à l’EFSA après l’expiration du délai fixé par le règlement no 451/2000 (à savoir le au lieu de toute date antérieure au , soit au moins douze mois après avoir attesté du caractère complet du dossier notifié) et que l’EFSA a transmis son rapport à la Commission après l’expiration du délai fixé par le règlement no 451/2000 (à savoir le au lieu de toute date antérieure au , soit près de douze mois après avoir reçu le PRE).

221

Les compétences attribuées à la Commission aux fins du réexamen des substances actives relevant de la deuxième phase du programme de travail devraient être exercées dans le strict respect du cadre fixé par la directive 91/414 et, à l’intérieur même de ce cadre, conformément aux instructions du Conseil et des règlements d’application. En refusant d’accepter des nouvelles données reflétant l’état des connaissances scientifiques, la Commission aurait agi en dehors de ces limites et, en conséquence, aurait adopté une décision contraire aux articles 4 et 5 de la directive 91/414 et à l’article 95 CE.

222

La Commission aurait également agi de manière disproportionnée en imposant des délais «impératifs, artificiels, dénués de finalité», aux fins de la production des données. Elle ne saurait prétendre avoir examiné «attentivement» (considérant 6 de la décision attaquée) les observations présentées par Cheminova dès lors que le nouveau test Ames de 2005 énoncerait clairement que le malathion ne présente aucun risque mutagène.

223

La Commission soutient que le septième moyen ne peut pas non plus être accueilli.

Appréciation du Tribunal

224

Il doit être rappelé que le principe de bonne administration fait partie des garanties conférées par l’ordre juridique communautaire dans les procédures administratives (arrêt du Tribunal du 15 mars 2006, BASF/Commission, T-15/02, Rec. p. II-497, point 501).

225

Dans le cadre de leur moyen tiré d’une violation du principe de bonne administration, les requérantes critiquent d’abord le fait que la Commission n’aurait pas veillé à ce que l’EMR et l’EFSA respectent les délais imposés par la directive 91/414 et le règlement no 451/2000.

226

À cet égard, il y a lieu de relever que, même si l’EMR et l’EFSA interviennent dans le cadre de la procédure d’évaluation des substances actives, le cadre juridique applicable n’organise aucune relation hiérarchique entre l’EMR et l’EFSA, d’une part, et la Commission, d’autre part. Dans ces conditions, le fait que la Commission n’aurait pas veillé à ce que l’EMR et l’EFSA respectent les délais imposés par la directive 91/414 et le règlement no 451/2000 ne saurait donc être considéré comme une violation du principe de bonne administration de la part de la Commission (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du Tribunal du 20 mars 2002, ABB Asea Brown Boveri/Commission, T-31/99, Rec. p. II-1881, points 100 à 104).

227

Ensuite, les requérantes font valoir que le principe de bonne administration a été violé dès lors que la Commission aurait omis d’examiner avec soin et impartialité tous les éléments pertinents du cas d’espèce et notamment l’ensemble des données que les requérantes auraient soumises au cours de la procédure précédant l’adoption de la décision attaquée. Ce grief a également été formulé dans le cadre du moyen tiré d’une violation du principe de proportionnalité.

228

À cet égard, premièrement, il ressort d’une jurisprudence constante que l’obligation pour l’institution compétente d’examiner, avec soin et impartialité, tous les éléments pertinents du cas d’espèce se rattache au principe de bonne administration (voir arrêt ABB Asea Brown Boveri/Commission, point 226 supra, point 99, et la jurisprudence citée; arrêt du Tribunal du 18 juin 2008, Hoechst/Commission, T-410/03, Rec. p. II-881, point 129).

229

Deuxièmement, aux fins d’apprécier si, dans le cas d’espèce, le principe de bonne administration a été violé dans le cadre de la procédure ayant conduit à l’adoption de la décision attaquée, il y a lieu de rappeler d’abord les responsabilités incombant respectivement au notifiant, d’une part, et à l’EMR, à l’EFSA et à la Commission, d’autre part.

230

À cet effet, il doit être rappelé que, d’une part, conformément à l’article 6, paragraphe 1, du règlement no 451/2000, il appartenait à Cheminova, de notifier un dossier complet concernant le malathion qui aurait permis à l’EMR, à l’EFSA et à la Commission d’effectuer une évaluation des effets nocifs du malathion au sens de l’article 5, paragraphe 1, de la directive 91/414 (voir point 135 ci-dessus). Toutefois, il ressort de l’examen du premier moyen que le dossier notifié ne contenait pas d’éléments suffisants pour permettre auxdites autorités d’effectuer l’évaluation de la nocivité de la substance active en cause.

231

D’autre part, l’article 8 du règlement no 451/2000 énonce, à deux reprises, dans ses paragraphes 2 et 5, la règle selon laquelle de «nouvelles études» ne sont, en principe, pas admises postérieurement à la notification du dossier par le notifiant (voir point 137 ci-dessus). Même si, selon lesdites dispositions, l’EMR, le cas échéant avec l’accord de l’EFSA lorsque le PRE a déjà été transmis à cette autorité, peut inviter le notifiant à soumettre dans des délais spécifiés, des données complémentaires que l’EMR ou, le cas échéant l’EFSA, jugent nécessaires à la clarification du dossier, elles ne prévoient pas une telle exception pour la soumission de nouvelles études.

232

Il ressort donc de l’article 8, paragraphes 2 et 5, du règlement no 451/2000 qu’une demande émanant de l’EMR, au sens desdites dispositions, porte sur des «données complémentaires», et non sur des «nouvelles études», et spécifie les délais dans lesquels les informations doivent être transmises.

233

Force est de constater que, parmi les documents que les requérantes invoquent au soutien de leur argumentation selon laquelle une demande au sens de l’article 8, paragraphes 2 et 5, du règlement no 451/2000 avait été adressée à Cheminova, seuls deux documents émanent de l’EMR, à savoir le courriel de l’EMR à Cheminova du 3 mars 2005 et le courriel de l’EMR à Cheminova du . Dès lors que le PRE avait été communiqué à l’EFSA le , toute prétendue demande de données complémentaires formulée en 2005 devait, conformément à l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 451/2000, être formulée en accord avec l’EFSA.

234

Le courriel de l’EMR à Cheminova du 3 mars 2005 fait état de ce que le représentant de l’EMR «[se] demand[ait] si [celle-ci] dispos[ait] d’informations disponibles concernant les niveaux de desméthyl de malathion dans différentes commodités, parce que avec cette information [il aurait été possible] au moins [d’]évaluer ses niveaux d’ingestion alimentaire» (voir point 35 ci-dessus). Eu égard aux termes utilisés dans ce courriel et au fait qu’il ne mentionne ni l’éventuel accord de l’EFSA ni d’ailleurs le délai dans lequel les éventuelles informations auraient dû être fournies, il ne saurait être considéré comme une demande de données complémentaires au sens de l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 451/2000. Il résulte par ailleurs du courrier électronique de réponse de Cheminova du que le courriel de l’EMR du a été considéré par celle-ci comme un «retour non officiel de la part de l’EMR au sujet des réunions d’experts EFSA/EPCO».

235

De même, le courriel de l’EMR à Cheminova du 13 juin 2005 ne saurait pas non plus être considéré comme une demande de données complémentaires au sens de l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 451/2000. Au contraire, par ce courriel, l’EMR a transmis à Cheminova un tableau d’évaluation du malathion «pour information, mais pas pour commentaire».

236

Certes, l’absence de prise en considération par l’EFSA et la Commission des informations communiquées par le notifiant au cours de la procédure d’évaluation d’une substance active à la demande expresse de l’EMR peut constituer une violation du principe de bonne administration. Il n’en est toutefois pas ainsi lorsqu’il s’agit d’une absence de prise en compte de données complémentaires que le notifiant a communiquées, en l’absence d’une demande de l’EMR en ce sens au titre de l’article 8, paragraphes 2 ou 5, du règlement no 451/2000, et a fortiori lorsqu’il s’agit de «nouvelles études», telle que le nouveau test Ames d’août 2005, dont la soumission au cours de la procédure d’évaluation de la substance active en cause n’est de surcroît pas compatible avec les termes de l’article 8, paragraphes 2 et 5, du règlement no 451/2000. En effet, le dossier notifié aurait dû déjà contenir, en principe, tous les éléments pertinents de nature à permettre à l’EMR, à l’EFSA et à la Commission d’apprécier la nocivité du malathion au sens de l’article 5, paragraphe 1, de la directive 91/414.

237

Eu égard à ce qui a été constaté au point 236 ci-dessus, les requérantes ne sauraient pas non plus prétendre que la Commission aurait dû renvoyer l’affaire à l’EFSA afin que les études et données nouvelles communiquées par Cheminova au cours de la procédure d’évaluation de la substance active en cause fassent l’objet d’un examen collégial, qui, en tout état de cause, est facultatif, conformément à l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 451/2000, tel que modifié.

238

Les requérantes, se référant à l’arrêt Industrias Químicas del Vallés/Commission, point 106 supra, estiment enfin que les autorités compétentes ne sauraient chercher à imposer «à la lettre» à Cheminova le respect de délais applicables alors qu’elles auraient elles-mêmes omis de respecter les délais qui leur auraient été impartis.

239

Cet argument a déjà été examiné dans le cadre de l’examen du premier moyen et doit être rejeté pour les motifs exposés aux points 131 à 138 ci-dessus.

240

Il résulte de tout ce qui précède que le présent moyen doit être rejeté dans son intégralité.

Sur le huitième moyen, tiré d’une violation des droits de la défense

Arguments des parties

241

Les requérantes rappellent que les droits de la défense et le droit à une procédure équitable constituent des principes fondamentaux du droit communautaire, consacrés par l’article 41 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, proclamée le 7 décembre 2000 à Nice (JO C 364, p. 1). Le principe du respect des droits de la défense constituerait un principe fondamental du droit communautaire qui devrait être respecté dans toutes les procédures administratives, en particulier celles débouchant sur l’adoption d’une décision susceptible de faire grief.

242

En ignorant les nouveaux éléments de preuve transmis par Cheminova et évalués par l’EMR au cours de l’évaluation du malathion, la Commission aurait violé ses droits de la défense. En effet, elle aurait dû prendre en considération ces nouveaux éléments de preuve à des fins de bonne administration, de manière à garantir que, d’une part, l’appréciation soit correctement réalisée du point de vue scientifique et juridique et, d’autre part, Cheminova ait disposé de la possibilité et de suffisamment de temps pour défendre sa position.

243

La Commission soutient qu’elle n’a pas violé le droit de Cheminova d’être entendue et conclut au rejet du huitième moyen.

Appréciation du Tribunal

244

Selon une jurisprudence constante, le respect des droits de la défense, dans toute procédure ouverte à l’encontre d’une personne et susceptible d’aboutir à un acte faisant grief à celle-ci, constitue un principe fondamental du droit communautaire et doit être assuré, même en l’absence de toute réglementation concernant la procédure en cause (arrêt de la Cour du 29 juin 1994, Fiskano/Commission, C-135/92, Rec. p. I-2885, point 39; arrêt du Tribunal du , Organisation des Modjahedines du peuple d’Iran/Conseil, T-228/02, Rec. p. II-4665, point 91).

245

En l’espèce, il doit être constaté d’abord que la décision attaquée fait grief à Cheminova dès lors qu’elle refuse de faire droit à la demande de celle-ci de faire inscrire le malathion à l’annexe I de la directive 91/414.

246

Il doit être rappelé ensuite que Cheminova a pu inclure dans le dossier notifié toutes études et données utiles à l’évaluation de la nocivité du malathion au titre de l’article 5, paragraphe 1, de la directive 91/414. En outre, par lettre du 6 février 2006 Cheminova a été invitée à formuler des observations sur le rapport de l’EFSA. Elle a formulé ses observations par lettre du . Enfin, il ressort du considérant 6 de la décision attaquée que les observations de Cheminova «ont été examinées attentivement», mais que «les sujets de préoccupation évoqués plus haut subsistaient».

247

Il s’ensuit que les droits de la défense de Cheminova ont été respectés au cours de la procédure précédant l’adoption de la décision attaquée. Cheminova a non seulement été invitée à formuler ses observations, mais celles-ci ont en outre été examinées attentivement. À cet égard, les requérantes ne sauraient confondre le non-respect des droits de la défense avec l’absence d’obtention du résultat souhaité par l’exercice de ces droits. En effet, la circonstance que les requérantes estiment que les observations formulées répondent à tout sujet de préoccupation à propos de la nocivité du malathion ne démontre pas pour autant que la Commission aurait violé les droits de la défense de Cheminova en considérant, au moment de l’adoption de la décision attaquée, qu’«il [n’était] pas […] possible, sur la base des informations disponibles, de déterminer si le malathion satisfaisait aux conditions d’inscription à l’annexe I de la directive 91/414».

248

S’agissant du point de savoir si les droits de la défense de Cheminova avaient été violés en raison du fait que les nouvelles études et données soumises au stade de l’évaluation du malathion avaient été ignorées par la Commission, il doit être rappelé que ces éléments ont été produits tardivement dès lors que, en principe, ils auraient dû être compris dans le dossier notifié (voir point 236 ci-dessus).

249

En tout état de cause, les requérantes ne démontrent pas que, à supposer même que, pour l’évaluation de la substance active, les autorités compétentes aient tenu compte de l’ensemble des éléments qui ont été communiqués par Cheminova, postérieurement à la notification du dossier à l’EMR, cette évaluation aurait pu conduire à une décision différente. Dans ces conditions, à supposer même que la Commission ait dû tenir compte des nouvelles études et données soumises par Cheminova, quod non, cette irrégularité ne serait pas de nature à affecter la légalité de la décision attaquée (voir, en ce sens et par analogie, arrêts de la Cour du 10 juillet 1980, Distillers Company/Commission, 30/78, Rec. p. 2229, point 26, et du , Thyssen Stahl/Commission, C-194/99 P, Rec. p. I-10821, point 31).

250

Il ressort de tout ce qui précède que le moyen tiré d’une violation des droits de la défense doit être rejeté.

Sur le neuvième moyen, tiré d’une violation du principe de subsidiarité et de l’article 5 CE

Arguments des parties

251

Les requérantes font valoir que, lorsque la Commission décide d’interdire à l’avenir une substance active, ainsi que de mettre fin à toutes les autorisations qui y sont afférentes, sans s’interroger sur le point de savoir si l’adoption d’une telle décision ne pourrait pas être mieux réalisée au niveau des États membres, elle viole le principe de subsidiarité sur lequel se fonde, «de son propre aveu», la directive 91/414 [Rapport de la Commission au Parlement européen et au Conseil, du 25 juillet 2001 — Évaluation des substances actives des produits phytopharmaceutiques (présenté conformément à l’article 8, paragraphe 2, de la directive 91/414, concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques), COM(2001) 444 final, point 6]. Elles expliquent que la directive 91/414 tend en substance à réserver à l’État membre concerné, dont l’autorisation est sollicitée, l’évaluation scientifique finale de la substance active présente dans le produit phytopharmaceutique. Ce seraient donc les États membres qui décideraient si les données produites par le notifiant au niveau national sont suffisantes pour répondre à tout éventuel sujet de préoccupation. Il s’agirait d’un «aspect logique du système», puisque le réexamen d’une substance active fondé sur une évaluation objective des risques ne pourrait pas prendre pleinement en considération, par exemple, les variations existantes entre les conditions prévalant en matière de géographie et d’agriculture dans les différents États membres.

252

Se référant à l’arrêt de la Cour du 10 décembre 2002, British American Tobacco (Investments) et Imperial Tobacco (C-491/01, Rec. p. I-11453, point 180), les requérantes prétendent que la Commission n’a pas établi que l’objectif de l’action envisagée (à savoir le retrait des autorisations du malathion en raison de préoccupations d’ordre sanitaire) pouvait être mieux réalisé au niveau communautaire. Premièrement, l’affirmation, au considérant 6 de la décision attaquée, selon laquelle «en dépit des arguments avancés par l’auteur de la notification, les sujets de préoccupation évoqués plus haut subsistaient», pourrait laisser penser que la Commission a estimé, nonobstant les variations existantes entre les conditions prévalant en matière de géographie et d’agriculture dans les différents États membres, du Portugal à la Finlande, qu’une interdiction du malathion pouvait être justifiée quelles que soient les circonstances. Or, il aurait été répondu à tous les sujets de préoccupation soulevés, «soit de manière catégorique, soit, à tout le moins, à première vue». Deuxièmement, au vu des éléments clairs qui étaient en sa possession, répondant aux sujets de préoccupation évoqués dans le considérant 5 de la décision attaquée — que les éléments de preuve qui y sont afférents aient ou non été produits tardivement au cours de la procédure —, la Commission aurait été légalement tenue de s’interroger sur le point de savoir dans quelle mesure elle était mieux placée que les États membres pour se saisir de ces sujets de préoccupation. Toutefois, la Commission se serait abstenue de toute réflexion en ce sens.

253

Les requérantes insistent sur «la nécessité de modifier la balance existant entre l’action de la Communauté et celle des États membres» dans un sens accordant aux États membres un rôle bien plus grand aux fins de la réalisation de l’objectif poursuivi par la directive 91/414, et ce notamment en raison du fait que la Commission aurait connaissance de données évaluées par l’EMR qui répondraient aux prétendus sujets de préoccupation. L’existence de «délais arbitraires» n’aurait pas pour effet de libérer la Commission de ses obligations légales à l’égard des États membres au titre du principe de subsidiarité.

254

La Commission fait valoir que le neuvième moyen doit également être rejeté.

Appréciation du Tribunal

255

Il y a lieu de relever que, conformément aux articles 3 et 4 de la directive 91/414, l’autorisation des produits pharmaceutiques relève de la responsabilité des États membres. Par ailleurs, l’article 4, paragraphe 1, de ladite directive prévoit que les États membres ne peuvent en principe autoriser un produit pharmaceutique que si les substances actives concernées sont énumérées à l’annexe I.

256

Cependant, un État membre pouvait, selon l’article 8, paragraphe 2, premier alinéa, de la directive 91/414 autoriser, pendant une période transitoire et sous certaines conditions, la mise sur le marché, sur son territoire, de produits phytopharmaceutiques contenant des substances actives non visées à l’annexe I.

257

Le malathion est une substance active qui a bénéficié de la dérogation de l’article 8, paragraphe 2, premier alinéa, de la directive 91/414. Conformément à l’article 8, paragraphe 2, deuxième alinéa, de la directive 91/414, la Commission devait entamer un programme de travail pour l’examen graduel des substances actives, qui, à l’instar du malathion, relevaient du premier alinéa de ladite disposition.

258

Le programme de travail pour l’examen graduel des substances actives dont il est fait état au point précédent comporte trois phases. L’évaluation du malathion relève de la deuxième phase, conformément à l’article 1er, paragraphe 2, du règlement no 451/2000.

259

Or, il ressort de l’article 8, paragraphe 8, du règlement no 451/2000 que seuls la Commission ou le Conseil ont compétence pour décider de l’inscription ou non d’une substance active relevant de la deuxième phase du programme de travail à l’annexe I de la directive 91/414. En outre, ladite disposition prévoit une procédure qui doit impérativement être suivie pour l’évaluation des substances relevant de la deuxième phase et qui ne permet, en aucun cas, aux États membres de prendre une décision finale sur le point de savoir si la substance active en question satisfait aux conditions de l’article 5, paragraphe 1, de la directive 91/414.

260

Certes, l’article 5, paragraphe 4, de la directive 91/414 permet l’inscription de substances qui ne satisfont pas aux exigences de l’article 5, paragraphe 1, de ladite directive en imposant certaines restrictions qui écartent les utilisations problématiques de la substance en cause (arrêt Suède/Commission, point 166 supra, point 169). Même si, dans le cadre des restrictions imposées, un certain rôle peut être attribué aux États membres, il n’en reste pas moins que l’appréciation définitive concernant la conformité de la substance active aux exigences de l’article 5, paragraphe 1, de ladite directive appartient aux seules instances communautaires. Ainsi, même en cas d’application de l’article 5, paragraphe 4, de la directive 91/414, il appartient à la Commission, et le cas échéant au Conseil, d’établir, au-delà de tout doute raisonnable, que les restrictions à l’utilisation de la substance en cause permettent d’assurer une utilisation de cette substance qui soit conforme aux exigences de l’article 5, paragraphe 1, de la directive 91/414 (arrêt Suède/Commission, point 166 supra, point 170).

261

Il ressort de l’ensemble de ce qui précède que le présent moyen doit aussi être rejeté.

Sur le dixième moyen, tiré d’une violation de l’article 13 de la directive 91/414

Arguments des parties

262

Les requérantes font valoir que la décision attaquée prive Cheminova des droits à la protection des données qu’elle aurait pu espérer obtenir en vertu de l’article 13 de la directive 91/414 si le malathion avait été inscrit à l’annexe I de celle-ci. La Commission aurait enfreint l’article 13 de la directive 91/414 et le droit de propriété dès lors que la décision attaquée aurait eu pour effet que Cheminova n’ait pu bénéficier d’aucun droit à la protection des données.

263

La Commission conclut au rejet du dernier moyen.

Appréciation du Tribunal

264

Il y a lieu de relever que l’article 13 de la directive 91/414 prévoit que les États membres doivent protéger la confidentialité des données incluses dans le dossier qui a accompagné la demande d’autorisation de mise sur le marché d’un produit phytopharmaceutique. La protection s’applique uniquement, conformément à l’article 13, paragraphes 3 et 4, de la directive 91/414, lorsque les États membres «accordent une autorisation».

265

À supposer même que les dispositions de l’article 13 de ladite directive s’appliquent mutatis mutandis au dossier notifié, conformément à l’article 4 du règlement no 451/2000, en vue d’obtenir l’inscription d’une substance active à l’annexe I de la directive 91/414, il doit être constaté que, en tout état de cause, la protection des données prévue à l’article 13 de ladite directive ne pourrait pas s’appliquer, en l’espèce, dès lors que la substance active n’a fait l’objet d’aucune «autorisation».

266

Dans ces conditions, le moyen tiré d’une violation de l’article 13 de la directive 91/414 doit être rejeté.

267

Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que le recours doit être rejeté dans son ensemble.

Sur les dépens

268

Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens s’il est conclu en ce sens. Les requérantes ayant succombé, il y a lieu de les condamner aux dépens, y compris à ceux relatifs à la procédure de référé, conformément aux conclusions de la Commission.

 

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (huitième chambre)

déclare et arrête:

 

1)

Le recours est rejeté.

 

2)

Cheminova A/S, Cheminova Agro Italia Srl, Cheminova Bulgaria EOOD, Agrodan, SA et Lodi SAS supporteront, outre leurs propres dépens, les dépens exposés par la Commission, y compris ceux relatifs à la procédure de référé.

 

Martins Ribeiro

Papasavvas

Dittrich

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 3 septembre 2009.

Signatures

Table des matières

 

Cadre juridique

 

Antécédents du litige

 

Décision attaquée

 

Procédure et conclusions des parties

 

Sur la recevabilité

 

Arguments des parties

 

Appréciation du Tribunal

 

Sur le fond

 

Sur l’exception d’illégalité de l’article 20 du règlement no 1490/2002

 

Arguments des parties

 

Appréciation du Tribunal

 

Sur le premier moyen, tiré de l’absence de base scientifique objective de la décision attaquée

 

Arguments des parties

 

Appréciation du Tribunal

 

— Sur le premier sujet de préoccupation, lié à la présence de l’isomalathion dans le malathion

 

1. Sur le caractère opérant de l’argumentation des requérantes

 

2. Sur la génotoxicité de l’isomalathion

 

a) Sur la prétendue absence de prise en compte de l’étude UDS in vivo

 

b) Sur la prétendue absence de prise en compte du test Ames de 2005

 

Sur l’obligation de l’EFSA et de la Commission de prendre en compte le résultat du test Ames de 2005

 

Sur l’incidence du résultat du test Ames de 2005 sur la légalité de la décision attaquée

 

— Sur le second sujet de préoccupation, lié aux effets de certains métabolites présentant une importance du point de vue toxicologique

 

— Sur le caractère prétendument complet du dossier notifié et sur le prétendu défaut de motivation de la décision attaquée

 

Sur le deuxième moyen, tiré d’une violation de l’article 95 CE, de l’article 4, paragraphe 1, et de l’article 5, paragraphe 1, de la directive 91/414

 

Arguments des parties

 

Appréciation du Tribunal

 

Sur le troisième moyen, tiré d’une violation du principe de protection de la confiance légitime

 

Arguments des parties

 

Appréciation du Tribunal

 

Sur le quatrième moyen, tiré d’une violation du principe de proportionnalité

 

Arguments des parties

 

Appréciation du Tribunal

 

Sur le cinquième moyen, tiré d’une violation de l’article 8, paragraphe 7, du règlement no 451/2000

 

Arguments des parties

 

Appréciation du Tribunal

 

Sur le sixième moyen, tiré d’une violation du «principe de non-discrimination»

 

Arguments des parties

 

Appréciation du Tribunal

 

Sur le septième moyen, tiré d’une violation du principe de bonne administration

 

Arguments des parties

 

Appréciation du Tribunal

 

Sur le huitième moyen, tiré d’une violation des droits de la défense

 

Arguments des parties

 

Appréciation du Tribunal

 

Sur le neuvième moyen, tiré d’une violation du principe de subsidiarité et de l’article 5 CE

 

Arguments des parties

 

Appréciation du Tribunal

 

Sur le dixième moyen, tiré d’une violation de l’article 13 de la directive 91/414

 

Arguments des parties

 

Appréciation du Tribunal

 

Sur les dépens


( *1 ) Langue de procédure: l’anglais.