ARRÊT DU TRIBUNAL (sixième chambre)
7 mai 2009 ( *1 )
«Marque communautaire — Procédure d’opposition — Demande de marque communautaire verbale CK CREACIONES KENNYA — Marque communautaire figurative antérieure CK Calvin Klein et marques nationales figuratives antérieures CK — Motif relatif de refus — Absence de risque de confusion — Absence de similitude des signes — Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) no 40/94»
Dans l’affaire T-185/07,
Calvin Klein Trademark Trust, établie à Wilmington, Delaware (États-Unis), représentée par Mes T. Andrade Boué, I. Lehmann Novo et A. Hernández Lehmann, avocats,
partie requérante,
contre
Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. Ó. Mondéjar Ortuño, en qualité d’agent,
partie défenderesse,
l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI, intervenant devant le Tribunal, étant
Zafra Marroquineros, SL, établie à Caravaca de la Cruz (Espagne), représentée par Me J. Martín Álvarez, avocat,
ayant pour objet un recours formé contre la décision de la deuxième chambre de recours de l’OHMI du 29 mars 2007 (affaire R 314/2006-2), relative à une procédure d’opposition entre Calvin Klein Trademark Trust et Zafra Marroquineros, SL,
LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (sixième chambre),
composé de MM. A. W. H. Meij, président, V. Vadapalas (rapporteur) et E. Moavero Milanesi, juges,
greffier: Mme K. Andová, administrateur,
vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 29 mai 2007,
vu le mémoire en réponse de l’OHMI déposé au greffe du Tribunal le 3 octobre 2007,
vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 3 octobre 2007,
vu la réponse de l’intervenante à la question écrite du Tribunal du 17 juin 2008,
vu la modification de la composition des chambres du Tribunal,
vu la désignation d’un autre juge pour compléter la chambre à la suite de l’empêchement d’un de ses membres,
à la suite de l’audience du 8 juillet 2008,
rend le présent
Arrêt
Antécédents du litige
1 |
Le 7 octobre 2003, l’intervenante, Zafra Marroquineros, SL, a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) no 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié. |
2 |
La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal CK CREACIONES KENNYA. |
3 |
Les produits pour lesquels l’enregistrement de la marque a été demandé relèvent des classes 18 et 25 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante:
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4 |
Cette demande a été publiée au Bulletin des marques communautaires no 23/2004, du 7 juin 2004. |
5 |
Le 6 septembre 2004, la requérante, Calvin Klein Trademark Trust, a formé une opposition à l’encontre de l’enregistrement de la marque demandée, au titre notamment de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 40/94. |
6 |
L’opposition était fondée sur les marques antérieures suivantes:
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7 |
L’opposition était fondée sur l’ensemble des produits et des services couverts par les marques antérieures et était dirigée contre l’ensemble des produits désignés par la demande de marque. |
8 |
Par décision du 22 décembre 2005, la division d’opposition de l’OHMI a rejeté l’opposition dans son ensemble. Elle a considéré qu’il n’existait aucun risque de confusion entre les marques en cause pour le consommateur pertinent. |
9 |
Le 22 février 2006, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 57 à 62 du règlement no 40/94, contre la décision de la division d’opposition en invoquant une violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), dudit règlement. |
10 |
Par décision du 29 mars 2007 (ci-après la «décision attaquée»), la deuxième chambre de recours a rejeté le recours et a confirmé la décision de la division d’opposition. Elle a considéré qu’il n’existait pas de similitude suffisante entre les signes en cause pour conclure à l’existence d’un risque de confusion dans l’esprit du public visé. |
Conclusions des parties
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La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal:
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L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal:
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13 |
L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal:
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En droit
Sur la recevabilité du deuxième chef de conclusions de la requérante
14 |
Par son deuxième chef de conclusions, la requérante demande au Tribunal d’enjoindre à l’OHMI de refuser l’enregistrement de la marque demandée. À cet égard, il convient de rappeler que, conformément à l’article 63, paragraphe 6, du règlement no 40/94, l’OHMI est tenu de prendre les mesures que comporte l’exécution de l’arrêt du juge communautaire. Dès lors, il n’appartient pas au Tribunal d’adresser à l’OHMI une injonction. Il incombe à celui-ci de tirer les conséquences du dispositif et des motifs du présent arrêt [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 31 janvier 2001, Mitsubishi HiTec Paper Bielefeld/OHMI (Giroform), T-331/99, Rec. p. II-433, point 33, et du 27 février 2002, Eurocool Logistik/OHMI (EUROCOOL), T-34/00, Rec. p. II-683, point 12]. Le deuxième chef de conclusions de la requérante est donc irrecevable. |
Sur le fond
Arguments des parties
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La requérante invoque un moyen unique, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 40/94. |
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La requérante soutient que l’analyse de la chambre de recours est erronée en ce qui concerne la comparaison des signes en conflit et l’appréciation du risque de confusion. |
17 |
Pour ce qui est de la comparaison des signes en conflit, la requérante fait valoir que, contrairement à ce qui est indiqué dans la décision attaquée, l’élément distinctif des marques en conflit est constitué par le groupe de lettres «ck». |
18 |
Ces deux lettres apparaîtraient en premier lieu dans la marque demandée, de sorte qu’elles seraient perçues en premier et retiendraient l’attention du consommateur. Les marques en conflit coïncideraient ainsi dans leur élément le plus distinctif, ce qui conduirait à une similitude phonétique entre les signes en conflit. |
19 |
La requérante conteste que le caractère distinctif du groupe de lettres «ck» des marques antérieures soit plus élevé que celui du groupe de lettres «ck» de la marque demandée uniquement en raison de sa représentation graphique particulière. |
20 |
La requérante soutient que, contrairement à ce qui est admis dans la décision attaquée, l’utilisation du groupe de lettres «ck» ne se justifie pas par les mots «creaciones» et «kennya», lesquels ne correspondent pas au nom commercial de l’intervenante, mais s’explique plutôt par la volonté de se rapprocher de la marque antérieure renommée. |
21 |
La requérante souligne que ni le terme «creaciones» ni le terme «kennya» ne possèdent un caractère distinctif. Le premier serait utilisé dans le secteur de la mode pour faire référence aux modèles de vêtement. Le second pourrait évoquer un pays africain, le Kenya, ou le nom d’une personne. |
22 |
La marque CK CREACIONES KENNYA serait ainsi perçue comme étant une marque CK se rapportant à la gamme «creaciones» (créations) intitulée «kennya» (Kenya), soit parce qu’elle se serait inspirée de l’art ou des couleurs du Kenya, soit parce que le créateur des produits en cause porterait ce nom. Or, les noms de pays n’auraient pas de caractère distinctif et ne pourraient être retenus comme éléments permettant de différencier les marques que l’on compare. La requérante fait valoir que, en l’espèce, le terme «kennya» serait une fausse indication de provenance, puisque le demandeur de la marque en cause est un commerçant de la ville espagnole de Murcie qui n’a aucun rapport avec le Kenya et dont les produits n’ont pas non plus été achetés dans ce pays. |
23 |
Le résultat serait le même si le mot «kennya» faisait allusion au nom d’une personne, car un nom commun ne serait pas non plus distinctif en soi. Il augmenterait la confusion en donnant à penser qu’il s’agit d’une sous-marque de la marque CK, conçue par une personne s’appelant Kennya, ce qui n’est pas le cas. La requérante considère, par conséquent, que le mot «kennya» n’est pas distinctif ou n’a qu’un caractère distinctif très faible et que, partant, le consommateur se concentrera sur l’élément «ck» de la marque demandée, qui se compose des mêmes lettres que celles formant les marques antérieures. |
24 |
Elle fait observer que les marques antérieures jouissent d’une renommée importante, ce qui est de nature à renforcer l’existence d’une similitude entre les marques litigieuses, notamment sous les angles visuel et phonétique. Elle souligne que c’est le signe figuratif CK qui est en fait notoirement connu. |
25 |
De l’avis de la requérante, dans le secteur de la mode, il est courant que les fabricants de vêtements soient identifiés par les lettres qui forment l’acronyme de leur nom. Dès lors, le fait de se rapprocher de marques constituées des lettres d’un acronyme serait clairement une tentative de copier la marque d’un tiers. |
26 |
Dans le secteur de la mode, il serait également courant qu’une même entreprise de confection utilise des sous-marques, c’est-à-dire des signes qui découlent d’une marque principale et qui partagent avec elle un élément dominant commun, pour distinguer ses différentes lignes de production. Ainsi, le fait que le groupe de lettres «ck» se retrouve dans toutes les marques en cause, même si les lettres sont représentées selon un graphisme différent, serait susceptible de créer une confusion chez le consommateur, qui pourrait penser que le signe CK CREACIONES KENNYA concerne une ligne de production déterminée. |
27 |
Au soutien de cette thèse, la requérante mentionne plusieurs décisions des juridictions communautaires, des tribunaux espagnols, ainsi que de l’OHMI et de l’office espagnol des brevets et des marques. |
28 |
L’OHMI et l’intervenante contestent le bien-fondé de l’argumentation de la requérante. Ils considèrent notamment que l’appréciation de la chambre de recours, selon laquelle les signes en cause produisent une impression d’ensemble différente, est correcte. L’OHMI relève également que, dans la mesure où c’est le signe figuratif CK, disposant déjà en raison de son graphisme particulier d’un caractère distinctif intrinsèque, qui jouit d’une notoriété, il ne convient pas de reconnaître au groupe de lettres «ck», écrites en caractères standard, ou à leur sonorité, la notoriété que la chambre de recours a reconnue aux marques antérieures. |
29 |
Par ailleurs, l’OHMI et l’intervenante estiment que, en ce qui concerne la marque demandée, l’expression «creaciones kennya» est l’élément dominant, soit sur le plan visuel, en raison de sa longueur, soit sur le plan conceptuel, en raison de sa composante fantaisiste, tandis que le groupe de consonnes «ck», compte tenu de son graphisme particulier, constituent l’élément dominant des marques antérieures. |
Appréciation du Tribunal
30 |
Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 40/94, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, une marque est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. |
31 |
Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou, le cas échéant, d’entreprises liées économiquement [arrêt du Tribunal du 23 octobre 2002, Oberhauser/OHMI — Petit Liberto (Fifties), T-104/01, Rec. p. II-4359, point 25; voir également, par analogie, arrêts de la Cour du 29 septembre 1998, Canon, C-39/97, Rec. p. I-5507, point 29, et du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C-342/97, Rec. p. I-3819, point 17]. |
32 |
Selon une jurisprudence tout aussi constante, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, en tenant compte de tous les facteurs caractérisant le cas d’espèce, notamment de l’interdépendance entre la similitude des signes et celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du Tribunal du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI — Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T-162/01, Rec. p. II-2821, points 31 et 32, et la jurisprudence citée]. |
33 |
Par ailleurs, le risque de confusion est d’autant plus élevé que le caractère distinctif de la marque antérieure est important. Ainsi, les marques qui ont un caractère distinctif élevé, soit intrinsèquement, soit en raison de la connaissance de celles-ci sur le marché, jouissent d’une protection plus étendue que celles dont le caractère distinctif est moindre (voir, par analogie, arrêt Lloyd Schuhfabrik Meyer, précité, point 20). |
34 |
En outre, la perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale du risque de confusion. Or, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (arrêts de la Cour du 11 novembre 1997, SABEL, C-251/95, Rec. p. I-6191, point 23, et Lloyd Schuhfabrik Meyer, précité, point 25). Aux fins de cette appréciation globale, le consommateur moyen des produits concernés est censé être normalement informé et raisonnablement attentif et avisé (arrêt Lloyd Schuhfabrik Meyer, précité, point 26). |
35 |
En l’espèce, il convient d’observer, à titre liminaire, que l’identité des produits en cause n’a pas été contestée par les parties. |
36 |
Par ailleurs, il résulte de la décision attaquée, qui n’est pas remise en cause sur ce point, que, dans la mesure où les marques antérieures consistent en deux enregistrements espagnols et en un enregistrement communautaire et où les produits en cause sont destinés au grand public, le public pertinent se compose des consommateurs moyens desdits produits en Espagne et dans la Communauté. |
37 |
La requérante conteste en revanche l’appréciation de la chambre de recours quant à la similitude des signes litigieux et la conclusion qui en a été tirée en ce qui concerne le risque de confusion. Il y a donc lieu d’examiner si la chambre de recours a commis une erreur en retenant qu’il existait entre les signes en conflit des différences suffisantes pour exclure, dans l’esprit du public pertinent, l’existence d’un risque de confusion. |
— Sur la similitude des signes
38 |
En ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, l’appréciation globale du risque de confusion doit être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants [voir arrêt du Tribunal du 14 octobre 2003, Phillips-Van Heusen/OHMI — Pash Textilvertrieb und Einzelhandel (BASS), T-292/01, Rec. p. II-4335, point 47, et la jurisprudence citée]. |
39 |
Il est par ailleurs de jurisprudence constante que ne peuvent être considérées comme étant similaires une marque complexe et une autre marque, identique ou présentant une similitude avec l’un des composants de la marque complexe que lorsque celui-ci constitue l’élément dominant dans l’impression d’ensemble produite par la marque complexe. Tel est le cas lorsque ce composant est susceptible de dominer à lui seul l’image de cette marque que le public pertinent garde en mémoire, de telle sorte que tous les autres composants de la marque sont négligeables dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci [arrêts du Tribunal du 23 octobre 2002, Matratzen Concord/OHMI — Hukla Germany (MATRATZEN), T-6/01, Rec. p. II-4335, point 33, et du 18 octobre 2007, Ekabe International/OHMI — Ebro Puleva (OMEGA3), T-28/05, Rec. p. II-4307, point 43]. |
40 |
Cependant, il ne convient pas de prendre en considération uniquement l’un des composants d’une marque complexe et de le comparer avec une autre marque. Il y a lieu, au contraire, d’opérer une telle comparaison en examinant les marques en cause, considérées chacune dans leur ensemble (arrêts de la Cour du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C-334/05 P, Rec. p. I-4529, point 41; du 20 septembre 2007, Nestlé/OHMI et Quick, C-193/06 P, non publié au Recueil, point 35, et MATRATZEN, précité, point 34). |
41 |
En l’espèce, il y a lieu de relever qu’il ressort du point 7 de la décision attaquée que les signes figuratifs faisant l’objet des enregistrements antérieurs se composent du groupe de lettres «ck», écrites en majuscules et en caractères d’imprimerie, la deuxième lettre, le «k», étant d’une longueur et d’une largeur supérieures à celles de la première lettre, le «c», qui est, quant à elle, centrée par rapport au «k». La marque communautaire antérieure contient également les mots «calvin klein», écrits en caractères d’imprimerie beaucoup plus petits que les lettres «c» et «k». Par ailleurs, la marque demandée est une marque verbale se composant de trois éléments, à savoir le groupe de lettres «ck», suivi des mots «creaciones» et «kennya». |
42 |
La requérante prétend que l’élément «ck» constitue l’élément distinctif et dominant de la marque demandée. Force est toutefois de constater, ainsi que l’OHMI le fait valoir, que les mots «creaciones kennya» occupent, de par leur taille, une position beaucoup plus importante que le groupe de lettres «ck» et forment une unité syntaxique et conceptuelle qui domine l’ensemble de cette marque. |
43 |
En effet, quoique la signification précise de l’élément «creaciones kennya» soit incertaine, en ce qu’il peut être compris soit comme faisant référence au nom d’un créateur de mode, soit comme étant une expression purement fantaisiste, celui-ci possède un caractère distinctif certain pour les articles d’habillement et les accessoires de mode relevant des classes 18 et 25. Par ailleurs, ce caractère distinctif n’est pas remis en cause par le lien qui serait créé dans l’esprit du public concerné entre le mot «kennya» et le pays du Kenya, eu égard à l’orthographe différente des deux termes. Les arguments de la requérante contestant le caractère distinctif de l’élément «creaciones kennya» doivent donc être rejetés. |
44 |
Par ailleurs, ainsi que la chambre de recours l’a relevé au point 26 de la décision attaquée, l’élément «ck» correspond aux premières lettres des mots «creaciones» et «kennya», qui en définissent ainsi l’origine et en expliquent la présence. Tel que présenté dans la demande de marque, l’élément «ck» occupe par conséquent une position accessoire par rapport à l’élément «creaciones kennya». |
45 |
Il s’ensuit qu’il y a lieu de considérer que le consommateur concerné retiendra avant tout les mots «creaciones kennya», sur lesquels il focalisera dans une très large mesure son attention. La circonstance, invoquée par la requérante, que le groupe de lettres «ck» apparaît en premier lieu dans la marque demandée ne modifie pas cette appréciation. S’il est exact que le consommateur moyen prête généralement une attention plus grande aux éléments se situant au début d’une marque, les circonstances particulières à certaines marques peuvent faire exception à cette règle [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 20 novembre 2007, Castellani/OHMI — Markant Handels und Service (CASTELLANI), T-149/06, Rec. p. II-4755, point 54]. En l’occurrence, pour les motifs exposés aux points 42 à 44 ci-dessus, la seule position au début de la marque demandée du groupe de lettres «ck» ne suffit pas à en faire l’élément dominant dans l’impression d’ensemble produite par cette marque. |
46 |
En ce qui concerne la similitude des signes sous l’angle visuel, il y a lieu, par conséquent, de relever que c’est à bon droit que la chambre de recours a retenu que les marques litigieuses étaient différentes. En effet, alors que les marques antérieures sont composées de l’élément unique ou dominant «ck», représenté selon un graphisme particulier qui, ainsi que la chambre de recours l’a relevé au point 22 de la décision attaquée, confère à ces marques un caractère distinctif intrinsèque, l’impression d’ensemble produite par la marque demandée est dominée par l’élément «creaciones kennya». |
47 |
Ainsi, la seule ressemblance visuelle entre l’élément figuratif unique ou dominant «ck» des marques antérieures et l’élément «ck» de la marque demandée ne permet pas de créer une similitude visuelle entre les marques litigieuses, compte tenu, d’une part, de l’impression d’ensemble produite par la marque CK CREACIONES KENNYA et, d’autre part, de la représentation graphique particulière qui caractérise les marques antérieures, à savoir la taille inférieure et le centrage de la lettre «c» par rapport à la lettre «k». |
48 |
À cet égard, il importe de souligner, ainsi que la chambre de recours l’a relevé au point 23 de la décision attaquée, que l’examen de la similitude des marques litigieuses prend en considération ces marques dans leur ensemble, telles qu’elles sont enregistrées ou telles qu’elles sont demandées. Or, une marque verbale est une marque constituée exclusivement de lettres, de mots ou d’associations de mots, écrits en caractères d’imprimerie dans une police normale, sans élément graphique spécifique. La protection qui découle de l’enregistrement d’une marque verbale porte sur le mot indiqué dans la demande d’enregistrement et non sur les aspects graphiques ou stylistiques particuliers que cette marque pourrait éventuellement revêtir. Il n’y a donc pas lieu de prendre en compte, aux fins de l’examen de la similitude, la représentation graphique que la marque demandée serait susceptible d’adopter à l’avenir [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 20 avril 2005, Faber Chimica/OHMI — Nabersa (Faber), T-211/03, Rec. p. II-1297, points 36 et 37; du 13 février 2007, Ontex/OHMI — Curon Medical (CURON), T-353/04, non publié au Recueil, point 74, et du 22 mai 2008, Radio Regenbogen Hörfunk in Baden/OHMI (RadioCom), T-254/06, non publié au Recueil, point 43]. |
49 |
Sur le plan phonétique, c’est également à bon droit que la chambre de recours a constaté que les marques litigieuses n’étaient pas similaires. Ainsi que l’OHMI le fait observer, la référence aux marques antérieures se fera par le groupe de lettres «ck», voire par les mots «calvin klein», et ce même lorsque le signe antérieur ne fait pas apparaître ces derniers, tant il est clair que le signe figuratif CK, dans sa représentation graphique caractéristique, constitue une référence au fabricant et créateur renommé d’articles de mode Calvin Klein. |
50 |
En revanche, il sera fait référence à la marque demandée en prononçant soit les seuls mots «creaciones kennya», soit l’ensemble de l’expression «ck creaciones kennya». Il est, en tout état de cause, peu vraisemblable que la référence à la marque demandée ck creaciones kennya se fera en prononçant seulement le groupe de lettres «ck», dans la mesure où, en raison de leur caractère peu connu, il y aura lieu de faire explicitement référence aux termes «creaciones kennya». |
51 |
Sur le plan conceptuel, la chambre de recours n’a pas commis d’erreur en retenant que les mots «creaciones kennya», qui sont à l’origine du groupe de lettres «ck», créent une différence conceptuelle par rapport aux marques antérieures. Ainsi que la chambre l’a relevé au point 27 de la décision attaquée, alors que le groupe de lettres «ck» de la marque demandée trouve son origine dans les mots «creaciones kennya», le groupe de lettres «ck» composant les marques antérieures constitue une référence au fabricant et créateur renommé d’articles de mode Calvin Klein. |
52 |
Il résulte de ce qui précède que la chambre de recours n’a pas commis d’erreur en considérant que les marques litigieuses n’étaient pas similaires. En effet, l’examen des marques sous les angles visuel, phonétique et conceptuel fait apparaître que l’impression d’ensemble produite par les marques antérieures est dominée par l’élément unique ou dominant «ck» tandis que celle produite par la marque demandée est dominée par l’élément «creaciones kennya». L’absence de similitude des signes en conflit résulte ainsi des différences visuelle, phonétique et conceptuelle constatées ci-dessus. |
— Sur le risque de confusion
53 |
Compte tenu de l’examen de la similitude entre les marques litigieuses, c’est à bon droit que la chambre de recours a considéré qu’il n’y avait pas lieu de retenir l’existence d’un risque de confusion. |
54 |
L’identité des produits désignés par les marques en conflit ne modifie pas cette appréciation, dès lors que les signes en cause ne sont pas similaires. Ainsi que la chambre de recours l’a relevé au point 28 de la décision attaquée, il ressort clairement de la marque demandée que le groupe de lettres «ck» fait référence aux mots «creaciones kennya», qui distinguent sans ambiguïté la marque demandée des marques antérieures. La similitude entre les signes en conflit étant une condition à la reconnaissance d’un risque de confusion, le constat de l’absence d’une telle similitude s’oppose à ce qu’un risque de confusion puisse être admis [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 18 décembre 2008, Torres/OHMI — Sociedad Cooperativa del Campo San Ginés (TORRE DE BENÍTEZ), T-16/07, non publié au Recueil, point 74]. |
55 |
Il convient de relever encore que la requérante invoque la renommée de l’élément figuratif CK, commun aux marques antérieures et caractérisé par un graphisme particulier. Bien que la jurisprudence reconnaisse que les marques qui disposent d’un caractère distinctif élevé en raison de leur renommée jouissent d’une protection plus étendue (voir point 33 ci-dessus), la reconnaissance, en l’espèce, de la renommée des marques antérieures ne saurait remettre en cause le bien-fondé de l’appréciation opérée par la chambre de recours, selon laquelle, notamment en raison de la divergence de leurs éléments dominants respectifs, les marques litigieuses produisent une impression d’ensemble trop différente pour qu’un risque de confusion puisse être constaté. |
56 |
En ce qui concerne l’argument de la requérante tiré de ce que le public visé serait susceptible d’appréhender la marque demandée comme une de ses sous-marques, il convient d’observer, ainsi que la requérante le relève elle-même, que les sous-marques se caractérisent par des signes dérivant d’une marque principale et partageant avec elle un élément dominant commun [arrêt du Tribunal du 6 octobre 2004, New Look/OHMI — Naulover (NLSPORT, NLJEANS, NLACTIVE et NLCollection), T-117/03 à T-119/03 et T-171/03, Rec. p. II-3471, point 51]. Or, en l’espèce, les marques litigieuses ne partagent pas d’élément dominant commun. En effet, ainsi qu’il a été constaté ci-dessus à plusieurs reprises, les marques antérieures sont dominées ou exclusivement constituées par l’élément figuratif CK, tandis que la marque demandée est, quant à elle, dominée par l’élément verbal distinctif «creaciones kennya». |
57 |
Il résulte de ce qui précède que la chambre de recours n’a pas commis d’erreur en concluant qu’il n’existait pas de risque de confusion entre la marque demandée et les marques antérieures. Le recours doit, dès lors, être rejeté. |
Sur les dépens
58 |
Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI et de l’intervenante. |
Par ces motifs, LE TRIBUNAL (sixième chambre) déclare et arrête: |
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Meij Vadapalas Moavero Milanesi Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 7 mai 2009. Signatures |
( *1 ) Langue de procédure: l’espagnol.