Conclusions de l'avocat général

Conclusions de l'avocat général

I – Introduction

1. Le présent recours de la Commission des Communautés européennes est de nouveau dirigé contre un État membre pour désignation insuffisante des zones de protection spéciale (ci-après les «ZPS») des oiseaux, conformément à la directive 79/409/CEE du Conseil, du 2 avril 1979, concernant la conservation des oiseaux sauvages (2) (ci-après la «directive oiseaux»). Pour des infractions similaires, la Commission a déjà obtenu la condamnation du Royaume des Pays-Bas (3), de la République française (4), de la République de Finlande (5) et de la République italienne (6) . Des procédures sont également en cours à l’encontre de la République hellénique (7) et de l’Irlande (8) . La Commission prépare un autre recours concernant la République portugaise (9) .

2. Le point crucial dans ces affaires est à chaque fois celui de la preuve qu’un État membre n’a pas encore classé en ZPS toutes les zones qui auraient dû être désignées. La Commission se fonde en l’espèce sur un inventaire des zones ornithologiques importantes en Espagne, qui a été publié en 1998 par la société espagnole d’ornithologie – Sociedad Española de Ornitología, ci‑après «SEO/BirdLife» – [inventaire appelé ci-après l’«IBA 98», IBA étant l’abréviation d’Important Bird Area (zone importante pour la conservation des oiseaux) ou d’Important Bird Areas (zones importantes pour la conservation des oiseaux)] (10) . Le Royaume d’Espagne met en doute la qualité de cet inventaire.

II – Le cadre juridique

3. L’article 4, paragraphes 1 et 2, de la directive oiseaux régit les superficies que les États membres doivent classer en ZPS, et le paragraphe 3 de ce même article l’information de la Commission sur la désignation:

«1. Les espèces mentionnées à l’annexe I font l’objet de mesures de conservation spéciale concernant leur habitat, afin d’assurer leur survie et leur reproduction dans leur aire de distribution.

À cet égard, il est tenu compte:

a) des espèces menacées de disparition;

b) des espèces vulnérables à certaines modifications de leurs habitats;

c) des espèces considérées comme rares parce que leurs populations sont faibles ou que leur répartition locale est restreinte;

d) d’autres espèces nécessitant une attention particulière en raison de la spécificité de leur habitat.

Il sera tenu compte, pour procéder aux évaluations, des tendances et des variations des niveaux de population.

Les États membres classent notamment en zones de protection spéciale les territoires les plus appropriés en nombre et en superficie à la conservation de ces dernières dans la zone géographique maritime et terrestre d’application de la présente directive.

2. Les États membres prennent des mesures similaires à l’égard des espèces migratrices non visées à l’annexe I dont la venue est régulière, compte tenu des besoins de protection dans la zone géographique maritime et terrestre d’application de la présente directive en ce qui concerne leurs aires de reproduction, de mue et d’hivernage et les zones de relais dans leur aire de migration. À cette fin, les États membres attachent une importance particulière à la protection des zones humides et tout particulièrement de celles d’importance internationale.

3. Les États membres adressent à la Commission toutes les informations utiles de manière à ce qu’elle puisse prendre les initiatives appropriées en vue de la coordination nécessaire pour que les zones visées au paragraphe 1 d’une part, et au paragraphe 2, d’autre part, constituent un réseau cohérent répondant aux besoins de protection des espèces dans la zone géographique maritime et terrestre d’application de la présente directive.»

4. Le neuvième considérant explique cette réglementation:

«considérant que la préservation, le maintien ou le rétablissement d’une diversité et d’une superficie suffisantes d’habitats sont indispensables à la conservation de toutes les espèces d’oiseaux; que certaines espèces d’oiseaux doivent faire l’objet de mesures de conservation spéciale concernant leur habitat afin d’assurer leur survie et leur reproduction dans leur aire de distribution; que ces mesures doivent également tenir compte des espèces migratrices et être coordonnées en vue de la constitution d’un réseau cohérent».

5. L’article 10 de la directive oiseaux prévoit que les États membres encouragent la recherche ornithologique:

«1. Les États membres encouragent les recherches et les travaux nécessaires aux fins de la protection, de la gestion et de l’exploitation de la population de toutes les espèces d’oiseaux visées à l’article 1 er .

2. Une attention particulière sera accordée aux recherches et aux travaux portant sur les sujets énumérés à l’annexe V. Les États membres adressent à la Commission toutes les informations nécessaires de manière à ce qu’elle puisse prendre les mesures appropriées en vue de la coordination des recherches et travaux visés au présent article.»

6. L’annexe V mentionne certains domaines de recherche méritant une attention particulière.

7. Aux termes de l’article 3, paragraphe 1, deuxième alinéa, de la directive 92/43/CEE du Conseil, du 21 mai 1992, concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages (11) (ci-après la «directive habitats»), le réseau Natura 2000 constitué par cette directive comprend également les ZPS classées par les États membres en vertu des dispositions de la directive oiseaux.

III – La procédure précontentieuse et les conclusions des parties

8. Le 26 janvier 2000, la Commission a invité le gouvernement espagnol à présenter ses observations conformément à l’article 226 CE (lettre de mise en demeure). La Commission reprochait au Royaume d’Espagne d’avoir désigné un nombre insuffisant de ZPS en vertu de l’article 4 de la directive oiseaux. À cette date, le Royaume d’Espagne avait désigné, selon les indications de la Commission, 175 zones pour une superficie de 33 582 km 2 .

9. Pour démontrer l’insuffisance de cette désignation de ZPS, la Commission s’est fondée sur l’IBA 98. Dans cet inventaire figurent 391 sites, d’une superficie de 15 862 567 hectares, représentant 31,5 % du territoire national espagnol.

10. Dans le courant de l’année 2000, le Royaume d’Espagne a réfuté le grief de la Commission, tout en désignant de nouvelles ZPS.

11. L’avis motivé, en date du 31 janvier 2001, mentionnait donc pour le Royaume d’Espagne 262 ZPS d’une superficie de 53 674 km 2 . Dans cet avis motivé, la Commission a imparti au Royaume d’Espagne un dernier délai de deux mois afin de procéder aux désignations supplémentaires requises. À la demande du gouvernement espagnol, la Commission a prorogé ce délai jusqu’au 3 mai 2001. En mars 2001, le Royaume d’Espagne a communiqué à la Commission 13 nouvelles ZPS, d’une superficie de 402 272 hectares.

12. Au cours des années suivantes, le Royaume d’Espagne a porté en plusieurs étapes le nombre de ZPS à 427, couvrant une superficie d’environ 79 778 km 2 , soit 15,8 % du territoire espagnol.

13. Ces progrès n’ont pas satisfait la Commission, qui a introduit un recours le 4 juin 2004.

14. La Commission conclut à ce qu’il plaise à la Cour:

1) constater que, en n’ayant pas classé comme ZPS pour les oiseaux des territoires suffisants en nombre et en superficie pour offrir une protection à toutes les espèces d’oiseaux visées à l’annexe I de la directive oiseaux, ainsi qu’aux espèces migratrices non visées dans ladite annexe, le Royaume d’Espagne a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 4, paragraphes 1 et 2, de cette directive;

2) condamner le Royaume d’Espagne aux dépens.

15. Le royaume d’Espagne conclut à ce qu’il plaise à la Cour:

1) rejeter le présent recours;

2) condamner l’institution requérante aux dépens.

16. Bien que les conclusions du recours visent la totalité du Royaume d’Espagne, ses motifs se limitent aux Communautés autonomes d’Andalousie, des Baléares, des Canaries, de Castilla‑La‑Mancha, de Catalogne, d’Estrémadure, de Galice et de Valence.

17. Depuis l’introduction du recours, le nombre des ZPS espagnoles a été porté à 512, englobant environ 91 803 km 2 . Les ZPS terrestres correspondent à 18,2 % du territoire espagnol. En outre, 20 ZPS comprennent des parties maritimes d’une superficie de 574 km 2 (12) .

18. Lors de la procédure orale, la Commission s’est désistée de son recours en ce qui concerne la Communauté autonome d’Estrémadure.

IV – Appréciation

19. La Commission reproche au Royaume d’Espagne d’avoir désigné trop peu de ZPS. Toutefois, l’objet du recours est limité à sept des Communautés autonomes espagnoles (13) .

A – Sur les fondements juridiques de l’obligation de classement

20. Les fondements juridiques de l’obligation de classement ne font pas l’objet d’une contestation entre les parties.

21. Aux termes de l’article 4, paragraphe 1, dernier alinéa, de la directive oiseaux, les États membres classent en ZPS les territoires les plus appropriés en nombre et en superficie à la conservation des espèces de l’annexe I dans la zone géographique maritime et terrestre d’application de cette directive. Il n’est pas possible de se soustraire à cette obligation par l’adoption d’autres mesures de conservation spéciale (14) .

22. Les États membres prennent, conformément à l’article 4, paragraphe 2, des mesures similaires à l’égard des espèces migratrices non visées à l’annexe I dont la venue est régulière, en ce qui concerne leurs aires de reproduction, de mue et d’hivernage et les zones de relais dans leur aire de migration. À cette fin, les États membres attachent une importance particulière à la protection des zones humides, et tout particulièrement de celles d’importance internationale.

23. Il résulte de l’article 4, paragraphe 3, et du neuvième considérant de la directive oiseaux que les ZPS doivent constituer un réseau cohérent répondant aux besoins de protection des espèces dans la zone géographique maritime et terrestre d’application de la directive.

24. Selon une jurisprudence constante, si les États membres jouissent d’une certaine marge d’appréciation en ce qui concerne le choix des ZPS, il n’en demeure pas moins que le classement et la détermination de ces zones doivent obéir exclusivement aux critères ornithologiques déterminés par la directive. D’autres considérations, notamment d’ordre économique ou social, ne sauraient jouer un rôle lors du classement (15) .

25. La Cour a déjà constaté que le Royaume d’Espagne aurait dû exécuter complètement son obligation de désignation de ZPS au moment de son adhésion, c’est-à-dire au 1 er janvier 1986 (16) . En revanche, dans le cadre de la présente procédure, la date à retenir pour l’appréciation du manquement est, comme on le sait, le terme du délai fixé par la Commission dans son avis motivé (17) . Étant donné que la Commission a prorogé a posteriori ce délai jusqu’au 3 mai 2003, il convient d’examiner si le Royaume d’Espagne avait désigné à cette date suffisamment de ZPS.

B – Sur l’acquiescement partiel au grief formulé dans le recours

26. Le Royaume d’Espagne conteste certes vigoureusement le grief formulé à son encontre, notamment en ce qui concerne la portée de l’inventaire IBA 98 pour l’appréciation de l’obligation de désignation. Néanmoins, depuis le 3 mai 2003, il a désigné de nouvelles ZPS ou étendu des ZPS existantes en Andalousie, aux Baléares, en Castilla‑La‑Mancha, en Catalogne, en Galice et dans la Communauté de Valence. En ce qui concerne les Canaries, le Royaume d’Espagne ne communique pas de nouvelles désignations depuis cette date, tout en reconnaissant dans ses écritures que la désignation de seize nouvelles ZPS et l’extension de onze ZPS existantes sont à tout le moins nécessaires dans cet archipel. De nouvelles désignations ou des extensions de ZPS doivent encore intervenir également en Andalousie, en Catalogne, en Galice et dans la Communauté de Valence.

27. Dans certaines affaires antérieures, la Cour s’est fondée sur de pareilles circonstances pour constater une désignation insuffisante de sites à la date de référence (18) . En effet, en désignant une ZPS, un État membre reconnaît que ce site fait partie des territoires les plus appropriés pour la protection des oiseaux (19) . On pourrait dès lors estimer que, en désignant de nouvelles zones de protection des oiseaux après l’expiration du délai fixé par l’avis motivé, le Royaume d’Espagne a reconnu se trouver dans l’obligation de procéder à une telle désignation.

28. Toutefois, dans toutes ces affaires, il existait d’autres circonstances qui conféraient au manquement une particulière gravité. Dans le cas de la France, aucun site n’avait été classé en ZPS pour six espèces de l’annexe I (20) ; dans le cas de la Finlande, quinze ZPS avaient été en tout et pour tout désignées, chiffre reconnu insuffisant de part et d’autre (21) ; enfin, dans le cas de la République italienne, cet État membre avait reconnu avoir tenu compte de raisons économiques et récréationnelles pour le choix des sites (22) . Il était en outre constant que les désignations italiennes se situaient largement en deçà de l’IBA 89 (23) . En conséquence, une condamnation du Royaume d’Espagne sur le seul fondement des ZPS désignées entre‑temps reposerait, en comparaison, sur une base bien faible.

29. Mais, avant tout, un arrêt rendu sur ce fondement ne serait pas justifié au regard du litige persistant entre les parties. En effet, le recours n’a pas perdu son objet du fait des désignations et des annonces intervenues entre‑temps. Le Royaume d’Espagne conteste être tenu à de nouvelles désignations sur le fondement de l’IBA 98 et la Commission ne se satisfait manifestement pas encore des avancées intervenues jusqu’à présent. En cas de condamnation du Royaume d’Espagne sur la base de ces désignations et de ces annonces, le litige sur le point de savoir dans quelle mesure de nouveaux sites doivent être classés passerait, sans avoir été résolu, dans la sphère d’application de l’article 228 CE et pourrait, le cas échéant, être à nouveau porté devant la Cour dans ce cadre (24) .

30. Cette incertitude serait principalement dommageable pour le Royaume d’Espagne, puisque celui-ci resterait dans le doute quant à la portée des obligations lui incombant en vertu d’un éventuel arrêt tout en devant craindre d’être condamné, dans le cadre d’une procédure ultérieure, au paiement d’une astreinte et/ou d’une somme forfaitaire. Cet inconvénient serait disproportionné, injustifié et immérité, puisqu’une condamnation fondée sur les désignations et annonces de désignations qu’il a effectuées entre‑temps aurait pour seule base le fait que le Royaume d’Espagne s’est efforcé, au cours de la procédure en manquement, de remplir ses obligations.

31. Il s’impose dès lors de statuer également sur le reste du litige entre les parties (25) .

C – Sur le reste du litige entre les parties

32. La Commission se fonde principalement, pour étayer son grief, sur le fait que les désignations espagnoles dans les Communautés autonomes visées dans le recours laissent sans couverture de larges parties des sites mentionnés dans l’IBA 98, mais également sur le fait que le Royaume d’Espagne n’a pas classé toutes les zones humides qu’il avait reconnues comme relevant de la convention de Ramsar (Iran) relative aux zones humides d’importance internationale (26) ; la Commission invoque enfin la couverture insuffisante d’espèces particulièrement dignes de protection, visées à l’annexe I de la directive oiseaux.

33. La Commission fait état à plusieurs reprises de cette protection insuffisante d’espèces particulièrement dignes de protection, mais ne fournit presque dans aucun cas une motivation expresse. En tout état de cause, l’énumération – que l’on trouve pour toutes les Communautés autonomes – des espèces concernées et l’indication partielle des habitats concernés (steppe, zones humides ou montagnes) ne suffisent pas pour établir de façon probante une protection insuffisante. La seule motivation, implicite, de ce grief se trouve dans l’IBA 98, lequel vise des sites non encore classés qui sont le mieux appropriés pour la conservation de ces espèces. En conséquence, ce grief ne contient aucun argument nouveau par rapport à l’invocation de l’IBA 98, mais se borne à contribuer à la démonstration de la force probante de cet inventaire afin d’établir une désignation insuffisante. Il n’est dès lors pas nécessaire d’apprécier séparément cette argumentation.

34. En ce qui concerne les «zones Ramsar», la Commission mentionne dans son recours deux sites en Andalousie et un en Galice, qui n’avaient pas encore été classés en ZPS à la date de référence. Le Royaume d’Espagne ne contestant pas ce point, celui-ci est considéré comme admis.

35. En conséquence, l’examen peut se limiter à la valeur probante de l’IBA 98.

36. La Commission expose que l’IBA 98 est, parmi les sources disponibles, l’expertise de référence la mieux documentée et la plus précise pour la définition des sites les mieux appropriés pour la conservation et surtout pour la survie et la reproduction des espèces importantes. Selon elle, cet inventaire est basé sur des critères ornithologiques équilibrés permettant d’indiquer quels sont les sites les plus adéquats pour assurer la conservation de toutes les espèces visées à l’annexe I et des autres espèces migratrices; il énumère en outre les zones de protection des oiseaux à désigner en priorité en Espagne.

37. La comparaison entre les données de l’IBA 98 et des ZPS des oiseaux désignées par le Royaume d’Espagne permettrait de conclure, tant en ce qui concerne l’ensemble du territoire espagnol que moyennant un examen ventilé selon les différentes Communautés autonomes, que le nombre et la superficie des sites classés en ZPS se situent en deçà de ceux des sites qui, selon les connaissances scientifiques disponibles, sont le mieux appropriés pour permettre une conservation adéquate des oiseaux visés par l’article 4 de la directive.

38. Le Royaume d’Espagne s’oppose, sur le plan des principes, au recours à l’IBA 98, au motif que la définition d’un réseau de ZPS doit être fondée sur des informations dont disposent les autorités compétentes. Or, l’IBA 98 ne saurait constituer une pareille référence.

39. Cette thèse n’est que partiellement exacte. La désignation de ZPS relève de la compétence exclusive des États membres. Ceux-ci ne peuvent pas se soustraire à leurs responsabilités en se bornant à reprendre et à transposer les conclusions d’autres instances, y compris celles d’organisations de protection des oiseaux. Chaque désignation suppose au contraire que, selon la conviction des instances compétentes fondée sur les meilleures données scientifiques disponibles (27), le site concerné figure parmi ceux les mieux appropriés pour la conservation des oiseaux.

40. Il n’en découle cependant pas que, d’une façon générale, l’obligation de désignation soit absente aussi longtemps que les autorités compétentes n’ont pas examiné et vérifié de nouvelles connaissances scientifiques. Il convient au contraire de rappeler que l’obligation de désignation existe depuis l’expiration du délai de transposition de la directive oiseaux, soit, dans le cas du Royaume d’Espagne, depuis le 1 er  janvier 1986 (28) . L’obligation de classement n’est pas non plus limitée par l’état des connaissances scientifiques à une date déterminée (29) .

41. Cette obligation se doublait d’une autre, à savoir celle d’identifier les zones les mieux appropriées. Les dispositions combinées de l’article 10 de la directive oiseaux et de son annexe V imposent ainsi aux États membres d’encourager les recherches et les travaux nécessaires. En conséquence, le Royaume d’Espagne aurait dû procéder lui-même, dès avant 1986, à un relevé scientifique complet de la présence des oiseaux sur son territoire et désigner les ZPS en résultant. S’il avait satisfait complètement à cette obligation, soit l’IBA 98 ne contiendrait que des ZPS, soit le Royaume d’Espagne pourrait réfuter facilement toutes les exigences supplémentaires visant à la désignation de ZPS. De nouvelles obligations de désignation ne pourraient naître qu’en cas de variation de la présence d’oiseaux, ce qu’aucune des parties ne soutient en l’espèce.

42. Ce contexte explique la portée de l’inventaire IBA 98 pour le présent litige. Même de l’avis de la Commission, il ne décrit pas de façon absolue et définitive le réseau des ZPS à désigner. Celle‑ci n’attend pas du Royaume d’Espagne qu’il classe entièrement en ZPS chacun des sites énumérés dans l’inventaire. En conséquence, la Commission a renoncé au grief visant des désignations insuffisantes pour certaines Communautés autonomes, alors même que ces désignations se situent en deçà de l’IBA 98 (30), de même qu’elle a accepté la délimitation, scientifiquement fondée, de ZPS à l’intérieur des IBA, bien que celle‑ci se situât, en superficie, très en deçà des indications de l’IBA 98 (31) . L’IBA ne sert au contraire que d’indice faisant apparaître que les désignations intervenues jusqu’à présent se situent nettement en deçà des exigences de l’article 4 de la directive oiseaux.

43. Il est en principe possible d’utiliser de cette manière un inventaire de sites. La Cour a constaté, à l’égard de l’inventaire plus ancien IBA 89, que, compte tenu du caractère scientifique de ce dernier et de l’absence de production de tout élément de preuve scientifique tendant notamment à démontrer qu’il pouvait être satisfait aux obligations découlant de l’article 4, paragraphes 1 et 2, de la directive oiseaux en classant en ZPS des sites autres que ceux résultant dudit inventaire et couvrant une superficie totale inférieure à celle de ces derniers, celui-ci, bien que n’étant pas juridiquement contraignant pour l’État membre concerné, pouvait être utilisé par la Cour comme élément de référence permettant d’apprécier si cet État membre a classé un nombre et une superficie suffisants de territoires en ZPS au sens des dispositions susmentionnées de la directive (32) .

44. La Commission n’invoque plus cet inventaire plus ancien, reconnu par la Cour, mais l’IBA 98. Elle estime que ce dernier fournit désormais les meilleures informations scientifiques disponibles sur les sites les mieux appropriés pour la conservation des oiseaux.

45. Le Royaume d’Espagne pourrait réfuter cet indice en produisant de meilleures données scientifiques qui démontreraient que les ZPS désignées répondent aux obligations découlant de l’article 4 de la directive oiseaux (33) . Il semble que les Communautés autonomes qui ne font plus l’objet de la présente procédure aient apporté cette preuve à la satisfaction de la Commission. Le Royaume d’Espagne déclare d’ailleurs, à l’égard de différentes autres Communautés autonomes, que des données correspondantes existent ou sont en cours d’élaboration. Toutefois, cette affirmation n’est en général (34) pas suffisamment étayée pour permettre à la Cour d’examiner si, à cet égard, l’IBA 98 se trouve réfuté.

46. Dans l’optique du présent litige, le Royaume d’Espagne poursuit au contraire une stratégie différente. Il s’efforce de mettre en cause d’emblée la valeur scientifique de l’inventaire IBA 98, afin d’empêcher qu’il soit utilisé comme moyen de preuve pour démontrer une désignation insuffisante. À cet effet, il avance une série de critiques de principe, il conteste la qualité des données utilisées et il récuse enfin certains des critères pour la désignation des sites les mieux appropriés pour la conservation des oiseaux.

1. Sur la critique de principe de l’IBA 98

47. Le gouvernement espagnol émet tout d’abord certaines critiques de principe à l’encontre de l’IBA 98. Selon lui, cet inventaire est d’une qualité radicalement différente de celle de l’IBA 89, lequel a été établi à la demande de la Commission par le Conseil international pour la protection des oiseaux, alors que l’IBA 98 ne l’a été que par une organisation espagnole de protection des oiseaux, SEO/BirdLife. BirdLife International, organisation ayant succédé au Conseil international pour la protection des oiseaux, aurait expressément décliné toute responsabilité pour le contenu de l’IBA 98.

48. Il serait incompréhensible que, neuf années seulement après l’IBA 89, l’IBA 98 ait pu englober 16 millions d’hectares, au lieu de 9,5 millions. Or, selon la Commission et la Cour, l’IBA 89 aurait déjà été rigoureux, précis et exhaustif. Apparemment, SEO/BirdLife aurait eu l’intention, après l’arrêt Commission/Pays‑Bas (35), d’augmenter unilatéralement le nombre et la superficie des sites importants du point de vue ornithologique, afin de se créer des arguments pour une procédure en manquement. Le gouvernement espagnol rappelle que l’IBA 98 a été publié début 1999 et que la présente procédure en manquement a été introduite déjà un an plus tard.

49. Toutefois, comme la Commission le souligne à juste titre, l’IBA 98 a été élaboré par la même organisation que celle qui avait établi la partie espagnole de l’IBA 89: SEO/BirdLife. Certes, l’IBA 98 contient encore la réserve selon laquelle BirdLife International, la fédération internationale regroupant les organisations de protection des oiseaux, déclinait toute responsabilité; il n’en reste pas moins que cette organisation a depuis lors repris l’IBA 98 dans l’IBA 2000, l’inventaire européen des sites importants pour la protection des oiseaux, établi sous sa responsabilité (36) .

50. SEO/BirdLife est une autorité reconnue pour les questions ornithologiques concernant l’Espagne. Le Royaume d’Espagne l’admet expressément. Les missions d’experts énumérées par la Commission, confiées par les instances espagnoles à cette organisation, la participation d’instances étatiques espagnoles à l’IBA 98 (37), ainsi que les désignations complémentaires effectuées sur la base de l’IBA 98 dans certaines Communautés autonomes d’Espagne confirment l’autorité de SEO/BirdLife en matière scientifique. Enfin, la Cour s’est elle-même expressément fondée, dans un arrêt récent, sur un rapport de SEO/BirdLife concernant la chasse aux gluaux (38) .

51. Même au regard de la méthode employée et de la participation de la Commission, le nouvel inventaire correspond largement à celui qui l’a précédé. Comme l’IBA 89, l’inventaire IBA 98 a pour résultat d’appliquer une série de critères ornithologiques pour l’identification des sites les mieux appropriés à un relevé de la présence d’oiseaux.

52. En ce qui concerne les critères pour le choix des sites, l’IBA 89 et l’IBA 98 sont pour leur plus grande partie concordants (39) . La participation de la Commission à l’IBA 89, soulignée par le Royaume d’Espagne, s’est limitée pour l’essentiel à accompagner le travail des ornithologues sur les critères. Ces derniers continuant dans une large mesure à être appliqués, la Commission prend également la responsabilité, du moins indirectement, de l’IBA 98. En revanche, déjà pour l’IBA 89, la Commission n’a guère pu surveiller le relevé des données, car elle n’était pas en mesure de vérifier l’existence et l’importance de chaque présence d’oiseaux. De ce point de vue également, il n’y a donc pas de différence significative entre l’IBA 89 et l’IBA 98.

53. Au demeurant, les objections de principe soulevées par le gouvernement espagnol à l’encontre de l’IBA 98 constituent de simples suppositions – presque des soupçons – et ne sont donc pas de nature, considérées isolément, à mettre en cause l’autorité de l’inventaire. Il est plausible que l’accroissement des connaissances scientifiques sur la présence d’oiseaux permette d’identifier de nouveaux sites qui sont les mieux appropriés pour la conservation des oiseaux. De même, le fait pour une organisation se consacrant à la protection des oiseaux, comme SEO/BirdLife, de chercher à actualiser et à compléter l’inventaire des sites importants après que la Cour a reconnu sa valeur en tant que moyen de preuve pour une désignation insuffisante de ZPS constitue une stratégie logique. BirdLife International a elle aussi poursuivi, en collaboration avec ses autres partenaires dans les pays d’Europe, une stratégie semblable, puisqu’un nouvel inventaire européen a été publié en 2000 (40) .

54. Enfin, l’objection du Royaume d’Espagne selon laquelle il a déjà fourni une contribution anormalement élevée aux ZPS désignées dans la Communauté ne saurait prospérer. Il est exact que la part des ZPS par rapport à la superficie était la plus importante en Espagne à la date d’introduction du recours: le Royaume d’Espagne avait à ce moment 35 % des superficies classées en ZPS dans la Communauté, alors qu’il ne disposait que de 16 % du territoire communautaire.

55. Cet argument est toutefois dépourvu de valeur juridique. L’article 4 de la directive oiseaux n’exige pas que chaque État membre désigne des ZPS en fonction de sa taille, mais que les États membres désignent les sites les mieux appropriés. Selon leur situation géographique et biologique, les États membres disposent de tels sites dans une proportion variable. C’est ainsi que, entre‑temps, la République de Slovénie et la République slovaque ont classé des parties nettement plus importantes de leur territoire en ZPS (41) . Si un État membre devait, par la désignation de ZPS, contribuer dans une proportion anormalement élevée à la mise en place de Natura 2000, la Communauté serait tenue, en vertu du principe de loyauté communautaire, de procéder à une pondération d’autant plus favorable à son égard dans le cadre du soutien communautaire du réseau (42) .

56. Les objections de principe du Royaume d’Espagne à l’encontre de l’IBA 98 ne peuvent donc mettre en doute la qualité scientifique de cet inventaire. En toute logique, l’inventaire le plus récent doit se voir reconnaître, en raison de son origine, une qualité scientifique comparable à celle de l’instrument qui l’a précédé.

2. Sur les données utilisées

57. D’autres objections du Royaume d’Espagne se rapportent à la qualité intrinsèque de l’IBA 98. Elles nécessitent une discussion quant au relevé des données de cet inventaire et à la qualité en résultant de ces dernières.

58. Le Royaume d’Espagne fait grief à l’inventaire de ne pas contenir de sources pour l’évaluation des différents sites énumérés. Selon lui, les informations sous‑jacentes et l’étendue des sites ne peuvent donc être vérifiées. Ce faisant, le gouvernement espagnol méconnaît que des relevés scientifiques effectués sur place, dans les différentes IBA, sont en mesure de vérifier à tout moment la présence d’oiseaux et les superficies retenues. Au demeurant, même dans le cas de l’inventaire plus ancien, l’IBA 89, la situation n’était pas meilleure en ce qui concerne les sources. Cela n’a pas empêché la Cour de reconnaître cet inventaire.

59. Le Royaume d’Espagne invoque également le fait que SEO/BirdLife ait refusé de donner aux Communautés autonomes, exclusivement compétentes pour la désignation de ZPS, un accès illimité à sa base de données des IBA. Selon lui, cette base de données peut contenir pour chaque IBA des informations différentes, non reprises dans l’inventaire, notamment des références à la littérature et des indications sur la qualité des données concernant la délimitation des sites (43) .

60. Selon ce que l’on sait, de pareils instruments, qui pouvaient faciliter aux États membres une désignation de ZPS, n’existaient pas pour l’IBA 89. Il est très regrettable, s’il en va aujourd’hui autrement, que les instances compétentes ne puissent, le cas échéant, accéder à ces instruments. Cela crée l’impression que SEO/BirdLife ne soutient pas de toutes ses forces son propre objectif, à savoir une désignation complète de ZPS. Il convient toutefois d’observer en même temps que SEO/BirdLife n’a refusé que l’accès totalement libre à la base de données, tout en semblant prête à négocier sur les conditions d’accès.

61. En tout état de cause, le refus d’accès ne met pas en question la qualité scientifique de l’inventaire publié. En effet, l’inventaire ne se borne pas à exploiter la littérature citée dans cette base de données, mais repose de façon tout à fait essentielle sur des observations et expériences, par ailleurs non publiées, de groupes locaux de SEO/BirdLife, d’administrations régionales, de biologistes, de groupes de protection de la nature, d’ornithologues, de chercheurs, de naturalistes, de professeurs d’université, d’agents de l’administration des forêts et autres (44) . Les informations pertinentes pour le choix des IBA sont donc contenues dans la publication, tandis que les références de littérature figurant dans la base de données sont d’importance moindre pour l’identification de ces sites.

62. Il serait en conséquence utile d’identifier les personnes responsables du relevé des données dans les différentes IBA. Celles‑ci pourraient, compte tenu de leur compétence, apporter une aide aux instances compétentes pour la délimitation et la désignation d’une ZPS. La Commission a toutefois souligné à juste titre, lors de la procédure orale, que ces personnes avaient droit à un traitement confidentiel de la part de SEO/BirdLife si elles étaient amenées à craindre des représailles en raison de leur engagement en faveur de la désignation de ZPS. Cela n’est notamment pas à exclure lorsqu’elles travaillent à titre professionnel pour des autorités ayant une attitude négative vis-à-vis de la désignation de ZPS. Des problèmes peuvent également survenir au niveau local dans le cas d’IBA litigieuses.

63. Le gouvernement espagnol ne peut pas non plus opposer au recours une atteinte aux droits de la défense quant aux informations contenues dans la base de données. En effet, le recours n’est pas fondé sur ces informations, mais uniquement sur l’inventaire IBA 98 tel que publié.

64. Le Royaume d’Espagne ne peut pas davantage faire état d’un manque de soutien de la part de la Commission. La Commission est certes tenue de soutenir les États membres dans toute la mesure du possible pour la désignation des ZPS; cela ne lui permet cependant pas de mettre à leur disposition des informations qui sont la propriété de personnes privées. Or, tel est exactement le cas de cette base de données.

65. En tout état de cause, indépendamment de la portée de ce refus d’accès, rien n’empêche le gouvernement espagnol de prendre les mesures nécessaires pour satisfaire complètement à son obligation de désignation. SEO/BirdLife a au contraire considérablement facilité les désignations complémentaires, ne serait‑ce que par la publication de l’inventaire. Les instances espagnoles ne se trouvent donc pas dans l’obligation d’examiner l’ensemble du territoire national, mais peuvent se concentrer sur les IBA.

66. Le gouvernement espagnol met par ailleurs en doute la qualité des données utilisées. SEO/BirdLife définit la qualité des données comme élevée pour 38 %, moyenne pour 44 % et faible pour 18 % (45) . Pour chaque élément de protection ornithologique des différents sites, l’IBA 98 classe la qualité des données dans les catégories A, B, C ou U. U signifie inconnu, C correspond à des informations faibles, B à des informations incomplètes; seule la catégorie A contient des informations exactes (46) .

67. Le Royaume d’Espagne estime que seules les informations de la catégorie A peuvent être prises en considération dans le cadre de la procédure en manquement. Toutefois, cette objection revient finalement à dire que le Royaume d’Espagne pouvait rester dans l’inaction jusqu’à ce que la Commission ou des organisations privées analysent de façon systématique et au plus haut niveau scientifique la présence d’oiseaux sur l’ensemble du territoire national. Or, en vertu de la directive oiseaux, cette obligation incombe au Royaume d’Espagne. Aussi longtemps que l’on ne dispose pas de meilleures informations, des informations de qualité moyenne ou faible peuvent donc elles aussi servir d’indice de l’existence de sites qui sont les mieux appropriés pour la conservation des oiseaux.

68. Les objections du gouvernement espagnol à l’égard de la qualité des données de l’IBA 98 doivent en conséquence également être écartées.

3. Sur les critères pour la définition des sites les mieux appropriés pour la conservation des oiseaux

69. Le gouvernement espagnol critique enfin certains des critères retenus pour la définition des sites les mieux appropriés pour la conservation des oiseaux, ainsi que leur application par SEO/BirdLife.

70. Les critères sont décrits dans les inventaires IBA 98 et IBA 2000 (47) . Les IBA hébergent en règle générale un nombre significatif d’individus d’une espèce globalement menacée (C.1) (48) ou au moins 1 % de la population totale pertinente d’une espèce menacée dans l’Union européenne, c’est-à-dire d’une espèce visée à l’annexe I de la directive oiseaux (C.2) (49) ou d’une autre espèce migratrice (C.3) (50) . Les IBA abritent également de grands rassemblements de plus de 20 000 oiseaux aquatiques ou de plus de 10 000 couples d’oiseaux de mer (C.4), ainsi que des goulets migratoires où passent régulièrement plus de 5 000 cigognes ou plus de 3 000 rapaces ou grues (C.5) (51) . Enfin, selon le critère C.6, les cinq sites les plus importants pour les espèces de l’annexe I doivent être considérés comme site le plus important du point de vue ornithologique dans la région européenne concernée (critère dit «top 5») (52) . Le critère C.7 vise des ZPS désignées ou des sites prévus pour un classement qui ont été choisis sur la base d’autres critères.

71. Par ailleurs, BirdLife se fonde sur des principes généraux pour la délimitation des sites. Soit une IBA se distingue nettement de son environnement – il s’agit déjà d’un site délimité aux fins de la protection de la nature –, soit elle répond à elle seule ou en liaison avec d’autres IBA à toutes les exigences des espèces concernées au moment de leur présence (53) .

72. Étant donné que les critères de l’IBA 89 et de l’IBA 98 sont largement concordants pour la définition des sites les mieux appropriés pour la conservation des oiseaux, la Cour les a déjà reconnus en principe en constatant, pour l’inventaire plus ancien IBA 89, que celui‑ci constituait (à la date pertinente pour chaque procédure) le seul document contenant les moyens de preuve scientifiques pour apprécier la question de savoir si l’État défendeur avait satisfait à son obligation de classer en ZPS les sites qui, en nombre et en superficie, étaient les mieux appropriés pour la conservation des espèces protégées (54) .

73. Rien n’empêche cependant les États membres de développer eux‑mêmes des critères pour l’identification des sites les mieux appropriés pour la conservation des oiseaux et de désigner leurs ZPS sur cette base (55) . Ces critères doivent toutefois au moins équivaloir, du point de vue ornithologique, à ceux des inventaires IBA.

74. Le Royaume d’Espagne n’a cependant pas développé ses propres critères, tout en s’opposant à l’application des critères de choix C.1 et C.6 dans le cadre de l’IBA 98 ainsi qu’à la délimitation de nombreux sites identifiés.

a) Sur le critère C.1

75. Le Royaume d’Espagne estime que SEO/BirdLife a choisi dans certains cas, contrairement à la définition du critère C.1, des sites hébergeant nettement moins de 1 % de la population reproductrice des espèces protégées. Cela vaudrait notamment pour l’outarde barbue. Le Royaume d’Espagne hébergerait environ 23 000 individus; en conséquence, la valeur limite se situerait à 230 individus. Or, SEO/BirdLife utiliserait une valeur limite de 50 individus.

76. Par cette critique, le gouvernement espagnol méconnaît la définition de ce critère. En ce qui concerne les espèces globalement menacées, il suffit que le site en question héberge un nombre significatif d’individus. Ce nombre significatif peut être sensiblement inférieur au seuil de 1 % prévu par le critère C.2, c’est‑à‑dire pour les espèces qui ne sont menacées que dans l’Union européenne, mais non globalement.

77. Pour les espèces qui sont menacées à l’échelle mondiale, BirdLife International utilise, pour contrer cette menace, des valeurs limites nettement moins élevées, par exemple celle de 30 individus pour l’outarde barbue, évoquée par le Royaume d’Espagne (56) . Or – comme le souligne la Commission –, eu égard à la présence relativement plus importante de cette espèce en Espagne, SEO/BirdLife a fixé le seuil de l’IBA 98 à un niveau plus élevé que BirdLife International pour l’inventaire européen.

78. Au demeurant, ce critère n’a pas non plus été renforcé, mais au contraire assoupli, par rapport à l’inventaire IBA 89 reconnu par la Cour. Le critère 5 de l’IBA 89 visait encore toutes les aires de nidification d’espèces rares ou menacées.

79. En conséquence, il y a lieu d’écarter cette objection du Royaume d’Espagne.

b) Sur le critère C.6

80. Le Royaume d’Espagne critique en outre l’application du critère C.6, c’est‑à‑dire du critère «top 5». Selon celui‑ci, les cinq meilleurs sites de chaque région sont réputés, pour chaque espèce, comme étant le mieux appropriés pour la conservation des oiseaux. À l’intérieur de chaque État membre, les régions sont délimitées conformément à la nomenclature des unités territoriales statistiques (NUTS) établie par Eurostat. BirdLife a sélectionné, dans plusieurs États membres, des niveaux différents de cette nomenclature afin d’obtenir des régions européennes de taille comparable (57) . En Espagne, c’est le niveau 2 qui a été choisi, qui correspond aux Communautés autonomes et qui aboutit ainsi à une répartition en 17 régions.

81. Le Royaume d’Espagne refuse de reconnaître les Communautés autonomes en tant que régions européennes au sens de ce critère. Il expose que les Communautés autonomes ne sont pas délimitées en fonction de critères ornithologiques, mais constituent des circonscriptions administratives. C’est ainsi qu’il existe 17 régions de ce type en Espagne, 20 en Italie et 95 en France (58) . Le Royaume d’Espagne estime qu’il faut au contraire se fonder sur les «régions biogéographiques» qui sont utilisées dans le cadre de la directive habitats.

82. Aux fins de la directive habitats, l’ensemble du territoire de la Communauté a été réparti en régions biogéographiques, actuellement au nombre de sept: les régions continentale, méditerranéenne, alpine, atlantique, macaronésienne, boréale et pannonique. L’Espagne compte des parties de quatre de ces régions, à savoir des parties des régions biogéographiques atlantique, méditerranéenne, alpi ne et macaronésienne.

83. Si seules les parties espagnoles des régions biogéographiques étaient reconnues comme «régions européennes» au sens du critère C.6, le nombre des sites correspondant à ce critère serait beaucoup moins élevé. Au lieu de 85 meilleurs sites au maximum pour chaque espèce protégée, l’Espagne ne compterait que 20 meilleurs sites au maximum pour chacune de ces espèces.

84. Cette objection du Royaume d’Espagne ne peut être écartée sans autre forme de procès. Il n’y a pas lieu de s’attacher, dans ce contexte, à l’argument de la Commission selon lequel le Royaume d’Espagne a toujours insisté, jusqu’à présent, pour que l’exécution des obligations de désignation soit appréciée séparément au niveau des Communautés autonomes, seules compétentes. Les compétences des Communautés autonomes ne peuvent en effet pas être déterminantes pour la définition des sites à classer. Comme on le sait, la sélection de ces sites doit reposer sur des critères scientifiques (59) .

85. Un autre argument de la Commission est nettement plus axé sur l’ornithologie, sans être pour autant décisif: les régions biogéographiques de la directive habitats ne sont pas fonction des populations d’oiseaux, mais principalement de la répartition des types d’habitat. Il ne serait guère possible d’établir une comparaison entre les oiseaux et les espèces et types d’habitats protégés par la directive habitats. Or, même si les régions biogéographiques ne visent pas spécifiquement la conservation des oiseaux, elles présentent sans doute un lien plus étroit avec celle‑ci que des découpages territoriaux, administratifs et statistiques.

86. BirdLife International admet d’elle‑même que l’ancrage à la NUTS n’est pas idéal à des fins ornithologiques, étant donné que de nombreuses espèces d’oiseaux privilégient des régions peu peuplées. Or, la NUTS est fondée sur la population. Lorsque la densité de la population est moindre, les régions sont plus grandes. Afin de garantir l’équivalence des régions, on a donc, selon BirdLife International, choisi pour chaque État membre des niveaux de NUTS différents.

87. Cette motivation fait apparaître la véritable valeur de la référence faite à la NUTS, laquelle est indifférente du point de vue ornithologique. On obtient de cette façon une grandeur de référence comparable dans tous les États membres pour l’application du critère top 5. Cela garantit à son tour une répartition peu ou prou uniforme des ZPS dans la Communauté. Une telle répartition est une condition pour que les ZPS ne se concentrent pas dans certains secteurs, mais constituent ensemble un réseau qui couvre la Communauté de façon plus ou moins uniforme.

88. Cette couverture uniforme s’impose en particulier pour des raisons ornithologiques, car elle garantit la protection des espèces sur l’ensemble de leur aire de distribution. L’importance de la répartition géographique des espèces ressort de la définition de l’état de conservation des espèces figurant à l’article 1 er , sous i), de la directive habitats. L’état de conservation désigne l’effet de l’ensemble des influences qui, agissant sur l’espèce, peuvent affecter à long terme la répartition et l’importance de ces populations. Cette définition n’est certes pas directement applicable à la directive oiseaux, mais elle illustre le consensus scientifique qui doit prévaloir également dans le cadre du choix des sites au titre de cette directive, qui doit être fondé sur des critères ornithologiques.

89. Si on devait, en revanche, choisir comme grandeur de référence des régions plus grandes, par exemple les régions biogéographiques proposées par le Royaume d’Espagne, on obtiendrait, pour un nombre identique de sites à sélectionner par région, un nombre inférieur de ZPS. Le réseau serait alors moins dense. En outre, on courrait le risque que ces ZPS soient réparties de façon moins uniforme que sur la base de régions plus petites. Ce risque existerait au demeurant également si, pour des régions plus grandes, le nombre des sites à sélectionner était augmenté. En effet, on ne pourrait exclure dans aucun de ces deux cas que les meilleurs sites se concentrent dans certains secteurs, tandis que d’autres secteurs, qui pourraient offrir chacun cinq nouveaux sites en tant que région autonome, ne seraient pas visés.

90. Dès lors, si l’on voulait utiliser, au lieu de la NUTS, d’autres régions de référence, le critère en résultant devrait être conçu de telle sorte qu’il conduise à un réseau de ZPS aussi finement maillé. Une telle répartition du territoire espagnol sur une base ornithologique pourrait certainement être réalisée, puis utilisée pour l’identification des ZPS, moyennant l’effort scientifique nécessaire (60) . Toutefois, le Royaume d’Espagne n’a pas entrepris cet effort, se bornant à invoquer les régions biogéographiques, lesquelles ne constituent pas une base comparable aux Communautés autonomes pour la réalisation d’un réseau uniforme.

91. Dès lors, le Royaume d’Espagne n’a pas non plus démontré, en ce qui concerne le critère C.6, que l’inventaire IBA 98 ne constitue pas le meilleur document scientifique pour l’identification des sites les mieux appropriés pour la conservation des oiseaux.

c) Sur la délimitation des IBA

92. Le Royaume d’Espagne est enfin mécontent de la délimitation des IBA. Celle‑ci serait fréquemment erronée, car elle engloberait des territoires manifestement inappropriés, par exemple des zones d’urbanisation. En outre, on aurait souvent obtenu des IBA trop grandes, en moyenne beaucoup plus grandes que dans d’autres États membres.

93. Tout comme la sélection des zones de protection des oiseaux, leur délimitation doit reposer sur les critères ornithologiques contenus dans l’article 4, paragraphes 1 et 2, de la directive oiseaux (61) . Le Royaume d’Espagne critique la délimitation des IBA, mais non les critères utilisés pour cette délimitation. Dès lors, il s’oppose uniquement à leur application, ainsi qu’aux données utilisées à cet effet. Toutefois, les affirmations globales, par exemple quant aux zones d’urbanisation, ne suffisent pas pour permettre un examen concret de ces critiques. Le cas échéant, certaines espèces sont justement tributaires de pareils habitats. Ainsi, il n’est pas contesté que des colonies de faucons crécerellettes (falco naumanni), menacés à l’échelle mondiale, nichent également à l’intérieur de zones d’urbanisation.

94. Le Royaume d’Espagne souligne toutefois à juste titre que la Commission se trouve en contradiction, en ce qui concerne les IBA qui ne sont que partiellement couvertes par des ZPS, avec l’argumentation qu’elle développe elle‑même à un autre endroit du recours (62) . Elle y expose avoir accepté les arguments scientifiques des Communautés autonomes de Catalogne, de Valence, de Galice et de Castilla‑La‑Mancha selon lesquels la délimitation de leurs ZPS était susceptible, pour chacune («cada una») de leurs IBA, de garantir le respect de la directive oiseaux. La Commission fait état de cet argument du Royaume d’Espagne dans son mémoire en réplique (63), mais elle n’a élucidé cette contradiction ni dans cette réplique ni en réponse à une question lors de la procédure orale.

95. Cet exposé de ses moyens ne satisfait pas aux exigences de l’article 38, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure. L’exposé des moyens, nécessaire en vertu de cette disposition, doit être suffisamment clair et précis pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et à la Cour d’exercer son contrôle. Il en résulte que les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels un recours est fondé doivent ressortir d’une façon cohérente et compréhensible du texte de la requête elle‑même (64) . Or, en ce qui concerne les ZPS à l’intérieur des IBA dans les Communautés autonomes susmentionnées, on ne sait pas exactement, eu égard à cette contradiction dans la requête, si la Commission soulève effectivement ce grief. Cela rend impossible tout à la fois une défense appropriée et une appréciation par la Cour.

96. Sur ce point, le recours est donc irrecevable. Ce vice affecte les ZPS désignées et communiquées à la Commission à la date d’introduction du recours dans les Communautés autonomes de Castilla‑La‑Mancha, de Catalogne, de Valence et de Galice.

97. La poursuite de l’examen du grief selon lequel certains sites n’ont été classés en ZPS des oiseaux que pour une superficie trop faible n’est donc nécessaire qu’à l’égard de l’Andalousie, des Baléares et des Canaries.

D – Sur les différentes Communautés autonomes

98. L’argumentation des parties porte enfin sur les différentes Communautés autonomes. Elle doit être examinée au regard de chacune de ces régions.

1. Sur l’Andalousie

99. Sur la base d’une comparaison entre l’IBA 98 et les désignations en Andalousie, la Commission expose que, au moment de l’expiration du délai imparti par l’avis motivé, 37 IBA sur 60 n’étaient pas couvertes du tout par des ZPS, que les 22 ZPS désignées ne concordaient que partiellement avec 23 IBA et que différentes espèces n’étaient couvertes qu’insuffisamment, notamment l’aigle royal ibérique (aquila adalberti), la cigogne noire (ciconia nigra), la foulque caronculée (fulica cristata), la sarcelle marbrée (marmaronetta angustirostris), le faucon crécerellette, la talève sultane (porphyrio porphyrio), le goéland d’Audouin (larus audouinii), l’outarde canepetière (tetrax tetrax), l’outarde barbue (otis tarda), le busard cendré (circus pygargus) et l’aigle de Bonelli (hieraaetus fasciatus). Selon la Commission, la superficie classée d’environ un million d’hectares ne correspond qu’à environ un tiers des superficies couvertes par les IBA.

100. Le Royaume d’Espagne ne conteste pas ce grief. Celui‑ci doit donc être considéré comme admis. En conséquence, il y a lieu de faire droit intégralement au recours en ce qui concerne l’Andalousie.

2. Sur les Baléares

101. À la date de référence, les Baléares comptaient 40 ZPS désignées, d’une superficie de 121 015 hectares. Toutefois, les 20 IBA, d’une superficie de 131 243 hectares, n’étaient couvertes qu’à concurrence de 54 %. La Commission a notamment invoqué le grief que le milan royal (milvus milvus) n’était couvert qu’insuffisamment.

102. Le Royaume d’Espagne objecte que les sites identifiés dans l’IBA 98 n’étaient pas utilisables, ne serait‑ce qu’en raison de l’échelle de 1: 2 500 000, et qu’ils étaient en outre dépassés. Il reconnaît toutefois que le milan royal doit être mieux couvert dans des ZPS; à cette fin, il a procédé, dans le cadre d’un plan de conservation de l’espèce, à la désignation de nouvelles ZPS et à la nouvelle délimitation de ZPS existantes, de sorte à couvrir 70 % de l’espèce.

103. Le Royaume d’Espagne a donc admis en principe les griefs de la Commission également à l’égard des Baléares. Il n’est pas possible d’apprécier si les nouvelles constatations des autorités compétentes mettent effectivement en cause la valeur probante de l’IBA 98, étant donné qu’elles n’ont pas été produites devant la Cour.

104. En conséquence, il y a lieu de faire droit intégralement au recours à l’égard des Baléares.

3. Sur les Canaries

105. À la date de référence – comme sans doute encore aujourd’hui –, les Canaries comptaient 28 ZPS désignées, d’une superficie de 211 598 hectares. Elles couvrent environ 59, 5 % des 65 IBA, d’une superficie de 133 443 hectares. 23 IBA ne sont pas du tout couvertes, une partie des autres ne l’est que partiellement. La Commission souligne en particulier la couverture insuffisante des espèces suivantes: l’outarde houbara (chlamydotis undulata), le vautour percnoptère (neophron percnopterus), le tarier des Canaries (saxicola dacotiae), le courvite isabelle (cursorius cursor) et le pétrel de Bulwer (bulweria bulwerii).

106. Le Royaume d’Espagne reconnaît qu’il convient de procéder à la désignation de nouvelles ZPS et à l’extension de ZPS existantes. Il déclare toutefois que, sur une base scientifique, les autorités compétentes n’approuvent pas toutes les IBA dans leur intégralité. Pour étayer cette déclaration, le gouvernement espagnol a produit, à l’appui de son mémoire en défense, une étude détaillée sur toutes les IBA des Canaries non encore entièrement couvertes; cette étude expose les considérations ornithologiques sur la base desquelles des IBA doivent être ou non classées en ZPS (65) . La Commission ne l’ayant pas contestée, son contenu doit être considéré comme admis et constitue, pour les défauts de classement qui subsistent, un moyen de preuve plus actuel et plus précis que l’IBA 98. Le grief d’un classement insuffisant ne subsiste donc plus que dans la mesure où des ZPS doivent être désignées ou étendues suivant cette étude.

107. Il y a donc lieu, sous cette réserve, de faire droit au recours également à l’égard des Canaries.

4. Sur Castilla‑La‑Mancha

108. Dans le cas de la Communauté autonome de Castilla‑La‑Mancha également, la Commission compare les ZPS désignées aux indications fournies par l’IBA 98. Dix IBA sur 39, d’une superficie de 261 000 hectares, ne seraient pas du tout couvertes, les autres ne le seraient au total qu’à concurrence de 32,3 %. En particulier, le faucon crécerellette et l’outarde canepetière ne seraient pas encore suffisamment couverts.

109. Comme nous l’avons déjà constaté, le grief relatif à la délimitation de ZPS à l’intérieur d’IBA est irrecevable (66) . En revanche, en ce qui concerne les dix IBA qui ne sont pas du tout couvertes par des ZPS, le Royaume d’Espagne a reconnu entre‑temps dans trois cas qu’une désignation était nécessaire et semble l’avoir réalisée depuis lors (67) . La question de savoir si, dans chaque cas, la différence de la délimitation par rapport à l’IBA 98 repose sur des critères ornithologiques ne peut être appréciée, faute de précisions apportées par le Royaume d’Espagne. En revanche, sept IBA restent encore litigieuses.

110. En ce qui concerne cinq de ces IBA, le Royaume d’Espagne refuse de désigner des ZPS, au motif que le territoire de Castilla‑La‑Mancha n’en comporte que de petites parties. Ces parties n’auraient pas de signification ornithologique autonome et n’auraient donc pas besoin d’être classées.

111. Cet argument ne saurait cependant prospérer. Le fait qu’un site le mieux approprié pour la conservation de certaines espèces s’étend sur le territoire de différentes régions ne justifie pas d’en exclure certaines portions. Si ces portions font partie intégrante de l’ensemble du site, elles doivent être classées, car, autrement, des mesures incontrôlées pourraient intervenir sur les superficies en question et affecter, partant, l’ensemble du site. Au demeurant, la Commission expose, sans être contredite, que des espèces de l’annexe I nidifient dans au moins deux des portions de sites susmentionnées, à savoir l’aigle impérial, menacé à l’échelle mondiale, la cigogne noire, l’aigle de Bonelli, l’aigle royal (aquila chrysaetos), le vautour fauve (gyps fulvus), le vautour percnoptère et le faucon pèlerin (falco peregrinus).

112. En ce concerne l’IBA n° 185, «San Clemente‑Villarrobledo», le Royaume d’Espagne objecte que sa superficie de 103 000 hectares la rend trop étendue. Les populations visées de faucons crécerellettes, de gangas catas (pterocles alchata) et d’outardes canepetières seraient, en proportion, relativement réduites.

113. Cette argumentation ne saurait prospérer, ne serait‑ce que parce que ce site a été intégré dans l’IBA 98 non seulement parce qu’il s’agit de l’un des cinq meilleurs sites, mais également parce qu’il héberge des populations significatives d’espèces menacées à l’échelle mondiale et en Europe. En conséquence, ces objections pourraient le cas échéant justifier une autre délimitation, mais non l’abandon total du classement.

114. Aussi bien le Royaume d’Espagne a-t-il procédé, au cours de la procédure contentieuse, à la désignation d’une ZPS du même nom, englobant au moins 10 677,81 hectares; il a ainsi reconnu en principe que ce site devait lui aussi être classé. Il n’est pas possible d’apprécier si la délimitation effectuée est correcte du point de vue ornithologique, étant donné que le Royaume d’Espagne n’a pas fourni de motifs à l’appui de cette délimitation.

115. Enfin, le Royaume d’Espagne refuse de classer l’IBA n° 199, «Torrijos», d’une superficie de 28 600 hectares, au motif que la population de 150 à 200 outardes barbues est négligeable par rapport à la population totale de la Communauté autonome, de l’ordre de 3 000 individus. Il convient toutefois de souligner, à cet égard, la signification européenne de cette présence d’une espèce menacée à l’échelle mondiale. Elle est de plusieurs fois supérieure au seuil d’une population significative, soit 50 individus, qui a déjà été relevé pour l’Espagne. En outre, on observe dans l’IBA 98 également une présence significative d’outardes canepetières, elles aussi menacées à l’échelle mondiale; cette présence est de 1 200 individus, pour une valeur seuil de 200 individus. Le classement de ce site paraît dès lors s’imposer.

116. Pour ce qui est du grief de la Commission portant sur les déficits, au regard de l’IBA 98, dans la protection du faucon crécerellette et de l’outarde canepetière, les éléments qui précèdent permettent à eux seuls de conclure à la nécessité de désigner des ZPS supplémentaires pour ces deux espèces.

117. En ce qui concerne, notamment, la menace pesant sur l’outarde canepetière, le Royaume d’Espagne ne saurait davantage se prévaloir avec succès de difficultés résultant de la grande mobilité de cette espèce, du caractère ténu de ses liens avec différents sites, de la variation de ses besoins en habitats selon les époques de l’année et de l’absence d’évaluation précise de la population. Le Royaume d’Espagne doit faire face à ces difficultés au moyen de recherches supplémentaires et de la désignation de sites suffisamment grands, avec une souplesse de gestion adéquate, faute de quoi il y aurait lieu de craindre la disparition de cette espèce.

118. On ne peut pas non plus admettre le point de vue selon lequel les colonies de faucons crécerellettes situées à l’intérieur de zones d’urbanisation ne peuvent être classées en ZPS. Si les faucons crécerellettes sont tributaires de ces habitats, leur protection par un classement y est précisément nécessaire. C’est la seule façon de garantir que, par exemple, des mesures d’aménagement urbain ne chassent pas cette espèce. Les intérêts liés au développement urbain ne permettent pas, eux non plus, de renoncer à un classement, puisque, comme on le sait, il n’est pas possible d’opposer à une désignation des motifs d’ordre économique et social. Si ces considérations devaient prévaloir sur l’intérêt de la protection du faucon crécerellette, elles devraient être mises en œuvre dans le cadre de l’article 6, paragraphe 4, de la directive habitats, c’est-à-dire en l’absence de solutions alternatives et moyennant l’adoption des mesures compensatoires qui s’imposent.

119. En conséquence, il y a lieu de rejeter dans leur ensemble les objections soulevées par le Royaume d’Espagne à l’encontre des IBA n’ayant pas fait du tout l’objet d’un classement en ZPS en Castilla‑La‑Mancha. Il convient donc de faire droit au recours de la Commission dans cette mesure.

5. Sur la Catalogne

120. À l’égard de la Catalogne également, la Commission compare l’IBA 98 aux désignations effectivement intervenues et parvient à la conclusion que 10 IBA sur 21 ne sont pas du tout visées, que les autres ne le sont que partiellement et que, dès lors, sur 62 espèces reproductrices d’oiseaux de l’annexe I en Catalogne, certaines ne sont qu’insuffisamment protégées dans le cadre de ZPS: la pie-grièche à poitrine rose (lanius minor), le grand tétras (tetrao urogallus), le cormoran huppé (phalacrocorax aristotelis), l’outarde canepetière, l’alouette calandre (melanocorypha calandra), le sirli de Dupont (chersophilus duponti), le rollier d’Europe (coracias garrulus), l’alouette calandrelle (calandrella brachydactyla) et la glaréole à collier (glareola pratincola).

121. Comme nous l’avons précédemment constaté, le grief relatif à la délimitation de ZPS à l’intérieur d’IBA est irrecevable (68) . En ce qui concerne les 10 IBA restantes, qui ne sont pas du tout couvertes par des ZPS, l’IBA 98 ne mentionne ni la pie-grièche à poitrine rose, ni le grand tétras, ni le sirli de Dupont ni la glaréole à collier. S’agissant de ces espèces, l’insuffisance des classements effectués n’est donc pas établie.

122. Le Royaume d’Espagne conteste en outre la recevabilité du recours en ce qui concerne les espèces d’oiseaux indiquées, au motif que l’on ne sait pas exactement quelles sont les espèces qui auraient dû faire l’objet de désignations supplémentaires de ZPS. Selon lui, la Commission indique 62 espèces de l’annexe I, tandis que le droit catalan prévoit la protection de 73 espèces. Pendant la procédure précontentieuse, la Commission ne se serait d’ailleurs pas toujours référée aux mêmes espèces.

123. Cette objection doit cependant être écartée. Tout d’abord, le Royaume d’Espagne méconnaît la nature de la référence à des espèces d’oiseaux: la Commission mentionne certes le nombre de 62 espèces de l’annexe I pour la Catalogne, mais elle ne justifie de déficits de classement qu’à l’égard des espèces expressément mentionnées ci‑dessus. Du moins implicitement, ce sont ces espèces qui ont fait l’objet de la procédure précontentieuse, puisque la Commission s’est toujours fondée sur l’IBA 98 et que les espèces susmentionnées résultent des différences entre l’IBA 98 et les ZPS en Catalogne.

124. Le Royaume d’Espagne soutient par ailleurs qu’une partie des IBA a déjà été proposée comme site d’importance communautaire dans le cadre de la directive habitats. Toutefois, de telles propositions ne peuvent juridiquement suppléer à des défaillances dans la désignation de ZPS, puisque cette désignation repose sur l’article 4 de la directive oiseaux, alors que la proposition de site est fondée sur l’article 4 de la directive habitats; il s’agit de régimes différents ayant des effets juridiques différents.

125. Dans son mémoire en duplique, le Royaume d’Espagne invoque le fait que la plupart des habitats qui ne sont pas encore classés en ZPS sont protégés en vertu du droit régional dans le cadre du plan des sites d’intérêt pour la nature ou en tant que sites naturels particulièrement protégés. Indépendamment de la question de savoir si une telle protection satisfait aux exigences qui s’imposent à la protection par les ZPS, elle ne justifie pas l’abandon d’un classement en ZPS. L’article 4, paragraphes 1 et 2, de la directive oiseaux exige le classement afin que ces sites soient incorporés dans un réseau européen conformément au paragraphe 3. Au sein de ce réseau, la qualité de la protection est garantie par des normes européennes. C’est la raison pour laquelle la Cour a déjà jugé qu’il n’était pas possible de se soustraire à la désignation de ZPS par l’adoption d’autres mesures (69) . Des catégories de protection purement nationales ne constitueraient, elles aussi, que de telles autres mesures, non susceptibles de remplacer une désignation (70) .

126. Enfin, s’agissant de la Catalogne, le Royaume d’Espagne procède pour la première fois dans son mémoire en réplique à une approche scientifique de l’IBA 98. En effet, il compare les indications de l’IBA 98 concernant la présence d’espèces dans ses sites aux indications relatives à la population totale correspondante en Catalogne fournies par un atlas des oiseaux nicheurs qui repose sur des observations des années 1999 à 2002. Ces chiffres ne sont toutefois comparables que dans une mesure limitée, étant donné que les populations totales de ces espèces seront en général plus importantes dans l’ensemble de la Catalogne que les populations dans les IBA.

127. Ainsi, les chiffres récents nous montrent que les indications de l’IBA 98 ne sont supérieures aux observations ultérieures que pour quatre espèces pertinentes pour des IBA encore litigieuses, à savoir pour le pétrel tempête (hydrobates pelagicus) (0 à 10 couples pour 5 à 15), le grand butor (botaurus stellaris) (1 à 5 couples pour 8 à 11), le busard cendré (5 à 10 couples pour 15 à 20), le ganga unibande (pterocles orientalis) (5 à 10 couples pour 10). On ne peut en conclure que les données ayant servi de base à l’IBA 98 étaient défectueuses, mais tout au plus que ces espèces, déjà très rares en Catalogne, sont proches de la disparition et nécessitent par conséquent une protection particulière.

128. Pour le reste, les populations totales des espèces présentes dans les 10 IBA encore litigieuses sont supérieures à celles indiquées dans l’IBA 98. Pour certaines espèces, seule une fraction de la population totale est comprise dans des IBA, par exemple pour le martin pêcheur d’Europe (alcedo atthis), présent dans des IBA avec 20 à 30 couples, mais dont la population totale est de 1 009 à 1 420 couples, ou pour le cochevis de Thékla (galerida Theklae), dont 100 à 200 couples se trouvent à l’intérieur d’IBA pour une population de 7 300 à 18 400 couples. Cette comparaison ne prouve donc pas qu’il n’existe pas de besoin supplémentaire de classement, mais indique au contraire que des sites doivent être désignés au‑delà de l’IBA 98.

129. Le Royaume d’Espagne produit en outre un tableau présentant les espèces comprises dans les ZPS. Il souligne que, en Catalogne, les ZPS comprennent, pour certaines, des parties plus importantes de la population que l’IBA 98. Il déclare cependant aussi que, pour 16 espèces, il se situe en deçà du nombre compris dans l’IBA 98. Ces espèces sont en outre présentes dans 9 IBA sur les 10 encore litigieuses. La dernière IBA (n° 138, «Islas Medas») permettrait par ailleurs la protection d’au moins deux espèces très rares, qui ne sont jusqu’à maintenant pas du tout présentes dans les ZPS de Catalogne, à savoir le pétrel tempête et le cormoran huppé. Cet argument n’est donc pas non plus de nature à réfuter la thèse de la Commission.

130. Le Royaume d’Espagne n’a donc pas été en mesure de faire échec aux griefs de la Commission concernant les IBA qui ne sont pas encore du tout classées en ZPS en Catalogne. Il y a dès lors lieu de faire droit au recours de la Commission dans cette mesure.

6. Sur la Galice

131. En ce qui concerne la Galice, la Commission constate que trois IBA sur onze ne sont pas classées en ZPS et que certaines des autres ne le sont que partiellement. Au total, seuls 10 % des superficies comprises dans des IBA sont des ZPS. Le grand butor, le busard cendré, l’aigle de Bonelli, le grand tétras, l’outarde canepetière, la bondrée apivore (pernis apivorus) et la sous‑espèce ibérique de la perdrix grise (perdix perdix hispaniensis) ne seraient ainsi qu’insuffisamment protégés.

132. Comme nous l’avons déjà constaté, le grief relatif à la délimitation de ZPS à l’intérieur d’IBA est irrecevable (71) . Pour les trois IBA restantes, qui ne sont pas du tout couvertes par des ZPS, l’IBA 98 ne mentionne ni le grand butor ni l’aigle de Bonelli ou la bondrée apivore. En ce qui concerne ces espèces, nous ne disposons donc pas de la preuve de désignations insuffisantes.

133. L’une des trois IBA restantes a été entre‑temps classée à concurrence de 86 % en ZPS, les deux autres doivent être partiellement classées en ZPS sur la base d’études intervenues dans l’intervalle. En conséquence, le Royaume d’Espagne a admis en principe le reste du grief de la Commission et n’a pas contesté, en tout cas preuves à l’appui, les limites des IBA. Le recours doit donc être accueilli en ce qui concerne les IBA qui ne sont pas encore du tout classées en ZPS en Galice.

7. Sur la Communauté de Valence

134. En ce qui concerne la Communauté de Valence, la Commission mentionne 5 IBA sur 21 qui ne sont pas du tout couvertes par des ZPS; certaines des autres ne seraient en partie pas classées. Ainsi, le grand butor, le grabier chevelu (ardeola ralloides), la sarcelle marbrée, l’érismature à tête blanche (oxyura leucocephala), le goéland d’Andouin, le busard cendré et l’aigle de Bonelli ne seraient pas suffisamment protégés dans des ZPS.

135. Comme nous l’avons déjà constaté, le grief relatif à la désignation de ZPS à l’intérieur d’IBA est irrecevable (72) . Pour les 5 IBA restantes, qui ne sont pas du tout couvertes par des ZPS, l’IBA 98 ne mentionne que l’aigle de Bonelli. En ce qui concerne les autres espèces, on ne trouve donc pas de preuve de désignations insuffisantes.

136. En ce qui concerne la Communauté de Valence, le Royaume d’Espagne ne conteste pas le recours, mais annonce de nouvelles désignations. Il convient donc de faire droit au recours à l’égard des IBA qui ne sont pas encore du tout classées en ZPS dans la Communauté de Valence.

E – Conclusion

137. Dans les Communautés autonomes d’Andalousie, des Baléares, des Canaries, de Castilla‑La‑Mancha, de Catalogne, de Galice et de Valence, le Royaume d’Espagne n’a pas classé suffisamment de sites en ZPS des oiseaux; dans les Communautés autonomes d’Andalousie, des Baléares et des Canaries, il a classé certains sites en ZPS pour une superficie trop faible.

V – Sur les dépens

138. En vertu de l’article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Dans la présente affaire, la Commission s’est désistée de son recours en ce qui concerne une Communauté autonome après que le Royaume d’Espagne s’est conformé à ses exigences. Dans cette mesure, tout comme en ce qui concerne les trois Communautés autonomes à l’égard desquelles la Commission obtient totalement gain de cause, il y a lieu de condamner le Royaume d’Espagne aux dépens.

139. En revanche, pour quatre autres Communautés autonomes, une partie importante du recours doit être rejetée. Dès lors, les dépens doivent être partagés à cet égard.

140. En conséquence, le Royaume d’Espagne devrait supporter trois quarts de ses propres dépens ainsi que des dépens de la Commission et la Commission un quart des dépens du Royaume d’Espagne ainsi qu’un quart de ses propres dépens.

VI – Conclusion

141. Nous proposons en conséquence à la Cour de statuer comme suit:

1) constater que:

– en n’ayant pas classé comme zones de protection spéciale pour les oiseaux des territoires suffisants dans les Communautés autonomes d’Andalousie, des Baléares, des Canaries, de Castilla‑La Mancha, de Catalogne, de Galice et de Valence,

– et en ayant classé comme zones de protection spéciale pour les oiseaux certains sites pour une superficie trop faible dans les Communautés autonomes d’Andalousie, des Baléares et des Canaries,

pour offrir une protection à toutes les espèces d’oiseaux visées à l’annexe I de la directive 79/409/CEE du Conseil, du 2 avril 1979, concernant la conservation des oiseaux sauvages, ainsi qu’aux espèces migratrices non visées dans ladite annexe, le Royaume d’Espagne a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 4, paragraphes 1 et 2, de cette directive;

2) rejeter le recours pour le surplus;

3) dire que le Royaume d’Espagne supportera trois quarts de ses propres dépens et trois quarts des dépens de la Commission des Communautés européennes et que la Commission supportera un quart de ses propres dépens et un quart des dépens du Royaume d’Espagne.

(1) .

(2)  – JO L 103, p. 1

(3)  – Arrêt du 19 mai 1998, Commission/Pays-Bas (C-3/96, Rec. p. I-3031).

(4)  – Arrêt du 26 novembre 2002, Commission/France (C-202/01, Rec. p. I-11019).

(5)  – Arrêt du 6 mars 2003, Commission/Finlande (C-240/00, Rec. p. I-2187).

(6)  – Arrêt du 20 mars 2003, Commission/Italie (C-378/01, Rec. p. I-2857).

(7)  – Voir nos conclusions de ce jour dans l’affaire Commission/Grèce (C-334/04, pendante devant la Cour).

(8)  – Voir nos conclusions de ce jour dans l’affaire Commission/Irlande (C-418/04, pendante devant la Cour).

(9)  – Communiqué de presse IP/05/45 de la Commission du 14 janvier 2005.

(10)  – Carlota Viada (éd.), Áreas importantes para las aves en España, Madrid, 1998.

(11)  – JO L 206, p. 7.

(12)  – Indications tirées du baromètre Natura de la Commission, version juin 2006, ec.europa.eu/environnement/nature/nature_conservation/useful_info/barometer/barometer.htm.

(13)  – De la même façon, la Cour a, par exemple, circonscrit à Gibraltar le recours dirigé par la Commission à l’encontre du Royaume-Uni dans son ensemble (voir arrêt du 20 octobre 2005, C‑6/04, Rec. p. I‑9017, point 79 et quatrième tiret du point 4 du dispositif).

(14)  – Arrêt Commission/Pays-Bas (précité à la note 3, points 55 et suiv.).

(15)  – Arrêts du 2 août 1993, Commission/Espagne (C‑355/90, Rec. p. I-4221, point 26, ci‑après l’«arrêt des marais de Santoña»); du 11 juillet 1996, Royal Society for the Protection of Birds (C-44/95, Rec. p. I-3805, point 26, ci‑après l’«arrêt du Lappel Bank»), et Commission/Pays-Bas (précité à la note 3, points 59 et suiv.).

(16)  – Arrêt des marais de Santoña (précité à la note 15, point 11).

(17)  – Arrêts du 4 juillet 2002, Commission/Grèce (C‑173/01, Rec. p. I‑6129, point 7); du 10 avril 2003, Commission/France (C‑114/02, Rec. p. I‑3783, point 9), et du 18 mai 2006, Commission/Espagne (C‑221/04, Rec. p. I‑4515, point 23, ci‑après l’«arrêt de la chasse au collet à arrêtoir»).

(18)  – Arrêts du 21 novembre 2002, Commission/France (précité à la note 4, points 19 et suiv.); Commission/Finlande (précité à la note 5, points 28 et suiv.), et Commission/Italie (précité à la note 6, point 26).

(19)  – Arrêt du 28 février 1991, Commission/Allemagne (C‑57/89, Rec. p. I‑883, point 20, ci‑après l’«arrêt de la Leybucht»).

(20)  – Arrêt du 26 novembre 2002, Commission/France (précité à la note 4, point 20).

(21)  – Arrêt Commission/Finlande (précité à la note 5, point 31).

(22)  – Arrêt Commission/Italie (précité à la note 6, point 17).

(23)  – Idem, point 18.

(24)  – Les procédures contre la République française et contre la République italienne se trouvent depuis plus d’un an au stade de l’avis motivé au titre de l’article 228 CE (communiqués de presse IP/05/09 de la Commission du 12 janvier 2005 en ce qui concerne la République française et IP/05/56 du 18 janvier 2005 en ce qui concerne la République italienne). La Commission est en train d’examiner, il est vrai, si la République française a entre‑temps rempli ses obligations par de nouvelles désignations (communiqué de presse IP/06/907 de la Commission du 3 juillet 2006).

(25)  – Voir conclusions de l’avocat général Alber du 27 juin 2002 ayant donné lieu à l’arrêt du 26 novembre 2002, Commission/France (précité à la note 4, point 25).

(26)  – Convention du 2 février 1971, Recueil des traités des Nations unies n° 14583.

(27)  – Voir arrêts du 17 janvier 1991, Commission/Italie (C‑157/89, Rec. p. I‑57, point 15), concernant les périodes de chasse, et du 8 juin 2006, WWF Italia e.a. (C‑60/05, Rec. p. I‑5083, point 27).

(28)  – Arrêt des marais de Santoña (précité à la note 15, point 11).

(29) – Arrêt du 23 mars 2006, Commission/Autriche (C-209/04, Rec. p. I-2755, point 44, ci‑après l’«arrêt du Lauteracher Ried»).

(30)  – Point 38 du mémoire en réplique.

(31)  – Point 183 du recours; voir, à ce sujet, points 94 et suiv. ci-après.

(32)  – Arrêts Commission/Pays-Bas (précité à la note 3, points 68 à 70) et du 20 mars 2003, Commission/Italie (précité à la note 6, point 18).

(33)  – Voir arrêts Commission/Pays-Bas (précité à la note 3, point 66) et du 20 mars 2003, Commission/Italie (précité à la note 6, point 18), se rapportant l’un et l’autre à l’IBA 89, ainsi que conclusions de l’avocat général Léger dans l’affaire Commission/Finlande (précitée à la note 5), point 42.

(34)  – Seules la Communauté autonome de Catalogne et les Canaries font l’objet d’un début d’argumentation scientifiquement étayée; voir, à ce sujet, points 106 et 126 et suiv. ci-après.

(35)  – Précité à la note 3.

(36)  – Heath, M. F., et Evans, M. I., Important Bird Areas in Europe. Priority sites for conservation. Volume 2: Southern Europe , BirdLife Conservation Series, n° 8, volume II, Cambridge, 2000, p. 515 et suiv.

(37)  – Voir liste, p. 14 de l’IBA 98.

(38)  – Arrêt du 9 décembre 2004, Commission/Espagne (C‑79/03, Rec. p. I‑11619, point 19).

(39)  – Voir ci-après, points 70 et suiv.

(40)  – L’IBA 2000, précité à la note 36.

(41)  – Selon le baromètre Natura de la Commission, version juin 2006 (précité à la note 12), 23 % du territoire slovène et 25,2 % du territoire slovaque.

(42)  – Certes, le régime financier de l’article 8 de la directive habitats ne vise pas de ZPS au sens de la directive oiseaux; toutefois, le sixième programme pour l’environnement qualifie d’action prioritaire le fait de «mettre en place le réseau Natura 2000 et [de] mettre en œuvre les instruments nécessaires sur les plans technique et financier ainsi que les mesures indispensables à sa pleine mise en œuvre et à la protection, en dehors des zones relevant du réseau Natura 2000, des espèces protégées en vertu des directives ‘habitats’ et ‘oiseaux’» [article 6, paragraphe 2, sous a), septième tiret, de la décision n° 1600/2002/CE du Parlement européen et du Conseil, du 22 juillet 2002, établissant le sixième programme d’action communautaire pour l’environnement (JO L 242, p. 1)].

(43)  – IBA 98, p. 363 et suiv.

(44)  – IBA 98, p. 39.

(45)  – IBA 98, p. 43, figure 5.

(46)  – IBA 98, p. 364 et suiv.

(47)  – L’IBA 2000 décrit dans son volume 2, p. 776 et suiv., les critères à la base de l’IBA 89 et les met en regard des critères utilisés pour les nouveaux inventaires, voir également l’IBA 98, p. 368.

(48)  – Ce critère correspond au critère n° 5 de l’IBA 89.

(49)  – Ce critère correspond au critère n° 1 de l’IBA 89.

(50)  – Ce critère n’a pas de pendant dans l’IBA 89.

(51)  – Les critères C.4 et C.5 développent le critère n° 9 de l’IBA 89. Celui‑ci englobait les zones de relais de plus de 20 000 oiseaux de mer ou de plus de 5 000 rapaces.

(52)  – Le critère C.6 n’était pas mentionné expressément dans la liste des critères de l’IBA 89, mais dans les explications dont il était assorti [voir annexe 7, p. 2, de la requête dans l’affaire Commission/Pays‑Bas et annexe 16 de la requête dans l’affaire Commission/Italie (arrêt du 20 mars 2003)]. Ce critère a dès lors été développé et appliqué dans le cadre du projet de biotope CORINE.

(53)  – IBA 2000, p. 13.

(54)  – Arrêts Commission/Pays‑Bas (précité à la note 3, point 69) et du 20 mars 2003, Commission/Italie (précité à la note 6, point 18).

(55)  – Voir références citées à la note 33.

(56)  – IBA 2000, p. 13.

(57)  – IBA 2000, volume 2, p. 18. Il ressort ainsi de la p. 778 que, pour le Royaume de Belgique, la République hellénique et l’Irlande, il a été sélectionné un niveau supérieur à celui de l’IBA 89, ce qui a eu pour effet de réduire le nombre de régions.

(58)  – Le gouvernement espagnol se trompe sur ce point: selon l’IBA 2000, volume 2, p. 778, on a utilisé également pour la République française le deuxième niveau de la NUTS, qui comporte 22 régions.

(59)  – Voir références citées à la note 15.

(60)  – C’est ainsi que l’on utilise, en Allemagne, pour l’identification des propositions de sites dans le cadre de la directive habitats, des «entités principales de territoire naturel» en tant que subdivision des parties allemandes des régions biogéographiques.

(61)  – Arrêts du Lappel Bank (précité à la note 15, point 26) et du 13 juillet 2006, Commission/Portugal (C‑191/05, Rec. p. I‑6853, point 10, ci‑après l’«arrêt Moura, Mourão, Barrancos»).

(62)  – Point 183 de la requête.

(63)  – Point 33 du mémoire en réplique.

(64)  – Arrêt du 9 janvier 2003, Italie/Commission (C‑178/00, Rec. p. I‑303, point 6); voir, également, nos conclusions du 15 décembre 2005 dans l’affaire de la chasse au collet à arrêtoir (arrêt précité à la note 17), point 25.

(65) _ Annexe 11 du mémoire en défense.

(66)  – Voir ci‑dessus, points 94 et suiv.

(67)  – Il s’agit de l’IBA n° 78, «Puebla de Beleña», de l’IBA n° 183, «Hoces del río Mundo y del río Segura» et de l’IBA n° 189, «Parameras de Embid‑Molina».

(68)  – Voir ci‑dessus, points 94 et suiv.

(69)  – Voir ci‑dessus, point 21.

(70)  – Voir arrêt du Lauteracher Ried (précité à la note 29, point 48).

(71)  – Voir ci‑dessus, points 94 et suiv.

(72)  – Voir ci‑dessus, points 94 et suiv.