Affaire T-322/03

Telefon & Buch Verlagsgesellschaft mbH

contre

Office de l'harmonisation dans le marché intérieur

(marques, dessins et modèles) (OHMI)

« Marque communautaire — Recevabilité du recours — Cas fortuit — Demande en nullité — Article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement (CE) nº 40/94 — Marque verbale WEISSE SEITEN — Motifs absolus de refus — Article 7, paragraphe 1, sous b) à d), du règlement nº 40/94 »

Arrêt du Tribunal (troisième chambre) du 16 mars 2006 

Sommaire de l'arrêt

1.     Marque communautaire — Renonciation, déchéance et nullité — Causes de nullité absolue

(Règlement du Conseil nº 40/94, art. 7, § 1, d), et 51, § 1, a))

2.     Marque communautaire — Renonciation, déchéance et nullité — Causes de nullité absolue

(Règlement du Conseil nº 40/94, art. 7, § 1, c), et 51, § 1, a))

1.     Le syntagme WEISSE SEITEN n'aurait pas dû être enregistré, en tant que marque communautaire pour « supports d'enregistrement magnétiques et mémoires informatiques avec des enregistrements pour installations et appareils de traitement électronique des données, en particulier bandes magnétiques, disques et CD-ROM » et « produits de l'imprimerie, bottins, ouvrages de référence » relevant respectivement des classes 9 et 16 au sens de l'arrangement de Nice, en raison de l'existence du motif absolu de refus visé à l'article 7, paragraphe 1, sous d), du règlement nº 40/94 sur la marque communautaire tenant au caractère usuel de la marque, dans la mesure où il est démontré que, pour le consommateur moyen germanophone, le syntagme « weiße Seiten » était devenu usuel, à la date du dépôt de la demande d'enregistrement de la marque, en tant que dénomination générique pour l'annuaire téléphonique des particuliers non seulement en version papier, mais également sous forme électronique.

(cf. points 66, 71-72)

2.     Le syntagme WEISSE SEITEN n'aurait pas dû être enregistré, pour « supports d'enregistrement magnétiques et mémoires informatiques avec des enregistrements pour installations et appareils de traitement électronique des données, en particulier bandes magnétiques, disques et CD-ROM »; « papier, carton et produits en ces matières, non compris dans d'autres classes; produits de l'imprimerie, bottins, ouvrages de référence; matériel pour les artistes; articles de bureau (à l'exception des meubles); matériel d'instruction ou d'enseignement (à l'exception des appareils) »; « services d'une maison de publication, en particulier publication de textes, de livres, de revues et de journaux » et « services d'un rédacteur » relevant respectivement des classes 9, 16, 41 et 42 au sens de l'arrangement de Nice, en raison de l'existence du motif absolu de refus visé à l'article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement nº 40/94 sur la marque communautaire tenant au caractère descriptif de la marque, dans la mesure où, du point de vue du consommateur moyen germanophone, le lien entre la marque et les caractéristiques des produits et services en question est suffisamment étroit pour tomber sous l'interdiction visée par cette disposition.

(cf. point 108)




ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre)

16 mars 2006 (*)

« Marque communautaire – Recevabilité du recours – Cas fortuit – Demande en nullité – Article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement (CE) n° 40/94 – Marque verbale WEISSE SEITEN – Motifs absolus de refus – Article 7, paragraphe 1, sous b) à d), du règlement n° 40/94 »

Dans l’affaire T-322/03,

Telefon & Buch Verlagsgesellschaft mbH, établie à Salzbourg (Autriche), représentée par Mes H. Zeiner et M. Baldares del Barco, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. G. Schneider, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI, intervenant devant le Tribunal, étant

Herold Business Data GmbH & Co. KG, anciennement Herold Business Data AG, établie à Mödling (Autriche), représentée par Mes A. Lensing-Kramer, C. von Nussbaum et U. Reese, avocats,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l’OHMI du 19 juin 2003 (affaires jointes R 580/2001‑1 et R 592/2001‑1), relative à une procédure d’annulation entre Herold Business Data AG et Telefon & Buch Verlagsgesellschaft mbH,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (troisième chambre),

composé de M. M. Jaeger, président, Mme V. Tiili et M. O. Czúcz, juges,

greffier : M. J. Plingers, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 19 septembre 2003,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 15 septembre 2004,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 15 septembre 2004,

à la suite de l’audience du 14 septembre 2005,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1       Le 2 octobre 1996, la requérante a présenté une demande de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI) en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié.

2       La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal WEISSE SEITEN. Les produits et services pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 9, 16, 41 et 42 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante :

–       classe 9 : « Appareils et instruments scientifiques, nautiques, géodésiques, électriques, photographiques, cinématographiques, optiques, de pesage, de mesurage, de signalisation, de contrôle (inspection), de secours (sauvetage) et d’enseignement ; appareils pour l’enregistrement, la transmission, la reproduction du son et des images ; supports d’enregistrement magnétiques et mémoires informatiques avec des enregistrements pour installations et appareils de traitement électronique des données, en particulier bandes magnétiques, disques et CD-ROM ; disques acoustiques ; distributeurs automatiques et mécanismes pour appareils à prépaiement ; caisses enregistreuses, machines à calculer, équipement pour le traitement de l’information et les ordinateurs ; extincteurs » ;

–       classe 16 : « Papier, carton et produits en ces matières, non compris dans d’autres classes ; produits de l’imprimerie, bottins, ouvrages de référence ; articles pour reliures ; photographies ; papeterie ; adhésifs (matières collantes) pour la papeterie ou le ménage ; matériel pour les artistes ; pinceaux ; machines à écrire et articles de bureau (à l’exception des meubles) ; matériel d’instruction ou d’enseignement (à l’exception des appareils) ; matières plastiques pour l’emballage (non comprises dans d’autres classes) ; cartes à jouer ; caractères d’imprimerie ; clichés » ;

–       classe 41 : « Services d’une maison de publication, en particulier publication de textes, de livres, de revues et de journaux » ;

–       classe 42 : « Services d’un rédacteur ».

3       La marque demandée a été enregistrée le 28 septembre 1999.

4       Le 14 février 2000, Herold Business Data GmbH & Co. KG, anciennement Herold Business Data AG, a demandé que soit déclarée la nullité de cet enregistrement en vertu de l’article 51, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 40/94, au motif que l’enregistrement se heurtait aux motifs absolus de refus prévus par l’article 7, paragraphe 1, sous b) à d) et g), dudit règlement. L’intervenante s’est référée à une décision de la division d’annulation du Patentamt (Office des brevets autrichien) du 6 novembre 1998, déclarant nulle la marque autrichienne WEISSE SEITEN, et à une décision de l’Oberste Patent- und Markensenat (Chambre suprême des marques et des brevets autrichienne) du 22 septembre 1999, confirmant la décision du Patentamt s’agissant des produits suivants : « papier et produits de l’imprimerie ». En outre, au soutien de sa demande en nullité, elle a produit devant la division d’annulation, notamment, les documents suivants :

–       la « communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil sur le développement futur du marché des annuaires et autres services d’information sur les télécommunications dans un environnement concurrentiel » du 22 septembre 1995 (ci-après la « communication de la Commission ») ;

–       diverses informations de la poste autrichienne concernant des annuaires téléphoniques ;

–       copie de bons de commande d’annuaires téléphoniques autrichiens concernant les années 1993/1994 et 1994/1995 ;

–       des directives pour l’édition des annuaires officiels, laquelle faisait l’objet d’un contrat datant de 1992 et conclu entre l’intervenante et l’administration autrichienne des postes et des télégraphes ;

–       copie de lettres échangées entre l’intervenante et différentes directions de l’administration autrichienne des postes et des télégraphes concernant l’édition des « Weiße Seiten » (pages blanches) ;

–       le résultat de recherches sur Internet.

5       Le 5 avril 2001, la division d’annulation a déclaré la nullité partielle de la marque WEISSE SEITEN sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous d), et paragraphe 2, du règlement n° 40/94 en ce qu’elle portait sur des annuaires téléphoniques reprenant les noms des abonnés sous forme imprimée ou sous forme de mémoires électroniques (classes 9 et 16) ainsi que la publication, par une maison de publication, de tels annuaires téléphoniques reprenant les noms des abonnés (classe 41). Elle a ainsi limité la liste des produits et des services en ajoutant, s’agissant de la classe 9, la mention « de ces produits sont exclus ceux qui concernent ou comportent des annuaires téléphoniques reprenant les noms des abonnés », s’agissant de la classe 16, la mention « de ces produits sont exclus les annuaires téléphoniques reprenant les noms des abonnés » et, s’agissant de la classe 41, la mention « de ces services est exclue la publication d’annuaires téléphoniques reprenant les noms des abonnés ». La demande en nullité a été rejetée pour le surplus.

6       Tant l’intervenante, pour ce qui concerne le rejet partiel de la demande en nullité, que la requérante, pour ce qui concerne la déclaration de nullité partielle de sa marque, ont formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 57 à 62 du règlement n° 40/94, contre la décision de la division d’annulation.

7       Statuant sur les deux recours, joints en vertu de l’article 7, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 216/96 de la Commission, du 5 février 1996, portant règlement de procédure des chambres de recours de l’OHMI (JO L 28, p. 11), la première chambre de recours a, par décision du 19 juin 2003 (affaires jointes R 580/2001‑1 et R 592/2001‑1, ci-après la « décision attaquée »), partiellement admis le recours de l’intervenante et a rejeté celui de la requérante. Elle a annulé la décision de la division d’annulation et a déclaré la nullité de la marque WEISSE SEITEN pour les produits et les services suivants :

–       classe 9 : « Supports d’enregistrement magnétiques et mémoires informatiques avec des enregistrements pour installations et appareils de traitement électronique des données, en particulier bandes magnétiques, disques et CD-ROM » ;

–       classe 16 : « Papier, carton et produits en ces matières, non compris dans d’autres classes ; produits de l’imprimerie, bottins, ouvrages de référence ; matériel pour les artistes ; articles de bureau (à l’exception des meubles) ; matériel d’instruction ou d’enseignement (à l’exception des appareils) » ;

–       classe 41 : « Services d’une maison de publication, en particulier publication de textes, de livres, de revues et de journaux » ;

–       classe 42 : « Services d’un rédacteur ».

8       La chambre de recours a considéré, tout d’abord, que, s’agissant des produits relevant de la classe 9, mentionnés au point précédent, et des produits de l’imprimerie, bottins et ouvrages de référence, relevant de la classe 16, la marque WEISSE SEITEN avait été enregistrée en violation de l’article 7, paragraphe 1, sous d), du règlement n° 40/94. En outre, elle a considéré que, s’agissant de tous les produits et services mentionnés au point précédent (ci-après les « produits et services en question »), l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), dudit règlement trouvait également à s’appliquer.

 Conclusions des parties

9       La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–       réformer la décision attaquée de sorte que la demande en nullité soit intégralement rejetée ;

–       à titre subsidiaire, annuler la décision attaquée dans la mesure où la demande en nullité a été accueillie et ordonner à l’OHMI de prendre une nouvelle décision, le cas échéant après une procédure complémentaire, et de rejeter intégralement la demande en nullité ;

–       condamner l’OHMI aux dépens.

10     L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–       rejeter le recours ;

–       condamner la requérante aux dépens.

11     L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal rejeter le recours.

 Sur la recevabilité du recours

12     Aux termes de l’article 63, paragraphe 5, du règlement n° 40/94, le recours contre la décision d’une chambre de recours de l’OHMI doit être formé dans un délai de deux mois à compter de la notification de ladite décision. Conformément à l’article 102, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, les délais de procédure sont augmentés d’un délai de distance forfaitaire de dix jours.

13     En l’espèce, la décision attaquée a été notifiée à la requérante le 1er  juillet 2003. Le délai d’introduction du recours a donc expiré le 11 septembre 2003, délai de distance inclus.

14     La requête est, certes, parvenue par télécopie au greffe du Tribunal le 8 septembre 2003, soit avant l’expiration du délai de recours.

15     Toutefois, conformément à l’article 43, paragraphe 6, du règlement de procédure, la date à laquelle une copie de l’original signé d’un acte de procédure parvient au greffe du Tribunal par télécopieur n’est prise en considération, aux fins du respect des délais de procédure, que si l’original signé de l’acte est déposé à ce greffe au plus tard dix jours après la réception de la télécopie.

16     Or, en l’espèce, l’original de la requête n’est parvenu au greffe du Tribunal que le 19 septembre 2003, soit en dehors du délai de dix jours susvisé. Dès lors, conformément à l’article 43, paragraphe 6, du règlement de procédure, seule la date du dépôt de l’original signé, à savoir le 19 septembre 2003, doit être prise en considération aux fins du respect du délai de recours. Partant, il y a lieu de constater que la requête a été déposée après l’expiration de ce délai.

17     Cependant, la requérante fait valoir qu’elle se trouve en présence d’un cas typique de force majeure ou, à tout le moins, d’un cas fortuit.

18     Il y a lieu de relever que les notions de force majeure et de cas fortuit comportent, outre un élément objectif relatif aux circonstances anormales et étrangères à l’intéressé, un élément subjectif tenant à l’obligation, pour l’intéressé, de se prémunir contre les conséquences de l’événement anormal en prenant des mesures appropriées sans consentir des sacrifices excessifs. En particulier, l’intéressé doit surveiller soigneusement le déroulement de la procédure et, notamment, faire preuve de diligence afin de respecter les délais prévus (arrêt de la Cour du 15 décembre 1994, Bayer/Commission, C‑195/91 P, Rec. p. I‑5619, point 32). Ainsi, les notions de force majeure et de cas fortuit ne s’appliquent pas à une situation où une personne diligente et avisée aurait objectivement été en mesure d’éviter l’expiration d’un délai de recours (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 12 juillet 1984, Valsabbia/Commission, 209/83, Rec. p. 3089, point 22, et ordonnance de la Cour du 18 janvier 2005, Zuazaga Meabe/OHMI, C‑325/03 P, Rec. p. I‑403, point 25).

19     En l’espèce, la requérante a confié directement l’envoi de l’original de sa requête à la poste autrichienne le 9 septembre 2003, c’est-à-dire dès le lendemain de l’envoi de la télécopie. Par la suite, l’envoi a été remis par la poste autrichienne à la poste luxembourgeoise le 11 septembre 2003 et confié par cette dernière à l’entreprise Michel Greco le 12 septembre 2003. Or, celle-ci a mis sept jours pour déposer l’envoi au greffe du Tribunal.

20     Dès lors, la cause principale, voire exclusive, du retard peut être trouvée dans la circonstance que la requête n’est entrée en possession du Tribunal que sept jours après son arrivée à Luxembourg (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 2 mars 1967, Simet et Feram/Haute Autorité, 25/65 et 26/65, Rec. p. 39). Cette circonstance doit être considérée comme un cas fortuit à l’égard de la requérante, et il ne peut pas être reproché à celle-ci, qui a fait preuve de la diligence attendue d’un requérant normalement avisé en vue de respecter les délais, d’avoir contribué au retard par son propre comportement.

21     Par conséquent, le recours est recevable.

 Sur la recevabilité du deuxième chef de conclusions

22     Dans la deuxième partie de son deuxième chef de conclusions, la requérante demande au Tribunal, en substance, d’ordonner à l’OHMI de prendre une nouvelle décision et de rejeter intégralement la demande en nullité.

23     À cet égard, il convient de rappeler que, conformément à l’article 63, paragraphe 6, du règlement nº 40/94, l’OHMI est tenu de prendre les mesures que comporte l’exécution de l’arrêt du juge communautaire. Dès lors, il n’appartient pas au Tribunal d’adresser d’injonction à l’OHMI. Il incombe, en effet, à ce dernier de tirer les conséquences du dispositif et des motifs des arrêts du juge communautaire [arrêts du Tribunal du 31 janvier 2001, Mitsubishi HiTec Paper Bielefeld/OHMI (Giroform), T‑331/99, Rec. p. II‑433, point 33 ; du 27 février 2002, Eurocool Logistik/OHMI (EUROCOOL), T‑34/00, Rec. p. II‑683, point 12, et du 3 juillet 2003, Alejandro/OHMI – Anheuser‑Busch (BUDMEN), T‑129/01, Rec. p. II‑2251, point 22].

24     La deuxième partie du deuxième chef de conclusions de la requérante est donc irrecevable.

 Sur le fond

25     La requérante invoque, en substance, quatre moyens à l’appui de son recours. Le premier moyen est tiré d’une discordance de la décision attaquée avec la décision autrichienne, et les deuxième, troisième et quatrième moyens sont tirés, respectivement, de violations de l’article 7, paragraphe 1, sous d), c) et b), du règlement n° 40/94.

 Sur le premier moyen, tiré d’une discordance de la décision attaquée avec la décision autrichienne

 Arguments des parties

26     La requérante fait valoir que la décision attaquée contient une incohérence, dans la mesure où elle est fondée sur une appréciation du public autrichien autre que celle à laquelle se sont livrées les autorités nationales autrichiennes dans la décision de l’Oberste Patent- und Markensenat du 22 septembre 1999.

27     L’OHMI rappelle qu’il n’est pas juridiquement tenu de veiller à la cohérence de ses décisions avec les décisions nationales. En outre, les faits à apprécier n’auraient pas été identiques, étant donné que les autorités nationales auraient fondé leur décision sur les habitudes linguistiques en Autriche, tandis que l’OHMI aurait dû prendre en considération les habitudes linguistiques dans l’ensemble du marché intérieur et, partant, également en Allemagne.

28     De plus, l’OHMI souligne que la décision de l’Oberste Patent- und Markensenat a confirmé la nullité de la marque autrichienne WEISSE SEITEN en ce qu’elle couvrait les produits « papier et produits de l’imprimerie » en raison de son caractère descriptif (au sens de « pages de couleur blanche ») et que, partant, il y avait une cohérence entre les décisions à cet égard.

29     L’intervenante rappelle qu’il n’existe aucune obligation pour l’OHMI de se rallier à l’appréciation d’une autorité nationale, de sorte que la décision du 22 septembre 1999 est sans pertinence pour la détermination de la perception de la marque en cause par le public autrichien.

 Appréciation du Tribunal

30     Il y a lieu de relever que l’OHMI n’est pas tenu de fonder sur une décision nationale son appréciation de la perception qu’a le public pertinent de la marque en cause. Le régime communautaire des marques est un système autonome, constitué d’un ensemble de règles et poursuivant des objectifs qui lui sont spécifiques, son application étant indépendante de tout système national [arrêt du Tribunal du 5 décembre 2000, Messe München/OHMI (electronica), T‑32/00, Rec. p. II‑3829, point 47]. Dès lors, le caractère enregistrable d’un signe en tant que marque communautaire ne doit être apprécié que sur le fondement de la réglementation communautaire pertinente. L’OHMI et, le cas échéant, le juge communautaire ne sont pas liés par une décision intervenue au niveau d’un État membre ou d’un pays tiers admettant le caractère enregistrable de ce même signe en tant que marque nationale. Tel est le cas même si une telle décision a été prise en application d’une législation nationale harmonisée en vertu de la première directive 89/104/CEE du Conseil, du 21 décembre 1988, rapprochant les législations des États membres sur les marques (JO 1989, L 40, p. 1), ou encore dans un pays appartenant à la zone linguistique dans laquelle le signe verbal en cause trouve son origine [arrêts du Tribunal du 27 février 2002, Streamserve/OHMI (STREAMSERVE), T‑106/00, Rec. p. II‑723, point 47, et du 22 juin 2005, Metso Paper Automation/OHMI (PAPERLAB), T‑19/04, non encore publié au Recueil, point 37].

31     Dès lors, l’existence d’une éventuelle discordance de la décision attaquée avec la décision autrichienne ne saurait constituer une violation de la réglementation communautaire pertinente. Le Tribunal examinera dans le cadre des autres moyens si l’OHMI a correctement analysé la perception du public pertinent en l’espèce.

32     Par conséquent, il convient de rejeter le premier moyen.

 Sur le deuxième moyen, tiré d’une violation de l’article 7, paragraphe 1, sous d), du règlement n° 40/94

 Arguments des parties

33     La requérante conteste l’appréciation de la chambre de recours selon laquelle le syntagme « weiße Seiten » est entré dans la langue allemande en tant que synonyme d’« alphabetisches Teilnehmerverzeichnis » (annuaire alphabétique des abonnés) au plus tard au moment de la publication de la communication de la Commission en 1995 et qu’il était déjà utilisé auparavant au sens d’annuaire téléphonique alphabétique en Autriche. Elle soutient que seule une dénomination objective compréhensible pour la majorité des milieux concernés et habituellement utilisée peut constituer un motif absolu de refus prévu par l’article 7, paragraphe 1, sous d), du règlement n° 40/94. Or, l’utilisation sporadique d’un signe en tant que dénomination générique par les milieux concernés ne suffirait pas à constituer une telle dénomination.

34     Selon la requérante, il est possible que, dans l’espace anglophone, les notions de « Yellow Pages » (pages jaunes) et de « White Pages » (pages blanches) soient usuelles pour désigner la partie professionnelle et la partie administrative d’un annuaire ou d’un bottin téléphonique. Dans le langage courant allemand, du fait de l’utilisation importante de la dénomination « gelbe Seiten » (pages jaunes), ce signe serait devenu une indication générale usuelle pour désigner un annuaire professionnel. Toutefois, le syntagme « weiße Seiten » ne serait jamais devenu usuel, dans l’espace germanophone, pour désigner, de manière générique, des parties administratives d’annuaires ou de bottins téléphoniques. De plus, dans la communication de la Commission, il s’agirait plutôt de la traduction de la dénomination anglaise « White Pages » que de la création d’une nouvelle dénomination objective dans la langue allemande.

35     La requérante fait valoir que le fait que quelqu’un d’autre, qui a omis de faire enregistrer en sa faveur un droit d’exclusivité, ait déjà utilisé une fois, ou peut-être même de façon sporadique, un tel syntagme original annonçant, de manière détournée, des produits ne saurait justifier qu’il soit fait obstacle à l’enregistrement de la dénomination objective, puisque l’élément de l’utilisation usuelle par le public et de l’usage dans le langage courant fait, selon elle, défaut. Ce ne serait que lorsqu’une telle dénomination est également reprise par d’autres concurrents et généralement utilisée qu’une habitude loyale pourrait se développer et que le signe pourrait devenir un élément du langage courant. Or, dans le dossier, on constaterait seulement que l’intervenante a déjà utilisé, dans certains cas exceptionnels, cette dénomination, tout en l’assortissant d’explications correspondantes pour en améliorer la compréhension. Le dossier ne contiendrait pas la moindre preuve de ce que cette dénomination originale pour une publication serait devenue un élément du langage courant allemand. Un tel développement d’un signe ne pourrait être assumé et déduit de manière hypothétique, mais devrait être démontré. L’OHMI lui-même aurait autorisé sans restriction, malgré les objections de l’examinateur, la marque WEISSE SEITEN, étant donné qu’il aurait estimé que la dénomination n’était pas devenue usuelle pour le public et qu’elle ne faisait pas non plus partie du vocabulaire général de la langue allemande. Dans ce cas, il appartiendrait au demandeur en nullité, c’est-à-dire à l’intervenante, d’apporter la preuve qu’au cours de la procédure de notification l’OHMI a méconnu un aspect essentiel tenant à l’existence d’un motif absolu de refus.

36     Même si l’on devait admettre que la Commission et l’administration autrichienne des postes et des télégraphes ont créé, par la publication et par l’utilisation sporadique du syntagme « weiße Seiten » assortie d’explications, une dénomination objective, la chambre de recours n’aurait pas indiqué les raisons pour lesquelles cette dénomination s’appliquait également à des produits et des services autres que les annuaires téléphoniques sous forme de livre. La décision attaquée ne contiendrait aucune motivation expliquant en quoi un fichier électronique ou un site Internet qui s’appellerait « WEISSE SEITEN » et qui ne serait ni blanc ni constitué de pages ne devrait pas s’appeler « WEISSE SEITEN » et en quoi il s’agirait d’une dénomination objective.

37     L’OHMI souligne, tout d’abord, que, à aucun moment, la chambre de recours ou la division d’annulation n’ont affirmé que l’utilisation unique du syntagme « weiße Seiten » par la Commission était suffisante pour refuser l’enregistrement. Cette utilisation aurait été considérée comme traduisant le moment où, dans l’évolution de la langue, ce syntagme aurait été présenté comme générique même au niveau européen, au moins dans les milieux spécialisés, comme cela a été constaté dans la décision de la division d’annulation, ou comme reflétant le moment où, au plus tard, il serait entré dans la langue allemande en tant que synonyme d’annuaire alphabétique des abonnés, comme cela a été constaté dans la décision attaquée.

38     La conclusion de la chambre de recours, selon laquelle le syntagme en question serait devenu une expression générique dès avant la date de la demande d’enregistrement, serait le résultat d’une analyse de documents volumineux provenant des espaces linguistiques autrichien et allemand et de la communication de la Commission. De plus, cette dernière reposerait sur des documents et des études qui utiliseraient déjà le syntagme « weiße Seiten » en tant que notion générique. En effet, les notes de bas de page ainsi que les indications des sources dans les tableaux renverraient à une étude réalisée en 1992 par Coopers & Lybrand, Deloitte, qui aurait déjà employé cette notion. Dès lors, la communication de la Commission ne saurait être qualifiée d’utilisation unique, mais de preuve appropriée pour établir que ce syntagme était devenu, au moins dans les milieux spécialisés, une indication générique pour désigner un annuaire alphabétique des abonnés.

39     En outre, cette notion ne serait pas seulement limitée dans son usage à l’Allemagne et à l’Autriche, car on l’utiliserait également, depuis longtemps, au Luxembourg.

40     Dès lors, selon l’OHMI, il n’y a aucun doute sur le fait que la notion de « weiße Seiten » était déjà une notion générique en allemand à la date de la demande d’enregistrement. Par « habitudes loyales et constantes du commerce », il faudrait entendre l’usage commercial, la coutume commerciale. Dès lors, l’emploi usuel dans un groupe plus restreint que le public général serait suffisant pour constituer un motif de refus. En tout état de cause, au plus tard à la date de la communication de la Commission, qui se serait adressée à un large public, le syntagme en cause serait également devenu usuel dans le langage courant.

41     L’OHMI fait observer que, s’agissant des mémoires électroniques, la requérante comprend mal la notion de « weiße Seiten », en l’assimilant à celle de « weißfarbige Seiten » (pages de couleur blanche) et en mettant en avant le fait qu’une mémoire électronique n’est pas blanche et n’a pas de pages. La chambre de recours aurait considéré à bon droit que, comme les annuaires téléphoniques sont également proposés sous forme électronique, un tel support d’information pouvait également être décrit avec plus de précision par la notion de « weiße Seiten ».

42     L’intervenante soutient que la chambre de recours a constaté à juste titre que le syntagme « weiße Seiten » était une indication devenue courante pour désigner des répertoires de numéros d’abonnés du téléphone classés alphabétiquement.

43     Les documents de l’administration autrichienne des postes et des télégraphes démontreraient que ce syntagme était déjà usuel en Autriche dans les années 1992/1993. Puisque seule la notion de « weiße Seiten », sans autre indication, aurait été utilisée dans les formulaires de commande, l’intervenante en conclut que le client autrichien des postes ne pouvait obtenir un annuaire que dans la mesure où il avait connaissance de la signification de cette notion. Dès lors, l’indication explicative « répertoire des abonnés » n’aurait pas été nécessaire pour la compréhension de la notion en cause par le client des postes. La seule mention du type de produit (« répertoire des abonnés ») à côté de la dénomination du produit (« weiße Seiten »), de même que l’utilisation en parallèle des termes « annuaire professionnel » et « gelbe Seiten », ne s’opposerait donc pas à la supposition selon laquelle il s’agissait d’une dénomination devenue usuelle du produit.

44     Selon l’intervenante, cette utilisation n’était pas isolée ou sporadique. Le point déterminant serait non pas le nombre de documents présentés, mais la signification et le contenu de ces documents. La fiche d’information aurait été envoyée à tous les foyers autrichiens, qui en auraient pris connaissance. De plus, l’utilisation de la dénomination en cause par tous les concurrents ou par un grand nombre d’entre eux ne serait nullement nécessaire pour établir que la dénomination du produit était devenue usuelle. Ce qui importerait serait de savoir si la dénomination était généralement considérée par le public comme étant usuelle. La raison principale de l’évolution d’une marque recouvrant une dénomination générique serait, en général, le fait que, pendant une période relativement longue, un seul fournisseur existe sur le marché pour un produit particulier et que le public, pour cette raison, utilise la marque et la dénomination du produit comme des synonymes. En raison de la position de monopole de l’État, aucun autre fournisseur d’annuaires officiels à côté des postes autrichiennes n’aurait existé, durant les années 1992 et 1993, dans le domaine des répertoires téléphoniques officiels.

45     En ce qui concerne la communication de la Commission, elle démontrerait que le syntagme en cause a été également utilisé dans d’autres pays comme dénomination usuelle pour désigner des répertoires d’abonnés. La Commission aurait utilisé dans sa présentation de l’état du marché des termes et des dénominations qu’elle aurait rencontrés dans le cadre de l’analyse préalable. La dénomination « weiße Seiten » ne serait donc pas une nouvelle création arbitraire de la Commission, mais une dénomination déjà courante sur le marché pour les répertoires téléphoniques.

46     En se référant aux recherches effectuées sur Internet à l’occasion du présent recours, l’intervenante déclare constater que la notion de « weiße Seiten » est utilisée, notamment, pour la Belgique (« pages blanches »), la France (« pages blanches »), l’Italie (« pagine bianche »), la Roumanie (« white pages »), San Marin (« pagine bianche »), la Suisse (« pagine bianche »), le Maroc (« pages blanches »), le Mexique (« paginas blancas ») ainsi que pour l’Australie et la Nouvelle-Zélande (« white pages »). L’intervenante souligne que l’utilisation de cette notion dans d’autres langues de l’Union européenne est pertinente, puisqu’une action fondée sur l’existence d’une marque enregistrée dans l’espace germanophone de l’Union européenne contre une dénomination utilisée dans une autre langue mais identique est possible.

47     Ensuite, l’intervenante soutient que, étant donné que le motif absolu de refus prévu par l’article 7, paragraphe 1, sous d), du règlement n° 40/94 était déjà présent au moment du dépôt de la marque en 1996 ainsi qu’au moment de son enregistrement en 1999, l’existence éventuelle d’une action d’opposition n’est pas déterminante.

48     Enfin, l’intervenante fait valoir que la dénomination « weiße Seiten » est une dénomination générale pour les répertoires d’abonnés, de sorte que celle-ci ne recouvre pas seulement les répertoires en version imprimée, mais toute forme de répertoire d’abonnés, indépendamment de la nature du support.

 Appréciation du Tribunal

49     Il y a lieu de rappeler que l’article 7, paragraphe 1, sous d), du règlement n° 40/94 doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose à l’enregistrement d’une marque que lorsque les signes ou les indications dont cette marque est exclusivement composée sont devenus usuels dans le langage courant ou dans les habitudes loyales et constantes du commerce pour désigner les produits ou les services pour lesquels ladite marque est présentée à l’enregistrement [voir, par analogie, arrêt de la Cour du 4 octobre 2001, Merz & Krell, C‑517/99, Rec. p. I‑6959, point 31, et arrêt du Tribunal du 5 mars 2003, Alcon/OHMI – Dr. Robert Winzer Pharma (BSS), T‑237/01, Rec. p. II‑411, point 37]. Ainsi, il convient de relever que le caractère usuel d’une marque ne peut être apprécié que, d’une part, par rapport aux produits ou aux services visés par la marque, même si la disposition en cause ne fait pas une référence explicite à ceux-ci et, d’autre part, par rapport à la perception qu’en a le public ciblé (arrêt BSS, précité, point 37).

50     S’agissant du public ciblé, il convient de constater que le caractère usuel d’un signe s’apprécie en tenant compte de l’attente présumée d’un consommateur moyen du type de produit en cause qui est censé être normalement informé et raisonnablement attentif et avisé (arrêt BSS, précité, point 38).

51     En outre, bien qu’il existe un chevauchement évident des champs d’application respectifs de l’article 7, paragraphe 1, sous c), et de l’article 7, paragraphe 1, sous d), du règlement n° 40/94, l’exclusion de l’enregistrement des marques visées par cette dernière disposition n’est pas fondée sur la nature descriptive de ces marques, mais sur l’usage en vigueur dans les milieux dont relève le commerce des produits et des services pour lesquels lesdites marques ont été présentées à l’enregistrement (voir, par analogie, arrêt Merz & Krell, précité, point 35, et arrêt BSS, précité, point 39).

52     Enfin, des signes ou des indications composant une marque qui sont devenus usuels dans le langage courant ou dans les habitudes loyales et constantes du commerce pour désigner les produits ou les services visés par cette marque ne sont pas propres à distinguer les produits ou les services d’une entreprise de ceux d’autres entreprises et ne remplissent donc pas la fonction essentielle de ladite marque (voir, par analogie, arrêt Merz & Krell, précité, point 37, et arrêt BSS, précité, point 40).

53     En l’espèce, la chambre de recours a considéré que l’enregistrement de la marque WEISSE SEITEN devait être annulé sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous d), du règlement n° 40/94 en ce qui concerne les « supports d’enregistrement magnétiques et mémoires informatiques avec des enregistrements pour installations et appareils de traitement électronique des données, en particulier bandes magnétiques, disques et CD-ROM », relevant de la classe 9, et les « produits de l’imprimerie, bottins, ouvrages de référence », relevant de la classe 16. Dès lors, le caractère usuel du syntagme « weiße Seiten » doit être analysé par rapport à ces produits.

54     Étant donné que ces produits sont destinés au consommateur en général, il s’agit d’analyser la perception du consommateur moyen. En outre, étant donné que la marque en question est composée de mots en langue allemande, ce consommateur moyen est germanophone.

55     Il y a lieu de relever que les éléments présentés par l’intervenante devant l’OHMI, énumérés au point 4 ci-dessus, concernant le caractère usuel du syntagme « weiße Seiten » pour le public ciblé, démontrent que ce syntagme est devenu la dénomination générique courante pour l’annuaire téléphonique des particuliers.

56     Il ressort de la communication de la Commission que celle-ci a utilisé plusieurs fois la notion de « weiße Seiten » en se référant à un « alphabetisches Teilnehmerverzeichnis ». Cette notion est utilisée parfois seule, parfois accompagnée de cette dernière description. Le syntagme « gelbe Seiten » est également utilisé dans cette communication, au sens d’annuaire téléphonique des professionnels. Cette communication étant datée du mois de septembre 1995, elle démontre que la notion de « weiße Seiten » était entrée dans la langue allemande au plus tard à cette époque. De plus, comme l’a constaté à juste titre l’OHMI, cette communication se réfère à une étude réalisée en 1992 par Coopers & Lybrand, Deloitte, qui faisait déjà état de cette notion.

57     L’argument de la requérante selon lequel il s’agirait plutôt de la traduction de la dénomination anglaise « White Pages » que de la création d’une nouvelle dénomination objective dans la langue allemande ne saurait être accepté. En effet, étant donné que les documents des institutions sont traduits par des traducteurs vers leur langue maternelle, ces personnes utilisent, dans la mesure du possible, des termes et des expressions idiomatiques ou consacrés par l’usage.

58     En tout état de cause, les divers documents d’information émanant de la poste autrichienne concernant les annuaires téléphoniques démontrent que le syntagme « weiße Seiten » était déjà utilisé en Autriche, au sens d’annuaire téléphonique des particuliers, au plus tard à partir de l’année 1992. Ces documents ont été créés par la poste autrichienne et certains d’entre eux ont été adressés à tous les abonnés, tandis que d’autres étaient destinés au grand public. Tous ces documents concernent la période antérieure à la date du dépôt de la marque WEISSE SEITEN. Il ressort de ces documents que l’utilisation du syntagme « weiße Seiten » n’a pas été sporadique, comme le fait valoir la requérante, mais que la poste autrichienne a considéré que le grand public en connaissait la signification, sans quoi elle ne l’aurait pas utilisé dans ses fiches d’information.

59     Quant aux bons de commande d’annuaires téléphoniques autrichiens, il y a lieu de relever qu’ils ont été établis par l’intervenante. Ils concernent les années 1993/1994 et 1994/1995 et contiennent aussi bien les syntagmes « weiße Seiten » que « gelbe Seiten », sans aucune explication complémentaire. Dès lors, ceux qui ont reçu ces bons de commande étaient censés connaître la signification du syntagme « weiße Seiten ».

60     Il ressort également des directives pour l’édition des annuaires officiels, laquelle faisait l’objet d’un contrat datant de 1992 conclu entre l’intervenante et l’administration autrichienne des postes et des télégraphes, et des lettres échangées entre l’intervenante et différentes directions de l’administration autrichienne des postes et des télégraphes concernant l’édition des « Weiße Seiten » que l’intervenante et l’administration utilisaient, dès 1992, le syntagme « weiße Seiten », sans autre explication quant à sa signification, dans leur correspondance.

61     En outre, il ressort de la recherche effectuée sur Internet le 8 août 2000 que tant les termes « weiße Seiten » que les termes « weisse Seiten » font référence aux annuaires téléphoniques, notamment sous forme électronique ou de CD‑ROM.

62     Même si ces derniers documents ont été recueillis quatre ans après le dépôt de la marque WEISSE SEITEN, ils confirment l’évolution linguistique intervenue et les conclusions résultant des documents concernant la période antérieure à ce dépôt.

63     Au surplus, il ressort, effectivement, de la décision de l’Oberste Patent- und Markensenat que la marque autrichienne WEISSE SEITEN a été déclarée nulle s’agissant des produits suivants : « papier et produits de l’imprimerie ».

64     Par ailleurs, l’intervenante se réfère aux recherches effectuées sur Internet à l’occasion du présent recours, jointes à sa réponse, pour démontrer que la notion de « weiße Seiten » est présente dans plusieurs pays. De même, l’OHMI se réfère à une recherche effectuée sur Internet, jointe à sa réponse.

65     Il y a lieu de constater que ces pièces, produites pour la première fois devant le Tribunal, ne peuvent être prises en considération. En effet, le recours devant le Tribunal vise au contrôle de la légalité des décisions des chambres de recours de l’OHMI au sens de l’article 63 du règlement n° 40/94, de sorte que la fonction du Tribunal n’est pas de réexaminer les circonstances de fait à la lumière des documents présentés pour la première fois devant lui. Il convient donc d’écarter les documents susvisés sans qu’il soit nécessaire d’examiner leur force probatoire [arrêts du Tribunal du 18 février 2004, Koubi/OHMI − Flabesa (CONFORFLEX), T‑10/03, Rec. p. II‑719, point 52 ; du 29 avril 2004, Eurocermex/OHMI (Forme d’une bouteille de bière), T‑399/02, non encore publié au Recueil, point 52, et du 21 avril 2005, Ampafrance/OHMI – Johnson & Johnson (monBeBé), T‑164/03, non encore publié au Recueil, point 29].

66     Il résulte de tout ce qui précède que la chambre de recours a considéré à juste titre que les pièces produites par l’intervenante devant l’OHMI étaient suffisantes pour démontrer que, pour le public ciblé, « weiße Seiten » était un syntagme devenu usuel, à la date du dépôt de la demande d’enregistrement de la marque WEISSE SEITEN par la requérante, en tant que dénomination générique pour l’annuaire téléphonique des particuliers. Par ailleurs, il convient de relever que la requérante n’a pas produit devant l’OHMI de preuves de nature à démontrer que la marque WEISSE SEITEN ne tombait pas dans le champ d’application du motif absolu de refus visé par l’article 7, paragraphe 1, sous d), du règlement n° 40/94.

67     S’agissant de l’argument de la requérante selon lequel la chambre de recours n’aurait pas indiqué les raisons pour lesquelles le motif absolu de refus visé par l’article 7, paragraphe 1, sous d), du règlement n° 40/94 s’appliquait également à des produits et à des services autres que les annuaires téléphoniques sous forme de livre, il n’y a pas lieu de l’accueillir. En effet, la chambre de recours a exposé, au point 40 de la décision attaquée, ce qui suit : « Les annuaires téléphoniques ne sont pas seulement proposés sur support papier, mais aussi sous forme électronique. La demanderesse en nullité commercialise, depuis la fin des années 80 déjà, différents annuaires téléphoniques sur support électronique. En outre, les annuaires téléphoniques ne sont plus seulement proposés sur CD-ROM, aujourd’hui, c’est-à-dire sur des mémoires informatiques enregistrées, mais sont aussi directement accessibles via Internet. » Elle a répété, au point 53 de la décision attaquée, dans le cadre de l’examen de ce motif absolu de refus, que les « annuaires téléphoniques [n’étaient] pas seulement proposés sur support papier, mais aussi sous forme électronique » et qu’il était « également possible d’y accéder directement via Internet ».

68     En outre, elle a constaté, au point 41 de la décision attaquée, que, « [m]ême lorsqu’un terme n’[était] normalement pas utilisé pour la présentation, dans le commerce, de tous les produits couverts par une demande d’enregistrement, c’[était] le terme générique mentionné qu’il conv[enait] d’envisager pour établir l’existence d’un motif absolu de refus ». La chambre de recours a estimé ne pouvoir « faire la distinction entre les différents produits couverts par ledit terme, soit, par exemple, entre romans (divertissants) et annuaires téléphoniques » et devoir « apprécier le défaut de caractère distinctif au regard de l’ensemble des produits repris dans la liste accompagnant la demande ».

69     Il ressort de ces passages que la chambre de recours a indiqué les raisons pour lesquelles elle considérait que ce motif absolu de refus devait également s’appliquer aux « supports d’enregistrement magnétiques et mémoires informatiques avec des enregistrements pour installations et appareils de traitement électronique des données, en particulier bandes magnétiques, disques et CD-ROM », relevant de la classe 9, et aux « produits de l’imprimerie, bottins, ouvrages de référence », relevant de la classe 16, et, ainsi, a satisfait à l’obligation de motivation figurant à l’article 73 du règlement n° 40/94.

70     Il y a lieu d’examiner ensuite le bien-fondé de cette motivation.

71     Il est constant que les annuaires téléphoniques des particuliers sont disponibles non seulement en version papier, mais également sous forme électronique, sur Internet ou sur CD‑ROM. Le Tribunal a déjà été amené à souligner, s’agissant des « mémoires informatiques avec des enregistrements pour installations et appareils de traitement électronique des données, en particulier CD-ROM » et des « produits de l’imprimerie, bottins, ouvrages de référence », que ces produits couvraient divers types de produits aptes à contenir, soit sur support électronique, soit sur support papier, des annuaires téléphoniques ou de communication [arrêt du Tribunal du 14 juin 2001, Telefon & Buch/OHMI (UNIVERSALTELEFONBUCH et UNIVERSALKOMMUNIKATIONS-VERZEICHNIS), T‑357/99 et T‑358/99, Rec. p. II‑1705, point 26].

72     Dès lors, le syntagme « weiße Seiten » doit être considéré comme étant également une dénomination usuelle pour les annuaires électroniques, comme cela ressort aussi des recherches effectuées sur Internet par l’intervenante pendant la procédure administrative devant l’OHMI.

73     En ce qui concerne les « supports d’enregistrement magnétiques et mémoires informatiques avec des enregistrements pour installations et appareils de traitement électronique des données, en particulier bandes magnétiques, disques et CD-ROM », relevant de la classe 9, il convient de relever que la requérante a demandé l’enregistrement de la marque en cause pour cette catégorie de produits dans son ensemble, sans opérer de distinction.

74     Par conséquent, il y a lieu de confirmer l’appréciation de la chambre de recours en ce qu’elle porte sur cette catégorie dans son ensemble [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 7 juin 2001, DKV/OHMI (EuroHealth), T‑359/99, Rec. p. II‑1645, point 33 ; STREAMSERVE, précité, point 46 ; du 20 mars 2002, DaimlerChrysler/OHMI (TELE AID), T‑355/00, Rec. p. II‑1939, point 34 ; DaimlerChrysler/OHMI (CARCARD), T‑356/00, Rec. p. II‑1963, points 33 et 36, et DaimlerChrysler/OHMI (TRUCKCARD), T‑358/00, Rec. p. II‑1993, points 34 et 37].

75     En ce qui concerne les « produits de l’imprimerie, bottins, ouvrages de référence », relevant de la classe 16 et dont les annuaires téléphoniques sur support papier font partie, la requérante n’ayant pas opéré de distinction au sein de cette catégorie générique, il y a lieu de confirmer l’appréciation de la chambre de recours en ce qu’elle porte sur cette catégorie dans son ensemble.

76     Dans ces circonstances, il convient de considérer que c’est à bon droit que la chambre de recours a annulé l’enregistrement de la marque WEISSE SEITEN sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous d), du règlement n° 40/94, pour ce qui concerne les « supports d’enregistrement magnétiques et mémoires informatiques avec des enregistrements pour installations et appareils de traitement électronique des données, en particulier bandes magnétiques, disques et CD-ROM », relevant de la classe 9, et les « produits de l’imprimerie, bottins, ouvrages de référence », relevant de la classe 16.

77     Par conséquent, il y a lieu de rejeter le deuxième moyen de la requérante.

 Sur le troisième moyen, tiré d’une violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94

 Arguments des parties

78     La requérante constate que le signe WEISSE SEITEN a été formé dans le respect des règles de la grammaire allemande. Il ne pourrait échapper à personne que la marque est constituée de la désignation de la couleur « weiß » (blanc) et du mot « Seiten » (pages, côtés), auquel il serait possible d’attribuer plusieurs significations. Toutefois, ce ne serait que lorsque le signe permet de donner une information pertinente sur les produits et les services en question qu’il existerait éventuellement un motif absolu de refus prévu par l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94.

79     La requérante souligne qu’une publication n’est pas constituée de pages blanches, car presque toutes les publications sont imprimées à l’encre noire sur du papier blanc. Le mot « Seiten » ne pourrait pas désigner un livre, puisque les pages ne seraient qu’un des éléments composant un tel livre et que ce terme ne serait donc pas suffisant pour indiquer au consommateur qu’il va recevoir un livre s’il demande des « weiße Seiten ». S’agissant du papier blanc, la requérante souligne que le papier vierge n’est jamais désigné par le mot « Seiten » (pages), puisque ces dernières ne constituent qu’un élément d’une publication.

80     Selon la requérante, personne, confronté au signe WEISSE SEITEN, ne penserait à un service de rédaction, d’édition ou de publication. Le mot « Seite » (page, côté) ne pourrait jamais désigner un service et l’indication de couleur « weiß » ne pourrait pas non plus faire penser à des services.

81     La requérante en conclut que, étant donné que la notion de « weiße Seiten » n’est pas susceptible de décrire de manière appropriée et sous une forme aisément compréhensible une caractéristique essentielle de chacun des produits et des services en question, à l’exception du papier, pour lequel elle n’est pas non plus descriptive, la marque WEISSE SEITEN ne peut être considérée comme descriptive pour aucun de ces produits et de ces services.

82     L’OHMI fait observer que la requérante fait une lecture erronée de la décision attaquée. S’agissant des « produits de l’imprimerie, bottins, ouvrages de référence » et des « supports d’enregistrement magnétiques et mémoires informatiques avec des enregistrements pour installations et appareils de traitement électronique des données, en particulier bandes magnétiques, disques et CD-ROM », le signe WEISSE SEITEN serait descriptif des produits désignés en sa qualité de synonyme d’annuaire téléphonique des particuliers et non en raison de la couleur blanche des pages de livres. De plus, une désignation devenue usuelle dans le langage courant serait, en règle générale, également descriptive.

83     L’OHMI souligne que, même si un signe n’est descriptif que pour une partie des produits compris dans une catégorie déterminée, il ne peut pas être enregistré pour cette catégorie. Le signe WEISSE SEITEN étant descriptif d’annuaire téléphonique des particuliers, il ne pourrait pas non plus être enregistré pour des produits d’imprimerie (imprimés), à moins que le demandeur ou le titulaire de la marque ne procède à une limitation appropriée de la liste des produits et des services, de sorte que les bottins en soient exclus.

84     En ce qui concerne le rattachement par la chambre de recours à la signification « weißfarbige Seiten », il ne vaudrait que pour les produits suivants : « papier, carton et produits en ces matières, non compris dans d’autres classes ; matériel pour les artistes ; articles de bureau (à l’exception des meubles) ; matériel d’instruction ou d’enseignement (à l’exception des appareils) ». Selon l’OHMI, la notion de « weiße Seiten » peut être utilisée comme synonyme de « weißfarbige Blätter » (feuilles de couleur blanche). Dès lors, le signe WEISSE SEITEN serait descriptif de tous ces produits. L’OHMI remarque cependant que la question de savoir si le consommateur percevra également ce signe comme synonyme descriptif du « matériel d’instruction ou d’enseignement (à l’exception des appareils) » reste en suspens, étant donné que la requérante n’a pas expressément contesté cette appréciation par rapport à ces produits.

85     L’intervenante soutient que le signe WEISSE SEITEN constitue une indication directe et concrète d’une caractéristique et d’une qualité ou de la destination des produits et des services en question au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94.

86     Selon l’intervenante, les termes « Seite » et « Blätter » sont utilisés comme synonymes, comme le démontreraient un article paru dans GEO ainsi que les autres documents présentés par elle dans le cadre de la procédure devant l’OHMI.

87     Étant donné que l’indication « weiß » servirait à désigner des pages et des feuilles qui ne seraient pas imprimées et qui seraient vendues ainsi, elle décrirait de cette manière une qualité de pages disponibles dans le commerce de sorte que la notion de « weiße Seiten » servirait à désigner le type et la qualité de ce produit.

 Appréciation du Tribunal

88     Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94, sont refusées à l’enregistrement « les marques qui sont composées exclusivement de signes ou d’indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique ou l’époque de la production du produit ou de la prestation de service, ou d’autres caractéristiques de ceux-ci ». En outre, l’article 7, paragraphe 2, du même règlement énonce que le « paragraphe 1 est applicable même si les motifs de refus n’existent que dans une partie de la Communauté ».

89     La disposition de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94 poursuit un but d’intérêt général, lequel exige que les signes ou indications descriptives des caractéristiques de produits ou de services pour lesquels l’enregistrement est demandé puissent être librement utilisés par tous. Cette disposition empêche, dès lors, que de tels signes ou indications soient réservés à une seule entreprise en raison de leur enregistrement en tant que marque [arrêt de la Cour du 23 octobre 2003, OHMI/Wrigley, C‑191/01 P, Rec. p. I‑12447, point 31, et arrêt du Tribunal du 27 février 2002, Ellos/OHMI (ELLOS), T‑219/00, Rec. p. II‑753, point 27].

90     Dans cette perspective, les signes et les indications visés par la disposition citée sont ceux qui peuvent servir, dans un usage normal du point de vue du public ciblé, pour désigner soit directement, soit par la mention d’une de ses caractéristiques essentielles le produit ou le service pour lequel l’enregistrement est demandé (arrêt de la Cour du 20 septembre 2001, Procter & Gamble/OHMI, C‑383/99 P, Rec. p. I‑6251, point 39). L’appréciation du caractère descriptif d’un signe ne peut donc être opérée que, d’une part, par rapport aux produits ou aux services concernés et, d’autre part, par rapport à la compréhension qu’en a le public pertinent (arrêt CARCARD, précité , point 25).

91     Il convient, aux fins de l’application de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94, d’examiner, eu égard à la signification donnée à la marque verbale en cause, s’il existe, du point de vue du public pertinent, un rapport suffisamment direct et concret entre cette marque et les catégories de produits et de services pour lesquelles l’enregistrement a été accepté (voir, en ce sens, arrêt CARCARD, précité, point 28).

92     Il y a lieu de rappeler, à cet égard, que, pour que l’OHMI refuse une demande d’enregistrement sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94, il n’est pas nécessaire que les signes et indications composant la marque visés par cet article soient effectivement utilisés, au moment de la demande d’enregistrement, à des fins descriptives de produits ou de services tels que ceux pour lesquels la demande est présentée ou des caractéristiques de ces produits ou de ces services. Il suffit, comme l’indique la lettre même de cette disposition, que ces signes et indications puissent être utilisés à de telles fins. Un signe verbal doit ainsi être refusé à l’enregistrement, en application de ladite disposition, si, en au moins une de ses significations potentielles, il désigne une caractéristique des produits ou des services concernés (arrêt OHMI/Wrigley, précité, point 32).

93     En l’espèce, la chambre de recours a considéré que le motif absolu de refus visé par l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94 était d’application pour les produits et services suivants :

–       classe 9 : « Supports d’enregistrement magnétiques et mémoires informatiques avec des enregistrements pour installations et appareils de traitement électronique des données, en particulier bandes magnétiques, disques et CD-ROM » ;

–       classe 16 : « Papier, carton et produits en ces matières, non compris dans d’autres classes ; produits de l’imprimerie, bottins, ouvrages de référence ; matériel pour les artistes ; articles de bureau (à l’exception des meubles) ; matériel d’instruction ou d’enseignement (à l’exception des appareils) » ;

–       classe 41 : « Services d’une maison de publication, en particulier publication de textes, de livres, de revues et de journaux » ;

–       classe 42 : « Services d’un rédacteur ».

94     Même s’il suffit qu’un des motifs absolus de refus énumérés à l’article 7, paragraphe 1, du règlement n° 40/94 s’applique pour que le signe ne puisse être enregistré comme marque communautaire, il convient d’examiner le bien-fondé de l’application du motif absolu de refus visé par l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94 s’agissant également des produits mentionnés au point 76 ci-dessus, pour lesquels il a été jugé que l’article 7, paragraphe 1, sous d), du règlement n° 40/94 avait été correctement appliqué.

95     Le syntagme « weiße Seiten » est construit correctement, selon les règles grammaticales de la langue allemande, comme le constate d’ailleurs la requérante, et est composé de termes allemands courants.

96     Comme il a été relevé dans le cadre de l’examen du moyen précédent, ce syntagme est devenu synonyme, en langue allemande, d’annuaire téléphonique des particuliers. Dès lors, ce syntagme peut être également considéré comme descriptif pour les produits pour lesquels il est considéré comme recouvrant une dénomination usuelle, c’est-à-dire les « supports d’enregistrement magnétiques et mémoires informatiques avec des enregistrements pour installations et appareils de traitement électronique des données, en particulier bandes magnétiques, disques et CD-ROM » et les « produits de l’imprimerie, bottins, ouvrages de référence », étant donné qu’il désigne l’espèce de ces produits (voir, en ce sens, arrêt UNIVERSALTELEFONBUCH et UNIVERSALKOMMUNIKATIONS-VERZEICHNIS, précité, point 28).

97     Ainsi, les arguments de la requérante, selon lesquels une publication n’est pas constituée de pages blanches, car presque toutes les publications sont imprimées à l’encre noire sur du papier blanc, et selon lesquels le mot « Seiten » ne pourrait pas désigner un livre, puisque les pages ne seraient qu’un des éléments composant un tel livre et que ce terme ne serait donc pas suffisant pour indiquer au consommateur qu’il va recevoir un livre s’il demande des « weiße Seiten », ne sont pas pertinents, étant donné que la chambre de recours a constaté que la marque WEISSE SEITEN était descriptive de ces produits en sa qualité de synonyme d’annuaire téléphonique des particuliers et non en raison de la couleur blanche des pages d’un tel annuaire.

98     En ce qui concerne les « services d’une maison de publication, en particulier publication de textes, de livres, de revues et de journaux », relevant de la classe 41, et les « services d’un rédacteur », relevant de la classe 42, ils concernent la création et l’élaboration des produits cités au point 96 ci-dessus et, en particulier, des produits sur support papier qui relèvent de la classe 16. Dès lors, le syntagme « weiße Seiten » peut également être considéré comme descriptif de ces services, étant donné qu’il désigne leur destination (voir, en ce sens, arrêt UNIVERSALTELEFONBUCH et UNIVERSALKOMMUNIKATIONS-VERZEICHNIS, précité, points 26 et 28).

99     Dans ces circonstances, l’argument de la requérante selon lequel personne, confronté au signe WEISSE SEITEN, ne penserait à un service de rédaction, d’édition ou de publication ne saurait prospérer, car la chambre de recours a établi l’existence d’un lien suffisant entre ces services et les produits pour lesquels le syntagme « weiße Seiten » signifie « annuaire téléphonique des particuliers ».

100   Par conséquent, la chambre de recours n’a pas commis d’erreur d’appréciation concernant les produits et les services susvisés.

101   Il importe encore d’examiner l’éventuel caractère descriptif de la marque WEISSE SEITEN vis-à-vis des produits suivants : « papier, carton et produits en ces matières, non compris dans d’autres classes ; matériel pour les artistes ; articles de bureau (à l’exception des meubles) ; matériel d’instruction ou d’enseignement (à l’exception des appareils) », relevant de la classe 16.

102   La chambre de recours a constaté à cet égard, au point 81 de la décision attaquée, ce qui suit :

« Le ‘papier’ consiste en des feuilles. Or, dès qu’elles ne sont plus isolées, mais reliées, agrafées ou assemblées d’une autre manière, qu’elles soient imprimées ou non, elles sont appelées ‘Seiten’ […] Il n’est pas non plus exclu que le terme ‘Seite’ […] devienne ou soit déjà devenu un synonyme du mot ‘Blatt’ (feuille). Préciser qu’il s’agit de pages blanches constitue une indication concrète et directe d’une caractéristique du papier, dont les consommateurs tiendront compte lors de leur décision d’achat, contrairement au point de vue de la division d’annulation. Quant au terme générique ‘articles de bureau’, il inclut également le papier, de sorte que le syntagme ‘weiße Seiten’ […] est une indication descriptive y compris à leur égard. La même constatation vaut pour le ‘matériel d’instruction ou d’enseignement’, ce matériel consistant surtout en des livres. En effet, préciser que la matière enseignée est imprimée sur des pages blanches constitue une indication essentielle des caractéristiques du produit. Le ‘matériel pour les artistes’ est un autre terme générique qui, pour sa part, couvre également des feuilles à dessin, ainsi qu’il a déjà été constaté, et qui, par conséquent, est également descriptif à leur égard. »

103   Il y a lieu de relever que l’appréciation de la chambre de recours est exacte. En effet, le syntagme en question peut facilement être compris dans le sens de « weißfarbige Seiten » et il peut être utilisé, comme le font valoir l’OHMI et l’intervenante, comme synonyme de « weißfarbige Blätter ». Dès lors, il peut être considéré comme descriptif au moins pour le papier et, étant donné que la requérante n’a pas opéré de distinction au sein de la catégorie générique « papier, carton et produits en ces matières, non compris dans d’autres classes », pour tous ces produits.

104   En ce qui concerne le « matériel pour les artistes », il y a lieu de relever qu’il peut inclure toutes les ressources que les artistes utilisent. Il peut donc également inclure le papier et, étant donné que la requérante n’a pas effectué de limitation dans cette catégorie en en excluant le papier, le syntagme « weiße Seiten » doit être considéré comme descriptif pour la catégorie « matériel pour les artistes ».

105   S’agissant des « articles de bureau (à l’exception des meubles) », cette catégorie peut inclure, par exemple, les bloc-notes et le papier à imprimer et, étant donné que la requérante n’a pas effectué de limitation au sein de cette catégorie, le syntagme en cause peut être également considéré comme descriptif de ces produits.

106   Enfin, quant au « matériel d’instruction ou d’enseignement (à l’exception des appareils) », le même raisonnement vaut que pour les produits précédemment cités. Étant donné que la requérante n’a pas exclu de ce matériel les feuilles ou les pages blanches, il convient de relever que la marque peut être considérée comme descriptive de ces produits.

107   Dès lors, étant donné que la requérante n’a opéré ni distinction ni limitation au sein de ces catégories génériques, il y a lieu de confirmer l’appréciation de la chambre de recours pour tous les produits mentionnés au point 101 ci-dessus.

108   Il résulte de ces considérations que le lien entre la marque WEISSE SEITEN et les caractéristiques de tous les produits et services en question est suffisamment étroit pour tomber sous l’interdiction visée par l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94.

109   Par conséquent, il convient de rejeter le troisième moyen de la requérante.

110   En ce qui concerne le quatrième moyen, tiré d’une violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, il convient de rappeler que, ainsi qu’il ressort de l’article 7, paragraphe 1, du règlement n° 40/94, il suffit qu’un des motifs absolus de refus s’applique pour que le signe ne puisse être enregistré comme marque communautaire (arrêt de la Cour du 19 septembre 2002, DKV/OHMI, C‑104/00 P, Rec. p. I‑7561, point 29).

111   Au demeurant, selon la jurisprudence, une marque verbale qui est descriptive des caractéristiques de produits ou de services, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94, est, de ce fait, nécessairement dépourvue de caractère distinctif au regard de ces mêmes produits ou services, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b) (voir, par analogie, arrêts de la Cour du 12 février 2004, Campina Melkunie, C‑265/00, Rec. p. I‑1699, point 19, et Koninklijke KPN Nederland, C‑363/99, Rec. p. I‑1619, point 86).

112   Dans ces circonstances, le quatrième moyen de la requérante ne saurait être accueilli.

113   Par conséquent, il y a lieu de rejeter le recours dans son ensemble.

 Sur les dépens

114   Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens exposés par l’OHMI, conformément aux conclusions de celui-ci. L’intervenante n’ayant pas conclu en ce sens, elle doit supporter ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      La requérante est condamnée aux dépens, à l’exception de ceux exposés par l’intervenante.

3)      L’intervenante supportera ses propres dépens.


Jaeger

Tiili

Czúcz


Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 16 mars 2006.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

       M. Jaeger


* Langue de procédure : l’allemand.