1. Concurrence — Procédure administrative — Examen des plaintes
(Règlement du Conseil nº 17; règlement de la Commission nº 2842/98)
2. Concurrence — Procédure administrative — Examen des plaintes — Obligations de la Commission
(Art. 81 CE et 82 CE)
3. Recours en annulation — Décision de la Commission nécessitant une appréciation économique complexe
(Art. 81 CE, 82 CE et 230 CE)
4. Concurrence — Ententes — Accords entre entreprises — Affectation du commerce entre États membres — Critères
(Art. 81, § 1, CE)
5. Concurrence — Procédure administrative — Examen des plaintes — Délai excessif
(Art. 81 CE et 82 CE)
6. Concurrence — Procédure administrative — Obligations de la Commission
(Art. 81 CE et 82 CE)
7. Actes des institutions — Motivation — Obligation — Portée
(Art. 81 CE, 82 CE et 253 CE)
1. Ni le règlement nº 17 ni le règlement nº 2842/98, relatif à l'audition dans certaines procédures fondées sur les articles [81 CE] et [82 CE], ne contiennent de dispositions expresses concernant la suite à réserver, au fond, à une plainte et les obligations d'investigation éventuelles de la Commission en ce qui concerne l'instruction de celle-ci. De fait, la Commission n'a pas l'obligation d'engager des procédures visant à établir d'éventuelles violations du droit communautaire et, parmi les droits conférés aux plaignants par les règlements nº 17 et nº 2842/98, ne figure pas celui d'obtenir une décision définitive quant à l'existence ou non de l'infraction alléguée.
Dès lors que la Commission n'a pas l'obligation de se prononcer sur l'existence ou non d'une infraction, elle ne saurait être contrainte de mener une instruction, puisque cette dernière ne pourrait avoir d'autre objet que de rechercher les éléments de preuve relatifs à l'existence ou non d'une infraction qu'elle n'est pas tenue de constater. De plus, quand bien même une telle instruction a été menée, aucune disposition du droit dérivé ne confère au plaignant le droit d'obliger la Commission à poursuivre la procédure jusqu'au stade d'une décision finale constatant l'existence ou l'inexistence de l'infraction alléguée. L'existence du pouvoir discrétionnaire reconnu à la Commission dans le cadre de l'examen des plaintes, en effet, n'est pas fonction du caractère plus ou moins avancé de l'instruction d'une affaire.
(cf. points 27-28)
2. À la suite d'une plainte pour violation des articles 81 CE et 82 CE, la Commission n'est pas obligée d'engager une procédure visant à établir lesdites violations, mais seulement d'examiner attentivement les éléments de fait et de droit portés à sa connaissance par le plaignant en vue d'apprécier si ces éléments font apparaître un comportement de nature à fausser la concurrence à l'intérieur du marché commun et à affecter le commerce entre les États membres. Quand la Commission décide de procéder à l'instruction d'une plainte, elle doit, sauf motivation dûment circonstanciée, le faire avec le soin, le sérieux et la diligence requis, aux fins d'être en mesure d'apprécier en pleine connaissance de cause les éléments de fait et de droit soumis à son appréciation par les plaignants.
(cf. points 29, 212)
3. Dans le cadre d'un recours en annulation dirigé contre une décision de la Commission rejetant une plainte pour violation des règles communautaires de concurrence, il convient pour le Tribunal de vérifier si la décision attaquée comporte un examen approprié des éléments de fait et de droit soumis à l'appréciation de la Commission dans le cadre de la procédure administrative. À cet égard, le contrôle juridictionnel des actes de la Commission impliquant des appréciations économiques complexes, comme cela est le cas en matière d'allégations d'infractions aux articles 81 CE et 82 CE, se limite à la vérification du respect des règles de procédure et de motivation ainsi qu'à celle de l'exactitude matérielle des faits, de l'absence d'erreur manifeste d'appréciation et de détournement de pouvoir.
(cf. point 30)
4. Pour justifier l'application des règles de concurrence à un accord concernant des produits achetés aux États-Unis pour être vendus dans la Communauté, cet accord doit, sur la base d'un ensemble d'éléments de fait et de droit, permettre d'envisager avec un degré de probabilité suffisant qu'il puisse exercer une influence plus qu'insignifiante sur la concurrence dans la Communauté et le commerce entre États membres. Le simple fait qu'un comportement produise certains effets, quels qu'ils soient, sur l'économie de la Communauté ne constitue pas en soi un lien suffisamment étroit pour permettre de fonder la compétence communautaire. Pour pouvoir être pris en compte, il faut que cet effet soit substantiel, c'est-à-dire sensible et non négligeable.
(cf. point 167)
5. Un éventuel délai excessif pour le traitement d'une plainte pour violation des règles communautaires de concurrence ne saurait, en principe, avoir d'incidence sur le contenu même de la décision finale adoptée par la Commission. En effet, ce délai ne saurait, sauf situation exceptionnelle, modifier les éléments de fond qui, selon les cas, établissent l'existence ou non d'une infraction aux règles de concurrence, ou qui justifient que la Commission ne conduise pas une instruction. La durée d'instruction de la plainte ne porte donc pas, en principe, préjudice au plaignant quand il y a rejet.
(cf. point 193)
6. Le respect par la Commission d'un délai raisonnable lors de l'adoption de décisions à l'issue des procédures administratives en matière de politique de concurrence constitue une application du principe de bonne administration. Le caractère raisonnable de la durée d'une telle procédure doit s'apprécier en fonction des circonstances propres de chaque affaire et, notamment, du contexte de celle-ci, des différentes étapes procédurales que la Commission doit suivre, de la complexité de l'affaire ainsi que de son enjeu pour les différentes parties intéressées.
(cf. point 195)
7. La Commission n'est pas obligée, dans la motivation des décisions qu'elle est amenée à prendre pour assurer l'application des règles communautaires de concurrence, de prendre position sur tous les arguments que les intéressés invoquent à l'appui de leur demande. Il suffit qu'elle expose les faits et les considérations juridiques revêtant une importance essentielle dans l'économie de la décision.
(cf. point 199)