«Politique sociale – Égalité des rémunérations entre travailleurs masculins et travailleurs féminins – Directive 92/85/CEE – Congé de maternité – Prestation de maternité calculée sur la base du salaire du travailleur féminin – Augmentation de salaire intervenue avant ou pendant le congé de maternité – Inclusion»
[…]»
40. La Cour a donc dit pour droit que le principe de l’égalité des rémunérations, posé par l’article 119 du traité, n’imposait pas de maintenir la rémunération intégrale des travailleurs féminins pendant le congé de maternité et qu’il ne posait pas de critères spécifiques pour déterminer le montant de la prestation de maternité des travailleurs féminins. En revanche, elle a jugé que le principe de non‑discrimination exigeait que la prestation de maternité prenne en considération les augmentations de salaire intervenues entre le début de la période pertinente et la fin du congé de maternité. 41. En l’espèce, les parties intervenantes s’opposent sur la portée qu’il convient d’attribuer à l’arrêt Gillespie. 42. Selon le Royaume‑Uni, cet arrêt doit être limité aux circonstances de l’espèce, c’est‑à‑dire aux cas où l’augmentation de salaire rétroagit à la période pertinente. 43. En effet, le Royaume‑Uni souligne que, dans l’affaire Gillespie, les augmentations de salaire, bien qu’elles furent décidées avant ou pendant le congé de maternité des requérantes, rétroagissaient à la période pertinente. Dans cet arrêt, la Cour aurait donc simplement constaté qu’une augmentation de salaire de cette nature devait être intégrée dans le montant de la prestation de maternité. En revanche, la Cour n’aurait pas posé le principe selon lequel toute augmentation de salaire, qui est intervenue avant ou pendant le congé de maternité, mais en dehors de la période pertinente, doit être prise en compte dans la prestation de maternité. Le Royaume‑Uni estime que, si l’arrêt Gillespie devait être interprété en ce sens, il engendrerait une insécurité juridique considérable ainsi qu’une multitude de difficultés pratiques. 44. Mme Alabaster conteste cette lecture de l’arrêt Gillespie. Elle fait observer que rien, dans cet arrêt, ne permet d’affirmer que les augmentations de salaire avaient un effet rétroactif à la période pertinente. En tout état de cause, elle estime que le libellé de l’arrêt Gillespie est clair: le principe de non‑discrimination impose de tenir compte de toute augmentation de salaire intervenue avant ou pendant le congé de maternité, même si cette augmentation se situe en dehors de la période pertinente. Mme Alabaster ajoute que les difficultés d’ordre pratique invoquées par le Royaume‑Uni ne sauraient remettre en cause cette conclusion. 45. La Commission partage l’analyse de Mme Alabaster. Elle précise que, à partir du moment où un État membre choisit un système dans lequel la prestation de maternité est fondée sur le salaire de la travailleuse, ce système doit être conforme à l’article 119 du traité. Cela implique, conformément à l’arrêt Gillespie, que la prestation de maternité doit intégrer les augmentations de salaire intervenant avant ou pendant le congé de maternité de la travailleuse. 46. Pour notre part, nous pensons que la portée de l’arrêt Gillespie est claire. Selon nous, la Cour a posé le principe selon lequel une prestation légale de maternité, lorsqu’elle est calculée sur la base du salaire perçu par le travailleur féminin pendant une période déterminée, doit intégrer toutes les augmentations de salaire qui interviennent entre le début de la période pertinente et la fin du congé de maternité. 47. En effet, comme l’a souligné Mme Alabaster, aucun élément ne permet d’affirmer que, dans l’affaire Gillespie, les augmentations de salaire litigieuses avaient un effet rétroactif à la période pertinente. 48. L’arrêt Gillespie se limite à indiquer que, «[a]u cours de l’année 1988, les requérantes au principal ont bénéficié d’un congé de maternité» (11) ; que, «[e]n novembre 1988, des négociations […] ont abouti à des augmentations salariales rétroactives, prenant effet au 1er avril 1988» (12) , et que «les requérantes au principal n’ont pas pu bénéficier de cette augmentation» (13) . 49. En outre, certains éléments de l’arrêt Gillespie tendent même à indiquer que les augmentations de salaire litigieuses rétroagissaient à une date située en dehors de la période pertinente. 50. En effet, au point 6 de cet arrêt, la Cour a exposé que les augmentations de salaire des requérantes n’avaient pas été intégrées dans leur prestation de maternité pour les raisons suivantes: «[…] il ressort de l’arrêt de l’Industrial Tribunal, auquel se réfère la demande préjudicielle, que la prestation en espèces à verser pendant le congé de maternité est déterminée sur la base du salaire hebdomadaire moyen, celui‑ci étant calculé […] à partir des deux derniers salaires (ci‑après les ‘salaires de référence’) que les intéressées ont perçus pour les deux mois qui ont précédé la semaine de référence. Cette dernière est définie comme la quinzième semaine avant le début de la semaine d’accouchement présumée. Aucune augmentation des salaires de référence n’était prévue dans le cas d’une augmentation salariale subséquente» 14 –Souligné par nous.. 51. Cette dernière phrase semble donc indiquer que la raison pour laquelle les requérantes n’ont pas bénéficié de leur augmentation de salaire est que cette augmentation est intervenue en dehors de la période de référence définie par les règles nationales pertinentes. 52. En conséquence, nous pensons qu’il n’est pas établi que les augmentations de salaire des requérantes dans l’affaire Gillespie avaient un effet rétroactif à la période pertinente. 53. En tout état de cause, nous pensons que le libellé de l’arrêt Gillespie ne permet pas de limiter l’appréciation de la Cour à cette seule hypothèse. 54. En effet, les points 21 et 22 de l’arrêt Gillespie sont rédigés en termes clairs et généraux. Le point 21 indique que «la question de savoir si le travailleur féminin se trouvant en congé de maternité doit bénéficier d’une augmentation de salaire intervenue avant ou pendant cette période […] appelle une réponse affirmative». De même, le point 22 énonce que «le travailleur féminin […] [doit] bénéficie[r] […] d’une augmentation de salaire intervenue entre le début de la période couverte par le salaire de référence et la fin du congé de maternité […]». Enfin, le dispositif de l’arrêt Gillespie énonce, de manière claire et générale, que: «[…] dans la mesure où le calcul de ces prestations [de maternité] est fondé sur un salaire perçu par le travailleur féminin avant le […] congé de maternité, leur montant devra intégrer, à partir de leur entrée en vigueur, les augmentations de salaire intervenues entre le début de la période couverte par les salaires de référence et la fin du congé de maternité.» 55. Il en résulte qu’aucun élément ne permet de limiter le principe posé par l’arrêt Gillespie aux seuls cas où l’augmentation de salaire a un effet rétroactif à la période pertinente. 56. Sur la base de ces éléments, il conviendrait donc de répondre par l’affirmative à la première question préjudicielle. La Cour pourrait donc indiquer que, en vertu de l’arrêt Gillespie, une prestation légale de maternité, qui est calculée sur la base du salaire moyen perçu par le travailleur féminin durant une période déterminée, doit intégrer les augmentations de salaire qui interviennent avant ou pendant le congé de maternité, mais en dehors de la période pertinente prescrite par le droit national. 57. Toutefois, comme le Royaume‑Uni, nous pensons que l’arrêt Gillespie pose un certain nombre de difficultés. À la lumière de celles‑ci, et de l’évolution de la jurisprudence, nous proposerons à la Cour de ne pas confirmer l’arrêt Gillespie. En effet, nous verrons que, en l’état actuel du droit communautaire, le droit du travailleur féminin à bénéficier de son augmentation de salaire devrait être fondé sur la directive 92/85, plutôt que sur le principe de l’égalité de traitement. B – Sur les difficultés posées par l’arrêt Gillespie 58. Il est constant que le principe de non‑discrimination exige que le travailleur féminin ne subisse aucun traitement défavorable en raison de sa grossesse ou de son congé de maternité (15) . Cela implique que le travailleur féminin, qui reste lié à son employeur pendant le congé de maternité, doit pouvoir continuer à bénéficier de l’ensemble de ses conditions de travail, qui s’appliquent tant aux travailleurs féminins qu’aux travailleurs masculins (16) . 59. Dans l’arrêt Gillespie (17) , la Cour a déduit de ce principe qu’une femme, qui se trouve en congé de maternité, doit, comme tout autre travailleur qui occupe son poste de travail, pouvoir bénéficier immédiatement de son augmentation de salaire, même si celle‑ci intervient en dehors de la période pertinente ou pendant le congé de maternité. Cette exigence implique que l’augmentation de salaire soit prise en compte dans le montant de la rémunération ou de la prestation qui est versée au travailleur féminin pendant son congé de maternité. 60. Toutefois, la particularité de l’arrêt Gillespie réside dans le fait que, ce faisant, la Cour a appliqué le principe de non‑discrimination au travailleur féminin qui se trouve en congé de maternité et, plus précisément, à la rémunération que ce travailleur perçoit durant cette période. 61. Or, il nous semble que cette application particulière du principe de l’égalité de traitement est de nature à poser deux séries de difficultés. 62. Premièrement, nous pensons qu’il existe une certaine contradiction entre le principe posé par l’arrêt Gillespie (18) et les points 16 à 20 du même arrêt. 63. En effet, aux points 16 à 20 de l’arrêt Gillespie, la Cour a jugé que l’article 119 du traité ne s’applique pas aux femmes qui se trouvent en congé de maternité. La raison de cette exclusion est que l’interdiction posée par l’article 119 du traité suppose l’existence d’une discrimination entre les travailleurs masculins et les travailleurs féminins. Or, selon la Cour, la femme qui bénéficie d’un congé de maternité se trouve dans une situation spécifique, qui exige une protection particulière, mais qui ne peut être comparée à aucune autre situation. La Cour en a déduit que l’article 119 du traité n’impose pas de maintenir le salaire intégral des travailleurs féminins pendant leur congé de maternité et qu’il ne pose aucun critère visant à déterminer le montant de la prestation de maternité. 64. Or, dans le même temps, la Cour a jugé, aux points 21 et 22, que le principe de non‑discrimination exige qu’une prestation de maternité, qui est calculée sur la base du salaire perçu par le travailleur féminin, tienne compte d’une augmentation de salaire intervenue avant ou pendant le congé de maternité. La raison de cette exigence est que, à défaut, le travailleur féminin ferait l’objet d’une discrimination en raison de sa grossesse ou de son congé de maternité. 65. Il faut avouer que ces deux principes semblent relativement contradictoires. En effet, il est difficile de comprendre comment le principe de non‑discrimination, qui ne s’applique pas pendant le congé de maternité et qui ne pose donc aucun critère pour le calcul de la prestation de maternité, peut, simultanément, imposer l’obligation de tenir compte de certaines augmentations de salaire lors du calcul de la prestation de maternité. En d’autres termes, on voit mal comment le principe de non‑discrimination, qui n’est pas applicable pendant le congé de maternité, peut avoir une incidence sur le montant de la prestation versée au travailleur féminin pendant son congé de maternité. 66. En définitive, il semble que l’arrêt Gillespie se trouve à mi‑chemin entre deux logiques, qui auraient dû être suivies jusqu’à leur terme. La première logique consiste à exclure l’application du principe de non‑discrimination pendant le congé de maternité. Mais, dans ce cas, ce principe ne peut imposer l’obligation d’intégrer une augmentation de salaire dans la prestation de maternité. La seconde logique consiste à appliquer le principe de non‑discrimination à la femme qui se trouve en congé de maternité. Mais, dans ce cas, l’article 119 du traité exige que la femme perçoive l’intégralité de son salaire pendant toute la durée du congé de maternité. 67. Deuxièmement, nous pensons que le principe posé par l’arrêt Gillespie est susceptible d’avoir des conséquences négatives pour les travailleurs féminins. 68. Comme l’ont souligné la Court of Appeal (19) et le Royaume‑Uni (20) , le fait d’appliquer le principe de non‑discrimination à la femme qui se trouve en congé risque de nuire à la protection dont elle bénéficie durant cette période. 69. En effet, l’arrêt Gillespie exige que le travailleur féminin, qui se trouve en congé de maternité, ne soit pas traité autrement que le travailleur qui occupe son poste de travail (21) . Nous l’avons vu, cela signifie que, si la femme bénéficie d’une augmentation de salaire avant ou pendant son congé de maternité, cette augmentation doit être reflétée immédiatement dans le montant de sa prestation de maternité. 70. Toutefois, une application correcte du principe de non‑discrimination exige que l’on prenne également en considération les éléments négatifs qui interviennent avant ou pendant le congé de maternité. Ainsi, si le travailleur féminin devait subir une diminution ou une perte de salaire avant ou pendant son congé de maternité, le principe de non‑discrimination exigerait que cette diminution ou cette perte de salaire soit également reflétée dans le montant de sa prestation de maternité. En décider autrement reviendrait à faire une application à géométrie variable du principe de non‑discrimination, qui serait incompatible avec les exigences du principe de sécurité juridique. 71. Il en résulte que l’application du principe posé par l’arrêt Gillespie pourrait provoquer une diminution du montant de la prestation versée aux travailleurs féminins pendant leur congé de maternité. 72. Une telle conséquence serait d’autant plus regrettable que, au Royaume‑Uni, la période pertinente semble avoir pour objectif de protéger les travailleurs féminins contre les événements négatifs qui interviennent avant ou pendant le congé de maternité. En effet, le Royaume‑Uni a exposé que cette période a été choisie en vue de calculer le salaire moyen de la travailleuse à un moment de la grossesse (entre le quatrième et le sixième mois) où, en règle générale, elle connaît peu de problèmes liés à son état. 73. Or, comme l’a souligné le Royaume‑Uni, l’arrêt Gillespie, en ce qu’il impose de tenir compte de l’ensemble des éléments intervenus avant le congé de maternité, revient à déplacer la période pertinente vers la fin de la grossesse, c’est‑à‑dire à un moment où, statistiquement, les femmes sont moins en mesure de travailler normalement. 74. En conséquence, il n’est pas exclu que l’arrêt Gillespie ait pour effet de diminuer le montant de la prestation versée aux travailleurs féminins pendant le congé de maternité (22) . C – Sur l’évolution de la jurisprudence de la Cour 75. Par ailleurs, il semble que le principe posé par l’arrêt Gillespie ne s’inscrit plus dans le cadre de la jurisprudence actuelle en matière de protection des droits liés à la grossesse et à la maternité. 76. En effet, en vertu de la jurisprudence actuelle, que la Cour applique le principe de l’égalité des rémunérations et le principe de l’égalité de traitement uniquement en dehors de la période du congé de maternité. 77. Ainsi, la Cour considère que le principe de non‑discrimination s’oppose au refus d’engager un travailleur féminin en raison de sa grossesse (23) , au licenciement d’un travailleur féminin pour la même raison (24) , au licenciement d’un travailleur féminin en raison d’absences dues à une maladie trouvant son origine dans la grossesse (25) , au refus d’un employeur de réintégrer un travailleur féminin au motif que celui‑ci a omis de l’informer de sa grossesse avant la signature du contrat de travail (26) , ainsi qu’à une mesure privant une femme du droit d’être notée au motif qu’elle a été absente de l’entreprise pendant son congé de maternité (27) . 78. De même, la Cour considère que le principe de l’égalité des rémunérations s’oppose à ce qu’un employeur réduise le montant d’une prime de Noël pour tenir compte de l’absence du travailleur féminin pendant son congé de maternité (28) . La Cour estime également que le même principe impose de maintenir le salaire intégral d’un travailleur féminin qui, avant son congé de maternité, se trouve en incapacité de travail en raison de sa grossesse, lorsque le même droit est reconnu aux travailleurs masculins qui se trouvent en incapacité de travail (29) . 79. Il apparaît clairement que ces différents événements – le recrutement, le licenciement, la réintégration, la notation, le versement d’une prime, l’absence pour cause de maladie – se déroulent en dehors de la période couverte par le congé de maternité. 80. En revanche, lorsque la femme se trouve en congé de maternité, la Cour n’applique plus le principe de l’égalité des rémunérations et le principe de l’égalité de traitement. Il semble, au contraire, qu’elle examine la situation litigieuse au regard des seules dispositions de la directive 92/85. 81. Ainsi, dans l’arrêt Boyle e.a. (30) , le litige portait sur la clause d’un contrat de travail qui permettait au travailleur féminin de percevoir, pendant son congé de maternité, une rémunération plus élevée que celle prévue par la législation nationale, à condition qu’il s’engage à reprendre le travail après l’accouchement pendant au moins un mois. À défaut, le travailleur féminin devait rembourser la différence entre le montant de la rémunération qui lui a été versée et le montant des paiements légaux. La Cour a estimé que l’article 119 du traité ne s’opposait pas à l’application d’une telle clause au motif que: «[…] la travailleuse enceinte, accouchée ou allaitante se trouve dans une situation spécifique de vulnérabilité qui nécessite qu’un droit à un congé de maternité lui soit accordé, mais qui, spécialement pendant ce congé, ne peut être assimilée à celle d’un homme ni à celle d’une femme qui bénéficie d’un congé de maladie» 31 –Ibidem (point 40).. 82. La Cour a donc examiné la clause litigieuse au regard des seules dispositions de la directive 92/85 (32) . 83. De même, dans l’arrêt Høj Pedersen e.a., précité, le litige concernait une législation nationale qui prévoyait qu’une femme enceinte, atteinte d’une incapacité de travail résultant d’un état pathologique lié à sa grossesse, n’avait pas le droit au paiement de son salaire intégral pendant son incapacité. Il était pourtant établi qu’un travailleur masculin se trouvant en incapacité de travail conservait l’intégralité de son salaire. Pour justifier cette différence, les défendeurs au principal avaient soutenu que l’article 11 la directive 92/85 autorise les États membres à prévoir un plafond pour les prestations versées aux travailleurs féminins en cas de grossesse (33) . 84. La Cour a rejeté cet argument au motif que l’article 11 de la directive 92/85 ne s’applique qu’aux rémunérations ou aux prestations versées aux travailleurs féminins pendant le congé de maternité (34) . Dès lors que, en l’espèce, le litige concernait une incapacité de travail intervenue avant le congé de maternité, la Cour a estimé que l’article 119 du traité imposait de maintenir également l’intégralité du salaire en cas d’incapacité de travail du travailleur féminin (35) . 85. Enfin, dans l’arrêt Lewen, précité (36) , la Cour a jugé qu’une prime de Noël, versée à titre volontaire par l’employeur en guise d’encouragement pour le travail à venir, ne pouvait constituer une rémunération au sens de l’article 11, point 2, sous b), de la directive 92/85 dans la mesure où cette prime n’est pas destinée à assurer un niveau de revenus adéquat à la travailleuse pendant son congé de maternité. 86. Il résulte de ces arrêts que, depuis l’entrée en vigueur de la directive 92/85, la Cour opère une distinction entre deux périodes déterminées: une première période, qui couvre la grossesse jusqu’au début du congé de maternité, et une seconde période qui couvre le congé de maternité. Or, la Cour applique l’article 119 du traité et le principe de l’égalité de traitement uniquement pendant la première période. En revanche, lorsque la femme se trouve en congé de maternité, sa situation est examinée au regard des seules dispositions de la directive 92/85. Cela signifie que, si le travailleur féminin fait l’objet d’un traitement défavorable pendant son congé de maternité, ce traitement ne sera interdit que s’il est contraire aux dispositions de la directive 92/85 (37) . 87. Dans ces conditions, il nous semble que le principe posé par l’arrêt Gillespie ne s’inscrit plus dans le cadre de la jurisprudence actuelle. Nous l’avons dit, dans cet arrêt, la Cour a appliqué le principe de non‑discrimination à la seconde période décrite ci‑dessus et, plus précisément, à la rémunération du travailleur féminin pendant le congé de maternité. 88. Compte tenu des difficultés exposées ci‑dessus et de l’évolution de la jurisprudence, nous proposons à la Cour de ne pas confirmer le principe posé par l’arrêt Gillespie. Nous pensons que le droit du travailleur féminin de bénéficier de son augmentation de salaire doit désormais être fondé sur la directive 92/85. D – Sur le fondement du droit conféré au travailleur féminin 89. On le sait, la directive 92/85 a été adoptée sur la base de l’article 118 A du traité en vue d’accorder une protection spéciale aux travailleurs féminins pendant la grossesse et le congé de maternité. Le législateur communautaire a jugé que les travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes constituaient, à maints égards, un groupe de personnes à risques spécifiques et que des mesures devaient être prises pour assurer leur sécurité et leur santé (38) . Il a donc édicté une série de mesures de protection, telles que l’interdiction de licenciement des travailleuses pendant la grossesse et le congé de maternité ou la dispense de travail pour les examens prénataux. 90. Parmi ces mesures, la directive 92/85 prévoit que les travailleurs féminins doivent bénéficier d’un congé de maternité d’au moins quatorze semaines continues, dont deux semaines obligatoires. En outre, l’article 11, point 2, de la directive 92/85 prévoit que, pendant le congé de maternité, les éléments suivants doivent être assurés: