62001O0253

Ordonnance de la Cour (troisième chambre) du 29 janvier 2004. - S.A. Krüger contre Directie van de rechtspersoonlijkheid bezittende Dienst Wegverkeer. - Demande de décision préjudicielle: Arrondissementsrechtbank te Rotterdam - Pays-Bas. - Article 104, paragraphe 3, du règlement de procédure - Libre circulation des personnes - Directive 91/439/CEE - Permis de conduire - Reconnaissance mutuelle - Obligation d'échange. - Affaire C-253/01.

Recueil de jurisprudence 2004 page 00000


Parties
Motifs de l'arrêt
Décisions sur les dépenses
Dispositif

Parties


Dans l'affaire C-253/01,

ayant pour objet une demande adressée à la Cour, en application de l'article 234 CE, par l'Arrondissementsrechtbank te Rotterdam (Pays-Bas) et tendant à obtenir, dans le litige pendant devant cette juridiction entre

S.A. Krüger

et

Directie van de rechtspersoonlijkheid bezittende Dienst Wegverkeer,

une décision à titre préjudiciel sur l'interprétation, d'une part, de l'article 1er , paragraphes 1 et 2, de la directive 91/439/CEE du Conseil, du 29 juillet 1991, relative au permis de conduire (JO L 237, p. 1), telle que modifiée par la directive 96/47/CE du Conseil, du 23 juillet 1996 (JO L 235, p. 1), et, d'autre part, des dispositions du traité CE relatives à la libre circulation des personnes,

LA COUR (troisième chambre)

composée de M. A. Rosas, président de chambre, M. R. Schintgen (rapporteur) et Mme N. Colneric, juges,

avocat général: M. P. Léger,

greffier: M. R. Grass,

la juridiction de renvoi ayant été informée que la Cour se propose de statuer par voie d'ordonnance motivée conformément à l'article 104, paragraphe 3, de son règlement de procédure,

les intéressés visés à l'article 23 du statut de la Cour de justice ayant été invités à présenter leurs observations éventuelles à ce sujet,

l'avocat général entendu,

rend la présente

Ordonnance

Motifs de l'arrêt


1. Par ordonnance du 27 juin 2001, parvenue à la Cour le 2 juillet suivant, l'Arrondissementsrechtbank te Rotterdam a posé, en vertu de l'article 234 CE, deux questions préjudicielles sur l'interprétation, d'une part, de l'article 1er , paragraphes 1 et 2, de la directive 91/439/CEE du Conseil, du 29 juillet 1991, relative au permis de conduire (JO L 237, p. 1), telle que modifiée par la directive 96/47/CE du Conseil, du 23 juillet 1996 (JO L 235, p. 1, ci-après la «directive 91/439»), et, d'autre part, des dispositions du traité CE relatives à la libre circulation des personnes.

2. Ces questions ont été soulevées dans le cadre d'un litige opposant Mme Krüger à la Directie van de rechtspersoonlijkheid bezittende Dienst Wegverkeer (Direction de l'office de la circulation routière) au sujet de l'enregistrement et de l'échange aux Pays-Bas du permis de conduire dont l'intéressée est titulaire.

Le cadre juridique

La réglementation communautaire

3. Le premier considérant de la directive 91/439 est libellé comme suit:

«[...] il est souhaitable, aux fins de la politique commune des transports et en vue d'une contribution à l'amélioration de la sécurité de la circulation routière ainsi que pour faciliter la circulation des personnes qui s'établissent dans un État membre autre que celui dans lequel elles ont passé un examen de conduite, qu'il y ait un permis de conduire national de modèle communautaire reconnu mutuellement par les États membres sans obligation d'échange».

4. Le neuvième considérant de cette même directive prévoit:

«[...] les dispositions prévues à l'article 8 de la directive 80/1263/CEE, et notamment l'obligation d'échange des permis de conduire dans le délai d'un an en cas de changement d'État de résidence normale, constituent un obstacle à la libre circulation des personnes et ne peuvent être admises compte tenu des progrès réalisés dans le cadre de l'intégration européenne».

5. L'article 1er de la directive 91/439 dispose:

«1. Les États membres établissent le permis de conduire national d'après le modèle communautaire tel que décrit à l'annexe I ou I bis conformément aux dispositions de la présente directive.

2. Les permis de conduire délivrés par les États membres sont mutuellement reconnus.

3. Lorsqu'un titulaire de permis de conduire en cours de validité acquiert sa résidence normale dans un État membre autre que celui qui a délivré le permis, l'État membre d'accueil peut appliquer au titulaire du permis ses dispositions nationales en matière de durée de validité du permis, de contrôle médical, de dispositions fiscales et peut inscrire sur le permis les mentions indispensables à sa gestion.»

6. Aux termes de l'article 2, paragraphe 2, de la directive 91/439:

«Les États membres prennent toutes dispositions utiles pour éviter les risques de falsification des permis de conduire.»

7. En vertu de l'article 7, paragraphe 5, de cette même directive, une personne ne peut être titulaire que d'un seul permis de conduire délivré par un État membre.

8. L'article 8 de la directive 91/439 prévoit:

«1. Dans le cas où le titulaire d'un permis de conduire en cours de validité délivré par un État membre a établi sa résidence normale dans un autre État membre, il peut demander l'échange de son permis contre un permis équivalent; il appartient à l'État membre qui procède à l'échange de vérifier, le cas échéant, si le permis présenté est effectivement en cours de validité.

2. Sous réserve du respect du principe de territorialité des lois pénales et de police, l'État membre de résidence normale peut appliquer au titulaire d'un permis de conduire délivré par un autre État membre ses dispositions nationales concernant la restriction, la suspension, le retrait ou l'annulation du droit de conduire et, si nécessaire, procéder à ces fins à l'échange de ce permis.

3. L'État membre qui procède à l'échange renvoie l'ancien permis aux autorités de l'État membre qui l'a délivré, en précisant les raisons de cette procédure.

4. Un État membre peut refuser de reconnaître, à une personne faisant l'objet sur son territoire d'une des mesures visées au paragraphe 2, la validité de tout permis de conduire établi par un autre État membre.

Un État membre peut de même refuser de délivrer un permis de conduire à un candidat qui fait l'objet d'une telle mesure dans un autre État membre.

[...]»

La réglementation nationale

9. Aux Pays-Bas, les dispositions régissant le permis de conduire sont principalement contenues dans la réglementation générale relative à la circulation routière, dont fait partie la Wegenverkeerswet (loi sur la circulation routière), du 21 avril 1994 (Stbl. 1994, nº 475), telle que modifiée (Stbl. 1996, nº 276, ci-après la «WVW 1994»).

10. Conformément à l'article 107, paragraphe 1, de la WVW 1994, le conducteur d'un véhicule à moteur roulant sur la voie publique doit posséder un permis de conduire délivré par l'autorité compétente l'autorisant à conduire ce véhicule, étant entendu que l'autorité visée est celle qui est compétente aux Pays-Bas. Le paragraphe 2 de ce même article précise les différentes caractéristiques auxquelles ce permis doit répondre et prévoit notamment que celui-ci doit être en cours de validité.

11. L'article 108, paragraphe 1, sous h), de la WVW 1994 dispose:

«1. L'article 107 ne s'applique pas aux conducteurs de:

[...]

h) véhicules à moteur si ces conducteurs résident aux Pays-Bas et que l'autorité compétente d'un autre État membre des Communautés européennes ou d'un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen leur a délivré un permis de conduire valable pour la conduite d'un véhicule à moteur tel que celui avec lequel ils roulent, pendant la durée de validité aux Pays-Bas fixée lors de l'enregistrement de ce permis au registre des permis de conduire ou, si ce permis n'est pas enregistré au registre des permis de conduire ou si la durée de validité aux Pays-Bas fixée lors de l'enregistrement est inférieure à un an, tant qu'une année ne s'est pas écoulée depuis le jour de leur établissement aux Pays-Bas.»

12. Aux termes de l'article 109 de la WVW 1994:

«1. La durée de validité aux Pays-Bas fixée lors de l'enregistrement, visé à l'article 108, paragraphe 1, sous h), est de:

a) 10 ans à compter de la date de la délivrance si le permis de conduire a été délivré à une personne qui n'avait pas encore atteint l'âge de 60 ans à la date de la délivrance;

[...]»

13. En vertu de l'article 122, paragraphe 1, de la WVW 1994, un permis de conduire délivré à un demandeur qui n'a pas encore atteint l'âge de 60 ans a une durée de validité de 10 ans à compter du jour de sa délivrance. Lorsque le demandeur a entre 60 et 65 ans, le permis de conduire est valable du jour de sa délivrance jusqu'au jour où le demandeur atteint l'âge de 70 ans. Lorsque le demandeur est âgé de 65 ans ou plus, le permis de conduire a une durée de validité de 5 ans à partir de sa délivrance.

14. L'article 177, paragraphe 1, de la WVW 1994 assortit la conduite sans permis de conduire, avec un permis de conduire périmé ou avec un permis de conduire ne répondant pas aux exigences établies en la matière par ou en vertu de cette loi d'une sanction pénale, à savoir une peine d'emprisonnement de deux mois au maximum ou une amende.

15. L'article 2, paragraphe 1, de la Wet administratiefrechtelijke handhaving verkeersvoorschriften (loi relative à la mise en oeuvre administrative des règles de circulation), du 3 juillet 1989 (Stbl. 1989, n° 300), telle que modifiée en dernier lieu par la loi du 28 octobre 1999 (Stbl. 1999, nº 469, ci-après la «WAHV»), prévoit, en ce qui concerne certains comportements contraires aux dispositions établies par ou en vertu de la WVW 1994, l'application de sanctions administratives à la place des sanctions pénales établies par cette dernière.

Le litige au principal et les questions préjudicielles

16. Il ressort de l'ordonnance de renvoi que Mme Krüger, ressortissante allemande, réside et travaille aux Pays-Bas depuis janvier 1996. Elle est titulaire d'un permis de conduire délivré par les autorités allemandes le 2 septembre 1983. Ce permis a, conformément au droit allemand, une durée de validité illimitée. Afin de se conformer à l'article 108, paragraphe 1, sous h), de la WVW 1994, Mme Krüger a, par lettre du 14 juin 1996, demandé à la Direction de l'office de la circulation routière d'enregistrer ledit permis. Par décision du 1er octobre 1996, cette dernière a refusé de faire droit à ladite demande au motif que le permis en cause avait été délivré plus de 10 ans auparavant. En application de la législation néerlandaise un tel permis ne pourrait être enregistré mais devrait être échangé contre un permis de conduire néerlandais.

17. Mme Krüger a introduit un recours à l'encontre de cette décision devant l'Arrondissementsrechtbank te Rotterdam en faisant valoir que le refus de donner suite à la demande d'enregistrement du permis de conduire, d'une part, constitue une entrave à la libre circulation des personnes ne pouvant être justifiée par des raisons objectives d'intérêt général et, d'autre part, est contraire au principe de la reconnaissance mutuelle des permis de conduire figurant à l'article 1er , paragraphe 2, de la directive 91/439, tel qu'interprété par la Cour dans son arrêt du 29 février1996, Skanavi et Chryssanthakopoulos (C-193/94, Rec. p. I-929).

18. Devant cette juridiction, la Direction de l'office de la circulation routière a soutenu que l'impossibilité d'enregistrer un permis de conduire délivré plus de 10 ans auparavant ne constitue pas une entrave à la libre circulation des personnes puisqu'elle est indistinctement applicable aux titulaires d'un permis de conduire néerlandais et aux titulaires d'un permis de conduire délivré par un autre État membre. En tout état de cause, à supposer même que la législation néerlandaise soit constitutive d'une telle entrave, celle-ci serait justifiée par rapport à l'objectif poursuivi, à savoir le renouvellement des permis de conduire tous les 10 ans. Elle a ajouté que la directive 91/439 ne s'oppose pas à ce que le titulaire d'un permis de conduire allemand, qui s'établit aux Pays-Bas, soit obligé de procéder à l'échange de ce permis contre un permis de conduire néerlandais.

19. Dans son ordonnance de renvoi, l'Arrondissementsrechtbank te Rotterdam constate que, pour une personne se trouvant dans une situation telle que celle de Mme Krüger, les dispositions de la WVW 1994 entraînent en fait l'existence ou, à tout le moins, la naissance d'une obligation d'échanger son permis de conduire dans un délai d'un an si elle ne veut pas entrer en conflit avec la loi. Or, il semblerait ressortir tant du neuvième considérant de la directive 91/439 que du point 42 de l'arrêt du 29 octobre 1998, Awoyemi (C-230/97, Rec. p. I-6781), que ladite directive impose aux États membres d'éviter que le titulaire d'un permis de conduire délivré par un État membre soit obligé d'échanger ce permis contre un permis de conduire délivré par l'État membre d'accueil.

20. Estimant que, dans ces conditions, la solution du litige pendant devant lui nécessite l'interprétation du droit communautaire, l'Arrondissementsrechtbank te Rotterdam a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

«1) Faut-il considérer comme conforme à la directive 91/439 - et plus précisément à son article 1er , paragraphes 1 et 2, - une réglementation nationale de mise en oeuvre des dispositions de cette directive qui prévoit l'existence, ou du moins la naissance, à la charge du titulaire d'un permis de conduire délivré pour une durée illimitée par les autorités allemandes, d'une obligation d'échanger ce permis dans le délai d'un an à compter de l'établissement de sa résidence normale aux Pays-Bas, au motif qu'un permis de conduire délivré il y a plus de 10 ans dans un autre État membre ne peut être enregistré aux Pays-Bas et que, faute d'enregistrement, son titulaire se rend coupable d'un fait délictueux en conduisant un véhicule à moteur aux Pays-Bas?

2) Une réglementation nationale comme celle visée dans la première question, qui produit les conséquences qui y sont décrites, constitue-t-elle un obstacle à la libre circulation des personnes et, si oui, cet obstacle peut-il être justifié par des considérations se rattachant à la possibilité d'actualiser périodiquement les données mentionnées sur le document en question ainsi que par l'adaptation aux avancées techniques concernant les exigences à imposer à ce document du point de vue de la sécurisation et de la lutte contre la fraude?»

Sur la première question

21. Par sa première question, la juridiction de renvoi demande en substance si l'article 1er , paragraphes 1 et 2, de la directive 91/439 doit être interprété en ce sens qu'il s'oppose à une réglementation d'un État membre qui prévoit, à la charge des titulaires d'un permis de conduire délivré par un autre État membre qui se sont établis sur son territoire, une obligation d'échanger ledit permis contre un permis de conduire national au motif qu'un permis de conduire délivré par un autre État membre et qui n'est pas conforme aux dispositions en matière de durée de validité applicables dans l'État membre d'accueil ne peut pas être inscrit au registre des permis de conduire de ce dernier État.

22. Considérant que la réponse à la question posée peut être clairement déduite de sa jurisprudence, la Cour a, conformément à l'article 104, paragraphe 3, de son règlement de procédure, informé la juridiction de renvoi qu'elle se proposait de statuer par voie d'ordonnance motivée et invité les parties visées à l'article 23 du statut de la Cour de justice à présenter leurs observations éventuelles à ce sujet.

23. Le gouvernement du Royaume-Uni et la Commission n'ont émis aucune objection quant à l'intention de la Cour de statuer par voie d'ordonnance motivée. En revanche, Mme Krüger, les gouvernements néerlandais, espagnol et finlandais ont exprimé un avis contraire.

24. En vue de répondre à la question ainsi reformulée, il convient de relever, en premier lieu, qu'il ressort des points 60 à 63 et 67 à 70 de l'arrêt du 10 juillet 2003, Commission/Pays-Bas (C-246/00, non encore publié au Recueil), que la directive 91/439 s'oppose à une réglementation d'un État membre qui prévoit l'enregistrement obligatoire des permis de conduire délivrés par les autres États membres lorsque leurs titulaires s'établissent sur son territoire.

25. Ainsi, après avoir rappelé aux points 60 et 61 de l'arrêt Commission/Pays-Bas, précité, que, conformément à la jurisprudence, d'une part, la reconnaissance mutuelle des permis de conduire prévue à l'article 1er , paragraphe 2, de la directive 91/439 doit être assurée sans aucune formalité (voir arrêts précités Skanavi et Chryssanthakopoulos, point 26, ainsi que Awoyemi, point 41) et, d'autre part, l'obligation de reconnaissance mutuelle des permis de conduire est une obligation claire et inconditionnelle à l'égard de laquelle les États membres ne disposent d'aucune marge d'appréciation quant aux modalités à adopter pour s'y conformer (voir arrêt Awoyemi, précité, point 42), la Cour a jugé, au point 63 du même arrêt, que l'enregistrement obligatoire d'un permis de conduire délivré par un autre État membre, prévu par la législation néerlandaise, constitue une formalité, au sens de la jurisprudence précitée, et est donc contraire au principe de la reconnaissance mutuelle des permis de conduire énoncé à l'article 1er , paragraphe 2, de la directive 91/439.

26. Elle a également jugé, aux points 67 à 70 de l'arrêt Commission/Pays-Bas, précité, que l'enregistrement obligatoire des permis de conduire délivrés par un autre État membre n'est pas indispensable pour permettre à un État membre de faire usage de la faculté, prévue à l'article 1er , paragraphe 3, de la directive 91/439, d'appliquer au titulaire d'un permis de conduire délivré par un autre État membre qui s'est établi aux Pays-Bas ses dispositions nationales en matière de durée de validité du permis, de contrôle médical ainsi que de fiscalité et d'inscrire sur le permis les mentions indispensables à sa gestion.

27. À cet égard, la Cour a relevé, tout d'abord, que le fait qu'un permis délivré par un autre État membre n'est pas enregistré aux Pays-Bas ne s'oppose pas à ce que, à l'occasion de contrôles routiers, les autorités néerlandaises puissent correctement appliquer les dispositions nationales en matière de durée de validité des permis de conduire en calculant une période de 10 ans à compter de la date de délivrance mentionnée sur ledit permis.

28. Elle a considéré, ensuite, que l'enregistrement litigieux n'apparaît pas non plus indispensable pour permettre aux autorités compétentes de vérifier si les dispositions nationales relatives au renouvellement du permis de conduire et aux contrôles médicaux sont respectées, dès lors qu'il appartient au titulaire d'un permis de conduire de rapporter la preuve qu'il a respecté les dispositions en cause. Il suffirait donc d'informer les titulaires de permis de conduire délivrés par d'autres États membres des obligations qui leur incombent en vertu de la législation nationale lorsqu'ils font les démarches nécessaires pour s'établir aux Pays-Bas et d'appliquer les sanctions prévues en cas de non-respect des dispositions en cause.

29. Elle a jugé, enfin, que l'existence, dans certains États membres, de permis de conduire en polycarbonate ne rend pas non plus indispensable un enregistrement obligatoire de ces permis puisque, contrairement à ce que soutenait le gouvernement néerlandais, ces permis doivent, ainsi qu'il ressort de l'annexe I bis, point 2, de la directive 91/439, contenir un espace réservé pour l'inscription éventuelle, par l'État membre d'accueil, des mentions indispensables à leur gestion.

30. Il importe de rappeler, en second lieu, que la Cour a également jugé que les articles 1er , paragraphe 2, et 8, paragraphe 1, de la directive 91/439, lus en combinaison avec le neuvième considérant de cette même directive, interdisent aux États membres, notamment, d'exiger l'échange des permis de conduire délivrés par un autre État membre, sans considération de la nationalité du titulaire (voir, en ce sens, arrêt Awoyemi, précité, point 42).

31. Cette interprétation a été récemment confirmée par la Cour dans son arrêt Commission/Pays-Bas, précité. En effet, au point 72 de celui-ci, elle a jugé qu'il ressort du neuvième considérant de la directive 91/439 que cette dernière a expressément entendu abolir les systèmes d'échange de permis de conduire.

32. Dès lors, il y a lieu de constater qu'il résulte clairement de la jurisprudence que la directive 91/439 s'oppose à ce qu'un État membre exige l'enregistrement ou l'échange des permis de conduire qui ne sont pas délivrés par ses propres autorités lorsque les titulaires desdits permis s'établissent sur son territoire.

33. Il en découle que la directive 91/439 s'oppose à une réglementation nationale, telle que celle en cause au principal, qui prévoit, à la charge des titulaires d'un permis de conduire délivré par un État membre autre que l'État membre d'accueil, une obligation d'enregistrement et, le cas échéant, une obligation d'échange dudit permis contre un permis de conduire national.

34. Il convient d'ajouter que, ainsi qu'il ressort déjà du point 28 de la présente ordonnance, il appartient au titulaire d'un permis de conduire délivré par un État membre qui acquiert sa résidence normale sur le territoire d'un autre État membre, qui a fait usage de la faculté prévue à l'article 1er , paragraphe 3, de la directive 91/439, de rapporter la preuve qu'il remplit les conditions énoncées par les dispositions de l'État membre d'accueil relatives au renouvellement du permis de conduire. Toutefois, dès lors que cette preuve est rapportée, il appartient aux autorités de l'État membre d'accueil d'en tirer les conséquences et d'autoriser ledit titulaire à conduire un véhicule sous couvert de son permis de conduire d'origine.

35. Cette conclusion n'est pas remise en cause par l'argument du gouvernement néerlandais selon lequel la circonstance qu'un État membre est empêché d'exiger des ressortissants communautaires qui résident sur son territoire qu'ils échangent leur permis de conduire délivré par un autre État membre contre un permis de conduire national, alors que les titulaires d'un tel permis national, qui sont principalement des ressortissants de l'État membre d'accueil, sont obligés d'échanger ce permis tous les 10 ans contre un nouveau permis, constituerait une discrimination à l'égard des ressortissants de cet État membre.

36. En effet, ainsi qu'il ressort de la jurisprudence de la Cour, les éventuelles discriminations dont les ressortissants d'un État membre peuvent faire l'objet au regard du droit de cet État relèvent du champ d'application de ce droit, en sorte qu'elles doivent être résolues dans le cadre du système juridique interne dudit État (arrêt du 5 juin 1997, Uecker et Jacquet, C-64/96 et C-65/96, Rec. p. I-3171, point 23).

37. Eu égard à ces considérations, il y a lieu de répondre à la première question, telle que reformulée, que l'article 1er , paragraphes 1 et 2, de la directive 91/439 doit être interprété en ce sens qu'il s'oppose à une réglementation d'un État membre qui prévoit, dans certaines circonstances, à la charge des titulaires d'un permis de conduire délivré par un autre État membre qui se sont établis sur son territoire, une obligation d'échanger ledit permis contre un permis de conduire national au motif qu'un permis de conduire délivré par un autre État membre et qui n'est pas conforme aux dispositions en matière de durée de validité applicables dans l'État membre d'accueil ne peut pas être inscrit au registre des permis de conduire de ce dernier État.

Il appartient au titulaire d'un permis de conduire délivré par un État membre qui acquiert sa résidence normale sur le territoire d'un autre État membre, qui a fait usage de la faculté prévue à l'article 1er , paragraphe 3, de la directive 91/439, de rapporter la preuve qu'il remplit les conditions énoncées par les dispositions de l'État membre d'accueil relatives au renouvellement du permis de conduire. Toutefois, dès lors que cette preuve est rapportée, il appartient aux autorités de l'État membre d'accueil d'en tirer les conséquences et d'autoriser ledit titulaire à conduire un véhicule sous couvert de son permis de conduire d'origine.

Sur la seconde question

38. Eu égard à la réponse donnée à la première question, il n'y a pas lieu de répondre à la seconde question.

Décisions sur les dépenses


Sur les dépens

39. Les frais exposés par les gouvernements néerlandais, espagnol, italien, finlandais et du Royaume-Uni, ainsi que par la Commission, qui ont soumis des observations à la Cour, ne peuvent faire l'objet d'un remboursement. La procédure revêtant, à l'égard des parties au principal, le caractère d'un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens.

Dispositif


Par ces motifs,

LA COUR (troisième chambre)

statuant sur les questions à elle soumises par l'Arrondissementsrechtbank te Rotterdam, par ordonnance du 27 juin 2001, dit pour droit:

L'article 1 er , paragraphes 1 et 2, de la directive 91/439/CEE du Conseil, du 29 juillet 1991, relative au permis de conduire, telle que modifiée par la directive 96/47/CE du Conseil, du 23 juillet 1996, doit être interprété en ce sens qu'il s'oppose à une réglementation d'un État membre qui prévoit, dans certaines circonstances, à la charge des titulaires d'un permis de conduire délivré par un autre État membre qui se sont établis sur son territoire, une obligation d'échanger ledit permis contre un permis de conduire national au motif qu'un permis de conduire délivré par un autre État membre et qui n'est pas conforme aux dispositions en matière de durée de validité applicables dans l'État membre d'accueil ne peut pas être inscrit au registre des permis de conduire de ce dernier État.

Il appartient au titulaire d'un permis de conduire délivré par un État membre qui acquiert sa résidence normale sur le territoire d'un autre État membre, qui a fait usage de la faculté prévue à l'article 1er , paragraphe 3, de la directive 91/439, de rapporter la preuve qu'il remplit les conditions énoncées par les dispositions de l'État membre d'accueil relatives au renouvellement du permis de conduire. Toutefois, dès lors que cette preuve est rapportée, il appartient aux autorités de l'État membre d'accueil d'en tirer les conséquences et d'autoriser ledit titulaire à conduire un véhicule sous couvert de son permis de conduire d'origine.