1. Recours en annulation — Compétence du juge communautaire — Substitution au destinataire d’une décision d’une institution communautaire d’un nouveau destinataire — Exclusion en l’absence de disparition du destinataire désigné — (Art. 229 CE et 230, al. 4, CE)
2. Recours en annulation — Recours introduit par la personne physique ou morale destinataire de l’acte attaqué — Transfert du recours à une tierce personne — Inadmissibilité — (Art. 229 CE et 230, al. 4, CE)
3. Concurrence — Règles communautaires — Infractions — Imputation — Personne physique ou morale exploitant l’entreprise lors de l’infraction — Prise en charge de la responsabilité par une autre personne ayant repris l’exploitation — Admissibilité — Portée
4. Droit communautaire — Principes — Droits fondamentaux — Présomption d’innocence — Procédure en matière de concurrence — Applicabilité
5. Concurrence — Procédure administrative — Décision de la Commission constatant une infraction — Mode de preuve — Recours à un faisceau d’indices — Degré de force probante requis s’agissant des indices pris individuellement — (Art. 81, § 1, CE)
6. Concurrence — Procédure administrative — Décision de la Commission constatant une infraction consistant en la conclusion d’un accord anticoncurrentiel — Décision s’appuyant sur des preuves documentaires — Obligations probatoires des entreprises contestant la réalité de l’infraction — (Art. 85, § 1, CE)
7. Concurrence — Ententes — Accords entre entreprises — Atteinte à la concurrence — Critères d’appréciation — Objet anticoncurrentiel — Constatation suffisante — [Art. 81, § 1, c), CE]
8. Concurrence — Ententes — Accords entre entreprises — Preuve de l’infraction à la charge de la Commission — Limites — [Art. 81, § 1, c), CE]
9. Concurrence — Ententes — Accords entre entreprises — Preuve — Réponse d’une entreprise à une demande de renseignements de la Commission — Déclaration d’une entreprise contestée par d’autres entreprises — Déposition faite devant un procureur — Valeur probante — Appréciation — (Règlement du Conseil nº 17, art. 11)
10. Concurrence — Ententes — Accords entre entreprises — Preuve de l’infraction — Production par la Commission d’un document sans révélation de sa source — Admissibilité
11. Concurrence — Ententes — Participation à des réunions d’entreprises ayant un objet anticoncurrentiel — Circonstance permettant, en l’absence de distanciation par rapport aux décisions prises, de conclure à la participation à l’entente subséquente — (Art. 81, § 1, CE)
12. Concurrence — Procédure administrative — Décision de la Commission constatant une infraction — Éléments de preuve devant être réunis — Degré de précision exigé quant aux types de produits couverts par l’infraction — (Art. 81, § 1, CE)
13. Procédure — Preuve — Charge de la preuve — Transfert de la requérante vers la défenderesse dans un cas particulier — Incapacité de la Commission à préciser la date d’expiration d’un accord avec un État tiers conclu par ses soins
14. Concurrence — Ententes — Accords et pratiques concertées constitutifs d’une infraction unique — Entreprises pouvant se voir reprocher l’infraction consistant à participer à une entente globale — Critères — (Art. 81, § 1, CE)
15. Concurrence — Ententes — Affectation du commerce entre États membres — Critères — (Art. 81, § 1, CE)
16. Actes des institutions — Motivation — Obligation — Portée — (Art. 253 CE)
17. Recours en annulation — Moyens — Violation des droits de la défense — Illégalité subjective par nature excluant un examen d’office par le juge — (Art. 230 CE ; règlement de procédure du Tribunal, art. 48, § 2)
18. Concurrence — Procédure administrative — Décision de la Commission constatant une infraction — Décision non identique à la communication des griefs — Violation des droits de la défense — Condition — Impossibilité pour l’entreprise de se défendre à propos d’un grief finalement retenu — (Règlement du Conseil nº 17, art. 19, § 1)
19. Concurrence — Procédure administrative — Communication des griefs — Contenu nécessaire — (Règlement du Conseil nº 17, art. 19, § 1)
20. Concurrence — Procédure administrative — Compétences respectives de la Commission et de l’autorité de surveillance de l’Association européenne de libre-échange — Principe du guichet unique — Ouverture d’une procédure sur la base à la fois des dispositions du traité CE et de celles de l’accord sur l’Espace économique européen — Admissibilité — Condition — Impossibilité, à ce stade, de déterminer l’autorité compétente pour constater et sanctionner l’infraction supposée — (Art. 81 CE ; accord EEE, art. 56 et 109 ; règlement nº 17)
21. Concurrence — Amendes — Montant — Détermination — Non-imposition ou réduction de l’amende en contrepartie de la coopération de l’entreprise incriminée — Respect du principe d’égalité de traitement — (Règlement du Conseil nº 17, art. 15, § 2)
22. Concurrence — Amendes — Montant — Détermination — Critères — Coopération de l’entreprise durant la procédure administrative — Notion — Simple fourniture d’informations demandées sans reconnaissance de la réalité de l’infraction — Exclusion — (Règlement du Conseil nº 17, art. 15, § 2)
23. Concurrence — Amendes — Montant — Détermination — Critères — Gravité de l’infraction — (Règlement du Conseil nº 17, art. 15, § 2)
24. Concurrence — Amendes — Montant — Détermination — Marge d’appréciation réservée à la Commission — Limites — Respect des lignes directrices arrêtées par la Commission — Respect des règles et des principes généraux du droit communautaire — (Règlement du Conseil nº 17, art. 15 ; communication de la Commission 98/C 9/03)
25. Concurrence — Amendes — Montant — Pouvoir d’appréciation de la Commission — Contrôle juridictionnel — Compétence de pleine juridiction — Condition d’exercice — Portée — (Art. 229 CE ; règlement du Conseil nº 17, art. 17)
1. L’ayant cause à titre universel d’une personne physique ou morale disparue lui est nécessairement substitué de plein droit en tant que destinataire d’un acte d’une institution et peut donc poursuivre une action en annulation qu’elle avait engagée.
En revanche, le juge communautaire n’est compétent ni dans le contexte d’un recours en annulation au titre de l’article 230 CE, ni même dans l’exercice de son pouvoir de pleine juridiction au titre de l’article 229 CE en ce qui concerne les sanctions pour réformer la décision d’une institution communautaire en substituant au destinataire de celle-ci une autre personne physique ou morale alors que ledit destinataire existe encore. Cette compétence appartient a priori à la seule institution qui a adopté la décision en cause. Ainsi, une fois que l’institution compétente a adopté une décision et, partant, déterminé l’identité de la personne à qui il y a lieu d’adresser celle-ci, il n’appartient pas au Tribunal de substituer une autre personne à cette dernière.
(cf. points 46-47)
2. Le recours introduit par une personne en qualité de destinataire d’un acte pour faire valoir ses droits dans le contexte d’une demande en annulation conformément à l’article 230 CE et/ou d’une demande de réformation conformément à l’article 229 CE ne peut pas être transféré à une tierce personne qui n’est pas le destinataire de celui-ci. En effet, si un tel transfert devait être admis, il y aurait une discordance entre la qualité au titre de laquelle le recours a été introduit et la qualité au titre de laquelle il serait prétendument poursuivi. De plus, un tel transfert donnerait lieu à une discordance entre l’identité du destinataire de l’acte et celle de la personne agissant en justice en qualité de destinataire.
(cf. point 48)
3. La personne sous la responsabilité de laquelle l’exploitation d’une entreprise est désormais placée peut, au stade de la procédure administrative devant la Commission, assumer, par une déclaration en ce sens, la responsabilité des faits reprochés au responsable réel, même si, en principe, il incombe à la personne physique ou morale qui dirigeait l’entreprise en cause au moment où l’infraction a été commise de répondre de celle-ci. Toutefois, une telle déclaration ne saurait avoir pour effet de modifier l’identité du destinataire d’une décision de la Commission une fois que celle-ci a été adoptée, ni celle de la requérante dans un recours en annulation contre une telle décision une fois que celui-ci a été introduit.
(cf. point 50)
4. Le principe de la présomption d’innocence, tel qu’il résulte notamment de l’article 6, paragraphe 2, de la convention européenne des droits de l’homme, fait partie des droits fondamentaux qui, selon la jurisprudence de la Cour, par ailleurs réaffirmée par le préambule de l’Acte unique européen et par l’article 6, paragraphe 2, du traité sur l’Union européenne ainsi que par l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, sont protégés dans l’ordre juridique communautaire. Eu égard à la nature des infractions en cause ainsi qu’à la nature et au degré de sévérité des sanctions qui s’y rattachent, le principe de la présomption d’innocence s’applique notamment aux procédures relatives à des violations des règles de concurrence applicables aux entreprises susceptibles d’aboutir à la prononciation d’amendes ou d’astreintes.
Il s’ensuit que l’existence d’un doute dans l’esprit du juge doit profiter à l’entreprise destinataire de la décision constatant une infraction. Le juge ne saurait donc conclure que la Commission a, comme elle y est tenue, établi l’existence de l’infraction en cause à suffisance de droit si un doute subsiste encore dans son esprit sur cette question.
(cf. points 173, 177-178)
5. En matière de concurrence, il est nécessaire que la Commission fasse état de preuves précises et concordantes pour fonder la ferme conviction que l’infraction qu’elle a retenue a été commise.
Toutefois, chacune des preuves apportées par la Commission ne doit pas nécessairement répondre à ces critères par rapport à chaque élément de l’infraction. Il suffit que le faisceau d’indices invoqué par l’institution, apprécié globalement, réponde à cette exigence. Dès lors, la circonstance selon laquelle un document ne se réfère qu’à certains des faits évoqués dans d’autres éléments de preuve ne suffit pas à obliger la Commission à écarter ce document du faisceau d’indices retenus à charge.
(cf. points 179-180, 238, 263)
6. Dès lors que, pour prouver l’infraction qu’elle a entendu sanctionner, à savoir la conclusion d’un accord ayant un objet anticoncurrentiel prohibé par l’article 81, paragraphe 1, sous c), CE, la Commission s’appuie sur des preuves documentaires, les entreprises mises en cause ne peuvent utilement contester l’existence de l’infraction qu’en démontrant que les preuves retenues sont insuffisantes pour établir l’existence de l’accord illicite. Il ne leur est d’aucun secours de tenter de prouver que la conclusion d’un accord n’allait pas dans le sens de leur intérêt commercial ou que le comportement qu’elles ont effectivement adopté sur le marché pourrait s’expliquer autrement que par l’existence d’un accord anticoncurrentiel.
(cf. points 181-187)
7. Dès lors que la Commission a pour mission de sanctionner les infractions à l’article 81, paragraphe 1, CE et que les accords consistant à « répartir les marchés ou les sources d’approvisionnement » sont expressément mentionnés à l’article 81, paragraphe 1, sous c), CE comme étant interdits au titre de cette disposition, il lui suffit donc d’établir qu’un accord entre entreprises susceptible d’affecter le commerce entre États membres a eu pour objet ou pour effet de répartir les marchés communautaires d’un ou de plusieurs produits entre elles pour que cet accord soit constitutif d’une infraction.
(cf. point 202)
8. S’il incombe nécessairement à la Commission, lorsqu’elle entend sanctionner une infraction à l’article 81, paragraphe 1, sous c), CE, d’établir qu’un accord illicite de partage des marchés a été conclu, il serait excessif d’exiger, en outre, qu’elle apporte la preuve du mécanisme spécifique par lequel ce but devait être atteint. En effet, il serait trop aisé pour une entreprise coupable d’une infraction d’échapper à toute sanction si elle pouvait tirer argument du caractère vague des informations présentées par rapport au fonctionnement d’un accord illicite dans une situation dans laquelle l’existence de l’accord et son but anticoncurrentiel sont pourtant établis de manière suffisante. Les entreprises peuvent se défendre utilement dans une telle situation pour autant qu’elles aient la possibilité de commenter tous les éléments de preuve invoqués à leur charge par la Commission.
(cf. points 203, 317)
9. Les réponses données à la demande de renseignements adressée par la Commission en vertu de l’article 11 du règlement nº 17, au nom d’une entreprise en tant que telle, sont revêtues d’une crédibilité surpassant celle que pourrait avoir la réponse donnée par un membre de son personnel quelles que soient l’expérience ou l’opinion personnelles de ce dernier.
Cependant, la déclaration d’une entreprise mise en cause pour avoir participé à une entente, dont l’exactitude est contestée par plusieurs autres entreprises, elles aussi mises en cause, ne peut être considérée comme constituant une preuve suffisante de l’existence d’une infraction commise par ces dernières sans être étayée par d’autres éléments de preuve.
Par ailleurs, les déclarations allant à l’encontre des intérêts du déclarant doivent, en principe, être considérées comme des éléments de preuve particulièrement fiables. En particulier, le fait pour une personne à qui l’on demande de commenter des documents d’avouer qu’elle a commis une infraction et d’admettre ainsi l’existence de faits qui dépassent ceux dont l’existence pouvait être déduite de manière directe des documents en question implique a priori, en l’absence de circonstances particulières de nature à indiquer le contraire, que cette personne a pris la résolution de dire la vérité.
Enfin, si une déposition faite devant un procureur n’a certes pas la même valeur qu’un témoignage fait sous serment devant une juridiction, il convient de considérer que la contrainte, résultant des pouvoirs d’enquête dont dispose un procureur, et les conséquences négatives pouvant découler sur le plan pénal pour un déposant qui aurait menti dans le cadre d’une enquête sont des circonstances qui rendent une telle déposition plus fiable qu’une simple déclaration.
(cf. points 205, 211-212, 219, 296, 312)
10. Le principe qui prévaut en droit communautaire est celui de la libre administration des preuves et le seul critère pertinent pour apprécier les preuves produites réside dans leur crédibilité. Cette crédibilité ne saurait être refusée à un document au motif que la Commission qui le produit se refuse à en révéler la source, car il peut être nécessaire pour la Commission de protéger l’anonymat de ses informateurs.
(cf. point 273)
11. Dès lors qu’une entreprise participe à des réunions entre entreprises ayant un objet anticoncurrentiel, et qu’elle ne se distancie pas publiquement du contenu de celles-ci, donnant ainsi à penser aux autres participants qu’elle participe à l’entente résultant desdites réunions et qu’elle s’y conformera, il peut être considéré qu’elle participe à l’entente en question.
(cf. point 327)
12. Si une décision sanctionnant un accord, prise dans son ensemble, fait apparaître que l’infraction retenue a porté sur un type particulier de produits et mentionne les éléments de preuve au soutien d’une telle conclusion, le fait que cette décision ne contient pas une énonciation précise et exhaustive de tous les types de produits couverts par l’infraction ne saurait suffire, à lui seul, pour justifier son annulation. Si tel n’était pas le cas, une entreprise pourrait échapper à toute sanction malgré le fait que la Commission avait établi avec certitude qu’elle avait commis une infraction dans des circonstances où l’identité des produits spécifiques, visés parmi une gamme de produits similaires commercialisés par l’entreprise en cause, n’aurait pas été établie.
(cf. point 336)
13. Si, d’une manière générale, une partie requérante ne peut transférer la charge de la preuve à la partie défenderesse en se prévalant de circonstances qu’elle n’est pas en mesure d’établir, la notion de charge de la preuve ne saurait, lorsque la Commission a décidé de ne pas retenir l’existence d’une infraction aux règles de concurrence pour la période durant laquelle des accords d’autolimitation conclus entre un pays tiers et la Communauté, représentée par la Commission, étaient en vigueur, être appliquée au bénéfice de la Commission, en ce qui concerne la date d’expiration desdits accords. En effet, l’incapacité inexplicable de la Commission à produire des éléments de preuve relatifs à une circonstance qui la concerne directement prive le Tribunal de la possibilité de statuer en connaissance de cause en ce qui concerne ladite date d’expiration et il serait contraire au principe de bonne administration de la justice de faire supporter les conséquences de cette incapacité de la Commission aux entreprises destinataires de la décision attaquée, qui, à la différence de l’institution défenderesse, ne sont pas en mesure d’apporter la preuve qui fait défaut.
(cf. points 342-344)
14. Une entreprise peut être tenue pour responsable d’une entente globale même s’il est établi qu’elle n’a participé directement qu’à un ou plusieurs des éléments constitutifs de celle-ci, dès lors, d’une part, qu’elle savait, ou devait nécessairement savoir, que la collusion à laquelle elle participait, en particulier au travers de réunions régulières organisées durant plusieurs années, s’inscrivait dans un dispositif d’ensemble destiné à fausser le jeu normal de la concurrence, et, d’autre part, que ce dispositif recouvrait l’ensemble des éléments constitutifs de l’entente.
De même, le fait que différentes entreprises aient joué des rôles différents dans la poursuite d’un objectif commun n’élimine pas l’identité d’objet anticoncurrentiel et, partant, d’infraction, à condition que chaque entreprise ait contribué, à son propre niveau, à la poursuite de l’objectif commun.
(cf. point 370)
15. Pour être susceptibles d’affecter le commerce entre États membres, une décision, un accord ou une pratique concertée doivent, sur la base d’un ensemble d’éléments de fait et de droit, permettre d’envisager avec un degré de probabilité suffisant qu’ils puissent exercer une influence directe ou indirecte, actuelle ou potentielle, sur les courants d’échanges entre États membres. Il s’ensuit que la Commission n’est pas tenue de démontrer l’existence réelle d’une telle affectation du commerce, une influence potentielle étant suffisante. Toutefois, il importe que cette influence actuelle ou potentielle ne soit pas insignifiante.
(cf. point 392)
16. L’obligation de motivation d’un acte ne saurait englober une obligation pour l’institution qui en est l’auteur de motiver le fait de ne pas avoir adopté d’autres actes similaires adressés à des parties tierces.
(cf. point 414)
17. Une violation des droits de la défense, étant une illégalité subjective par sa nature, ne relève pas de la violation des formes substantielles, et, partant, ne doit pas être soulevée d’office. En conséquence, un tel moyen doit être rejeté comme irrecevable, au titre de l’article 48, paragraphe 2, du règlement de procédure, s’il a été soulevé pour la première fois par une partie dans sa réplique.
(cf. point 425)
18. Les droits de la défense ne sont violés du fait d’une discordance entre la communication des griefs et la décision finale qu’à condition qu’un grief retenu dans celle-ci n’ait pas été exposé dans celle-là d’une manière suffisante pour permettre aux destinataires de se défendre.
Il s’ensuit qu’en principe il ne saurait être reproché à la Commission de limiter la portée d’une décision finale par rapport à la communication des griefs qui la précède, dès lors que la Commission doit entendre les destinataires de celle-ci et, le cas échéant, tenir compte de leurs observations visant à répondre aux griefs retenus, précisément pour respecter leurs droits de la défense.
(cf. points 429-430)
19. L’obligation de la Commission au stade de la communication des griefs se limite à exposer les griefs avancés et à énoncer, de manière claire, les faits sur lesquels elle se fonde ainsi que la qualification qui leur est donnée, afin que ses destinataires puissent se défendre utilement. La Commission n’est pas obligée d’exposer les conclusions qu’elle tire des faits, documents et arguments juridiques.
(cf. point 453)
20. L’accord sur l’Espace économique européen (EEE), notamment ses articles 56 et 109, établit un système de « guichet unique » pour l’application des règles de concurrence, applicable dès le stade de l’instruction, de sorte que chacune des deux autorités a l’obligation de se dessaisir et de transférer son dossier à l’autre autorité si elle constate que l’autre autorité est compétente.
Toutefois, cette notion de « guichet unique » ne saurait s’appliquer dès le début de l’enquête, s’il n’est pas possible à ce stade de déterminer quelle autorité est compétente, sous peine de violer, dans l’hypothèse où l’Autorité de surveillance de l’Association européenne de libre-échange (AELE) serait saisie mais où la Commission serait finalement compétente, le principe selon lequel les dispositions de l’accord EEE ne sauraient priver la Commission de sa compétence pour enquêter sur les comportements anticoncurrentiels affectant le commerce entre États membres de la Communauté.
C’est pourquoi on ne saurait reprocher à la Commission d’ouvrir une enquête dans un secteur particulier, en invoquant comme base juridique tout à la fois l’article 81 CE, le règlement nº 17 et l’article 53 EEE, ainsi qu’une décision de l’Autorité de surveillance de l’AELE autorisant l’envoi d’une demande d’assistance à la Commission, si, au moment de cette ouverture, elle ne peut raisonnablement savoir avec certitude qu’elle est la base juridique correcte, la réponse à cette question dépendant précisément du résultat des investigations à mener.
(cf. points 489-490, 492)
21. Pour autant que des entreprises fournissent à la Commission, au même stade de la procédure administrative et dans des circonstances analogues, des informations semblables concernant les faits qui leur sont reprochés, les degrés de la coopération fournie par elles doivent être considérés comme comparables, avec la conséquence que ces entreprises doivent être traitées de manière égale s’agissant de la détermination du montant de l’amende qui leur est infligée.
(cf. points 501, 573)
22. Pour justifier la réduction du montant d’une amende au titre de la coopération, le comportement d’une entreprise doit faciliter la tâche de la Commission consistant en la constatation et la répression des infractions aux règles communautaires de la concurrence.
Ne facilite pas de manière significative la tâche de la Commission l’entreprise qui se borne à fournir les informations factuelles que la Commission lui a demandées et dont l’utilité repose exclusivement sur le fait qu’elles corroborent, dans une certaine mesure, d’autres déclarations dont la Commission dispose déjà, tout en refusant toute interprétation de celles-ci susceptible d’établir l’existence d’une infraction dans son chef, et qui n’a informé la Commission à aucun moment qu’elle reconnaissait la matérialité des faits durant la procédure administrative, tout en continuant par ailleurs à les contester devant le Tribunal.
(cf. points 499, 503-505)
23. Le montant de l’amende in fligée à une entreprise au titre d’une infraction en matière de concurrence doit être proportionné à l’infraction, appréciée dans son ensemble, en tenant compte, notamment, de la gravité de celle-ci.
Il est nécessaire de tenir compte, pour apprécier ladite gravité, d’un grand nombre d’éléments dont le caractère et l’importance varient selon le type d’infraction en cause et les circonstances particulières de celle-ci.
(cf. point 532)
24. Si la Commission jouit d’une marge d’appréciation pour fixer le montant des amendes dans les affaires de concurrence, elle ne peut se départir des règles qu’elle s’est imposées et doit tenir compte, notamment, des éléments qui sont retenus de manière impérative dans ses lignes directrices. Néanmoins, pour autant que ses lignes directrices pour le calcul des amendes ne l’obligent pas à tenir compte systématiquement d’une circonstance donnée, elle peut déterminer quels facteurs il y a lieu de prendre en compte à cette fin, ce qui lui permet d’adapter son appréciation in concreto. Son appréciation doit toutefois être effectuée dans le respect du droit communautaire, lequel inclut non seulement les dispositions du traité mais aussi les principes généraux du droit.
(cf. points 537, 553, 572)
25. Lorsqu’une entreprise qui a introduit un recours contre une décision de la Commission lui ayant infligé une amende pour violation des règles communautaires de concurrence a demandé, dans son recours, que le juge communautaire exerce sa compétence de pleine juridiction, y compris dans le contexte d’une demande de réduction du montant de l’amende, le Tribunal est habilité à réformer l’acte attaqué, même en l’absence d’annulation, en tenant compte de toutes les circonstances de fait, afin de modifier le montant de l’amende infligée. La compétence de pleine juridiction qu’attribue au juge communautaire l’article 17 du règlement nº 17, conformément à l’article 229 CE, inclut expressément le pouvoir de majorer l’amende infligée, le cas échéant.
Les agents de la Commission peuvent, sous réserve d’éventuelles instructions expresses contraires de leurs supérieurs hiérarchiques, légalement conclure à ce que le juge communautaire exerce son pouvoir de pleine juridiction pour majorer le montant d’une amende fixé par les membres de la Commission. En effet, le simple fait pour un agent de la Commission de demander au juge communautaire d’exercer un pouvoir dont dispose ce dernier et d’avancer des arguments qui pourraient, le cas échéant, justifier cette démarche ne saurait signifier que l’agent se substitue aux membres de la Commission.
(cf. points 575, 577)