61997J0253

Arrêt de la Cour (cinquième chambre) du 28 octobre 1999. - République italienne contre Commission des Communautés européennes. - FEOGA - Apurement des comptes - Exercice 1993. - Affaire C-253/97.

Recueil de jurisprudence 1999 page I-07529


Sommaire
Parties
Motifs de l'arrêt
Décisions sur les dépenses
Dispositif

Mots clés


1 Agriculture - FEOGA - Apurement des comptes - Refus de prise en charge de dépenses découlant d'irrégularités dans l'application de la réglementation communautaire - Contestation par l'État membre concerné - Charge de la preuve - Répartition entre la Commission et l'État membre

(Règlement du Conseil n_ 729/70)

2 Agriculture - Organisation commune des marchés - Sucre - Compensation des frais de stockage - Cotisation imposée aux fabricants - Principe de neutralité financière - Portée

(Règlement du Conseil n_ 1358/77, art. 6, § 2)

3 Agriculture - FEOGA - Apurement des comptes - Refus de prise en charge de dépenses découlant d'irrégularités dans l'application de la réglementation communautaire - Correction financière - Cumul de corrections analytiques et de corrections forfaitaires - Admissibilité - Conditions

4 Actes des institutions - Motivation - Obligation - Portée - Décision d'apurement des comptes FEOGA imposant une correction forfaitaire de 10% sur certaines dépenses - Nécessité d'indiquer les éléments permettant de conclure à l'existence d'un risque élevé de pertes généralisées pour le FEOGA

(Traité CE, art. 190 (devenu art. 253 CE))

Sommaire


1 En matière de financement de la politique agricole commune par le FEOGA, il appartient à la Commission, lorsqu'elle entend refuser la prise en charge d'une dépense déclarée par un État membre, de prouver l'existence d'une violation des règles de l'organisation commune des marchés agricoles. Par conséquent, la Commission est obligée de justifier sa décision constatant l'absence ou les défaillances des contrôles mis en oeuvre par l'État membre concerné. Ce dernier, pour sa part, ne saurait infirmer les constatations de la Commission sans étayer ses propres allégations par des éléments établissant l'existence d'un système fiable et opérationnel de contrôle. Dès lors qu'il ne parvient pas à démontrer que les constatations de la Commission sont inexactes, celles-ci constituent des éléments susceptibles de faire naître des doutes sérieux quant à la mise en place d'un ensemble adéquat et efficace de mesures de surveillance et de contrôle.

2 Il résulte de l'article 6, paragraphe 2, du règlement n_ 1358/77 que le système de compensation des frais de stockage dans le secteur du sucre repose sur le principe de la neutralité financière, en ce sens que les cotisations perçues doivent équivaloir aux remboursements versés. Toutefois, cet équilibre doit être atteint à l'échelle communautaire, et non au niveau de l'État membre ou de l'entreprise concernée.

3 Ne peuvent être financées par le FEOGA, mais doivent, en tout état de cause, rester à la charge de l'État membre concerné, les charges supplémentaires résultant de mesures nationales de nature à compromettre l'égalité de traitement des opérateurs économiques à l'intérieur de la Communauté et à fausser ainsi les conditions de concurrence entre les États membres.

Dès lors, s'il s'avère, lors de l'apurement des comptes FEOGA, que le risque encouru par le FEOGA ne peut pas être uniquement couvert par des corrections analytiques, d'autres corrections forfaitaires doivent être possibles. Il serait contraire au système de financement du FEOGA que, s'il existe des motifs d'opérer une correction analytique, d'autres dommages ou risques, qui ne sont pas aussi clairement déterminables, restent à la charge du FEOGA.

Aucune raison de principe ne s'oppose, par conséquent, au cumul d'une correction analytique et d'une correction forfaitaire.

4 La décision prise par la Commission, dans le cadre de l'apurement des comptes FEOGA, d'opérer une correction forfaitaire de 10% sur certaines dépenses doit être suffisamment motivée pour permettre de conclure à l'existence du risque élevé de pertes généralisées pour le FEOGA requis par le rapport Belle.

Doit donc être annulée, pour défaut de motivation, la correction forfaitaire de 10 % opérée par la Commission au titre de paiements tardifs d'achats à l'intervention de viandes bovines dès lors qu'il ne ressort ni de la décision attaquée, ni du rapport de synthèse, que les carences relevées concernent l'ensemble ou les éléments fondamentaux du système de contrôle ou encore l'exécution de contrôles essentiels destinés à garantir la régularité de la dépense.

Parties


Dans l'affaire C-253/97,

République italienne, représentée par M. le professeur U. Leanza, chef du service du contentieux diplomatique du ministère des Affaires étrangères, en qualité d'agent, assisté de M. G. De Bellis, avvocato dello Stato, ayant élu domicile à Luxembourg au siège de l'ambassade d'Italie, 5, rue Marie-Adélaïde,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par M. P. Ziotti, membre du service juridique, en qualité d'agent, assisté de Me A. Dal Ferro, avocat au barreau de Vicence, ayant élu domicile à Luxembourg, auprès de M. C. Gómez de la Cruz, membre du même service, Centre Wagner, Kirchberg,

partie défenderesse,

ayant pour objet l'annulation partielle de la décision 97/333/CE de la Commission, du 23 avril 1997, relative à l'apurement des comptes des États membres au titre des dépenses financées par le Fonds européen d'orientation et de garantie agricole (FEOGA), section «garantie», pour l'exercice financier 1993 (JO L 139, p. 30), dans sa partie concernant la République italienne,

LA COUR

(cinquième chambre),

composée de MM. J. C. Moitinho de Almeida, président de la sixième chambre, faisant fonction de président de la cinquième chambre, L. Sevón, J.-P. Puissochet, P. Jann et M. Wathelet (rapporteur), juges,

avocat général: M. S. Alber,

greffier: M. H. von Holstein, greffier adjoint,

vu le rapport d'audience,

ayant entendu les parties en leur plaidoirie à l'audience du 18 mars 1999, au cours de laquelle le gouvernement italien a été représenté par M. G. De Bellis et la Commission par M. F. Ruggeri Laderchi, membre du service juridique, en qualité d'agent, assisté de Me A. Dal Ferro,

ayant entendu l'avocat général en ses conclusions à l'audience du 6 mai 1999,

rend le présent

Arrêt

Motifs de l'arrêt


1 Par requête déposée au greffe de la Cour le 10 juillet 1997, la République italienne a, en vertu de l'article 173, premier alinéa, du traité CE (devenu, après modification, article 230, premier alinéa, CE), demandé l'annulation partielle de la décision 97/333/CE de la Commission, du 23 avril 1997, relative à l'apurement des comptes des États membres au titre des dépenses financées par le Fonds européen d'orientation et de garantie agricole (FEOGA), section «garantie», pour l'exercice financier 1993 (JO L 139, p. 30, ci-après la «décision attaquée»), dans sa partie la concernant.

2 Ce recours poursuit l'annulation de la décision attaquée en tant qu'elle a déclaré non imputables au FEOGA les sommes suivantes:

- 17 361 126 678 ITL au titre du préfinancement de la restitution à l'exportation de viande bovine;

- 2 686 311 350 ITL au titre du retrait pluriannuel de terres arables de la production;

- 76 987 797 ITL et 911 895 729 ITL au titre du remboursement des frais de stockage de sucre;

- 22 731 751 579 ITL au titre des aides à la consommation d'huile d'olive;

- 2 165 691 000 ITL et 8 155 895 000 ITL au titre de la distillation obligatoire de vin de table;

- 3 382 118 277 ITL au titre de l'abandon définitif de superficies viticoles;

- 243 553 000 ITL au titre de la soustraction anticipée des pertes de viande bovine désossée;

- 5 771 993 000 ITL au titre des ajustements comptables pour les stocks de viande bovine non désossée;

- 778 000 000 ITL au titre de paiements tardifs d'achats à l'intervention de viande bovine;

- 27 804 654 011 ITL au titre de la gestion et du contrôle inadéquats des primes pour les ovins et les caprins.

Les lignes directrices du rapport Belle et les devoirs respectifs de la Commission et des États membres en matière d'apurement des comptes FEOGA ainsi que la nature du contentieux soumis à la Cour

3 À titre liminaire, il convient de rappeler les lignes directrices à suivre lorsque des corrections financières doivent être appliquées à un État membre, définies par le rapport Belle de la Commission, ainsi que la jurisprudence constante de la Cour en matière d'apurement des comptes FEOGA et de préciser la nature du contentieux soumis à la Cour.

4 À côté de trois techniques de calcul principales, le rapport Belle prévoit, pour les cas difficiles, trois catégories de corrections forfaitaires:

«A. 2 % des dépenses, si la carence se limite à certains éléments du système de contrôle de moindre importance ou à l'exécution de contrôles qui ne sont pas essentiels pour garantir la régularité de la dépense, de sorte qu'il peut raisonnablement être conclu que le risque de pertes pour le FEOGA était mineur.

B. 5 % de la dépense, si la carence concerne des éléments importants du système de contrôle ou l'exécution de contrôles qui jouent un rôle important pour la détermination de la régularité de la dépense, de sorte qu'il peut être raisonnablement conclu que le risque de pertes pour le FEOGA était significatif.

C. 10 % de la dépense, si la carence concerne l'ensemble ou les éléments fondamentaux du système de contrôle ou encore l'exécution de contrôles essentiels destinés à garantir la régularité de la dépense, de sorte que l'on peut raisonnablement conclure qu'il existait un risque élevé de pertes généralisées pour le FEOGA.»

5 Lorsqu'il existe un doute sur la correction à appliquer, les lignes directrices prévoient qu'il y a lieu de tenir compte des points suivants en tant que circonstances atténuantes:

«- les autorités nationales ont-elles pris des mesures efficaces pour remédier aux carences dès lors que celles-ci ont été décelées?

- les carences provenaient-elles de difficultés d'interprétation des textes communautaires?»

6 Ainsi que la Cour l'a déjà relevé, seules sont financées par le FEOGA les interventions entreprises selon les règles communautaires, dans le cadre de l'organisation commune des marchés agricoles (voir arrêt du 10 novembre 1993, Pays-Bas/Commission, C-48/91, Rec. p. I-5611, point 14). À cet égard, il appartient à la Commission de prouver l'existence d'une violation des règles de l'organisation commune des marchés agricoles (voir arrêts du 24 mars 1988, Royaume-Uni/Commission, 347/85, Rec. p. 1749, point 16; du 19 février 1991, Italie/Commission, C-281/89, Rec. p. I-347, point 19; du 6 octobre 1993, Italie/Commission, C-55/91, Rec. p. I-4813, point 13, et Pays-Bas/Commission, précité, point 18). Par conséquent, la Commission est obligée de justifier sa décision constatant l'absence ou les défaillances des contrôles mis en oeuvre par l'État membre concerné (voir arrêt du 12 juin 1990, Allemagne/Commission, C-8/88, Rec. p. I-2321, point 23).

7 L'État membre concerné, pour sa part, ne saurait infirmer les constatations de la Commission sans étayer ses propres allégations par des éléments établissant l'existence d'un système fiable et opérationnel de contrôle. Dès lors qu'il ne parvient pas à démontrer que les constatations de la Commission sont inexactes, celles-ci constituent des éléments susceptibles de faire naître des doutes sérieux quant à la mise en place d'un ensemble adéquat et efficace de mesures de surveillance et de contrôle (voir, en ce sens, arrêt du 12 juin 1990, Allemagne/Commission, précité, point 28).

8 Enfin, il y a lieu de rappeler que, étant saisie d'un recours en annulation au titre de l'article 173 du traité, la Cour a uniquement pour mission d'examiner si les moyens invoqués à l'appui de celui-ci sont fondés. Il ne lui incombe pas, dans ce cadre, de majorer les corrections qui s'avéreraient insuffisantes au regard, notamment, des critères du rapport Belle.

Sur la correction au titre du préfinancement de la restitution à l'exportation de viande bovine

9 Les règlements (CEE) nos 565/80 du Conseil, du 4 mars 1980, relatif au paiement à l'avance des restitutions à l'exportation pour les produits agricoles (JO L 62, p. 5), et 3665/87 de la Commission, du 27 novembre 1987, portant modalités communes d'application du régime des restitutions à l'exportation pour les produits agricoles (JO L 351, p. 1), organisent le système de préfinancement des restitutions à l'exportation pour les produits agricoles, et notamment la viande bovine. Ce système consiste essentiellement en un régime de paiement anticipé dès que les produits transformés ou les marchandises sont placés sous contrôle douanier garantissant qu'ils seront exportés dans un délai déterminé.

10 Aux termes des articles 3, paragraphe 6, et 26, paragraphe 1, du règlement n_ 3665/87, les produits ou marchandises sont placés sous contrôle douanier à compter de l'acceptation par le service des douanes de la déclaration d'exportation comportant l'indication qu'une restitution sera demandée et jusqu'à ce qu'ils quittent le territoire douanier de la Communauté ou atteignent une destination prévue.

11 Le règlement (CEE) n_ 2388/84 de la Commission, du 14 août 1984, portant modalités particulières d'application des restitutions à l'exportation pour certaines conserves de viande bovine (JO L 221, p. 28), prévoit, en son article 2, que les conserves de viande bovine doivent être fabriquées à partir de viandes bovines d'origine communautaire et que le nom de l'État membre dans lequel le produit a été fabriqué doit être estampillé sur chaque boîte de conserve.

12 Il ressort également des règlements n_ 2388/84, (CEE) n_ 2911/91 de la Commission, du 2 octobre 1991, relatif à la vente, dans le cadre de la procédure définie au règlement (CEE) n_ 2539/84, de viandes bovines détenues par certains organismes d'intervention et destinées à être exportées après transformation, vers l'Union soviétique modifiant le règlement (CEE) n_ 569/88 et abrogeant le règlement (CEE) n_ 673/91 (JO L 276, p. 28), et (CEE) n_ 2919/92 de la Commission, du 7 octobre 1992, relatif à la vente, dans le cadre de la procédure définie au règlement (CEE) n_ 2539/84, de viandes bovines avec os détenues par certains organismes d'intervention et destinées à être exportées après transformation et modifiant le règlement (CEE) n_ 569/88 (JO L 292, p. 11), que les viandes ne peuvent être soumises à une cuisson avant l'entrée dans le régime de préfinancement.

13 La Commission fait valoir que les services du FEOGA ont opéré les constatations suivantes, reproduites au point 4.2.19 du rapport de synthèse de 1993:

- les contrôles douaniers effectués sur la viande bovine à restitution préfinancée ont été de piètre qualité en raison de leur portée limitée due, notamment, au manque de contacts entre les douanes et les autres services compétents assurant la gestion globale et la surveillance du régime;

- les étiquettes utilisées pour le scellement des boîtes contenant de la viande bovine à restitution élevée étaient imprimées et détenues par les opérateurs et leur emploi n'a été soumis à aucun contrôle;

- des quantités de viande bovine précuite ont été utilisées lors des opérations de transformation sous préfinancement;

- dans certains cas, la viande bovine placée sous le régime de la transformation avec préfinancement avait déjà été transformée, de sorte que les services douaniers compétents étaient dans l'impossibilité de reconnaître et de vérifier la nature et la qualité du produit de base.

14 Le gouvernement italien ne conteste pas l'existence d'insuffisances et de lacunes dans les contrôles, mais considère que celles-ci justifient une correction de 2 %, et non de 5 % comme celle retenue par la Commission.

15 Selon ce gouvernement, d'une part, il n'existerait pas d'éléments certains démontrant l'existence d'un risque notable pour le FEOGA, compte tenu du nombre peu élevé des contrôles effectués et des irrégularités relevées.

16 D'autre part, le fait que la viande bovine était soumise à cuisson avant le contrôle douanier ne prêterait pas à conséquence dès lors que la phase de cuisson était, elle aussi, effectuée sous le contrôle d'un organe public, l'Istituto nazionale per le conserve alimentari (Institut national pour les conserves alimentaires, ci-après l'«INCA»). Cette irrégularité purement formelle ne comporterait donc pas de risques de préjudice pour le FEOGA.

17 Le gouvernement italien souligne également que la réglementation en la matière n'est pas claire, l'article 4, paragraphe 3, du règlement n_ 565/80 se limitant à indiquer que: «En ce qui concerne les procédures de contrôle et le taux de rendement, les produits de base sont soumis aux mêmes règles que celles qui s'appliquent, dans le cadre du perfectionnement actif, aux produits de même nature».

18 Au demeurant, les remarques de la Commission auraient été immédiatement suivies de la modification de ces procédures de contrôle dans le sens requis. Pour le passé, cependant, la correction de 5 % apparaîtrait disproportionnée, compte tenu notamment de la difficulté d'interprétation de la réglementation communautaire.

19 À cet égard, il convient, en premier lieu, de souligner que le système italien de contrôle présentait des lacunes considérables. Comme l'a relevé la Commission sans être contredite à ce sujet, la répartition peu claire des compétences entre les autorités italiennes a conduit à ce que, pendant le stockage et la transformation de la viande bovine, le respect des règles du préfinancement n'a pu être assuré. C'est ainsi que les vérifications de l'INCA dans les entreprises concernaient principalement l'hygiène alimentaire. Nombreuses étaient également les disparités d'un district douanier à l'autre dans le contrôle des viandes bovines stockées sous régime de préfinancement. Par ailleurs, outre qu'elle est contraire à la réglementation communautaire, la cuisson de la viande avant l'entrée en régime de préfinancement ne peut absolument pas être acceptée. Après cette cuisson, il n'est en effet plus possible d'identifier les caractéristiques du produit de base. S'agissant de l'étiquetage de la viande bovine, il existait également des lacunes considérables dans le contrôle, ce qui a créé des risques considérables de substitution de quantités emballées à d'autres et de fraudes sur la qualité.

20 En second lieu, les vérifications effectuées par le FEOGA ont concerné près de 60 % de l'ensemble du préfinancement destiné à l'Italie, dans la mesure où elles ont porté sur quatre grandes entreprises qui avaient reçu 57,31 % de la somme globale destinée au préfinancement de la viande bovine en Italie.

21 En dernier lieu, s'agissant des améliorations de son système de contrôle invoquées par la République italienne, il suffit de constater qu'elles ne sont intervenues qu'à partir du mois de mai 1995. Dès lors, elles ne peuvent pas être prises en considération dans le cadre de l'apurement des comptes pour l'exercice 1993.

22 Au vu des considérations qui précèdent, il apparaît que les carences relevées par les services de la Commission concernent des éléments importants du système de contrôle ainsi que l'exécution de contrôles qui jouent un rôle important pour la détermination de la régularité de la dépense, de sorte qu'il pouvait être raisonnablement conclu que le risque de pertes pour le FEOGA était significatif. En conséquence, la correction de 5 % opérée par la Commission n'apparaît pas injustifiée.

23 Il y a lieu, en conséquence, de rejeter le premier moyen.

Sur la correction au titre du retrait pluriannuel de terres arables de la production

24 L'article 1er bis du règlement (CEE) n_ 797/85 du Conseil, du 12 mars 1985, concernant l'amélioration de l'efficacité des structures de l'agriculture (JO L 93, p. 1), tel qu'introduit par le règlement (CEE) n_ 1094/88 du Conseil, du 25 avril 1988, modifiant les règlements (CEE) n_ 797/85 et (CEE) n_ 1760/87 en ce qui concerne le retrait des terres arables ainsi que l'extensification et la reconversion de la production (JO L 106, p. 28), a instauré un régime d'aides destiné à encourager le retrait des terres arables de la production. En vertu de cette disposition, peuvent bénéficier de ce régime toutes les terres arables, sans distinction de cultures, à condition qu'elles aient été effectivement cultivées pendant une période de référence à déterminer.

25 Les modalités d'application du régime d'aides destiné à encourager le retrait des terres arables sont fixées par le règlement (CEE) n_ 1272/88 de la Commission, du 29 avril 1988 (JO L 121, p. 36). L'article 2, paragraphe 1, de ce règlement précise que, par «terres arables», il convient d'entendre celles énumérées à l'annexe I, D, du règlement (CEE) n_ 571/88 du Conseil, du 29 février 1988, portant organisation d'enquêtes communautaires sur la structure des exploitations agricoles au cours de la période 1988-1997 (JO L 56, p. 1), à l'exclusion, notamment, des terres destinées à être mises en jachère. En outre, aux termes de l'article 3 du règlement n_ 1272/88, la période de référence pendant laquelle les terres arables doivent avoir été effectivement cultivées afin de pouvoir bénéficier des aides destinées à encourager le retrait des terres arables doit porter au moins sur une campagne agricole comprise entre le 1er juillet 1985 et le 30 juin 1988. Pour l'Italie, cette campagne était celle de 1987/1988.

26 Compte tenu des nombreuses modifications apportées au règlement n_ 797/85, celui-ci a été codifié et remplacé par le règlement (CEE) n_ 2328/91 du Conseil, du 15 juillet 1991, concernant l'amélioration de l'efficacité des structures de l'agriculture (JO L 218, p. 1).

27 Selon la Commission, il ressort du rapport de synthèse que les contrôles effectués par les services du FEOGA ont montré que, en Sicile, de nombreuses terres retirées de la production en application du régime d'aides au retrait pluriannuel des terres arables étaient en fait soumises au régime de la jachère traditionnelle et n'étaient donc pas effectivement cultivées pendant la campagne de référence. L'enquête aurait en outre établi que les autorités italiennes avaient négligé de tenir compte de cette exigence dans la vérification de l'éligibilité des terres au régime d'aides en cause. L'objectif du régime, c'est-à-dire la réduction de la production, n'aurait donc été réalisé qu'en partie.

28 Compte tenu du caractère pluriannuel de ces aides, la Commission a procédé, au titre de l'exercice 1993, à une correction financière de 5 %, soit le taux déjà appliqué pour l'exercice 1992.

29 La République italienne conteste, à titre principal, la légalité de cette correction financière et demande, à titre subsidiaire, une réduction appropriée de celle-ci. Elle expose que la technique de la jachère traditionnelle a été remplacée, dès la campagne de référence, par celle dite de la «jachère couverte». Cette technique, dans laquelle les surfaces accueillent des cultures automnales/printanières sarclées, à récolte précoce, telles que les légumineuses de fourrage, la fève, le pois chiche et la pomme de terre, consiste à maintenir une couverture végétale durant des périodes limitées et à effectuer ensuite les travaux normaux de préparation des terres en enterrant la végétation produite (jachère associée à l'enfouissement d'engrais vert).

30 Il convient, d'une part, de relever que la République italienne ne conteste pas que les autorités nationales compétentes se sont abstenues de vérifier si les terres ayant fait l'objet d'une aide au retrait avaient été effectivement cultivées antérieurement ou, à tout le moins, si elles avaient été cultivées dans le cadre de la jachère dite «couverte».

31 D'autre part, elle n'a fourni aucun élément de preuve susceptible d'étayer la thèse du remplacement de la pratique de la jachère traditionnelle par celle dite de la «jachère couverte».

32 Au contraire, les données recueillies dans le cadre du réseau d'information comptable agricole créé à l'échelle communautaire par le règlement n_ 79/65/CEE du Conseil, du 15 juin 1965, portant création d'un réseau d'information comptable agricole sur les revenus et l'économie des exploitations agricoles dans la Communauté économique européenne (JO 1965, 109, p. 1859), démontrent que la pratique de la jachère traditionnelle était encore courante en Italie en 1986 et en 1987. En outre, il ressort d'une lettre du FEOGA du 2 août 1994 que, lors des visites effectuées dans les exploitations, les exploitants directement concernés ont contredit, au moins en Sicile, les déclarations des autorités italiennes selon lesquelles la jachère traditionnelle ne serait plus une pratique agricole courante.

33 Au vu des considérations qui précèdent, il apparaît que les carences relevées par les services de la Commission concernent des éléments importants du système de contrôle ainsi que l'exécution de contrôles qui jouent un rôle important pour la détermination de la régularité de la dépense, de sorte qu'il pouvait être raisonnablement conclu que le risque de pertes pour le FEOGA était significatif. En conséquence, la correction de 5 % opérée par la Commission n'apparaît pas injustifiée.

34 Dès lors, il y a lieu de rejeter le deuxième moyen.

Sur les corrections au titre du remboursement des frais de stockage de sucre

35 L'article 8 du règlement (CEE) n_ 1785/81 du Conseil, du 30 juin 1981, portant organisation commune des marchés dans le secteur du sucre (JO L 177, p. 4), prévoit un régime de compensation des frais de stockage pour certains types de sucre produits à partir de betteraves ou de cannes d'origine communautaire. Ces frais sont remboursés sur la base d'un taux forfaitaire unique pour l'ensemble de la Communauté. Le régime est financé par des cotisations d'un taux uniforme pour l'ensemble de la Communauté perçues, notamment, auprès des producteurs de sucre sur les quantités produites par chacun d'entre eux.

36 Les modalités d'application de ce régime sont fixées par le règlement (CEE) n_ 1358/77 du Conseil, du 20 juin 1977, établissant les règles générales de compensation des frais de stockage dans le secteur du sucre et abrogeant le règlement (CEE) n_ 750/68 (JO L 156, p. 4). L'article 2 du règlement n_ 1358/77 dispose que le remboursement est accordé à tout fabricant de sucre bénéficiant d'un quota de base, à tout raffineur de sucre, à tout organisme d'intervention ainsi qu'à tout broyeur, agglomérateur, candisier et commerçant spécialisé dans le domaine du sucre agréés, à condition qu'ils soient propriétaires des sucres ou des sirops faisant l'objet du stockage. Aux termes de l'article 3 du règlement n_ 1358/77, le remboursement est accordé par l'État membre sur le territoire duquel le sucre est stocké. En outre, étant donné que le remboursement ne peut être accordé sans possibilité de contrôle, l'article 3 prescrit le stockage du sucre dans des magasins préalablement agréés par l'État membre sur le territoire duquel ils se trouvent.

37 Aux termes des articles 4 et 5 du règlement n_ 1358/77, qui précisent les modalités de fixation du montant du remboursement, le calcul doit être effectué sur la base des relevés mensuels des quantités stockées, déterminées en faisant la moyenne arithmétique des quantités se trouvant en stock au début et à la fin du mois considéré; le montant du remboursement est ensuite fixé en prenant en considération les frais de financement, les frais d'assurance et les frais de stockage spécifiques.

38 En application du principe de la neutralité financière sous-jacent au système de compensation (voir le troisième considérant du règlement n_ 1358/77), l'article 6, paragraphe 1, de ce règlement dispose que la cotisation à percevoir de chaque fabricant de sucre pour les quantités produites doit être fixée de telle sorte que, pour une campagne sucrière, la somme prévisible des cotisations soit égale à la somme prévisible des remboursements. L'article 6, paragraphe 2, du règlement n_ 1358/77 prévoit que, lorsque, pour une campagne sucrière, la somme des cotisations perçues n'est pas égale à la somme des remboursements effectués, la différence est reportée sur une campagne ultérieure. Enfin, selon l'article 6, paragraphe 3, du règlement n_ 1358/77, qui précise les modalités de calcul du montant de la cotisation, la somme des remboursements prévisibles pour la campagne sucrière en cause est augmentée ou, le cas échéant, diminuée des reports visés à l'article 6, paragraphe 2; le résultat ainsi obtenu est ensuite divisé par la quantité prévisible de sucre écoulée pendant cette campagne sucrière et produite dans le cadre des quotas maximaux.

39 Selon la Commission, les contrôles effectués par les services du FEOGA en Italie en 1993 et en 1994 ont permis d'établir que, jusqu'au 31 décembre 1992, les organismes nationaux compétents n'ont procédé à aucun contrôle auprès des commerçants spécialisés et des autres magasins indépendants agréés. Les services du FEOGA auraient en outre constaté que l'Azienda di Stato per gli interventi nel mercato agricolo (Organisme d'État pour les interventions sur le marché agricole, ci-après l'«AIMA») n'avait pas non plus effectué de contrôles auprès de ces bénéficiaires.

40 La Commission explique que, compte tenu du risque important pour le budget communautaire, elle a appliqué une correction financière de 10 % sur les paiements effectués en faveur de ces catégories professionnelles pour la période comprise entre le 15 octobre 1992 et le 31 décembre 1992, correspondant à la somme de 76 987 797 ITL.

41 Les contrôles effectués par les services du FEOGA auraient également permis d'établir que la carence complète de contrôle a perduré jusqu'au 30 juin 1993, les contrôles sur place ayant été repris par l'AIMA à partir du mois de juillet 1993, avec effet rétroactif au mois de janvier 1993. La quantité et la qualité de ces contrôles se seraient toutefois avérées insuffisantes, justifiant la correction forfaitaire de 2 % appliquée par la Commission sur les montants payés pour le stockage de sucre entre le 1er janvier et le 30 juin 1993, soit la somme de 911 895 729 ITL.

42 Le gouvernement italien fait valoir, en premier lieu, que les périodes auxquelles se réfèrent les corrections financières de la Commission sont des phases de transition particulières. En effet, à partir du mois de mars 1991, l'AIMA aurait pris en charge toutes les activités de gestion du système, qui relevaient jusqu'alors de la compétence de la Cassa Conguaglio Zucchero, et, à partir du 1er janvier 1993, l'activité de contrôle qui était antérieurement assurée par les Uffici tecnici imposta di fabbricazione (UTIF).

43 Le gouvernement italien soutient que, en tout état de cause, pour les commerçants spécialisés, un système de contrôle de nature administrative avait été mis en oeuvre. Même si celui-ci ne donnait pas lieu à des vérifications sur place, il aurait dû être considéré comme particulièrement intensif et pertinent pour la détermination des quantités de sucre stockées.

44 En second lieu, tirant argument du fonctionnement global de l'organisation commune des marchés dans le secteur du sucre, le gouvernement italien conteste l'affirmation selon laquelle, en Italie, le secteur du sucre serait à «haut risque» pour les finances communautaires. Il invoque, d'une part, les limites imposées aux opérateurs du secteur par les quotas de production et, d'autre part, le rapport étroit entre les montants des cotisations versées par les fabricants de sucre et les remboursements effectués au titre des frais de stockage, lequel priverait de tout intérêt, pour les sociétés sucrières, la déclaration de quantités supérieures à celles produites. Selon le gouvernement italien, une preuve en est apportée par le fait que, durant la période du 1er juillet 1992 au 30 juin 1993, les entreprises sucrières auraient versé à la Communauté environ 214 milliards de ITL alors que les remboursements des dépenses de stockage ne s'élèveraient qu'à environ 123 milliards de ITL.

45 Aussi le gouvernement italien demande-t-il, à titre principal, l'annulation des corrections opérées et, à titre subsidiaire, leur réduction à un taux approprié.

46 Il y a lieu, d'une part, de relever que, n'ayant pas effectué de contrôles sur place auprès des commerçants spécialisés au cours de la période examinée par la Commission, la République italienne a manqué aux obligations de contrôle qui lui incombent en vertu de la réglementation communautaire.

47 Il y a lieu, d'autre part, de rejeter l'argument que le gouvernement italien prétend tirer du lien entre les montants des cotisations versées par les fabricants de sucre et ceux des remboursements effectués au titre des frais de stockage.

48 En effet, si le système de compensation repose effectivement sur le principe de la neutralité financière en ce sens que le total des cotisations perçues doit être équivalent à celui des remboursements versés, ainsi que cela résulte de l'article 6, paragraphe 2, du règlement n_ 1358/77 et de la jurisprudence de la Cour (voir arrêt du 15 mai 1984, Zuckerfabrik Franken, 121/83, Rec. p. 2039, point 26), cet équilibre doit être atteint à l'échelle communautaire, et non au niveau de l'État membre ou de l'entreprise concernée (voir arrêt du 1er octobre 1998, Italie/Commission, C-242/96, Rec. p. I-5863, point 118).

49 Les opérateurs qui versent les cotisations ne sont d'ailleurs pas nécessairement les mêmes que ceux qui bénéficient du remboursement. Ainsi, parmi ces derniers, se trouvent les commerçants spécialisés, qui ne sont pas soumis au versement d'une cotisation. Du reste, même pour les fabricants, les deux montants, fixés respectivement en fonction du quota de production qui leur est attribué et de la durée du stockage, ne coïncident pas automatiquement (voir arrêt du 1er octobre 1998, Italie/Commission, précité, point 119).

50 C'est la raison pour laquelle les États membres doivent mettre en place des procédures de contrôle appropriées pour vérifier la réalité des frais de stockage ouvrant droit au remboursement. L'absence de telles procédures, ou leurs lacunes, pourraient en effet permettre à certains opérateurs de se faire rembourser des frais fictifs, ce qui aurait évidemment pour conséquence de provoquer des distorsions de concurrence, en particulier au détriment des opérateurs des autres États membres où le système de contrôle est conforme aux exigences de la réglementation communautaire (voir arrêt du 1er octobre 1998, Italie/Commission, précité, point 120).

51 Au vu des considérations qui précèdent, il apparaît que les carences relevées par les services de la Commission au cours de la période comprise entre le 15 octobre et le 31 décembre 1992 concernent des éléments fondamentaux du système de contrôle ainsi que l'exécution de contrôles essentiels destinés à garantir la régularité de la dépense, de sorte que la Commission pouvait raisonnablement conclure qu'il existait un risque élevé de pertes généralisées pour le FEOGA. Dès lors, la correction de 10 % opérée par la Commission n'apparaît pas injustifiée.

52 S'agissant de la correction de 2 % appliquée sur les montants payés au titre du remboursement des frais de stockage de sucre entre le 1er janvier et le 30 juin 1993, il apparaît que les carences relevées par les services de la Commission concernent des éléments importants du système de contrôle et l'exécution de contrôles qui jouent un rôle important pour la détermination de la régularité de la dépense, de sorte qu'il aurait pu être raisonnablement conclu que le risque de pertes pour le FEOGA était significatif. Dès lors que la Commission aurait pu retenir une correction de 5 %, la requérante ne saurait lui reprocher d'avoir opéré une correction de 2 %.

53 En conséquence, il y a lieu de rejeter ces deux moyens.

Sur la correction au titre des aides à la consommation d'huile d'olive

54 L'article 11 du règlement n_ 136/66/CEE du Conseil, du 22 septembre 1966, portant établissement d'une organisation commune des marchés dans le secteur des matières grasses (JO 1966, 172, p. 3025), a institué un régime d'aide destiné à encourager la consommation de l'huile d'olive produite et commercialisée dans la Communauté.

55 Cet article, dans sa version résultant des règlements (CEE) nos 1917/80 du Conseil, du 15 juillet 1980, modifiant le règlement n_ 136/66 et complétant le règlement (CEE) n_ 1360/78 concernant les groupements de producteurs et leurs unions (JO L 186, p. 1), et 2210/88 du Conseil, du 19 juillet 1988, modifiant le règlement n_ 136/66 (JO L 197, p. 1), prévoit que, lorsque le prix indicatif à la production, diminué de l'aide à la production, est supérieur au prix représentatif de marché pour l'huile d'olive, une aide à la consommation pour l'huile produite et mise sur le marché dans la Communauté est octroyée. Cette aide est égale à la différence entre ces deux montants.

56 Les règles générales relatives à l'aide à la consommation pour l'huile d'olive ont été arrêtées par le règlement (CEE) n_ 3089/78 du Conseil, du 19 décembre 1978 (JO L 369, p. 12), tel que modifié par le règlement (CEE) n_ 3461/87 du Conseil, du 17 novembre 1987 (JO L 329, p. 1, ci-après le «règlement n_ 3089/78»).

57 Le règlement n_ 3089/78 prévoit que l'aide est accordée aux seules entreprises de conditionnement d'huile d'olive agréées (article 1er) et établit les conditions de leur agrément (article 2) ainsi que du retrait de celui-ci (article 3). Le droit à l'aide à la consommation est acquis au moment où l'huile d'olive sort de l'entreprise de conditionnement (article 5), laquelle doit introduire ses demandes d'aide sur une base périodique (article 6).

58 Les articles 7 et 8 du règlement n_ 3089/78 définissent le système de contrôle garantissant que le produit pour lequel l'aide est demandée répond aux exigences nécessaires pour en bénéficier. L'aide n'est versée que lorsque l'organisme de contrôle désigné par l'État membre a constaté le respect des conditions requises par le règlement. Cependant, l'aide peut être avancée dès la présentation de la demande d'aide à condition qu'une garantie suffisante soit constituée.

59 Les modalités d'application du régime d'aide à la consommation pour l'huile d'olive résultaient, pour la campagne 1991/1992, du règlement (CEE) n_ 2677/85 de la Commission, du 24 septembre 1985 (JO L 254, p. 5), tel que modifié par le règlement (CEE) n_ 571/91 de la Commission, du 8 mars 1991 (JO L 63, p. 19, ci-après le «règlement n_ 2677/85»).

60 L'article 12, paragraphe 6, du règlement n_ 2677/85, qui précise les conditions relatives au retrait de l'agrément, dispose:

«Lorsqu'il est constaté par décision de l'autorité compétente que la demande d'aides porte sur une quantité supérieure à celle pour laquelle le droit à l'aide a été reconnu, l'État membre retire sans délai l'agrément pour une période allant de un à cinq ans en tenant compte de la gravité de l'infraction, sans préjudice des autres sanctions éventuelles.»

61 Selon la Commission, il ressort du rapport de synthèse (point 4.7.3.1) que, sur le fondement de l'interprétation de l'article 12, paragraphe 6, du règlement n_ 2677/85 qu'il avait retenue, le ministère de l'Industrie italien considérait le retrait de l'agrément comme une sanction accessoire aux sanctions pécuniaires et administratives infligées par l'Institut pour la répression des fraudes (ci-après l'«IRF»). En conséquence, il n'aurait retiré l'agrément que dans les cas où l'IRF avait préalablement imposé à l'entreprise le paiement d'une amende administrative.

62 La Commission souligne qu'à partir de 1990 seules 24 «ordonnances d'injonction» ont été délivrées sur un total de 688 dossiers signalés par l'Agecontrol, agence italienne chargée du contrôle du droit à l'aide, pour des aides indûment perçues. Selon elle, en vertu de son interprétation de l'article 12, paragraphe 6, du règlement n_ 2677/85, le ministère de l'Industrie italien devait, chaque fois, attendre la décision concernant la sanction pécuniaire avant de pouvoir appliquer le retrait de l'agrément. À ce rythme, dix années n'auraient pas suffi pour retirer l'aide à des entreprises qui avaient commis des fraudes et qui auraient continué de percevoir cette aide pendant ce délai.

63 La Commission considère que les carences ainsi constatées concernaient un élément fondamental du système de gestion et de contrôle de l'aide, en sorte qu'il existait un risque élevé de pertes pour le FEOGA. C'est pourquoi celui-ci aurait initialement proposé une correction financière forfaitaire égale à 10 % de l'aide payée par l'Italie.

64 Bien qu'il ait reconnu le bien-fondé des critiques formulées par les services de la Commission en matière de gestion de la mesure, l'organe de conciliation institué par la décision 94/442/CE de la Commission, du 1er juillet 1994, relative à la création d'une procédure de conciliation dans le cadre de l'apurement des comptes du Fonds européen d'orientation et de garantie agricole (FEOGA), section «garantie» (JO L 182, p. 45), aurait estimé qu'il fallait prendre en considération les améliorations opérées entre-temps dans le domaine de la gestion des cautions, ainsi que la bonne qualité du travail accompli par l'Agecontrol et l'introduction d'un système de sanctions assez sévère. Il aurait, par conséquent, proposé d'effectuer le calcul de la correction financière à appliquer sur base d'une évaluation du risque réel relatif aux entreprises concernées.

65 Donnant suite aux observations de l'organe de conciliation, les services de la Commission auraient accepté de revoir leur position.

66 La Commission explique que, sur la base d'un calcul détaillé des montants indûment payés à 22 entreprises de conditionnement par le biais de 4 organisations professionnelles, les services de l'apurement des comptes du FEOGA, section «garantie», ont proposé une correction analytique de - 10 610 940 125 ITL. Ils ont considéré, en outre, que la non-application du retrait de l'agrément avait provoqué une absence d'effet dissuasif sur l'ensemble des entreprises de conditionnement et ont, de ce fait, appliqué également une correction forfaitaire de 2 % de la dépense déclarée par l'Italie.

67 S'agissant de la correction analytique, le gouvernement italien considère que la Commission a commis des erreurs dans le calcul de celle-ci. D'une part, elle se serait fondée à tort sur l'ensemble des montants payés et n'aurait pas déduit ceux déjà récupérés. D'autre part, elle aurait inclus dans la correction des sommes qui avaient été octroyées avant les contestations. Il serait donc justifié de réduire à 7 147 758 628 ITL (au lieu de 10 610 940 125 ITL) le montant de la correction analytique.

68 À l'audience, le gouvernement italien a en outre allégué que la Commission avait inclus par deux fois dans la correction analytique des montants qui se rapportaient à des quantités ne dépassant pas la marge de 20 %, en dessous de laquelle la Commission a pour politique de ne pas exiger le retrait.

69 S'agissant de la correction forfaitaire, le gouvernement italien soutient, en premier lieu, que la Commission ne pouvait entreprendre une correction forfaitaire en plus d'une correction analytique.

70 Il fait valoir, en second lieu, que les griefs de la Commission ne concernaient, au total, que 55 entreprises (soit moins de 10 % du nombre total); pour 33 d'entre elles la récupération aurait été intégrale, de sorte que des créances ne subsistaient que contre 22 d'entre elles. Étant donné que des irrégularités n'auraient été constatées que pour 4 % seulement de l'ensemble des bénéficiaires, une correction forfaitaire ne serait plus nécessaire dès lors qu'elle serait couverte par la correction analytique. À titre subsidiaire, le gouvernement italien avance que la correction forfaitaire de 2 % est également erronée parce que toutes les sommes versées ou récupérées n'ont pas été prises en compte.

71 Il y a lieu de relever, à titre liminaire, que la requérante ne conteste pas, pour l'essentiel, l'existence d'insuffisances et de lacunes dans les contrôles et la procédure de retrait de l'agrément.

72 S'agissant du cumul d'une correction analytique et d'une correction forfaitaire, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, ne peuvent être financées par le FEOGA, mais doivent, en tout état de cause, rester à la charge de l'État membre concerné, les charges supplémentaires résultant de mesures nationales de nature à compromettre l'égalité de traitement des opérateurs économiques à l'intérieur de la Communauté et à fausser ainsi les conditions de concurrence entre les États membres (voir, en ce sens, arrêt Royaume-Uni/Commission, précité, point 12).

73 Dès lors, s'il s'avère que le risque encouru par le FEOGA ne peut pas être uniquement couvert par des corrections analytiques, d'autres corrections forfaitaires doivent être possibles. Il serait contraire au système de financement du FEOGA que, s'il existe des motifs d'opérer une correction analytique, d'autres dommages ou risques, qui ne sont pas aussi clairement déterminables, restent à la charge du FEOGA.

74 Aucune raison de principe ne s'oppose, par conséquent, au cumul d'une correction analytique et d'une correction forfaitaire.

75 Une correction forfaitaire de 2 % des dépenses paraît également justifiée au regard des insuffisances, non contestées par le gouvernement italien, constatées dans le cadre de la procédure administrative et des contrôles. Dans la mesure où il a fallu dix années pour mettre fin au conflit de compétences entre les autorités italiennes et où, dans l'intervalle, aucun contrôle efficace n'a pu avoir lieu, il est raisonnable de présumer qu'il y a eu des lacunes impliquant un risque de pertes pour le FEOGA.

76 Par ailleurs, il convient de souligner que le total des corrections - l'une analytique et l'autre forfaitaire de 2 % - décidées par la Commission dans ce domaine reste inférieur à une correction forfaitaire de 5 % qui, étant donné les lacunes des contrôles, aurait également pu se justifier.

77 S'agissant de l'argument de la requérante selon lequel, pour établir la correction analytique, la Commission s'est fondée, à tort, sur l'ensemble des montants déjà payés, y compris ceux versés au cours de périodes antérieures à la date à laquelle eût pu intervenir un éventuel retrait d'agrément, il suffit de rappeler que la Commission ne peut mettre à la charge du FEOGA que les montants versés en conformité avec les règles établies dans les différents secteurs des produits agricoles, en y incluant, le cas échéant, les sommes déjà récupérées à la date limite pour l'année de référence (voir arrêt du 1er octobre 1998, Italie/Commission, précité, point 122).

78 Pour ce qui est du non-respect par la Commission du «seuil» des 20 % en dessous duquel la Commission a pour politique de ne pas exiger le retrait dans le calcul des corrections qu'elle a décidées, il y a lieu de constater que le gouvernement italien a soulevé cet argument pour la première fois à l'audience. Les faits qui le sous-tendent étant déjà connus au stade de la procédure écrite, il doit être rejeté comme étant tardif et donc irrecevable (voir les arrêts du 6 octobre 1993, Italie/Commission, précité, point 40; du 17 septembre 1998, Commission/Belgique, C-323/96, Rec. p. I-5063, point 38, et du 21 janvier 1999, Allemagne/Commission, C-54/95, Rec. p. I-35, point 28).

79 Ce moyen doit donc être également rejeté.

Sur les corrections au titre de la distillation obligatoire de vin de table

80 La distillation obligatoire des vins de table est régie par le règlement (CEE) n_ 822/87 du Conseil, du 16 mars 1987, portant organisation commune du marché vitivinicole (JO L 84, p. 1). Selon le quarante-quatrième considérant de ce règlement, «la distillation obligatoire est la mesure la plus efficace pour résorber les excédents de vin de table sur le marché ... il est dès lors nécessaire de prévoir le déclenchement de cette mesure lorsqu'il apparaît que le marché est en situation de déséquilibre grave, ainsi que la fixation de critères précis pour l'appréciation de ce déséquilibre».

81 L'article 39, paragraphe 1, du règlement n_ 822/87 prévoit que, lorsque, pour une campagne viticole, le marché des vins de table présente une situation de déséquilibre grave, une distillation obligatoire de vin de table est décidée.

82 La Commission fixe alors les quantités qui doivent être livrées à la distillation obligatoire afin d'éliminer les excédents de production (article 39, paragraphe 2). La quantité totale à distiller est répartie entre les différentes régions de production de la Communauté regroupées par État membre (article 39, paragraphe 3) puis entre les différents producteurs de vin de table de chaque région de production (article 39, paragraphe 4).

83 Ces diverses quantités sont fixées sur la base des communications sur les quantités de vin de table produites dans chaque région adressées par les États membres à la Commission, elles-mêmes élaborées à partir des déclarations des quantités de produits de la dernière récolte effectuées par les producteurs de raisins destinés à la vinification, ainsi que des déclarations des quantités de moût et de vin qu'ils détiennent effectuées par les producteurs de moût et de vin (articles 39, paragraphe 5, et 3, paragraphe 1, du règlement n_ 822/87).

84 Avant le 10 décembre de chaque année, la Commission et les représentants de chaque État membre élaborent un bilan prévisionnel pour la campagne en cours (article 31 du règlement n_ 822/87).

85 Ce bilan a pour but de déterminer les excédents de vins de table susceptibles de résulter de la campagne viticole et, par conséquent, de donner lieu à une distillation obligatoire. Il évalue, en particulier, la production totale de vin de table déjà récoltée et l'étendue des stocks de départ. La somme de la production totale de vin de table et du volume des stocks indique la disponibilité existante de vin de table.

86 Chaque producteur de vin de table a l'obligation de faire distiller un certain pourcentage de sa production, telle que celle-ci ressort de sa propre déclaration de production. Ce pourcentage, qui peut varier d'une région de production à l'autre, sur la base des rendements obtenus dans le passé, est déterminé selon un barème progressif établi en fonction du rendement par hectare (article 39, paragraphe 4, deuxième et troisième alinéas, du règlement n_ 822/87).

87 Les excédents à éliminer par le biais de la distillation obligatoire sont obtenus en faisant la différence entre les stocks prévisibles sur la base du bilan prévisionnel pour la fin de la campagne vitivinicole et les stocks physiques, c'est-à-dire les quantités de vin nécessaires afin d'assurer l'approvisionnement du marché jusqu'à la campagne suivante, équivalant à environ quatre ou cinq mois d'utilisation normale.

88 Les contrôles mis en oeuvre par les organes des États membres (qui correspondent à chaque région de production) doivent garantir, d'une part, la véracité des données relatives à la production de vin et, d'autre part, la réalisation de la distillation obligatoire établie sur la base du bilan prévisionnel.

89 L'article 7 du règlement (CEE) n_ 3929/87 de la Commission, du 17 décembre 1987, relatif aux déclarations de récolte de production et de stocks de produits du secteur vitivinicole (JO L 369, p. 59), prévoit, à cet égard, que:

«Les États membres établissent les modèles de formulaires des diverses déclarations visées au titre Ier et assurent que ces formulaires comportent au moins les éléments repris aux tableaux de l'annexe I.

Les formulaires susvisés peuvent ne pas comporter la référence expresse au rendement à l'hectare lorsque l'État membre est en mesure de déterminer avec certitude cet élément par la connaissance des autres informations figurant dans la déclaration, notamment la superficie en production et la récolte totale de l'exploitation.

Les déclarations visées au premier alinéa sont centralisées à l'échelon national.

Les États membres adoptent toutes mesures de contrôle utiles pour assurer la conformité de ces déclarations à la réalité.

Ils informent la Commission de ces mesures et lui transmettent les modèles de formulaires établis conformément au premier alinéa.»

90 La Commission considère que, pendant les campagnes 1991/1992, 1992/1993 et 1993/1994, l'Italie a été défaillante tant dans l'établissement des barèmes relatifs aux pourcentages à distiller qu'en matière de contrôles exercés sur les viticulteurs. Selon elle, durant ces trois campagnes, les viticulteurs italiens ont fait distiller des quantités nettement inférieures à celles qui avaient été définies dans le bilan prévisionnel.

91 En conséquence, la Commission a opéré une correction de 2 165 691 000 ITL pour l'exercice 1992 et une correction de 8 155 895 000 ITL pour l'exercice 1993.

92 S'il ne conteste pas que les agriculteurs italiens ont distillé 1 285 000 hl de moins que le volume prévu, le gouvernement italien fait valoir que le système repose sur des prévisions pour la période à venir sur la base des chiffres de production annuels. L'État membre ne pourrait pas être automatiquement rendu responsable d'une erreur dans les prévisions, l'évolution réelle étant soumise à beaucoup de fluctuations et d'impondérables. En outre, la responsabilité de l'élaboration du bilan prévisionnel de la production de vin incomberait non seulement aux États membres, mais aussi à la Commission.

93 À titre subsidiaire, le gouvernement italien conteste le calcul des corrections. Celui-ci serait fondé sur les frais de stockage pour le vin non distillé. Or, il n'y aurait pas nécessairement de lien entre la décision du producteur de vin de stocker et celle de distiller. En outre, il ne faudrait pas prendre en compte toute la période de stockage (la durée des contrats en la matière est en moyenne de neuf mois) mais seulement deux mois (du 1er juillet jusqu'à la distillation, celle-ci commençant le 1er septembre, en vertu de l'article 38, paragraphe 1, du règlement n_ 822/87), étant donné que, jusqu'au 1er juillet, les frais de stockage pourraient, en tout état de cause, être imputés au FEOGA. Par ailleurs, les charges pour le FEOGA auraient nettement baissé par rapport à l'année précédente, ce que la Commission aurait dû prendre en compte. Au surplus, des contrôles réguliers seraient maintenant effectués, de sorte que les corrections apparaîtraient dans l'ensemble injustifiées.

94 Il y a d'abord lieu de relever que le système italien de contrôle présente des insuffisances, ce que la requérante ne conteste pas. En ce qui concerne, par exemple, l'année 1993, l'Italie aurait dû produire, dans le cadre de la procédure de conciliation, une preuve des contrôles effectués auprès des viticulteurs, afin de vérifier que ceux-ci avaient satisfait à l'obligation qui leur incombe de communiquer les quantités exactes de vins à soumettre à la distillation obligatoire. Elle n'a été en mesure de communiquer que quelques données sur des contrôles supposés avoir été effectués auprès des producteurs relativement à cette année. Par ailleurs, ces données ne justifient aucunement les différences considérables entre les quantités qui auraient dû être distillées sur la base du bilan prévisionnel (12 760 000 hl), et celles qui ont été réellement distillées (11 475 000 hl, d'où une différence de 1 285 000 hl, soit plus de 10 %).

95 Ensuite, les estimations de récolte relevaient de la seule compétence des producteurs et de l'État membre, les producteurs étant les seuls à posséder les chiffres nécessaires et les États membres ayant le devoir, en vertu de l'article 7, quatrième alinéa, du règlement n_ 3929/87, d'adopter toutes les mesures de contrôle utiles pour assurer la conformité de ces déclarations avec la réalité.

96 Enfin, la Commission n'a pu calculer le risque éventuel pour le FEOGA que sur la base du vin resté en stock. S'il se conçoit qu'il n'y ait pas automatiquement de rapport entre les quantités stockées et les quantités de vin non distillées, il était difficile de retenir une autre base de calcul. En outre, le gouvernement italien n'a pas pu rapporter la preuve d'erreurs concrètes de calcul.

97 Au vu des considérations qui précèdent, il y a lieu de rejeter les deux moyens.

Sur la correction au titre de l'abandon définitif de superficies viticoles

98 Le règlement (CEE) n_ 1442/88 du Conseil, du 24 mai 1988, relatif à l'octroi, pour les campagnes viticoles 1988/1989 à 1995/1996, de primes d'abandon définitif de superficies viticoles (JO L 132, p. 3), tel que modifié par les règlements (CEE) nos 1869/92 du Conseil, du 30 juin 1992 (JO L 189, p. 6), et 1990/93 du Conseil, du 19 juillet 1993 (JO L 182, p. 7), prévoit l'octroi de primes durant les années 1988/1989 à 1995/1996 en vue de favoriser l'abandon définitif de superficies viticoles.

99 La Commission indique avoir constaté que le contrôle relatif aux superficies viticoles effectivement abandonnées réalisé par les autorités régionales italiennes compétentes était tout à fait insuffisant dans certaines régions. Elle aurait également relevé que le casier viticole était trop imprécis dans la mesure où il ne donnait pas d'indications concrètes sur les surfaces cultivées et sur les types de vignes existants.

100 En particulier, les contrôles effectués à Agrigente et Catanzaro auraient permis de mettre en lumière de nombreuses erreurs, qui auraient entraîné des dépenses injustifiées à la charge du FEOGA.

101 Les autorités italiennes auraient d'ailleurs reconnu que, dans la province de Catanzaro, les superficies sélectionnées pour l'octroi de primes étaient surestimées de 6,15 %.

102 Le gouvernement italien fait valoir que la correction est erronée. D'une part, il aurait fallu retenir, pour la province d'Agrigente, un pourcentage de surestimation des superficies abandonnées de 1,01 et non de 3,09. Le gouvernement italien se fonde, à cet égard, sur une note de la Commission du 17 novembre 1992 par laquelle cette dernière aurait autorisé une augmentation forfaitaire des superficies italiennes sur la base du casier viticole. D'autre part, les variétés de raisin pour lesquelles les primes avaient été accordées auraient effectivement été celles cultivées sur les surfaces abandonnées, comme l'auraient montré les contrôles des autorités compétentes. Les différences entre les rapports de contrôle des autorités et les casiers viticoles des viticulteurs seraient imputables à l'imprécision de ces derniers.

103 À cet égard, il suffit de constater que le taux de 1,01 % revendiqué par le gouvernement italien trouve sa source dans une note de la Commission se rapportant aux campagnes 1992/1993 et suivantes, alors que la correction en question se réfère aux dépenses de la campagne 1991/1992. Quant à la disparité entre les cultures existantes et celles mentionnées au casier viticole, il y a lieu de relever que la prime réservée par la législation communautaire aux seuls raisins destinés à la vinification a été octroyée par les autorités italiennes à des raisins de table qui ne sont pas éligibles et non en fonction des données cadastrales viticoles.

104 Au demeurant, il y a lieu de souligner que le gouvernement italien n'a pas pu établir d'erreurs de calcul de la Commission dans la détermination de cette correction.

105 Il convient donc de rejeter ce moyen.

Sur la correction au titre de la soustraction anticipée des pertes de viande bovine désossée

106 Aux termes de l'article 1er, paragraphes 1 et 2, du règlement (CEE) n_ 147/91 de la Commission, du 22 janvier 1991, définissant et fixant les limites de tolérance pour les pertes de quantités de produits agricoles stockés en intervention publique (JO L 17, p. 9):

«1. Une limite de tolérance, couvrant les pertes de quantités résultant des opérations normales de stockage effectuées dans les règles, est fixée pour chaque produit agricole qui fait l'objet d'une mesure de stockage public.

2. La limite de tolérance est fixée en pourcentage du poids réel, sans emballage, des quantités entrées en stock et prises en charge au cours de l'exercice en cause, augmentées des quantités en stock au début dudit exercice.

Elle est calculée, pour chaque produit, sur l'ensemble des quantités stockées par un organisme d'intervention.

Le poids réel à l'entrée et à la sortie est calculé en déduisant, du poids constaté, le poids forfaitaire d'emballage qui est prévu dans les conditions d'achat ou, à défaut de celles-ci, le poids moyen des emballages utilisés par l'organisme d'intervention.»

107 En vertu de l'article 3 du règlement n_ 147/91, les pertes dépassant la limite de tolérance sont comptabilisées à la fin de l'exercice comptable du FEOGA, section «garantie».

108 Il ressort du rapport de synthèse (point 4.9.1.8) que:

«Comme il a déjà été expliqué dans plusieurs rapports de synthèse antérieurs [cf. point 4.9.1.6 c) pour 1992, par exemple] le FEOGA a relevé que les autorités italiennes opèrent systématiquement, avant que les cartons soient introduits dans les installations frigorifiques, une déduction de 0,1 kg par carton de viande bovine désossée en prévision de pertes à la réfrigération.

Le FEOGA estime que cette pratique est irrégulière et inacceptable. En effet, les règles généralement admises et les dispositions du règlement n_ 147/91, introduisant une limite de tolérance pour les pertes de poids, exigent que le poids réel soit pris en compte pour les mouvements des stocks.

Le mode de calcul de la correction qui en résulte est le même que celui applicable à 1991 et 1992. Correction: poste budgétaire 2113: - 243 553 000 LIT.»

109 Selon le gouvernement italien, la pratique de la déduction en prévision de la perte de poids de la viande bovine désossée consécutive à la congélation, que les autorités italiennes ont systématiquement opérée dans une proportion de 0,1 kg par boîte, serait une pure irrégularité formelle sans incidence sur les comptes du FEOGA. En effet, étant donné que chaque boîte pèse entre 25 et 30 kg, cette déduction correspondrait à une perte de 0,3 à 0,4 %, c'est-à-dire à une perte inférieure à 0,6 % admise par le règlement n_ 147/91. Dans ces conditions, la correction financière décidée par la Commission devrait être annulée.

110 Il convient de relever que la pratique incriminée des autorités italiennes contrevient tant à la lettre qu'à l'économie générale du règlement n_ 147/91.

111 L'article 1er, paragraphe 2, premier alinéa, de ce règlement requiert, en effet, que la limite de tolérance soit calculée en pourcentage du poids réel des quantités entrées en stock. De plus, il ressort de l'article 1er, paragraphe 2, troisième alinéa, du même règlement que le poids réel doit être contrôlé à nouveau à la sortie, ce dont les autorités italiennes s'abstiennent.

112 Faute pour les autorités italiennes d'avoir mis en oeuvre les contrôles permettant d'assurer le respect et l'efficacité des règles prescrites, les corrections opérées par la Commission n'apparaissent pas injustifiées.

113 Il y a lieu, dès lors, de rejeter ce moyen.

Sur la correction au titre des ajustements comptables pour les stocks de viande bovine non désossée

114 Le règlement (CEE) n_ 3492/90 du Conseil, du 27 novembre 1990 (JO L 337, p. 3), détermine les éléments à prendre en considération dans les comptes annuels pour le financement des mesures d'intervention sous forme de stockage public par le FEOGA, section «garantie». En vertu de l'article 4 de ce règlement, «Une limite de tolérance des pertes admises pour la conservation des quantités stockées peut être fixée» et, conformément à l'article 5 du même règlement, «Toutes les quantités manquantes et les quantités détériorées du fait des conditions matérielles de stockage, de transport ou de transformation ou du fait d'une trop longue conservation sont comptabilisées en sortie du stock d'intervention à la date à laquelle la perte ou la détérioration a été constatée». L'article 2, paragraphe 1, du règlement n_ 147/91 fixe la tolérance pour la viande bovine à 0,6 %.

115 La Commission fait valoir que les contrôles effectués par ses services ont mis en évidence que les stocks de viande bovine non désossée de fin d'année avaient été déclarés sans qu'il soit tenu compte des pertes au stockage, ceci afin de ne pas créditer le FEOGA du montant correspondant.

116 Durant la mission des fonctionnaires FEOGA, effectuée du 10 au 14 octobre 1994, les autorités italiennes auraient fourni une grille détaillée par entrepôt frigorifique, qui indiquait une perte nette de 668,723 tonnes de viande bovine, laquelle dépassait de 293,733 tonnes la tolérance réglementaire de 0,6 %, prévue par l'article 2, paragraphe 1, du règlement n_ 147/91. Les services de la Commission auraient opéré les corrections appropriées, afin de compenser l'absence de crédit au profit du FEOGA des montants correspondant aux pertes non identifiées.

117 La Commission indique que, en communiquant ces calculs aux autorités italiennes par sa lettre du 6 avril 1995, le FEOGA a demandé une version correcte du résumé des contrôles d'inventaires et de leurs effets sur la situation des stocks en fin d'exercice au 30 septembre 1993, résumé qui a été fourni par l'AIMA le 14 novembre 1995. L'analyse de la situation des stocks transmise par l'AIMA aurait mis en lumière l'existence de pertes supplémentaires, non déclarées auparavant, pour un volume global de 1 204,707 tonnes de viande bovine. Un dépassement de 829,717 tonnes par rapport à la tolérance admise aurait été constaté.$

118 Le gouvernement italien conteste la correction au motif que les diminutions de poids constatées par la Commission durant l'exercice 1993 auraient également dû être imputées au prorata aux années 1991 et 1992. Dans ce cas, les seuils de tolérance n'auraient pas été dépassés. En effet, compte tenu de la marge de tolérance de 0,6 % sur le montant des stocks de chaque année, il aurait dû être considéré que les pertes constatées de 1 204,707 tonnes n'étaient pas excessives.

119 Dès lors, le gouvernement italien estime que les irrégularités constatées par la Commission sont purement formelles et ne sont aucunement de nature à porter préjudice au FEOGA.

120 À cet égard, il suffit de constater que, si, du fait de l'insuffisance des contrôles qui incombent aux États membres, des pertes durant l'entreposage remontant à des années antérieures ont éventuellement été prises en compte dans l'exercice 1993, c'est à l'État membre concerné d'en assurer les conséquences financières. Il ressort, en effet, des articles 1er et 3 du règlement n_ 147/91 qu'un état des stocks doit être réalisé à la fin de chaque exercice comptable du FEOGA. Au demeurant, le gouvernement italien n'a pas pu établir que ces pertes remontaient effectivement aux années antérieures. Or, il ne saurait infirmer les constatations de la Commission par de simples allégations qui ne sont pas étayées par des éléments établissant l'existence d'un système fiable et opérationnel de contrôle (voir, en ce sens, arrêt du 12 juin 1990, Allemagne/Commission, précité, point 28).

121 Au vu des considérations qui précèdent, il y a lieu de rejeter le moyen.

Sur la correction au titre de paiements tardifs d'achats à l'intervention de viande bovine

122 L'article 18, paragraphe 1, du règlement (CEE) n_ 2456/93 de la Commission, du 1er septembre 1993, portant modalités d'application du règlement (CEE) n_ 805/68 du Conseil en ce qui concerne les mesures générales et des mesures spéciales d'intervention dans le secteur de la viande bovine (JO L 225, p. 4), exige que le paiement de la viande bovine admise à l'intervention s'effectue dans un délai qui commence le 45e jour après la fin de la prise en charge des produits et se termine le 65e jour après cette date.

123 Selon la Commission, ayant relevé des retards considérables dans les paiements en Italie pour l'exercice 1993 après avoir déjà opéré ce constat pour les deux exercices précédents, le FEOGA en a conclu que des frais financiers avaient été indûment mis à sa charge. Il a donc opéré une correction de 10 % applicable à ces frais financiers.

124 Le gouvernement italien justifie le non-respect du délai de 65 jours à partir de la date de remise des produits par les retards, peu importants, dus à la nécessité pour l'AIMA de respecter la procédure prévue par la législation italienne, et en particulier celle relative à l'acquisition du certificat «antimafia». Celle-ci oblige, en effet, toute entreprise, quelle que soit sa forme juridique, susceptible de recevoir des fonds publics, à présenter un certificat attestant qu'elle n'a aucun rapport avec la mafia, qu'elle doit obtenir auprès de l'administration ou de la chambre de commerce à laquelle elle est inscrite.

125 Il y a lieu de relever, d'une part, que, en l'espèce, les délais prévus par le règlement n_ 2456/93 ont été dépassés, ce que le gouvernement italien n'a pas contesté.

126 D'autre part, les dépenses de financement à la charge du FEOGA doivent être calculées en supposant que ce délai est respecté. En conséquence, lorsque l'Italie paie après l'expiration du délai, elle impute au FEOGA des dépenses non éligibles.

127 Toutefois, il ne ressort ni de la décision attaquée ni du rapport de synthèse que les carences relevées concernent l'ensemble ou les éléments fondamentaux du système de contrôle ou encore l'exécution de contrôles essentiels destinés à garantir la régularité de la dépense, ce qui aurait permis de conclure qu'il existait un risque élevé de pertes généralisées pour le FEOGA, comme le requiert le rapport Belle pour une correction de 10 %.

128 En conséquence, il y a lieu d'annuler pour défaut de motivation la correction opérée par la Commission au titre de paiements tardifs d'achats à l'intervention de viandes bovines.

Sur la correction au titre de la gestion et du contrôle inadéquats des primes pour les ovins et les caprins

129 L'article 5 du règlement (CEE) n_ 3013/89 du Conseil, du 25 septembre 1989, portant organisation commune des marchés dans le secteur des viandes ovine et caprine (JO L 289, p. 1), prévoit l'octroi d'une prime aux producteurs de viande ovine et caprine dans la mesure nécessaire pour compenser une perte de revenu au cours d'une campagne de commercialisation.

130 Le FEOGA réalise depuis 1988 des contrôles sur place en Italie pour éviter que les primes payées ne soient supérieures au nombre d'animaux éligibles, tel qu'il ressort des statistiques. En vertu de la décision n_ C/90/831 de la Commission, du 11 mai 1990, les États membres sont tenus d'effectuer des contrôles sur place, portant sur au moins 10 % du nombre des demandeurs par campagne. Les autorités italiennes n'ont pas été en mesure d'effectuer les contrôles nécessaires. À la suite des contrôles, le FEOGA a signalé aux autorités italiennes l'ensemble des carences relevées dans la gestion des primes en question. La correction décidée par la Commission pour l'année 1991 équivalait à 30 % de la dépense nationale et celle de l'année 1992 à 10 %. Comme pour l'exercice 1992, la Commission a décidé de fixer une correction s'élevant à 10 % de la dépense nationale pour l'exercice financier 1993. Si elle a pris acte de la réforme du système administratif des contrôles qui est intervenue en Italie cette année-là, la Commission ne considère pas, en effet, que celle-ci répond aux normes en vigueur et est de nature à garantir un contrôle adéquat, l'exécution des vérifications sur place et le traitement des anomalies détectées restant gravement insuffisants (voir le rapport de synthèse, point 4.9.4.6).

131 Il convient de rappeler d'abord que, lorsque la Commission, au lieu de rejeter la totalité des dépenses concernées par l'infraction, s'est efforcée d'établir l'impact financier de l'action illégale au moyen de calculs fondés sur une appréciation de la situation qui se serait produite sur le marché en cause en l'absence d'infraction, il appartient à l'État membre de démontrer que ces calculs ne sont pas exacts (arrêt Royaume-Uni/Commission, précité, point 15).

132 L'État membre concerné, pour sa part, ne saurait infirmer les constatations de la Commission par de simples allégations qui ne sont pas étayées par des éléments établissant l'existence d'un système fiable et opérationnel de contrôle (voir arrêt du 12 juin 1990, Allemagne/Commission, précité, point 28), tels que l'engagement de réformes ou la résolution des autorités régionales de mieux préparer les contrôleurs.

133 Compte tenu de la gravité, de l'étendue et de la persistance des carences dans le système de contrôles et dans l'exécution de ceux-ci, que la Commission a relevées pour l'exercice 1993 après des constatations similaires pour les exercices précédents, elle pouvait raisonnablement conclure qu'il existait un risque élevé de pertes généralisées pour le FEOGA, en sorte que la correction de 10 % qu'elle a opérée n'apparaît pas injustifiée.

134 Eu égard à l'ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu d'admettre le recours de la République italienne en tant qu'il porte sur la correction au titre de paiements tardifs d'achats à l'intervention de viande bovine et de le rejeter pour le surplus.

Décisions sur les dépenses


Sur les dépens

135 Aux termes de l'article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. La Commission ayant conclu à la condamnation de la République italienne et celle-ci ayant succombé en ses moyens, à l'exception d'un, il y a lieu de la condamner aux quatre cinquièmes des dépens.

Dispositif


Par ces motifs,

LA COUR

(cinquième chambre)

déclare et arrête:

1) La décision 97/333/CE de la Commission, du 23 avril 1997, relative à l'apurement des comptes des États membres au titre des dépenses financées par le Fonds européen d'orientation et de garantie agricole (FEOGA), section «garantie», pour l'exercice financier 1993, est annulée en tant qu'elle a opéré une correction de 778 000 000 ITL au titre de paiements tardifs d'achats à l'intervention de viande bovine.

2) Le recours est rejeté pour le surplus.

3) La République italienne est condamnée aux quatre cinquièmes des dépens et la Commission des Communautés européennes à un cinquième.