Mots clés
Sommaire

Mots clés

1 Recours en manquement - Engagement par la Commission de deux procédures distinctes ayant pour objet les mêmes faits mais fondées sur des dispositions de droit communautaire différentes - Violation des droits de la défense - Absence

(Traité CE, art. 155 et 169)

2 Concurrence - Règles communautaires - Entreprise - Notion - Expéditeur en douane - Inclusion

(Traité CE, art. 85 et 86)

3 Concurrence - Ententes - Accords entre entreprises ou associations d'entreprises - Organisation professionnelle nationale ayant fixé un tarif uniforme et obligatoire pour les expéditeurs en douane

(Traité CE, art. 85)

4 Concurrence - Ententes - Atteinte à la concurrence - Affectation du commerce entre États membres - Fixation, par une organisation professionnelle nationale, d'un tarif uniforme et obligatoire pour tous les expéditeurs en douane

(Traité CE, art. 85)

5 Concurrence - Règles communautaires - Obligations des États membres - Réglementation visant à renforcer les effets d'ententes préexistantes - Notion - Législation imposant à une organisation professionnelle l'adoption d'une décision d'association d'entreprises, consistant à fixer un tarif obligatoire pour tous les expéditeurs en douane

(Traité CE, art. 5 et 85)

Sommaire

1 Compte tenu de l'économie générale des règles relatives au recours en manquement, le fait qu'un État membre doive se défendre dans deux causes distinctes ayant pour objet les mêmes faits mais fondées sur des dispositions de droit communautaire différentes ne saurait en soi constituer une violation des droits de la défense.

2 L'activité d'expéditeur en douane relève de la notion d'entreprise aux fins de l'application des règles communautaires de concurrence, étant donné que, dans le contexte du droit de la concurrence, cette notion comprend, indépendamment de son statut juridique et de son mode de financement, toute entité exerçant une activité économique, notamment celle consistant à offrir des biens ou des services sur un marché donné.

La circonstance que l'activité d'expéditeur en douane serait intellectuelle, nécessiterait une autorisation et pourrait être poursuivie sans la réunion d'éléments matériels, immatériels et humains n'est pas de nature à l'exclure du champ d'application des articles 85 et 86 du traité, dès lors que cette activité présente un caractère économique. En effet, l'expéditeur en douane offre, contre rémunération, des services consistant à effectuer des formalités douanières, concernant surtout l'importation, l'exportation et le transit de marchandises, ainsi que d'autres services complémentaires, comme des services relevant des domaines monétaire, commercial et fiscal, assume les risques financiers afférents à l'exercice de cette activité et, en cas de déséquilibre entre dépenses et recettes, est appelé à supporter lui-même les déficits.

3 Lorsqu'elle fixe un tarif obligatoire pour tous les expéditeurs en douane, l'organisation professionnelle regroupant les représentants de la profession se comporte comme une association d'entreprises, au sens de l'article 85, paragraphe 1, du traité, dès lors que, en vertu du droit national, ces représentants ne sauraient être qualifiés d'experts indépendants et qu'ils ne sont pas tenus par la loi de fixer les tarifs en prenant en considération non pas seulement les intérêts des entreprises ou des associations d'entreprises du secteur qui les a désignés, mais aussi l'intérêt général et les intérêts des entreprises des autres secteurs ou des usagers des services en question.

A cet égard, le fait que l'organisation professionnelle en cause ait un statut de droit public ne fait pas obstacle à l'application de l'article 85 du traité, qui, selon ses propres termes, s'applique à des accords entre entreprises et à des décisions d'associations d'entreprises. Le cadre juridique dans lequel s'effectue la conclusion de tels accords et sont prises de telles décisions ainsi que la qualification juridique donnée à ce cadre par les différents ordres juridiques nationaux sont sans incidence sur l'applicabilité des règles communautaires de la concurrence, et notamment de l'article 85 du traité.

4 Les décisions par lesquelles un organisme professionnel fixe un tarif uniforme et obligatoire pour tous les expéditeurs en douane restreignent la concurrence au sens de l'article 85 du traité dès lors que le tarif fixe directement les prix des services des opérateurs économiques, prévoit, pour chaque type distinct d'opérations, les prix maximaux et minimaux susceptibles d'être réclamés aux clients, détermine différents échelons en fonction de la valeur ou du poids de la marchandise à dédouaner ou du type spécifique de marchandise, voire du type de prestation professionnelle, et, est impératif de sorte qu'un opérateur économique ne peut s'en écarter de sa propre initiative.

Ces décisions sont susceptibles d'affecter les échanges intracommunautaires dès lors que le tarif, en s'étendant à l'ensemble du territoire d'un État membre, a, par sa nature même, pour effet de consolider des cloisonnements de caractère national, entravant ainsi l'interpénétration économique voulue par le traité. Cette incidence est d'autant plus sensible que divers types d'opérations d'importation ou d'exportation de marchandises à l'intérieur de la Communauté ainsi que d'opérations effectuées entre opérateurs communautaires exigent l'accomplissement de formalités douanières et peuvent, par conséquent, rendre nécessaire l'intervention d'un expéditeur en douane indépendant inscrit au registre.

5 S'il est vrai que, par lui-même, l'article 85 du traité concerne uniquement le comportement des entreprises et ne vise pas des mesures législatives ou réglementaires émanant des États membres, il n'en reste pas moins que cet article, lu en combinaison avec l'article 5 du traité, impose aux États membres de ne pas prendre ou maintenir en vigueur des mesures, même de nature législative ou réglementaire, susceptibles d'éliminer l'effet utile des règles de concurrence applicables aux entreprises. Tel serait notamment le cas si un État membre imposait ou favorisait la conclusion d'ententes contraires à l'article 85 ou en renforçait les effets ou s'il retirait à sa propre réglementation son caractère étatique en déléguant à des opérateurs privés la responsabilité de prendre des décisions d'intervention en matière économique.

Un État membre manque ainsi aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 5 et 85 du traité, en adoptant et en maintenant en vigueur une loi qui impose à une organisation professionnelle, par l'attribution d'un pouvoir de décision correspondant, l'adoption d'une décision d'association d'entreprises contraire à l'article 85 du traité, consistant à fixer un tarif obligatoire pour tous les expéditeurs en douane.