Conclusions de l'avocat général Tesauro présentées le 20 février 1997. - Procédure administrative engagée par VAG Sverige AB. - Demande de décision préjudicielle: Länsrätten i Stockholms Län - Suède. - Immatriculation des véhicules - Certificat national en matière de gaz d'échappement - Compatibilité avec la directive 70/156/CEE. - Affaire C-329/95.
Recueil de jurisprudence 1997 page I-02675
1 Les questions préjudicielles posées à la Cour par le Laensraetten i Stockholm laen portent sur l'interprétation de la directive 70/156/CEE du Conseil, du 6 février 1970, concernant le rapprochement des législations des États membres relatives à la réception des véhicules à moteur et de leurs remorques (1), ainsi que des articles 30 et 36 du traité.
Le juge national entend notamment voir établir si une disposition nationale qui subordonne l'immatriculation des véhicules à moteur à la présentation d'un certificat national qui en atteste la conformité avec les dispositions nationales applicables en matière de gaz d'échappement, alors que ces véhicules sont munis d'un certificat valide de conformité communautaire, est compatible avec la directive 70/156 et, dans l'affirmative, si la disposition en cause constitue néanmoins une mesure d'effet équivalant à une restriction quantitative.
La réglementation communautaire et nationale
2 Afin de permettre une meilleure compréhension de la portée des questions préjudicielles posées à la Cour, il est opportun de rappeler, en premier lieu, la réglementation, tant communautaire que nationale, pertinente en la matière.
La réglementation communautaire
3 La réglementation communautaire en matière de véhicules à moteur est composée d'une directive-cadre et d'environ 45 directives «particulières». L'ensemble des dispositions figurant dans ces directives, qui ont procédé à une harmonisation exhaustive des règles techniques et de fonctionnement de ce secteur, a permis de mettre en vigueur un système de réception communautaire, en ce qui concerne les véhicules de type M1 (2), catégorie dont relève le véhicule qui fait l'objet du présent litige. Son application, laissée à la discrétion des différents constructeurs pour la période du 1er janvier 1993 au 31 décembre 1995, est devenue obligatoire à partir du 1er janvier 1996. A partir de cette date, par conséquent, les États membres sont tenus d'appliquer et de respecter la procédure de réception communautaire.
La directive-cadre dans ce secteur est précisément la directive 70/156, telle qu'elle a été modifiée par la directive 92/53/CEE (3). Cette directive définit la procédure de réception communautaire des véhicules à moteur et de leurs remorques, qu'ils soient construits en une seule ou en plusieurs étapes, ainsi que de réception des systèmes, composants et entités techniques prévus pour ces véhicules et leurs remorques (article 1er). La demande de réception d'un véhicule, qui ne doit être introduite que dans un seul État membre, est présentée par le constructeur à l'autorité compétente en matière de réception et elle est accompagnée des documents spécifiques exigés; jusqu'au moment où la réception est délivrée ou refusée, le dossier de réception relatif à chaque directive particulière est mis à la disposition des autorités compétentes en matière de réception (article 3, paragraphe 1). Les autorités de l'État membre auprès de qui la demande est présentée remplissent une fiche de réception dans laquelle il est attesté que le type de véhicule en cause est conforme aux informations contenues dans le dossier constructeur et satisfait aux exigences techniques des directives particulières (article 4, paragraphe 1). La réception communautaire atteste par conséquent que le type de véhicule en cause est conforme à l'ensemble des exigences techniques prescrites par chacune des directives particulières.
Le certificat de conformité est délivré, conformément à l'article 6, paragraphe 1, par le constructeur pour chaque véhicule de la série et atteste que ce véhicule est conforme au type réceptionné. L'article 7, paragraphe 1, qui est pertinent pour la présente affaire, prévoit en outre que «chaque État membre immatricule des véhicules neufs ou en permet la vente ou la mise en service pour des motifs ayant trait à leur construction ou à leur fonctionnement si, et seulement si, ces véhicules sont accompagnés d'un certificat de conformité valide». Le paragraphe 3 du même article 7 prévoit que «si un État membre établit que des véhicules, des composants ou des entités techniques d'un type particulier compromettent gravement la sécurité routière, bien qu'ils soient accompagnés d'un certificat de conformité en cours de validité ou soient marqués d'une façon adéquate, il peut, pendant six mois au maximum, refuser d'immatriculer de tels véhicules ou interdire la vente ou la mise en service sur son territoire de tels véhicules, composants ou entités techniques. Il en informe immédiatement les autres États membres et la Commission, en motivant sa décision. Si l'État membre qui a procédé à la réception conteste les risques allégués pour la sécurité routière dont il a reçu notification, les États membres intéressés s'emploient à régler le différend. La Commission est tenue informée et procède, en tant que de besoin, aux consultations nécessaires pour aboutir à une solution» (4).
En cas de non-conformité d'un véhicule au type réceptionné, c'est à l'État membre qui a procédé à la réception de prendre les mesures qu'il estime les plus opportunes et qui peuvent aller jusqu'au retrait de la réception (article 11, paragraphe 2). Si les autres États membres ont des doutes sur la conformité d'un véhicule au type réceptionné, il leur est seulement loisible de demander une vérification à l'État membre ayant procédé à la réception (article 11, paragraphe 3).
4 Aux fins de la présente procédure, est également pertinente la directive 70/220/CEE du Conseil, du 20 mars 1970, concernant le rapprochement des législations des États membres relatives aux mesures à prendre contre la pollution de l'air par les gaz provenant des moteurs à allumage commandé équipant les véhicules à moteur (5). Cette directive «particulière» dispose, entre autres, que «les États membres ne peuvent refuser la réception CEE ni la réception de portée nationale d'un véhicule pour des motifs concernant la pollution de l'air par les gaz provenant du moteur à allumage commandé équipant ledit véhicule» dès lors qu'il répond à certaines prescriptions (article 2). La même directive, telle qu'elle a été modifiée par la directive 91/441/CEE (6), prévoit en outre que «les éléments susceptibles d'influer sur les émissions à l'échappement et par évaporation doivent être conçus, construits et montés de telle façon que, dans des conditions normales d'utilisation et en dépit des vibrations auxquelles ils peuvent être soumis, le véhicule puisse satisfaire aux prescriptions de la présente directive. Les moyens techniques mis en oeuvre par le constructeur doivent être tels que, conformément aux dispositions de la présente directive, les véhicules présentent, pendant leur durée de vie normale et dans des conditions normales d'utilisation, un taux d'émissions de gaz à l'échappement et d'émissions par évaporation effectivement limité. Pour les émissions à l'échappement, ces conditions sont considérées comme remplies si les dispositions des points 5.3.1.4 et 7.1.1.1 sont respectivement remplies» (point 5.1.1 de l'annexe I).
La réglementation nationale
5 Conformément à l'article 12, premier alinéa, point 9, de la loi suédoise relative à l'immatriculation des véhicules (bilregisterkungoerelsen), l'immatriculation est subordonnée à la présentation d'un certificat de conformité national, en plus du certificat de conformité communautaire. Un tel certificat, délivré par l'importateur suédois, doit attester que la famille de moteurs à laquelle appartient le véhicule en cause a obtenu une autorisation qui atteste qu'il répond aux conditions fixées par le règlement suédois relatif aux gaz d'échappement (Bilavgasfoerordningen; ci-après le «BAF»). La demande de certificat doit être introduite par le fabricant à l'occasion de la sortie d'un nouveau modèle de voiture et elle est valide pour une «famille de moteurs», c'est-à-dire pour une catégorie de véhicules ayant un moteur similaire (article 2 du BAF). Le fabricant choisit lui-même la famille de moteurs dans laquelle le nouveau modèle de voiture sera classé. Les conditions fixées par le BAF sont réputées satisfaites lorsque la famille de moteurs à laquelle appartient le véhicule en cause bénéficie d'une autorisation qui émane d'une autorité au sein de l'Espace économique européen (article 6, deuxième alinéa, du BAF).
Lorsqu'un véhicule est muni d'un certificat de conformité communautaire, la réglementation suédoise impose par conséquent uniquement la conversion dudit certificat en un certificat national, en ce sens qu'il n'est pas prévu de contrôles supplémentaires destinés à vérifier concrètement que le véhicule en cause répond aux normes suédoises en matière de pollution par le gaz d'échappement. La délivrance du certificat national n'en est pas moins subordonnée à la présentation d'un dossier spécifique, qui concorde dans une large mesure avec celui qui a déjà été présenté par le constructeur pour obtenir la réception communautaire, ainsi qu'au paiement de 32 330 SKR par an par famille de moteurs (7), auxquelles s'ajoutent un droit de 25 SKR par véhicule vendu, ainsi que 75 SKR, également par véhicule et qui doivent être versées à l'Office pour la protection de la nature, à titre de financement de la procédure suédoise de réception concernant les émissions de gaz d'échappement.
6 L'exigence d'un certificat national semble liée au système suédois de contrôle des véhicules et de responsabilité du constructeur. Tout constructeur qui entend commercialiser des automobiles sur le territoire suédois doit s'engager à prendre en charge gratuitement la réparation de véhicules qui, lors d'un contrôle officiel (8), ne répondent plus aux conditions relatives aux émissions de gaz d'échappement. Cet engagement ne joue toutefois pas pour les voitures de particuliers qui ont plus de cinq ans ou qui ont parcouru plus de 80 000 km. En cas de défaut majeur, il peut être imposé au constructeur de changer à ses frais certaines parties du système antipollution. Dans les cas extrêmes, celui-ci peut être obligé de rappeler l'ensemble des véhicules d'un même type (procédure dite de recall). Afin de garantir la bonne exécution de ces engagements, la réglementation suédoise en cause impose aux constructeurs de véhicules fabriqués à l'étranger de désigner un représentant officiel en Suède.
En définitive, le certificat national suédois et le registre y relatif auraient précisément pour objectif de classer les voitures dans une famille de moteurs, ce qui permettrait aux autorités compétentes d'avoir à disposition les informations nécessaires sur les véhicules défectueux - sous l'angle de leur conformité aux règles applicables à l'émission des gaz d'échappement -, appartenant à une même famille de moteurs, informations qui sont considérées comme étant nécessaires pour engager la responsabilité du constructeur.
Les faits et les questions préjudicielles
7 Par décision du 24 mai 1995, la préfecture de la région de Stockholm a refusé la demande, présentée par la société VAG Sverige AB, d'immatriculer un véhicule de type Audi A 4. Ce refus a été motivé par le fait que, bien que le véhicule en cause ait été muni d'un certificat valide de conformité communautaire, le certificat national visé à l'article 12, précité, premier alinéa, point 9, c'est-à-dire le certificat attestant que la famille de moteurs à laquelle appartient le véhicule en cause répond aux conditions fixées par le BAF en matière de gaz d'échappement, n'avait pas été produit.
La VAG Sverige AB a formé un recours contre cette décision devant le Laensraetten i Stockholm laen, en faisant valoir, entre autres, que l'interprétation faite par la préfecture de région est contraire au droit communautaire, notamment à la directive 70/156 concernant la procédure de réception des véhicules à moteur.
8 Considérant que l'interprétation du droit communautaire était nécessaire aux fins de la solution du litige, le juge national a décidé d'effectuer un renvoi préjudiciel à la Cour. Les questions posées sont les suivantes:
«1) L'exigence d'un certificat [suédois] telle que prévu à l'article 12, premier alinéa, point 9, de bilregisterkungoerelsen (le règlement suédois relatif à l'immatriculation des véhicules automobiles) est-elle compatible avec les dispositions de la directive 70/156/CEE, dans sa version la plus récente?
2) En cas de réponse affirmative à la question 1, l'exigence dont il s'agit est-elle compatible avec l'article 30 du traité de Rome ou constitue-t-elle une `mesure d'effet équivalent'?
3) Dans l'hypothèse d'une réponse affirmative à la question 1 et d'une réponse à la question 2 en ce sens que la mesure doit être considérée comme une `mesure d'effet équivalent', l'exigence suédoise de production d'un tel certificat peut-elle être maintenue sur le fondement de l'article 36?»
La première question
9 Par la première question, le juge de renvoi demande donc si les dispositions pertinentes de la directive 70/156, dans sa version actuellement en vigueur, font obstacle à une réglementation nationale qui impose, pour l'immatriculation, la présentation d'un certificat national qui atteste la conformité du véhicule en cause à une famille de moteurs pour laquelle une autorisation prouvant qu'elle satisfait aux conditions imposées par la réglementation nationale en matière de gaz d'échappement a été obtenue: et ce bien que le véhicule en cause soit muni d'un certificat valide de conformité communautaire.
Il s'agit donc d'établir si la procédure de réception prévue par la directive 70/156 - et, avec elle, le certificat de conformité délivré par le constructeur - laisse aux États membres la possibilité de subordonner l'immatriculation des véhicules à des procédures et/ou à des certificats nationaux.
10 Nous commençons par constater que la réglementation communautaire applicable est tout à fait claire:
a) les États membres procèdent à l'immatriculation des véhicules neufs ou en permettent la vente ou la mise en service «seulement si ces véhicules sont accompagnés d'un certificat de conformité valide» (article 7, paragraphe 1);
b) les États membres ne peuvent refuser l'immatriculation, la vente ou la mise en service des véhicules accompagnés des certificats de conformité en cours de validité que s'il s'agit de véhicules qui «compromettent gravement la sécurité routière» et, en toute hypothèse, pour une période ne dépassant pas six mois, période durant laquelle, si l'État membre qui a procédé à la réception conteste les risques allégués pour la sécurité routière, les États membres intéressés doivent parvenir à une solution sous le contrôle de la Commission (article 7, paragraphe 3).
En somme, la possibilité de refuser l'immatriculation d'un véhicule muni d'un certificat communautaire valide est limitée à une période de six mois et n'est reconnue que pour des motifs ayant trait à la sécurité routière; en outre, les États membres qui prennent une telle décision doivent immédiatement avertir les autres États membres et la Commission. En dehors de cette hypothèse, les dispositions de la directive 70/156 ne prévoient aucune possibilité de refuser l'immatriculation de véhicules munis d'un certificat communautaire de conformité valide, et encore moins de subordonner cette délivrance à d'autres conditions ou à d'autres preuves. Il y a lieu par conséquent d'interpréter l'article 7, paragraphe 1, en ce sens qu'un véhicule muni du certificat en cause doit être immatriculé.
11 Or, dans le cas présent, les motifs du refus de l'immatriculation sont, rappelons-le, précisément dus à l'absence d'un certificat national attestant que le véhicule en cause répond aux exigences d'une loi nationale en matière de gaz d'échappement. Nous sommes donc en présence d'une demande - faite de surcroît de manière systématique - qui ne tire pas son origine de motifs inhérents à la sécurité routière et qui ne relève, par conséquent, en aucune manière du champ d'application de l'article 7, paragraphe 3.
Les éléments cités suffisent pour parvenir à la conclusion que la directive 70/156 s'oppose à l'application d'une réglementation nationale telle que celle en cause dans la présente affaire. Nous relevons en outre que la directive «particulière» 70/220 concernant les émissions de gaz d'échappement n'ajoute rien de plus à cet égard, étant donné que la procédure de réception communautaire, telle que prévue par la directive 70/156, impose qu'il soit satisfait à toutes les exigences techniques prévues par les directives particulières, y compris celle sur les gaz d'échappement. Par ailleurs, comme l'a affirmé le gouvernement suédois lui-même, au cours de la procédure, les normes nationales en la matière ne sont pas plus sévères que les normes communautaires, mais sont en substance identiques, comme le prouve le fait que le certificat national de conformité n'est pas subordonné à des contrôles supplémentaires.
12 En réalité, la réglementation nationale en cause répond plutôt à l'exigence de garantir la responsabilité du constructeur, notamment le fonctionnement de la procédure de recall. Cette exigence n'est toutefois pas de nature à modifier les données du problème, puisqu'il est constant que la directive 70/156 n'admet pas, en dehors de l'hypothèse et dans les limites visées par l'article 7, paragraphe 3, la possibilité d'exclure ou même de retarder l'immatriculation de véhicules munis d'un certificat communautaire de conformité valide.
Nous observons en outre que l'exigence en cause est déjà protégée par la réglementation communautaire, au moins dans la mesure où elle répond, selon les explications fournies par le gouvernement suédois, à la nécessité d'intervenir sur des véhicules déjà en circulation mais dont il apparaît, lors du contrôle périodique effectué par l'Office pour la protection de la nature, qu'ils ne répondent plus aux normes applicables en matière de gaz d'échappement (9). En effet, la directive 70/156 ne comporte certainement pas de lacune sur ce point: l'article 11 de cette directive prend bien en considération l'hypothèse dans laquelle la non-conformité au type réceptionné intervient après la mise en circulation du véhicule en cause, en prévoyant que ce soit l'État membre qui a procédé à la réception qui procède concrètement aux vérifications nécessaires et adopte les mesures qui s'imposent, lesquelles peuvent aller jusqu'au retrait de la réception.
13 En définitive, il ne nous semble pas que la nécessité de garantir la responsabilité du producteur, même si elle est liée - bien qu'indirectement - à des préoccupations de type environnemental, puisse être considérée de manière autonome dans le cadre d'un système harmonisé tel que celui en cause en l'espèce. Nous ne parvenons pas, par ailleurs, à imaginer de quelle manière le système en cause pourrait aboutir à nier la responsabilité du constructeur, qui peut sûrement être identifié déjà au moyen du certificat de conformité et dont la responsabilité pourra très bien être engagée - comme on peut raisonnablement le présumer - au-delà d'un éventuel engagement écrit de sa part en ce sens.
14 Il reste à dire que nous ne pensons pas non plus qu'il y ait lieu de prendre en considération la thèse du gouvernement suédois, selon laquelle, lors de l'adhésion, la Communauté a autorisé le royaume de Suède à maintenir la réglementation en cause. Sur ce point, il suffit de relever ici que la déclaration sur laquelle se fonde le gouvernement suédois se borne à affirmer que les directives en cause «n'excluent pas le maintien éventuel de la procédure de `retrait' en vigueur en Suède dans le respect des directives communautaires en matière de responsabilité et de sécurité. La Communauté est disposée à clarifier au besoin cette question au cours de discussions avec les experts suédois» (10).
La déclaration précitée, loin de permettre le maintien en vigueur de la réglementation nationale en cause, se borne par conséquent à laisser ouverte une possibilité de négociation sur ce point. En tout cas, il suffit en l'espèce de rappeler que, selon une jurisprudence constante de la Cour, les déclarations figurant dans un procès-verbal ont une valeur limitée, en ce sens qu'elles ne peuvent être prises en considération «pour l'interprétation d'une disposition du droit dérivé lorsque ... le contenu de la déclaration ne trouve aucune expression dans le texte de la disposition en cause et n'a, dès lors, pas de portée juridique» (11).
15 Or, l'article 112 de l'acte d'adhésion prévoit expressément la possibilité d'une période transitoire de quatre ans, à partir de la date d'adhésion, afin d'adapter la réglementation nationale aux actes de droit communautaire énumérés de manière détaillée à l'annexe XII de l'acte d'adhésion. Cette annexe ne mentionne toutefois ni la directive 70/156 ni la directive 70/220: cela signifie que le royaume de Suède ne s'est même pas prévalu de la possibilité de bénéficier, en ce qui concerne les directives précitées, d'une période transitoire et qu'il était par conséquent tenu de respecter l'acquis communautaire en la matière à partir de l'adhésion.
Les deuxième et troisième questions
16 Compte tenu de la conclusion à laquelle nous sommes parvenu en ce qui concerne la première question, il n'est manifestement pas nécessaire de répondre à la deuxième question ni à la troisième. Par ailleurs, il est tout à fait évident que l'exigence d'un certificat national de conformité constitue une mesure d'effet équivalant à une restriction quantitative et, comme telle, interdite par l'article 30 du traité. Même le gouvernement suédois, qui a pourtant évoqué à cet égard la jurisprudence Keck et Mithouard (12) lors de l'audience - à vrai dire, sans beaucoup de conviction et sans aucun fondement -, ne le conteste pas. L'incompatibilité avec l'article 30 serait d'ailleurs difficilement contestable, étant donné que la réglementation en cause: a) exige la présentation d'un document supplémentaire et la présence d'un représentant officiel en Suède; b) a pour conséquence, outre le paiement de sommes non négligeables, un retard dans l'immatriculation d'environ huit semaines.
Dans ces conditions, nous ne pouvons que considérer comme absolument dépourvue de pertinence la circonstance qu'il n'est pas procédé à des contrôles supplémentaires et qu'il s'agit en substance d'une simple conversion du certificat communautaire en un certificat national. Nous rappelons, en effet, que la jurisprudence en la matière est claire, en ce sens que même la délivrance d'une autorisation immédiate et automatique est contraire à l'article 30: une liberté fondamentale garantie par le traité ne peut en effet être subordonnée à l'accord de l'administration, peu importe qu'elle ait à cet égard un pouvoir plus ou moins discrétionnaire (13).
17 En outre, contrairement à ce qui a été soutenu par le gouvernement suédois, il n'existe dans le cas présent aucune exception de nature à justifier la mesure en cause. Sur ce point, il suffit en effet de rappeler que le recours à l'article 36 «n'est plus possible lorsque des directives communautaires prévoient l'harmonisation des mesures nécessaires à la réalisation de l'objectif spécifique que poursuivraient les recours à l'article 36» (14).
Dans le cas présent, il est à peine besoin de rappeler que la réglementation communautaire en la matière est exhaustive. Comme nous l'avons déjà montré, cette constatation est confirmée par la réglementation suédoise elle-même, laquelle ne subordonne pas la délivrance du certificat en cause à un contrôle supplémentaire destiné à vérifier le respect des normes en matière de protection de l'environnement.
Conclusion
18 A la lumière des considérations qui précèdent, nous suggérons à la Cour de répondre comme suit aux questions posées par le Laensraetten i Stokholms laen:
«1) La directive 70/156/CEE du Conseil, du 6 février 1970, concernant le rapprochement des législations des États membres relatives à la réception des véhicules à moteur et de leurs remorques, doit être interprétée en ce sens qu'elle s'oppose à une réglementation nationale qui subordonne l'immatriculation des véhicules à moteur, munis d'un certificat de conformité communautaire valide, à la présentation d'un certificat national qui en atteste la conformité aux exigences nationales en matière de gaz d'échappement.
2) Compte tenu de la réponse donnée à la première question, il n'y a pas lieu de répondre à la deuxième question ni à la troisième.»
(1) - JO L 42, p. 1.
(2) - Il s'agit de véhicules affectés au transport de personnes, comportant, outre le siège du conducteur, huit places assises au maximum.
(3) - JO L 225, p. 1.
(4) - Une procédure analogue est prévue, sur le fondement de l'article 4, paragraphe 1, aux fins de la délivrance de la réception.
(5) - JO L 76, p. 1.
(6) - JO L 242, p. 1.
(7) - L'autorisation, qui est valide pour une famille de moteurs, doit en effet être demandée chaque année.
(8) - Outre un contrôle technique annuel, obligatoire pour les véhicules ayant plus de trois ans, les véhicules peuvent être soumis à un contrôle beaucoup plus approfondi, effectué par l'Office suédois pour la protection de la nature, en ce qui concerne la qualité du système antipollution. Cet office procède en effet périodiquement à la vérification, au regard des exigences prescrites par la réglementation communautaire, d'un échantillon de véhicules appartenant à une même famille de moteurs. Dans le cas où cette vérification fait apparaître des défauts dans les véhicules en cause, le constructeur concerné est tenu de prendre les mesures nécessaires, en ce qui concerne l'ensemble des véhicules appartenant à la même famille de moteurs.
(9) - Sur ce point, nous rappelons en effet que l'on considère qu'il a été satisfait aux prescriptions techniques en matière de gaz d'échappement visées à la directive 70/220, telle que modifiée par la directive 91/441, ce qui aboutit à la délivrance de la réception, compte tenu aussi, et précisément, de la durée normale de vie d'un véhicule dans des conditions normales d'utilisation.
(10) - Déclaration du 27 mai 1993, telle qu'elle figure au procès-verbal de la cinquième conférence ministérielle du 21 décembre 1993.
(11) - Arrêt du 26 février 1991, Antonissen (C-292/89, Rec. p. I-745, point 18).
(12) - Arrêt du 24 novembre 1993 (C-267/91 et C-268/91, Rec. p. I-6097).
(13) - Voir, par exemple, l'arrêt du 8 février 1983, Commission/Royaume-Uni (124/81, Rec. p. 203, point 18).
(14) - Arrêt du 23 mai 1996, Hedley Lomas (C-5/94, Rec. p. I-2553, point 18).