Arrêt de la Cour du 2 août 1993. - Commission des Communautés européennes contre République hellénique. - Manquement d'Etat - Franchises fiscales applicables à l'importation temporaire et définitive de moyens de transport - Directives 83/182/CEE, 83/183/CEE et 73/148/CEE. - Affaire C-9/92.
Recueil de jurisprudence 1993 page I-04467
Parties
Motifs de l'arrêt
Décisions sur les dépenses
Dispositif
++++
1. Dispositions fiscales - Harmonisation des législations - Franchises fiscales en matière d' importation temporaire de moyens de transport et d' importation définitive de biens personnels des particuliers - Résidence normale au sens des directives 83/182 et 83/183 - Notion - Modes de preuve - Régime national incompatible avec les règles communautaires
(Directives du Conseil 83/182, art. 7, et 83/183, art. 6)
2. Libre circulation des personnes - Droit d' entrée et de séjour des ressortissants des États membres - Apposition par les autorités nationales, aux fins de contrôler la durée de la présence des véhicules importés temporairement, de tampons sur les passeports des voyageurs - Admissibilité
(Directive du Conseil 73/148, art. 2, § 1, et 3, § 1)
3. Dispositions fiscales - Harmonisation des législations - Franchises fiscales en matière d' importation temporaire de moyens de transport - Apposition par les autorités nationales, aux fins de contrôler la durée de la présence des véhicules importés temporairement, de tampons sur les passeports des voyageurs - Admissibilité
(Directive du Conseil 83/182, art. 7, § 3)
4. Dispositions fiscales - Harmonisation des législations - Franchises fiscales en matière d' importation temporaire de moyens de transport - Réexportation des véhicules redonnés en location - Fixation d' un délai spécifique - Inadmissibilité
(Directive du Conseil 83/182, art. 3, sous b))
Dans l' affaire C-9/92,
Commission des Communautés européennes, représentée par Mme Maria Condou-Durande et M. Daniel Calleja, membres du service juridique, en qualité d' agents, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. Nicola Annecchino, membre du service juridique, Centre Wagner, Luxembourg,
partie requérante,
contre
République hellénique, représentée par M. Fokion Georgakopoulos, conseiller juridique adjoint au conseil juridique de l' État, en qualité d' agent, ayant élu domicile à Luxembourg au siège de l' ambassade de Grèce, 117, Val Sainte-Croix,
partie défenderesse,
ayant pour objet de faire constater par la Cour que, en instituant et en appliquant un régime d' importation temporaire et définitive de moyens de transport incompatible, d' une part, avec les dispositions de la directive 83/182/CEE du Conseil, du 28 mars 1983, relative aux franchises fiscales applicables à l' intérieur de la Communauté en matière d' importation temporaire de certains moyens de transport (JO L 105, p. 59), et de la directive 83/183/CEE du Conseil, du 28 mars 1983, relative aux franchises fiscales applicables aux importations définitives de biens personnels des particuliers en provenance d' un État membre (JO L 105, p. 64) et, d' autre part, avec les dispositions de la directive 73/148/CEE du Conseil, du 21 mai 1973, relative à la suppression des restrictions au déplacement et au séjour des ressortissants des États membres à l' intérieur de la Communauté en matière d' établissement et de prestation de services (JO L 172, p. 14), la République hellénique a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu du traité CEE,
LA COUR,
composée de MM. O. Due, président, C. N. Kakouris et M. Zuleeg, présidents de chambre, R. Joliet, J. C. Moitinho de Almeida, F. Grévisse, M. Díez de Velasco, P. J. G. Kapteyn et D. A. O. Edward, juges,
avocat général: M. G. Tesauro
greffier: M. H. A. Ruehl, administrateur principal
vu le rapport d' audience,
ayant entendu les parties en leur plaidoirie à l' audience du 23 mars 1993,
ayant entendu l' avocat général en ses conclusions à l' audience du 21 avril 1993,
rend le présent
Arrêt
1 Par requête déposée au greffe de la Cour le 8 janvier 1992, la Commission des Communautés européennes a introduit, en vertu de l' article 169 du traité CEE, un recours visant à faire constater que, en instituant et en appliquant un régime d' importation temporaire et définitive de moyens de transport incompatible, d' une part, avec les dispositions de la directive 83/182/CEE du Conseil, du 28 mars 1983, relative aux franchises fiscales applicables à l' intérieur de la Communauté en matière d' importation temporaire de certains moyens de transports (JO L 105, p. 59, ci-après la "directive 83/182") et de la directive 83/183/CEE du Conseil, du 28 mars 1983, relative aux franchises fiscales applicables aux importations définitives, de biens personnels des particuliers en provenance d' un État membre (JO L 105, p. 64, ci-après la "directive 83/183") et, d' autre part, avec les dispositions de la directive 73/148/CEE, du 21 mai 1973, relative à la suppression des restrictions au déplacement et au séjour des ressortissants des États membres à l' intérieur de la Communauté en matière d' établissement et de prestation de services (JO L 172, p. 14, ci-après la "directive 73/148"), la République hellénique a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu du traité CEE.
2 Les directives 83/182 et 83/183 ont été transposées en République hellénique respectivement par les arrêtés ministériels n * 1254/141/1984 du 1er novembre 1984, modifié par l' arrêté ministériel n * 247/13 du 1er mars 1988, et n * 264/23/2985 du 30 novembre 1985, modifié par l' arrêté n * 245/11 du 1er mars 1988. Des dispositions d' exécution de ces arrêtés se trouvent dans les circulaires n * 357 et n * 366/26 *** 10, respectivement, des 22 et 4 mars 1988.
3 Selon la Commission, ces mesures contiennent des dispositions incompatibles avec les dispositions des directives qu' elles visent à transposer et, en tout état de cause, la circulaire ne constitue pas un instrument adéquat pour une telle mise en oeuvre. Enfin, l' administration hellénique elle-même aurait entretenu des pratiques incompatibles avec ces directives ainsi qu' avec la directive 73/148/CEE.
4 Pour un plus ample exposé des faits de l' affaire, du déroulement de la procédure ainsi que des moyens et arguments des parties, il est renvoyé au rapport d' audience. Ces éléments du dossier ne sont repris ci-après que dans la mesure nécessaire au raisonnement de la Cour.
Sur les règles relatives à la détermination de la résidence normale
5 Selon la Commission, la définition de la résidence normale qui figure à l' article 3, premier alinéa, de l' arrêté ministériel n * 247/13 et à l' article 2, paragraphe 1, sous c), de l' arrêté ministériel n * 245/11 est incompatible avec celle de l' article 7, paragraphe 1, de la directive 83/182 et de l' article 6, paragraphe 1, de la directive 83/183. En effet, selon ces dernières dispositions, on entend par "résidence normale" le lieu où une personne demeure habituellement, c' est-à-dire pendant au moins 185 jours de l' année civile, tandis que, dans la réglementation hellénique, la période de référence est, non pas l' année civile, mais la période de douze mois qui précède l' importation.
6 Les directives 83/182 et 83/183, adoptées sur la base de l' article 99 du traité, visent à la suppression des entraves à l' établissement d' un marché intérieur résultant des régimes fiscaux applicables à l' importation temporaire et définitive de certains moyens de transport à usage privé ou professionnel. Ainsi que la Cour l' a relevé dans son arrêt du 23 avril 1991, Ryborg (C-297/89, Rec. p. I-1943) la notion de résidence normale est à la base du régime prévu dans la directive 83/182. Cette constatation vaut également pour la directive 83/183.
7 En effet, le lieu de résidence normale permet de déterminer l' État membre où le véhicule concerné se trouve en régime d' importation temporaire ou définitive, ainsi que l' État membre qui est en droit de le soumettre à son régime d' imposition.
8 Il s' ensuit que la notion de résidence normale est une notion communautaire dont la portée ne peut pas être modifiée par les États membres.
9 La République hellénique fait toutefois valoir que, en vertu de l' article 9, paragraphe 1, de la directive 83/182 et de l' article 11, paragraphe 2, de la directive 83/183, les États membres ont la faculté de maintenir ou de prévoir des dispositions plus libérales que celles prévues par ces directives. Tel serait le cas des mesures litigieuses. En effet, la prise en considération de la seule année civile aboutirait à ne pas faire bénéficier des dispositions de la directive des personnes qui remplissent la condition d' un séjour de 185 jours au cours de la période de douze mois qui a précédé l' importation, mais pas au cours de l' année civile.
10 Cette argumentation ne saurait être accueillie. En effet, ainsi que l' avocat général l' a remarqué au point 4 de ses conclusions, "il est évident que, selon la période durant laquelle le séjour en question a été effectué ... et selon la continuité ou non dudit séjour, les intéressés pourront être désavantagés ou favorisés par le fait que l' on tienne compte des douze mois qui ont précédé l' importation plutôt que de l' année civile précédente". L' article 9, paragraphe 1, de la directive 83/182 et l' article 11, paragraphe 2, de la directive 83/183 ne sont donc pas de nature à justifier l' adoption, par la République hellénique, d' une notion de "résidence normale" différente de celle des directives.
11 Il s' ensuit que les griefs tirés de la violation de l' article 7, paragraphe 1, de la directive 83/182 et de l' article 6, paragraphe 1, de la directive 83/183 sont fondés.
Sur l' exigence, posée par la réglementation hellénique, en ce qui concerne l' importation définitive, d' un séjour d' au moins deux ans dans un autre État membre
12 La Commission considère que la condition à laquelle l' article 4, paragraphe 1, de l' arrêté n * 245/11, soumet l' octroi de la franchise en cas d' importation définitive, à savoir une résidence normale en dehors de la République hellénique pendant au moins deux périodes de douze mois précédant le transfert de cette résidence, ne figure pas à l' article 6, paragraphe 1, de la directive 83/183 et donc qu' elle est incompatible avec cette disposition.
13 La République hellénique fait valoir que les États membres peuvent fixer une période minimale de "résidence normale". Cette notion présupposerait en effet la continuité et la stabilité qui caractérisent la notion de domicile lesquelles ne résulteraient pas des seuls éléments mentionnés dans la directive, à savoir le séjour de 185 jours par année civile et les attachements personnels et professionnels.
14 Cette argumentation ne saurait être accueillie. Ainsi qu' il a été relevé au point 8 du présent arrêt, la directive 83/183 ne laisse pas aux États membres le pouvoir de compléter la notion de résidence normale définie à son article 6, paragraphe 1.
15 Dès lors, le grief tiré de la violation de cette disposition est fondé.
Sur la preuve de la résidence normale
16 La Commission considère que la défenderesse n' a pas transposé dans son droit interne l' article 7, paragraphes 2 et 3, de la directive 83/182 et l' article 6, paragraphes 2 et 3, de la directive 83/183. Selon ces dispositions, la preuve du lieu de résidence normale est apportée par tous moyens, notamment par la production de la carte d' identité ou de tout autre document valable. Ce n' est que lorsqu' elles ont des doutes sur la validité de la déclaration de la résidence normale ou aux fins de certains contrôles spécifiques que les autorités compétentes de l' État membre d' importation peuvent demander des éléments d' information ou des preuves supplémentaires.
17 Or, les arrêtés ministériels n s * 247/13 et * 245/11 se limitent, respectivement dans leurs articles 15 et 29, à établir une règle attribuant la charge de la preuve de la résidence normale au requérant. Les règles relatives à la preuve de la résidence normale se trouvent au titre II de la circulaire n * 366/26 ***. Celle-ci, adressée à l' administration des douanes, précise les différents documents qui peuvent être pris en considération pour établir la résidence normale.
18 Selon la Commission, la circulaire ne constitue pas un moyen adéquat pour la transposition de directives qui, comme celles de l' espèce, visent à créer des droits pour les particuliers. De manière générale, la réglementation hellénique conférerait aux autorités douanières un large pouvoir d' appréciation quant aux moyens de preuve qui peuvent être exigés indépendamment de l' existence de doutes sur le lieu de la résidence normale.
19 La République hellénique conteste ce grief en faisant valoir que la circulaire n * 366/26 *** est compatible avec les directives et que, contrairement à ce que la Commission soutient, les moyens de preuve qui y sont mentionnés ne sauraient être exigés indépendamment de l' existence de doutes quant au lieu de la résidence normale.
20 Il convient de relever à cet égard que, conformément à une jurisprudence constante (voir entre autres arrêt du 17 octobre 1991, Commission/République fédérale d' Allemagne, C-58/89, Rec. p. I-4983), dans le cas où une directive vise à créer des droits pour les particuliers, les bénéficiaires doivent être mis en mesure de connaître la plénitude de leurs droits et de s' en prévaloir, le cas échéant, devant les juridictions nationales. Tel n' est pas le cas, lorsque le moyen choisi pour la transposition d' une directive est une circulaire dont les dispositions n' ont pas un effet direct à l' égard des tiers.
21 Or, ainsi que la Commission l' a fait valoir, les arrêtés ministériels litigieux ne contiennent aucune règle de transposition de l' article 7, paragraphes 2 et 3, de la directive 83/182 ni de l' article 6, paragraphes 2 et 3, de la directive 83/183, qui permettent aux particuliers d' établir la résidence normale par tous moyens et limitent le recours à des éléments d' information ou à des preuves supplémentaires aux seuls cas où la validité de la déclaration de la résidence normale est mise en doute, et lorsque sont réalisés certains contrôles spécifiques.
22 Enfin, le titre II de la circulaire n * 366/26 *** définit les différents documents que les autorités douanières peuvent prendre en considération pour établir la résidence normale. Conformément au dernier alinéa de ce titre, ces éléments de preuve "servent également à la vérification de la résidence d' une personne déterminée à l' étranger pendant 185 jours par période de douze mois, lorsque cette vérification ne peut pas être effectuée à l' aide du passeport uniquement".
23 Ces dispositions n' établissent pas clairement que la preuve de la résidence normale peut être apportée par tous moyens et que ce n' est qu' en cas de doute ou dans le cadre de contrôles spécifiques que des éléments d' information ou des preuves supplémentaires peuvent être exigés. Elles ne sauraient donc, en tout état de cause, être considérées comme transposant correctement l' article 7, paragraphes 2 et 3, de la directive 83/182 et de l' article 6, paragraphes 2 et 3, de la directive 83/183.
Sur l' exigence, posée par la réglementation hellénique, en ce qui concerne l' importation définitive, de la présentation d' un titre de séjour de cinq ans, comme preuve du transfert de la résidence normale
24 La Commission considère que l' exigence d' un permis de séjour de cinq ans comme preuve de la résidence normale, imposée par le titre III de la circulaire n * 357, est également contraire à l' article 6, paragraphes 2 et 3, de la directive 83/183.
25 La République hellénique fait valoir que ce grief est irrecevable, étant donné que ce n' est que dans la réponse à une question posée par la Cour que la Commission fait référence, pour la première fois, à la circulaire n * 357. La requérante aurait ainsi élargi l' objet du litige d' une manière inadmissible.
26 A cet égard, il suffit de relever que l' exigence d' un permis de séjour de cinq ans pour l' octroi de la franchise a déjà été mentionnée par la requérante dans la phase précontentieuse du recours. La référence à la circulaire n' ayant servi qu' à établir ce grief, celui-ci doit être déclaré recevable.
27 Dans sa réponse à l' avis motivé, la République hellénique a reconnu l' existence de cette exigence mais a considéré qu' elle était justifiée. Il serait en effet absurde d' imposer à un État membre l' octroi de la franchise prévue dans la directive 83/183 avant que l' intéressé ne soit autorisé à s' installer sur son territoire.
28 Il y a lieu de relever à cet égard que l' article 6 de la directive 83/183 contient les règles générales d' établissement de la résidence normale. Il y définit cette notion afin qu' elle ait le même contenu dans tous les États membres et prévoit des règles quant à la façon d' établir la résidence normale, dans le but d' éviter que certaines exigences de preuve, trop strictes, ne créent des entraves injustifiées à l' octroi de la franchise.
29 Vu ces objectifs, il y a lieu d' interpréter l' article 6 de la directive 83/183 comme concernant non seulement la preuve de la résidence normale dans l' État membre de provenance mais également le transfert de la résidence normale dans l' État membre d' importation. Les exigences de preuve sont en effet les mêmes dans les deux cas et, dans les deux cas, le risque existe que des entraves soient mises à l' octroi de la franchise.
30 Il convient d' observer ensuite que le transfert de la résidence normale peut être prouvé par d' autres moyens que le titre de séjour, notamment par un contrat de travail à durée illimitée ou par un contrat de bail, et que, dès lors, l' exigence d' un titre de séjour comme seule preuve dudit transfert crée des entraves injustifiées à l' octroi de la franchise. Celles-ci découlent du délai de délivrance de ce titre, lequel, conformément à l' article 5, paragraphe 1, de la directive 64/221/CEE du Conseil, du 25 février 1964, pour la coordination des mesures spéciales aux étrangers en matière de déplacement et de séjour justifiées par des raisons d' ordre public, de sécurité publique et de santé publique (JO 1964, 56, p. 850), est de six mois à compter de la demande. Or, la directive 83/183 vise précisément à supprimer de telles entraves.
31 Enfin, en ce qui concerne l' argument invoqué par la République hellénique dans la réponse à l' avis motivé, il y a lieu de rappeler que, conformément à la jurisprudence de la Cour (voir entre autres arrêt du 8 avril 1976, Royer, 48/75, Rec. p. 497) le titre de séjour n' est pas constitutif du droit, pour le ressortissant d' un État membre, de résider dans un autre État membre afin d' y exercer une liberté fondamentale ou dans les cas prévus par le droit dérivé, mais la simple preuve d' un tel droit de résidence.
32 Pour les raisons mentionnées aux points précédents, la preuve du transfert de la résidence normale doit pouvoir être rapportée par tous moyens, indépendamment des formalités nécessaires à la constatation du droit de résidence.
33 Il s' ensuit que le grief tiré de la violation de l' article 6, paragraphes 2 et 3, de la directive 83/183, relatif à l' exigence posée par la réglementation hellénique de la présentation d' un titre de séjour de cinq ans pour établir le transfert de la résidence normale, est également fondé.
Sur l' apposition de tampons sur les passeports
34 La Commission reproche à la République hellénique d' apposer des tampons sur les passeports, portant le numéro de la plaque d' immatriculation des véhicules, à l' entrée et à la sortie du territoire hellénique, afin de contrôler la durée du séjour desdits véhicules. Cette pratique des autorités douanières serait contraire à l' article 2, paragraphe 1, et à l' article 3, paragraphe 1, de la directive 73/148/CEE du Conseil, du 21 mai 1973, relative à la suppression des restrictions au déplacement et au séjour des ressortissants des États membres à l' intérieur de la Communauté en matière d' établissement et de prestation de services, ainsi qu' à l' article 7, paragraphe 3, de la directive 83/182.
35 En effet, il résulterait de la jurisprudence de la Cour que les dispositions de la directive 73/148 mentionnées ci-dessus interdisent toute formalité visant à autoriser l' entrée sur le territoire d' un État membre et qui s' ajoute au contrôle d' un passeport ou d' une carte d' identité à la frontière, quels que soient le lieu ou le moment de la délivrance de cette autorisation et quelle qu' en soit la forme. Selon la Commission, la pratique litigieuse, même si elle n' est applicable qu' aux voyageurs munis d' un passeport et non à ceux munis d' une carte d' identité, constitue une entrave réelle à la libre circulation des personnes et est donc contraire aux dispositions précitées.
36 En ce qui concerne la violation de l' article 7, paragraphe 3, de la directive 83/182, la Commission fait valoir que cette disposition ne permet des contrôles que lorsqu' il y a des doutes sérieux sur le lieu de résidence de la personne qui importe temporairement le véhicule. Tel ne serait pas le cas de la pratique en cause concernant, d' une manière systématique, les titulaires de passeports.
37 A cet égard, il convient de relever que la pratique litigieuse ne constitue pas une entrave à la libre circulation des personnes contraire aux dispositions précitées de la directive 73/148. En effet, selon cette pratique, les voyageurs devaient présenter leur passeport comme preuve de leur identité et n' avaient aucune raison de refuser l' apposition de tampons destinée au contrôle de la durée de la présence des véhicules sur le territoire hellénique.
38 Quant à l' article 7, paragraphe 3, de la directive 83/182, il concerne la preuve de la résidence normale ou du transfert de celle-ci et non le contrôle du respect du délai pour lequel la franchise est accordée. Vu l' absence de dispositions communautaires en la matière, les États sont libres d' adopter des mesures telles que les mesures litigieuses.
39 Dès lors, le grief tiré de la violation de l' article 2, paragraphe 1, et de l' article 3, paragraphe 1, de la directive 73/148, ainsi que de l' article 7, paragraphe 3, de la directive 83/182, relatif à l' apposition sur les passeports des voyageurs de tampons portant le numéro de la plaque d' immatriculation de leurs voitures, ne saurait être accueilli.
Sur la fixation d' un délai pour la réexportation des véhicules, redonnés en location conformément à l' article 3, sous b) de la directive 83/182
40 La Commission considère que la fixation par l' article 8, paragraphe 2 de l' arrêté ministériel n 247/13 d' un délai de dix jours pour la réexportation d' un véhicule redonné en location conformément à l' article 3, sous b), de la directive 83/182, est contraire à cette disposition.
41 La République hellénique fait valoir que cette disposition contient une règle interdisant toute cession ou location d' un véhicule importé temporairement, en même temps qu' une exception à cette règle permettant la location dans le cas où le véhicule appartient à une entreprise ayant son siège social dans la Communauté et se trouve dans le pays concerné à la suite de l' exécution d' un contrat de location qui y a pris fin. Toutefois, la location n' est admise qu' en vue de la réexportation et non pour permettre que le véhicule soit utilisé sur le territoire de l' État membre d' importation temporaire pendant toute la durée de celle-ci. Si la directive devait être interprétée de la manière suggérée par la Commission, des distorsions de concurrence apparaîtraient, du fait que les entreprises de location ayant leur siège social en dehors de la République hellénique utilisent des véhicules dont le coût est inférieur à celui des véhicules utilisés par les entreprises de location relevant du droit hellénique.
42 Cette argumentation ne saurait être accueillie. En effet, l' article 3, sous b), de la directive 83/182 contient un régime complet applicable à la location de certains moyens de transports importés temporairement, qui ne prévoit aucun délai spécifique pour la réexportation des véhicules redonnés en location à des non-résidents, laquelle doit ainsi avoir lieu dans le délai prévu pour l' importation temporaire. Si le législateur communautaire avait voulu éviter la situation décrite par la République hellénique, il aurait lui-même fixé un délai pour la réexportation en cause.
43 Il résulte de l' ensemble des considérants qui précèdent que la République hellénique a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu du traité
- en n' ayant pas adopté les dispositions nécessaires pour transposer en droit interne celles de l' article 7 de la directive 83/182/CEE du Conseil, du 28 mars 1983, relative aux franchises fiscales applicables à l' intérieur de la Communauté en matière d' importation temporaire de certains moyens de transport, et de l' article 6 de la directive 83/183/CEE du Conseil, du 28 mars 1983, relative aux franchises fiscales applicables aux importations définitives, de biens personnels des particuliers en provenance d' un État membre;
- en ayant établi une définition de "résidence normale" différente de celle imposée par les dispositions précitées;
- en exigeant un séjour d' au moins deux ans dans un autre État membre pour l' octroi de la franchise en cas d' importation définitive, contrairement à l' article 6, paragraphe 1, de la directive 83/183;
- en exigeant la présentation d' un titre de séjour de cinq ans pour la preuve du transfert de la résidence normale, contrairement à l' article 6, paragraphes 2 et 3, de la directive 83/183;
- en fixant un délai de 10 jours pour la réexportation d' un véhicule, donné en location conformément à l' article 3, sous b) de la directive 83/182, contrairement à cette disposition.
Sur les dépens
44 Aux termes de l' article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens. La République hellénique ayant succombé en ses moyens principaux, il y a lieu de la condamner aux dépens.
Par ces motifs,
LA COUR
déclare et arrête:
1) La République hellénique a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu du traité CEE
- en n' ayant pas adopté les dispositions nécessaires pour transposer en droit interne celles de l' article 7 de la directive 83/182/CEE du Conseil, du 28 mars 1983, relative aux franchises fiscales applicables à l' intérieur de la Communauté en matière d' importation temporaire de certains moyens de transport, et de l' article 6 de la directive 83/183/CEE du Conseil, du 28 mars 1983, relative aux franchises fiscales applicables aux importations définitives, de biens personnels des particuliers en provenance d' un État membre;
- en ayant établi une définition de "résidence normale" différente de celle imposée par les dispositions précitées;
- en exigeant un séjour d' au moins deux ans dans un autre État membre pour l' octroi de la franchise en cas d' importation définitive, contrairement à l' article 6, paragraphe 1, de la directive 83/183;
- en exigeant la présentation d' un titre de séjour de cinq ans pour la preuve du transfert de la résidence normale, contrairement à l' article 6, paragraphes 2 et 3, de la directive 83/183;
- en fixant un délai de 10 jours pour la réexportation d' un véhicule, donné en location conformément à l' article 3, sous b) de la directive 83/182, contrairement à cette disposition.
2) Le recours est rejeté pour le surplus.
3) La République hellénique est condamnée aux dépens.