61990J0190

Arrêt de la Cour du 20 mai 1992. - Commission des Communautés européennes contre Royaume des Pays-Bas. - Manquement - Directive CEE - Législation nationale non conforme. - Affaire C-190/90.

Recueil de jurisprudence 1992 page I-03265


Sommaire
Parties
Motifs de l'arrêt
Décisions sur les dépenses
Dispositif

Mots clés


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1. Actes des institutions - Directives - Exécution par les États membres - Transposition d' une directive sans action législative - Conditions - Existence d' un contexte juridique général garantissant la pleine application de la directive

(Traité CEE, art. 189, alinéa 3)

2. Rapprochement des législations - Risques d' accidents majeurs de certaines activités industrielles - Obligation, pour le fabricant, de procéder à une notification précisant la personne ou l' instance habilitées à mettre en oeuvre certains plans d' urgence - Portée

((Directive du Conseil 82/501, art. 5, § 1, sous c), troisième tiret))

Sommaire


1. La transposition en droit interne d' une directive n' exige pas nécessairement une reprise formelle et textuelle de ses règles dans une disposition légale expresse et spécifique et peut, en fonction de son contenu, se satisfaire d' un contexte juridique général, dès lors que celui-ci assure effectivement la pleine application de la directive d' une façon suffisamment claire et précise, afin que, au cas où la directive viserait à créer des droits pour les particuliers, ces derniers soient mis en mesure de connaître la plénitude de leurs droits et de s' en prévaloir, le cas échéant, devant les juridictions nationales.

2. L' article 5, paragraphe 1, sous c), troisième tiret, de la directive 82/501 concernant les risques d' accidents majeurs de certaines activités industrielles, qui oblige les États membres à prendre les mesures nécessaires pour que les fabricants visés soient tenus d' adresser aux autorités compétentes une notification indiquant nominativement la personne ou l' instance habilitées à mettre en oeuvre certains plans d' urgence et à alerter les autorités compétentes, est à interpréter en ce sens qu' il vise non pas seulement le responsable légal de la sécurité, dont notamment la sécurité externe de l' établissement, mais également le responsable chargé de réaliser cette sécurité matériellement, c' est-à-dire de déclencher en pratique les mesures de sécurité nécessaires en cas d' accident.

Parties


Dans l' affaire C-190/90,

Commission des Communautés européennes, représentée par M. Thomas van Rijn, membre du service juridique, en qualité d' agent, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. Roberto Hayder, représentant du service juridique, Centre Wagner, Kirchberg,

partie requérante,

contre

Royaume des Pays-Bas, représenté par MM. J. W. de Zwaan et T. Heukels, conseillers juridiques adjoints au ministère des Affaires étrangères, en qualité d' agents, ayant élu domicile à Luxembourg au siège de l' ambassade des Pays-Bas, 5, rue C. M. Spoo,

partie défenderesse,

ayant pour objet de faire constater que, en ne prenant pas dans le délai prescrit toutes les mesures législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer aux dispositions de la directive 82/501/CEE du Conseil, du 24 juin 1982, concernant les risques d' accidents majeurs de certaines activités industrielles (JO L 230, p. 1), et notamment à ses articles 3, 4, 5, paragraphe 1, sous b) et c), et paragraphe 3, ainsi qu' à ses articles 8, paragraphe 1, et 10, paragraphes 1 et 2, le royaume des Pays-Bas a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu du traité CEE,

LA COUR,

composée de MM. F. A. Schockweiler, président de chambre, f.f. de président, F. Grévisse et P. J. G. Kapteyn, présidents de chambre, G. F. Mancini, C. N. Kakouris, J. C. Moitinho de Almeida, M. Díez de Velasco, M. Zuleeg et J. L. Murray, juges,

avocat général: M. G. Gulmann

greffier: M. J. A. Pompe, greffier adjoint

vu le rapport d' audience,

ayant entendu les parties en leur plaidoirie à l' audience du 5 février 1992, au cours de laquelle la Commission a été représentée par M. R. G. Fischer, conseiller juridique, et le royaume des Pays-Bas par M. T. Heukels, en qualité d' agents,

ayant entendu l' avocat général en ses conclusions à l' audience du 17 mars 1992,

rend le présent

Arrêt

Motifs de l'arrêt


1 Par requête déposée au greffe de la Cour le 14 juin 1990, la Commission des Communautés européennes a introduit, en vertu de l' article 169 du traité CEE, un recours visant à faire constater que, en n' ayant pas arrêté toutes les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer aux dispositions de la directive 82/501/CEE du Conseil, du 24 juin 1982, concernant les risques d' accidents majeurs de certaines activités industrielles (JO L 230, p. 1, ci-après "directive"), et notamment à ses articles 3, 4, 5, paragraphe 1, sous b) et c), et paragraphe 3, ainsi qu' à ses articles 8, paragraphe 1, et 10, paragraphes 1 et 2, le royaume des Pays-Bas a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu du traité CEE.

2 La directive concerne la prévention des accidents majeurs qui pourraient être causés par certaines activités industrielles ainsi que la limitation de leurs conséquences pour l' homme et l' environnement.

3 L' article 3 de la directive dispose que

"Les États membres prennent les dispositions nécessaires afin que, pour toute activité industrielle définie à l' article 1er, le fabricant soit tenu de prendre toutes les mesures qui s' imposent pour prévenir les accidents majeurs et pour en limiter les conséquences pour l' homme et l' environnement."

4 Conformément à l' article 4 de la directive,

"Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que tout fabricant soit tenu de prouver à tout moment à l' autorité compétente, aux fins de vérifications visées à l' article 7, paragraphe 2, qu' il a déterminé les risques d' accidents majeurs existants, pris les mesures de sécurité appropriées et informé, formé et équipé, afin d' assurer leur sécurité, les personnes qui travaillent sur le site."

5 En vertu de l' article 5, paragraphe 1, de la directive, les États membres prennent les mesures nécessaires pour que le fabricant soit tenu de communiquer une notification, aux autorités compétentes, comportant, notamment,

"a) ...

b) des informations relatives aux installations:

- ...

- le nombre maximal de personnes travaillant sur le site et en particulier de celles exposées au risque,

- ...

c) des informations relatives à des situations éventuelles d' accident majeur:

- ...

- ...

- le nom de la personne et de ses suppléants ou l' instance qualifiée, qui sont compétents pour la sécurité et qui sont habilités à mettre en oeuvre les plans d' urgence et à alerter les autorités compétentes visées à l' article 7".

L' article 5, paragraphe 3, de la directive dispose que

"La notification visée au paragraphe 1 doit être mise à jour périodiquement, notamment afin de tenir compte des nouvelles connaissances techniques relatives à la sécurité ainsi que de l' évolution des connaissances en matière d' évaluation des risques."

6 L' article 8, paragraphe 1, de la directive est rédigé comme suit:

"Les États membres veillent à ce que les personnes susceptibles d' être affectées par un accident majeur, provenant d' une activité industrielle notifiée au sens de l' article 5, soient informées, d' une manière appropriée, sur les mesures de sécurité et sur le comportement à adopter en cas d' accidents."

7 L' article 10 de la directive a la teneur suivante:

"1. Les États membres prennent les dispositions nécessaires pour que, dès qu' un accident majeur survient, le fabricant soit tenu:

a) d' informer immédiatement les autorités compétentes visées à l' article 7;

b) de leur communiquer, dès qu' elles sont connues:

- les circonstances de cet accident;

- les substances dangereuses impliquées au sens de l' article 1er, paragraphe 2, sous d);

- les données disponibles pour évaluer l' impact de cet accident sur l' homme et l' environnement;

- les mesures d' urgence entreprises;

c) de les informer des mesures qui sont envisagées pour:

- pallier les effets à moyen et à long terme de cet accident;

- éviter que cet accident ne se reproduise.

2. Les États membres chargent les autorités compétentes:

a) de s' assurer que les mesures d' urgence et les mesures à moyen et à long terme qui s' avèrent nécessaires soient prises;

b) de recueillir, lorsque cela est possible, les informations nécessaires pour compléter l' analyse de l' accident majeur et éventuellement de faire des recommandations."

8 Lors de la procédure orale, la Commission s' est désistée des griefs relatifs à la non-transposition de l' article 5, paragraphe 1, sous b), deuxième tiret, et paragraphe 3, ainsi que de l' article 10, paragraphe 2, de la directive. Sont, dès lors, maintenus les griefs concernant les articles 3, 4, 5, paragraphe 1, sous c), troisième tiret, 8, paragraphe 1, et 10, paragraphe 1, de la directive.

9 Le royaume des Pays-Bas soutient que les obligations prévues par sa législation nationale correspondent aux termes de la directive. Ainsi, à l' article 3 de la directive correspondraient:

- les articles 2 et 17, paragraphe 1, de la loi de 1952 sur les établissements incommodes, insalubres ou dangereux (ci-après "Hinderwet", publiée au Stbl. 1981, p. 410);

- les dispositions de la loi du 26 novembre 1970 sur la pollution atmosphérique (ci-après "Wet inzake de luchtverontreiniging", publiée au Stbl. 1970, p. 580);

- l' arrêté du 23 mai 1972 portant exécution de l' article 19, paragraphe 1, de cette loi (publié au Stbl. 1972, p. 294);

- les articles 1er, 12 et 13 de la loi de 1985 sur les services d' incendies (ci-après "Brandweerwet", publiée au Stbl. 1985, p. 87) et l' arrêté relatif aux services d' incendie d' entreprise (ci-après "Besluit bedrijfsbrandweren", publié au Stbl. 1990, p. 80), et

- l' article 2 de la loi relative aux substances dangereuses pour l' environnement (ci-après "Wet milieugevaarlijke stoffen", publiée au Stbl. 1985, p. 639).

A l' article 4 de la directive correspondraient:

- les articles 2, paragraphe 1, 5, 30 et suivants de la Hinderwet, et

- l' article 2 de l' arrêté de 1953 sur les établissements incommodes, insalubres ou dangereux, modifié en 1988 (ci-après "Hinderbesluit", publié au Stbl. 1988, p. 433).

A l' article 5, paragraphe 1, sous c), troisième tiret, de la directive correspondraient:

- les articles 14 et 26 de la Hinderwet, et

- les articles 2, paragraphe 1, et 4, paragraphe 1, sous a), de l' arrêté royal du 15 septembre 1988 relatif aux risques d' accidents majeurs (ci-après "Besluit inzake risico' s van zware ongevallen", publié au Stbl. 1988, p. 432).

Le gouvernement néerlandais reconnaît que seuls les paragraphes 1 des articles 8 et 10 n' ont pas été transposés en droit néerlandais.

10 Pour un plus ample exposé des faits du litige, du déroulement de la procédure ainsi que des moyens et arguments des parties, il est renvoyé au rapport d' audience. Ces éléments du dossier ne sont repris ci-après que dans la mesure nécessaire au raisonnement de la Cour.

En ce qui concerne l' article 3 de la directive

11 L' article 2 de la Hinderwet énonce l' interdiction générale de créer ou d' exploiter des établissements susceptibles de présenter un danger, un risque ou une gêne à l' extérieur de cet établissement ainsi que d' étendre ou de modifier ces établissements ou de changer les méthodes de travail qui y sont utilisées, sans autorisation spéciale. Le gérant de l' établissement a l' obligation de communiquer toute modification de l' établissement et des méthodes de travail à l' autorité compétente pour autoriser de telles modifications, à l' inspecteur et au chef de district et aux autorités de la province et de la commune dans lesquels l' établissement est intégralement ou partiellement situé. Conformément à l' article 17, paragraphe 1, de la Hinderwet, l' autorisation est assortie des prescriptions nécessaires pour prévenir ou limiter les dangers, risques ou gênes susceptibles de se présenter en dehors de l' établissement. Ces prescriptions peuvent comporter, notamment, l' obligation de mettre en oeuvre les moyens de prévenir ou de limiter les risques, dommages ou gênes qui y sont indiqués, l' obligation de prendre des mesures selon une méthode indiquée en vue de déterminer si l' établissement présente ou est susceptible de présenter un danger, un risque ou une gêne à l' extérieur, ou encore l' obligation de communiquer les résultats des mesures ainsi prises aux organes administratifs désignés à cette fin.

12 La Wet inzake de luchtverontreiniging prévoit également un certain nombre de mesures tendant à la prévention et à la réduction de la pollution atmosphérique provoquée par les catégories d' établissements mentionnés dans l' arrêté du 23 mai 1972 portant exécution de l' article 19, paragraphe 1, de ladite loi. En vertu de l' article 42 de cette loi, si, à la suite d' un incident exceptionnel survenu dans un établissement, l' air est ou menace d' être pollué à un point tel qu' il présente un risque important pour la santé, ou cause une gêne intolérable ou un dommage grave, les mesures adéquates doivent être prises sur le champ pour mettre fin à cette situation. L' incident, ainsi que les mesures prises, doivent être immédiatement notifiés au bourgmestre de la commune dans laquelle l' établissement est situé; ces obligations incombent au directeur de l' établissement ainsi qu' au personnel de surveillance.

13 Les articles 1er, 12 et 13 de la Brandweerwet, en combinaison avec le Besluit bedrijfsbrandweren, imposent, d' une part, aux autorités communales et, d' autre part, aux directeurs ou aux gérants des établissements susceptibles de présenter un risque particulier pour la sécurité publique l' obligation d' instituer un service d' incendie. Le service interne à l' établissement doit satisfaire aux exigences relatives aux effectifs et au matériel fixées par les autorités locales. Le directeur ou le gérant d' un établissement doit veiller à ce que le service d' incendie suive les instructions données à cet effet par la personne légalement chargée de la direction effective de la lutte contre les incendies ou autres risques internes.

14 La Wet milieugevaarlijke stoffen stipule en son article 2 que toute personne qui, à titre professionnel, produit une substance ou une préparation, met celle-ci à la disposition d' un tiers, l' importe ou l' utilise aux Pays-Bas et qui sait, ou a pu raisonnablement soupçonner, que ces activités présentent un danger pour l' homme ou l' environnement est tenue de prendre toutes les mesures qu' on peut raisonnablement exiger d' elle, afin de limiter ce danger dans la mesure du possible.

15 La Commission fait valoir que l' obligation contenue à l' article 3 de la directive, et consistant pour les États membres à imposer aux fabricants de prendre toutes les mesures nécessaires à la prévention des accidents majeurs et à la limitation de leurs conséquences pour l' homme et l' environnement, a été méconnue. Elle estime, en effet, que cette obligation de caractère général aurait dû être mise en oeuvre par une règle contraignante pour les autorités nationales compétentes. Or, l' article 17 de la Hinderwet donnerait aux autorités néerlandaises un pouvoir discrétionnaire en ce qui concerne tant la délivrance des autorisations aux établissements industriels en cause que la définition du contenu et du caractère facultatif ou contraignant des prescriptions dont celles-ci sont assorties.

16 Selon le gouvernement néerlandais, l' article 17, paragraphe 1, première phrase, de la Hinderwet obligerait les autorités compétentes à délivrer les autorisations et à les assortir des prescriptions nécessaires en vue de prévenir et de limiter les dangers, risques ou gênes susceptibles de survenir en dehors de l' établissement. Le caractère exemplatif de la liste de mesures concrètes mentionnées à la deuxième phrase de ce paragraphe ne porterait pas atteinte à la nature impérative de la règle énoncée à la première phrase, qui, par ailleurs, est applicable aux "dangers, risques ou gênes" et aurait ainsi un champ d' application plus étendu que celui de l' article 3 de la directive, limité aux seuls "accidents majeurs". Le gouvernement néerlandais fait valoir également que la prévention ou la limitation des risques d' accidents majeurs par des autorisations individuelles obligatoires, assorties de prescriptions adaptées à la nature et à la situation concrète de l' établissement, sont plus efficaces qu' une règle générale qui, en tout état de cause, doit être concrétisée cas par cas. Il ajoute enfin que la Wet inzake de luchtverontreiniging, la Brandweerwet, le Besluit bedrijfsbrandweren et la Wet milieugevaarlijke stoffen participent à la mise en oeuvre de l' article 3 de la directive.

17 Il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante (voir, notamment, arrêt du 30 mai 1991, Commission/Allemagne, point 18, C-59/89, Rec. p. I-0000), la transposition en droit interne d' une directive n' exige pas nécessairement une reprise formelle et textuelle de ses règles dans une disposition légale expresse et spécifique et peut, en fonction de son contenu, se satisfaire d' un contexte juridique général, dès lors que celui-ci assure effectivement la pleine application de la directive d' une façon suffisamment claire et précise, afin que, au cas où la directive viserait à créer des droits pour les particuliers, ces derniers soient mis en mesure de connaître la plénitude de leurs droits et de s' en prévaloir, le cas échéant, devant les juridictions nationales.

18 A cet égard, il y a lieu de relever que l' objectif de la directive 82/501 consiste, notamment, à ce que soient adoptées les mesures nécessaires pour prévenir les accidents majeurs causés par certaines activités industrielles et pour en limiter les conséquences. Conformément à l' article 1er de la directive, l' activité visée est toute opération effectuée dans des installations industrielles, spécifiées à son annexe I, mettant ou pouvant mettre en jeu une ou plusieurs substances dangereuses et pouvant présenter des risques d' accidents majeurs ainsi que le transport effectué à l' intérieur de l' établissement pour des raisons internes et le stockage associé à cette opération à l' intérieur de l' établissement ((article 1er, paragraphe 2, sous a), premier tiret)). Il en résulte que le champ d' application de cette obligation est très large et que sa mise en oeuvre implique l' existence ou l' adoption d' un ensemble de textes, qui couvre toutes ces activités et garantit que chaque fabricant est tenu de prendre les mesures adaptées au type d' activité industrielle en cause pour éviter les accidents majeurs et en prévenir les conséquences pour l' homme et l' environnement.

19 Or, il convient de constater que l' ensemble de la législation nationale à laquelle se réfère le gouvernement néerlandais a, tout comme la directive, pour objectif l' adoption de mesures concrètes et efficaces en vue d' éviter les accidents majeurs et leurs éventuelles conséquences en dehors de l' établissement.

20 En effet, d' une part, la Hinderwet institue un système d' autorisations préalables et obligatoires assorties des prescriptions nécessaires pour prévenir ou limiter tout danger, risque ou gêne.

21 D' autre part, l' autorisation qui doit être délivrée aux établissements industriels susceptibles de provoquer une pollution atmosphérique est, en vertu de la Wet inzake de luchtverontreiniging, également assortie de prescriptions concrètes en fonction de l' activité envisagée.

22 Enfin, l' article 2 de la Wet milieugevaarlijke stoffen impose à l' auteur d' opérations susceptibles de constituer un danger pour l' homme et l' environnement de prendre des mesures pour limiter ce danger et correspond ainsi aux exigences posées par l' article 3 de la directive.

23 Il découle des considérations qui précèdent que la mise en oeuvre de l' article 3 de la directive est assurée par des textes nationaux contraignants et spécifiques, qui satisfont aux obligations incombant au royaume des Pays-Bas en vertu de l' article 189 du traité CEE.

En ce qui concerne l' article 4 de la directive

24 Conformément à l' article 5 de la Hinderwet, la demande d' autorisation pour créer, exploiter, étendre ou modifier un établissement est présentée, avec un grand nombre de données qui, prévues à l' article 2 du Hinderbesluit, concernent les mesures de sécurité prises pour déterminer et prévenir les risques d' accidents majeurs. Les articles 30 et suivants de la Hinderwet prévoient que les fonctionnaires chargés du contrôle de l' application des dispositions de cette loi ont accès aux livres et aux lieux de l' établissement, pour autant que cela soit raisonnablement nécessaire pour l' accomplissement de leur tâche, à laquelle le fabricant et ses employés sont tenus de collaborer.

25 La Commission estime qu' en vertu de l' article 4 de la directive le fabricant a l' obligation générale et continue de prouver à tout moment qu' il a déterminé les risques d' accidents majeurs existants en fonction de l' évolution de la technique ou de la production. Le fait, pour le fabricant, de présenter, avec la demande d' autorisation, notamment, un rapport sur la sécurité externe ne satisferait pas à cette obligation. Par ailleurs, la Commission considère que les articles 30 et suivants de la Hinderwet ne sont pas conformes à l' article 4 de la directive, car ils ne visent que les contrôles relatifs aux données contenues dans la demande d' autorisation ainsi qu' aux prescriptions dont celle-ci est assortie.

26 Le gouvernement néerlandais fait valoir que l' article 4 de la directive ne comporte aucune obligation pour le fabricant de prouver à tout moment qu' il a adopté les mesures nécessaires à la prévention d' accidents majeurs. Il estime que l' assertion formulée à cet égard par la Commission priverait l' article 6 de la directive de tout objet. Il précise toutefois qu' en tout état de cause les articles 30 et suivants de la Hinderwet institueraient une obligation d' information continue sur les données fournies à l' appui de la demande d' autorisation et sur les prescriptions qu' elle contient et que, partant, le droit néerlandais serait conforme à l' article 4 de la directive.

27 Il convient de constater que l' article 4 de la directive institue pour le fabricant une obligation de prouver à tout moment à l' autorité compétente qu' il a déterminé les risques d' accidents majeurs et pris les mesures visées par cette disposition et que cette obligation est reproduite dans la législation néerlandaise.

28 En effet, conformément aux articles 30 et suivants de la Hinderwet, il est loisible, à tout moment, aux fonctionnaires nationaux chargés de l' application de cette loi, d' une part, de demander au fabricant des informations concernant les données fournies à l' appui de la demande d' autorisation, les prescriptions dont celle-ci est assortie ainsi que les livres et autres documents relatifs à l' établissement et, d' autre part, de procéder à des visites sur les lieux, en se faisant, le cas échéant, accompagner de tierces personnes, ainsi que de prélever et examiner des biens ou échantillons, pour autant que cela soit raisonnablement nécessaire à l' accomplissement du contrôle. Cette fonction de contrôle, qui implique l' obligation pour le fabricant de collaborer et de fournir les informations demandées, correspond pour celui-ci à une obligation de renseignement constante.

29 Par ailleurs, il convient de relever que, selon l' article 6 de la directive, les États membres prennent les mesures appropriées afin que le fabricant procède, entre autres, à une révision des mesures visées, notamment, à l' article 4 de cette directive en cas de modification d' une activité industrielle, qui pourrait avoir des implications importantes en ce qui concerne les risques d' accidents majeurs. Partant, un des objectifs de l' article 6 est d' imposer aux États membres l' obligation de contraindre le fabricant à déterminer les risques d' accidents majeurs, en fonction de l' évolution, et à modifier en conséquence les mesures concernant l' information, la formation ainsi que l' équipement des personnes qui travaillent sur le site afin d' en assurer la sécurité.

30 De même l' article 5, paragraphe 3, de la directive prévoit la mise à jour de la notification visée au paragraphe 1 de ce même article, afin notamment de tenir compte des nouvelles connaissances techniques relatives à la sécurité ainsi que de l' évolution des connaissances en matière d' évaluation des risques.

31 Dans la mesure où la Commission n' invoque aucun manquement aux obligations d' actualisation prévues aux articles 5, paragraphe 3, et 6 de la directive, elle doit être regardée comme admettant la conformité de la législation néerlandaise aux objectifs de ces deux dispositions et, par voie de conséquence, comme admettant de manière implicite que cette législation est conforme aux objectifs de l' article 4 de la directive, puisque le respect des obligations prévues aux articles 5, paragraphe 3, et 6 de la directive suppose nécessairement le respect des obligations prévues aux articles 4 et 5, paragraphe 1, de la même directive.

En ce qui concerne l' article 5, paragraphe 1, sous c), troisième tiret, de la directive

32 Les articles 14 et 26 de la Hinderwet prévoient que l' autorisation donnée pour l' exercice d' une activité industrielle vaut pour le demandeur et ses ayants droit et que l' autorité compétente pour accorder une telle autorisation peut modifier ou retirer les prescriptions dont elles sont assorties. Conformément aux articles 2, paragraphe 1, et 4, paragraphe 1, sous a), du Besluit risico' s zware ongevallen, toute personne qui dirige un établissement dans lequel se trouve une substance dangereuse transmet tous les cinq ans à l' autorité compétente un rapport sur la sécurité externe, comprenant, notamment, une description générale de l' établissement, des substances qui s' y trouvent et de leurs propriétés.

33 De l' avis de la Commission, ces dispositions permettent de connaître le responsable légal pour la sécurité, mais non pas l' instance compétente sur le terrain, à laquelle les autorités peuvent s' adresser en cas d' accident.

34 Selon le gouvernement néerlandais, le contexte général de la Hinderwet, et plus particulièrement ses articles 14 et 26, ainsi que les dispositions de l' article 1, paragraphe 1, sous a), du Besluit inzake risico' s zware ongevallen permettent de connaître le titulaire d' une autorisation, qui est chargé de veiller au respect de toutes les obligations légales, y compris celles relatives à la sécurité externe de l' établissement. Le titulaire de l' autorisation serait compétent pour la sécurité, disposerait à cet égard d' un certain pouvoir de décision et correspondrait, par conséquent, à la personne ou à l' instance qualifiée, au sens de l' article 5, paragraphe 1, sous c), troisième tiret, de la directive. La législation néerlandaise serait donc conforme à cette disposition.

35 A cet égard, il convient de relever que la notification prévue à l' article 5, paragraphe 1, sous c), troisième tiret, de la directive doit contenir le nom de la personne ou de l' instance habilitée à mettre en oeuvre les plans d' urgence et à alerter les autorités compétentes. Cela suppose une compétence factuelle pour déclencher en pratique les mesures de sécurité nécessaires en cas d' accident. Il en résulte que ladite disposition vise non seulement le responsable légal de la sécurité, dont notamment la sécurité externe de l' établissement, mais également le responsable chargé de réaliser cette sécurité matériellement.

36 Il convient de constater que les textes cités par le gouvernement néerlandais ne permettent pas de connaître la personne chargée de mettre en oeuvre les plans d' urgence et d' alerter les autorités en cas d' accident majeur.

37 En conséquence, il y a lieu d' accueillir le grief de la Commission en ce qui concerne la mise en oeuvre de l' article 5, paragraphe 1, sous c), troisième tiret, de la directive.

En ce qui concerne les articles 8, paragraphe 1, et 10, paragraphe 1, de la directive

38 Le gouvernement néerlandais, tout en signalant que des initiatives législatives sont en cours pour assurer la mise en oeuvre des paragraphes 1 des articles 8 et 10 de la directive, ne conteste pas que ces dispositions n' ont pas été transposées en droit néerlandais.

39 A cet égard, il suffit de constater qu' au moment de l' expiration du délai imparti dans l' avis motivé aucune mesure nécessaire pour assurer l' application de ces dispositions n' avait été prise.

40 Il en découle que le recours de la Commission est fondé en ce qui concerne les articles 8, paragraphe 1, et 10, paragraphe 1, de la directive.

41 Eu égard à l' ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de constater que, en ne prenant pas dans les délais prescrits toutes les mesures législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer aux dispositions des articles 5, paragraphe 1, sous c), troisième tiret, 8, paragraphe 1, et 10, paragraphe 1, de la directive 82/501/CEE du Conseil, du 24 juin 1982, concernant les risques d' accidents majeurs de certaines activités industrielles, le royaume des Pays-Bas a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu du traité CEE.

Décisions sur les dépenses


Sur les dépens

42 Aux termes de l' article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s' il est conclu en ce sens.

43 Le royaume des Pays-Bas n' ayant que partiellement succombé et la Commission s' étant partiellement désistée, il y a lieu de condamner chacune des parties à supporter ses propres dépens.

Dispositif


Par ces motifs,

LA COUR

déclare et arrête:

1) En ne prenant pas dans les délais prescrits toutes les mesures législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer aux dispositions des articles 5, paragraphe 1, sous c), troisième tiret, 8, paragraphe 1, et 10, paragraphe 1, de la directive 82/501/CEE du Conseil, du 24 juin 1982, concernant les risques d' accidents majeurs de certaines activités industrielles, le royaume des Pays-Bas a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu du traité CEE.

2) Le recours est rejeté pour le surplus.

3) Chaque partie supportera ses propres dépens.