COMMISSION EUROPÉENNE
Bruxelles, le 21.11.2024
COM(2024) 543 final
2024/0302(NLE)
Proposition de
DÉCISION D’EXÉCUTION DU CONSEIL
modifiant la décision d’exécution (UE) 2018/789 du Conseil autorisant la Hongrie à introduire une mesure particulière dérogatoire à l’article 193 de la directive 2006/112/CE relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée
EXPOSÉ DES MOTIFS
En vertu de l’article 395, paragraphe 1, de la directive 2006/112/CE du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée (ci-après la «directive TVA»), le Conseil, statuant à l’unanimité sur proposition de la Commission, peut autoriser tout État membre à appliquer des mesures particulières dérogatoires aux dispositions de ladite directive afin de simplifier la procédure de perception de la TVA ou d’éviter certaines formes de fraude ou d’évasion fiscales.
Par lettre enregistrée à la Commission le 10 juin 2024, la Hongrie a demandé l’autorisation de continuer à déroger à l’article 193 de la directive TVA en ce qui concerne le redevable de la TVA lorsque certaines opérations sont effectuées par des assujettis faisant l’objet d’une procédure de liquidation ou de toute autre procédure établissant légalement leur insolvabilité. Conformément à l’article 395, paragraphe 2, de la directive TVA, la Commission a informé les autres États membres, par lettre datée du 7 août 2024, de la demande introduite par la Hongrie. Par lettre datée du 9 août 2024, la Commission a informé la Hongrie qu’elle disposait de toutes les données utiles pour apprécier la demande.
1.CONTEXTE DE LA PROPOSITION
•Justification et objectifs de la proposition
Conformément à l’article 199, paragraphe 1, point g), de la directive TVA, les États membres peuvent prévoir que le redevable de la TVA sur la livraison d’un bien immeuble vendu par le débiteur d’une créance exécutoire dans le cadre d’une procédure de vente forcée est l’assujetti destinataire de la livraison (ci-après le «mécanisme d’autoliquidation»). En 2017, la Hongrie a demandé d’étendre l’application du mécanisme d’autoliquidation aux livraisons de biens d’équipement et aux livraisons d’autres biens et prestations de services dont la valeur normale excède 100 000 HUF (soit environ 250 EUR) au moment de la livraison ou de la prestation, lorsque l’assujetti fournissant les biens ou services fait l’objet d’une procédure de liquidation ou de toute autre procédure établissant légalement son insolvabilité. La dérogation a été autorisée par la décision d’exécution (UE) 2018/789 du Conseil jusqu’au 31 décembre 2021.
La mesure a ensuite été prorogée jusqu’au 31 décembre 2024 par la décision d’exécution (UE) 2021/1775 du Conseil du 5 octobre 2021.
Les biens d’équipement sont typiquement des outils, des machines et des objets de grande valeur. En outre, d’après la Hongrie, un grand nombre d’opérations dépassant le seuil de 100 000 HUF sont effectuées par des assujettis insolvables. Souvent, le liquidateur ne reverse pas la TVA due, car ce montant sert à régler des créances antérieures. Parallèlement, l’acquéreur qui est un assujetti disposant du droit à déduction peut toujours déduire la TVA acquittée, ce qui a une incidence négative sur le budget. La Hongrie a aussi enregistré des cas de fraude dans lesquels des entreprises en liquidation adressaient de fausses factures à des entreprises en activité, gonflant ainsi considérablement le montant de TVA déductible, sans garantie que l’émetteur des factures acquitterait la TVA due.
La Hongrie soutient dès lors qu’il est nécessaire de protéger les recettes fiscales et les intérêts budgétaires compte tenu du nombre d’assujettis connaissant des difficultés financières qui effectuent les opérations susmentionnées. Le mécanisme d’autoliquidation est, selon la Hongrie, un outil approprié à cette fin. L’assujetti en liquidation ne serait pas redevable de la TVA due et le client ne serait pas pénalisé, tandis qu’il serait possible d’éviter des pertes pour le budget de l’État.
Conformément à l’article 199 bis de la directive TVA, tous les États membres ont la possibilité d’appliquer le mécanisme d’autoliquidation à des opérations spécifiques exposées à la fraude. Cet article est en vigueur jusqu’au 31 décembre 2026 et la Commission évaluera si les livraisons de biens d’équipement et les opérations portant sur d’autres biens et services, lorsque l’assujetti effectuant la livraison de biens ou la prestation de services fait l’objet d’une liquidation ou de toute autre procédure établissant légalement son insolvabilité, devraient également être incluses dans les livraisons et prestations relevant du mécanisme d’autoliquidation, dans l’éventualité où une nouvelle proposition à cet égard serait présentée.
Par conséquent, bien que la Hongrie ait sollicité la prolongation de l’autorisation jusqu’au 31 décembre 2027, il est proposé d’autoriser la prorogation de la dérogation jusqu’au 31 décembre 2026.
Une dérogation autorisant un seul État membre à recourir au mécanisme d’autoliquidation au lieu d’appliquer des mesures générales constitue un moyen de dernier ressort et doit, autant que possible, être limitée dans le temps. En outre, ce délai doit être suffisant pour permettre la mise en œuvre d’autres mesures conventionnelles visant à réduire les pertes pour le budget de l’État, notamment celles qui découlent de manœuvres frauduleuses, de manière à éviter que la mesure ne soit à nouveau prolongée.
2.BASE JURIDIQUE, SUBSIDIARITÉ ET PROPORTIONNALITÉ
•Base juridique
Article 395 de la directive TVA.
•Subsidiarité (en cas de compétence non exclusive)
Compte tenu de la disposition de la directive TVA sur laquelle se fonde la proposition, le principe de subsidiarité ne s’applique pas.
•Proportionnalité
La décision porte sur une autorisation accordée à un État membre à sa propre demande et ne constitue en rien une obligation.
Compte tenu du champ d’application restreint de la dérogation, la mesure particulière est proportionnée à l’objectif poursuivi, à savoir simplifier la perception de la taxe et lutter contre la fraude ou l’évasion fiscales. Elle ne va pas au-delà de ce qui est nécessaire pour réaliser ces objectifs.
•Choix de l'instrument
L’instrument proposé est une décision d’exécution du Conseil.
Conformément à l’article 395 de la directive TVA, l’octroi d’une dérogation aux règles communes en matière de TVA n’est possible que sur décision du Conseil, qui statue à l’unanimité sur proposition de la Commission. La décision d’exécution du Conseil constitue l’instrument le plus approprié puisqu’elle peut être adressée à un seul État membre.
3.RÉSULTATS DES ÉVALUATIONS EX POST, DES CONSULTATIONS DES PARTIES INTÉRESSÉES ET DES ANALYSES D'IMPACT
•Consultation des parties intéressées
Il n’y a pas eu de consultation des parties intéressées. La présente proposition fait suite à une demande de la Hongrie et concerne exclusivement cet État membre.
•Obtention et utilisation d'expertise
Il n’a pas été nécessaire de faire appel à des experts externes.
•Analyse d'impact
La proposition de décision d’exécution vise à protéger les recettes fiscales et les intérêts budgétaires à l’égard d’entreprises faisant l’objet d’une procédure d’insolvabilité qui effectuent des livraisons de biens d’équipement ou des livraisons de biens ou prestations de services dont la valeur normale excède 100 000 HUF. Selon la Hongrie, l’application du mécanisme d’autoliquidation à ces types d’opérations a utilement permis de simplifier la perception de la taxe et d’éviter certaines formes de fraude ou d’évasion fiscales.
D’après les données chiffrées fournies par l’administration fiscale hongroise pour la période 2021-2023, le nombre d’assujettis concernés en 2021 – à la suite des mesures d’urgence introduites en raison de la pandémie de COVID-19 – a augmenté à 380 pour ensuite retomber à 335 en 2022 et à 212 en 2023.
Les livraisons de biens et les prestations de services enregistrées dans le cadre du mécanisme d’autoliquidation représentaient 34 milliards de HUF en 2021 et 31 milliards de HUF en 2022. En 2023, ce chiffre a atteint 157 milliards de HUF, dont 109 milliards de HUF étaient liés à un seul grand contribuable.
Par conséquent, en partant du principe que le taux normal d’imposition était appliqué, la charge fiscale était de l’ordre de 8,3 à 9,3 milliards de HUF en 2021 et en 2022 et a atteint en 2023 le chiffre exceptionnellement élevé de 42 milliards de HUF.
Étant donné qu’il est donc peu probable de recouvrer la TVA auprès des assujettis faisant l’objet d’une procédure de liquidation, l’administration fiscale hongroise estime à environ 3,6 à 4 milliards de HUF (5,6 milliards de HUF en 2023 sans tenir compte de la valeur aberrante, ou 18 milliards de HUF si celle-ci est prise en compte) les pertes de recettes de TVA qui seraient enregistrées chaque année si la dérogation n’avait pas été maintenue pour les biens meubles corporels.
La mesure dérogatoire a donc des effets positifs. Eu égard au caractère limité de ces effets, il convient que la Hongrie mette en œuvre d’autres mesures conventionnelles visant à réduire les pertes budgétaires, qui pourraient aboutir à des résultats similaires.
Compte tenu du champ d’application restreint de la dérogation et de son application limitée dans le temps, ses effets seront en tout état de cause limités.
4.INCIDENCE BUDGÉTAIRE
La proposition n’aura aucune incidence négative sur le budget de l’Union.
5.AUTRES ÉLÉMENTS
La proposition contient une clause de limitation dans le temps fixée au 31 décembre 2026.
2024/0302 (NLE)
Proposition de
DÉCISION D’EXÉCUTION DU CONSEIL
modifiant la décision d’exécution (UE) 2018/789 du Conseil autorisant la Hongrie à introduire une mesure particulière dérogatoire à l’article 193 de la directive 2006/112/CE relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée
LE CONSEIL DE L’UNION EUROPÉENNE,
vu le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne,
vu la directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée, et notamment son article 395, paragraphe 1, premier alinéa,
vu la proposition de la Commission européenne,
considérant ce qui suit:
(1)Conformément à l’article 193 de la directive 2006/112/CE, la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) est, en règle générale, due aux autorités fiscales par tout assujetti effectuant une livraison de biens ou une prestation de services imposable.
(2)Par la décision d’exécution (UE) 2018/789 du Conseil, la Hongrie a été autorisée à introduire une mesure particulière dérogatoire à l’article 193 de la directive 2006/112/CE (ci-après la «mesure particulière») en ce qui concerne le redevable de la TVA lorsque certaines opérations sont effectuées par un assujetti faisant l’objet d’une procédure de liquidation ou de toute autre procédure établissant légalement son insolvabilité.
(3)La décision d’exécution (UE) 2021/1775 du Conseil du 5 octobre 2021 a prorogé l’autorisation d’appliquer la mesure particulière jusqu’au 31 décembre 2024.
(4)Par lettre du 10 juin 2024 (ci-après la «demande»), la Hongrie a demandé à la Commission une nouvelle prorogation de l’autorisation d’appliquer la mesure particulière jusqu’au 31 décembre 2027. Conjointement à la demande, la Hongrie a présenté un rapport comprenant un réexamen de la mesure particulière.
(5)En vertu de l’article 395, paragraphe 2, deuxième alinéa, de la directive 2006/112/CE, la Commission a transmis la demande aux autres États membres par lettres datées du 7 août 2024. Par lettre datée du 9 août 2024, la Commission a notifié à la Hongrie qu’elle disposait de toutes les données utiles pour apprécier la demande.
(6)La Hongrie souligne que, souvent, les assujettis en liquidation ou faisant l’objet d’une procédure d’insolvabilité ne versent pas la TVA due aux autorités fiscales. Parallèlement, l’acquéreur, qui est un assujetti disposant du droit à déduction, peut toujours déduire la TVA acquittée, ce qui a une incidence négative sur le budget public. La Hongrie a aussi enregistré des cas de fraude dans lesquels des entreprises en liquidation adressaient de fausses factures à des entreprises en activité et réduisaient ainsi considérablement le montant de taxe à payer par ces dernières, sans garantie que l’émetteur des factures acquitterait la TVA due.
(7)Conformément à l’article 199, paragraphe 1, point g), de la directive 2006/112/CE, les États membres peuvent prévoir que le redevable de la TVA sur la livraison d’un bien immeuble vendu par le débiteur d’une créance exécutoire dans le cadre d’une procédure de vente forcée est l’assujetti destinataire de la livraison (conformément au «mécanisme d’autoliquidation»). La mesure particulière permet à la Hongrie d’étendre l’application du mécanisme d’autoliquidation à d’autres opérations effectuées par des assujettis faisant l’objet d’une procédure d’insolvabilité, à savoir les livraisons de biens d’équipement et les opérations portant sur d’autres biens ou services dont la valeur normale excède 100 000 HUF.
(8)Il ressort des informations fournies par la Hongrie que l’application du mécanisme d’autoliquidation à ces types d’opérations a utilement permis de simplifier la perception de la taxe et d’éviter certaines formes de fraude ou d’évasion fiscales. La mise en œuvre de la mesure a limité les pertes pour les recettes publiques et généré des recettes budgétaires supplémentaires.
(9)Il convient que la prorogation demandée soit limitée dans le temps, afin de laisser à l’administration fiscale du temps pour introduire d’autres mesures conventionnelles visant à régler le problème considéré et à réduire les pertes pour le budget de l’État, notamment celles qui découlent de pratiques frauduleuses, jusqu’à l’expiration de la mesure particulière, et qu’il soit ainsi inutile de proroger à nouveau ladite mesure. Une dérogation à l’article 193 de la directive 2006/112/CE en vue de permettre de recourir au mécanisme d’autoliquidation n’est accordée qu’à titre exceptionnel dans des secteurs spécifiques touchés par la fraude et constitue un moyen de dernier ressort. Par ailleurs, l’article 199 bis de la directive 2006/112/CE restera en vigueur jusqu’au 31 décembre 2026. L’autorisation d’appliquer la mesure particulière devrait donc être prolongée uniquement jusqu’au 31 décembre 2026.
(10)La mesure particulière n'aura pas d'incidence négative sur les ressources propres de l'Union provenant de la TVA.
(11)Il y a donc lieu de modifier la décision d’exécution (UE) 2018/789 en conséquence,
A ADOPTÉ LA PRÉSENTE DÉCISION:
Article premier
À l’article 2 de la décision d’exécution (UE) 2018/789, le deuxième alinéa est remplacé par le texte suivant:
«La présente décision expire le 31 décembre 2026.».
Article 2
La Hongrie est destinataire de la présente décision.
Fait à Bruxelles, le
Par le Conseil
Le président