COMMISSION EUROPÉENNE
Bruxelles, le 2.2.2024
COM(2024) 75 final
RAPPORT DE LA COMMISSION AU PARLEMENT EUROPÉEN ET AU CONSEIL
sur l'évaluation du règlement (UE) 2019/1896 relatif au corps européen de garde-frontières et de garde-côtes, y compris le réexamen du contingent permanent
{SWD(2024) 75 final}
1.Introduction
Un espace sans contrôles aux frontières intérieures nécessite un ensemble complet de règles de l’Union européenne (UE) qui garantissent une gestion commune et très efficace de nos frontières extérieures communes, comme le souligne la stratégie de la Commission de 2021 pour un espace Schengen. La mission de l’Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes (Frontex) est d’aider les États membres à gérer les frontières extérieures de manière efficace et efficiente et à faire face aux menaces et aux défis migratoires à ces frontières, dans le plein respect des droits fondamentaux.
Le Conseil européen des 26 et 27 octobre 2023 appelle l’ensemble des institutions et des États membres à s’engager dans des efforts concertés pour mobiliser tous les domaines d’action pertinents aux niveaux national et de l’UE afin d’améliorer la sécurité intérieure, y compris en renforçant la protection des frontières extérieures, la lutte contre les passeurs et la coopération étroite avec les pays tiers. Le corps européen de garde-frontières et de garde-côtes, y compris Frontex, doit jouer un rôle déterminant dans cet effort.
Ces dernières années, l’UE a pris un certain nombre de décisions historiques pour renforcer ses frontières extérieures, l’objectif étant de faire de la gestion des frontières extérieures de l’UE l’un des systèmes les plus performants au monde. Les mandats des agences clés, telles que Frontex et l’Agence de l’Union européenne pour la gestion opérationnelle des systèmes d’information à grande échelle (eu-LISA), ont été renforcés, un nouveau mécanisme d’évaluation de Schengen a été lancé en octobre 2022, une nouvelle infrastructure informatique aux frontières extérieures est en cours de mise en œuvre et le processus de délivrance des visas sera numérisé d’ici à 2030. Dans ce contexte, le contingent permanent du corps européen de garde-frontières et de garde-côtes, qui a été institué par le règlement (UE) 2019/1896 relatif au corps européen de garde-frontières et de garde-côtes (ci-après dénommé «règlement relatif au corps européen de garde-frontières et de garde-côtes») et dont la mise en place se fait progressivement jusqu’à la fin de 2027, est un véritable exemple d’intégration européenne dans le domaine de la gestion des frontières extérieures. Pour la toute première fois, l’UE dispose de son propre service en uniforme. Le contingent permanent, composé de 10 000 agents de Frontex et agents nationaux, sera, à tout moment, disponible pour aider les États membres confrontés à des difficultés aux frontières extérieures communes et améliorer l’efficacité des retours.
Frontex et les autorités des États membres chargées de la gestion des frontières, des retours et de la réintégration coopèrent dans le cadre du corps européen de garde-frontières et de garde-côtes. Pour que cette coopération soit aussi efficace que possible, le règlement relatif au corps européen de garde-frontières et de garde-côtes charge l’Agence et les États membres de mettre en œuvre efficacement la gestion européenne intégrée des frontières en tant que responsabilité partagée. Dans le cadre de cet effort, la Commission a publié, le 14 mars 2023, une communication instituant la politique stratégique pluriannuelle pour la gestion européenne intégrée des frontières. Frontex l’a complété dans sa stratégie technique et opérationnelle adoptée le 20 septembre 2023.
En vertu de l’article 121 du règlement relatif au corps européen et de garde-côtes, au plus tard le 5 décembre 2023, puis tous les quatre ans, la Commission procède à l’évaluation du règlement. L’évaluation porte en particulier sur l’incidence, l’efficacité et l’efficience de l’action de Frontex. La Commission est tenue de faire rapport au Parlement européen, au Conseil et au conseil d’administration des résultats de l’évaluation.
La Commission est également tenue de procéder, pour le 31 décembre 2023 au plus tard, à un réexamen du contingent permanent, y compris de sa composition, de sa compétence et de son professionnalisme.
La Commission a procédé à l’évaluation et au réexamen entre mai 2022 et octobre 2023. Ces exercices ont été fondés sur une vaste consultation associant les autorités des États membres, le Parlement européen, le Conseil, Frontex elle-même et les agences compétentes de l’UE, y compris l’Agence des droits fondamentaux. Ces travaux ont également été étayés par une étude externe.
Le présent rapport expose les conclusions que la Commission a tirées de l’évaluation du règlement et du réexamen du contingent permanent, qui sont tous deux détaillés dans le document de travail des services de la Commission qui accompagne le rapport. Or, indépendamment du fait que la mise en œuvre du règlement n’est pas encore arrivée à son terme, l’évaluation et le réexamen ont mis en évidence des retards et des lacunes considérables dans certains domaines. Pour les combler, le rapport propose également des mesures, sous la forme d’un plan d’action, afin d’atteindre pleinement les objectifs de Frontex et du corps européen de garde-frontières et de garde-côtes.
2.Résumé de l’évaluation
Malgré des défis importants, tels que la pandémie de COVID-19, l’instrumentalisation de la migration et la guerre d’agression menée par la Russie contre l’Ukraine, l’évaluation se conclut par un bilan positif en ce qui concerne la pertinence et la valeur ajoutée européenne du règlement relatif au corps européen de garde-frontières et de garde-côtes, qui continue d’offrir une base suffisante pour relever les défis actuels et futurs aux frontières extérieures de l’UE.
La migration irrégulière reste un défi important, nécessitant une réponse commune et coordonnée de la part de l’UE et de ses États membres, sur le plan tant intérieur qu’extérieur, en coopération avec les pays partenaires. Conformément au considérant 6 du code frontières Schengen, le «contrôle aux frontières devrait contribuer à la lutte contre l’immigration illégale et la traite des êtres humains, ainsi qu’à la prévention de toute menace sur la sécurité intérieure, l’ordre public, la santé publique et les relations internationales des États membres». La mise en œuvre du règlement relatif au corps européen de garde-frontières et de garde-côtes a contribué à renforcer la gestion des frontières extérieures de l’UE, dans le plein respect des droits fondamentaux, et à améliorer l’efficacité de la politique de l’UE en matière de retour. Elle a également permis le lancement réussi, bien que graduel, du contingent permanent du corps européen de garde-frontières et de garde-côtes.
Depuis 2019, l’Agence a renforcé son soutien opérationnel aux États membres dans divers domaines relevant de son mandat, répondant ainsi en grande mesure à leurs besoins. Le nombre d’opérations conjointes menées entre 2020 et 2023 n’a cessé d’augmenter. En 2023, l’Agence a lancé 24 opérations conjointes, contre 15 en 2020, 19 en 2021 et 20 en 2022, et elle comptait 2 874 personnes déployées à la mi-octobre 2023, contre 1 122 en 2020. Au cours de la période soumise à évaluation, l’Agence a pris de plus en plus d’initiatives en proposant un soutien opérationnel aux États membres sur la base de sa propre analyse des priorités opérationnelles.
Frontex a également continué d’accroître le soutien aux États membres dans les activités liées aux retours. En 2022, l’Agence a apporté un soutien au retour effectif de 24 868 ressortissants de pays tiers, soit une augmentation de 36 % par rapport à l’année précédente. Avec le mandat renforcé dans le domaine des retours, l’Agence, parallèlement, s’emploie à accroître encore le déploiement d’escortes pour les retours forcés et d’agents d’appui, et à renforcer les activités menées dans le cadre des services conjoints de réintégration.
La coopération avec les pays partenaires, en tant qu’élément important du mandat de Frontex et conformément à sa stratégie de coopération internationale, s’est progressivement intensifiée également. En 2022, Frontex a renforcé son engagement opérationnel dans les pays partenaires en élargissant sa zone opérationnelle et en renforçant sa capacité opérationnelle. En octobre 2023, Frontex comptait près de 600 membres du personnel déployés dans le cadre de dix opérations conjointes dans huit pays tiers
. Une nouvelle opération («Joint Operation North Macedonia») a été lancée en 2023 sur la base de l’accord sur le statut entre la Macédoine du Nord et l’Union européenne, qui est entré en vigueur en avril 2023.
En outre, l’analyse des risques et les évaluations de la vulnérabilité de l’Agence sont devenues des outils bien établis qui contribuent à la connaissance de la situation et étayent une réponse opérationnelle appropriée. Au cours de la période soumise à évaluation, l’Agence a mis au point des méthodes très complètes et a constamment amélioré la qualité de ses produits d’analyse des risques, qui sont de plus en plus axés sur la prévision et la prévention, ainsi que de ses évaluations de la vulnérabilité afin d’évaluer et de suivre les capacités des États membres aux frontières extérieures.
Bien que la période de mise en œuvre concrète du mandat de Frontex fixée dans le règlement relatif au corps européen de garde-frontières et de garde-côtes se poursuive encore, et ce jusqu’en 2027, l’évaluation a mis en évidence un certain nombre de difficultés qui limitent actuellement l’efficacité du règlement. Certaines dispositions du règlement pourraient certes être plus claires (par exemple, en ce qui concerne les droits fondamentaux), mais la plupart des difficultés recensées ne découlent pas du règlement lui-même; elles résultent plutôt de faiblesses organisationnelles, techniques ou opérationnelles, qui prennent principalement la forme de retards, dans sa mise en œuvre (par exemple, absence de structure de commandement claire pour le contingent permanent, lacunes dans certains profils du contingent permanent). Enfin, une autre série de problèmes sapant l’efficacité de la mise en œuvre découle de certaines limitations (comme le manque de reconnaissance des pouvoirs exécutifs conférés au contingent permanent dans la législation nationale de certains États membres) ou de l’existence de dispositions de la législation de l’UE qui vont au-delà du règlement relatif au corps européen de garde-frontières et de garde-côtes lui-même (régissant, par exemple, le traitement des données à caractère personnel par l’Agence).
Conclusions clés dans les principaux domaines de l’évaluation
L’analyse de la structure de gouvernance de Frontex montre qu’il existe une répartition claire des tâches entre le conseil d’administration et le directeur exécutif. La structure de contrôle de l’Agence, qui associe le Parlement européen, le Conseil et la Commission, est également claire et efficace. Néanmoins, il ressort de l’évaluation que la gouvernance interne de Frontex n’est pas encore pleinement en mesure de soutenir de manière efficace son mandat de 2019 en raison du chevauchement des responsabilités et d’approches parfois contradictoires. La mise en œuvre de la nouvelle structure organisationnelle adoptée par le conseil d’administration en novembre 2023 devrait régler ce problème. Une autre constatation est que les autorités chargées des procédures de retour ne sont pas encore suffisamment représentées au sein du conseil d’administration. À l’heure actuelle, les États membres au sein du conseil d’administration continuent d’être représentés principalement par leurs autorités nationales chargées de la gestion des frontières, qui ne sont souvent pas compétentes en matière de retour.
Si l’on se penche sur les activités de Frontex, la connaissance de la situation et l’analyse des risques comptent parmi les activités considérées comme apportant la plus grande valeur au niveau de l’UE. Frontex élabore de multiples produits d’analyse des risques au service d’un large éventail de parties prenantes, conformément aux objectifs fixés dans le règlement relatif au corps européen de garde-frontières et de garde-côtes, et couvre une grande variété de domaines thématiques et géographiques. Ces produits d’analyse des risques sont utilisés par les États membres pour alimenter leur propre analyse au niveau national et, dans une certaine mesure, leur planification opérationnelle. Par ailleurs, ils contribuent également aux mécanismes de l’UE pertinents et sont essentiels pour guider les activités opérationnelles de Frontex.
EUROSUR, le cadre intégré pour l’échange d’informations et pour la coopération opérationnelle au sein du corps européen de garde-frontières et de garde-côtes, a joué un rôle important dans les progrès réalisés par l’Agence pour fournir des informations totalement actualisées, fiables et exploitables grâce à une surveillance en temps (quasi) réel, 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, des situations et des crises. Il a contribué à créer un tableau de situation européen, à fournir un cadre commun pour l’échange d’informations, à améliorer la connaissance de la situation et à augmenter les capacités de réaction. Le volume, la qualité, le flux et la rapidité des données échangées ont considérablement augmenté ces dernières années. Toutefois, EUROSUR n’est toujours pas en mesure d’apporter une connaissance complète et entièrement actualisée de la situation aux frontières extérieures de l’UE. Cela s’explique principalement par des problèmes de mise en œuvre, tels que le fait que tous les États membres ne signalent pas les événements se produisant aux frontières avec la même exhaustivité ou la même régularité.
Le respect des droits fondamentaux fait partie intégrante de la gestion européenne intégrée des frontières. Selon l’évaluation, le respect par l’Agence du droit de l’Union et du droit international, en particulier le cadre en matière de droits fondamentaux en place au sein de Frontex, contribue efficacement à la prévention des violations des droits fondamentaux dans le cadre du soutien apporté aux États membres et aux pays tiers. Depuis 2021, avec le soutien résolu de son conseil d’administration, Frontex a activement et efficacement améliorer ses règles internes, ses pratiques et la formation du contingent permanent afin de renforcer le respect, la protection et la promotion des droits fondamentaux dans toutes ses activités. Néanmoins, l’évaluation attire l’attention sur la question de savoir dans quelle mesure Frontex peut être tenue responsable des actes des États membres et comment les actions de l’Agence pourraient contribuer efficacement à garantir que les États membres hôtes respectent les droits fondamentaux dans le cadre des activités conjointes, telles que les opérations conjointes. À cet égard, le cadre de l’Agence prévoit la possibilité de recourir à l’article 46 du règlement relatif au corps européen de garde-frontières et de garde-côtes, qui permet de suspendre des activités opérationnelles ou d’y mettre un terme dans un État membre. Si l’article 46 constitue un outil essentiel à la disposition de l’Agence, il ne devrait être utilisé qu’en dernier recours, étant donné que l’évaluation suggère que la présence de Frontex peut contribuer de manière positive à un meilleur respect global des droits fondamentaux. Par conséquent, l’évaluation conclut qu’à ce stade, il n’est pas nécessaire de modifier l’article 46.
Les activités opérationnelles de Frontex ont une valeur ajoutée manifeste pour les États membres, en soutenant la mise en œuvre des priorités stratégiques de l’UE. Frontex fournit une assistance technique et opérationnelle étendue aux États membres au moyen d’opérations conjointes et d’interventions rapides aux frontières, y compris une assistance technique et opérationnelle à l’appui des opérations de recherche et de sauvetage. L’efficacité du soutien opérationnel fourni par l’Agence est parfois quelque peu limitée par la disponibilité actuelle de certains profils de personnel du contingent permanent et de certains types d’équipements demandés par les États membres. La nouvelle structure de commandement du contingent permanent, qui se met actuellement en place, renforcera également l’efficacité de l’Agence. D’une manière générale, le soutien opérationnel de Frontex semble avoir contribué à la réalisation des objectifs du corps européen de garde-frontières et de garde-côtes; toutefois, la coopération entre Frontex et les autorités nationales pourrait être renforcée afin d’accroître l’efficacité des déploiements.
La coopération de Frontex avec d’autres agences de l’UE, telles qu’Europol, et avec des pays tiers a été entravée dans une certaine mesure par des retards dans la mise en œuvre d’un cadre approprié de protection des données à caractère personnel permettant un échange efficace d’informations. Les règles nécessaires en matière de protection des données ont été adoptées par le conseil d’administration de Frontex au début de 2024. S’agissant des pays tiers, les règles en matière de protection des données à caractère personnel figurant dans le modèle d’arrangement de travail pour les pays tiers adopté par la Commission en décembre 2021 sont en cours de révision.
Frontex a joué un rôle actif et positif dans la coopération européenne en ce qui concerne les fonctions de garde-côtes, notamment grâce à la coopération interservices avec l’Agence européenne de contrôle des pêches et l’Agence européenne pour la sécurité maritime dans le cadre d’un arrangement de travail tripartite.
La coopération entre Frontex et Europol en particulier doit être intensifiée afin de renforcer la lutte contre le trafic de migrants et la traite des êtres humains, et d’atteindre ainsi les objectifs fixés par la Commission dans ses récentes propositions visant à moderniser le cadre juridique de la lutte contre le trafic de migrants. La conclusion d’un arrangement de travail entre les deux agences, qui est en cours de négociation, facilitera notamment le transfert de données à cette fin.
Outre la gestion des frontières extérieures, le règlement relatif au corps européen de garde-frontières et de garde-côtes charge explicitement Frontex de fournir une assistance technique et opérationnelle dans la mise en œuvre des mesures de retour. L’évaluation conclut que Frontex a effectivement soutenu les États membres dans tous les aspects du processus de retour, notamment en organisant des opérations de retour conjointes et d’autres formes de soutien liées aux retours, y compris la réintégration. Il ressort toutefois de l’évaluation que la coopération entre l’Agence, les autorités nationales chargées des procédures de retour et la Commission européenne peut encore être améliorée.
3.Résumé du réexamen du contingent permanent
L’une des innovations les plus marquantes du règlement relatif au corps européen de garde-frontières et de garde-côtes est la création d’un contingent permanent de garde-frontières et de garde-côtes européens, le tout premier service en uniforme de l’UE. Le contingent fournit à Frontex un outil unique pour soutenir les États membres sur le terrain dans leurs efforts visant à protéger les frontières extérieures, à lutter contre la criminalité transfrontière (y compris le trafic de migrants, la traite des êtres humains, le terrorisme et les menaces hybrides) et à renforcer considérablement le retour effectif et durable des migrants en situation irrégulière.
Le contingent permanent doit être mis en place et déployé par étapes conformément au règlement. Il contribue à promouvoir une culture commune pour le corps européen de garde-frontières et de garde-côtes, contribue au respect des droits fondamentaux et promeut les normes les plus élevées dans la mise en œuvre de l’acquis de Schengen et des bonnes pratiques.
Le contingent permanent est toujours en cours de constitution et vise à devenir un soutien encore plus fiable et permanent aux États membres.
Le réexamen conclut que l’évolution des tendances migratoires nécessite un déploiement souple et flexible de l’aide aux États membres, afin de combler les lacunes et de contribuer à gérer des situations inattendues. Dans ce contexte, l’augmentation récente de la migration irrégulière met également en évidence la nécessité de lutter plus efficacement contre le trafic de migrants et la traite des êtres humains. En outre, les défis en matière de sécurité, qui vont du terrorisme aux menaces hybrides, sont en augmentation, comme en témoignent les derniers attentats en Europe. Des cas d’instrumentalisation de la migration, qui sont des tentatives pour déstabiliser l’UE et ses États membres, ont également été signalés. Dans le même temps, le nombre de franchissements autorisés des frontières extérieures continue d’augmenter régulièrement, soulignant la nécessité d’assurer la fluidité des voyages effectués de bonne foi pour les affaires, le tourisme et la coopération internationale dans le contexte de mondialisation actuel. Pour ce faire, l’Agence doit davantage se tourner vers l’avenir et mieux prévoir les nouvelles tendances. Les États membres, quant à eux, doivent répondre efficacement aux demandes de déploiement de personnel de l’Agence. Cela exige également que les profils spécifiques de certains membres du contingent permanent, qui définissent leur rôle opérationnel, puissent être adaptés à l’évolution de la situation.
Effectif total et composition d’ensemble du contingent permanent
Même si la création du contingent permanent en est encore à ses débuts, elle a déjà fait la preuve de sa valeur ajoutée et son soutien opérationnel est apprécié par les États membres. L’augmentation de la taille du contingent permanent pour atteindre le nombre requis de 10 000 membres d’ici à 2027 est en cours. Ce nombre était initialement fondé sur les besoins opérationnels évalués au moment où le contingent permanent a été proposé, et sur les évolutions aux frontières extérieures de l’UE. Il est globalement proportionnel aux capacités nationales. Le règlement relatif au corps européen de garde-frontières et de garde-côtes prévoit qu’un soutien à la mise en place du contingent permanent est accordé aux États membres dans l’intérêt de l’ensemble du corps européen de garde-frontières et de garde-côtes. Bien que ce processus nécessite des efforts considérables de la part de l’Agence et des États membres, les résultats du réexamen, compte tenu également de la situation actuelle aux frontières extérieures de l’UE, ne justifient pas d’ajustements à ce stade.
Toutefois, la composition actuelle du contingent permanent doit être affinée pour correspondre davantage aux besoins opérationnels. Il existe des lacunes dans la disponibilité de certains experts et profils spécialisés. Les États membres espèrent bénéficier d’un soutien supplémentaire de la part du personnel de catégorie 1 dans certains domaines spécialisés, mais le personnel statutaire de l’Agence ne peut pas encore fournir cette expertise spécifique dans tous les domaines où cela est nécessaire, et les États membres eux-mêmes ne disposent pas de spécialistes en nombre suffisant. Cette situation devrait s’améliorer à mesure que la formation du contingent permanent se concentrera sur les profils les plus demandés.
En outre, il convient de remédier à certaines limitations découlant du statut des fonctionnaires de l’UE qui ont une incidence sur l’efficacité du déploiement du personnel de catégorie 1 du contingent permanent, telles que les conditions de travail, les droits à allocation, les grades et les règles de reclassement ou de déploiement, principalement par l’adoption de nouvelles règles d’exécution ou la modification des règles existantes, conformément aux dispositions pertinentes du statut. En outre, il est essentiel de remédier aux lacunes en matière de diversité, notamment en ce qui concerne l’équilibre national pour le personnel de catégorie 1 du contingent permanent. La nouvelle stratégie de l’Agence en matière de ressources humaines devrait permettre à Frontex d’améliorer la situation, y compris en ce qui concerne l’égalité entre les hommes et les femmes.
Après les premiers retards dans le recrutement du personnel statutaire pour le contingent permanent, la mise en œuvre progresse à présent à pleine vitesse. Pour l’avenir, il est primordial d’assurer des ressources de recrutement adéquates et de mettre en place des processus appropriés. En outre, il est essentiel de déployer le contingent permanent pour des tâches opérationnelles le long des frontières extérieures, dans les pays tiers et dans les opérations de retour. Le siège de l’Agence à Varsovie ne devrait compter qu’un nombre très limité de membres du contingent permanent affectés à des fonctions de soutien.
L’Agence a accompli des progrès importants dans le recrutement d’agents de catégorie 1 du contingent permanent, faisant passer le nombre d’agents de catégorie 1 pouvant être déployés de 678
à la fin de 2022 à 970 en septembre 2023. L’Agence a donc presque atteint le nombre requis de personnel déployable en 2023. L’Agence a également déclaré 450 agents de catégorie 2 du contingent permanent détachés et 3 899 agents de catégorie 3 du contingent permanent nommés. L’objectif de 1 500 membres du contingent permanent de catégorie 4 fixé pour 2023 a été atteint
.
La réserve de réaction rapide (catégorie 4) a été créée pour répondre à des besoins imprévus avant que le contingent permanent n’atteigne une masse critique. Jusqu’à présent, il n’a pas été nécessaire d’utiliser cette réserve. D’ici à 2025, d’autres catégories du contingent permanent, telles que le personnel statutaire, les détachements de longue durée et les déploiements de courte durée depuis les États membres, atteindront un niveau permettant la réaffectation des ressources en cas de besoins imprévus et disproportionnés. La suppression progressive prévue de la réserve de réaction rapide se poursuit.
La taille des contributions nationales est considérée comme conforme aux capacités nationales. Les contributions individuelles des États membres varient de 0,14 % à 1,5 % des capacités nationales. La répartition actuelle s’est révélée efficace. Un volume important de fonds de l’UE a été alloué aux États membres pour les aider à renforcer leurs capacités, en termes tant de personnel que de moyens techniques. Toutefois, la mise en place du corps européen de garde-frontières et de garde-côtes nécessite également des efforts importants de la part des États membres et certains sont confrontés à des difficultés pour renforcer leurs propres capacités. Les contributions au contingent permanent définies par le règlement semblent dans l’ensemble suffisantes pour atteindre les objectifs du règlement relatif au corps européen de garde-frontières et de garde-côtes, étant donné que l’Agence a pu répondre à la quasi-totalité des demandes d’assistance urgentes des États membres.
Professionnalisme et formation du contingent permanent
L’Agence a mis en place des mesures de formation destinées au personnel du contingent permanent, afin qu’il respecte des normes professionnelles élevées et puisse être déployé efficacement. Il s’agit notamment de la connaissance et du respect des obligations et normes pertinentes en matière de droits fondamentaux, du droit international en matière de droits de l’homme et du droit humanitaire. Toutefois, le réexamen montre que plusieurs aspects du concept de formation pour le contingent permanent doivent être davantage développés afin de garantir que le nombre, le contenu et la qualité de la formation du personnel statutaire (catégorie 1) lui permettent d’apporter un soutien efficace aux États membres dans des domaines spécialisés. Il s’agit également de mettre à jour les programmes de formation afin de garantir une formation pratique suffisante pour préparer le personnel statutaire à son travail aux frontières. L’Agence doit garantir des ressources adéquates en matière de formation.
Le système de formation doit être mis à jour, en tenant compte de la mise en œuvre de la gestion européenne intégrée des frontières, dans le cadre de l’élaboration et de la mise en œuvre de la feuille de route pour le développement capacitaire du corps européen de garde-frontières et de garde-côtes, qui est un instrument essentiel prévu par le règlement pour assurer la planification intégrée des capacités du corps européen de garde-frontières et de garde-côtes. L’Agence élabore actuellement cette feuille de route avec le concours des États membres, dans le but de faire converger les plans nationaux de développement capacitaire et la planification pluriannuelle des ressources de l’Agence, afin d’optimiser les investissements à long terme du corps européen de garde-frontières et de garde-côtes dans son ensemble. Elle devrait guider les États membres dans la manière de renforcer leur personnel et leurs ressources, notamment en se coordonnant étroitement pour le recrutement et la formation de leur personnel, y compris le contingent permanent.
Outre les problèmes recensés concernant sa formation, le personnel statutaire est également confronté à d’autres difficultés qui l’empêchent de faire pleinement usage de ses compétences. Ces questions doivent également être abordées afin de garantir que le contingent permanent fonctionne de manière professionnelle et efficace. Par exemple, les procédures d’accès aux bases de données nationales, les problèmes linguistiques et la dépendance à l’égard de l’État membre hôte dans plusieurs domaines administratifs et procéduraux limitent la capacité du personnel à travailler de manière indépendante. Il n’est pas possible d’apporter des solutions rapides et faciles à ces problèmes, ceux-ci nécessitant plutôt une coopération étroite et continue entre l’Agence et les États membres.
En outre, dans le cadre de la mise en œuvre du règlement, plusieurs questions pratiques sont apparues et doivent être abordées par l’Agence pour que le contingent permanent puisse apporter son plein soutien aux États membres tout en obtenant le plus haut niveau possible de professionnalisme. Il s’agit notamment de la nécessité d’améliorer la planification, la gestion, l’organisation (y compris les déploiements et redéploiements), les arrangements administratifs, la gestion des ressources humaines, les conditions d’emploi, les communications internes, la logistique, les procédures opérationnelles standard et la coordination avec l’État membre hôte et le soutien à celui-ci.
4. Conclusions
En dépit des retards et des lacunes énumérés plus haut, le corps européen de garde-frontières et de garde-côtes, tel qu’il est conçu dans le règlement relatif au corps européen de garde-frontières et de garde-côtes, fonctionne bien, compte tenu de l’état actuel de mise en œuvre. Il a largement atteint ses objectifs de la manière escomptée, certaines activités clés devant encore être pleinement mises en œuvre. Les parties prenantes conviennent que les objectifs du règlement relatif au corps européen de garde-frontières et de garde-côtes n’auraient pas pu être atteints de manière suffisante par les États membres agissant seuls. Par conséquent, le règlement relatif au corps européen de garde-frontières et de garde-côtes reste pertinent pour faire face à la situation actuelle et à son évolution future aux frontières extérieures de l’UE. La migration irrégulière reste un défi majeur et nécessite une réponse commune et coordonnée de la part de tous les États membres dans un avenir prévisible.
Le règlement contribue au développement et à la mise en œuvre efficaces de toutes les composantes de la gestion européenne intégrée des frontières. Bien que la mise en œuvre du règlement soit toujours en cours, elle a déjà permis de mettre en place et de déployer le tout premier service en uniforme de l’UE, à savoir le contingent permanent du corps européen de garde-frontières et de garde-côtes.
Le contingent permanent établi dans le règlement relatif au corps européen de garde-frontières et de garde-côtes est un élément bénéfique et nécessaire de la mise en œuvre de la gestion européenne intégrée des frontières. Il a prouvé qu’il contribue à assurer une gestion efficace des frontières aux frontières extérieures et à garantir la sécurité de l’espace Schengen. La taille et la composition du contingent permanent, ainsi que les contributions annuelles à fournir par les États membres, telles que définies dans les annexes du règlement relatif au corps européen de garde-frontières et de garde-côtes, restent justifiées et proportionnées.
Néanmoins, la mise en œuvre du contingent permanent n’est pas encore achevée et se heurte à plusieurs difficultés. À cet égard, il importe de continuer à suivre l’évolution des besoins opérationnels afin de veiller à ce que le contingent permanent reste apte à réagir à la situation en constante évolution aux frontières extérieures de l’UE. En outre, il est essentiel que l’Agence et les États membres mettent en œuvre le cycle stratégique d’orientation politique pluriannuel pour la gestion européenne intégrée des frontières et le processus connexe de planification intégrée des opérations et de planification d’urgence. Le contingent permanent contribuera également à améliorer les capacités de réaction aux frontières extérieures afin de repérer, de prévenir et de combattre l’immigration illégale et la criminalité transfrontière. Cela contribue à sauver des vies de migrants et garantit la protection de ces derniers par des déploiements et des redéploiements efficaces et flexibles du contingent permanent en fonction des besoins opérationnels actuels.
La Commission estime que l’évaluation du règlement et le réexamen du contingent permanent confirment que, d’une manière générale, il n’est pas nécessaire de réviser immédiatement le règlement relatif au corps européen de garde-frontières et de garde-côtes ou ses annexes. Le mandat révisé confié à l’Agence par le règlement relatif au corps européen de garde-frontières et de garde-côtes, qui a été adopté en 2019, est en cours d’exécution, et la Commission estime qu’à l’heure actuelle la plupart des lacunes recensées lors de l’évaluation et du réexamen peuvent encore être comblées pendant la période de mise en œuvre qui reste à courir.
Afin de rationaliser les mesures nécessaires pour remédier à ces constatations, d’accompagner la mise en œuvre du règlement relatif au corps européen de garde-frontières et de garde-côtes et de le rendre pleinement effectif d’ici à 2027, la Commission propose un plan d’action qui sera appliqué par l’Agence, son conseil d’administration, les États membres et la Commission.
Parmi les différents problèmes recensés dans les domaines évalués, les actions ci-après sont considérées comme revêtant une importance particulière.
La mise en œuvre intégrale de la nouvelle structure organisationnelle de l’Agence, en particulier en ce qui concerne le contingent permanent, est considérée comme une étape importante dans la réalisation du mandat principal de l’Agence, qui est de superviser le bon fonctionnement du contrôle aux frontières extérieures et de fournir une assistance aux États membres dans la mise en œuvre des aspects opérationnels de la gestion des frontières extérieures. L’élaboration et la mise en œuvre d’une nouvelle structure pour la chaîne de commandement, dotée de lignes hiérarchiques et de canaux de communication clairs, sont considérées comme essentielles pour améliorer l’efficacité opérationnelle du contingent permanent.
En outre, il est essentiel de garantir une vision stratégique à long terme, une planification et une prévisibilité pour les investissements clés dans les capacités au sein de l’Agence et des États membres. À cette fin, il est clairement nécessaire d’élaborer et de mettre à jour régulièrement la feuille de route sur les capacités et les plans nationaux de développement capacitaire. Le processus de planification intégrée du corps européen de garde-frontières et de garde-côtes doit également être élaboré et mis en œuvre. Cette étape est essentielle pour garantir des déploiements rapides et flexibles en fonction des besoins opérationnels.
Les activités de retour occupent une place de plus en plus importante dans le nouveau mandat de l’Agence. En conséquence, il est essentiel que le conseil d’administration assure un pilotage stratégique approprié des questions liées aux retours, avec la possibilité d’envisager également des discussions lors des réunions de la table ronde de haut niveau. L’amélioration de la coordination et de la communication d’une part entre la Commission, en particulier le coordinateur chargé des retours, et l’Agence et, d’autre part, entre l’Agence et les autorités nationales responsables est essentielle pour que l’Agence puisse apporter un soutien opérationnel efficace aux États membres, y compris en matière de retour, dans le plein respect des droits fondamentaux.
L’objectif reste d’atteindre d’ici à 2027 le nombre prévu de 10 000 membres du personnel du contingent permanent pleinement opérationnels. Les actions garantissant un niveau satisfaisant de formation répondant aux besoins opérationnels, en particulier pour la catégorie 1 du contingent permanent et l’efficacité des procédures de recrutement, sont particulièrement importantes. En outre, il est aussi nécessaire d’examiner plus avant comment remédier à certains problèmes découlant du statut des fonctionnaires de l’UE, ou de ses règles d’exécution, pour le personnel du contingent permanent de catégorie 1 afin que le personnel statutaire en uniforme de l’Agence soit pleinement opérationnel.
Enfin, en ce qui concerne la connaissance de la situation, il sera envisagé de prendre des mesures qui fournissent un tableau de situation et une analyse des risques précis, complets et actualisés. Cet objectif peut être atteint, par exemple, en incluant mieux les données d’évaluation de la vulnérabilité dans les produits d’analyse des risques et en poursuivant le développement d’EUROSUR. Ces mesures feront l’objet d’une réflexion plus approfondie afin que ces produits analytiques puissent mieux soutenir la prise de décision opérationnelle.
La Commission suivra de près la mise en œuvre du plan d’action annexé au présent rapport et pourrait proposer des ajustements, y compris de nature législative, si cela s’avérait nécessaire à l’avenir.