21.12.2022 |
FR |
Journal officiel de l'Union européenne |
C 486/59 |
Avis du Comité économique et social européen sur le thème «La transition énergétique et numérique dans les zones rurales»
(avis d’initiative)
(2022/C 486/09)
Rapporteur: |
John COMER |
Corapporteur: |
Luís MIRA |
Décision de l’assemblée plénière |
20.1.2022 |
Base juridique |
Article 52, paragraphe 2, du règlement intérieur |
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Avis d’initiative |
Compétence |
Section «Agriculture, développement rural et environnement» |
Adoption en section |
30.6.2022 |
Adoption en session plénière |
21.9.2022 |
Session plénière no |
572 |
Résultat du vote (pour/contre/abstentions) |
173/1/2 |
1. Conclusions et recommandations
1.1. |
Le CESE estime qu’une stratégie combinée de transition énergétique et numérique dans les zones rurales n’a pas bénéficié du niveau d’attention et de soutien escompté. Il appelle à la mise en œuvre rapide de la vision à long terme de la Commission pour les zones rurales de l’Union européenne et à la mobilisation des parties prenantes dans le cadre du pacte rural de l’Union européenne. Les zones rurales les plus vulnérables doivent faire l’objet d’une attention particulière afin que personne ne soit laissé pour compte. Il est essentiel de mettre l’accent sur la précarité énergétique et les zones rurales. |
1.2. |
Le CESE est convaincu que le succès futur de l’Europe dépendra largement de la manière dont elle traite les zones rurales, de façon équilibrée par rapport aux zones urbaines. Les populations rurales ne doivent pas être désavantagées en ce qui concerne la numérisation et les options disponibles en matière de consommation d’énergie, eu égard par exemple à la nécessité de recourir à la voiture particulière en raison du manque de transports publics. |
1.3. |
Il s’impose de s’appuyer sur le rôle des communautés locales pour parvenir à une transition énergétique juste combinée au développement local en créant et en renforçant les communautés d’énergie renouvelable et les communautés énergétiques citoyennes, ce qui implique notamment que se réunissent sur une base volontaire les citoyens, les autorités locales et les PME afin de promouvoir les avantages sociaux et économiques. |
1.4. |
Le CESE demande le renforcement des politiques et instruments suivants:
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1.5. |
Le CESE invite la Commission à proposer une législation sur le numérique rural (Digital Rural Act) en qualité de troisième composante de la stratégie numérique de l’Union européenne, en sus des législations sur les marchés numériques et les services numériques. La numérisation ouvrira de nouvelles perspectives (en particulier pour les jeunes), ce qui pourrait modifier les tendances démographiques en permettant aux personnes de travailler depuis leur domicile et depuis des «antennes» de leur entreprise situées en milieu rural. |
1.6. |
Le CESE souligne qu’il est impératif de garantir l’accès à une connexion internet à haut débit sur l’ensemble du territoire, y compris dans les zones à faible densité de population, pour que les plans nationaux ou européens pour la reprise et la résilience puissent bénéficier pleinement de la contribution des zones rurales. Il demande instamment aux gouvernements soit de créer les conditions permettant aux opérateurs privés de fournir ce service, soit de faire appel à une entreprise publique pour fournir ce service. |
1.7. |
Le CESE estime que les pouvoirs publics et les prestataires de services devraient développer des applications conviviales adaptées aux réalités des modes de vie et des activités en milieu rural. Le recours à ces technologies réduira par exemple l’empreinte carbone de l’agriculture (agriculture de précision) et contribuera à améliorer l’accessibilité des zones reculées (drones). Le secteur public doit intervenir si le secteur privé ne fournit pas ces solutions. |
1.8. |
Le CESE souligne que les utilisateurs ruraux, quel que soit leur âge, doivent pouvoir bénéficier d’une formation et d’une mise à niveau appropriées pour utiliser cette nouvelle technologie numérique. Personne ne doit être laissé pour compte dans les zones défavorisées et chacun doit également avoir accès aux dispositifs nécessaires, grâce à un usage partagé ou à des possibilités d’achat subventionné par l’État. |
1.9. |
En conclusion, le CESE estime que le déploiement des technologies numériques dans les zones rurales est nécessaire pour soutenir la transition énergétique. Le système énergétique en milieu rural doit être décentralisé, ce qui implique un besoin énorme d’interconnexions plus nombreuses et de meilleure qualité, d’où la nécessité de déployer des technologies numériques afin de faire coïncider l’offre et la demande et de garantir des flux énergétiques efficaces. L’application numérique en milieu rural devra être très efficace sur le plan énergétique en raison d’un moindre taux d’utilisation et d’une densité de population plus faible. La connectivité informatique à faible consommation d’énergie est une nécessité pour les zones rurales. |
1.10. |
Le CESE souligne qu’étant donné que 30 % de la population de l’Union européenne vit dans des zones rurales, une transition énergétique rurale juste est un élément essentiel de la transition juste vers une Union européenne neutre pour le climat, durable et prospère, conformément à l’agenda territorial 2030. |
1.11. |
La Commission a proposé que 20 % des fonds de NextGenerationEU soient investis dans le numérique. Le CESE recommande que tous les États membres consacrent au moins 10 % de ces fonds à la numérisation des zones rurales sans imposer de charge administrative indue. |
2. La transition énergétique dans les zones rurales
Introduction
2.1. |
Les scientifiques s’accordent généralement à considérer que la manière la plus probable dont l’humanité influence le changement climatique mondial est le rejet de dioxyde de carbone par la combustion de combustibles fossiles. |
2.2. |
Dans son ouvrage intitulé «The New Climate War», le climatologue Michael Mann affirme que le réchauffement de notre planète a désormais atteint un seuil dangereux et que nous ne prenons pas encore les mesures nécessaires pour éviter la plus grande crise mondiale jamais connue. |
2.3. |
Les effets néfastes du changement climatique se font déjà sentir à certains endroits en raison de la montée des mers. Venise et Miami doivent faire face à d’importants défis à cet égard. L’Amazonie a fait l’objet d’une déforestation massive et a subi une sécheresse provoquée par le changement climatique. La fonte de la calotte glaciaire arctique, plus rapide que prévue, est extrêmement préoccupante. |
2.4. |
Toutes les parties prenantes doivent agir à l’échelle mondiale pour combattre sans tarder le changement climatique, notamment par des mesures d’atténuation et d’adaptation visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre. La réduction rapide de l’utilisation des combustibles fossiles doit être une priorité immédiate. |
Zones rurales
2.5. |
130 millions de personnes, soit 30 % de la population de l’Union européenne, vivent dans des zones rurales. Les zones rurales sont variées et leurs caractéristiques sont fortement influencées par leur situation géographique. Dans de nombreuses régions, en particulier dans le sud de l’Europe, l’eau se raréfiera progressivement, les inondations s’aggraveront et les feux de forêts deviendront plus intenses et plus fréquents en raison du changement climatique. Dans le nord de l’Europe, l’augmentation des précipitations et des tempêtes peut occasionner et occasionnera des dommages importants et coûteux aux infrastructures. La hausse des températures intensifiera le cycle de l’eau et augmentera la fréquence des fortes tempêtes. Ces circonstances démontrent la nécessité d’une transition énergétique et numérique qui soit la plus rapide possible dans les zones rurales. |
2.6. |
L’idée d’une transition énergétique dans les zones rurales n’a pas bénéficié de l’attention qu’elle aurait méritée, ce qui est surprenant, car les ressources nécessaires à la production d’énergie renouvelable sont étroitement liées aux zones rurales. La majorité des infrastructures d’énergie renouvelable, telles que les éoliennes, les centrales solaires et les installations de biogaz, sont situées dans des zones rurales. Les réseaux de transmission sont également une caractéristique du paysage rural. De nombreux habitants des zones rurales estiment que ces structures leur sont imposées et profitent davantage aux zones urbaines. |
2.7. |
Les zones rurales ont des besoins variés et distincts en fonction de leur situation géographique. Elles peuvent être classées selon les catégories suivantes:
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2.8. |
Ces différentes zones rurales étant confrontées à des défis multiples et variés s’agissant de la mise en œuvre de la transition énergétique, une transition juste est essentielle pour atteindre l’objectif souhaité. |
2.9. |
De nombreuses zones rurales sont isolées physiquement, et se caractérisent par une activité économique peu diversifiée et une faible densité de population. Dans de nombreux cas, les communautés rurales sont plus vulnérables en raison des faibles revenus et du vieillissement de la population. Les personnes vivant seules dans des zones rurales isolées et ayant peu de relations sociales représentent un problème majeur lors de la mise en œuvre d’une transition énergétique. La précarité énergétique est un problème important dans ces régions. |
2.10. |
Bien que le déploiement de compteurs intelligents soit un élément essentiel de la transition énergétique dans les zones rurales, il semblerait qu’il ait été relativement lent à ce jour. Il convient également de veiller à ce que les ménages à faibles revenus et les personnes ayant des compétences informatiques limitées puissent utiliser au mieux les compteurs intelligents dans le cadre d’une transition énergétique juste qui ne laisse personne de côté. 25 milliards d’EUR ont été alloués au titre de la facilité pour la reprise et la résilience pour soutenir les compétences et l’éducation numériques. Les États membres doivent consacrer une part adéquate de ce fonds à la formation aux compétences numériques et à l’alphabétisation des populations rurales. Le fait que certaines parties de l’Europe ne disposent pas de l’internet est une situation intolérable à laquelle il convient de remédier au plus vite. |
2.11. |
Dans son avis sur le thème «Vers une stratégie globale en matière de développement rural et urbain durable» (1), le CESE a souligné que les politiques en matière d’agriculture, d’alimentation et de ruralité doivent être cohérentes avec celles qui concernent le climat et la biodiversité. Les aspects multifonctionnels de l’agriculture sont tout aussi importants que la promotion des activités non agricoles telles que l’implantation en zone rurale d’entreprises du secteur des services en matière d’énergies propres en vue de créer des emplois. Il convient d’explorer le potentiel du commerce électronique. |
2.12. |
La communication relative à «Une vision à long terme pour les zones rurales de l’UE» (2) comprend un pacte rural visant entre autres à favoriser la cohésion territoriale et à créer de nouvelles perspectives afin d’attirer des entreprises innovantes. La mise en œuvre de cette vision faciliterait grandement une transition énergétique juste dans les zones rurales. Le CESE s’est félicité de cette approche dans son avis sur «Une vision à long terme pour les zones rurales de l’UE» (3). |
Transports
2.13. |
L’offre de transports est un problème majeur dans les zones rurales en raison du faible développement des transports publics, de la dispersion de la population et de l’éloignement des commerces et des services. En outre, les habitants des zones rurales qui travaillent dans les centres urbains parcourent souvent de longues distances entre leur domicile et leur lieu de travail. |
2.14. |
Une planification locale et nationale est nécessaire pour mettre en place un système de transport multimodal permettant la transition vers une énergie renouvelable. Un tel système doit offrir diverses possibilités et solutions de substitution pour le transport de personnes et de marchandises. |
2.15. |
Il convient d’accorder au transport de marchandises dans les zones rurales une attention particulière au regard de la transition énergétique. Par exemple, les livraisons de fournitures agricoles et la collecte des produits agricoles doivent constituer un volet important dans le cadre de la planification de la transition énergétique. L’objectif à atteindre doit être la généralisation des poids lourds électriques et des camions à hydrogène. À court terme, les biocarburants durables et les véhicules hybrides pourraient contribuer à la réduction des émissions de gaz à effet de serre. |
2.16. |
En raison de l’explosion des achats en ligne, en particulier dans les zones rurales, il est crucial de réduire les émissions de gaz à effet de serre des camionnettes de livraison. L’utilisation de camionnettes électriques permettrait de réaliser cet objectif, dès que des infrastructures de recharge adéquates seront disponibles. Les entreprises de messagerie doivent également financer l’achat de camionnettes électriques. La priorité immédiate est de commencer à réduire les émissions de toutes les manières possibles. |
2.17. |
Il convient de viser avant tout à améliorer l’offre de transports publics dans les zones rurales, ce qui permettra de réduire les émissions de gaz à effet de serre, de renforcer l’inclusion sociale et de garantir des possibilités de développement rural. Les transports publics ruraux doivent être considérés comme un bien public dans le contexte de la transition énergétique, et des fonds publics sont dès lors nécessaires pour promouvoir et faciliter des transports publics durables. |
2.18. |
Les voitures particulières sont considérées comme un moyen indispensable de transport rural, car il serait inenvisageable, sans elles, de vivre en milieu rural. La priorité doit être d’aider et d’encourager les habitants des zones rurales à réduire, dans la mesure du possible, l’utilisation des voitures particulières et à passer le plus rapidement possible aux véhicules à faibles émissions. L’octroi d’une aide financière destinée à promouvoir l’achat de véhicules électriques doit être un objectif clé de la transition énergétique dans les zones rurales. |
2.19. |
Le stockage sur batteries est un moyen efficace d’aplatir la courbe de demande nette d’électricité renouvelable. L’utilisation généralisée de véhicules électriques pourrait apporter une contribution à cet égard. Lorsque les véhicules électriques sont en mesure de restituer de l’électricité au réseau, le parc électrique peut servir de moyen de stockage en complément d’autres formes de stockage sur batteries. Il doit être financièrement intéressant pour les consommateurs de restituer de l’électricité au réseau à partir d’un véhicule électrique, comme l’a fait observer le CESE dans son avis sur le «Règlement sur le déploiement d’une infrastructure pour carburants de substitution» (4). |
Tourisme
2.20. |
Les zones rurales dépendent souvent du tourisme, qui est une source de revenus importante. Par conséquent, les zones rurales doivent disposer d’une infrastructure adéquate pour les carburants alternatifs afin de soutenir le secteur du tourisme tout en réduisant les émissions de gaz à effet de serre. Les sociétés de location de voitures doivent être encouragées à opter pour des véhicules à faibles émissions et, de préférence, des véhicules électriques. La transition énergétique dans les zones rurales requiert des mesures visant à accroître les revenus provenant du tourisme. |
Électricité renouvelable
2.21. |
L’électricité renouvelable, telle que l’énergie éolienne, l’énergie solaire et le biogaz, est une composante majeure du paysage rural. L’harmonisation de la législation entre les États membres doit promouvoir et protéger les intérêts des prosommateurs et encourager les investissements dans les infrastructures d’énergie renouvelable. La capacité à vendre l’énergie produite dans le réseau national doit être rendue possible dans tous les États membres. Des systèmes de compensation adéquats doivent être mis en place entre l’énergie renouvelable produite par les prosommateurs et l’énergie consommée afin de garantir l’indépendance énergétique des zones rurales. |
2.22. |
Récemment, les enchères pour l’acquisition centralisée d’électricité renouvelable ont pris de l’ampleur et ont permis, dans de nombreux cas, de réduire les coûts de construction des installations éoliennes et solaires. De manière générale, le développement de l’électricité renouvelable est principalement lié à la décarbonation du secteur de l’énergie, et il n’existe aucune synergie avec les objectifs de développement rural. Les habitants des zones rurales s’opposent fréquemment à ces évolutions car ils ne voient que peu d’avantages pour la population locale. |
2.23. |
Les coopératives et les autres organisations locales doivent être associées au choix des sites pour les installations d’électricité renouvelable, tant terrestres que côtières. Les communautés locales doivent détenir une participation dans ces installations et en retirer un bénéfice local. |
2.24. |
Dans ces grands projets, le développement des énergies renouvelables est principalement lié à la décarbonation du secteur de l’énergie; le développement rural suscite peu d’attention. Les petits parcs éoliens, ainsi que les petits digesteurs solaires et anaérobies exploités par des coopératives et les populations locales peuvent être davantage axés sur le développement rural, ainsi que sur l’inclusion sociale et économique des communautés rurales. Il est nécessaire de parvenir à un équilibre entre ces deux systèmes. Les communautés d’énergie renouvelable et les communautés énergétiques citoyennes constituent un moyen de parvenir à une transition énergétique juste combinée au développement local. |
2.25. |
Une étude de cas menée en Suède rurale (Ejdemo et Söderholm, 2015) a montré qu’en l’absence de mécanismes de partage des bénéfices avec les communautés locales, les possibilités d’emploi dans le contexte du développement rural étaient très modestes. |
2.26. |
Une communauté énergétique citoyenne est une entité juridique au sein de laquelle des citoyens, des PME et des collectivités locales se réunissent en tant qu’utilisateurs finaux pour coopérer en vue de la production d’énergie renouvelable. C’est le cas, par exemple, de la municipalité de Feldheim (un petit village situé au sud-ouest de Berlin), qui est devenue autosuffisante en énergie. Elle a installé des éoliennes sur son territoire et mis en place un réseau indépendant. Les habitants achètent l’électricité à des prix très bas. La construction d’une centrale de production de biogaz a permis au village de créer un réseau de chauffage urbain. Il s’agit d’un excellent exemple de communauté d’énergie renouvelable en activité. Celui-ci démontre également qu’une approche ascendante est essentielle pour l’avenir des zones rurales (5). |
2.27. |
La modulation de la demande permet de déplacer la consommation électrique vers des périodes où le système est en mesure de faire face à la demande. Il y a lieu d’aplatir la courbe de demande nette d’électricité pendant les périodes de pointe afin d’éviter les coupures de courant lorsque la part d’électricité verte dans la production augmente. Le recours au stockage sur batteries, au stockage hydraulique et à l’électrification intelligente offrira une certaine souplesse pour aplatir la courbe de demande nette. |
2.28. |
S’adressant à Dublin à des parlementaires irlandais, Kadri Simson, commissaire chargée de l’énergie, a déclaré que la guerre en Ukraine avait contraint Bruxelles à aller plus loin et à progresser plus rapidement afin de mettre un terme aux importations de carburant russe. Elle a déclaré que dans le cadre des propositions qui restent à approuver, l’Union européenne s’efforcera de porter à 45 % la part de sa consommation d’énergie provenant d’énergies renouvelables d’ici à 2030. Cela représentera une augmentation par rapport à l’objectif actuel de 32 % et plus du double de l’objectif de 22 % en 2020. Le CESE approuve ce nouvel objectif mais précise qu’il ne pourra être atteint que si des investissements nouveaux et plus importants sont consentis rapidement dans la transition énergétique rurale. |
2.29. |
Le vent ne souffle pas en permanence, de sorte qu’un système de secours sera nécessaire. L’hydrogène vert peut constituer une solution d’appoint pour répondre aux variations de la demande d’électricité et peut être stocké jusqu’au moment où il sera nécessaire. |
Agriculture
2.30. |
L’activité agricole est au cœur du développement et de la prospérité de la plupart des zones rurales. Ce secteur de l’économie rurale doit faire face à d’énormes difficultés pour réaliser la transition énergétique. |
2.31. |
Aucun effort important n’a été accompli pour réduire l’empreinte carbone des machines agricoles. |
2.32. |
Dans un avenir proche, il semblerait que la meilleure façon de réduire les émissions serait de recourir aux de biocarburants durables, étant donné que les machines existantes pourraient être utilisées après avoir été modifiées à cet effet. |
2.33. |
La fabrication des biocarburants durables est onéreuse et leur prix peut atteindre plus du double de celui du diesel. Les prix pourraient diminuer légèrement avec le temps. |
2.34. |
À l’avenir, lorsque les machines agricoles électriques deviendront plus largement disponibles, il sera possible de réduire sensiblement les émissions. |
2.35. |
L’agriculture étant principalement une entreprise peu lucrative, les coûts d’investissement liés au passage à des machines électriques seraient extrêmement difficiles à financer. L’un des problèmes majeurs qu’il conviendra de résoudre dans le cadre de la transition énergétique des zones rurales est celui du financement des machines électriques ou à hydrogène. |
2.36. |
Le placement de panneaux solaires sur les bâtiments agricoles permettrait aux agriculteurs d’utiliser de l’électricité verte, ce qui représenterait un gain significatif dans le cadre de la transition énergétique, étant donné que l’agriculture est une grande consommatrice d’électricité. Tout excédent pourrait être revendu au réseau. |
2.37. |
L’agriculture de précision est une approche de la gestion agricole fondée sur les données qui peut améliorer la production et les rendements et réduire l’empreinte carbone de l’agriculture. Elle est rendue possible grâce aux progrès de la technologie numérique en ce qui concerne la télédétection, le GPS et les systèmes de guidage par satellite pour les tracteurs. Elle aura son importance dans le cadre de la transition énergétique du secteur agricole, tout comme la nécessité d’investissement, de formation et de perfectionnement professionnel. |
2.38. |
Les agriculteurs peuvent avoir la possibilité de vendre de l’électricité excédentaire au réseau, étant donné que les producteurs laitiers et bovins disposent de surfaces de toiture importantes sur leur exploitation. Certains agriculteurs pourraient être en mesure de devenir des partenaires pour la mise en place de centrales à biomasse et la vente de gaz au réseau gazier. L’utilisation de résidus forestiers dans les centrales à biomasse est importante pour faciliter la gestion des forêts dans les zones concernées. |
2.39. |
Eu égard aux conséquences de la guerre en Ukraine, nous devons reconsidérer la sécurité alimentaire dans l’UE. Les terres doivent être utilisées en priorité à la production de denrées alimentaires. Celle-ci ne devrait pas faire concurrence à l’installation de panneaux solaires à l’échelle industrielle et à la production de biomasse comme source d’énergie renouvelable; il devrait plutôt s’agir d’opérations complémentaires. |
Biométhane
2.40. |
Le biométhane est un biogaz dont on a éliminé le dioxyde de carbone, le sulfure d’hydrogène et l’eau; il peut ensuite être injecté directement dans le réseau gazier ou utilisé dans un véhicule fonctionnant au gaz. |
2.41. |
Des digesteurs anaérobies doivent être installés à proximité d’un approvisionnement suffisant en lisier. L’ensilage d’herbe excédentaire et de maïs peut également être utilisé, pour autant que cela ne nuise pas à la production alimentaire et fourragère. |
2.42. |
Il est nécessaire de poursuivre les recherches afin d’améliorer l’efficacité des digesteurs anaérobies et de réduire les coûts associés à ce processus. |
2.43. |
Il convient d’encourager et de financer l’utilisation de digesteurs anaérobies dans le cadre de la transition énergétique dans les zones rurales. |
2.44. |
L’énergie issue de la biomasse peut être utilisée pour produire de la chaleur ou de l’électricité. La biomasse jouera un rôle essentiel dans la production d’électricité renouvelable. |
Habitat rural
2.45. |
De nombreux ménages ruraux peuvent installer des technologies de microgénération, telles que des panneaux solaires et de petites éoliennes, avec la possibilité de réinjecter tout excédent de production dans le réseau. |
2.46. |
Les ménages à faibles revenus ont besoin d’une aide financière pour pouvoir mettre en place des installations de microgénération. Il en résulterait une transition énergétique importante pour les ménages ruraux. |
2.47. |
Les maisons rurales sont généralement moins bien isolées et moins économes en énergie que les maisons urbaines. Bon nombre d’entre elles sont des maisons «quatre façades» exposées aux intempéries. |
2.48. |
Un grand programme d’investissement pour moderniser les logements ruraux afin d’en améliorer l’isolation et l’efficacité énergétique est nécessaire dans le cadre de la transition énergétique. Un tel investissement constituera une avancée majeure sur la voie de la réduction de la consommation d’énergie et de la décarbonation du chauffage domestique rural. Il conviendra de prévoir un régime d’aides sous forme de subventions étant donné que les coûts d’un grand programme de mise à niveau sont très élevés. Les ménages à faibles revenus et les ménages en situation de précarité énergétique devront bénéficier d’une aide spéciale pour mener à bien cette transition. |
3. La transition numérique dans les zones rurales
3.1. |
En 2021, la Commission européenne a présenté sa vision de la transformation numérique de l’Europe d’ici à 2030. D’entrée de jeu, elle a souligné la nécessité des propositions législatives sur les marchés numériques et les services numériques pour garantir un espace numérique plus sûr, dans lequel les droits fondamentaux des utilisateurs sont protégés, et afin de créer des conditions de concurrence équitables pour les entreprises européennes dans le monde numérique. |
3.2. |
Afin de nourrir une population mondiale croissante tout en ayant une incidence minimale sur l’environnement et en promouvant la neutralité carbone, il convient de mettre en place des infrastructures numériques et technologiques dans les zones rurales pour permettre une utilisation efficace et précise des ressources dans l’agriculture. Cependant, bien que 30 % de la population européenne vive dans les zones rurales, qui représentent 80 % du territoire des 27 États membres, la numérisation rencontre, dans le monde rural, davantage de difficultés qui, si elles ne sont pas prises en compte, compromettront l’ambition numérique de l’Europe. Un cadre législatif européen sur le numérique rural permettrait de faire face à ces difficultés par les moyens suivants:
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3.3. |
La législation sur le numérique rural, en tant que mécanisme législatif de la Commission européenne, constituera, à l’instar de la législation sur les marchés numériques et sur les services numériques, un ensemble de règles, d’obligations et de responsabilités visant à faire en sorte que les zones rurales européennes puissent bénéficier de toute une série d’initiatives, d’outils et de moyens d’accès qui, en raison de la faible densité de population, ne sont pas intéressants, d’un point de vue économique, pour les investissements privés. La législation sur le numérique rural garantira ainsi la mise en œuvre de la numérisation dans les zones rurales, où les besoins sont inversement proportionnels aux rendements financiers obtenus. |
3.4. |
Enfin, une telle législation sera un préalable essentiel à la réalisation du pacte vert pour l’Europe ainsi que des stratégies «De la ferme à la table» et en faveur d’une Europe neutre pour le climat d’ici à 2050, étant donné que la transition vers un système alimentaire équitable, sain et respectueux de l’environnement ne sera possible que si la technologie et la numérisation sont disponibles et accessibles pour le monde agricole et rural. |
3.5. |
Comme le souligne le CESE dans son avis intitulé «Améliorer les niveaux d’inclusivité, de sécurité et de fiabilité de la numérisation pour tous» (6), l’importance de la numérisation ne saurait être sous-estimée, car elle peut être «en mesure de favoriser davantage de mobilité sur le marché du travail, d’accroître la productivité et la flexibilité sur le lieu de travail et d’aboutir à un équilibre entre la vie professionnelle et la vie privée lorsque les travailleurs travaillent à distance de chez eux». Pour ce faire, les travailleurs ont absolument besoin de disposer d’un ensemble complet de compétences numériques, qu’ils vivent dans des zones urbaines ou rurales. Toutefois, des obstacles supplémentaires d’aspects multiples existent dans les endroits isolés, aussi le CESE demande-t-il que la stratégie spécifique en matière de compétences numériques soutienne les citoyens européens vivant dans les zones rurales. Cette approche, qui doit figurer au centre de la législation sur le numérique rural, devrait contribuer simultanément à réduire la fracture numérique et à tirer parti des avantages de la transformation numérique de la société. |
Bruxelles, le 21 septembre 2022.
La présidente du Comité économique et social européen
Christa SCHWENG
(1) Avis sur le thème «Vers une stratégie globale en matière de développement rural et urbain durable» (JO C 105 du 4.3.2022, p. 49).
(2) COM(2021) 345 final.
(3) Avis du CESE «Une vision à long terme pour les zones rurales de l’UE» (JO C 290 du 29.07.2022, p. 137).
(4) Avis sur le «Règlement sur le déploiement d’une infrastructure pour carburants de substitution» (JO C 152 du 6.4.2022, p. 138).
(5) Rapport d’atelier du Parlement rural européen, Atelier 21.
(6) Avis sur le thème «Améliorer les niveaux d’inclusivité, de sécurité et de fiabilité de la numérisation pour tous» (JO C 374 du 16.9.2021, p. 11).