7.5.2021   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 175/6


Avis du Comité européen des régions — Mise en place d’un espace européen de l’éducation d’ici à 2025

(2021/C 175/02)

Rapporteur:

Emil BOC (RO/PPE), maire de Cluj-Napoca

Texte de référence:

Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions relative à la réalisation d’un espace européen de l’éducation d’ici à 2025

COM(2020) 625 final

RECOMMANDATIONS POLITIQUES

LE COMITÉ EUROPÉEN DES RÉGIONS

1.

attire l’attention sur le fait que l’éducation est essentielle au développement harmonieux des collectivités locales et régionales, en particulier dans le nouveau contexte où elle constitue un facteur stratégique de premier plan dans la construction d’une économie fondée sur la connaissance. L’éducation a également une incidence cruciale pour d’autres domaines qui intéressent les collectivités locales et régionales, tels que la fuite ou l’afflux des cerveaux, la cohésion sociale, la mise en œuvre de stratégies de spécialisation intelligente, la transformation numérique, l’innovation (technologique et sociale), les communautés vertes, et la coopération entre le monde universitaire et les autres secteurs. L’éducation est un facteur important dans le développement de la résilience des collectivités, qui leur permet de faire face plus facilement aux crises, qu’elles soient économiques ou d’une autre nature, et de s’adapter aux nouveaux besoins et contextes. À l’échelon local et régional, la promotion de l’éducation et de la formation doit être considérée comme un investissement majeur dans notre avenir;

2.

estime que le rôle des collectivités locales et régionales dans la réussite du projet de l’espace européen de l’éducation est essentiel en raison des liens directs et substantiels qu’elles entretiennent avec les communautés au sein desquelles les politiques éducatives définies au niveau européen doivent être mises en œuvre et sur lesquelles ces dernières ont ensuite un impact direct. Les collectivités locales et régionales sont responsables de la mise en œuvre de 70 % de la législation de l’UE. En définitive, l’éducation se joue au niveau local et, de ce point de vue, en vertu du principe de subsidiarité active, il convient d’inclure les niveaux local et régional dans le plan, au même titre que les niveaux national et européen, en les associant aux processus de prise de décision dès leur début. Il va de soi qu’une relation structurée et continue doit être établie entre la Commission et le CdR dans ce domaine clé;

3.

souligne l’importance de lier au mieux les objectifs stratégiques de l’espace européen de l’éducation à des ressources financières claires et identifiables, accessibles aux collectivités locales et régionales;

4.

estime que la réalisation des objectifs de développement durable, la poursuite des objectifs de durabilité environnementale et le renforcement des identités européenne, nationale et régionale devraient figurer parmi les principales visées de l’espace européen de l’éducation;

5.

insiste sur la nécessité d’élaborer une feuille de route, ainsi que des jalons et des indicateurs annuels, afin d’être en mesure d’évaluer les progrès accomplis dans la mise en œuvre des objectifs de l’espace européen de l’éducation aux niveaux européen, national et, le cas échéant, régional et local. Il est nécessaire d’étayer l’évaluation de la situation actuelle au niveau local et régional, et de définir en conséquence les buts, les objectifs et le système de soutien;

6.

attire l’attention sur le fait qu’il est nécessaire de mener une discussion sérieuse au niveau européen sur les responsabilités des collectivités locales et régionales dans la création de l’espace européen de l’éducation, alors que les compétences des collectivités locales et régionales dans le domaine de l’éducation diffèrent considérablement d’un État membre à l’autre. Il est essentiel d’établir un lien entre ces responsabilités et les stratégies et actions des gouvernements nationaux. Chaque ville, commune et région doit inclure dans sa stratégie des objectifs éducatifs clés liés aux objectifs nationaux et européens;

7.

constate que si les problématiques et les enjeux relevant du domaine de l’éducation sont communs, les outils et les ressources dont disposent les collectivités locales et régionales varient. Par ailleurs, ces dernières ne disposent pas toutes de la même capacité administrative, ce qui influence directement leurs chances de réussite s’agissant de la conception et de la mise en œuvre de différentes stratégies et politiques dans le domaine de l’éducation. Il est essentiel de recenser les besoins régionaux en matière d’éducation et de promouvoir des politiques spécifiques dans ce domaine, qui tiennent compte du contexte local. À cet égard, il importe de développer des outils permettant aux collectivités locales et régionales de s’inspirer des bonnes pratiques d’autres communautés locales au sein de l’Union. Le développement d’un système paneuropéen recensant les ressources disponibles dans chaque région afin d’en permettre un usage souple et efficace, contribuera à la réalisation d’un espace européen de l’éducation. La coopération est essentielle pour fournir des services d’éducation et pour éviter les chevauchements. La Commission devrait soutenir ce type de démarche et veiller à supprimer tout obstacle à la coopération en développant et en promouvant activement un cadre de coopération souple, accessible et facile à utiliser;

8.

estime qu’il importe de réduire les disparités en matière d’éducation qui existent entre les zones isolées, rurales et urbaines, entre les différentes régions, entre les différents niveaux d’enseignement (primaire, secondaire et supérieur) et entre les différents établissements d’enseignement. Ces disparités contribuent au maintien des inégalités en ce qui concerne l’accès à l’éducation ainsi que le maintien dans le système éducatif et les résultats à long terme, en particulier l’intégration sur le marché du travail et la possibilité de trouver un emploi bien rémunéré;

9.

note que nous devons adopter une approche cohérente des différents programmes et financements en faveur de l’éducation et de la formation proposés par l’Union européenne. Une nouvelle approche exige, outre Erasmus+, l’intégration d’instruments supplémentaires tels qu’Horizon Europe et les Fonds structurels. Cette approche doit être inclusive et tous les instruments de l’UE doivent accompagner les régions et les communautés locales dans un processus de transformation souple et fluide, adapté à la diversité existante, garantissant des synergies et évitant les chevauchements en matière d’éducation et d’apprentissage (tant pour la population scolaire que pour le corps enseignant);

10.

souligne qu’il est fondamental de respecter le principe suivant lequel personne ne doit être laissé pour compte. Une éducation de piètre qualité est souvent liée à la pauvreté et à un manque de ressources individuelles. En persistant à ne pas soutenir l’éducation de manière adéquate, nous créons un cercle vicieux où les performances et compétences insuffisantes se traduisent par une croissance économique nulle au niveau local et des ressources encore plus insuffisantes. Il est essentiel que la stratégie/les programmes opérationnels tiennent également compte des citoyens qui ne disposent pas de ressources et des autres personnes défavorisées, pour qui l’éducation représente l’une des rares possibilités de sortir de la pauvreté;

11.

souligne en outre que le piètre niveau d’éducation s’explique également par des discriminations limitant l’accès à l’enseignement, notamment fondées sur le sexe, la race ou l’origine ethnique, la religion ou les convictions, l’existence d’un handicap ou l’orientation sexuelle. Il est donc essentiel de garantir à tous une éducation inclusive, équitable et exempte de préjugés, et de prendre des mesures appropriées pour lutter contre le racisme et la discrimination dans les établissements scolaires;

12.

considère qu’à la suite de la crise de la COVID-19, certains enseignements importants doivent être tirés en matière d’éducation au niveau des communautés locales et régionales. La crise a eu une incidence profonde sur l’éducation dans les collectivités locales et régionales, les obligeant à relever les grands défis que sont la gestion des crises, la résilience économique et sociale, l’utilisation de la technologie dans l’éducation, l’adaptation des ressources humaines aux nouvelles réalités, la nécessité de coopérer et celle de fournir une éducation inclusive et de qualité. Au niveau du processus éducatif, les défis ont été les suivants: la transition et la transformation numériques, de nouvelles méthodes pédagogiques, l’instauration d’un climat de sécurité et de bien-être pour la population scolaire et le corps enseignant, le maintien et la transformation de la mobilité (de la population scolaire et du corps enseignant). Il est important d’identifier quels sont les défis qui touchent le système, ainsi que les changements qu’il convient d’apporter afin que les systèmes éducatifs soient résilients, dans l’avenir, face à des situations similaires. La résilience des systèmes éducatifs doit constituer une priorité dans le cadre de la coopération en matière d’éducation et de formation, y compris par le recours à l’innovation dans l’éducation et aux nouvelles technologies (par exemple, l’intelligence artificielle, les supercalculateurs/la superinformatique et la cybersécurité). Au vu également des différences et des difficultés existant sur le plan social, ethnique et régional, il importe de veiller à ce que toutes les communautés bénéficient de l’égalité d’accès à l’éducation numérique, y compris aux équipements, aux ressources et aux contenus éducatifs numériques;

13.

souligne que la valorisation de la profession d’enseignant (y compris sur le plan financier) et, à cet égard, la formation continue d’un corps enseignant motivé et compétent, sont des facteurs essentiels pour la réalisation de l’espace européen de l’éducation. Sans une totale compréhension du rôle fondamental du corps enseignant, il est impossible de bâtir, dans le domaine de l’éducation, une stratégie qui puisse réussir. Il est essentiel d’investir dans des domaines tels que la formation et le perfectionnement des enseignants et dans des procédures efficaces de sélection, de recrutement et d’évaluation du corps enseignant, ou d’accroître l’attrait de la profession d’enseignant, en prêtant une attention particulière au monde rural, pour maintenir la qualité et la compétitivité des systèmes éducatifs des États membres et renforcer la position de l’UE en tant qu’acteur de premier plan sur la scène internationale;

14.

souligne qu’il est de plus en plus important de bâtir des partenariats stratégiques entre les collectivités locales et régionales et les universités de leur territoire (lesquelles sont des acteurs centraux du «carré de la connaissance» que constituent l’éducation, la recherche, l’innovation et le service à la société). Le rôle des universités dans le développement de collectivités locales et de régions qui soient résilientes est essentiel. L’enseignement universitaire est à même de stimuler l’afflux de cerveaux et la circulation des cerveaux et d’aider l’Europe à attirer des ressources humaines internationales de qualité. Dans le domaine de l’enseignement universitaire, les réformes proposées au niveau de l’Union sont massives, avec notamment l’initiative concernant les universités européennes, la mobilité des étudiants, la carte d’étudiant européenne, le suivi des diplômés, et la reconnaissance mutuelle des diplômes de l’enseignement supérieur. Les collectivités locales et régionales doivent pouvoir développer des partenariats stratégiques avec les universités et contribuer à ce processus de transformation;

15.

souligne les liens étroits qui unissent l’espace européen de l’éducation et l’espace européen de la recherche, appelle de ses vœux «une nouvelle approche pour un espace européen de l’éducation et de la recherche», et «rappelle la nécessité d’une approche transversale de ces questions en lien étroit notamment avec les politiques régionales» (1);

16.

prend acte de l’importance de la reconnaissance mutuelle entre États membres des diplômes de l’enseignement supérieur, de l’enseignement secondaire de deuxième cycle et des certificats de formation. Pour progresser, nous avons besoin de disposer d’une telle reconnaissance mutuelle, qui gagnerait à se fonder sur les acquis d’apprentissage escomptés, à l’instar de ceux présentés dans le cadre européen des certifications;

17.

note l’importance d’élaborer des programmes d’études flexibles, en mettant l’accent sur les compétences et en créant des ressources éducatives libres adaptées au processus d’apprentissage soutenu par la technologie; estime également que des programmes d’études flexibles peuvent favoriser l’intégration de spécificités locales et régionales en abordant les questions et en développant les compétences en fonction des réalités et des besoins/défis de chaque communauté et région;

18.

estime qu’il est essentiel de recenser et de promouvoir les exemples de réussite de mise en œuvre des objectifs de l’espace européen de l’éducation aux niveaux local et régional. L’analyse et la diffusion de ces meilleures pratiques peuvent renforcer la valeur ajoutée de l’action des collectivités locales et régionales des États membres;

19.

estime nécessaire de modifier les priorités en matière de développement des infrastructures éducatives au niveau local et fait observer que les collectivités locales et régionales soutiendront la transition vers des infrastructures éducatives modernes, fonctionnelles, numériques et vertes au sein de leurs communautés. L’accent devrait être mis sur l’abandon des structures éducatives rigides au profit de modèles flexibles permettant de surmonter les obstacles formels, tant entre établissements qu’entre niveaux d’enseignement;

20.

observe que l’éducation est un facteur clé pour changer le modèle économique au niveau local et régional (c’est-à-dire avancer vers une économie verte, fondée sur la connaissance et la transformation numérique). La double transition écologique et numérique doit être intégrée dans tous les processus éducatifs et les objectifs transversaux dans le domaine de l’éducation et de la formation;

21.

se félicite du lancement de la coalition «Éducation pour le climat» à l’appui de la mise en œuvre du pacte européen pour le climat, et se dit prêt à s’investir résolument dans cette initiative phare de l’espace européen de l’éducation afin de mener à bien une transition verte, numérique et équitable pour l’ensemble de la société;

22.

demande à la Commission européenne d’associer à la coalition «Éducation pour le climat» les régions et les collectivités locales, de même que des initiatives comme la Convention mondiale des maires pour le climat et l’énergie, de manière à tisser un lien entre les initiatives émanant du terrain et les actions au niveau de l’Union européenne, et à soutenir ainsi les engagements et mesures concrètes pris en faveur d’un comportement durable dans l’ensemble de l’Union;

23.

estime qu’il convient d’accorder une plus grande attention aux compétences de la vie courante et aux compétences transversales afin d’accroître la capacité des citoyens européens à s’adapter à un marché du travail dynamique et en constante évolution;

24.

souligne qu’il convient d’améliorer la qualité de l’éducation au niveau local et régional car il s’agit d’un facteur susceptible de limiter considérablement le phénomène de fuite des cerveaux, et attire l’attention sur l’importance de l’appui accordé par la Commission et l’Union européenne en vue de lutter contre la fuite des cerveaux et de la faire évoluer vers une circulation des cerveaux;

25.

juge essentiel que les collectivités locales et régionales soutiennent au mieux l’éducation et l’inclusion numériques pour la population scolaire, ainsi que pour les citoyens et les citoyennes et les fonctionnaires (en lien avec le nouveau plan d’action en matière d’éducation numérique promu par la Commission);

26.

fait observer qu’il importe d’améliorer la qualité des processus éducatifs dans des domaines tels que le développement des compétences de base, l’interculturalisme, l’apprentissage des langues, la diversité culturelle et linguistique, tout comme de veiller à ce que les enfants défavorisés puissent acquérir les compétences que les autres enfants acquièrent à domicile;

27.

estime que les collectivités locales et régionales peuvent, en partenariat avec les établissements d’enseignement et de formation formels et non formels, proposer les indispensables programmes de formation tout au long de la vie à des fins de renforcement des compétences et de reconversion, qui permettront aux citoyens de se maintenir sur un marché de l’emploi, mais aussi dans d’autres sphères de la vie quotidienne, en évolution rapide du fait des transitions écologique et numérique, ou d’y accéder à nouveau. Ces programmes peuvent également être adaptés aux besoins de groupes spécifiques, tels que les personnes âgées, afin d’améliorer la qualité de vie ainsi que le niveau global de satisfaction et d’intégration de ces groupes. Les universités pourraient/devraient également devenir des partenaires clés des collectivités locales et régionales dans le cadre de l’élaboration et la mise en œuvre de programmes innovants pour les acteurs locaux, en fonction des spécificités locales et régionales;

28.

encourage les collectivités locales et les régions à soutenir les universités, les centres de formation professionnelle et les autres organismes mettant en œuvre les programmes Erasmus+ afin d’encourager non seulement la mobilité des étudiants, mais aussi celle des jeunes entrepreneurs et des volontaires des États membres;

29.

relève l’intérêt majeur de la promotion, par les collectivités locales et régionales, pour tous les élèves des établissements scolaires, d’environnements sûrs, exempts de violence, de harcèlement scolaire, de propos nuisibles, de désinformation et de toute forme de discrimination;

30.

insiste sur l’importance de l’action des collectivités locales et régionales visant à rendre l’éducation plus inclusive, à tous les niveaux, pour les personnes handicapées ou issues de groupes vulnérables;

31.

note l’importance de la promotion, par les collectivités locales et régionales, de l’évolution (par l’intermédiaire des établissements d’enseignement) des comportements et des compétences des citoyens et des citoyennes en matière de transitions verte et numérique, ainsi que de la mobilité du corps enseignant et de la communauté estudiantine dans le cadre de partenariats nationaux et internationaux avec d’autres communautés. Cette mobilité peut constituer la base d’un transfert de savoir-faire en vue de l’élaboration et de la mise en œuvre de stratégies éducatives efficaces. Il ressort de l’étude de l’OCDE sur l’enseignement et l’apprentissage (TALIS, 2018) qu’un nombre élevé de membres du corps enseignant expriment le besoin de développer des compétences spécifiques pour enseigner dans des environnements comprenant des élèves ayant des besoins particuliers, utiliser des technologies numériques et enseigner à des classes multilingues et multiculturelles;

32.

encourage les collectivités locales et régionales (grâce à des partenariats entre les secteurs public, privé et non lucratif) à renforcer les capacités des universités dans les programmes éducatifs spécialisés dans les compétences numériques avancées, telles que les technologies de pointe (intelligence artificielle, cybersécurité et calcul à haute performance);

33.

observe qu’il convient que les collectivités locales et régionales des États membres encouragent la création de centres d’enseignement supranationaux dans les grandes villes universitaires de l’UE, afin de permettre l’élaboration de bonnes pratiques et de politiques publiques en matière de mobilité de la population estudiantine et du corps enseignant, ainsi que la transformation numérique des processus éducatifs.

Bruxelles, le 19 mars 2021.

Le président du Comité européen des régions

Apostolos TZITZIKOSTAS


(1)  Avis du Comité européen des régions — Un nouvel espace européen de la recherche (EER) pour la recherche et l’innovation (JO C 106 du 26.3.2021, p. 31).