1.10.2020   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 324/41


Avis du Comité européen des régions — «Vers une feuille de route pour un hydrogène propre — La contribution des collectivités locales et régionales à une Europe neutre pour le climat»

(2020/C 324/07)

Rapporteure:

Birgit HONÉ (DE/PSE), ministre chargée des affaires fédérales et européennes et du développement régional (Basse-Saxe)

Document de référence:

Avis d’initiative

RECOMMANDATIONS POLITIQUES

LE COMITÉ EUROPÉEN DES RÉGIONS,

Signification pour une Union européenne neutre sur le plan climatique à l’horizon 2050

1.

se félicite vivement que le Conseil européen ait approuvé l’objectif d’une Union neutre pour le climat à l’horizon 2050 et que la Commission européenne, par sa proposition de loi européenne sur le climat (1), s’efforce d’inscrire cet objectif dans le droit de l’Union;

2.

souligne qu’il importe de générer une croissance durable sur le plan environnemental et social, en particulier après la crise liée à la pandémie de COVID-19. Le pacte vert pour l’Europe (2), qui prévoit des innovations technologiques et sociales économes en énergie et en ressources et respectueuses du climat, doit constituer un élément clé de la relance économique après cette pandémie. Il convient dès lors de promouvoir vigoureusement, au sein de l’Union, l’hydrogène propre, une technologie d’avenir qui répond à ces critères;

3.

se félicite dès lors expressément que la Commission s’apprête à répondre de manière anticipée à la demande de présenter une stratégie européenne pour l’hydrogène formulée dans le présent avis (3); salue également le fait que la proposition remaniée de cadre financier pluriannuel de l’Union pour la période 2021-2027 favorise davantage encore, avec son plan de relance, la mise en place d’une économie de l’hydrogène propre, et invite le Conseil et le Parlement européen à préserver ces possibilités dans le cadre du processus législatif;

4.

rappelle que l’objectif de neutralité climatique implique une transformation complète de l’approvisionnement en électricité et en chaleur et qu’il nécessite notamment de profonds changements dans les secteurs de l’industrie et des transports. De nombreuses solutions techniques fondées sur les énergies renouvelables seront nécessaires. Or, pour accélérer le déploiement des technologies prometteuses, il est également nécessaire de pouvoir les soutenir de manière ciblée. L’hydrogène propre et les matières premières, carburants et combustibles de synthèse dérivés (4) seront indispensables à la réalisation de cet objectif et devraient dès lors bénéficier d’un soutien spécifique. Il convient à cet égard d’accorder une attention particulière à l’hydrogène vert produit à partir de sources d’énergie renouvelables;

5.

juge avantageux, à ce stade précoce de développement du marché, d’adopter une approche ouverte en ce qui concerne les applications possibles de l’hydrogène propre, dont l’utilisation dans certaines proportions est réaliste dans de nombreux secteurs. Le CdR estime nécessaire de se concentrer sur les applications prometteuses au fur et à mesure que le marché se développera;

6.

fait observer à cet égard que l’hydrogène propre et les carburants de synthèse, en raison des pertes de conversion, présentent des désavantages sur le plan de l’efficacité par rapport à l’utilisation directe de l’électricité renouvelable, ce qui devrait aussi, à long terme, entraîner des coûts plus élevés dans de nombreuses applications. C’est pourquoi il convient, sur le moyen à long terme, de considérer comme prioritaires les domaines d’application de l’hydrogène propre et des carburants de synthèse dans lesquels l’hydrogène est utilisé comme matière première ou dans lesquels les mesures d’efficacité énergétique et l’électrification directe ne sont pas des solutions (par exemple, la production d’ammoniac et d’acier, les transports par poids lourds et les transports sur longue distance, les procédés à haute température ou le stockage saisonnier de l’électricité), ainsi que les secteurs du chauffage urbain/de l’environnement bâti dans lesquels les pompes à chaleur ou les réseaux de chauffage ne sont pas efficaces;

7.

propose que la Commission examine les possibilités de production d’hydrogène vert dans l’Union européenne, y compris dans les unités territoriales statistiques (NUTS 2) les moins développées, et dans les régions voisines (par exemple, celle du Proche-Orient et de l’Afrique du Nord), en prêtant une attention particulière à la concurrence pour ce qui est de l’utilisation directe de l’électricité produite à partir d’énergies renouvelables. Il est en effet fondamental, pour bâtir une économie verte de l’hydrogène en Europe, de connaître de manière approfondie et détaillée le potentiel réalisable dans différents scénarios; en outre, l’on pourrait étudier la mesure dans laquelle il est possible de recourir à l’hydrogène bleu à titre de solution transitoire;

8.

recommande aux États membres de prévoir un soutien à l’économie verte de l’hydrogène lors de la mise à jour, en 2023, de leurs plans nationaux en matière d’énergie et de climat (PNEC) et de mettre sur pied, en étroite coopération avec l’ensemble des parties prenantes, des stratégies nationales intégrées en faveur de l’hydrogène, assorties de mesures de mise en œuvre. Il conviendrait que les États membres, lors de l’élaboration et de la réalisation de ces projets, travaillent de concert avec les collectivités régionales et locales ou avec leurs associations nationales et régionales et la communauté scientifique; recommande que chaque État membre examine le potentiel de la production d’hydrogène vert;

Aspects liés à la durabilité

9.

souligne qu’à long terme, seul l’hydrogène produit par électrolyse de l’eau à l’aide d’électricité issue des énergies renouvelables («hydrogène vert») représente une méthode durable de production d’hydrogène. L’Union européenne et les États membres doivent dès lors placer l’hydrogène vert au cœur de leurs efforts visant à instaurer une économie de l’hydrogène. Jusqu’à ce que l’on dispose de quantités suffisantes, des solutions technologiques transitoires, telles que l’hydrogène bleu, peuvent contribuer à réduire les émissions de CO2 résultant de la production d’hydrogène existante. Dans le même temps, il faudra veiller à ne pas entraver le passage à l’hydrogène vert lors du processus de mise en place d’une économie de l’hydrogène. Les solutions transitoires doivent apporter des avantages réels et significatifs quant aux coûts et à la vitesse de mise en œuvre par rapport à l’hydrogène vert, sans créer de dépendance à long terme vis-à-vis de la trajectoire suivie;

10.

juge tout aussi nécessaire de procéder à une classification et une certification complètes et transparentes en matière de durabilité de l’hydrogène et des carburants de synthèse que de recourir de manière généralisée et obligatoire aux certificats qui en découlent. Un marché de l’hydrogène vert ne pourra se développer que s’il existe des certificats stricts, clairs et différenciés, permettant également d’établir une distinction entre l’hydrogène bleu et l’hydrogène vert. Le CdR invite la Commission à faire progresser activement le processus de classification des gaz dans le cadre du Forum européen de régulation du gaz (Forum de Madrid) et à présenter rapidement une proposition relative à un système de classification et de certification conforme à la législation en vigueur sur la garantie des énergies renouvelables; il demande, à cet égard, qu’on examine la possibilité de fusionner les deux systèmes parallèles existants en matière de garanties d’origine (article 19 de la RED II) et de certificats de durabilité (articles 25 à 31 de la RED II). La Commission devrait promouvoir la diffusion à l’international du système européen de certificats et/ou de garanties d’origine devant être déployé;

Le rôle spécifique des régions

11.

fait valoir que l’hydrogène vert peut être produit et utilisé de manière décentralisée et s’intégrer ainsi dans un futur approvisionnement énergétique plus décentralisé, tel qu’il est décrit dans la stratégie à long terme de la Commission intitulée «Une planète propre pour tous» (5) qui a le soutien du CdR (6). L’hydrogène vert est à même de favoriser le développement régional et local, étant donné que des maillons importants de la chaîne de valeur peuvent être créés dans les régions et les communes, entraînant dès lors des effets positifs sur l’emploi et les PME; il est en outre possible d’utiliser, au niveau local et régional, l’excédent de chaleur qui résulte de la production d’hydrogène vert pour l’approvisionnement de chaleur, et l’hydrogène en tant que produit dérivé de certains processus industriels dans le cadre de la récupération d’hydrogène;

12.

souligne expressément que les collectivités locales et régionales jouent un rôle déterminant dans le déploiement de l’économie de l’hydrogène. Nombre d’entre elles élaborent des stratégies relatives à l’hydrogène, des programmes de soutien et des projets concrets, par exemple dans le cadre du «partenariat européen des vallées de l’hydrogène» (European Hydrogen Valleys Partnership(7). La connaissance approfondie des circonstances locales, les liens avec les acteurs de terrain, la supervision des processus de planification et d’autorisation, ainsi que les différentes possibilités de financement au niveau régional et local sont autant d’éléments qui font des collectivités locales et régionales des acteurs indispensables au développement du marché;

13.

souligne à cet égard que les régions peuvent, dans le cadre de leurs stratégies et programmes de soutien régionaux en faveur de l’hydrogène vert, endosser un rôle de liaison majeur dans la perspective d’un développement intégré de chaînes de valeur régionales pour l’hydrogène vert. La proximité géographique des points de production et d’utilisation leur permet de mettre en place dans un premier temps des réseaux d’hydrogène au niveau régional, qui pourront ensuite être étendus au fil du temps. La production industrielle centralisée d’hydrogène dans des groupements d’entreprises peut être mise en relation avec la demande décentralisée provenant de l’industrie, des transports, des bâtiments et de l’équilibrage du réseau à proximité de ces groupements, et ce au niveau régional, national ou international (couplage sectoriel). Dans ce contexte, les sites implantés près des ports pourraient être particulièrement attractifs, étant donné que leur situation est également favorable à long terme pour l’importation d’hydrogène et/ou de carburants de synthèse. Le CdR invite instamment la Commission européenne à soutenir le développement et la mise en œuvre de ces stratégies et programmes régionaux portant sur les chaînes de valeur de l’hydrogène vert et sur les groupements d’entreprises chargés de sa production;

Coordination du développement du marché

14.

rappelle qu’un marché de l’hydrogène vert ne peut se développer sans investissements importants, y compris de la part du secteur privé. Ceux-ci ne peuvent être engagés que s’il existe une confiance dans le développement à long terme du marché, laquelle pourra être instaurée notamment grâce à des objectifs ambitieux et contraignants, un cadre juridique clair, une stratégie explicite et une feuille de route concrète pour l’hydrogène vert;

15.

invite la Commission à concevoir une vision à l’échelle de l’Union dans la stratégie de l’Union pour l’hydrogène qu’elle a annoncée, en particulier concernant l’hydrogène vert à l’horizon 2030 et 2050, et à présenter des perspectives concernant les domaines d’application de l’hydrogène vert, son lancement sur le marché et la promotion d’autres innovations, en tenant compte des recommandations formulées dans le présent avis;

16.

invite la Commission à présenter une stratégie européenne pour l’hydrogène, assortie d’une feuille de route intégrée comportant des mesures législatives et non législatives visant à bâtir une économie européenne de l’hydrogène propre et un marché unique de l’hydrogène axé sur l’hydrogène vert, sur la base des recommandations du présent avis et de celles du Forum stratégique sur les projets importants d’intérêt européen commun. La stratégie de l’Union en faveur de l’hydrogène devrait comporter des objectifs ambitieux en ce qui concerne la capacité de production d’hydrogène vert reposant sur une analyse des potentiels de production régionaux, et appuyer le développement systématique de sa production et de son utilisation grâce à la création de chaînes de valeur correspondantes. Elle devrait favoriser la coordination, à l’échelle européenne, du développement de l’offre, de la demande et des infrastructures, de même que la coordination des activités réglementaires et des aides financières au niveau de l’Union, des États membres et des collectivités locales et régionales, en accordant une attention particulière au rôle de liaison des régions dans le développement de la production et de l’utilisation de l’hydrogène vert dans le cadre de la transition relative aux matières premières énergétiques et industrielles;

17.

considère le développement d’une économie verte de l’hydrogène comme essentiel pour la politique industrielle durable visée dans le pacte vert pour l’Europe; attire l’attention sur la nécessité de faire passer la technologie d’électrolyse à l’hydrogène à l’échelle du gigawatt afin de rendre l’hydrogène vert compétitif. La production d’électrolyseurs dans les États membres de l’Union offre à cet égard de nouvelles possibilités (en matière d’emploi) et un potentiel d’exportation à l’international. Le CdR demande instamment à la Commission européenne de les promouvoir. Il souligne la nécessité d’associer les régions européennes — avec l’industrie — au développement de chaînes de valeur de l’hydrogène transsectorielles reliant l’offre, les infrastructures et la demande. Le CdR invite la Commission à promouvoir, dans le cadre de la mise en œuvre de la nouvelle stratégie industrielle pour l’Europe (8), des marchés pilotes consacrés aux technologies et systèmes hydrogène verts et à leur utilisation pour une production neutre sur le plan climatique, en particulier dans les secteurs de l’acier, du ciment et de la chimie. Il demande en outre à la Commission d’adopter rapidement la stratégie de l’Union en matière d’acier propre qui a été annoncée et d’axer celle-ci sur l’utilisation de l’hydrogène vert;

18.

se félicite vivement de la création, prévue dans la nouvelle stratégie industrielle, d’une alliance européenne pour un hydrogène propre. Le CdR demande qu’elle soit mise en place rapidement, qu’elle se concentre sur l’hydrogène vert et qu’elle permette à l’Union d’être à l’avant-garde de cette technologie clé, en favorisant la coordination et l’échange de connaissances et d’expériences. Il insiste également pour que les régions et les PME puissent prendre résolument part à cette alliance, comme l’a annoncé la Commission;

19.

fait observer que l’intégration croissante des secteurs grâce à l’utilisation des mêmes sources d’énergie nécessite d’envisager ceux-ci sous une perspective plus systémique. Le CdR souligne que la stratégie pour un système intégré d’énergie et la stratégie hydrogène de l’Union (9), élaborées par la Commission européenne, doivent mettre en avant l’importance systémique que revêt l’hydrogène vert par rapport à d’autres formes d’énergie comme l’électricité, les gaz renouvelables et les carburants de synthèse en vue de l’intégration des secteurs au sein du futur système énergétique et économique et montrer la voie vers une mise en œuvre qui lui sera profitable. Elles doivent en outre présenter des modalités de mise en œuvre qui permettront de créer rapidement, au moyen de règles nouvelles et adaptées, un marché de l’hydrogène opérationnel qui permette, d’une part, de développer de manière dynamique la production et l’utilisation de l’hydrogène et, d’autre part, qui soit bien intégré avec les marchés de l’électricité et du gaz;

Législation-cadre de soutien et développement des infrastructures au titre du pacte vert pour l’Europe

20.

souligne que l’expansion du marché de l’hydrogène vert en Europe repose sur le développement dynamique des énergies renouvelables dans la production d’électricité. Le CdR plaide pour une révision de la directive sur les énergies renouvelables (RED II) à la suite d’un renforcement des objectifs climatiques de l’Union à l’horizon 2030, en vertu desquels il s’impose de relever en conséquence l’objectif de l’Union concernant la part des énergies renouvelables dans la consommation finale brute d’énergie; encourage les États membres et les collectivités locales et régionales à atteindre des objectifs ambitieux au niveau national, régional et local en matière de développement des énergies renouvelables telles que l’énergie éolienne et l’énergie solaire; escompte que la stratégie sur les énergies renouvelables en mer annoncée par la Commission imprimera un élan à ce secteur, notamment en finançant des projets innovants pour la production d’hydrogène vert en mer;

21.

recommande à la Commission d’examiner si la REE II et les actes délégués prévoient des incitations suffisantes en faveur de l’utilisation de carburants de synthèse basés sur les émissions industrielles de CO2 ou sur le captage et l’utilisation du CO2 dans une phase de transition. Il convient toutefois de veiller à éviter le double comptage des réductions d’émissions de gaz à effet de serre et de compter tous les carburants de synthèse comme «renouvelables»;

22.

demande par ailleurs que soient rapidement élaborés des actes délégués au titre de la RED II afin de clarifier la classification des réseaux électriques pour la production d’hydrogène (article 27 de la RED II) et les exigences minimales en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre pour les carburants de synthèse (article 25 de la RED II);

23.

souligne qu’il y a lieu de veiller à ce que l’électrolyse soit exploitée d’une manière utile au réseau et au système lors de l’utilisation de l’électricité issue du réseau pour la production d’hydrogène (gestion de la demande); demande de prévoir, dans la stratégie de l’Union pour l’hydrogène et dans celles des États membres et des régions en la matière, la création de capacités supplémentaires de production d’électricité verte pour l’électrolyse;

24.

attire l’attention sur le fait que l’internalisation des coûts externes crée des conditions de concurrence équitables pour les différentes sources d’énergie et accroît l’attrait économique de l’hydrogène vert. Le CdR est dès lors favorable à une révision approfondie de la directive sur la taxation de l’énergie afin d’aligner ladite taxation sur les objectifs du pacte vert pour l’Europe et d’inclure l’hydrogène et les carburants de synthèse dans le champ d’application de la directive; encourage les États membres à exploiter les marges existantes au profit d’une fiscalité écologique et à utiliser les recettes supplémentaires pour réduire la pression fiscale pesant sur l’électricité à faible intensité de carbone;

25.

fait valoir que le système d’échange de quotas d’émission (SEQE) de l’Union offre de profondes incitations à réduire les émissions de gaz à effet de serre dans les industries à forte intensité énergétique (par exemple, l’industrie chimique et la sidérurgie), dans lesquelles l’option de l’hydrogène vert est fondamentale pour ce qui est de la décarbonation. La révision de la directive relative au système d’échange de quotas d’émission devrait tenir compte des nouveaux objectifs climatiques à l’horizon 2030, en augmentant par exemple le facteur de réduction linéaire. La sécurité d’investissement pourrait être renforcée en complétant le SEQE de l’Union par l’ajout d’un prix minimal;

26.

est favorable au développement d’un mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (10) approprié qui soit conforme aux règles de l’OMC, s’appliquant aux produits importés de pays tiers dont la production entraîne des émissions de CO2 élevées et qui sont soumis à une forte concurrence internationale. Un tel mécanisme, combiné à un système européen d’échange de quotas d’émission adapté, pourrait encourager l’utilisation de l’hydrogène vert dans les industries à forte intensité énergétique;

27.

invite la Commission à réviser le règlement sur les infrastructures énergétiques transeuropéennes (RTE-E) (11) et les règles de l’Union relatives au marché européen du gaz, en accordant la priorité à la directive 2009/73/CE (12) de l’Union sur le gaz, de manière à permettre le développement dynamique d’une économie verte de l’hydrogène dans laquelle celui-ci pourrait être transporté aux quatre coins de l’Union. Il s’agit, entre autres, de définir des normes uniformes et claires (par exemple, la part admissible d’hydrogène dans le réseau de gaz naturel), d’adapter en conséquence les prescriptions relatives aux projets d’intérêt commun (PIC) en fonction des RTE-E, de planifier de manière coordonnée les infrastructures d’électricité et de gaz, de transformer les infrastructures gazières existantes ainsi que d’édicter des règles précises concernant l’injection d’hydrogène dans le réseau de gaz naturel. Il y a lieu également d’élaborer des bases réglementaires relatives aux réseaux publics d’hydrogène en assurant un accès non discriminatoire au réseau. Le CdR attire l’attention sur le fait que la mise en place et le développement de réseaux d’hydrogène spécifiques constituent une condition préalable importante pour assurer l’approvisionnement en hydrogène pur des applications prioritaires pour lesquelles aucune solution alternative à l’hydrogène n’est envisageable;

28.

est d’avis que la révision du règlement sur le réseau transeuropéen de transport (RTE-T) devrait accorder une importance bien plus grande aux technologies de propulsion à faible intensité de carbone destinées aux camions, aux autocars et aux bateaux de navigation intérieure, telles que les moteurs électriques alimentés par des piles à hydrogène ou via des lignes aériennes de contact, parallèlement à d’autres formes d’énergie répondant aux exigences de durabilité et de réduction des émissions de gaz à effet de serre. La mise en place des infrastructures correspondantes, dans un premier temps le long des corridors du réseau central, est une condition préalable au déploiement de ces technologies. Le mécanisme pour l’interconnexion en Europe (MIE) devrait prévoir des moyens financiers suffisants à cet effet. La révision de la directive sur le déploiement d’une infrastructure pour carburants alternatifs permettrait par ailleurs d’imposer des exigences spécifiques en ce qui concerne la densité du réseau de points de ravitaillement en hydrogène dans les États membres;

29.

demande à la Commission de permettre le soutien à la création d’infrastructures de transport d’hydrogène (construction de nouveaux gazoducs ou réaménagement de gazoducs existants) et d’infrastructures de stockage; souligne que le développement et le financement d’infrastructures transfrontalières d’hydrogène entre pôles industriels offrent des perspectives économiques. La coopération avec d’autres secteurs nécessitant de nouvelles infrastructures énergétiques est conseillée pour des raisons d’aménagement du territoire et de rationalisation des coûts;

30.

invite la Commission à donner la priorité, dans sa stratégie annoncée en faveur d’une mobilité durable et intelligente, à l’utilisation de l’hydrogène vert et des carburants de synthèse en complément de la mobilité électrique dans les secteurs du transport par poids lourds, des transports publics de passagers, du transport par bateau et du transport aérien. Il est nécessaire de disposer à cette fin d’une feuille de route claire et fiable et d’un cadre juridique européen permettant d’encourager l’utilisation de véhicules à faibles émissions dans le cadre des systèmes de péage existants;

Appui par des mesures financières et réglementaires ainsi que des aides d’État

31.

relève que le développement d’une économie verte de l’hydrogène, en particulier s’agissant de la production, doit être financé par des fonds publics, étant donné qu’à l’heure actuelle, l’hydrogène vert n’est économiquement pas rentable. Le CdR fait observer que la révision des lignes directrices concernant les aides d’État à la protection de l’environnement et à l’énergie devrait préserver, voire renforcer, les possibilités qu’offrent les instruments d’aide afin de stimuler le développement précoce du marché;

32.

rappelle que tant les coûts d’investissement que ceux de l’électricité représentent des éléments de coûts significatifs dans la production d’hydrogène vert. Il existe en principe des instruments de soutien à la production d’hydrogène vert, aussi bien du côté de l’offre que de la demande, qui peuvent avoir des effets similaires en fonction de leur conception. Les aides à l’investissement et les primes de rachat constituent des instruments éventuels pour ce qui est de l’offre. Le CdR souligne que, d’après l’expérience acquise dans le secteur de l’électricité, des recettes garanties sur une certaine période permettent d’accroître la capacité de production. Il est cependant possible, en vue de susciter une pression concurrentielle, de soumettre à des appels d’offres les primes de rachat, tout comme les aides à l’investissement;

33.

met en évidence la possibilité, grâce à des mesures réglementaires, de générer une demande d’hydrogène vert dans certains secteurs ou domaines d’application, laquelle stimulera en retour le développement de la production. Les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre dans les secteurs concernés, en lien avec des instruments tels que des taux de mélange obligatoires (pour le transport aérien et maritime, par exemple), des taux de réduction des émissions de GES appliqués aux responsables de la mise sur le marché des carburants ou encore des seuils d’émissions de CO2 des véhicules (pour les poids lourds, les autocars ou les bateaux de navigation intérieure), peuvent susciter une demande solide en hydrogène vert ou en carburants de synthèse. Dans ce contexte, le CdR invite les États membres, lors de la mise en œuvre de la directive RED II, à utiliser les possibilités juridiques existantes afin de promouvoir l’hydrogène vert ou les carburants de synthèse. Les contrats dits d’écart compensatoire appliqués au carbone, qui compensent la différence entre les coûts réels de réduction des émissions de gaz à effet de serre supportés par les utilisateurs et le prix actuel du carbone, pourraient constituer une solution de substitution pour les applications qui nécessitent d’ores et déjà de grandes quantités d’hydrogène;

34.

fait observer que les marchés publics peuvent également créer une demande effective et prévisible. Les collectivités locales et régionales sont susceptibles de jouer un rôle important à cet égard, étant donné que les parcs de véhicules des communes et des entreprises municipales, destinés par exemple au nettoyage des rues, à l’enlèvement des déchets ou aux transports publics ou aux services de taxi, représentent toujours plus de cas intéressants d’utilisation de l’hydrogène vert et d’autres technologies de propulsion neutres pour le climat;

35.

salue les initiatives visant à créer des projets importants d’intérêt européen commun (PIIEC) en faveur de l’hydrogène vert. Le CdR encourage la Commission à mettre en place, s’agissant de l’hydrogène vert, le cadre juridique relatif aux PIIEC et incite les États membres à en faire usage par la suite afin d’ouvrir la voie à des projets de démonstration à grande échelle. Il convient d’accorder une attention particulière à la création de synergies entre les différents PIIEC ayant trait à l’hydrogène, afin d’empêcher tout dilemme de type «l’œuf ou la poule» dans le développement de la chaîne de valeur de l’hydrogène vert;

36.

demande que les projets de démonstration portant sur l’hydrogène vert continuent d’être financés par l’intermédiaire du Fonds pour l’innovation et du Fonds pour la modernisation, lesquels sont alimentés par le SEQE de l’Union, et qu’un soutien ciblé soit apporté à l’hydrogène vert au titre du programme InvestEU. Le CdR encourage les États membres et les régions à recourir, pendant la prochaine période de programmation, aux Fonds structurels et d’investissement européens (Fonds ESI), y compris au programme Interreg, afin de développer et renforcer les pôles locaux, régionaux et interrégionaux dédiés à l’hydrogène. Il souligne la nécessité de réaliser, à tous les niveaux, des synergies entre ces aides financières, les PIIEC, le MIE et le financement de la recherche;

37.

se félicite de la nouvelle politique de financement dans le secteur de l’énergie adoptée par la Banque européenne d’investissement (BEI), y compris la définition de nouvelles approches de financement dans le cadre du programme «Services de conseil» du dispositif InnovFin (InnovFin Advisory); réclame à cet égard un soutien important de la BEI à l’hydrogène vert, assorti d’approches de financement qui profitent également aux PME et aux collectivités locales et régionales ainsi qu’à leurs banques de développement;

38.

estime qu’un guichet unique au niveau de l’Union pourrait faciliter considérablement l’accès au financement de projets pour les entreprises, notamment les PME, ainsi que pour les régions et les villes;

39.

recommande aux États membres, en étroite coopération avec les collectivités locales et régionales et leurs associations nationales et régionales, de compléter le soutien de l’Union par des programmes nationaux favorisant les «laboratoires vivants» et les projets de démonstration à plus grande échelle, ainsi que la constitution de réseaux à l’échelon national et les échanges entre régions productrices d’hydrogène;

40.

souligne la nécessité d’envoyer des signaux à long terme afin d’orienter les flux financiers et de capitaux du secteur privé vers des investissements dans une transition écologique liée à une économie verte de l’hydrogène, et ce également en faveur de PME innovantes. Le CdR escompte que la Commission apportera son soutien à cet égard dans le cadre de la stratégie annoncée en matière de finance durable;

Recherche et innovation

41.

fait valoir que la recherche et l’innovation jouent également un rôle décisif dans la mise en œuvre à grande échelle de la production et de l’utilisation de l’hydrogène vert. Elles doivent être axées sur la réduction des coûts à toutes les étapes de la chaîne de valeur, ainsi que sur l’amélioration de la capacité de réglage, de l’efficacité et de la durée de vie des installations. Le CdR recommande par conséquent de mettre explicitement l’accent sur l’hydrogène vert dans le cadre du programme Horizon Europe, par l’intermédiaire notamment des missions relevant du pacte vert, du plan SET et du Conseil européen de l’innovation (CEI);

42.

accueille favorablement la proposition de la Commission visant à mettre en œuvre, au titre du programme Horizon Europe, un partenariat européen pour l’hydrogène propre, qui succèdera à l’entreprise commune «Piles à combustible et hydrogène» (EC PCH) (13). Le CdR recommande d’améliorer la dotation financière ainsi que le mécanisme et la structure de ce partenariat par rapport à l’entreprise commune PCH, en tenant dûment compte de l’importance spécifique des collectivités locales et régionales, afin de soutenir davantage de projets de démonstration relatifs à l’hydrogène vert au sein de l’Union, notamment dans le cadre du partenariat européen des vallées de l’hydrogène. Il précise que l’un des objectifs essentiels du partenariat doit être de renforcer l’échange de connaissances et d’expériences entre les régions, les institutions de l’Union, les États membres et les collectivités locales et régionales, mais aussi entre les entreprises;

43.

encourage les États membres et les collectivités locales et régionales à promouvoir, dans le cadre de leurs compétences en matière d’enseignement supérieur ainsi que d’enseignement et de formation professionnels, la formation de professionnels et de scientifiques qualifiés tout au long de la chaîne de valeur de l’hydrogène vert. Ils devraient également mettre en place des services de conseil en la matière, notamment à l’attention des PME, et améliorer ceux qui existent. Le CdR invite la Commission à soutenir les efforts entrepris en ce sens, notamment dans le cadre du nouveau «pacte européen pour les compétences» annoncé dans la nouvelle stratégie industrielle pour l’Europe et de l’espace européen de l’éducation (14);

Dimension internationale

44.

fait remarquer qu’à long terme, une grande part de la demande en hydrogène ou en carburants de synthèse sera probablement satisfaite par des importations en provenance de régions disposant de ressources renouvelables très importantes; il convient de veiller, dans ce contexte, à ce que l’hydrogène et les carburants de synthèse importés soient également soumis à des critères stricts en matière de durabilité. Le CdR recommande de tenir compte, dans la feuille de route demandée pour l’hydrogène vert, de la production d’hydrogène vert et de carburants de synthèse dans les pays tiers et de leur transport vers l’Union européenne. Le Comité encourage en outre la Commission à nouer rapidement une coopération avec d’éventuels pays exportateurs, mais aussi avec d’autres pays importateurs (par exemple le Japon), en vue de soutenir la mise en place coordonnée d’une économie internationale de l’hydrogène vert, en particulier celui produit à partir d’énergies renouvelables. Il conviendrait en sus de renforcer les initiatives internationales pertinentes, à l’exemple de l’initiative sur l’hydrogène dans le cadre des réunions ministérielles sur l’énergie propre et de «Mission innovation». Les collectivités locales et régionales devraient également y être associées, comme tel est déjà le cas dans le partenariat européen des vallées de l’hydrogène.

Bruxelles, le 2 juillet 2020.

Le président du Comité européen des régions

Apostolos TZITZIKOSTAS


(1)  Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil établissant le cadre requis pour parvenir à la neutralité climatique et modifiant le règlement (UE) 2018/1999 (loi européenne sur le climat) [COM(2020) 80 final].

(2)  Communication de la Commission — Le pacte vert pour l’Europe [COM(2019) 640 final].

(3)  Voir la feuille de route Ares(2020)2722353.

(4)  Les carburants et combustibles de synthèse sont dénommés ci-après «carburants de synthèse» à titre de simplification.

(5)  COM(2018) 773 final.

(6)  Avis du Comité européen des régions — Mettre en œuvre l’accord de Paris grâce à une transition énergétique innovante et durable au niveau régional et local (JO C 39 du 5.2.2020, p. 72); avis du Comité européen des régions — Une planète propre pour tous — Une vision européenne stratégique à long terme pour une économie prospère, moderne, compétitive et neutre pour le climat (JO C 404 du 29.11.2019, p. 58).

(7)  Sous l’égide de la «plateforme de spécialisation intelligente» (S3P).

(8)  COM(2020) 102 final.

(9)  Voir la feuille de route de la Commission européenne, Ares(2020)2722353.

(10)  Voir l’analyse d’impact initiale Ares(2020)1350037.

(11)  Voir l’analyse d’impact initiale Ares(2020)2487772.

(12)  Directive 2009/73/CE du Parlement européen et du Conseil du 13 juillet 2009 concernant des règles communes pour le marché intérieur du gaz naturel et abrogeant la directive 2003/55/CE (JO L 211 du 14.8.2009, p. 94).

(13)  Voir l’analyse d’impact initiale Ares(2019)4972390.

(14)  COM(2020) 102 final.