Bruxelles, le 14.1.2020

COM(2020) 21 final

COMMUNICATION DE LA COMMISSION AU PARLEMENT EUROPÉEN, AU CONSEIL, AU COMITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN ET AU COMITÉ DES RÉGIONS

Plan d'investissement pour une Europe durable



Plan d'investissement du pacte vert pour l'Europe


1.Introduction

Le pacte vert pour l’Europe est la réponse de l’Union européenne aux défis liés au climat et à l’environnement, qui constituent la mission majeure de notre génération. Il s’agit d’une nouvelle stratégie de croissance visant à transformer l’UE en une société juste et prospère, dotée d’une économie moderne, efficace dans l’utilisation des ressources et compétitive, dont les émissions nettes de gaz à effet de serre seront devenues nulles en 2050, où l’environnement et la santé des citoyens seront protégés, et où la croissance économique sera dissociée de l’utilisation des ressources.

Le plan d’investissement pour une Europe durable constitue le volet «investissement» du pacte vert pour l’Europe. Pour une Europe durable, d’importants efforts d’investissement doivent être accomplis dans tous les secteurs de l’économie. Pour atteindre les objectifs climatiques et énergétiques fixés pour 2030 1 , il faudra réaliser 260 milliards d’EUR d’investissements supplémentaires par an d’ici à cette date 2 . La Commission a déjà annoncé son intention de présenter un plan assorti d’une analyse d’impact afin de relever encore les ambitions de l’UE en matière de climat pour 2030, et des investissements supplémentaires seront nécessaires pour atteindre les objectifs environnementaux et sociaux plus larges que l’UE s’est fixés 3 .

On constate un intérêt grandissant des investisseurs pour les opportunités d’investissements durables ayant un impact mesurable. Le montant annuel d’obligations vertes émises dans le monde a triplé depuis 2016, pour atteindre environ 225 milliards d’EUR en 2019 d’après de récentes estimations. Un cadre est nécessaire pour combler le fossé entre les objectifs politiques et les importantes ressources financières privées disponibles.

Le plan d’investissement pour une Europe durable mobilisera, grâce au budget de l’UE et à ses instruments connexes, au moins 1 000 milliards d’EUR d’investissements durables privés et publics au cours de la prochaine décennie. Il met en place un cadre global pour assurer la transition vers la durabilité partout dans l’UE. Ce cadre ciblera les investissements climatiques et environnementaux, ainsi que les investissements sociaux, dans la mesure où ces derniers sont en rapport avec la transition vers la durabilité.

Cependant, les défis à venir nécessitent encore davantage d’efforts. Ce sont les acteurs privés qui devront leur donner de l’envergure. En mettant en place, dans un cadre d’action unique, un ensemble de nouvelles initiatives combinées à un renforcement des engagements pris dans le cadre des instruments existants, la Commission donne un nouvel élan aux politiques dans ce domaine et augmente l’impact et la cohérence du cadre de l’UE pour les investissements durables. La Commission continuera d’examiner les moyens de mobiliser davantage de ressources pour atteindre les objectifs du pacte vert.

Graphique 1. Le plan d’investissement au sein du pacte vert pour l’Europe

Le plan d’investissement pour une Europe durable permettra d’accomplir la transition vers une économie verte et neutre pour le climat selon les trois axes suivants:

·Premièrement, le plan mobilisera au moins 1 000 milliards d’EUR d’investissements durables au cours de la prochaine décennie grâce au budget de l’UE. Le budget de l’UE consacrera au climat et à l’environnement une part plus importante que jamais des dépenses publiques. Il attirera les financements privés au moyen de garanties et il aidera à rendre la transition juste en facilitant les investissements du secteur public dans les régions les plus touchées par la transition, grâce au mécanisme pour une transition juste.

·Deuxièmement, il créera un cadre facilitateur pour les investisseurs privés et le secteur public. Il visera à garantir que la transition présente un bon rapport coût/efficacité et qu’elle soit juste ainsi que socialement équilibrée et équitable. Les établissements financiers et les investisseurs privés doivent disposer des outils nécessaires pour identifier correctement les investissements durables. La taxinomie de l’UE, le principe de primauté de l’efficacité énergétique et l’évaluation de la durabilité seront notamment essentiels pour exploiter leurs capacités d’investissement. En ce qui concerne le secteur public, le Semestre européen, l’examen de la mise en œuvre de la politique environnementale, les plans nationaux en matière d’énergie et de climat dans le cadre de l’union de l’énergie, et les plans requis par la législation environnementale sectorielle (par exemple, concernant les déchets, l’eau, la biodiversité et l’air) permettront de correctement recenser les besoins d’investissement.

·Troisièmement, le plan fournira un soutien sur mesure aux administrations publiques et aux promoteurs de projets pour les aider à définir, structurer et exécuter les projets durables. Le soutien apporté aux autorités publiques pour évaluer les besoins financiers et planifier ensuite les investissements ainsi que le soutien direct aux promoteurs de projets publics et privés seront renforcés.

Graphique 2. Le plan d’investissement pour une Europe durable

Le plan d’investissement pour une Europe durable contribue à la réalisation des objectifs de développement durable. Cela correspond à l’engagement pris dans la communication relative au pacte vert pour l’Europe de placer les objectifs de développement durable au centre de l’élaboration des politiques de l’UE et de l’action de celle-ci.

2.La question des investissements

La transition vers une économie neutre pour le climat, résiliente face au changement climatique et durable sur le plan environnemental nécessitera des investissements importants. La réalisation des objectifs actuels en matière de climat et d’énergie à l’horizon 2030 nécessite 260 milliards d’EUR d’investissements supplémentaires par an 4 . Ce montant comprend principalement les investissements liés à l’énergie, aux bâtiments et à une partie du secteur des transports (véhicules) 5 . Les besoins d’investissements moyens par secteur 6 les plus élevés sont ceux pour la rénovation des bâtiments. Il sera nécessaire de maintenir ces flux d’investissement dans la durée.

D’importants investissements seront également nécessaires dans d’autres secteurs, notamment dans l’agriculture, pour relever des défis environnementaux plus larges, tels que l’érosion de biodiversité et la pollution, la protection du capital naturel et le soutien à l’économie circulaire et à l’économie bleue, de même que des investissements sociaux et dans le capital humain liés à la transition.

La transformation numérique est un élément essentiel du pacte vert. Des investissements substantiels dans les capacités numériques stratégiques européennes, ainsi que dans le développement et le déploiement à grande échelle de technologies numériques de pointe, fourniront des solutions intelligentes, innovantes et sur mesure pour s’attaquer aux problèmes liés au changement climatique.

Le projet, annoncé dans le pacte vert pour l’Europe, de relever encore l’objectif de l’UE pour 2030 en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre se traduira par des besoins d’investissement encore plus importants. L’analyse approfondie étayant la vision stratégique à long terme de la Commission pour une économie européenne neutre pour le climat a déjà montré que le passage à une économie à faible intensité de carbone pourrait nécessiter jusqu’à 2 % du PIB d’investissements supplémentaires d’ici 2040. Ceux-ci pourraient devoir être réalisés plus tôt si l’on veut atteindre un objectif plus ambitieux dès 2030.

3.Fonds: mobiliser toutes les sources d’investissements durables

En tant que volet «investissement» du pacte vert pour l’Europe, le plan d’investissement pour une Europe durable mobilisera au moins 1 000 milliards d’euros d’investissements durables au cours de la prochaine décennie. Ce montant de financement de la transition verte sera assuré par des dépenses au titre du budget à long terme de l’UE, dont au moins un quart sera consacré à des objectifs liés au climat, et comprendra un montant estimé à 39 milliards d’EUR pour des dépenses en faveur de l’environnement. En outre, le plan mobilisera des financements privés supplémentaires grâce à l’effet de levier de la garantie budgétaire de l’Union dans le cadre du programme InvestEU.

Outre les dépenses de l’UE liées à l’action pour le climat et à la politique environnementale, le plan d’investissement pour une Europe durable couvre également les montants utilisés dans le cadre du mécanisme pour une transition juste, qui aidera les régions les plus touchées à réaliser la transition.

La Banque européenne d’investissement deviendra la banque de l’Union pour le climat. Elle a annoncé qu’elle augmenterait progressivement la part de ses financements consacrée à l’action pour le climat et à la viabilité environnementale pour qu’elle atteigne 50 % de ses opérations en 2025. La coopération avec d’autres institutions financières sera également cruciale.

Si cette contribution témoigne de l’engagement de l’UE à financer le pacte vert pour l’Europe, elle ne suffira pas, à elle seule, à débloquer les investissements nécessaires. Il faudra également une contribution importante de la part des budgets nationaux et du secteur privé.

Graphique 3: éléments de financement permettant de parvenir à au moins 1 000 milliards d’EUR sur les dix prochaines années 7 dans le cadre du plan d’investissement pour une Europe durable


De quelle manière le budget de l’UE permettra-t-il de mobiliser au moins 1 000 milliards d’EUR au cours de la prochaine décennie?

La mobilisation d’au moins 1 000 milliards d’EUR au cours des dix prochaines années nécessitera des fonds fournis par le budget de l’UE conformément à la proposition de la Commission, conjugués à d’autres investissements publics et privés que ce dernier permettra de déclencher.

Les dépenses pour le climat et l’environnement au titre du budget de l’UE représenteront 503 milliards d’EUR entre 2021 et 2030, conformément à l’objectif d’une part de 25 % consacrée aux questions climatiques proposé pour le cadre financier pluriannuel (CFP) 2021-2027 et en incluant les dépenses consacrées à l’environnement à travers l’ensemble des programmes 8 . Au cours de cette période, cela entraînera 114 milliards d’EUR de cofinancements nationaux supplémentaires en faveur du climat et de l’environnement.

Le Fonds InvestEU permettra de mobiliser environ 279 milliards d’EUR d’investissements privés et publics liés au climat et à l’environnement sur la période 2021‑2030, en fournissant une garantie budgétaire de l’UE pour réduire le risque attaché aux opérations de financement et d’investissement.

Pour ne laisser personne de côté, le mécanisme pour une transition juste comprendra un financement provenant du budget de l’UE, un cofinancement par les États membres ainsi que des contributions d’InvestEU et de la BEI, en vue de parvenir à mobiliser 100 milliards d’EUR d’investissements sur la période 2021-2027 pour assurer une transition juste, un montant qui atteint 143 milliards d’EUR si on l’extrapole sur dix ans.

Les fonds pour l’innovation et la modernisation, qui ne font pas partie du budget de l’UE mais qui sont financés par une partie du produit de la mise aux enchères de quotas de carbone dans le cadre du système d’échange de quotas d’émission, fourniront au moins 25 milliards d’EUR pour la transition de l’UE vers la neutralité climatique.

3.1.Une ambition accrue pour le budget de l’UE et les programmes associés

Dans sa proposition relative au prochain cadre financier pluriannuel de l’UE, la Commission a proposé de relever le niveau d’ambition en portant la part du budget consacrée aux questions climatiques à 25 %. La Commission invite le Parlement européen et le Conseil à au moins maintenir ce niveau d’ambition dans le cadre des négociations en cours.

Comme proposé par la Commission pour le prochain cadre financier pluriannuel de l’UE, les différents programmes incluront des mesures spécifiques visant à renforcer le lien entre l’exécution du budget de l’UE et l’objectif d’une Europe plus verte et sans carbone, par exemple:

·Le Fonds de cohésion et le Fonds européen de développement régional devraient investir au moins 108 milliards d’EUR dans des projets liés au climat et à l’environnement au cours des 7 prochaines années (2021-2027), soit plus de 30 % de leur enveloppe totale.

·La future politique agricole commune consacrera 40 % de son enveloppe totale à soutenir des objectifs liés au climat. Tous les paiements directs seront subordonnés au respect d’exigences plus strictes en matière d’environnement et de climat.

·Au moins 35 % du budget du programme Horizon Europe (soit un montant qui devrait atteindre 35 milliards d’EUR) soutiendront des objectifs en matière de climat. En outre, pour la dernière année du programme Horizon 2020, la Commission prépare un appel supplémentaire d’environ 1 milliard d’EUR consacré aux priorités du pacte vert, en plus de la dotation actuelle de 1,35 milliard d’EUR en 2020.

·L’enveloppe du programme LIFE sera augmentée de 72 % par rapport à 2014-2020 et portée à 5,4 milliards d’EUR. Plus de 60 % de cette enveloppe seront consacrés à la réalisation d’objectifs en matière de climat, dont 0,95 milliard d’EUR pour l’action pour le climat, 1 milliard d’EUR pour la transition vers l’énergie propre et 2,15 milliards d’EUR pour la nature et la biodiversité.

·Au moins 60 % du budget du mécanisme pour l’interconnexion en Europe (soutenant les infrastructures de transport, d’énergie et numériques) viseront à soutenir des objectifs en matière de climat.

·Le Fonds social européen plus soutiendra le renforcement des compétences et la reconversion, pour des emplois verts et l’économie verte, d’un nombre de personnes estimé à 5 millions.

Le budget de l’Union contribuera à la réalisation des objectifs climatiques également sur le plan des recettes. En mai 2018, la Commission a présenté une proposition de décision relative aux ressources propres, qui comprenait un ensemble de nouvelles ressources propres. L’un de ses principaux éléments correspond à la ressource propre tirée des emballages en plastique non recyclés, qui contribuera à la réalisation des objectifs fixés pour l’ensemble de l’UE dans la stratégie relative aux déchets. En outre, la proposition de la Commission prévoit que 20 % des recettes tirées des enchères du système d’échange de quotas d’émission de l’UE (SEQE) seront inscrits au budget de l’UE en tant que ressource propre.

En outre, le Fonds pour la modernisation du système d’échange de quotas d’émission et le Fonds pour l’innovation, qui sont tous deux financés en dehors du budget à long terme de l’UE, canaliseront des fonds supplémentaires vers la transition verte. Le Fonds pour l’innovation soutiendra les investissements dans le développement de technologies et processus innovants à faibles émissions de carbone dans le secteur des énergies renouvelables et les secteurs à forte intensité énergétique, notamment pour le captage, l’utilisation et le stockage du carbone, ainsi que le stockage de l’énergie. L’objectif est de partager le risque intrinsèque de l’innovation avec les promoteurs de projets afin de soutenir des projets inédits hautement innovants et de faire de l’industrie européenne un acteur mondial de premier plan dans ces technologies propres. La Commission prépare actuellement le premier appel pour le Fonds pour l’innovation, qui devrait être lancé à la mi-2020, avec un volume de 1 milliard d’EUR. Plusieurs ateliers se tiendront dans les prochains mois pour dialoguer avec les promoteurs de projets et d’autres investisseurs privés et publics en vue d’élaborer un ensemble de critères de sélection efficaces. Le Fonds pour la modernisation soutiendra les investissements visant à moderniser le secteur de l’électricité, et plus largement les systèmes d’énergie, et à améliorer ainsi l’efficacité énergétique dans dix États membres à plus faible revenu. Il peut également soutenir la reconversion et le renforcement des compétences des personnes touchées. La Commission mènera prochainement une consultation sur les modalités d’exécution pour le Fonds pour la modernisation. La Commission réexaminera les deux instruments dans le cadre de la révision du système d’échange de quotas d’émission de l’UE et envisagera d’allouer des recettes supplémentaires au budget de l’UE afin de renforcer le financement de la transition juste.

Conformément à la communication relative au pacte vert pour l’Europe, la Commission présentera d’ici l’été 2020 un plan assorti d’une analyse d’impact visant à relever l’objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre fixé par l’UE pour 2030, y compris une analyse des besoins d’investissement. En fonction de ses résultats, il pourrait être opportun d’envisager d’éventuelles modifications des objectifs en matière de climat dans le prochain cadre financier pluriannuel.

La Commission:

-défendra, lors des négociations interinstitutionnelles, l’ambition forte de consacrer au moins 25 % du montant du cadre financier pluriannuel au climat;

-renforcera le système de suivi pour surveiller les progrès accomplis dans la réalisation de cet objectif.

3.2.Attirer les investissements privés grâce à InvestEU

Certains investissements nécessaires à la transition comportent un niveau de risque trop élevé pour que le secteur privé puisse l’assumer seul. C’est dans de telles situations qu’une utilisation ciblée des fonds publics peut permettre de réduire les risques attachés aux projets afin de mobiliser des financements privés. En fournissant une garantie budgétaire de l’UE pour couvrir une partie du risque des opérations de financement et d’investissement, le programme InvestEU, qui prend le relais du Fonds européen pour les investissements stratégiques et de 13 autres instruments financiers de l’UE, permettra de mobiliser 650 milliards d’EUR sur 7 ans. Le potentiel du programme InvestEU doit être pleinement exploité afin de soutenir les objectifs du pacte vert pour l’Europe. Il est donc essentiel, dans le cadre des négociations interinstitutionnelles en cours, de parvenir pour InvestEU à un objectif ambitieux en matière de climat. La Commission a proposé un objectif d’au moins 30 %, qui déclencherait environ 195 milliards d’EUR d’investissements en faveur du climat entre 2021 et 2027, soit près de 28 milliards d’euros par an et 280 milliards d’euros sur dix ans.

InvestEU soutiendra les investissements durables dans tous les secteurs de l’économie. Il permettra également de diffuser des pratiques durables parmi les investisseurs privés et publics. La Commission présentera une méthode de suivi de l’action pour le climat permettant de mesurer la contribution d’une opération de financement ou d’investissement donnée aux objectifs climatiques et environnementaux du programme. En outre, elle mettra en place une méthode d’«évaluation de la durabilité», sur la base de laquelle les promoteurs de projets dépassant une certaine taille seront tenus d’évaluer l’impact environnemental, climatique et social de ces projets. Étant donné que ces méthodes seront appliquées par tous les partenaires chargés de la mise en œuvre d’InvestEU (le groupe Banque européenne d’investissement, les banques et institutions nationales de développement, les institutions financières internationales) et constitueront également la référence pour les investisseurs privés et les intermédiaires financiers participant au programme, elles devraient avoir des retombées au-delà du programme InvestEU. Ces méthodes feront un usage approprié du système de classification à l’échelle de l’UE des activités économiques durables sur le plan environnemental (ou «taxinomie de l’UE»).

La Commission:

-améliorera au cours du second semestre 2020 les orientations relatives au suivi en matière d’action pour le climat et d’environnement et à l’évaluation de la durabilité. Ces documents d’orientation utiliseront, d’une manière appropriée, les critères établis par la taxinomie de l’UE après l’entrée en vigueur de cette dernière;

-élaborera, en coopération avec les partenaires chargés de la mise en œuvre d’InvestEU, des produits financiers qui seront déployés dans le cadre dudit programme et qui cibleront la durabilité environnementale, climatique et sociale.

3.3.Contribution de la Banque européenne d’investissement et mobilisation d’autres institutions financières

La Banque européenne d’investissement (BEI) joue également un rôle essentiel dans le financement de la transition vers une économie durable et neutre en carbone. Elle utilise ses propres ressources et l’appui budgétaire de l’UE dans le cadre de divers programmes et facilités pour financer des investissements en faveur du climat et de l’environnement, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de l’UE. En 2018, près de 30 % des opérations signées par la BEI contribuaient à l’action pour le climat, en soutenant des investissements dans l’atténuation des changements climatiques et l’adaptation à leurs effets et dans la croissance sobre en carbone et résiliente face aux changements climatiques. Pour 2019, la BEI s’attend à ce que cette contribution ait été comprise entre 28 et 31 %. Sur l’ensemble des dix années que couvre le plan d’investissement pour une Europe durable, la BEI devrait financer, en dehors des mandats de l’UE, environ 600 milliards d’EUR d’investissements en faveur du climat dans l’ensemble des États membres.

Le rôle joué par la BEI dans le financement de la transition durable va s’accroître lorsqu’elle deviendra la banque de l’Union pour le climat. La BEI augmentera progressivement la part de ses financements consacrée à l’action pour le climat et à la durabilité environnementale pour qu’elle atteigne 50 % à partir de 2025. Cette augmentation sera réalisée en grande partie grâce au programme InvestEU, qui, en couvrant une partie du risque des opérations de financement et d’investissement, permettra à la BEI de s’engager dans des projets plus innovants et à plus forte valeur ajoutée stratégique. En outre, le groupe BEI alignera toutes ses activités de financement sur les principes et les objectifs de l’accord de Paris d’ici la fin de 2020. La première mesure prise en ce sens a été l’adoption, le 14 novembre 2019, de la nouvelle politique de prêt dans le secteur de l’énergie, qui donne la priorité aux prêts en faveur de l’efficacité énergétique, des énergies renouvelables, des nouvelles technologies vertes et des nouveaux types d’infrastructures énergétiques nécessaires au futur système énergétique à faible intensité de carbone. La politique révisée de prêt dans le secteur de l’énergie prévoit également la suppression progressive, après la fin de 2021, du soutien aux projets énergétiques reposant sur les combustibles fossiles , qui comprennent notamment tous les projets d’infrastructures de gaz naturel.

D’autres institutions financières internationales et nationales joueront également un rôle croissant dans le financement d’un modèle durable conformément aux objectifs de la politique de l’UE. La Commission collaborera donc étroitement avec celles-ci pour voir comment aligner plus étroitement leurs activités sur les objectifs du pacte vert pour l’Europe.

La Commission:

-fera en sorte que les opérations de la BEI financées au titre des mandats de l’UE apportent une valeur ajoutée élevée, en termes tant de secteurs couverts que de profil de risque des projets financés. Il s’agira notamment de renforcer le système de rapports et de surveillance, y compris la méthode de suivi en matière d’action pour le climat;

-nouera le dialogue avec les autres institutions financières internationales et nationales afin d’aligner plus étroitement leurs activités sur les objectifs du pacte vert pour l’Europe.

4.Faciliter: créer un cadre pour que les investissements publics et privés nécessaires soient réalisés.

Le pacte vert pour l’Europe fixe une orientation claire en vue d’un cadre d’action global pour la transformation de l’économie de l’UE. L’objectif de neutralité climatique à l’horizon 2050 sera inscrit dans la législation, et les ambitions en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre pour 2030 seront revues à la hausse. Les politiques du pacte vert pour l’Europe feront appel à un mélange de réglementation et d’incitations afin d’agir sur les externalités et appliqueront le principe du «pollueur-payeur», de sorte que les coûts pour la société soient pris en compte dans les décisions d’investissement. Le système d’échange de quotas d’émissions de l’UE sera revu de manière à contribuer davantage à une tarification efficace du carbone. Des initiatives spécifiques viseront les obstacles réglementaires sectoriels, par exemple les obstacles au financement et à l’exécution des investissements en faveur de l’efficacité énergétique dans le secteur de la construction. Des marchés compétitifs et intégrés sont également nécessaires pour limiter les coûts et susciter l’innovation. De même, le Conseil européen de l’innovation au titre d’Horizon Europe contribuera à des investissements public-privé dans l’innovation radicale qui soutiendront le pacte vert pour l’Europe.

Dans ce contexte plus large, le plan d’investissement pour une Europe durable facilitera la transition par des actions ciblées dans des domaines qui intéressent directement les décisions d’investissement des investisseurs privés et des entités publiques.

4.1.Mettre la finance durable au cœur du système financier

Étant donné que ce sont les entreprises privées et les ménages qui fourniront le gros des investissements durables au cours de la prochaine décennie, il est essentiel de mettre en place des signaux clairs sur le long terme pour guider les investisseurs vers les investissements durables.

Au vu du très important volume d’investissements nécessaires pour atteindre les objectifs de l’UE en matière de climat et, plus largement, de durabilité, la Commission a proposé en mars 2018 son plan d’action sur le financement de la croissance durable 9 . Ce plan d’action, qui contribue à la mise en place d’une union des marchés des capitaux, a posé des fondements importants de cadres propices à la mobilisation de financements en faveur d’investissements durables. Il s’agit notamment de la taxinomie de l’UE, de la publication d’informations sur la durabilité par le secteur financier et des indices de référence en matière de climat. Par la coopération internationale, par exemple via la plateforme internationale sur la finance durable, l’UE favorise des approches cohérentes et une incidence renforcée de la finance durable à l’échelle mondiale.

La Commission salue en particulier l’accord politique auquel sont récemment arrivés les colégislateurs au sujet du règlement sur l’établissement d’un cadre pour favoriser les investissements durables (taxinomie de l’UE), qui devra être précisé par des actes délégués à adopter par la Commission. La taxinomie de l’UE permettra de déterminer si une activité économique est durable sur le plan environnemental sur la base de critères de performance quant à sa contribution à l’un au moins des six objectifs environnementaux.

La Commission étudiera en outre comment la taxinomie de l’UE pourrait être utilisée par le secteur public dans le contexte du pacte vert pour l’Europe, au-delà d’InvestEU. La taxinomie a, au départ, été conçue pour les investisseurs privés, mais, une fois suffisamment développée, elle pourrait aussi être utilisée par les entités du secteur public. Il est important qu’il y ait convergence des normes entre le secteur privé et les banques/entités publiques, par exemple la Banque européenne d’investissement.

Sur la base du plan d’action de 2018 et à la lumière du pacte vert pour l’Europe, la Commission présentera au troisième trimestre de 2020 une stratégie renouvelée en matière de finance durable, visant à développer encore ce secteur. Les entreprises devront divulguer davantage de données concernant leur impact sur le climat et l’environnement afin que les investisseurs soient pleinement informés des possibilités d’investissement durable et puissent mieux orienter leurs investissements en soutien au pacte vert. À cet effet, la Commission procédera au réexamen de la directive sur la communication d’informations non financières. En outre, la stratégie renouvelée élargira les opportunités d’investissement en facilitant l’identification des investissements durables au moyen de labels clairs pour divers produits d’investissement durable et par l’élaboration et la mise en œuvre d’une norme de l’UE en matière d’obligations vertes.

La Commission:

-élaborera, en 2020, les actes délégués relatifs aux objectifs en matière de changement climatique liés à la taxinomie de l’UE et, pour la fin de 2021, les actes délégués relatifs aux autres objectifs environnementaux liés à la taxinomie de l’UE;

-étudiera comment la taxinomie de l’UE pourrait être utilisée par le secteur public dans le contexte du pacte vert pour l’Europe, au-delà d’InvestEU;

-lancera une consultation publique sur une stratégie renouvelée en matière de finance durable au premier trimestre de 2020, en vue de présenter cette stratégie au troisième trimestre de 2020;

-établira une norme de l’UE en matière d’obligations vertes, en 2020, et examinera comment cette norme, et d’autres cadres facilitateurs, pourraient augmenter les investissements durables publics et privés;

4.2.Fournir au secteur public des orientations et des moyens appropriés pour réaliser des investissements durables.

Dans certains secteurs, en particulier les infrastructures et les services publics, les acteurs publics sont les principaux investisseurs. Dans de nombreux cas, il convient que les autorités publiques jouent un rôle d’orientation et de coordination des investissements durables. Les autorités publiques peuvent aussi devoir investir lorsque les acteurs du marché ne peuvent pas intervenir, en particulier lorsque les avantages sociaux et environnementaux ne se répercutent pas sur les rendements privés ou lorsque les projets sont jugés trop risqués. Ces investissements ayant souvent une nature transfrontière et des retombées dans différents États membres, la Commission doit jouer un rôle de coordination au niveau de l’UE.

Le Semestre européen offre un cadre bien établi pour la coordination des politiques économiques et des politiques de l’emploi, qui facilitera les investissements de l’UE et de ses États membres nécessaires à la transformation verte. Le Semestre contribue à identifier les priorités d’investissement et les obstacles à l’investissement dans chaque État membre. Les rapports par pays établiront une correspondance entre les sources de financement disponibles via les Fonds de l’UE et les défis propres à chaque pays recensés dans les rapports, entre autres au regard des objectifs en matière de climat, d’environnement et de politique sociale. Un effort commun de l’UE et de ses États membres devrait garantir que les investissements s’orientent vers les projets les plus durables.

La Commission collaborera avec les États membres pour examiner attentivement et comparer les pratiques en matière de budgétisation verte. Il sera ainsi plus aisé d’évaluer dans quelle mesure les budgets annuels et les plans budgétaires à moyen terme tiennent compte des considérations environnementales et des risques pour l’environnement, et de tirer les enseignements des meilleures pratiques. Le réexamen du cadre européen de gouvernance économique inclura dans celui-ci une référence aux investissements publics durables en lien avec la qualité des finances publiques. Cela nourrira un débat sur la manière d’améliorer la gouvernance budgétaire de l’UE. Les résultats de ce débat serviront de point de départ pour toute éventuelle mesure ultérieure, notamment sur le traitement qu’il conviendrait de réserver aux investissements durables dans le cadre des règles budgétaires de l’UE, dans le respect des garanties contre les risques de non-soutenabilité de la dette.

La Commission proposera des critères ou objectifs «verts» obligatoires minimaux pour les marchés publics dans le cadre des initiatives sectorielles, des financements de l’UE ou de législations spécifiques à des produits. De tels critères minimaux établiront de facto une définition commune de l’achat vert, ce qui permettra de récolter des données comparables auprès des acheteurs publics et de jeter les bases d’une évaluation de l’incidence des marchés publics verts. Les autorités publiques de toute l’Europe seront encouragées à intégrer des critères verts et à utiliser des labels dans leurs marchés publics. La Commission soutiendra ces efforts par des orientations, des activités de formation et la diffusion de bonnes pratiques. En même temps, des méthodes de prise en compte du coût sur le cycle de vie devraient être appliquées par les acheteurs publics chaque fois que c’est possible. La Commission appelle tous les acteurs, y compris les entreprises, à élaborer des méthodes fiables de ce type.

Le principe de primauté de l’efficacité énergétique devrait être appliqué pour garantir que l’efficacité énergétique est prise en compte dès lors que cela est pertinent. Cela contribuerait aussi à éviter le gaspillage de ressources lié à la production, au transport, à la distribution et à l’utilisation d’énergie qui n’est pas réellement nécessaire. La Commission fournira des orientations sur la manière d’appliquer ce principe.

La Commission:

-fera de la durabilité environnementale une partie intégrante des rapports par pays établis dans le cadre du Semestre européen, dès cette année;

-aidera les États membres à définir leurs besoins d’investissement durable et les possibilités de financer ceux-ci chaque année à partir de 2020;

-en collaboration avec les États membres, examinera attentivement et comparera les pratiques en matière de budgétisation verte;

-proposera une nouvelle législation et des orientations en matière de marchés publics verts;

-fournira des orientations sur l’application du principe de primauté de l’efficacité énergétique dans les décisions d’investissement;

4.3.Faciliter les investissements durables au moyen d’un cadre favorable en matière d’aides d’État.

Les règles en matière d’aides d’État pertinentes seront révisées d’ici à 2021 à la lumière des objectifs du pacte vert pour l’Europe, de façon à soutenir une transition vers la neutralité climatique d’ici à 2050 qui soit inclusive sur le plan social et efficace par rapport à son coût. Les règles en matière d’aides d’État seront révisées afin de constituer un cadre clair, entièrement à jour et adapté aux objectifs poursuivis qui aidera les autorités publiques à atteindre ces objectifs en faisant l’utilisation la plus efficiente possible de fonds publics limités. Elles soutiendront la transition en favorisant les types d’investissements et les montants d’aide appropriés. Elles encourageront l’innovation et le déploiement sur le marché de nouvelles technologies respectueuses du climat. Dans ce cadre, la Commission envisagera aussi de faciliter encore les procédures d’approbation des aides d’État pour les régions en transition juste. Les règles faciliteront également l’abandon progressif des combustibles fossiles, en particulier les plus polluants, assurant ainsi des conditions de concurrence équitables dans le marché intérieur. Les règles concernées sont notamment les lignes directrices concernant les aides d’État à la protection de l’environnement et à l’énergie

En attendant la révision des règles, les États membres peuvent continuer d’utiliser la flexibilité permise par les règles en vigueur pour réaliser leurs objectifs pour 2030 puis la décarbonation du secteur de l’électricité et de l’économie pour 2050. Par exemple, ils peuvent choisir d’augmenter les investissements publics dans les dispositifs visant à produire de l’électricité à partir de sources renouvelables pour une énergie verte moins chère et plus intégrée, dans le déploiement d’infrastructures de recharge moins chères et accessibles au public ou dans des dispositifs contribuant à l’économie circulaire, notamment en matière de réutilisation de la chaleur résiduelle ou de recyclage des déchets.

De même, les États membres peuvent continuer à s’appuyer sur les règles existantes en matière d’aides d’État pour alléger les conséquences sociales et régionales des mesures de décarbonation. Par exemple, ils peuvent choisir de soutenir les travailleurs touchés par la fermeture de mines de charbon, investir dans les petites et moyennes entreprises et les jeunes entreprises, ou encore dans le perfectionnement et la reconversion des travailleurs. Pour obtenir des technologies génériques clés et faire de l’innovation radicale, les États membres peuvent mettre leurs fonds en commun afin de débloquer des investissements privés élevés et de réaliser des projets importants d’intérêt européen commun, y compris dans les régions subissant le plus les conséquences de la transition vers une économie verte.

Dans le même temps, les règles continueront de préserver l’intégrité du marché intérieur, tout en permettant le respect des objectifs de cohésion inscrits dans le traité UE, qui sont au cœur de l’intégration européenne. Ces objectifs tendent à réduire les disparités de niveau de développement entre les différentes régions, en aidant au rattrapage des moins favorisées. Cela signifie en particulier que le soutien aux grandes entreprises sous forme d’investissement productif public doit continuer à bénéficier uniquement aux régions les plus pauvres supportant le poids de la transition écologique [article 107, paragraphe 3, points a) et c), du TFUE].

Dans ce contexte, les règles actuelles en matière d’aides d’État seront appliquées avec souplesse, notamment dans un certain nombre de domaines qui semblent cruciaux pour mener à bien la transition vers une économie neutre pour le climat.

4.3.1.Davantage de souplesse en matière d’aides d’État pour permettre la conversion à des processus de production neutres pour le climat

La Commission approuvera le soutien apporté par les États membres à des entreprises pour les aider à décarboner ou électrifier leurs processus de production, à condition que des incitants économiques ne garantissent pas déjà l’investissement concerné et que les entreprises réduisent leur impact sur l’environnement au-delà des normes ou valeurs de référence de l’Union.

Pour réduire au maximum les coûts pour l’État, le soutien public devrait être limité à ce qui est nécessaire. Les lignes directrices actuelles fixent généralement le montant maximal de l’aide sur la base du surcoût de l’investissement en question par rapport à un investissement alternatif théorique qui serait moins respectueux de l’environnement. La Commission évaluera si, à l’avenir, pour les investissements compatibles avec la transition vers la neutralité climatique, elle pourrait plutôt déterminer les coûts éligibles par rapport au déficit de financement, en particulier dans les cas où il n’existe pas d’investissement alternatif hypothétique. Cela pourrait se justifier à la lumière des objectifs du pacte vert et du fait que ces investissements constituent un moyen important de réduire l’empreinte carbone des installations concernées et de contribuer à la neutralité climatique.

4.3.2.Aides pour améliorer l’efficacité énergétique des bâtiments

Les États membres auront davantage de latitude pour investir dans l’efficacité énergétique des bâtiments au titre des lignes directrices concernant les aides d’État à la protection de l’environnement et à l’énergie. En particulier, les États membres auront plus de souplesse pour soutenir des dispositifs de financement qui sont avantageux pour les consommateurs d’électricité, tels que les contrats de performance énergétique. Dans le cadre d’un tel dispositif, les sociétés de services énergétiques investissent dans la modernisation de bâtiments pour les rendre plus économes en énergie et sont rémunérées en fonction des économies réalisées sur la facture d’électricité du consommateur.

Les États membres disposeront aussi de plus grandes marges de manœuvre pour apporter une aide à des travaux de modernisation qui visent à la fois à améliorer l’efficacité énergétique des bâtiments et à investir dans la production d’énergie renouvelable pour l’autoconsommation.

Pour déterminer les coûts éligibles pour de tels projets, la Commission pourrait tenir compte du fait que, dans de nombreux cas, il n’y a pas d’investissement contrefactuel.

4.3.3.Aides pour le chauffage urbain

Les aides qui sont limitées aux réseaux de distribution de chauffage urbain peuvent, dans certaines circonstances, être considérées comme ne relevant pas du contrôle des aides d’État, en tant que mesure d’infrastructure qui n’a pas d’incidence sur la concurrence et les échanges. Cela peut notamment être le cas lorsque des réseaux de chauffage urbain sont exploités de la même façon que les autres infrastructures énergétiques, avec séparation de la production de chaleur, accès de tiers au réseau et tarifs réglementés.

Dans tous les autres cas où une aide d’État est présente, les lignes directrices concernant les aides d’État à la protection de l’environnement et à l’énergie établissent une série de conditions auxquelles le soutien à des projets de chauffage urbain peut être approuvé. En particulier, les règles exigent que les investissements aboutissent à un système de chauffage urbain efficace, au sens de la directive relative à l’efficacité énergétique. En ce qui concerne les montants pouvant être autorisés, les lignes directrices opèrent une distinction entre les intensités d’aide pour les coûts d’investissement dans les installations de chauffage urbain et la méthode dite du déficit de financement pour le financement de la construction ou de la modernisation du réseau de distribution.

Pour libérer davantage le potentiel de contribution du chauffage urbain à la transition vers une économie neutre pour le climat, les États membres pourront à l’avenir utiliser la méthode du déficit de financement également pour la production de chaleur pour le chauffage urbain, comme alternative aux intensités d’aide maximales fixées dans les lignes directrices concernant les aides d’État à la protection de l’environnement et à l’énergie.

Les États membres pourraient aussi être autorisés à octroyer des aides d’État à des réseaux de chauffage urbain qui ne font pas partie de systèmes de chauffage urbain efficaces si des investissements qui rendent la production de chaleur efficace commencent dans les trois ans suivant la modernisation du réseau.

4.3.4.Aides à la fermeture de centrales électriques au charbon

Brûler du lignite est l’un des modes de production d’électricité les plus polluants et les moins sobres en carbone. Le système d’échange de quotas d’émission de l’UE entraînera une réduction de la production d’électricité à forte intensité de carbone, mais un certain nombre d’États membres prévoient d’accélérer la fermeture progressive de leurs centrales électriques à la houille et au lignite. Les États membres qui choisissent d’aider à la fermeture de centrales électriques au charbon dans ce contexte, par exemple en indemnisant les opérateurs du manque à gagner causé par le fait qu’ils ne peuvent pas continuer à vendre de l’électricité sur le marché, devraient notifier ces plans à la Commission. La Commission appréciera les aides d’État présentes dans ces projets directement au regard du traité.

Dans ce contexte, la Commission examinera en particulier si ce soutien est proportionnel, afin d’éviter des surindemnisations. Cela signifie que les États membres doivent démontrer que l’indemnisation ne va pas au-delà de la perte de bénéfices subie par l’installation en raison de sa fermeture anticipée. Il est également important de veiller à ce que la mesure soit structurée de manière à limiter autant que possible les distorsions de concurrence sur le marché.

Il y a lieu de rappeler que tout soutien de l’État qui ne concerne pas une activité économique, en particulier s’il bénéficie à des particuliers (par exemple, une aide sociale ou une aide à la reconversion professionnelle) ou finance une infrastructure accessible au public, ne relève pas des règles en matière d’aides d’État, dès lors qu’il ne confère pas d’avantage indirect à une entreprise.

4.3.5.Aides à l’économie circulaire

Les États membres auront davantage de latitude pour soutenir les mesures nécessaires au passage d’une économie linéaire à une économie circulaire: recyclage des déchets, réutilisation de chaleur résiduelle, réutilisation du CO2, collecte sélective des flux de déchets. Cette souplesse s’appliquerait à condition que le mondant de l’aide soit déterminé compte tenu de tous les revenus supplémentaires que peuvent engendrer les investissements dans l’économie circulaire.

La Commission:

-continuera d’appliquer effectivement les règles en matière d’aide d’État, qui sont des vecteurs clés de la transition, en faisant preuve de souplesse dans les domaines cruciaux pour la transition vers une économie neutre pour le climat;

-révisera les règles en matière d’aides d’État d’ici à 2021 pour tenir compte des objectifs du pacte vert pour l’Europe, de façon à soutenir une transition vers la neutralité climatique d’ici à 2050 qui présente un bon rapport coût/efficacité.

5.Exécuter: créer une réserve de projets durables

Dans le contexte actuel de liquidité élevée du marché, le défi est de constituer une solide réserve de projets d’investissement conformes au pacte vert pour l’Europe. Il n’existe pas encore suffisamment de projets d’investissement compatibles avec les attentes et les exigences des investisseurs pour répondre à la demande. Les ressources de financement disponibles ne sont pas épuisées. Les services de conseil aux promoteurs de projets se sont révélés très efficaces pour combler l’écart entre un concept et un projet économiquement sain.

Sur la base des priorités établies, l’assistance technique et les services de conseil aideront à la définition et à la préparation de projets durables, et permettront aux promoteurs de projets de renforcer leurs capacités afin d’accéder plus facilement aux financements. Ces services seront organisés à différents niveaux, allant du soutien aux administrations publiques pour la définition de leurs plans d’investissement au soutien à des promoteurs de projet individuels publics et privés pour l’élaboration et la mise en œuvre de leurs projets spécifiques.

5.3.1.Soutien aux administrations

Le programme d’appui à la réforme structurelle (et son successeur, le programme d’appui à la réforme) apportera un soutien techniques aux États membres pour les aider à concevoir et mettre en œuvre des réformes permettant de réaliser la double transition climatique et numérique. Le manque de capacité administrative, d’information et d’expertise en matière de durabilité dans les administrations publiques nationales, régionales et locales des États membres est l’un des obstacles majeurs freinant les investissements en faveur des infrastructures durables et de la protection de l’environnement. Le programme aidera à déceler les potentiels d’investissement dans les énergies propres, ou les actions visant à accélérer les investissements en faveur de l’efficacité énergétique dans les bâtiments. Par l’intermédiaire du programme d’appui à la réforme, la Commission soutient aussi les États membres dans l’établissement de plans d’action sur l’économie circulaire, la budgétisation verte ou la finance et l’investissement durables.

5.3.2.Soutien aux promoteurs de projets

Au niveau des promoteurs de projets, la plateforme de conseil InvestEU et les initiatives de conseil élaborées dans le cadre du programme InvestEU, dotées d’un budget total de 500 millions d’EUR selon la proposition de la Commission, apporteront une aide pour la définition de projets d'investissement, leur préparation, leur développement, leur structuration, les procédures de passation de marchés y afférentes et leur mise en œuvre. Si nécessaire, ce dispositif peut aussi renforcer la capacité des promoteurs et des intermédiaires financiers à mettre en œuvre des opérations de financement et d’investissement. Cette offre globale de services prendra en considération les aspects liés à la durabilité.

La plateforme de conseil InvestEU fournira un point d’entrée unique aux promoteurs de projets tant publics que privés, ainsi qu’aux intermédiaires financiers pour mettre en œuvre des opérations de financement et d’investissement en faveur d’entités qui ont du mal à obtenir des financements. Jaspers, l’initiative conjointe de la Commission et de la Banque européenne d’investissement pour le développement de projets à soutenir par les Fonds structurels, sera intégrée à cette plateforme. Parmi les initiatives pertinentes en matière de conseil qui pourraient être couvertes par la plateforme de conseil InvestEU, on peut citer la poursuite du mécanisme européen d’assistance à l’échelle locale dans le domaine de l’énergie (ELENA), destiné à soutenir des projets locaux en matière d’énergie durable et de transport propre. Il pourrait s’agir aussi d’autres initiatives de conseil au titre du volet «Infrastructures durables» qui soutiennent la conception d’opérations de financement et d’investissement liées à des projets durables dans des domaines d’infrastructure clés (transports, énergie, environnement, haut débit et connectivité numérique). Une attention spéciale sera accordée à l’assistance technique à des projets qui favorisent le capital naturel et les solutions fondées sur la nature.

Les investisseurs publics bénéficieront d’un soutien sur mesure pour la mise en œuvre pratique de leurs projets. Un nouvel instrument d’«évaluation pour des marchés publics durables» – sur la base du mécanisme ex ante volontaire qui existe déjà pour les grands projets d’infrastructure – les aidera à faire usage de toutes les possibilités de rendre leurs marchés publics verts et de garantir la durabilité du projet et le respect des normes environnementales les plus élevées tout au long de la chaîne d’approvisionnement.

5.3.3.Assurer la cohérence et la visibilité

La Commission fera en sorte, s’il y a lieu, que le soutien aux administrations publiques et le soutien à chaque projet soient apportés de manière coordonnée. Les activités de renforcement de capacités et de planification stratégique de la Commission affichent des résultats positifs qui pourraient être reproduits, à plus grande échelle, aux fins du pacte vert. L’étroite coopération existant entre les services de la Commission et le soutien de la plateforme européenne de conseil en investissement à destination des banques nationales de développement et des projets d’investissement sera élargie dans le cadre des programmes successeurs concernés du prochain cadre financier pluriannuel afin de renforcer la création de réserves de projets d’investissement durable et la mise en œuvre des projets.

Le portail InvestEU sera basé sur le portail européen de projets d’investissement actuel et restera un portail en ligne convivial et gratuit, offrant aux entreprises et promoteurs de projets de l’UE à la recherche de financement la visibilité vis-à-vis des investisseurs du monde entier et les possibilités de mise en réseau dont ils ont besoin. Le portail servira aussi à présenter une réserve de projets d’investissement basés dans l’UE aux partenaires chargés de la mise en œuvre d’InvestEU, qui examineront les projets relevant de leur zone géographique et de leur champ d’action.

La Commission:

-fournira, par le programme d’appui à la réforme, un soutien technique aux États membres pour les aider à concevoir et mettre en œuvre des réformes favorisant la croissance, y compris des stratégies d’investissement durable;

-offrira, par la plateforme de conseil InvestEU, des services de conseil sur mesure aux promoteurs privés et publics de projets durables;

-proposera un instrument d’évaluation pour des marchés publics durables pour assurer le verdissement des projets d’infrastructure publics.

6.Un mécanisme pour une transition juste

La transition vers une économie durable et neutre pour le climat nécessitera des investissements substantiels dans toute l’Europe et une action décisive à tous les échelons. Toutes les régions auront besoin de financements pour la transition verte, mais la transformation constituera un défi important pour certains territoires. En effet, la neutralité climatique exigera une restructuration fondamentale de leurs économies, des changements structurels de modèles économiques et de nouvelles compétences. Il est nécessaire de le reconnaître et d’apporter des solutions telles que la transition ne laisse personne de côté.

L’exploration et l’extraction de combustibles fossiles connaîtront un déclin notable, et les activités à forte intensité de gaz à effet de serre subiront une transformation profonde. Les régions et territoires qui dépendent fortement de ces activités devront restructurer leurs industries, veiller à ce que les nouvelles activités économiques préservent le tissu social et économique et offrir aux travailleurs concernés les formations nécessaires pour trouver un nouvel emploi. Sans les mesures d’accompagnement nécessaires, la transition, n’étant ni juste, ni durable sur le plan social, ne se produira pas.

Pour répondre aux défis spécifiques rencontrés par certaines régions, la Commission propose un mécanisme pour une transition juste, qui apportera un soutien ciblé afin d’engendrer les investissements nécessaires dans ces territoires. Le mécanisme pour une transition juste reposera sur trois piliers:

·un Fonds pour une transition juste,

·un dispositif spécifique pour une transition juste, qui relèvera d’InvestEU, et

·une nouvelle facilité de prêt au secteur public, pour la mobilisation d’investissements supplémentaires par la Banque européenne d’investissement.



Graphique 4. Financer le mécanisme pour une transition juste

Chaque pilier comportera différents instruments de subvention et de financement, de sorte qu’il existe une gamme complète de possibilités de soutien répondant aux besoins de mobilisation d’investissements en faveur des régions les plus touchées. Pour assurer la cohérence entre les trois piliers, le Fonds pour une transition juste servira principalement à octroyer des subventions, le dispositif spécifique InvestEU pour une transition juste attirera des investissements privés, et la nouvelle facilité de prêt au secteur public pour une transition juste mobilisera des financements publics. Ces mesures seront accompagnées de services de conseil et d’assistance technique spéciaux pour les régions et les projets concernés. Le mécanisme pour une transition juste comprendra un cadre de gouvernance solide, articulé autour de plans territoriaux de transition juste.

Considérées ensemble, les composantes du mécanisme pour une transition juste pourraient aider à mobiliser des investissements dans les régions les plus exposées aux défis de la transition à hauteur d’environ 100 milliards d’EUR sur la période 2021-2027. Tous les investissements financés seront compatibles avec les objectifs du pacte vert.

En outre, la Commission proposera une révision des règlements sur le Fonds de recherche du charbon et de l’acier afin de permettre l’utilisation d’une partie des actifs de la Communauté européenne du charbon et de l’acier en liquidation. Cela aidera à maintenir un programme de recherche annuel d’au moins 40 millions d’EUR et de financer de grands projets de recherche et innovation propres dans le domaine de la fabrication de l’acier. Les activités de recherche dans le secteur du charbon se concentreront sur les régions en transition, conformément aux principes du mécanisme pour une transition juste.

En outre, le Fonds pour la modernisation du système d’échange de quotas d’émission de l’UE complètera le mécanisme pour une transition juste. 14 milliards d’EUR supplémentaires (sous réserve des prix définitifs du carbone) sur la période 2021-2030 seront consacrés à des investissements à faible intensité de carbone dans ses dix États membres bénéficiaires (Roumanie, Bulgarie, Hongrie, Lettonie, Lituanie, Estonie, République tchèque, Pologne, Slovaquie, Croatie).

6.1.Premier pilier: le Fonds pour une transition juste

Le Fonds pour une transition juste (FTJ) sera doté de sa propre enveloppe de 7,5 milliards d’EUR sur le budget de l’UE, en sus de ce qu’avait proposé la Commission en mai 2018 pour le prochain cadre financier pluriannuel 10 . Le Fonds visera à alléger les coûts économiques et sociaux de la transition vers la neutralité climatique.

La Commission adopte aujourd’hui une proposition de règlement établissant le Fonds pour une transition juste, ainsi qu’une proposition de modifications ciblées du règlement portant dispositions communes. Chaque euro du Fonds pour une transition juste ne pourra être débloqué que si les États membres y ajoutent un minimum de 1,50 euro et un maximum de 3 euros du Fonds européen de développement régional ou du Fonds social européen plus. Ces dépenses sur le budget de l’UE seront complétées par des cofinancements nationaux, conformément aux règles de la politique de cohésion. Les fonds publics mobilisés par l’intermédiaire du Fonds pour une transition juste pourraient ainsi être portés à un total de 30 à 50 milliards d’EUR.

Le Fonds pour une transition juste bénéficiera aux territoires dans lesquels les secteurs de la production de charbon, de lignite, de tourbe et de schiste bitumineux sont de gros pourvoyeurs d’emplois, ainsi qu’aux territoires où sont implantées des industries à forte intensité de gaz à effet de serre, qui seront soit arrêtées, soit fortement touchées par la transition. Le niveau de l’aide apportée tiendra compte de l’ampleur des défis que ces régions doivent relever, en ce qui concerne aussi bien la nécessité d’une diversification économique et d’une transition vers des activités porteuses de croissance à émissions de carbone faibles ou nulles que celle d’une reconversion des travailleurs visant à les doter des compétences requises pour trouver un nouvel emploi.

Le Fonds pour une transition juste aidera à la conversion de ces régions, laquelle est essentielle pour parvenir à la neutralité carbone d’ici à 2050. Son soutien se conjuguera aux dépenses consacrées à l’action pour le climat, afin de combler les différences entre les États membres et en leur sein. Le Fonds pour une transition juste sera donc mis en œuvre dans le cadre de la politique de cohésion, qui est la principale politique de l’UE visant à réduire les disparités régionales et à aider les régions d’Europe à affronter les changements structurels. Il sera mis en œuvre en gestion partagée, en étroite coopération avec les autorités nationales, régionales et locales et les parties prenantes. Ainsi, l’engagement de tous les acteurs sera assuré, et les instruments et structures d’un cadre de gestion efficiente seront mis en place.

Le Fonds pour une transition juste soutiendra tous les États membres, mais il se concentrera sur ceux d’entre eux pour qui les défis de la transition seront les plus lourds. Les ressources seront réparties entre les États membres à l’aune des besoins de décarbonation des régions à plus forte intensité de gaz à effet de serre (selon les émissions industrielles correspondantes) et du défi social que représentent, d’une part, les possibles destructions d’emplois dans l’industrie et les secteurs de la production de charbon, de lignite, de tourbe et de schiste bitumineux et, d’autre part, la nécessité corrélative de reconvertir les travailleurs concernés. Afin de garantir une transition équitable et acceptable pour tous, la répartition des ressources tiendra compte de la capacité des États membres de relever le défi, en fonction de leur niveau de développement économique.

Les États membres devront définir les territoires éligibles dans le cadre de plans territoriaux de transition spécifiques, en dialogue avec la Commission et en cohérence avec leur plan national en matière d’énergie et de climat. Ce dialogue reposera sur une évaluation, d’une part, des territoires les plus touchés par la transition vers la neutralité climatique et, d’autre part, des défis économiques et en matière d’emploi auxquels ces territoires vont être confrontés, tels qu’ils ont été répertoriés dans le cadre du Semestre européen. Les États membres tiendront compte de cette évaluation lors de l’élaboration de leurs plans territoriaux de transition, où ils devront exposer le processus de transition et les types de mesures envisagés. Ces plans seront annexés aux programmes de la politique de cohésion comportant un soutien du Fonds pour une transition juste et ils seront adoptés par la Commission en même temps que ces programmes.

Afin de garantir l’utilisation la plus efficace possible des ressources, le Fonds pour une transition juste pourra soutenir les investissements dans la transformation d’installations existantes, y compris dans les secteurs relevant du système d’échange de quotas d’émission de l’UE, mais uniquement à la condition que ces investissements conduisent à une réduction substantielle des émissions et apportent en outre une contribution positive à long terme à la situation de l’emploi dans les territoires concernés, conformément aux plans territoriaux de transition.

Les plans territoriaux de transition juste, au cœur du mécanisme pour une transition juste

Les plans territoriaux de transition juste seront au cœur du mécanisme pour une transition juste, et ils serviront de référence pour chacun de ses piliers. Ces plans exposeront les défis environnementaux, économiques et sociaux engendrés par le démantèlement progressif d’activités liées aux combustibles fossiles, ou par la décarbonation de processus ou produits à forte intensité de gaz à effet de serre. Ils présenteront le processus de transition envisagé jusqu’en 2030 dans ses grandes lignes, et notamment les besoins à couvrir en matière de développement, de reconversion des travailleurs et de réhabilitation environnementale, ainsi que l’approche prévue pour y répondre de façon intégrée. Ils présenteront aussi le calendrier, les types de mesures et les mécanismes de gouvernance envisagés. Cela signifie que les mesures que soutiendra le Fonds pour une transition juste pourraient différer d’un État membre à l’autre et d’un territoire à l’autre, en fonction de la définition des priorités et des défis à relever. Le processus de programmation se fondera sur l’évaluation établie dans le cadre du Semestre européen. Les États membres élaboreront leurs plans territoriaux de transition en tenant compte de cette évaluation, et ceux-ci feront partie intégrante des programmes relevant du Fonds pour une transition juste. L’approbation de ces plans par la Commission ouvrira la voie à des financements dédiés, non seulement du Fonds pour une transition juste (premier pilier du mécanisme pour une transition juste), mais aussi du dispositif InvestEU pour une transition juste (deuxième pilier) et de la facilité de prêt au secteur public de la BEI (troisième pilier).

6.2.Deuxième pilier: un dispositif spécial, au titre du Fonds InvestEU, pour les régions en transition juste

Le mécanisme pour une transition juste comprendra également un dispositif spécial, le dispositif pour une transition juste, qui s’inscrira dans le cadre d’InvestEU et visera à générer des investissements supplémentaires au profit des régions les plus touchées. Grâce à ce dispositif, les activités économiques qui doivent être progressivement éliminées en raison de leur incidence sur le climat et l’environnement pourront être remplacées par de nouvelles activités économiques. Par rapport au Fonds pour une transition juste, l’éventail de projets dans lequel ce dispositif permettra d’investir sera plus vaste, InvestEU ayant des critères plus larges d’éligibilité des investissements. InvestEU soutiendra le financement, entre autres, de projets d’infrastructures d’énergie et de transport, y compris d’infrastructures gazières et de chauffage urbain, mais aussi des projets de décarbonation, de diversification économique des régions, d’infrastructures sociales et de formation des personnes. Il permettra aussi aux secteurs concernés de s’adapter plus rapidement à des modes de production respectueux du climat. Les financements accordés au titre d’InvestEU pourront soutenir des investissements économiquement viables dans ces domaines, en complémentarité et en synergie avec le Fonds pour une transition juste.

En l’état actuel, le Fonds InvestEU devrait générer 650 milliards d’EUR d’investissements publics et privés supplémentaires au soutien des objectifs visés par les politiques de l’UE dans le prochain cadre financier pluriannuel, par une garantie de l’UE de 38 milliards d’EUR. Cette garantie repose sur une combinaison associant une enveloppe budgétaire de l’UE de 15,2 milliards d’EUR (ce qui correspond à un taux de provisionnement de 40 %) et des engagements conditionnels pour le solde.

Le Fonds InvestEU peut représenter un outil efficace pour générer d’importants investissements supplémentaires dans les projets en faveur d’une transition juste dans les régions concernées. À cet effet, une partie des financements disponibles au titre du Fonds InvestEU se concentrera sur les objectifs de la transition juste. Sur la période 2021-2027, jusqu’à 45 milliards d’EUR d’investissements pourraient ainsi être générés au soutien de la transition dans les régions concernées, l’objectif étant de suivre la clé de répartition par État membre au titre du Fonds pour une transition juste. Cependant, l’utilisation qui sera faite en définitive des financements InvestEU dépendra de la demande et de la réserve de projets. La capacité d’absorption des régions concernées jouera un rôle essentiel dans la réalisation des objectifs. La cible globale de 45 milliards d’EUR correspond à un provisionnement d’environ 1,8 milliard d’EUR sur l’enveloppe allouée au programme InvestEU dans le budget de l’UE. En outre, les États membres pourront consacrer une partie de la part du Fonds pour une transition juste qui leur est allouée à l’octroi de prêts garantis ou à des prises de participation au soutien d’investissements, via leur compartiment État membre. Il sera également nécessaire de mettre en place un service de conseil sur mesure pour le développement de la réserve de projets. Pour réaliser l’ambition ci-dessus, il est essentiel de veiller, pendant les négociations en cours sur le cadre financier pluriannuel, à conférer à la garantie InvestEU un niveau adéquat.

Les projets mis en œuvre dans les régions disposant d’un plan de transition approuvé au titre du règlement établissant le Fonds pour une transition juste, ou les projets qui profitent à ces régions (même s’ils n’y sont pas menés à proprement parler), pourront bénéficier du dispositif, mais uniquement à la condition que les financements intervenant en dehors des territoires en transition juste soient essentiels à la transition de ces territoires. Cela est pertinent, en particulier, pour les projets d’infrastructures de transport ou d’énergie qui améliorent la connectivité des territoires en transition juste. Les investissements poursuivant les objectifs de la transition juste pourront être pris en compte dans la réalisation des objectifs climatiques: ils peuvent contribuer à atteindre la cible du programme InvestEU de consacrer 30 % des ressources à la réalisation d’objectifs climatiques.

Ce ciblage des objectifs de la transition juste par la garantie InvestEU permettra de débloquer des investissements éligibles pour les quatre volets d’action et se manifestera également dans les produits financiers sous-jacents. Des mesures spécifiques d’incitation, prenant la forme de commissions ou d’une couverture des risques plus avantageuse pour les projets à mettre en œuvre dans les régions en transition, pourraient être proposées aux partenaires chargés de la mise en œuvre. La cible de la transition juste sera incluse dans les lignes directrices relatives aux investissements InvestEU et les accords de garantie conclus avec les partenaires chargés de la mise en œuvre. En outre, le ou les appels à propositions adressés aux partenaires chargés de la mise en œuvre au titre du Fonds InvestEU accorderont la priorité à ceux d’entre eux qui proposent des produits financiers contribuant à la réalisation des objectifs de la transition juste. Pour rendre les projets «investissables», une assistance technique spécifique sera fournie via la plateforme de conseil InvestEU, qui recevra une enveloppe supplémentaire.

6.3.Troisième pilier: une facilité de prêt au secteur public, avec le groupe Banque européenne d’investissement

Une facilité de prêt au secteur public, mise en œuvre avec la Banque européenne d’investissement (BEI), soutiendra un renforcement des investissements publics dans les régions en transition vers la neutralité climatique. Des prêts concessionnels seront, à ce titre, offerts au secteur public. Ces prêts procureront aux entités du secteur public des ressources leur permettant de prendre différentes mesures pour faciliter la transition vers la neutralité climatique. Les investissements soutenus comprendront les infrastructures d’énergie et de transport, les réseaux de chauffage urbain, les mesures d’efficacité énergétique, y compris la rénovation des bâtiments, et les infrastructures sociales. Ils pourront aussi couvrir d’autres secteurs. Le soutien de l’UE pourrait prendre la forme, notamment, d’une bonification d’intérêts ou d’une subvention à l’investissement, financée par le budget de l’UE, associée à des prêts octroyés par la BEI à des autorités municipales ou régionales ou à d’autres autorités publiques.

La couverture géographique sera la même que celle du dispositif InvestEU pour une transition juste (deuxième pilier du mécanisme pour une transition juste), à savoir les projets menés dans les régions disposant d’un plan de transition approuvé, mais aussi les projets profitant à ces régions, mais uniquement à la condition que les financements intervenant en dehors des territoires en transition soient essentiels à la transition de ces territoires. La finalité de la facilité de prêt au secteur public pour une transition juste est d’offrir des conditions de financement préférentielles, afin de soutenir les investissements publics au profit des régions les plus touchées. Elle comprendra aussi un service de conseil, pour aider à la constitution de la réserve de projets.

Le soutien apporté par la facilité de prêt au secteur public sera complémentaire des produits offerts par le dispositif dédié InvestEU pour une transition juste. Il concernera en effet des projets qui ne génèrent pas suffisamment de recettes sur le marché et qui ne seraient donc pas financés sans élément de subvention

Grâce à la contribution de 1,5 milliard d’EUR du budget de l’UE et aux 10 milliards d’EUR de prêts de la BEI à ses propres risques, la facilité de prêt au secteur public pourrait mobiliser de 25 à 30 milliards d’EUR d’investissements publics sur la période 2021-2027. Elle tiendra compte de la clé de répartition par État membre au titre du Fonds pour une transition juste, afin de soutenir la transition dans les régions concernées. La Commission présentera, en mars 2020, une proposition législative visant à créer cette nouvelle facilité de prêt au secteur public. Elle pourrait étudier ultérieurement la possibilité de coopérer avec un plus grand nombre de partenaires chargés de la mise en œuvre, au fur et à mesure que les besoins du secteur public évolueront.

6.4.Assistance technique et service de conseil

La transition juste ne dépendra pas uniquement des fonds disponibles pour soutenir les investissements, mais aussi de la capacité d’orienter ces fonds vers les bons projets. Une assistance sera apportée aux États membres et aux régions par une plateforme pour une transition juste, qui sera gérée par la Commission. Cette plateforme s’appuiera sur les travaux de l’actuelle plateforme pour les régions charbonnières en transition, qui soutient déjà les régions productrices de combustibles fossiles de toute l’UE sur la voie d’une transition juste, et elle les développera. Elle apportera un soutien technique et sous forme de conseils pour l’élaboration des plans territoriaux de transition, via un réseau d’experts facilitant le partage d’informations entre les États membres, les régions, les agences et les parties prenantes. Dès le premier trimestre de 2020, la Commission lancera un appel à demandes dans le cadre du programme d’appui à la réforme structurelle, pour aider les États membres qui en ont besoin à établir leurs plans territoriaux de transition. Le mécanisme pour une transition juste offrira également un service de conseil et une assistance technique, selon les mêmes moyens que ceux décrits à la section 5.1.2.

La Commission:

- engagera le dialogue avec les colégislateurs, en vue de travailler ensemble à l’adoption rapide du règlement établissant le Fonds pour une transition juste, ainsi que des modifications correspondantes dans le règlement portant dispositions communes;

- travaillera avec le groupe BEI et d’autres partenaires chargés de la mise en œuvre en vue de mettre en œuvre le dispositif InvestUE pour une transition juste, une fois celui-ci adopté;

- présentera, en mars 2020, une proposition législative pour la mise en place, avec la BEI, d’une facilité de prêt au secteur public;

- aidera les États membres et les régions à élaborer leurs plans territoriaux de transition;

- fournira une assistance technique et un service de conseil, pour générer une solide réserve de projets au bénéfice des régions en transition juste.

7.Conclusions et prochaines étapes

Le plan d’investissement pour une Europe durable permettra de mobiliser les investissements nécessaires pour atteindre les objectifs ambitieux du pacte vert pour l’Europe. En prenant l’engagement qu’au moins 1000 milliards d’EUR d’investissements durables seront mobilisés, via le budget de l’UE, au cours des dix prochaines années, la Commission s’est fixé un objectif très concret, à l’aune duquel les progrès seront évalués. Le plan prend aussi l’engagement d’utiliser tous les leviers d’action pertinents pour doter les investisseurs privés et publics d’un cadre permettant de maximiser les investissements durables. Il prend aussi l’engagement renouvelé d’apporter aux pouvoirs publics et aux promoteurs de projets le soutien nécessaire en matière de planification et d’exécution des projets. Étant donné l’ampleur des besoins financiers, la Commission est déterminée à continuer de rechercher les moyens de lever des fonds supplémentaires pour atteindre les objectifs du pacte vert pour l’Europe.

Le mécanisme pour une transition juste prévu dans le plan contribuera à faire en sorte que la transition vers un avenir durable ne laisse personne sur le bord de la route. Les régions pour lesquelles les défis de la transition sont les plus grands seront aidées, tant financièrement qu’administrativement, dans cette entreprise.

Le succès du plan d’investissement pour une Europe durable dépendra de l’engagement de toutes les parties prenantes dans sa mise en œuvre. Il sera essentiel que les États membres et le Parlement européen préservent le haut degré d’ambition de la proposition de la Commission durant les négociations sur le prochain cadre financier. La communauté des investisseurs et notamment les investisseurs institutionnels, les banques, les banques de développement et les fonds de capital-investissement sont invités à tirer pleinement parti du cadre qui est en train de se mettre en place pour les investissements durables. Pour leur part, les autorités des États membres devront prendre une part active dans la définition, la promotion et, si nécessaire, le financement de ces investissements.

Chaque année, la Commission organisera un sommet de l’investissement durable, qui réunira toutes les parties prenantes. Ce sommet sera l’occasion de faire le point des avancées réalisées selon les différents axes de travail prévus dans le plan d’investissement pour une Europe durable et d’identifier de nouveaux champs d’action. La Commission continuera de rechercher, avec les partenaires concernés, de nouvelles sources de financement pour répondre aux besoins à long terme de la transition, et des moyens innovants de les mobiliser. En outre, conformément aux conclusions du Conseil européen de décembre 2019, elle élaborera une méthode d’évaluation, et fournira des évaluations régulières, des incidences environnementales et socio-économiques de la transition vers la neutralité climatique, ainsi que des investissements liés qui pourraient être nécessaires pour corriger ces incidences.

(1)      Les objectifs clés pour 2030 sont: une réduction d’au moins 40 % des émissions de gaz à effet de serre (par rapport aux niveaux de 1990), une part d’au moins 32 % pour les énergies renouvelables et une amélioration d’au moins 32,5 % de l’efficacité énergétique.
(2)      Par rapport à un scénario de référence – Communication «Ensemble pour atteindre les objectifs de l’union de l’énergie et de l’action pour le climat – Jeter les bases pour réussir la transition vers une énergie propre» [COM(2019) 285].
(3)      La Commission estime qu’au-delà des mesures relatives au climat, le déficit d’investissements durables environnementaux au sens large est compris entre 100 milliards et 150 milliards d’EUR par an, y compris la protection de l’environnement et la gestion des ressources. En ce qui concerne les investissements sociaux, le groupe de travail de haut niveau sur l’investissement dans les infrastructures sociales a estimé qu’il serait nécessaire d’investir 142 milliards d’EUR supplémentaires par an en faveur des logements abordables, de la santé et des soins de longue durée, de l’éducation et de la formation tout au long de la vie. Ces investissements ne correspondent pas exclusivement au coût du soutien à la transition verte.
(4)      Par rapport à un scénario de référence — COM (2019) 285.
(5)      En ce qui concerne les transports, les données incluent les dépenses d’investissement totales dans les actifs mobiles, mais pas les investissements dans les infrastructures et dans les systèmes facilitant le partage de véhicules, etc. Ces chiffres ne tiennent pas compte des hypothèses actualisées de coûts technologiques utilisées pour la stratégie à long terme.
(6)      Ces estimations doivent être considérées comme des estimations basses. D’importants besoins d’investissement dans l’agriculture, l’adaptation au changement climatique ou la préservation et la restauration des écosystèmes et de la biodiversité n’ont pas été pris en compte en raison du manque actuel de données.
(7)

     Les montants estimés correspondent à une simple extrapolation sur 10 ans de la proposition de la Commission pour le cadre financier pluriannuel (CFP) 2021-2027, sans préjudice des futurs CFP après 2027, en partant de la supposition que l’ambition climatique sera au moins maintenue à son niveau actuel.

(8)      Fonds européen agricole pour le développement rural, Fonds européen agricole de garantie, Fonds européen de développement régional, Fonds de cohésion, Horizon Europe et LIFE.
(9)      COM(2018) 97 final.
(10)    COM(2019) 456 final.