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8.4.2019 |
FR |
Journal officiel de l'Union européenne |
C 130/11 |
Résumé de la décision de la Commission
du 7 décembre 2016
relative à une procédure d’application de l’article 101 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne et de l’article 53 de l’accord sur l’Espace économique européen
(Affaire AT.39914 — Produits dérivés de taux d’intérêt en euro)
[notifiée sous le numéro C(2016) 8530]
(Les textes en langues anglaise et française sont les seuls faisant foi.)
(2019/C 130/05)
Le 7 décembre 2016, la Commission a rendu une décision relative à une procédure d’application de l’article 101 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (le «Traité») et de l’article 53 de l’accord sur l’Espace économique européen (l’«accord EEE»). En application des dispositions de l’article 30 du règlement (CE) no 1/2003 du Conseil (1), la Commission publie par la présente les noms des parties et le contenu principal de la décision, y compris les sanctions infligées, en prenant en considération l’intérêt légitime des entreprises à ce que leurs secrets d’affaires ne soient pas divulgués. Une version non confidentielle de la décision est disponible sur le site de la direction Générale de la Concurrence à l’adresse suivante:
http://ec.europa.eu/competition/antitrust/cases/
1. INTRODUCTION
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(1) |
Les destinataires de la décision ont participé à une infraction unique et continue de l’article 101 du traité et de l’article 53 de l’accord EEE. Cette infraction consistait à restreindre et/ou fausser la concurrence dans le secteur des produits dérivés de taux d’intérêt en euro (Euro Interest Rate Derivatives) («EIRD»), liés au taux interbancaire offert en euro (Euro Interbank Offered Rate) («Euribor») et/ou au taux moyen pondéré de référence de la zone euro (Euro Over-Night Index Average) («EONIA»). |
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(2) |
L’Euribor est un taux d’intérêt de référence reflétant le coût des prêts interbancaires en euro. Il est largement utilisé sur les marchés monétaires internationaux. L’Euribor est défini comme le taux auquel les dépôts interbancaires à terme en euro sont offerts, par une banque de premier rang à une autre banque de premier rang, dans la zone euro (2). Il est basé sur les cotations individuelles par les banques du panel des taux auxquels chacune estime qu’une banque de premier rang hypothétique prêterait des fonds à une autre banque de premier rang (3). En effet, selon le code de conduite Euribor de la Fédération bancaire européenne («FBE»), les banques du panel soumettent les cotations quotidiennes du taux auquel chacune estime qu’une banque de premier rang cote à une autre banque de premier rang pour les dépôts interbancaires à terme au sein de la zone euro (4). |
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(3) |
L’Euribor est calculé (5) sur la base des soumissions par les banques du panel (6), envoyées chaque jour ouvré entre 10 h 45 et 11 heures, heure de Bruxelles, à Thomson Reuters, qui agit en tant qu’agent calculateur auprès de la FBE. Chaque banque du panel emploie des responsables des soumissions, lesquels sont chargés de proposer les soumissions de cotations de ladite banque. Ces responsables travaillent généralement au sein du département trésorerie de la banque. L’Euribor est déterminé et publié à 11 heures, heure de Bruxelles (10 heures, TUC), chaque jour ouvré. Chaque banque du panel fournit une contribution pour chacun des quinze taux d’intérêt Euribor différents (un pour chaque maturité allant d’une semaine à un an, également appelée «échéance»). |
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(4) |
L’Euribor ne propose pas d’échéance quotidienne. Ce rôle est assuré par l’EONIA, qui est un taux d’intérêt effectif au jour le jour, calculé avec l’aide de la Banque centrale européenne comme étant la moyenne pondérée de toutes les transactions de prêts non garantis au jour le jour, réalisées sur le marché interbancaire. Les banques qui contribuent au calcul de l’EONIA sont les mêmes que celles du panel contribuant au calcul de l’Euribor. |
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(5) |
Les différentes échéances de l’Euribor, telles qu’un, trois, six ou douze mois, sont une composante des prix des EIRD basés sur l’Euribor. Pour les EIRD, la maturité de l’Euribor applicable qui arrive à échéance ou dont le taux d’intérêt est refixé à une date spécifique peut influer soit sur les flux de trésoreries qu’une banque reçoit de la part de la contrepartie au EIRD, soit sur les flux de trésoreries qu’elle doit payer à la contrepartie à cette date. Selon les positions/expositions de trading prises en son nom par ses traders, une banque peut être intéressée par la fixation d’un taux Euribor élevé (lorsqu’elle reçoit un montant calculé sur la base de l’Euribor), bas (lorsqu’elle doit payer un montant calculé sur la base de l’Euribor) ou «neutre» (lorsqu’elle n’a pas de position significative dans l’un ou l’autre sens). |
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(6) |
Les taux d’Euribor sont reflétés notamment dans la fixation des prix des EIRD, qui sont des produits financiers négociés au niveau mondial utilisés par des entreprises, des établissements financiers, des fonds spéculatifs, et d’autres entreprises pour gérer leur exposition aux risques de taux d’intérêt (couverture, tant pour les emprunteurs que pour les investisseurs) ou à des fins spéculatives (7). Les EIRD les plus courants sont: i) les accords de taux futurs (forward rate agreements), ii) les swaps sur taux d’intérêt (interest rate swaps), iii) les options sur les taux d’intérêt (interest rate options) et iv) les contrats à terme sur taux d’intérêt (interest rate futures). Les EIRD peuvent soit être échangés de gré à gré, soit, dans les cas des contrats à terme (futures), être négociés en bourse. |
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(7) |
Sont destinataires de la présente décision («les destinataires»):
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(8) |
Crédit Agricole, HSBC et JPMorgan Chase étaient membres du panel Euribor tout au long de la période de leur participation respective à l’infraction. |
2. DESCRIPTION DE L’AFFAIRE
2.1. Procédure
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(9) |
La présente affaire a été ouverte à la suite d’une demande de clémence de la part de […], le 14 juin 2011. Suite aux inspections effectuées par la Commission européenne (la «Commission») dans les locaux de plusieurs banques en octobre 2011, trois autres banques […] ont coopéré avec l’enquête de la Commission. Elles ont volontairement fourni d’autres preuves à la Commission, et ont demandé une réduction de l’amende dans le cadre du programme de clémence de la Commission (8). Les trois banques destinataires de la présente décision n’ont pas coopéré activement avec l’enquête de la Commission dans le cadre du programme de clémence. |
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(10) |
La Commission a ouvert une procédure en mars 2013, conformément à l’article 11, paragraphe 6, du règlement (CE) no 1/2003, à l’encontre de sept banques […], et les a invitées à transiger. |
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(11) |
[…] ont chacune soumis une proposition de transaction, sur base desquelles la Commission a adopté le 4 décembre 2013 la décision de la Commission C(2013) 8512, rectifiée le 6 avril 2016 […], imposant des amendes à ces quatre banques pour un montant total de 824 583 000 EUR. |
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(12) |
Crédit Agricole, HSBC et JPMorgan Chase n’ont pas soumis de proposition de transaction. La Commission a poursuivi son enquête à leur encontre, et a mené une inspection annoncée dans les locaux de JPMorgan Chase en février 2014. Le 19 mai 2014, la Commission a émis une communication des griefs à l’encontre de Crédit Agricole, de HSBC et de JPMorgan Chase. Ces banques y ont répondu, et une audition a été organisée en juin 2015. |
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(13) |
Le comité consultatif en matière d’ententes et de positions dominantes a été consulté. Il a rendu un avis favorable les 28 novembre et 5 décembre 2016, le conseiller-auditeur a rendu son rapport final le 5 décembre 2016, et la Commission a adopté la décision le 7 décembre 2016. |
2.2. Description du comportement
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(14) |
L’infraction dans la présente affaire est une entente sur les EIRD, liés à l’Euribor et/ou à l’EONIA. Les EIRD les plus courants sont les accords de taux futurs (forward rate agreements), les swaps sur taux d’intérêt (interest rate swaps), les options sur les taux d’intérêt (interest rate options) et les contrats à terme sur taux d’intérêt (interest rate futures). Les EIRD sont des produits financiers dérivés, utilisés par de nombreuses entreprises pour gérer la fluctuation des taux d’intérêt et autres risques financiers (couverture) et à des fins spéculatives. |
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(15) |
La décision de transaction du 4 décembre 2013 a déjà établi que […] ont, durant des périodes individuelles différentes entre le 29 septembre 2005 et le 30 mai 2008, participé à des pratiques collusoires en vue de fausser le cours normal des composantes des prix des EIRD. |
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(16) |
La présente décision établit que Crédit Agricole, HSBC et JP Morgan Chase, durant des périodes individuelles différentes au cours de cette période, ont également participé à des pratiques collusoires en vue de fausser le cours normal des composantes des prix des EIRD. La participation de Crédit Agricole s’étend du 16 octobre 2006 au 19 mars 2007, celle de HSBC du 12 février 2007 au 27 mars 2007, et celle de JP Morgan Chase du 27 septembre 2006 au 19 mars 2007. |
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(17) |
Les parties, à travers la conduite de certains de leurs employés, ont participé aux arrangements dans le secteur des EIRD, qui consistaient en les pratiques suivantes entre différentes parties:
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(18) |
En outre, à certaines occasions, certains traders employés par différentes parties ont discuté du résultat du fixing des taux Euribor, y compris les soumissions de banques spécifiques, après le fixing at la publication des taux Euribor du jour. |
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(19) |
Chaque partie a participé à au moins plusieurs de ces formes de comportement. Il en a été ainsi tout au long de la période de participation respective des parties à l’infraction, bien que chaque partie n’ait pas pris part à toutes les situations de collusion et que l’intensité des contacts collusoires ait varié pendant la durée de l’infraction. |
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(20) |
L’activité collusoire a eu lieu via des contacts bilatéraux, principalement à travers des discussions en ligne, des courriels et des messages en ligne ou par téléphone. |
2.3. Participation individuelle dans le comportement
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(21) |
Entre le 16 octobre 2006 et le 19 mars 2007, Crédit Agricole s’est engagé dans des pratiques bilatérales relevant au moins de certaines des pratiques énoncées dans le point 17. |
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(22) |
Entre le 12 février 2007 et le 27 mars 2007, HSBC s’est engagée dans des pratiques bilatérales relevant au moins de certaines des pratiques énoncées dans le point 17. |
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(23) |
Entre le 27 septembre 2006 et le 19 mars 2007, JP Morgan Chase s’est engagée dans des pratiques bilatérales relevant au moins de certaines des pratiques énoncées dans le point 17. |
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(24) |
La décision établit que Crédit Agricole, HSBC et JP Morgan Chase ont participé à une infraction unique et continue de l’article 101 du traité et de l’article 53 de l’accord EEE. Les circonstances factuelles de l’espèce, tels que le contenu des contacts, les méthodes utilisées et l’objectif des différents accords et/ou pratiques concertées en cause, permet d’établir que les contacts collusoires bilatéraux entre les parties étaient liés et complémentaires par nature et ont contribué à un objectif unique. |
2.4. Étendue géographique
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(25) |
L’étendue géographique de l’entente couvre au moins l’EEE. |
2.5. Mesures correctives
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(26) |
La décision applique la méthodologie définie dans les lignes directrices de 2006 pour le calcul des amendes (9). La décision inflige des amendes aux entités du Crédit Agricole, HSBC et JP Morgan Chase énumérées au point 7 ci-dessus. |
2.5.1. Montant de base de l’amende
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(27) |
Le montant de base de l’amende qui est imposée aux entreprises concernées est calculé en fonction de la valeur des ventes, le fait que l’infraction est, par sa nature même, parmi les restrictions de concurrence les plus graves, la durée et l’étendue géographique du cartel, le fait que les activités collusoires étaient liées à des taux de référence financiers, l’importance capitale que les taux concernés revêtent pour le secteur des services financiers au sein du marché intérieur et des États membres, et un montant supplémentaire visant à dissuader les entreprises de participer à de telles pratiques illégales. |
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(28) |
La Commission prend généralement en compte la valeur des ventes réalisées par les entreprises durant la dernière année complète de leur participation à l’infraction (10). Toutefois, au vu des caractéristiques de chaque affaire, la Commission peut s’écarter de cette approche et considérer qu’il est plus approprié de prendre une autre période de référence. |
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(29) |
Concernant l’infraction en l’espèce, la Commission détermine, pour toutes les parties, la valeur annuelle des ventes sur la base des flux de trésorerie que chaque banque a obtenus de son portefeuille respectif d’EIRD conclus avec des contreparties établies dans l’EEE durant les mois correspondant à leur participation respective à l’infraction, réduits par un facteur uniforme afin de tenir compte des particularités du marché des EIRD, et notamment de la compensation inhérente à ce marché, c’est-à-dire que les banques vendent et achètent des produits dérivés de sorte que les paiements entrants sont compensés par les paiements sortants, et de l’échelle des variations des prix. |
2.5.2. Ajustement du montant de base: circonstances aggravantes ou atténuantes
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(30) |
Il n’y a pas de circonstances aggravantes. Toutefois, le rôle mineur de Crédit Agricole, HSBC et JPMorgan Chase dans l’infraction est reconnu comme étant une circonstance atténuante dans le niveau de leurs amendes. |
2.5.3. Application de la limite de 10 % du chiffre d’affaires
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(31) |
L’article 23, paragraphe 2, du règlement (CE) no 1/2003 dispose que l’amende infligée à chaque entreprise pour chaque infraction ne doit pas excéder 10 % de son chiffre d’affaires total réalisé au cours de l’exercice social précédant la date de la décision de la Commission. |
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(32) |
En l’espèce, aucune des amendes n’excède 10 % du chiffre d’affaires total d’une des entreprises réalisé au cours de l’exercice social précédant la date de cette décision. |
3. CONCLUSION
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(33) |
Les amendes infligées, conformément à l’article 23, paragraphe 2, du règlement (CE) no 1/2003 sont les suivantes:
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(1) Règlement (CE) no 1/2003 du Conseil du 16 décembre 2002 relatif à la mise en œuvre des règles de concurrence prévues aux articles 81 et 82 du traité (JO L 1 du 4.1.2003, p. 1).
(2) http://www.euribor-ebf.eu/euribor-org/about-euribor.html.
(3) Les détails de la composition du panel et les règles procédurales de soumissions sont décrits dans le code de conduite Euribor de la Fédération bancaire européenne (http://www.euribor-ebf.eu/assets/files/Euribor_code_conduct.pdf).
(4) Code de conduite Euribor de la Fédération bancaire européenne, p. 17.
(5) Les 15 % de soumissions des banques du panel les plus hautes et les plus basses sont éliminées. La moyenne des taux restants est établie et arrondie à la troisième décimale.
(6) Au moment de l’infraction, il y avait 44 banques dans le panel; il y en a actuellement 25.
(7) Selon la Banque des règlements internationaux, la valeur marchande brute des EIRD en cours (http://www.bis.org/statistics/dt21a21b.pdf) était de 4 747 milliards USD en décembre 2015, et constitue la plus grande part des produits dérivés de taux d’intérêt financiers négociés de gré à gré.
(8) Communication de la Commission sur l’immunité d’amendes et la réduction de leur montant dans les affaires portant sur des ententes (JO C 298 du 8.12.2006, p. 17).
(9) Lignes directrices pour le calcul des amendes conformément à l’article 23, paragraphe 2, point a), du règlement (CE) no 1/2003 (JO C 210 du 1.9.2006, p. 2).
(10) Point 13 des Lignes directrices pour le calcul des amendes.