Bruxelles, le 21.3.2018

COM(2018) 151 final

Recommandation de

DÉCISION DU CONSEIL

autorisant la Commission à ouvrir des négociations au nom de l'Union européenne en vue de la modification de l’accord de partenariat dans le secteur de la pêche et de la conclusion d’un protocole avec le Royaume du Maroc


EXPOSÉ DES MOTIFS

1.CONTEXTE DE LA PROPOSITION

Justification et objectifs de la proposition

La Commission propose de négocier une modification de l’accord de partenariat dans le secteur de la pêche (APP) entre la Communauté européenne et le Royaume du Maroc et de conclure un protocole mettant en œuvre cet accord, lesquels doivent répondre aux besoins de la flotte de l'Union et être conformes au règlement (UE) nº 1380/2013 relatif à la politique commune de la pêche ainsi qu'aux conclusions du Conseil du 19 mars 2012 sur la communication de la Commission relative à la dimension extérieure de la politique commune de la pêche.

Cette proposition est présentée à la suite de l’arrêt rendu le 27 février 2018 par la Cour de justice de l’Union européenne dans l’affaire C-266/16 (Western Sahara Campaign UK) par lequel la Cour juge que les eaux adjacentes au territoire du Sahara occidental ne font pas partie de la zone de pêche visée dans l’accord de pêche.

Cohérence avec les dispositions existantes dans le domaine d'action

L’APP existant entre l’Union européenne et le Royaume du Maroc est entré en vigueur le 28 février 2007 1 . Cet accord a été mis en œuvre par deux protocoles successifs autorisant les navires de l’Union ciblant les espèces pélagiques et démersales à accéder à la zone de pêche du Maroc jusqu’au 14 décembre 2011, date à laquelle le deuxième protocole a été dénoncé, le Parlement européen n’ayant pas approuvé sa conclusion. Le Parlement européen mettait en doute la durabilité de l’instrument proposé, son rapport coût-avantages et sa conformité au droit international. Un troisième protocole, tenant compte des préoccupations du Parlement européen, a été conclu en 2014 2 . Il arrivera à expiration le 14 juillet 2018.

D’une manière générale, l’APP conclu avec le Maroc autorise les navires de 11 États membres à exercer leurs activités dans six catégories de pêche différentes couvrant les espèces de petits pélagiques, les espèces démersales et les espèces de grands migrateurs. La zone de pêche du Maroc correspond à la limite septentrionale de l’aire de répartition du stock de petits pélagiques «C» 3 , qui comprend les eaux de la Mauritanie, du Sénégal et de la Guinée-Bissau, faisant toutes partie du réseau d’accords de partenariat bilatéraux dans le domaine de la pêche durable (APPD).

Les APPD contribuent à promouvoir les objectifs de la PCP au niveau international et garantissent que les activités de pêche de l’Union en dehors des eaux de celle-ci reposent sur les mêmes principes et normes que ceux applicables en vertu du droit de l’Union. En outre, les APPD renforcent la position de l’Union européenne dans les organisations internationales et régionales de pêche, en particulier au sein de la Commission internationale pour la conservation des thonidés de l'Atlantique (CICTA). Enfin, les APPD reposent sur les meilleurs avis scientifiques disponibles et contribuent à l’amélioration du respect des mesures internationales, y compris en luttant contre la pêche illicite, non déclarée et non réglementée (INN).

Une attention particulière sera accordée à l’exécution et à la mise en œuvre de la compensation financière accordée au Maroc afin de soutenir la gestion durable de la pêche, notamment à la lumière des recommandations du rapport spécial n° 11/2015 de la Cour des Comptes européenne relatif aux APPD.

Cohérence avec les autres politiques de l’Union

La négociation d’un APPD et d’un protocole avec le Royaume du Maroc est en conformité avec l’action extérieure de l’Union à l'égard des pays voisins et avec les objectifs de l’Union en matière de respect des principes démocratiques et des droits de l’homme.

À la suite de l’arrêt susmentionné rendu par la Cour de justice de l’Union européenne, il est nécessaire de préciser le champ d’application géographique de l’accord.

La position de l’Union est qu’il est possible d’étendre les accords bilatéraux avec le Maroc au Sahara occidental sous certaines conditions. Toutefois, il est entendu que tout accord ne sera que provisoire tant que la résolution du conflit dans le cadre des Nations unies et conformément aux résolutions pertinentes du Conseil de sécurité des Nations unies restera pendante.

Tout au long du processus, les négociations seront menées en consultation avec tous les services intéressés de la Commission et du SEAE, et avec le soutien de la délégation compétente de l’UE.

2.BASE JURIDIQUE, SUBSIDIARITÉ ET PROPORTIONNALITÉ

Base juridique

La base juridique de la décision est fournie par la cinquième partie du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) relative à l’action extérieure de l’Union, titre V relatif aux accords internationaux, article 218, qui indique la procédure à suivre pour les négociations et la conclusion d’accords entre l’Union et des pays tiers.

Subsidiarité (en cas de compétence non exclusive)

Sans objet; compétence exclusive.

Proportionnalité

La décision est proportionnelle au but recherché.

Choix de l'instrument

Cet instrument est prévu par l’article 218, paragraphes 3 et 4, du TFUE.

3.RÉSULTATS DES ÉVALUATIONS EX POST, DES CONSULTATIONS DES PARTIES INTÉRESSÉES ET DES ANALYSES D'IMPACT

Évaluations ex post/bilans de qualité de la législation existante

En 2017, la Commission a procédé à une évaluation ex post/ex ante de l’opportunité de renouveler le protocole de pêche avec le Royaume du Maroc. Les conclusions de cette évaluation figurent dans un document de travail distinct des services de la Commission 4 .

En conclusion, il ressort du rapport d’évaluation que les flottes de l’Union sont vivement intéressées par la possibilité de poursuivre leurs activités de pêche au Maroc. Le renouvellement du protocole contribuera également à renforcer le suivi, le contrôle et la surveillance, ainsi qu’à améliorer la gouvernance des pêcheries dans la région. L’évaluation démontre qu’un renouvellement du protocole présenterait également des avantages pour le Maroc compte tenu de l’importance de la contribution financière versée au titre du protocole dans le cadre de la stratégie marocaine «Halieutis» de développement du secteur de la pêche. Le Maroc a manifesté son intérêt pour l’ouverture de négociations avec l’Union européenne sur le renouvellement du protocole.

Consultation des parties intéressées

Les parties intéressées, y compris des représentants du secteur d'activité concerné et d'organisations de la société civile, ont été consultées à l'occasion de l’évaluation, en particulier dans le cadre du conseil consultatif pour la pêche lointaine.

Obtention et utilisation d'expertise

Sans objet

Analyse d'impact

Sans objet

Réglementation affûtée et simplification

Sans objet

Droits fondamentaux

Les directives de négociation proposées en annexe de la décision recommandent d’autoriser l’ouverture de négociations incluant une clause relative aux droits de l’homme et aux principes démocratiques dont le non-respect peut conduire à la suspension de l’accord et du protocole.

4.INCIDENCE BUDGÉTAIRE

Les incidences budgétaires liées au nouveau protocole comprennent le versement d’une contribution financière au Royaume du Maroc. Les dotations budgétaires correspondantes en termes de crédits d’engagement et de paiement doivent être inscrites chaque année dans la ligne budgétaire pour les accords de partenariat dans le domaine de la pêche durable (11 03 01) et être compatibles avec la programmation financière au titre du cadre financier pluriannuel pour la période 2014-2020. Les montants annuels des engagements et des paiements sont déterminés dans le cadre de la procédure budgétaire annuelle, y compris la ligne de réserve pour les protocoles qui ne sont pas entrés en vigueur au début de l’année 5 .

Les négociations devraient être finalisées avant l’expiration du protocole actuel, c’est-à-dire d’ici au 14 juillet 2018.

5.AUTRES ÉLÉMENTS

Plans de mise en œuvre et modalités de suivi, d'évaluation et d'information

Les négociations devraient s’ouvrir au cours du premier trimestre de 2018.

Explication détaillée des différentes dispositions de la proposition

La Commission recommande:

- que le Conseil l’autorise à ouvrir et à mener des négociations en vue de la modification de l’accord de partenariat dans le secteur de la pêche avec le Royaume du Maroc et de la conclusion d’un protocole;

- qu'elle soit désignée comme négociateur de l'Union à cet effet;

- qu'elle mène les négociations en concertation avec le comité spécial, comme le prévoit le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne;

- que le Conseil approuve les directives de négociation annexées à la présente recommandation.

Recommandation de

DÉCISION DU CONSEIL

autorisant la Commission à ouvrir des négociations au nom de l'Union européenne en vue de la modification de l’accord de partenariat dans le secteur de la pêche et de la conclusion d’un protocole avec le Royaume du Maroc

LE CONSEIL DE L'UNION EUROPÉENNE,

vu le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, et notamment son article 218, paragraphes 3 et 4,

vu la recommandation de la Commission,

considérant qu’il convient d’ouvrir des négociations avec le Royaume du Maroc en vue de modifier l’accord de partenariat dans le secteur de la pêche entre la Communauté européenne et le Royaume du Maroc 6 et de conclure un protocole mettant en œuvre cet accord,

considérant qu’il est important de ne pas interrompre le partenariat dans le secteur de la pêche, qui s’est développé au fil des années entre l’Union européenne et le Royaume du Maroc, tout en veillant à ce qu’il existe des garanties suffisantes pour la protection des droits de l’homme et le développement durable des territoires concernés,

considérant que l’Union soutient les efforts déployés par les Nations unies pour trouver une solution politique mutuellement acceptable qui permettrait l’autodétermination de la population du Sahara occidental en conformité avec les principes et les objectifs de la charte des Nations unies,

A ADOPTÉ LA PRÉSENTE DÉCISION:

Article premier

1.La Commission est autorisée à ouvrir des négociations avec le Royaume du Maroc en vue de modifier l’accord de partenariat dans le secteur de la pêche entre la Communauté européenne et le Royaume du Maroc et de conclure un protocole mettant en œuvre cet accord.

2.La Commission préside l'équipe de négociation dont fait également partie la haute représentante de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité.

Article 2

Ces négociations sont menées en concertation avec le groupe «Politique extérieure de la pêche» du Conseil, sur la base des directives de négociation du Conseil dont le texte figure dans l’addendum à la présente décision.

Article 3

La Commission est destinataire de la présente décision.

Fait à Bruxelles, le

   Par le Conseil

   Le président

(1)    JO L 78 du 17.3.2007, p. 31.
(2)    JO L 349 du 21.12.2013, p. 1.
(3)    Selon la classification scientifique en vigueur.
(4)    Évaluation rétrospective et prospective du Protocole à l'accord de partenariat dans le domaine de la pêche durable entre l'Union européenne et le Royaume du Maroc. Rapport final, septembre 2017 (F&S, Poseidon et Megapesca).
(5)    Chapitre 40 (ligne de réserve 40 02 41) conformément à l’accord interinstitutionnel sur le CFP (2013/C 373/01).
(6)    JO L 141 du 29.5.2006, p. 4.

Bruxelles, le21.3.2018

COM(2018) 151 final

ANNEXE

de la

Recommandation

de décision du Conseil autorisant la Commission à ouvrir des négociations au nom de l'Union européenne en vue de la modification de l’accord de partenariat dans le secteur de la pêche et de la conclusion d’un protocole avec le Royaume du Maroc


ANNEXE

Directives de négociation

L’objectif des négociations est de modifier l’accord de partenariat dans le secteur de la pêche conclu entre la Communauté européenne et le Royaume du Maroc et de conclure un protocole à cet accord conformément au règlement (UE) nº 1380/2013 relatif à la politique commune de la pêche et aux conclusions du Conseil du 19 mars 2012 sur la communication de la Commission du 13 juillet 2011 relative à la dimension extérieure de la politique commune de la pêche.

Afin de promouvoir une pêche durable et responsable et de contribuer au strict respect du droit international, tout en garantissant des avantages mutuels à l’Union et au Maroc au moyen de ce nouveau protocole, les négociations de la Commission visent:

·à donner l’accès aux eaux relevant de l’accord et du protocole en vigueur et aux eaux adjacentes au territoire non autonome du Sahara occidental et à fournir les autorisations nécessaires aux navires de la flotte de l’Union ciblant les espèces de petits pélagiques, les espèces démersales et les espèces de grands migrateurs pour pêcher dans lesdites eaux, permettant ainsi notamment de développer le réseau d'accords de partenariat dans le domaine de la pêche durable disponible pour les opérateurs de l'Union;

·à soutenir les efforts déployés par le secrétaire général des Nations unies pour trouver une solution permettant l’autodétermination de la population du Sahara occidental en conformité avec les principes et les objectifs de la charte des Nations unies;

·à prendre en compte les meilleurs avis scientifiques disponibles et les plans de gestion pertinents adoptés par les organisations régionales de gestion des pêches (ORGP) compétentes afin d’assurer la durabilité environnementale des activités de pêche et de promouvoir la gouvernance des océans à l’échelle internationale. Les activités de pêche devraient être orientées exclusivement vers les ressources disponibles, en prenant en considération les capacités de pêche de la flotte locale tout en accordant une attention particulière au caractère chevauchant ou hautement migrateur des stocks concernés;

·à obtenir une part appropriée des ressources halieutiques excédentaires, qui corresponde parfaitement aux intérêts de la flotte de l'Union, lorsque ces ressources présentent aussi un intérêt pour d'autres flottes étrangères, ainsi que l’application des mêmes conditions techniques à toutes les flottes étrangères;

·à faire en sorte que l’accès aux pêcheries soit en rapport avec l’activité de la flotte de l’Union dans la région, en tenant compte des plus récentes et meilleures évaluations scientifiques disponibles;

·à instaurer un dialogue visant à renforcer la politique sectorielle dans la perspective d’encourager la mise en œuvre d’une politique de la pêche responsable, en liaison avec les objectifs de développement du pays, notamment en ce qui concerne la gouvernance de la pêche, la lutte contre la pêche illicite, non déclarée et non réglementée, le contrôle, le suivi et la surveillance des activités de pêche et la mise à disposition d’avis scientifiques, et à soutenir la création d’emplois contribuant, entre autres, à la lutte contre les causes profondes de l’émigration;

·à prévoir une clause relative aux conséquences des violations des droits de l'homme et des principes démocratiques;

·à prévoir une clause pour l’accès préférentiel de la flotte de l’Union aux excédents disponibles et pour l’application des mêmes conditions techniques à toutes les flottes étrangères;

·à prévoir des mécanismes appropriés pour faire en sorte que la Commission soit suffisamment informée et associée en ce qui concerne la répartition géographique et sociale des avantages socio-économiques découlant de l’accord et du protocole, afin de lui permettre d’obtenir l’assurance qu’ils bénéficient tous les deux aux populations concernées;

·à prévoir une clause de réexamen permettant de prendre en compte une solution politique mutuellement acceptable qui permettrait l’autodétermination de la population du Sahara occidental en conformité avec les principes et les objectifs de la charte des Nations unies.

En outre:

·la Commission évalue, au moment de la signature, les incidences éventuelles de l’accord de partenariat dans le domaine de la pêche durable et de son protocole sur le développement durable, en particulier en ce qui concerne les avantages pour les populations concernées et l’exploitation des ressources naturelles des territoires concernés;

·la Commission devrait veiller à ce que, au moment de sa proposition relative à la signature et à la conclusion, les populations concernées par l’accord aient été associées de manière adéquate;

·afin d’éviter toute interruption des activités de pêche, le nouveau protocole devrait comporter une clause d’application provisoire.

Il importe en particulier que le protocole détermine:

·les possibilités de pêche, par catégorie, à octroyer aux navires de l'Union européenne;

·la compensation financière et ses modalités de paiement; et

·les mécanismes pour une mise en œuvre effective de l’appui sectoriel et son suivi régulier.