9.3.2020   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 76/23


P8_TA(2018)0215

Finance durable

Résolution du Parlement européen du 29 mai 2018 sur la finance durable (2018/2007(INI))

(2020/C 76/04)

Le Parlement européen,

vu l’engagement du G20 à l’égard du développement durable sous la présidence allemande du 1er décembre 2016 au 30 novembre 2017, eu égard notamment à la déclaration: «nous continuerons d’utiliser l’ensemble des instruments stratégiques (monétaires, fiscaux et structurels) individuellement et collectivement pour atteindre notre objectif d’une croissance solide, durable, équilibrée et inclusive, tout en favorisant la résilience économique et financière»,

vu les objectifs de développement durable définis par les Nations unies, et en particulier l’engagement à prendre des mesures pour lutter contre le changement climatique et son impact et pour garantir une consommation et une production durables,

vu l’engagement de la Commission concernant l’investissement durable à cet égard dans le cadre du plan d’action de l’union des marchés des capitaux, et plus particulièrement les conclusions du groupe d’experts de haut niveau sur la finance durable,

vu le rapport intérimaire du groupe d’experts de haut niveau de juillet 2017 intitulé Financing a sustainable european economy («Financement d’une économie européenne durable»), qui souligne la tension entre la recherche de profits à court terme et la nécessité d’un investissement à long terme en vue de réaliser les objectifs environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG), et vu notamment le point V sur le système financier et les risques encourus face à la «tragédie à l’horizon» à la page 16,

vu la communication de la Commission du 8 juin 2017 sur l’examen à mi-parcours du plan d’action concernant l’union des marchés des capitaux» (COM(2017)0292).

vu le rapport final du groupe d’experts de haut niveau de janvier 2018 intitulé «Financing a sustainable european economy» (Financement d’une économie européenne durable),

vu la page 14 du rapport intérimaire du groupe d’experts de haut niveau qui précise que les investisseurs européens présentent une exposition combinée aux secteurs à forte intensité de carbone d’environ 45 % et que moins de 1 % des investisseurs institutionnels mondiaux sont des infrastructures vertes,

vu le fait que les cadres prudentiels, en particulier la directive 2009/138/CE du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2009 sur l’accès aux activités de l’assurance et de la réassurance et leur exercice (solvabilité II) (1), et les règles comptables applicables aux investisseurs dissuadent une approche à long terme, et que les règles prudentielles exigent un niveau de fonds propres proportionnel au niveau de risque sur un an en ne tenant compte que du risque financier pour établir les exigences en matière de fonds propres,

vu l’article 173 de la loi française 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte,

vu le discours prononcé le 22 septembre 2016 par Mark Carney, gouverneur de la Banque d’Angleterre et président du Conseil de stabilité financière, et le rapport 2015 de la Carbon tracker initiative, notamment la référence au fait que la capitalisation boursière combinée des quatre principaux producteurs de charbon des États-Unis a chuté de plus de 99 % depuis la fin 2010,

vu la plateforme du financement climatique Luxembourg-BEI créée en septembre 2016,

vu la page 9 du document de réflexion d’E3G de mai 2016 intitulé Clean energy lift off – Capitalising Europe’s energy union («L’envolée des énergies propres – Tirer parti de l’union européenne de l’énergie»), notamment la référence au fait qu’entre 2008 et 2013, les 20 premières sociétés de distribution d’énergie en Europe ont vu s’envoler plus de la moitié de leur valeur de marché qui s’élevait à mille milliards d’euros,

vu les rapports 2015 et 2016 de la Carbon tracker initiative qui indiquent qu’entre 1 100 milliards et 2 000 milliards supplémentaires de dollars de dépenses en capital dans les énergies fossiles pourraient être perdus, dont 500 milliards rien que dans le secteur énergétique chinois,

vu la recommandation du Conseil de l’OCDE sur des approches communes pour les crédits à l’exportation bénéficiant d’un soutien public et le devoir de diligence environnementale et sociale («les approches communes»), qui reconnaît «la responsabilité qu’ont les Adhérents de mettre en œuvre les engagements pris par les Parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques» et «qu’il incombe aux Adhérents de prendre en compte les impacts positifs et négatifs des projets sur le plan environnemental et social, en particulier lorsqu’ils concernent des secteurs sensibles ou lorsqu’ils sont situés dans le périmètre ou à proximité de zones sensibles, et les risques environnementaux et sociaux associés aux opérations existantes, dans leur décision d’offrir des crédits à l’exportation bénéficiant d’un soutien public»,

vu les principes directeurs de l’OCDE de 2017 pour une bonne gouvernance d’entreprise à l’intention des investisseurs institutionnels, en particulier la page 13 qui précise que «les investisseurs, y compris ceux qui ne détiennent qu’une part minoritaire, peuvent être directement liés aux effets négatifs causés ou favorisés par les entreprises détenues du fait qu’ils détiennent ou gèrent des parts d’une entreprise donnant lieu ou contribuant à certaines répercussions sociales ou environnementales»,

vu l’approche adoptée par la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD) pour la transition vers une économie verte, qui vise à atténuer les effets du changement climatique et d’autres formes de détérioration de l’environnement et/ou à renforcer la résistance à ces effets, et notamment les documents de la BERD établissant un lien entre l’impact de la transition et l’environnement, y compris, le cas échéant, des changements dans la méthodologie d’évaluation du projet,

vu le document de l’OCDE de 2017 intitulé Responsible business conduct for institutional investors: key considerations for due diligence under the OECD guidelines for multinational enterprises («Code de bonne gouvernance d’entreprise à l’intention des investisseurs institutionnels: considérations essentielles de diligence au titre des principes directeurs de l’OCDE à l’intention des entreprises multinationales»),

vu le rapport de 2018 du groupe de travail de haut niveau sur les investissements dans l’infrastructure sociale intitulé «Boosting investment in social infrastructure in Europe» (Renforcer l’investissement dans les infrastructures sociales en Europe),

vu la loi française du 27 mars 2017 relative au devoir de vigilance des sociétés mères et des entreprises donneuses d’ordre, et en particulier son article premier et son article 2,

vu la directive 2014/95/UE du Parlement européen et du Conseil du 22 octobre 2014 modifiant la directive 2013/34/UE en ce qui concerne la publication d’informations non financières et d’informations relatives à la diversité par certaines grandes sociétés et certains groupes (2) (directive sur la publication d’informations non financières), et notamment les articles 19 et 19 bis de la directive 2013/34/UE et les considérants 3, 6, 7 et 8 de la directive 2014/95/UE,

vu la directive (UE) 2017/828 du Parlement européen et du Conseil du 17 mai 2017 modifiant la directive 2007/36/CE en vue de promouvoir l’engagement à long terme des actionnaires (3) (directive sur les droits des actionnaires),

vu la directive (UE) 2016/2341 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2016 concernant les activités et la surveillance des institutions de retraite professionnelle (4) (la directive IRP),

vu la directive 2013/34/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 relative aux états financiers annuels, aux états financiers consolidés et aux rapports y afférents de certaines formes d’entreprises, modifiant la directive 2006/43/CE du Parlement européen et du Conseil et abrogeant les directives 78/660/CEE et 83/349/CEE du Conseil (5),

vu le règlement (UE) 2017/2402 du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2017 créant un cadre général pour la titrisation ainsi qu’un cadre spécifique pour les titrisations simples, transparentes et standardisées, et modifiant les directives 2009/65/CE, 2009/138/CE et 2011/61/UE et les règlements (CE) no 1060/2009 et (UE) no 648/2012 (6) (règlement sur les titrisations STS),

vu l’article 8, paragraphe 4, du règlement (UE) no 1286/2014 du Parlement européen et du Conseil du 26 novembre 2014 sur les documents d’informations clés relatifs aux produits d’investissement packagés de détail et fondés sur l’assurance (7), qui prévoit que lorsqu’un produit d’investissement packagé de détail et fondé sur l’assurance présente un intérêt environnemental et social avéré, l’initiateur de ce produit doit démontrer à l’investisseur de détail et aux parties intéressées au sens large comment cet intérêt est servi tout au long du processus d’investissement,

vu la suggestion de la banque Triodos concernant des «modèles de mandats» qui prévoient l’exigence de pleinement intégrer des facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance dans les décisions d’investissements, l’engagement actif et le vote sur ces questions, le choix de repères durables, une notification moins fréquente mais plus pertinente par les gestionnaires d’actifs et une structure de tarification et de rémunération à long terme,

vu la réinterprétation du devoir de loyauté par le gouvernement britannique qui atténue la relation au rendement maximal et ouvre la prise en considération de questions d’ordre éthique et environnemental,

vu le rôle pionnier de la Banque européenne d’investissement (BEI), qui a émis la première obligation verte au monde et est devenue le plus gros émetteur mondial d’obligations vertes en janvier 2018,

vu les principes concernant la finance à impact positif définis par l’Initiative Finance du Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE FI),

vu l’avis du Comité européen des régions du 10 octobre 2017 intitulé «Financement de la lutte contre le changement climatique: un outil essentiel pour la mise en œuvre de l’accord de Paris», qui met en évidence le rôle des collectivités locales et régionales dans l’amélioration des projets d’investissement en vue d’atteindre les objectifs de l’accord de Paris,

vu l’enquête du PNUE sur la définition d’un système financier durable,

vu le rapport 2017 de la Climate bonds initiative qui révèle comment les obligations sont utilisées aux fins de la transition vers une économie mondiale à faible intensité de carbone,

vu le rapport d’investigation 2016 du PNUE qui indique que plusieurs autorités de réglementation financière nationales conduisent ou préparent déjà des évaluations de durabilité et que de telles initiatives devraient rapidement se généraliser au niveau européen, et vu la référence au fait que ces analyses devraient s’appuyer sur des scénarios climatiques normalisés, notamment sur le scénario qui prévoit une hausse de la température mondiale bien inférieure à 2 °C,

vu la recommandation du rapport final du groupe d’experts de haut niveau de janvier 2018 selon laquelle la Commission devrait appliquer un critère de durabilité à l’ensemble des propositions législatives en matière de finance,

vu l’examen à mi-parcours du plan d’action en faveur de l’union des marchés de capitaux (COM(2017)0292) et vu la déclaration de la Commission qui précise clairement qu’elle «promeut l’alignement des investissements privés sur les objectifs environnementaux en matière de climat, d’utilisation efficace des ressources et autres, aussi bien à travers des mesures politiques que des investissements publics» (COM(2016)0601),

vu le rapport de la Bundesbank d’avril 2017 et le quatrième bulletin trimestriel de la Banque d’Angleterre pour 2014 qui précisent que la plus grande partie de la masse monétaire en circulation est créée par le secteur banquier privé lorsque les banques accordent des prêts,

vu l’article 2, paragraphe 1, point c), de l’accord de Paris sur la nécessité de rendre «les flux financiers compatibles avec un profil d’évolution vers un développement à faible émission de gaz à effet de serre et résilient aux changements climatiques»,

vu le rapport du Bureau des Nations unies pour la réduction des risques de catastrophes (UNISDR) et du Centre de recherche sur l’épidémiologie des désastres (CRED) intitulé «The human cost of weather related disasters» (Le coût humain des catastrophes liées au climat), selon lequel 90 % des grandes catastrophes naturelles enregistrées entre 1995 et 2015 étaient dues au climat et aux conditions météorologiques et, dans le monde entier, le préjudice économique causé par les catastrophes représente 300 milliards de dollars par an (8),

vu le cadre de Sendai pour la réduction des risques de catastrophe (2015-2030) et sa priorité no 3 intitulée «Investir dans la réduction des risques de catastrophe aux fins de la résilience», y compris le paragraphe 30, qui énonce la nécessité de «favoriser, selon qu’il convient, l’intégration des considérations et des mesures relatives à la réduction des risques de catastrophe dans les instruments financiers et fiscaux»,

vu le rapport du Conseil de stabilité financière de juin 2017 intitulé Recommendations of the task force on climate-related financial disclosure (Recommandations du groupe de travail sur la publication d’informations financières relatives au climat),

vu le travail accompli par le Comité européen du risque systémique sur les risques liés aux actifs délaissés et la nécessité d’effectuer des «tests de résistance au risque carbone» au niveau européen,

vu le rapport spécial no 31/2016 de la Cour des comptes européenne, qui conclut que, malgré l’engagement politique déployé par l’Union au cours de la période budgétaire 2014-2020 en cours pour dépenser un euro sur cinq (20 % des dépenses) à des fins liées au climat, elle n’était pas en bonne voie pour respecter cet engagement car la programmation actuelle n’enregistre que 18 % des dépenses dans ce domaine,

vu le rapport statistique 2016 de la BEI du 27 avril 2017, qui montre que le soutien de la Banque à l’action pour le climat continue de refléter les différentes situations des marchés dans l’Union et n’a pas atteint les 20 % dans 16 États membres en 2016, et que même si l’investissement dans l’action pour le climat en 2016 a été majoritairement réalisé par les économies les plus solides de l’Union, la BEI a financé des projets d’énergies renouvelables dans 11 États membres et d’efficacité énergétique dans 18 États membres en 2016,

vu le rapport du groupe de haut niveau sur l’investissement dans les infrastructures sociales en Europe, qui estime le déficit minimum d’investissement dans les infrastructures sociales de l’Union à 100-150 milliards d’euros par an, avec un déficit total qui devrait s’élever à plus de 1 500 milliards d’euros entre 2018 et 2030,

vu la résolution du Parlement européen du 8 février 2018 sur le rapport annuel sur les activités financières de la Banque européenne d’investissement (9),

vu sa résolution du mardi 6 février 2018 sur le rapport annuel 2016 de la Banque centrale européenne (10),

vu sa résolution du 14 novembre 2017 sur le plan d’action relatif aux services financiers de détail (11),

vu le rapport d’investissement 2017/2018 de la BEI,

vu sa résolution du 2 juillet 2013 sur l’innovation pour une croissance durable: une bioéconomie pour l’Europe (12),

vu le train de mesures de 2015 de la Commission sur l’économie circulaire et la résolution du Parlement européen du 9 juillet 2015 sur l’utilisation efficace des ressources: vers une économie circulaire (13),

vu les principes directeurs des Nations unies relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme et la responsabilité de «protéger, respecter et réparer»,

vu le programme de développement durable à l’horizon 2030 et les objectifs de développement durable des Nations unies,

vu l’article 52 de son règlement intérieur,

vu le rapport de la commission des affaires économiques et monétaires (A8-0164/2018),

A.

considérant que les marchés financiers peuvent et doivent jouer un rôle essentiel pour favoriser la transition vers une économie durable au sein de l’Union qui aille au-delà de la transition climatique et des questions écologiques et aborde également les questions sociales et de gouvernance; qu’il est urgent de s’attaquer aux défaillances du marché en la matière; que les défis environnementaux, économiques et sociaux sont étroitement imbriqués; que, d’après le rapport du groupe d’experts de haut niveau de juillet 2017, le déficit de financement des efforts européens de décarbonation s’élève à près de 180 milliards d’euros, sans tenir compte des autres objectifs de développement durable;

B.

considérant que la transition écologique doit être un vecteur de solidarité et de cohésion; que la finance durable peut être un moyen de relever les défis sociétaux en vue d’une croissance solidaire à long terme et de bien-être des citoyens; que les critères d’investissement dans l’atténuation du changement climatiques semblent extrêmement prometteurs et peuvent constituer un bon point de départ; que la finance durable va au-delà de la lutte contre le changement climatique et les investissements verts et qu’elle devrait également prendre en compte de toute urgence les critères sociaux et de gouvernance;

C.

considérant qu’il est essentiel d’instaurer un système réglementaire prévisible et stable pour les investissements en lien avec le changement climatique afin d’encourager la participation du secteur public au financement de l’action climatique; que l’Union européenne peut définir les normes d’un système financier durable en instaurant un cadre crédible et complet dont les détails devraient être progressivement mis en place par des initiatives législatives spécifiques;

D.

considérant que toutes les parties prenantes doivent faire évoluer leur état d’esprit, ce qui nécessite une législation transversale de la part de la Commission; que les investisseurs institutionnels et de détail manifestent un intérêt croissant pour les investissements dans des produits respectueux des critères ESG;

E.

considérant qu’une transparence accrue des données relatives aux critères ESG concernant les entreprises est nécessaire pour empêcher l’éco-blanchiment;

F.

considérant que l’évaluation des incidences devrait faire partie de la taxonomie des produits financiers durables; que l’on observe une expertise de plus en plus affirmée dans la façon de calculer l’incidence des investissements sur les objectifs ESG;

Mise en place d’un cadre politique approprié pour mobiliser les capitaux nécessaires à la transition durable

1.

souligne qu’une transition durable plus rapide pourrait être l’occasion d’orienter les marchés de capitaux et les intermédiaires financiers vers des investissements à long terme, innovants, sociaux, efficaces et respectueux de l’environnement; prend acte de la tendance actuelle, qui consiste à se détourner du charbon, mais souligne qu’il faut déployer davantage d’efforts pour se débarrasser également des autres énergies fossiles; souligne qu’il est important pour les banques et les marchés des capitaux européens de pouvoir tirer parti de l’innovation dans ce domaine; relève que les avantages et les risques ESG sont souvent mal pris en compte au niveau des prix et que cela entraîne certains acteurs économiques, axés sur les rendements rapides, vers une finance non durable et court-termiste; souligne qu’il est nécessaire d’inscrire la finance durable dans un cadre politique, réglementaire et de surveillance bien conçu, en tenant compte de la diversité des possibilités offertes par les régions de l’Union; observe qu’un tel cadre pourrait contribuer à mobiliser des capitaux à grande échelle en faveur du développement durable et à améliorer l’efficacité des marchés afin d’orienter les flux de capitaux vers les actifs qui contribuent au développement durable; invite la Commission à proposer un cadre législatif ambitieux, reconnaissant les propositions de son plan d’action sur la finance durable;

Le rôle du secteur financier en ce qui concerne la durabilité et les politiques nécessaires pour remédier aux dysfonctionnements du marché

2.

souligne que le secteur financier dans son ensemble et dans sa fonction première d’allouer des capitaux de façon aussi efficace que possible au profit de la société doit, conformément aux objectifs de l’Union, respecter les valeurs d’équité et d’inclusivité et le principe de durabilité, et inclure des indicateurs ESG et évaluer le coût de l’inaction dans les analyses et décisions d’investissement; relève qu’une présentation trompeuse ou inexacte des risques climatiques et environnementaux des produits financiers peut constituer un risque pour la stabilité du marché; Souligne le rôle déterminant des politiques économiques, budgétaires et monétaires dans la promotion de la finance durable par la facilitation de l’allocation de capitaux et la réorientation des investissements vers des technologies et des entreprises plus durables, et vers des activités économiques sans carbone, résilientes aux catastrophes et économes en ressources, capables de limiter le besoin actuel en ressources futures et ainsi d’atteindre les objectifs de durabilité de l’Union et ceux de l’Accord de Paris; constate qu’une tarification appropriée et croissante des émissions de gaz à effet de serre est un élément clé d’une économie environnementale et sociale de marché fonctionnelle et efficace, apte à corriger les défaillances actuelles du marché; observe que les prix pratiqués sur le marché européen du carbone sont fluctuants; invite la Commission et les États membres à supprimer progressivement les subventions directes et indirectes destinées aux combustibles fossiles;

Actifs irrécupérables et risques systémiques liés

3.

souligne que, même si les actifs carbone figurent toujours au bilan des entreprises, leur valeur devra décroître si l’on veut passer à une société à faible intensité de carbone; souligne par conséquent les risques systémiques majeurs que les actifs carbone délaissés et autres actifs préjudiciables à l’environnement représentent pour la stabilité financière si la détermination de leur prix ne tient pas compte de leur profil de risque à long terme; souligne la nécessité d’identifier, d’évaluer et de gérer prudemment les expositions et, après une période de transition, d’établir des rapports proportionnels obligatoires et d’éliminer progressivement ces actifs, ce qui est essentiel pour assurer une transition ordonnée, équilibrée et stable vers des investissements respectueux du climat et économes en ressources; recommande d’élargir le concept d’actifs irrécupérables pour inclure les systèmes et services écologiques fondamentaux;

4.

réclame l’instauration de «tests européens de résistance au risque carbone» destinés aux banques et aux autres intermédiaires financiers afin de pouvoir déterminer quels sont les risques liés à de tels actifs délaissés, conformément à la recommandation formulée en 2016 par le comité européen du risque systémique (CERS); salue les propositions du CERS en matière de politiques prudentielles à l’épreuve du climat, qui comportent par exemple des surcharges de fonds propres spécifiques basées sur l’intensité en carbone des différentes expositions ou l’application de limites d’exposition pour l’ensemble des investissements dans des actifs jugés hautement vulnérables à une transition soudaine vers une économie à faible intensité de carbone; souligne que la révision en cours des règlements établissant les autorités européennes de surveillance (AES) est l’occasion de se pencher sur le rôle de ces AES dans l’examen et l’élaboration de normes d’évaluation des risques liés au carbone et autres risques environnementaux ainsi que dans leur divulgation et leur inclusion dans le processus interne d’évaluation des risques effectué par les banques tout en tenant compte des exigences qui s’imposent aux institutions en matière d’information sur le développement durable; invite la Commission à présenter des propositions législatives à cet égard;

Financer les investissements publics nécessaires à la transition

5.

insiste sur le fait que la réforme du système financier, de sorte qu’il contribue activement à l’accélération de la transition écologique, nécessitera la coopération des secteurs public et privé; souligne à cet égard le rôle déterminant de la politique budgétaire et économique pour fournir les bons signaux et les bonnes incitations; invite les États membres, en coordination avec la Commission, les AES et la BEI, à évaluer leurs besoins nationaux et collectifs en termes d’investissement public et à corriger les manques potentiels de sorte que l’Union soit en bonne voie d’atteindre ses objectifs en matière de lutte contre le changement climatique au cours des cinq prochaines années et de réaliser les objectifs de développement durable des Nations unies d’ici à 2030; souligne le rôle que les banques de développement et les institutions nationales peuvent jouer en la matière; suggère de coordonner ce processus au niveau européen et d’établir un système permettant de suivre les flux financiers réels en faveur d’investissements publics durables dans le cadre d’un observatoire européen de la finance durable; accueille favorablement les outils financiers novateurs intégrant des indicateurs de durabilité qui pourraient faciliter ce processus, tels que l’émission publique d’obligations vertes; salue la clarification apportée par Eurostat concernant le traitement des contrats de performance énergétique dans les comptes nationaux, ce traitement plus précis étant susceptible de libérer des flux considérables de capitaux publics vers un secteur qui représente actuellement les trois quarts du déficit d’investissement de l’Union dans les énergies propres à l’horizon 2030; demande à la Commission d’examiner de manière plus approfondie l’idée d’un traitement qualifié des investissements publics en lien avec les objectifs ESG afin de répartir les coûts de ces projets sur le cycle de vie des investissements publics concernés;

Indicateurs de durabilité et taxonomie à titre d’incitation pour les investissements durables

6.

invite la Commission à lancer un processus multipartite incluant à la fois des climatologues et des opérateurs du secteur financier en vue d’établir d’ici fin 2019 une taxonomie en matière de durabilité cohérente, crédible et neutre du point de vue technologique, fondée sur des indicateurs aptes à révéler toutes les incidences des investissements sur la durabilité et permettant de comparer les projets d’investissement et les entreprises; insiste sur la nécessité de développer ces indicateurs de durabilité dès la première phase du processus d’élaboration d’une taxonomie européenne en matière de durabilité et d’intégrer ces indicateurs à un mécanisme de transmission de rapports intégré; souligne que le développement de la taxonomie de durabilité devrait être suivie des propositions législatives supplémentaires suivantes: un cadre général et obligatoire de diligence raisonnable comprenant un devoir de vigilance à mettre en place progressivement dans les limites d’une période de transition et en tenant compte du principe de proportionnalité, une taxonomie de l’investissement responsable et une proposition concernant les risques et les facteurs ESG dans le cadre prudentiel des institutions financières;

7.

observe qu’il existe déjà des indicateurs de durabilité, mais que le cadre actuel de transmission de rapports volontaire n’est pas suffisamment harmonisé; invite dès lors la Commission à établir sa taxonomie de durabilité sur la base d’une liste harmonisée d’indicateurs fondés notamment sur les travaux de la Global reporting initiative (GRI), du réseau Principles for responsible investment, soutenu par l’ONU, de la Commission européenne, de l’OCDE et du secteur privé, et notamment les indicateurs concernant l’utilisation efficace des ressources d’Eurostat; recommande que ces indicateurs soient inclus dans la taxonomie de façon dynamique et s’accompagnent d’orientations claires aux investisseurs concernant les délais à respecter pour adopter un certain nombre de normes; recommande à la Commission d’envisager également une pondération des indicateurs en fonction de du caractère urgent de ces normes; souligne que cette taxonomie devrait trouver un juste équilibre entre l’engagement et la flexibilité, ce qui signifie que le cadre devrait, dans les limites d’une période de transition, être obligatoire et normalisé, mais qu’il devrait aussi être considéré comme un outil évolutif capable d’intégrer les nouveaux risques et/ou les risques qui n’ont pas encore été répertoriés correctement;

8.

considère que l’inclusion d’indicateurs quantitatifs et de jugements qualitatifs sur les risques climatiques et autres risques environnementaux constitue une étape importante vers une taxonomie de l’investissement responsable conforme aux objectifs de développement durable des Nations unies, au droit international des droits de l’homme, au droit international humanitaire et au droit du travail; souligne que des normes minimales en matière de risques et facteurs ESG doivent comporter des normes sociales minimales pour les investissements notamment en matière de droits, santé et sécurité des travailleurs, et exclure les ressources provenant des régions en guerre ou sans le consentement préalable des communautés affectées, ainsi que des normes minimales en matière de gouvernance englobant les exigences de l’Union en matière de gouvernance d’entreprise et d’élaboration de rapports répondant aux normes européennes en matière d’information financière et les normes européennes en matière de lutte contre le blanchiment d’argent, la corruption et la transparence fiscale;

Label «finance verte»

9.

invite la Commission à engager un processus multipartite afin de mettre en place, d’ici à la fin de 2019, par une initiative législative, un label «finance verte» qui sera accordé aux investissement, aux actions et aux produits de pensions ayant atteint les normes les plus élevées de durabilité, afin de guider les décisions d’investissement de ceux qui privilégient ce critère à tous les autres; considère que ce label devrait inclure des normes minimales pour les risques et facteurs ESG, alignées sur l’accord de Paris et le principe d’innocuité conformément à l’analyse des risques ESG, et comprendre des activités qui ont un «impact positif» démontré, tel que défini par l’Initiative Finance du Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE FI); note qu’une fonction importante de la taxonomie et du label «finance verte» est d’améliorer l’évaluation des risques par les opérateurs des marchés financiers en produisant une notation fondée sur le marché; se félicite des innovations introduite par les acteurs du marché, tels que les agences de notation, dans l’élaboration et l’administration de cette notation fondée sur le marché;

Intégration de critères de finance durable dans tous les textes de loi portant sur le secteur financier

10.

constate la récente intégration des problématiques de durabilité dans le règlement relatif aux produits d’investissement packagés de détail et fondés sur l’assurance, le règlement sur les titrisations STS, la directive sur les droits des actionnaires et la directive sur la publication d’informations non financières (NFRD); souligne la nécessité d’assurer un niveau suffisant de réglementation des risques associés aux actifs verts et durables; se félicite de la reconnaissance des actifs irrécupérables dans la directive sur les institutions de retraite professionnelle (IRP) ainsi que de l’élargissement du principe de la «personne prudente» et de la référence aux principes des Nations unies pour l’investissement responsable; demande l’intégration suffisante et proportionnée d’indicateurs de finance durable dans toutes les textes législatifs nouveaux et révisés relatifs au secteur financier, par une proposition omnibus ou des propositions spécifiques; réclame l’élaboration de lignes directrices communes afin d’harmoniser la définition des facteurs ESG et leur introduction dans tous les textes législatifs nouveaux et révisés;

11.

invite à cet égard la Commission à utiliser les pouvoirs définis dans le règlement (UE) no 1286/2014 pour adopter, dès que possible et avant de concevoir la taxonomie en matière de durabilité, un acte délégué précisant les détails des procédures utilisées pour déterminer si un produit d’investissement packagé de détail et fondé sur l’assurance cible des objectifs environnementaux ou sociaux spécifiques; appelle également à introduire un cadre proportionné de diligence raisonnable obligatoire, fondé sur les lignes directrices pour le comportement responsable des investisseurs institutionnels publiées par l’OCDE en 2017, afin d’obliger les investisseurs à déterminer, prévenir, atténuer et prendre en considération les facteurs et risques ESG après une période de transition; considère que ce cadre paneuropéen devrait se fonder sur la loi française relative au devoir de vigilance des entreprises et des investisseurs, dont les banques; demande également une référence directe aux critères ESG dans les exigences de surveillance et de gouvernance des produits dans tous les textes législatifs, nouveaux et révisés, y compris en cours d’examen; se félicite de la recommandation du groupe d’experts de haut niveau de la Commission européenne sur la finance durable, qui propose d’intégrer le principe impliquant de «penser d’abord à la durabilité» dans l’ensemble du processus européen de prise de décision, de mise en œuvre et d’exécution;

Risques pesant sur la viabilité dans le cadre prudentiel des règles d’adéquation des fonds propres

12.

observe que les risques pesant sur la durabilité peuvent aussi comporter des risques financiers, et que, lorsque ces risques sont importants, ils devraient être pris en compte dans les exigences de fonds propres et les considérations prudentielles des banques; demande par conséquent à la Commission d’adopter une stratégie réglementaire et une feuille de route pour mesurer notamment les risques en manière de durabilité dans le cadre prudentiel et promouvoir l’intégration des risques en matière de durabilité dans le dispositif de Bâle IV afin de garantir des réserves de fonds propres suffisantes; souligne que toutes les règles sur l’adéquation des fonds propres doivent reposer sur les risques avérés et les refléter pleinement; a l’intention de lancer un projet pilote européen lors du prochain exercice afin de commencer l’élaboration de repères méthodologiques à cet effet;

Information des parties

13.

souligne que la publication d’informations est une condition essentielle à la finance durable; salue les travaux de la Task force on climate-related financial disclosure (TCFD) et invite la Commission et le Conseil à adhérer à ses recommandations; demande que les cadres d’information intègrent le coût de l’inaction quant au risque climatique et environnemental et aux autres risques pesant sur la durabilité; suggère à la Commission d’inclure la publication proportionnelle et obligatoire dans le cadre de la révision de la directive comptable, de la directive sur la publication d’informations non financières, de la directive sur les exigences de fonds propres et du règlement sur les exigences de fonds propres à partir de 2020, avec une période transitoire permettant aux entreprises de se préparer à la mise en œuvre; relève que l’article 173 du projet de loi français sur la transition énergétique offre un modèle possible de réglementation contraignante imposant aux investisseurs de rendre publics les risques pour le climat; plaide en faveur de l’examen d’un élargissement du champ d’application de la directive NFRD; souligne à cet égard que les exigences du cadre de transmission de rapports devraient être proportionnés vis-à-vis des risques encourus par l’institution, de sa taille et de sa complexité; recommande d’étendre à tous les produits financiers de détail le type de publication actuellement requis par le règlement sur les produits d’investissement packagés de détail et fondés sur l’assurance, par l’intermédiaire du document d’informations clés;

Devoir fiduciaire

14.

observe que les devoirs de loyauté sont déjà inscrits dans le cadre réglementaire financier de l’Union, mais insiste sur le fait qu’il convient de les clarifier lors de la définition, de la mise en place et de la mise à l’essai d’une taxonomie durable robuste et crédible englobant les principales activités d’investissement, y compris la stratégie d’investissement, la gestion des risques, l’allocation des actifs, la gouvernance et l’intendance pour tous les acteurs de la chaîne d’investissement, y compris les gestionnaires de biens, les consultants indépendants et les intermédiaires; recommande que le devoir de loyauté soit étendu afin d’inclure un processus d’intégration «bidirectionnel» obligatoire, au titre duquel tous les acteurs de la chaîne d’investissement, y compris les gestionnaires d’actifs et les conseillers indépendants en investissement ou d’autres intermédiaires d’investissement, seraient tenus d’intégrer les facteurs ESG importants sur le plan financier dans leurs décisions, compris le coût de l’inaction, et de tenir compte des préférences ESG importantes sur le plan non financier des clients et des bénéficiaires ou des investisseurs finaux, qui devraient être interrogés de façon proactive sur leurs préférences en matière de délais et de durabilité; demande que le coût de l’inaction sur les risques climatiques, environnementaux et autres risques de durabilité soit intégré à la gestion des risques et à l’évaluation en matière de diligence raisonnable des conseils d’administration des entreprises et des pouvoirs publics, ainsi que dans le cadre du devoir de loyauté des investisseurs;

Les contrats-types pour l’identification des risques environnementaux, sociaux et de gouvernance

15.

invite les autorités européennes de surveillance à élaborer des lignes directrices afin que les modèles de contrats conclus entre les détenteurs d’actifs et les gestionnaires d’actifs, les conseillers indépendants en investissement et les autres intermédiaires d’investissement prévoient clairement la transmission de l’intérêt du bénéficiaire et comportent des attentes spécifiques en termes d’identification et d’intégration des risques environnementaux, sociaux et de gouvernance en vue d’éviter, de réduire, d’atténuer et de compenser ces risques; invite les institutions de l’Union à garantir l’affectation de ressources suffisantes aux AES dans le contexte de la révision en cours du règlement relatif à ces autorités; demande d’intégrer à toutes les analyses d’impact concernant la législation et les financements européens à venir l’intégration du coût de l’inaction sur les risques climatique et autres risques pesant sur la durabilité;

Gestion

16.

exige que l’intendance active et responsable fasse partie intégrante des devoirs juridiques des investisseurs et qu’un compte rendu des activités d’intendance soit mis à la disposition des bénéficiaires et du public par, entre autres, la communication publique et obligatoire des participations importantes, des activités d’engagement et du recours à des conseillers en vote ou à des véhicules d’investissement passifs; recommande d’encourager les fonds passifs investissant en fonction d’indices à publier leurs activités d’intendance et la mesure dans laquelle le recours à l’indiciérisation et à la référenciation passives leur permet d’identifier correctement les risques ESG dans les entreprises dans lesquelles ils investissent; estime que les fournisseurs d’indices devraient être invités à fournir des détails concernant l’exposition d’indices de référence largement utilisés vis-à-vis des paramètres concernant le climat et la durabilité;

Nécessité de définir de nouvelles exigences en matière d’établissement de rapports environnementaux dans le cadre de la directive sur la publication d’informations non financières

17.

constate un manque de convergence dans les obligations de rapports ESG dans le cadre de la directive NFRD et souligne le besoin d’harmonisation en vue de renforcer la cohérence et de définir les paramètres environnementaux les plus appropriés, pour information, par des indicateurs de durabilité et d’utilisation efficace des ressources; invite la Commission à créer un groupe multipartite de parties prenantes à l’échelle européenne, composé notamment de représentants du secteur des services financiers, du monde universitaire et de la société civile afin d’évaluer et de proposer une liste d’indicateurs visant à mesurer l’impact sur la durabilité et couvrant les principaux risques en matière de développement durable; est d’avis que cette réforme devrait inclure l’exigence de rapports vérifiés par une tierce partie;

Les obligations vertes

18.

note que les obligations vertes ne représentent qu’une fraction du marché de l’investissement, lequel est insuffisamment encadré, et est, par conséquent, une partie du marché exposé au risque de pratiques commerciales trompeuses et que l’Union n’a actuellement pas de norme uniforme pour les obligations vertes, qui devraient s’appuyer sur une future taxonomie durable de l’Union; relève que ces obligations vertes devraient être vérifiées et supervisées par les pouvoirs publics et inclure des comptes rendus périodiques sur les impacts environnementaux des actifs sous-jacents; souligne que les obligations vertes devraient également inclure l’impact environnemental inversé et soutenir la diminution de l’utilisation de combustibles fossiles; souligne que les obligations vertes devrait exclure certains secteurs, notamment en ce qui concerne les activités ayant un impact négatif significatif sur le climat, et ne pas enfreindre les normes sociales fondamentales et les droits de l’homme; estime que l’élaboration de la norme relative aux obligations vertes européennes devrait se faire dans une transparence complète, par l’intermédiaire d’un groupe travail spécifique de la Commission qui serait soumis au contrôle régulier du Parlement européen; invite la Commission à évaluer régulièrement l’incidence, l’efficacité et la surveillance des obligations vertes; demande à cet égard une initiative législative visant à encourager, promouvoir et commercialiser l’émission publique européenne d’obligations vertes par les institutions européennes existantes et futures telles que la BEI afin de financer de nouveaux investissements durables;

Agences de notation de crédit

19.

fait remarquer que les agences de notation de crédit ne tiennent pas suffisamment compte de l’impact des facteurs et risques environnementaux, sociaux et de gouvernance perturbateurs sur la solvabilité future des émetteurs; réclame l’adoption de normes européennes claires et la surveillance de l’intégration des indicateurs environnementaux, sociaux et de gouvernance lors des procédures de notation effectuées au sein de l’Union par l’ensemble des agences de notation de crédit; souligne que l’insuffisance sous-jacente de la concurrence entre ces entreprises et l’étroitesse de leur orientation économique n’ont pas encore été pleinement prises en compte; appelle à l’établissement d’une procédure d’accréditation en vue d’une «notation de la finance verte» par des agents de certification supervisés par l’Autorité européenne des marchés financiers (AEMF); recommande de charger l’AEMF d’imposer aux agences de notation de tenir compte des risques pesant sur la durabilité dans leurs méthodes de calcul; invite la Commission à réviser en conséquence le règlement sur les agences de notation de crédit pour les domaines dans lesquels ces risques sont susceptibles de se présenter à l’avenir; souligne l’importance des études de durabilité réalisées grâce aux indices de durabilité et par les agences de notation ESG pour fournir à tous les acteurs financiers les informations nécessaires afin qu’ils puissent s’acquitter de leurs obligations en matière de communication d’informations et de loyauté et contribuer ainsi à la transition vers un système financier plus durable;

Systèmes d’étiquetage pour les services financiers

20.

suggère à la Commission d’établir un système d’étiquetage proportionné, et contraignant après une période transitoire d’étiquetage volontaire, pour les institutions offrant des comptes bancaires pour les clients de détail, les fonds d'investissement, les produits d’assurance et les produits financiers, montrant dans quelle mesure les actifs sous-jacents sont compatibles avec la Convention de Paris et les objectifs ESG;

Le mandat des AES

21.

a l’intention de continuer à clarifier le mandat des AES et des autorités nationales compétentes dans la prochaine révision des règlements AES afin d’inclure et de suivre les risques et facteurs ESG, ce qui permettra d’aligner davantage le marché financier sur les objectifs de durabilité; est d’avis à cet égard que l’AEMF devrait:

inclure les préférences en matière de durabilité dans ses «lignes directrices d’éligibilité», comme le propose la Commission dans son plan d’action pour une finance durable, de manière plus générale, donner des orientations sur la manière dont les considérations en matière de durabilité pourraient être effectivement consacrées dans la législation financière pertinente de l’Union, et promouvoir une mise en œuvre cohérente de ces dispositions une fois qu’elles auront été adoptées;

établir un système de surveillance et de suivi proportionné et, après une période de transition, contraignant, pour évaluer les principaux risques et facteurs ESG à partir de 2018, et comprenant une analyse prospective de scénarios en matière de durabilité;

être chargée d’évaluer la compatibilité des portefeuilles avec les risques et facteurs ESG de la Convention de Paris et leur cohérence avec les recommandations du groupe de travail sur la publication d’informations financières relatives au climat;

souligne, dans ce contexte, que les AES devraient disposer de ressources financières suffisantes pour mener à bien leur mission; encourage les AES à coopérer sur ces questions avec les agences et les organisations internationales concernées;

Le rôle de la BEI en ce qui concerne le financement durable

22.

insiste sur le fait que les institutions de l’Union devraient montrer l’exemple en matière de promotion de la finance durable; note que si la BEI a consacré 26 % de son volume total de financements à l’atténuation du changement climatique, a été pionnière sur le marché des obligations vertes en 2007 et est bien placée pour tenir les engagements annoncés à cet égard, elle continue de financer des projets à forte intensité de carbone, ce qui laisse une marge d’amélioration; invite donc instamment la BEI à adapter et à hiérarchiser ses prêts à venir de façon à les rendre compatibles avec la hausse des températures limitée à 1,5 °C fixée par l’Accord de Paris; invite à renforcer et à rééquilibrer les opérations de prêts de la BEI et le règlement du Fonds européen pour les investissements stratégiques (règlement FEIS), afin qu’ils cessent de s’investir dans des projets à forte intensité de carbone et privilégient les projets de décarbonation économes en ressources aux côtés d’autres secteurs innovants et entreprises incorporelles; est d’avis que la BEI est en mesure de fournir davantage de capital-risque en faveur de la transition verte de façon équilibrée entre les régions; estime qu’il conviendrait de prendre davantage de mesures dans cette optique, y compris, entre autres, en interaction avec les instruments financiers européens dans le prochain cadre financier pluriannuel;

Le rôle de la BCE en ce qui concerne le financement durable

23.

reconnaît l’indépendance de la BCE et son mandat principal, qui est de de préserver la stabilité des prix, mais rappelle que cette institution de l’Union est, en tant que telle, également liée par l’accord de Paris; est donc préoccupé de constater que 62,1 % des obligations d’entreprises achetées par la BCE proviennent de secteurs responsables de 58,5 % des émissions de gaz à effet de serre de la zone euro (14) et constate que les principaux bénéficiaires directs de ce programme sont les grandes entreprises; recommande à la BCE de s’engager explicitement en faveur de l’accord de Paris et des objectifs ESG dans ses lignes directrices destinées à orienter ses programmes d’achat; souligne que ces lignes directrices pourraient être décisives pour la conception d4une future politique d’investissement axée sur les ESG en conformité avec les normes élevées d’une taxonomie de durabilité de l’Union;

Autres aspects

24.

souligne qu’une offre pertinente et étoffée de produits financiers durables peut aussi avoir des retombées positives pour l’amélioration des infrastructures sociales européennes, c’est-à-dire l’ensemble des initiatives et projets visant à créer de la valeur publique en dynamisant l’investissement et l’innovation dans les secteurs stratégiques et cruciaux pour le bien-être et la résilience des populations et des communautés, comme l’éducation, les soins de santé et le logement;

25.

salue le travail accompli par le groupe d’experts de haut niveau, qui jette les bases d’une nouvelle norme en faveur d’un secteur financier durable; insiste toutefois sur la nécessité d’impliquer activement le secteur bancaire, qui, en raison de sa position dominante dans le paysage financier européen, reste déterminant pour la durabilité de la finance;

26.

souligne que la méthodologie utilisée pour suivre les dépenses liées au climat provoque des incohérences entre les programmes, ce qui permet à des projets aux avantages environnementaux et climatiques douteux de prétendre au titre de dépenses liées au climat (voir, par exemple, la composante de la politique agricole commune en faveur de l’écologisation);

27.

souligne que tous les critères financiers de référence communément utilisés n’intègrent pas les facteurs ESG dans leur méthodologie; appelle à l’élaboration demande d’un ou de plusieurs critères de référence européens en matière de durabilité, en utilisant la taxonomie européenne en matière de durabilité, pour mesurer la performance des émetteurs européens sur la base des risques et facteurs ESG;

28.

demande que les initiatives privées, telles que le projet EeMAP sur les «prêts hypothécaires verts», soient analysées et encouragées afin d’évaluer et de démontrer dans quelles conditions les actifs verts peuvent entraîner une réduction des risques pour les investissements tout en améliorant la durabilité environnementale;

29.

invite l’Union à promouvoir activement l’intégration des indicateurs de durabilité dans le cadre des normes internationales d’information financière (IFRS);

30.

souligne que la gouvernance d’entreprise devrait promouvoir une création de valeur durable à long terme, par exemple en accordant des actions de fidélité aux actionnaires de longue durée et en intégrant des critères ESG dans la rémunération des administrateurs et des conseils d’administration; observe que clarifier les devoirs des administrateurs à cet égard faciliterait le dialogue entre les investisseurs durables et les conseils d’administration;

31.

réclame l’introduction d’une assurance obligatoire en responsabilité environnementale pour toutes les activités commerciales et publiques en tant que condition préalable à l’octroi d’autorisations;

32.

souligne que, pour garantir une finance durable, il convient de clarifier les devoirs des administrateurs des entreprises européennes concernant la création de valeur durable à long terme, les questions ESG et les risques systémiques dans le cadre de l’obligation globale qu’ont les administrateurs de promouvoir la réussite de l’entreprise;

33.

incite les autorités européennes de surveillance à élaborer des lignes directrices concernant la collecte de statistiques sur la reconnaissance et l’intégration dans le financement des risques liés à l’environnement, à la société et à la bonne gouvernance, et demande une publication de ces statistiques lorsque cela est possible;

34.

encourage les autorités bancaires nationales et les autorités des marchés financiers à rédiger des lignes directrices claires et concises sur la façon dont la nouvelle taxonomie et les autres modifications liées à la présente réglementation peuvent être mises en œuvre sans que cela génère de coûts et de délais supplémentaires;

35.

considère que les mesures de fixation des prix peuvent apporter une contribution essentielle pour combler le déficit de financement qui s’élève à 180 milliards d’euros afin de mener à bien les efforts de décarbonation de l’Europe en réorientant les investissements vers des objectifs durables à long terme;

36.

observe que les petites et moyennes entreprises (PME) sont souvent oubliées dans les discussions relatives à la finance durable, malgré leur caractère innovant; note à cet égard le vaste potentiel de la numérisation et des technologies financières vertes; recommande à la Commission d’envisager des mécanismes permettant aux PME de regrouper leurs projets afin de leur permettre d’accéder au marché des obligations vertes;

37.

insiste sur l’importance de la dimension sociale de la finance durable; observe le potentiel qu’offre le développement de nouveaux instruments financiers consacrés aux infrastructures sociales, comme les obligations sociales avalisées par les principes relatifs aux obligations sociales de 2017;

38.

souligne que la détermination, la gestion et la publication des risques ESG font partie intégrante de la protection des consommateurs et de la stabilité financière et devraient donc relever du mandat et des missions de surveillance des AES; demande au CERS de mener activement des recherches sur l’interaction entre les facteurs ESG et le risque systémique au-delà du changement climatique;

39.

rappelle que le Parlement a réclamé la création d’un compte d’épargne européen pour le financement de l’économie verte dans sa résolution du mardi 14 novembre 2017 sur le plan d’action sur les services financiers de détail;

40.

demande que toutes les dépenses futures de l’Union soient compatibles avec l’accord de Paris et que les objectifs liés à la décarbonation de l’économie soient intégrés aux instruments juridiques régissant le fonctionnement des Fonds structurels et d’investissement européens (y compris les fonds de cohésion), les fonds pour l’action extérieure et la coopération au développement et les autres instruments extérieurs au cadre financier pluriannuel, tels que le Fonds européen pour les investissements stratégiques (EFSI);

41.

invite la Commission à réaliser une étude de faisabilité sur la façon dont les autorités de surveillance et la réglementation pourraient mieux récompenser les mandats qui intègrent des perspectives à long terme;

42.

invite l’Autorité européenne des assurances et des pensions professionnelles (AEAPP) à élaborer des bonnes pratiques et des lignes directrices sur la manière dont les organismes proposant des systèmes de retraites professionnelles et des produits d’épargne-retraite privés peuvent dialoguer avec les bénéficiaires avant la conclusion des contrats et durant toute la durée de vie de l’investissement; invite l’AEAPP à publier des lignes directrices sur les bonnes pratiques, comme le fonds de retraite prévu par l’agence britannique pour l’environnement (Environmental Agency), concernant l’interaction avec les bénéficiaires et les clients de détail ainsi que la détermination de leurs intérêts financiers et non financiers;

43.

prend acte de la recommandation formulée par le groupe d’experts de haut niveau en faveur d’un observatoire européen de la finance durable, lequel devrait être créé par l’Agence européenne pour l’environnement, en coopération avec les AES, et avoir pour mission de suivre, de communiquer et de publier des informations sur les investissements durables dans l’Union; recommande, en vue de renforcer la capacité de l’Union à montrer l’exemple, que cet observatoire soit également chargé de suivre, de communiquer et de publier des informations sur les investissements durables des fonds et des institutions de l’Union, notamment l’EFSI, la BEI et la BCE; demande que l’observatoire fasse rapport de ses activités au Parlement européen;

44.

recommande que la BEI collabore avec les petits acteurs du marché et les coopératives de proximité en vue de regrouper les projets à petite échelle dans le domaine des énergies renouvelables, afin qu’ils puissent bénéficier des financements de la BEI et dans le cadre du programme d’achat de titres du secteur des entreprises;

45.

partage l’avis du groupe d’experts de haut niveau selon lequel il est crucial de responsabiliser les citoyens européens et de les sensibiliser aux questions de finance durable; souligne qu’il convient d’améliorer l’accès aux informations relatives aux performances en matière de durabilité et de promouvoir la culture financière;

46.

invite la Commission et les États membres à garantir la cohérence des politiques entre les secteurs financier et non financier; rappelle qu’une politique financière durable doit s’accompagner de choix stratégiques cohérents dans d’autres secteurs, tels que l’énergie, les transports, l’industrie et l’agriculture;

47.

invite la Commission à publier régulièrement des rapports d’avancement sur les thèmes couverts dans la présente résolution;

48.

invite la Commission et les États membres à exploiter l’influence de l’Union pour prendre les devants en matière de finance durable et pour renforcer les normes en matière de durabilité dans la finance au niveau mondial, y compris au moyen d’accords bilatéraux avec des pays tiers, au sein des enceintes politiques multilatérales, tels que les Nations unies, le G7 et le G20, et dans les organismes internationaux de normalisation, tels que l’Organisation internationale des commissions de valeurs (OICV);

o

o o

49.

charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil et à la Commission.

(1)  JO L 335 du 17.12.2009, p. 1.

(2)  JO L 330 du 15.11.2014, p. 1.

(3)  JO L 132 du 20.5.2017, p. 1.

(4)  JO L 354 du 23.12.2016, p. 37.

(5)  JO L 182 du 29.6.2013, p. 19.

(6)  JO L 347 du 28.12.2017, p. 35.

(7)  JO L 352 du 9.12.2014, p. 1.

(8)  Bureau des Nations unies pour la réduction des risques de catastrophes: https://www.unisdr.org/files/46796_cop21weatherdisastersreport2015.pdf

(9)  Textes adoptés de cette date, P8_TA(2018)0039.

(10)  Textes adoptés de cette date, P8_TA(2018)0025.

(11)  Textes adoptés de cette date, P8_TA(2017)0428.

(12)  JO C 75 du 26.2.2016, p. 41.

(13)  JO C 265 du 11.8.2017, p. 65.

(14)  Sini Matikainen, Emanuele Campiglio et Dimitri Zenghelis, «The climate impact of quantitative easing», Institut Grantham Institute sur le changement climatique et l’environnement, mai 2017.