5.4.2019 |
FR |
Journal officiel de l'Union européenne |
C 129/49 |
P8_TA(2018)0059
Couper les sources de revenus des djihadistes — cibler le financement du terrorisme
Recommandation du Parlement européen du 1er mars 2018 au Conseil, à la Commission et à la vice-présidente de la Commission / haute représentante de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité sur: couper les sources de revenus des djihadistes — cibler le financement du terrorisme (2017/2203(INI))
(2019/C 129/07)
Le Parlement européen,
— |
vu la convention internationale pour la répression du financement du terrorisme de 1999, |
— |
vu sa résolution du 27 octobre 2016 sur la situation dans le nord de l’Iraq et à Mossoul (1) et sa résolution du 30 avril 2015 sur la destruction de sites culturels par le groupe État islamique (2), |
— |
vu la stratégie globale pour la politique étrangère et de sécurité de l’Union européenne, |
— |
vu le règlement (CE) no 1210/2003 du Conseil du 7 juillet 2003 concernant certaines restrictions spécifiques applicables aux relations économiques et financières avec l'Iraq et abrogeant le règlement (CE) no 2465/96 (3), |
— |
vu la stratégie antiterroriste mondiale des Nations unies et les résolutions 1267 (1999), 1373 (2001) 1989 (2011), 2133 (2014), 2199 (2015), 2253 (2015) et 2368 (2017) du Conseil de sécurité des Nations unies, |
— |
vu la directive (UE) 2015/849 du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 2015 relative à la prévention de l’utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux ou du financement du terrorisme, modifiant le règlement (UE) no 648/2012 du Parlement européen et du Conseil et abrogeant la directive 2005/60/CE du Parlement européen et du Conseil et la directive 2006/70/CE de la Commission (4), |
— |
vu la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive (UE) 2015/849 relative à la prévention de l’utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux ou du financement du terrorisme et modifiant la directive 2009/101/CE (COM(2016)0450), |
— |
vu la déclaration de Manama sur la lutte contre le financement du terrorisme du 9 novembre 2014, |
— |
vu les meilleures pratiques du Groupe d’action financière (GAFI) concernant les sanctions financières ciblées liées au terrorisme et au financement du terrorisme, |
— |
vu la déclaration du GAFI du 24 octobre 2014 sur la lutte contre le financement de l’état islamique en Irak et au Levant (EIIL) et le rapport du GAFI de février 2015 sur le financement de l’EIIL, |
— |
vu le onzième rapport sur l’état d’avancement de l’union de la sécurité, publié par la Commission le 18 octobre 2017, |
— |
vu l’addendum au mémorandum d’Alger sur les bonnes pratiques en matière de prévention des enlèvements contre rançon par les terroristes et d’élimination des avantages qui en découlent, publié en septembre 2015 par le Forum mondial de lutte contre le terrorisme, |
— |
vu la déclaration du G7 de Taormine sur la lutte contre le terrorisme et l’extrémisme violent, du 26 mai 2017, |
— |
vu la récente création de la commission spéciale sur le terrorisme, |
— |
vu l’article 16 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (traité FUE), |
— |
vu les articles 7 et 8 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne concernant la protection des données à caractère personnel, |
— |
vu le règlement (UE) 2015/827 du Conseil du 28 mai 2015 modifiant le règlement (UE) n o 36/2012 concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Syrie (5), |
— |
vu le plan d'action de la Commission de février 2016 destiné à renforcer la lutte contre le financement du terrorisme, |
— |
vu le rapport 2017 d’Europol sur la situation et les tendances du terrorisme en Europe (TE-SAT), |
— |
vu le rapport de la Commission du 26 juin 2017 sur l’évaluation des risques de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme pesant sur le marché intérieur et liés à des activités transfrontalières (COM(2017)0340), |
— |
vu la directive (UE) 2017/541 du Parlement européen et du Conseil du 15 mars 2017 relative à la lutte contre le terrorisme et remplaçant la décision-cadre 2002/475/JAI du Conseil et modifiant la décision 2005/671/JAI du Conseil (6), |
— |
vu la directive (UE) 2016/680 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relative à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel par les autorités compétentes à des fins de prévention et de détection des infractions pénales, d’enquêtes et de poursuites en la matière ou d’exécution de sanctions pénales, et à la libre circulation de ces données, et abrogeant la décision-cadre 2008/977/JAI du Conseil (7), |
— |
vu la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil du 13 juillet 2017 concernant l'importation de biens culturels (COM(2017)0375), |
— |
vu le neuvième rapport sur l’état d’avancement de l’union de la sécurité, publié par la Commission le 27 juillet 2017, |
— |
vu la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil européen et au Conseil du 18 octobre 2017 intitulée «Onzième rapport sur les progrès accomplis dans la mise en place d'une union de la sécurité réelle et effective» (COM(2017)0608), |
— |
vu l’article 113 de son règlement intérieur, |
— |
vu le rapport de la commission des affaires étrangères (A8-0035/2018), |
A. |
considérant que l’un des éléments essentiels de la lutte contre le terrorisme est l’assèchement de ses sources de financement, y compris celles qui proviennent des circuits dissimulés de fraude et d’évasion fiscale, du blanchiment de capitaux et des paradis fiscaux; |
B. |
considérant que, si certains financements peuvent trouver leur origine dans des pays européens et être utilisés ailleurs par les organisations terroristes, d’autres proviennent de pays tiers et visent à financer la radicalisation ainsi que des actes terroristes concrets; que les dimensions extérieure et intérieure de la lutte contre le terrorisme sont liées, et que l’assèchement des sources de financement du terrorisme devrait faire partie d’une stratégie élargie de l’Union intégrant les deux dimensions interne et externe de la sécurité; |
C. |
considérant qu’il s’avère que les réseaux de communication modernes et le financement participatif constituent une méthode particulièrement efficace et bon marché pour lever des fonds en vue de financer les activités terroristes ou d’assurer la gestion du réseau djihadiste; que les groupes terroristes ont pu réunir des fonds supplémentaires pour leurs activités grâce à l’hameçonnage (phishing), à l’usurpation d’identité ou à l’achat d’informations concernant des cartes de crédit volées sur des forums en ligne; |
D. |
considérant que ces financements alimentent des attentats qui nécessitent un apport de fonds important et des attentats non moins dévastateurs qui requièrent des fonds en quantité moindre, et qu’ils financent la propagande pouvant inspirer des attentats commis par des «loups solitaires» qui ne requièrent que très peu de préparation ou de fonds; qu’il convient d’apporter une réponse efficace dans tous les cas; |
E. |
considérant que des fonds licites peuvent être déviés par leur destinataire vers des parties tierces, des individus, des groupes, des entreprises ou des entités liés à des activités terroristes; |
F. |
considérant que l’envergure mondiale du terrorisme appelle une réaction qui, pour être efficace, doit également être mondiale et complète, et que sont indispensables à cet égard la coordination entre les institutions financières, les autorités répressives et les organes judiciaires et l’échange d’informations pertinentes sur les personnes physiques et morales ainsi que les activités suspectes, tout en gardant à l’esprit que la protection des données à caractère personnel et le respect de la vie privée sont des droits fondamentaux importants; |
G. |
considérant que la prise de conscience des liens entre, d’une part, le blanchiment de capitaux et l’évasion fiscale et, d’autre part, la criminalité organisée et le financement du terrorisme a considérablement augmenté au cours des dernières années en raison des fuites d’informations, et que ces questions sont devenues une préoccupation politique internationale majeure; que, comme l’a reconnu la Commission, de récentes informations relayées par les médias ont aussi établi un lien entre la fraude à la TVA et aux droits d’accise à grande échelle et la criminalité organisée, y compris le terrorisme (8); |
H. |
considérant que presque tous les systèmes juridiques des États membres ont érigé le financement du terrorisme en infraction particulière; |
I. |
considérant que les données financières constituent un instrument très utile pour recueillir des renseignements afin d’analyser les réseaux terroristes et de mieux entraver leurs activités; qu’il convient de garantir en permanence l’application adéquate de la législation pour prévenir le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme; qu’il convient d’élaborer des stratégies de prévention complètes fondées sur l’échange d’informations essentielles et sur la coopération renforcée entre les cellules de renseignement financier, les services de renseignement et les autorités répressives au regard de la lutte contre le financement du terrorisme; que ces informations devraient comprendre les évolutions de la finance internationale, comme le mode point (bitmap), la codification SWIFT, la crypto-monnaie et les mécanismes réglementaires correspondants; que la lutte contre le financement du terrorisme à l’échelle mondiale doit comporter des normes mondiales de transparence pour les propriétaires en dernière analyse des sociétés, trusts et autres structures similaires afin de contrer l’opacité financière, qui facilite le blanchiment des produits de la criminalité et le financement des organisations et auteurs d’actes terroristes; |
J. |
considérant qu’il est nécessaire d’instaurer une plate-forme européenne institutionnalisée au sein des structures existantes, dont l’existence était jusqu’ici informelle, qui centralise des informations aujourd’hui éparpillées entre les vingt-huit États membres et permette aux États membres de fournir des informations sur leur niveau d’implication et leurs progrès en matière de lutte contre le financement du terrorisme; que cet échange d’informations devrait être préventif; |
K. |
considérant que nombre d’organisations internationales à but non lucratif, d’organisations caritatives, d’autres fondations, réseaux et de donateurs privés ayant ou prétendant avoir des objectifs sociaux ou culturels, ont fourni la base des capacités financières de l’EIIL/Daech, d’Al-Qaïda et d’autres organisations djihadistes, et servent de couverture à des pratiques frauduleuses; que la surveillance et la collecte de renseignements sur ces organisations, sur leurs fondateurs, sur leurs activités et sur leurs liens avec des acteurs au sein de l’Union, qui sont souvent très étendus, est donc essentielle; que le soutien qu’ils apportent à l’expansion de l’extrémisme djihadiste en Afrique, au Proche-Orient, en Asie et en Europe doit être contré; que cette expansion aux frontières de l’Union et dans les pays et partenaires voisins est particulièrement inquiétante; que la pleine application des recommandations du GAFI dans ces domaines par le Conseil de coopération du Golfe (CCG) et ses États membres revêt la plus haute importance dans la lutte contre le terrorisme mondial; |
L. |
considérant que le réseau mondial de collecte de fonds d’Al-Qaïda repose sur les dons à des organisations caritatives et à des organisations non gouvernementales (ONG), qui communiquent avec les donateurs grâce aux médias sociaux et aux forums en ligne; que des comptes ont également été utilisés pour demander des dons en faveur de la cause du djihad aux sympathisants; que plusieurs applications pour smartphone ont été conçues par les organisations terroristes au cours des dernières années pour maximiser leur portée et encourager les dons des sympathisants, qui sont établis, pour la plupart, dans les pays du Golfe; |
M. |
considérant que les micro-États et les États présentant des performances médiocres du point de vue de l’état de droit sont particulièrement vulnérables et exposés au risque de devenir des centres privilégiés pour le financement du terrorisme; |
N. |
considérant que, selon certaines sources, des institutions et des citoyens du Golfe apportent un soutien financier et logistique à Al-Qaïda, à Daech et à d’autres groupes radicaux; que beaucoup de ces groupes ne pourraient subsister sans ces financements; |
O. |
considérant que l’EIIL/Daech et Al-Qaïda sont devenus autosuffisants financièrement; qu’ils essaient d’exfiltrer leurs avoirs en Syrie et en Iraq par le biais d’exportations de pétrole, d’investissements dans des entreprises, y compris des entreprises de services monétaires, des passeurs de fonds et des professionnels des services monétaires et de transferts de fonds illégaux; qu’ils blanchissent le produit de leurs activités criminelles en achetant des entreprises et des actifs en tous genres; qu’ils blanchissent également le produit du vol d’antiquités et du trafic d’œuvres d’art et d’objets en les vendant à l’étranger, y compris sur le marché des États membres; que le trafic illicite de marchandises, d’armes à feu, de pétrole, de drogues, de cigarettes et d’objets culturels, entre autres marchandises, ainsi que la traite des êtres humains, l’esclavage, l’exploitation des enfants, le racket et l’extorsion de fonds sont devenus des sources de financement pour les groupes terroristes; que les liens croissants entre la criminalité organisée et les groupes terroristes constituent une menace de plus en plus grave pour l’Union; que ces sources pourraient permettre à l’EIIL/Daech et à Al-Qaïda de poursuivre le financement d’actes criminels à l’avenir après leur effondrement dans les territoires syriens et iraquiens; |
P. |
considérant qu'une interdiction a été prononcée au niveau international contre les demandes de rançon dans le cadre d’une série d’engagements ancrés dans des résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies et des lois nationales; que, dans la pratique, l’interdiction prononcée par les Nations unies ne bénéficie pas de l’appui de signataires de poids qui accordent la priorité à la préservation de la vie au détriment de leurs engagements en matière de lutte contre le terrorisme et, ce faisant, permettent le financement des organisations terroristes; |
1. |
adresse au Conseil, à la Commission et à la vice-présidente de la Commission / haute représentante de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité (HR/VP) les recommandations suivantes:
|
2. |
charge son Président de transmettre la présente recommandation au Conseil, à la Commission, à la vice-présidente de la Commission/haute représentante de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, ainsi qu’aux États membres. |
(1) Textes adoptés de cette date, P8_TA(2016)0422.
(2) JO C 346 du 21.9.2016, p. 55.
(3) JO L 169 du 8.7.2003, p. 6.
(4) JO L 141 du 5.6.2015, p. 73.
(5) JO L 132 du 29.5.2015, p. 1.
(6) JO L 88 du 31.3.2017, p. 6.
(7) JO L 119 du 4.5.2016, p. 89.
(8) http://europa.eu/rapid/press-release_IP-17-3441_fr.htm