5.4.2019   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 129/49


P8_TA(2018)0059

Couper les sources de revenus des djihadistes — cibler le financement du terrorisme

Recommandation du Parlement européen du 1er mars 2018 au Conseil, à la Commission et à la vice-présidente de la Commission / haute représentante de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité sur: couper les sources de revenus des djihadistes — cibler le financement du terrorisme (2017/2203(INI))

(2019/C 129/07)

Le Parlement européen,

vu la convention internationale pour la répression du financement du terrorisme de 1999,

vu sa résolution du 27 octobre 2016 sur la situation dans le nord de l’Iraq et à Mossoul (1) et sa résolution du 30 avril 2015 sur la destruction de sites culturels par le groupe État islamique (2),

vu la stratégie globale pour la politique étrangère et de sécurité de l’Union européenne,

vu le règlement (CE) no 1210/2003 du Conseil du 7 juillet 2003 concernant certaines restrictions spécifiques applicables aux relations économiques et financières avec l'Iraq et abrogeant le règlement (CE) no 2465/96 (3),

vu la stratégie antiterroriste mondiale des Nations unies et les résolutions 1267 (1999), 1373 (2001) 1989 (2011), 2133 (2014), 2199 (2015), 2253 (2015) et 2368 (2017) du Conseil de sécurité des Nations unies,

vu la directive (UE) 2015/849 du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 2015 relative à la prévention de l’utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux ou du financement du terrorisme, modifiant le règlement (UE) no 648/2012 du Parlement européen et du Conseil et abrogeant la directive 2005/60/CE du Parlement européen et du Conseil et la directive 2006/70/CE de la Commission (4),

vu la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive (UE) 2015/849 relative à la prévention de l’utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux ou du financement du terrorisme et modifiant la directive 2009/101/CE (COM(2016)0450),

vu la déclaration de Manama sur la lutte contre le financement du terrorisme du 9 novembre 2014,

vu les meilleures pratiques du Groupe d’action financière (GAFI) concernant les sanctions financières ciblées liées au terrorisme et au financement du terrorisme,

vu la déclaration du GAFI du 24 octobre 2014 sur la lutte contre le financement de l’état islamique en Irak et au Levant (EIIL) et le rapport du GAFI de février 2015 sur le financement de l’EIIL,

vu le onzième rapport sur l’état d’avancement de l’union de la sécurité, publié par la Commission le 18 octobre 2017,

vu l’addendum au mémorandum d’Alger sur les bonnes pratiques en matière de prévention des enlèvements contre rançon par les terroristes et d’élimination des avantages qui en découlent, publié en septembre 2015 par le Forum mondial de lutte contre le terrorisme,

vu la déclaration du G7 de Taormine sur la lutte contre le terrorisme et l’extrémisme violent, du 26 mai 2017,

vu la récente création de la commission spéciale sur le terrorisme,

vu l’article 16 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (traité FUE),

vu les articles 7 et 8 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne concernant la protection des données à caractère personnel,

vu le règlement (UE) 2015/827 du Conseil du 28 mai 2015 modifiant le règlement (UE) n o  36/2012 concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Syrie (5),

vu le plan d'action de la Commission de février 2016 destiné à renforcer la lutte contre le financement du terrorisme,

vu le rapport 2017 d’Europol sur la situation et les tendances du terrorisme en Europe (TE-SAT),

vu le rapport de la Commission du 26 juin 2017 sur l’évaluation des risques de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme pesant sur le marché intérieur et liés à des activités transfrontalières (COM(2017)0340),

vu la directive (UE) 2017/541 du Parlement européen et du Conseil du 15 mars 2017 relative à la lutte contre le terrorisme et remplaçant la décision-cadre 2002/475/JAI du Conseil et modifiant la décision 2005/671/JAI du Conseil (6),

vu la directive (UE) 2016/680 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relative à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel par les autorités compétentes à des fins de prévention et de détection des infractions pénales, d’enquêtes et de poursuites en la matière ou d’exécution de sanctions pénales, et à la libre circulation de ces données, et abrogeant la décision-cadre 2008/977/JAI du Conseil (7),

vu la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil du 13 juillet 2017 concernant l'importation de biens culturels (COM(2017)0375),

vu le neuvième rapport sur l’état d’avancement de l’union de la sécurité, publié par la Commission le 27 juillet 2017,

vu la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil européen et au Conseil du 18 octobre 2017 intitulée «Onzième rapport sur les progrès accomplis dans la mise en place d'une union de la sécurité réelle et effective» (COM(2017)0608),

vu l’article 113 de son règlement intérieur,

vu le rapport de la commission des affaires étrangères (A8-0035/2018),

A.

considérant que l’un des éléments essentiels de la lutte contre le terrorisme est l’assèchement de ses sources de financement, y compris celles qui proviennent des circuits dissimulés de fraude et d’évasion fiscale, du blanchiment de capitaux et des paradis fiscaux;

B.

considérant que, si certains financements peuvent trouver leur origine dans des pays européens et être utilisés ailleurs par les organisations terroristes, d’autres proviennent de pays tiers et visent à financer la radicalisation ainsi que des actes terroristes concrets; que les dimensions extérieure et intérieure de la lutte contre le terrorisme sont liées, et que l’assèchement des sources de financement du terrorisme devrait faire partie d’une stratégie élargie de l’Union intégrant les deux dimensions interne et externe de la sécurité;

C.

considérant qu’il s’avère que les réseaux de communication modernes et le financement participatif constituent une méthode particulièrement efficace et bon marché pour lever des fonds en vue de financer les activités terroristes ou d’assurer la gestion du réseau djihadiste; que les groupes terroristes ont pu réunir des fonds supplémentaires pour leurs activités grâce à l’hameçonnage (phishing), à l’usurpation d’identité ou à l’achat d’informations concernant des cartes de crédit volées sur des forums en ligne;

D.

considérant que ces financements alimentent des attentats qui nécessitent un apport de fonds important et des attentats non moins dévastateurs qui requièrent des fonds en quantité moindre, et qu’ils financent la propagande pouvant inspirer des attentats commis par des «loups solitaires» qui ne requièrent que très peu de préparation ou de fonds; qu’il convient d’apporter une réponse efficace dans tous les cas;

E.

considérant que des fonds licites peuvent être déviés par leur destinataire vers des parties tierces, des individus, des groupes, des entreprises ou des entités liés à des activités terroristes;

F.

considérant que l’envergure mondiale du terrorisme appelle une réaction qui, pour être efficace, doit également être mondiale et complète, et que sont indispensables à cet égard la coordination entre les institutions financières, les autorités répressives et les organes judiciaires et l’échange d’informations pertinentes sur les personnes physiques et morales ainsi que les activités suspectes, tout en gardant à l’esprit que la protection des données à caractère personnel et le respect de la vie privée sont des droits fondamentaux importants;

G.

considérant que la prise de conscience des liens entre, d’une part, le blanchiment de capitaux et l’évasion fiscale et, d’autre part, la criminalité organisée et le financement du terrorisme a considérablement augmenté au cours des dernières années en raison des fuites d’informations, et que ces questions sont devenues une préoccupation politique internationale majeure; que, comme l’a reconnu la Commission, de récentes informations relayées par les médias ont aussi établi un lien entre la fraude à la TVA et aux droits d’accise à grande échelle et la criminalité organisée, y compris le terrorisme (8);

H.

considérant que presque tous les systèmes juridiques des États membres ont érigé le financement du terrorisme en infraction particulière;

I.

considérant que les données financières constituent un instrument très utile pour recueillir des renseignements afin d’analyser les réseaux terroristes et de mieux entraver leurs activités; qu’il convient de garantir en permanence l’application adéquate de la législation pour prévenir le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme; qu’il convient d’élaborer des stratégies de prévention complètes fondées sur l’échange d’informations essentielles et sur la coopération renforcée entre les cellules de renseignement financier, les services de renseignement et les autorités répressives au regard de la lutte contre le financement du terrorisme; que ces informations devraient comprendre les évolutions de la finance internationale, comme le mode point (bitmap), la codification SWIFT, la crypto-monnaie et les mécanismes réglementaires correspondants; que la lutte contre le financement du terrorisme à l’échelle mondiale doit comporter des normes mondiales de transparence pour les propriétaires en dernière analyse des sociétés, trusts et autres structures similaires afin de contrer l’opacité financière, qui facilite le blanchiment des produits de la criminalité et le financement des organisations et auteurs d’actes terroristes;

J.

considérant qu’il est nécessaire d’instaurer une plate-forme européenne institutionnalisée au sein des structures existantes, dont l’existence était jusqu’ici informelle, qui centralise des informations aujourd’hui éparpillées entre les vingt-huit États membres et permette aux États membres de fournir des informations sur leur niveau d’implication et leurs progrès en matière de lutte contre le financement du terrorisme; que cet échange d’informations devrait être préventif;

K.

considérant que nombre d’organisations internationales à but non lucratif, d’organisations caritatives, d’autres fondations, réseaux et de donateurs privés ayant ou prétendant avoir des objectifs sociaux ou culturels, ont fourni la base des capacités financières de l’EIIL/Daech, d’Al-Qaïda et d’autres organisations djihadistes, et servent de couverture à des pratiques frauduleuses; que la surveillance et la collecte de renseignements sur ces organisations, sur leurs fondateurs, sur leurs activités et sur leurs liens avec des acteurs au sein de l’Union, qui sont souvent très étendus, est donc essentielle; que le soutien qu’ils apportent à l’expansion de l’extrémisme djihadiste en Afrique, au Proche-Orient, en Asie et en Europe doit être contré; que cette expansion aux frontières de l’Union et dans les pays et partenaires voisins est particulièrement inquiétante; que la pleine application des recommandations du GAFI dans ces domaines par le Conseil de coopération du Golfe (CCG) et ses États membres revêt la plus haute importance dans la lutte contre le terrorisme mondial;

L.

considérant que le réseau mondial de collecte de fonds d’Al-Qaïda repose sur les dons à des organisations caritatives et à des organisations non gouvernementales (ONG), qui communiquent avec les donateurs grâce aux médias sociaux et aux forums en ligne; que des comptes ont également été utilisés pour demander des dons en faveur de la cause du djihad aux sympathisants; que plusieurs applications pour smartphone ont été conçues par les organisations terroristes au cours des dernières années pour maximiser leur portée et encourager les dons des sympathisants, qui sont établis, pour la plupart, dans les pays du Golfe;

M.

considérant que les micro-États et les États présentant des performances médiocres du point de vue de l’état de droit sont particulièrement vulnérables et exposés au risque de devenir des centres privilégiés pour le financement du terrorisme;

N.

considérant que, selon certaines sources, des institutions et des citoyens du Golfe apportent un soutien financier et logistique à Al-Qaïda, à Daech et à d’autres groupes radicaux; que beaucoup de ces groupes ne pourraient subsister sans ces financements;

O.

considérant que l’EIIL/Daech et Al-Qaïda sont devenus autosuffisants financièrement; qu’ils essaient d’exfiltrer leurs avoirs en Syrie et en Iraq par le biais d’exportations de pétrole, d’investissements dans des entreprises, y compris des entreprises de services monétaires, des passeurs de fonds et des professionnels des services monétaires et de transferts de fonds illégaux; qu’ils blanchissent le produit de leurs activités criminelles en achetant des entreprises et des actifs en tous genres; qu’ils blanchissent également le produit du vol d’antiquités et du trafic d’œuvres d’art et d’objets en les vendant à l’étranger, y compris sur le marché des États membres; que le trafic illicite de marchandises, d’armes à feu, de pétrole, de drogues, de cigarettes et d’objets culturels, entre autres marchandises, ainsi que la traite des êtres humains, l’esclavage, l’exploitation des enfants, le racket et l’extorsion de fonds sont devenus des sources de financement pour les groupes terroristes; que les liens croissants entre la criminalité organisée et les groupes terroristes constituent une menace de plus en plus grave pour l’Union; que ces sources pourraient permettre à l’EIIL/Daech et à Al-Qaïda de poursuivre le financement d’actes criminels à l’avenir après leur effondrement dans les territoires syriens et iraquiens;

P.

considérant qu'une interdiction a été prononcée au niveau international contre les demandes de rançon dans le cadre d’une série d’engagements ancrés dans des résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies et des lois nationales; que, dans la pratique, l’interdiction prononcée par les Nations unies ne bénéficie pas de l’appui de signataires de poids qui accordent la priorité à la préservation de la vie au détriment de leurs engagements en matière de lutte contre le terrorisme et, ce faisant, permettent le financement des organisations terroristes;

1.

adresse au Conseil, à la Commission et à la vice-présidente de la Commission / haute représentante de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité (HR/VP) les recommandations suivantes:

a)

invite les États membres et la Commission à considérer l’interruption des sources de financement des réseaux terroristes comme une priorité de premier ordre, dans la mesure où cette stratégie contribue activement à nuire à l’efficacité de ces réseaux; estime qu’il est indispensable d’élaborer des stratégies de prévention fondées sur le partage des bonnes pratiques et sur l’échange d’informations pertinentes et portant sur des soupçons entre les services de renseignement au regard de la lutte contre le financement du terrorisme et plus généralement contre les attentats terroristes; invite dès lors les services de renseignement des États membres à renforcer la coordination de leur action et à coopérer en instaurant un dispositif européen stable de renseignement financier en matière de lutte contre le terrorisme dans le cadre des structures existantes (par exemple Europol) en vue d’éviter la création d’une agence supplémentaire, pour renforcer l’échange préventif d’informations sur les soutiens financiers des réseaux terroristes; estime qu’une telle plate-forme permettrait de créer une base de données commune contenant les informations relatives aux physiques et morales ainsi qu’aux opérations suspectes; insiste sur le fait que les données à forte valeur ajoutée collectées par une agence nationale de sécurité devraient être transmises rapidement dès l’instant où elles sont enregistrées dans le système central, ce qui devrait être autorisé afin inclure les informations sur les ressortissants de pays tiers, en tenant dûment compte des incidences possibles sur les droits fondamentaux et, en particulier, sur le droit à la protection des données à caractère personnel et sur le principe de limitation de la finalité; souligne que les informations concernées doivent notamment recenser les banques, les établissements financiers et les entités commerciales au sein et hors de l’Union, ainsi que les pays tiers dont l’action de lutte contre le terrorisme est défaillante; invite la Commission à établir aussitôt que possible cette base de données en s’appuyant sur ses propres critères et analyses conformément à la directive (UE) 2015/849; rappelle que les personnes responsables de la commission, de l’organisation ou du soutien directs ou indirects d’actes terroristes doivent répondre de leurs actes;

b)

invite les pays européens, à savoir aussi bien aux États membres de l’Union qu’aux pays tiers, de contribuer au financement de programmes qui favorisent l’échange de bonnes pratiques entre leurs services de renseignement, en particulier en ce qui concerne les enquêtes et les analyses des méthodes de recrutement et de transfert des financements des terroristes et des organisations terroristes; recommande la publication trimestrielle d’évaluations de la menace rassemblant les renseignements et les informations collectés par Europol et par le Centre de situation et du renseignement de l’Union européenne (INTCEN); invite les États membres à doter les services de renseignement de ressources financières et humaines appropriées;

c)

souligne qu’il est crucial, comme l’a rappelé le GAFI, qui a mis au point une stratégie de lutte contre le financement du terrorisme, de partager des informations de meilleure qualité de manière plus rapide entre les cellules de renseignement financier, entre ces cellules et les forces de sécurité et entre les services répressifs et les services de renseignement au sein même des États concernés, entre États ainsi qu’avec le secteur privé, en particulier le secteur bancaire;

d)

salue la participation du CCG au GAFI; invite la Commission et le SEAE à encourager activement les partenaires de l’Union, en particulier le CCG et ses États membres, à appliquer pleinement les recommandations du GAFI afin de remédier aux défaillances dans le domaine de la lutte contre le blanchiment de capitaux et contre le financement du terrorisme et à apporter une assistance technique pour favoriser les progrès dans ce domaine;

e)

invite la haute représentante à soutenir les efforts du GAFI et à accorder un degré de priorité élevé à la lutte contre le financement du terrorisme, notamment en identifiant les États membres des Nations unies présentant des défaillances stratégiques en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme ainsi qu’en collaborant avec ces pays;

f)

appelle de ses vœux le renforcement de la coopération entre Europol et les partenaires stratégiques essentiels de l’Union jouant un rôle crucial dans la lutte contre le terrorisme mondial; estime qu’une coopération plus étroite permettrait de mieux prévenir et repérer les centres de financement du terrorisme et de mieux faire face à ce problème; invite les États membres à mieux exploiter le réseau informel des cellules de renseignement financier européennes (FIU.net) en s’appuyant sur les travaux menés par Europol, en appliquant la cinquième directive anti-blanchiment et en adoptant des mesures réglementaires pour faire face à d’autres enjeux découlant de la diversité des statuts et compétences des cellules de renseignement financier, en particulier pour faciliter la coordination et l’échange d’informations, tant parmi les cellules de renseignement financier qu’entre ces dernières et les autorités répressives, afin de faire partager les informations concernées sur la plate-forme européenne de renseignement en matière de lutte contre le terrorisme;

g)

rappelle qu’il est extrêmement important d’intensifier le dialogue politique, d’augmenter l’assistance financière et de soutenir le renforcement des capacités en matière de lutte contre le terrorisme des partenaires de l’Union qui se trouvent en première ligne dans la lutte contre le terrorisme;

h)

invite les États membres de l’Union à améliorer la surveillance des organisations suspectes impliquées dans ce genre d’activités, comme le trafic illicite, le commerce de contrebande, la contrefaçon et les pratiques frauduleuses, en constituant des équipes communes d’enquête avec Europol, et à faciliter l’accès des services répressifs aux données concernant les opérations suspectes, en tenant compte du principe de proportionnalité et du droit à la vie privée; invite les États membres à améliorer la formation et la spécialisation des enquêteurs à cet effet; invite la Commission à soutenir et à financer de manière adéquate l’élaboration de programmes de formation pour les autorités répressives et judiciaires dans les États membres;

i)

invite les États membres et la Commission à rédiger un rapport annuel décrivant les progrès accomplis et les mesures prises en matière de lutte contre le financement du terrorisme, en particulier les efforts visant à faire obstacle au financement de l’EIIL/Daech et d’Al-Qaïda; rappelle que certains États membres œuvrent plus que d’autres à cibler le financement du terrorisme et que, par conséquent, la meilleure stratégie devrait être d’accroître les échanges d’informations, notamment en ce qui concerne les mesures déjà déployées;

j)

salue la proposition de la Commission de créer des registres des comptes bancaires et de faciliter l’accès à ceux-ci par des cellules de renseignement financier et d’autres autorités compétentes engagées dans la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme; prend note du fait que la Commission présentera prochainement une initiative visant à étendre l’accès des autorités répressives à ces registres; insiste sur la nécessité de respecter les règles de la coopération policière et de la coopération judiciaire lors de l’échange d’informations relatives aux comptes bancaires, notamment dans le cadre de procédures pénales; invite, dans ce contexte, les États membres qui n’ont pas encore transposé la directive 2014/41/UE du Parlement européen et du Conseil du 3 avril 2014 concernant la décision d’enquête européenne en matière pénale à procéder à sa transposition aussi vite que possible;

k)

demande aux États membres de prendre les mesures législatives nécessaires pour que les banques surveillent rigoureusement les opérations relatives aux cartes de débit prépayées afin de s’assurer que celles-ci ne puissent être rechargées que par virement bancaire et depuis un compte dont le titulaire est identifiable; insiste sur l’importance d’assurer une chaîne d’attribution qui permette aux services de renseignement de déterminer si une opération présente un risque sérieux d’être utilisée aux fins d’une infraction terroriste ou d’autres formes graves de criminalité; invite en outre les États membres à prendre les dispositions nécessaires pour faciliter au mieux l’ouverture d’un compte bancaire pour toutes les personnes présentes sur leur territoire;

l)

insiste sur la nécessité de mettre un terme à tout type de paradis fiscal permettant le blanchiment de capitaux, l’évasion et la fraude fiscale, soit autant d’éléments susceptible de permettre le financement des réseaux terroristes; invite les États membres, dans ce contexte, à lutter contre l’évasion fiscale et prie instamment la Commission de proposer et d’instaurer des mesures de contrôle rigoureux des flux financiers et des paradis fiscaux;

m)

prend acte de l’efficacité de la coopération et de l’utilité des informations obtenues dans le cadre de l’accord entre l’Union, les États-Unis et d’autres partenaires concernant l’échange d’informations issues du Terrorism Financing Tracking Program (TFTP) mis en œuvre par les États-Unis; invite la Commission à proposer la mise en place d’un système similaire à l’échelon européen en vue de compléter le cadre actuel et d’en combler les lacunes, notamment en ce qui concerne l’espace unique de paiements en euros (SEPA), en veillant à préserver l’équilibre entre impératifs de sécurité et libertés individuelles; rappelle que les normes européennes en matière de protection des données à caractère personnel seraient applicables dans le cadre de ce système européen;

n)

invite la haute représentante et les États membres, en coopération avec le coordinateur de l'Union pour la lutte contre le terrorisme, à constituer une liste des personnes et des entités dont les opérations sont opaques et présentent des indices significatifs d’activités financières suspectes lorsqu’il existe des preuves que les autorités compétentes n’ont pas réagi, en particulier si ces personnes et entités sont liées au radicalisme djihadiste; invite la haute représentante et les États membres à prendre en compte la participation d’un État au financement du terrorisme dans leurs relations avec ledit État;

o)

demande au Conseil de l’Union d’imposer davantage de sanctions ciblées et d’autres mesures restrictives à toutes les personnes et entités qui mettent des ressources économiques à la disposition de l’EIIL/Daech, d’Al-Qaïd ou d’autres groupes djihadistes, de quelque façon que ce soit; appelle de ses vœux le gel des fonds et autres avoirs financiers ou ressources économiques de ces personnes, groupes, entreprises et entités, y compris les fonds provenant de biens détenus ou contrôlés directement ou indirectement par eux ou par des personnes agissant pour leur compte ou sur leurs instructions; se félicite de la création du comité du Conseil de sécurité des Nations unies chargé de superviser l’application de sanctions; fait observer que tous les États membres sont tenus, conformément à la résolution 2253 (2015) du Conseil de sécurité des Nations unies, d’agir avec célérité en vue du gel d’avoirs et d’actifs financiers à destination de l’EIIL/Daech, d’Al-Qaïda et des personnes, groupes, entreprises et entités qui leurs sont associés; invite la haute représentante à soutenir l’appel du Conseil de sécurité des Nations unies aux États membres des Nations unies, les priant de prendre des mesures fermes et énergiques afin d’endiguer les flux de fonds et d’autres actifs financiers et ressources économiques à destination des personnes et entités inscrites sur la liste relative aux sanctions contre l’EIIL/Daech et Al-Qaïda;

p)

invite les États membres de l’Union à instaurer un système de contrôle et de compensation pour que les lieux de culte et d’enseignement, les institutions, les centres, les organisations caritatives, les associations culturelles ou autres entités similaires communiquent dans le détail de qui elles reçoivent des fonds et l’utilisation qu’elles font des fonds qu’elles reçoivent, en provenance de l’Union comme de pays tiers, dès lors que l’on peut raisonnablement suspecter qu’elles ont des liens avec des groupes terroristes, et à centraliser dans une base de données, constituée avec toutes les garanties requises, les informations relatives à l’ensemble des opérations réalisées par l’intermédiaire d’agences de transfert d’argent; préconise, concernant les dons, de réaliser un contrôle préalable obligatoire de l’origine et de la destination des fonds lorsque l’on peut raisonnablement suspecter l’existence de liens avec le terrorisme, afin d’éviter l’utilisation de ces fonds, par malveillance ou négligence, à des fins terroristes; exige que toutes ces mesures soient mises en œuvre dans le cadre de programmes spécifiques contre l’islamophobie, en vue d’éviter l’augmentation du nombre de crimes de haine et d’attaques perpétrées contre des musulmans ou de tout autre type d’attaque raciste et xénophobe à caractère religieux ou ethnique;

q)

invite les États membres à davantage surveiller et réglementer les pratiques traditionnelles en matière de transfert de fonds (comme l’hawala ou le fei ch’ien chinois, entre autres) ou les systèmes informels de transfert de fonds, par l’intermédiaire de la procédure en cours en vue de l’adoption d’un règlement relatif aux contrôles d’argent liquide entrant dans l’Union ou sortant de l’Union (2016/0413(COD)), en instaurant une obligation, pour les agents chargés des opérations, de déclarer aux autorités compétentes toutes les opérations importantes réalisées dans le cadre de ces systèmes, tout en insistant, en communiquant avec les groupes concernés par ces mesures, sur le fait qu’il ne s’agit pas d’engager des poursuites au regard des virements effectués au moyen de ce système traditionnel dans le cadre familial, mais bien de contrôler les possibles agissements des organisations criminelles, le financement du terrorisme ainsi que les retombées industrielles et commerciales de l’argent sale; demande à cet égard:

i)

que tout intermédiaire ou personne participant à de telles activités (contrôleurs, agents de change, intermédiaires, facilitateurs, coordonnateurs, collecteurs, opérateurs de transfert) soit tenu de s’enregistrer auprès des autorités nationales compétentes;

ii)

que toutes les opérations soient déclarées et documentées de manière à faciliter la transmission des informations lorsque la demande en est faite;

iii)

que soient instaurées des sanctions dissuasives pour les intermédiaires ou les personnes qui interviennent dans des activités non déclarées;

r)

invite la Commission à proposer la législation requise pour mieux contrôler l’ensemble des opérations financières électroniques et les entreprises émettrices de monnaie électronique, y compris leurs intermédiaires, afin d’en interdire la transformation par des utilisateurs non identifiés tels que les utilisateurs de réseaux publics ou de systèmes de navigation anonymes; préconise, à cet égard, que l’échange de crypto-monnaie contre des espèces, ou vice-versa, ait obligatoirement lieu par le truchement d’un compte bancaire identifié; invite la Commission à réaliser une évaluation des implications pour le financement du terrorisme des activités liées aux jeux en ligne, des monnaies virtuelles, des crypto-monnaies, de la chaîne de blocs et des technologies financières; invite en outre la Commission à envisager des mesures éventuelles, y compris législatives, visant à instaurer un cadre réglementaire pour ces activités afin de limiter les instruments permettant de financer le terrorisme;

s)

invite la Commission et les États membres à exercer un suivi plus rigoureux concernant la réglementation et le contrôle du trafic d’or, de pierres précieuses et de métaux précieux afin d’éviter que ces biens ne soient utilisés pour financer des activités terroristes; appelle de ses vœux l’établissement de critères convenus et respectés par les États membres; invite la Commission et les États membres à interdire et sanctionner tout trafic commercial (exportations et importations) avec des zones contrôlées par des djihadistes, à l’exception des biens humanitaires nécessaires à la population assujettie; demande des poursuites et des sanctions pour imprudence ou malveillance à l’encontre de toutes les personnes (physiques ou morales) qui participent à de tels trafics, quelle que soit leur forme (achat, vente, distribution, intermédiation ou autre); fait observer que les services de transmission de fonds présentent des risques spécifiques de financement du terrorisme; invite les États membres à instaurer un partenariat et une coopération renforcés entre les agents chargés de la transmission de fonds et les autorités répressives européennes ainsi qu’à émettre des orientations pour le recensement et l’élimination de tous les obstacles spécifiques à l’échange d’information concernant les transferts de fonds suspects;

t)

salue la proposition de règlement concernant les importations de biens culturels et souligne son importance dans la lutte contre l’importation illégale de ces biens afin de financer le terrorisme; invite la Commission à introduire un certificat de traçabilité pour les objets d’art et les antiquités qui entrent sur le marché de l’Union, en particulier pour les objets en provenance de territoires sous l’emprise de tout acteur armé non étatique ou d’organisations, de groupes ou de personnes inscrits sur la liste des organisations terroristes établie par l’Union; invite la Commission à intensifier sa coopération avec les organisations internationales telles que les Nations unies, l'Unesco, Interpol, l'Organisation mondiale des douanes et le Conseil international des musées, afin de renforcer la lutte contre le trafic illicite de biens culturels utilisé pour financer le terrorisme; invite les États membres à mettre en place des unités de police spécialisées dans le trafic de biens culturels et à coordonner l’action entre celles-ci à travers les États membres; préconise que les États membres imposent aux entreprises du marché de l’art de déclarer toute transaction suspecte et appliquent, le cas échéant, des sanctions efficaces, proportionnées et dissuasives en cas de participation involontaire au financement du terrorisme à l’encontre des responsables d’entreprises qui font le commerce d’objets d’art et d’antiquités impliqués dans le trafic de ce type de biens; invite la Commission à soutenir davantage les efforts déployés par les pays tiers, en particulier les États voisins, pour lutter contre la criminalité et le trafic de stupéfiants et le trafic, qui permettent de financer le terrorisme;

u)

invite la Commission à proposer des mesures visant à accroître la transparence de la provenance, du transport et du courtage des marchandises, en particulier des produits pétrochimiques, afin de renforcer la traçabilité et de mettre un terme au financement non intentionnel d’organisations terroristes;

v)

invite la Commission à envisager la possibilité de modifier les règlements et directives concernés pour que les organismes financiers soient tenus de s’informer des motifs qui justifient l’exécution d’opérations suspectes d’un montant élevé ou moindre afin de détecter le paiement de rançons à des organisations terroristes; invite les États membres à prendre des mesures préventives en ciblant les opérateurs économiques présents dans les zones à risques pour les aider dans la poursuite de leurs activités;

w)

presse le SEAE de désigner un spécialiste du renseignement financier dans le cadre de la nouvelle mission de politique de sécurité et de défense commune en Iraq afin que celui-ci apporte son soutien au gouvernement iraquien pour empêcher que les avoirs de l’EIIL/Daech et d’Al-Qaïda ne soient exfiltrés du pays ainsi que pour l’aider à élaborer des programmes de lutte contre le blanchiment de capitaux;

x)

demande à la Commission et aux États membres, dans le cadre des dialogues sur la lutte contre le terrorisme qu'ils entretiennent avec des États tiers partenaires, de concentrer leurs efforts sur la coopération policière et judiciaire ainsi que sur l'échange de données et de bonnes pratiques pour renforcer les synergies au niveau mondial dans la lutte contre le financement du terrorisme;

y)

salue la création d’un réseau d’experts en matière de lutte contre le terrorisme au sein des délégations de l’Union européenne; demande que ce réseau soit consolidé et étendu à davantage de régions, en particulier à la Corne de l’Afrique et à l’Asie du Sud-Est; souligne qu’il importe d’inclure les objectifs de lutte antiterroriste dans les mandats des missions et des opérations de la PSDC de l’Union européenne, en particulier en Libye, au Sahel, dans la Corne de l’Afrique et au Proche-Orient; prie instamment le SEAE de nommer un expert du renseignement financier dans le cadre de ses missions PSDC dans les pays susceptibles de servir de base arrière à des groupes terroristes et dans la région du Sahel, et de mettre en place une coopération étroite et effective avec les autorités locales;

z)

invite la Commission et les États membres à intensifier leur action afin d'encourager les États tiers partenaires à signer et à ratifier la convention internationale pour la répression du financement du terrorisme de 1999 qui définit certains principes et standards pour l'éradication du financement du terrorisme, ainsi qu'à la mettre en œuvre de manière effective;

aa)

souligne qu’il est essentiel de répondre aux revendications socio-économiques et de les atténuer, de favoriser la viabilité des États et de garantir le respect des droits de l’homme afin de réduire les chances qu’ont l’EIIL/Daech, Al-Qaïda et d’autres groupes djihadistes d’y prospérer, y compris du point de vue de leur capacité à parvenir à l’indépendance financière;

ab)

demande instamment à la haute représentante et au SEAE de renforcer la coopération avec les pays où sont détenus les fonds provenant du trafic de drogues, de la traite des êtres humains et du trafic de marchandises commerciales, ainsi qu’avec les pays d’origine des cigarettes illicites, en vue de leur saisie;

ac)

demande instamment à la haute représentante et au SEAE de mener des initiatives au sein d’enceintes internationales afin d’améliorer la transparence de l’actionnariat des sociétés, notamment par la création d’un registre public des personnes morales, y compris les entreprises, les trusts et les fondations, et d’un registre central des comptes bancaires, des instruments financiers, des biens immobiliers, des contrats d’assurance-vie et d’autres actifs pertinents qui pourraient être utilisés à des fins de blanchiment d’argent ou pour financer le terrorisme;

ad)

invite le Conseil et la Commission à établir et à mettre en œuvre un mécanisme de rapports de référence annuels au Parlement portant sur les mesures prises par les États membres et la Commission pour lutter contre le financement du terrorisme;

ae)

prie instamment la haute représentante et le SEAE de soutenir les efforts nationaux déployés par nos partenaires étrangers afin de réduire les flux de capitaux provenant de particuliers vers les organisations dont on estime qu’elles fournissent une aide et des ressources aux terroristes;

af)

exhorte les États membres d’adopter sans tarder les propositions de réforme de la TVA présentées par la Commission afin d’empêcher les organisations criminelles d’exploiter les lacunes du système européen de TVA pour financer le terrorisme et d’autres activités criminelles;

ag)

salue la proposition de règlement de la Commission concernant la reconnaissance mutuelle des décisions de gel et de confiscation;

ah)

réaffirme que la lutte contre l’EIIL/Daech et les autres groupes djihadistes et leur destruction, que ce soit sur le plan financier, militaire ou idéologique, doivent continuer de figurer au premier rang des priorités en matière de sécurité et de défense; invite le SEAE à mettre à profit ses relations diplomatiques avec les États de cette région pour souligner l’intérêt commun que présente cette stratégie pour l’Union européenne et pour les acteurs régionaux;

2.

charge son Président de transmettre la présente recommandation au Conseil, à la Commission, à la vice-présidente de la Commission/haute représentante de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, ainsi qu’aux États membres.

(1)  Textes adoptés de cette date, P8_TA(2016)0422.

(2)  JO C 346 du 21.9.2016, p. 55.

(3)  JO L 169 du 8.7.2003, p. 6.

(4)  JO L 141 du 5.6.2015, p. 73.

(5)  JO L 132 du 29.5.2015, p. 1.

(6)  JO L 88 du 31.3.2017, p. 6.

(7)  JO L 119 du 4.5.2016, p. 89.

(8)  http://europa.eu/rapid/press-release_IP-17-3441_fr.htm