15.2.2019   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 62/189


Avis du Comité économique et social européen sur la «Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil établissant le Fonds pour la sécurité intérieure»

[COM(2018) 472 final — 2018/0250 (COD)]

(2019/C 62/31)

Rapporteur:

José Antonio MORENO DÍAZ

Saisine

Parlement européen, 2.7.2018

Conseil, 25.7.2018

Base juridique

Article 82, paragraphe 1, article 84, article 87, paragraphe 2, et article 304 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne

 

 

Compétence:

Section spécialisée «Emploi, affaires sociales et citoyenneté»

Adoption en section spécialisée

26.9.2018

Adoption en session plénière

18.10.2018

Session plénière no

538

Résultat du vote

(pour/contre/abstentions)

141/3/4

1.   Conclusions et recommandations

1.1.

Le Comité économique et social européen (CESE) souscrit à la nécessité de conférer davantage de moyens aux actions et programmes opérationnels et de prévention en matière de sécurité, ainsi qu’à la création à cet effet d’un fonds souple et transparent, dont la répartition réponde à des critères opérationnels et à ses finalités, établis avec clarté et prévisibilité, visant à renforcer lesdits actions et programmes.

1.2.

L’articulation du Fonds de sécurité doit permettre d’approfondir une politique préventive. Il est à cette fin indispensable de pouvoir compter sur la société civile et de coopérer activement avec elle, s’agissant notamment de prêter assistance aux victimes et de les aider à s’organiser, de la surveillance des acteurs de la sécurité et de la prévention de la radicalisation.

1.3.

Les crédits du Fonds, qu’ils soient destinés à des pays de l’Union ou à des pays tiers, doivent exclusivement être octroyés à des institutions publiques garantissant effectivement un respect scrupuleux des droits de l’homme.

1.4.

Le CESE doit être pris en compte en tant qu’observateur lors de la création et du développement de ce Fonds afin que l’opinion de la société civile organisée puisse valablement se faire entendre au niveau de l’Union européenne.

1.5.

Nous attirons l’attention sur la nécessité de prendre en considération le risque que représente la radicalisation violente de groupes d’extrême droite.

1.6.

Nous attirons l’attention sur la nécessité de s’attaquer aux mécanismes de financement et aux flux de capitaux des groupes criminels organisés.

1.7.

Le CESE estime qu’il est nécessaire de dépasser l’action purement réactive et d’aller plus loin dans les politiques préventives, en se penchant sur les causes profondes qui font que certaines personnes se radicalisent pour représenter une menace pour leurs congénères, ainsi que sur les mécanismes de financement des groupes violents.

1.8.

Les droits de l’homme, en partant de la même philosophie que celle sur laquelle se fonde l’Union, doivent être partie intégrante et condition nécessaire de toute action. Ainsi, dans le cas d’un fonds de financement, les dotations du Fonds devraient être refusées à tout organisme ne se conformant pas à ces normes minimales. Il en est ainsi s’agissant de la récente proposition de la Commission (1) relative à des mesures financières pour garantir l’état de droit dans les États membres, ainsi que du groupe sur les droits fondamentaux et l’état de droit constitué au sein du CESE.

2.   Texte de la proposition

2.1.

Le présent document reprend à son compte, à des fins méthodologiques, le contenu de l’article 2 de la proposition de la Commission en ce qui concerne les définitions des différents concepts entrant en jeu dans son développement.

2.2.

Le CESE partage le constat formulé dans la proposition à l’examen, à partir de la base que constitue la réalité des menaces pour la sécurité en Europe, lesquelles se sont intensifiées et diversifiées au cours des dernières années sous la forme d’attentats terroristes, de nouvelles formes de criminalité organisée et de cybercriminalité.

2.3.

La sécurité revêt une dimension intrinsèquement transfrontière et exige dès lors de la part de l’Union européenne une réponse ferme et coordonnée: outre la sécurité intérieure, l’Union européenne doit faire face à des menaces extérieures complexes qu’aucun État membre ne peut affronter seul.

2.4.

La sécurité demeurera un thème central pour l’Union européenne dans les années à venir, et les citoyens européens attendent de l’Union et de leurs gouvernements nationaux qu’ils leur procurent la sécurité dans un monde incertain et en mutation rapide. Ainsi, il est souhaitable de procéder à des actions dans le domaine éducatif et pédagogique sur la prévention de comportements violents, notamment par le biais des manuels et du matériel scolaires, en privilégiant une vision fondée sur le respect des droits fondamentaux, du pluralisme et de la diversité.

2.5.

Il est clair que les défis auxquels est confrontée l’Union européenne, en particulier le terrorisme international, ne peuvent être traités individuellement par les États membres et sans le soutien financier et technique de l’Union européenne. À une époque où le terrorisme (qu’il soit issu de l’extérieur de nos frontières ou qu’il soit d’origine interne, qu’il soit religieux ou relevant de l’extrémisme politique, en particulier d’extrême droite) ainsi que d’autres menaces découlant du trafic de stupéfiants, de la traite des êtres humains en vue de leur exploitation et d’autres formes graves de criminalité ne connaissent pas les frontières, il incombe aux États membres d’assurer la sécurité publique de leurs citoyens dans le plein respect des droits fondamentaux consacrés par les textes de l’Union européenne et par les traités internationaux.

2.6.

L’Union européenne peut et doit étayer ces mesures et, à cet égard, les traités prévoient la nécessité d’assurer un niveau élevé de sécurité, notamment par des mesures préventives et par une coordination et une coopération entre autorités policières et judiciaires et autres autorités compétentes, comme les agences décentralisées.

2.7.

L’Agence de l’Union européenne pour la coopération des services répressifs (Europol), l’Agence de l’Union européenne pour la formation des services répressifs (CEPOL) et l’Observatoire européen des drogues et des toxicomanies (OEDT), remplissent des fonctions clés sur le plan opérationnel ainsi qu’en matière de coordination et d’appui dans la mise en œuvre des priorités, des objectifs et des activités de l’Union européenne dans le domaine de la sécurité.

2.8.

Le Fonds pour la sécurité intérieure est créé pour faciliter la coopération et l’échange d’informations transfrontières entre les agents des services répressifs des États membres et d’autres autorités concernées. Cette coopération se concrétisera notamment par l’interopérabilité des différents systèmes informatiques de l’Union européenne concernant la sécurité, rendant plus efficace et efficiente la gestion des frontières et des flux migratoires, ainsi que par des actions opérationnelles conjointes et des aides à la formation, à la construction d’installations essentielles liées à la sécurité, à la mise en place de la collecte et du traitement des données des dossiers passagers en conformité avec l’acquis correspondant de l’Union européenne et à l’achat des équipements techniques nécessaires.

2.9.

Le Fonds vise à intensifier la coopération opérationnelle transfrontière en matière de prévention, de détection et de recherche d’infractions pénales transfrontières, et à soutenir les efforts destinés à renforcer les capacités de prévention de cette forme de criminalité, y compris le terrorisme, notamment grâce à une coopération accrue entre les pouvoirs publics, la société civile et les partenaires privés dans tous les États membres.

2.10.

Le fait que la société civile se soit jointe aux préoccupations exprimées en matière de sécurité s’est révélé très utile, et nécessaire, s’agissant d’améliorer le respect des droits fondamentaux, de veiller à éviter tout excès de pouvoir de la part des autorités, et de dénoncer certains comportements indésirables, mais qui sont une tentation constante. Dans le cadre démocratique qui est le nôtre, nous ne pouvons nous laisser mener par un souci d’efficacité à tout prix relevant d’une perspective exclusivement sécuritaire. Par conséquent, le Fonds en cours de création doit être ouvert au financement de programmes susceptibles de renforcer cette surveillance et de soutenir les structures juridiques propres à soumettre l’action des forces de sécurité à un contrôle indépendant par les juridictions compétentes. Il en va de même s’agissant de sa tâche indispensable en matière de prévention de la radicalisation, de formation et de sensibilisation de la société.

2.11.

Les organisations non gouvernementales et le reste de la société civile apportent déjà une contribution considérable et de qualité à la sécurité, notamment par les actions suivantes:

prévention et poursuite d’actions excessives ou peu respectueuses des droits de l’homme par les forces de sécurité des États membres,

prévention et poursuite de la radicalisation idéologique dans tous les domaines,

sensibilisation de la société en faveur des victimes, intégration sociale et soutien de celles-ci,

articulation de l’organisation et capacité d’intervention et de proposition des victimes et de tous ceux qui se montrent solidaires avec elles, ainsi que de toutes les personnes concernées par la problématique de la sécurité,

intervention dans le domaine de l’éducation, en particulier des plus jeunes, au titre d’une fonction essentielle de sensibilisation, d’une part, et de prévention de la radicalisation, de l’autre,

de nombreuses autres actions qui profitent indirectement à la sécurité tant intérieure qu’extérieure, telles que celles déjà citées de surveillance de l’action des forces de sécurité, d’éducation et de sensibilisation, de protection et d’organisation des victimes, etc.,

il convient, dans cette perspective, que la société civile exerce un suivi continu de l’utilisation du Fonds.

2.12.

Toute cette gamme d’actions doit bénéficier d’un soutien direct de la part des autorités de l’Union; de plus, étant donné qu’elle contribue à garantir la sécurité, elle doit également se voir affecter des crédits de l’enveloppe susmentionnée.

2.13.

Tant l’Union européenne que les États membres doivent également être conscients du fait que certaines organisations de la société civile peuvent — de manière directe ou indirecte — promouvoir des discours ou des agissements qui portent atteinte aux valeurs et droits de l’Union européenne.

2.14.

La présente proposition vise avant tout à accroître la flexibilité dans la gestion du futur Fonds, par rapport à la présente période de programmation. Il est également important de se doter des outils nécessaires pour que les financements servent les priorités de l’Union et les actions qui présentent une forte valeur ajoutée pour celle-ci. Étant donné qu’il faudra de nouveaux mécanismes d’attribution des fonds entre les régimes de gestion directe, indirecte et partagée pour faire face aux nouveaux défis et priorités, ces mécanismes devraient aussi permettre la participation des membres actifs de la société civile mentionnés au point précédent, avec les finalités visées. Nous proposons dès lors que le CESE soit pris en compte en tant qu’observateur lors de la création et du développement de ce Fonds afin que l’opinion de la société civile organisée puisse valablement se faire entendre au niveau de l’Union européenne.

2.15.

Compte tenu de l’importance de la dotation du Fonds (2 500 000 000 EUR), les critères de répartition de ces crédits doivent être clarifiés. Il y a lieu de maintenir la souplesse qui s’impose, sans que cela n’empêche de préciser clairement les lignes budgétaires entre lesquelles seront répartis les crédits.

2.16.

Ces lignes budgétaires devront suivre un critère de simplicité qui évite que l’accès au Fonds ne soit soumis à des contraintes bureaucratiques excessives, et elles seront régies par le principe de la confiance mutuelle. La clarté et la prévisibilité en la matière contribueront à faire en sorte que les responsables des différents États puissent lancer des actions de «task-force» ou d’intervention rapide, avec la garantie qu’elles seront couvertes ou soutenues par les dotations du Fonds.

2.17.

Le CESE accueille favorablement la proposition; il considère comme opportune la création d’un Fonds pour la sécurité intérieure sur la base de l’article 3, paragraphe 2, du traité sur l’Union européenne, que justifient en outre les objectifs visés à l’article 67 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE), dans le respect des principes de solidarité et de partage équitable des responsabilités énoncés à l’article 80 du TFUE ainsi que des principes de subsidiarité — s’agissant d’une compétence non exclusive — et de proportionnalité, au moyen d’un règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à la création d’un Fonds pour la sécurité intérieure.

2.18.

En tout état de cause, la création d’un Fonds pour la sécurité intérieure vise à fournir un instrument complémentaire au travail des agences et des fonds dont dispose déjà l’Union, ainsi qu’à celui des organismes existants à l’échelon national; l’objectif général du Fonds est de contribuer à un niveau de sécurité élevé dans l’Union, notamment en s’attaquant au terrorisme et à la radicalisation, à la grande criminalité organisée et à la cybercriminalité, de même qu’en aidant et protégeant les victimes de la criminalité. À cet effet, le Fonds contribue à la réalisation des objectifs spécifiques suivants: l’échange d’informations, l’intensification des opérations transfrontières conjointes et le renforcement des capacités à des fins de prévention, dans le cadre d’une collaboration constante entre les différents pouvoirs publics, la société civile et les partenaires privés dans les États membres (2). À cet égard, il importe également de s’attaquer aux mécanismes de financement et aux flux de capitaux des organisations criminelles, ce dont le Fonds doit tenir compte dans ce chapitre.

2.19.

Enfin, il y a lieu de rappeler que le CESE a participé en qualité d’observateur au groupe de haut niveau sur la prévention de la radicalisation mis en place par la Commission européenne en 2017 (3).

3.   Recommandations

3.1.

Le Fonds devrait s’interroger sur les causes profondes pour lesquelles certaines personnes s’établissent et s’organisent en groupes qui représentent une menace pour leurs congénères, au moyen d’études et de recherches de fond servant à prévenir les situations objectives.

3.2.

La création du Fonds repose sur les investissements et les avancées qui l’ont précédé, tels que le programme «Sécurité et protection des libertés», l’instrument pour la coopération policière et le volet politique en matière de drogue du programme «Justice». En tout état de cause, il y a lieu d’approfondir l’affirmation selon laquelle «[l]e mécanisme permettra de traiter des priorités nouvelles ou de prendre des mesures urgentes et de les mettre en œuvre par le mode de mise à disposition le mieux adapté à la réalisation de l’objectif» (4). L’innovation est une priorité, notamment lorsque les groupes contre lesquels on lutte sont très innovants.

3.3.

Les critères de répartition du Fonds devraient être purement opérationnels, de manière à financer des actions et des programmes indépendamment de critères tels que le nombre d’habitants ou la superficie du pays. Une autre considération primordiale est la transparence totale de la dotation et du fonctionnement du Fonds, qui sera ouvert aux médias et à la société civile de manière à ce qu’ils puissent contrôler le respect des conditions imposées pour disposer des crédits afférents.

3.4.

Il importe également de prévoir lors de la mise en place du Fonds une évaluation future de son importance et de son efficacité, par la réalisation à intervalles réguliers d’une étude actualisée sur sa situation générale qui permettra d’en apprécier l’évolution.

3.5.

Le Comité économique et social souhaite attirer l’attention sur plusieurs de ces nouvelles priorités qui, bien que n’étant pas reprises dans le document, méritent une prise en compte spécifique dans la mesure où elles sont susceptibles de constituer un aspect important de l’objectif de prévention de la radicalisation, en particulier, problème qui peut même faire l’objet d’une certaine complicité de la part de certaines autorités.

3.6.

Sont visés ici en l’état les mouvements d’extrême droite ou d’ultradroite, néonazis, antisémites, de suprématie blanche ou de toute autre forme d’apologie de la discrimination sur la base de la race, de l’origine, du sexe, etc., qui constituent une menace réelle pour la sécurité et pour l’état de droit lui-même, et qui sont de la compétence de l’Union, dans la mesure notamment où ces mouvements, en dépit de leurs motivations ultranationalistes, commencent à percevoir l’intérêt de s’internationaliser et de coordonner leurs activités avec des membres de même obédience dans d’autres pays (5).

3.7.

La protection et l’aide aux victimes des réseaux de traite des êtres humains semblent être subordonnées à une coopération effective et efficace en ce qui concerne la poursuite des responsables de ces agissements. Cela étant, l’objectif fondamental des travaux de l’Union et du Fonds est de protéger les victimes, et l’on ne saurait faire dépendre la protection de ces dernières de la qualité de la collaboration qu’elles apportent aux poursuites à l’encontre des responsables de leurs maux.

3.8.

Il ne fait cependant aucun doute que la nécessaire allocation de moyens financiers du Fonds en cours de création, tant aux victimes directement qu’aux institutions qui contribuent à leur protection et à leur intégration, induira de manière naturelle cette coopération et profitera, ne serait-ce qu’à moyen terme, aux actions de répression et de prévention.

3.9.

La prévention de la radicalisation est un volet important; nous ne pouvons pas nous permettre de couvrir uniquement le spectre d’une éventuelle radicalisation dans une seule direction en ayant à l’esprit les attentats les plus graves survenus au cours des dernières années, commis par des groupes islamistes extrémistes; il y a lieu d’être très attentifs à l’extrémisme politique et idéologique, dont le terreau et la croissance sont complètement différents, ainsi que leurs victimes potentielles.

3.10.

Un autre point sur lequel le CESE se doit d’apporter une note critique à la proposition est celui des évaluations ex post, des consultations des parties intéressées et des analyses d’impact. À l’évidence, du point de vue de l’efficacité par rapport aux objectifs des instruments mis en œuvre, il y a lieu de se féliciter de leurs coûts, de leur logique, de leur pertinence, de leur cohérence et de leur complémentarité. Toutefois, l’analyse ne comporte pas d’évaluation visant à déterminer si ces instruments ont contribué à améliorer, outre la coopération, l’échange de connaissances et de bonnes pratiques et la confiance entre les pouvoirs publics, les aspects liés aux droits fondamentaux, auxquels la proposition ne consacre même pas ne serait-ce qu’un petit paragraphe, mais un simple engagement de pure forme, à la fin de l’article 3.

3.11.

Compte tenu des tensions historiques entre sécurité et droits fondamentaux, un instrument comme celui qui est proposé, visant au renforcement de la sécurité, pour nécessaire qu’il soit, doit comporter des objectifs spécifiques d’amélioration du respect des droits fondamentaux dans le cadre de la sécurité. Il ne faut jamais tolérer que l’amélioration de la sécurité se fasse au détriment des droits fondamentaux.

3.12.

Dans le cas où un pays, qu’il appartienne ou non à l’Union, n’atteste pas la pertinence de cet instrument dans l’action de ses services répressifs, refuse de recevoir la formation appropriée ou n’accepte pas de se soumettre à des mécanismes de contrôle de leur action au titre de ce chapitre, il ne doit pas bénéficier de financements du Fonds et doit être exclu de celui-ci. Le respect de normes minimales en matière de respect des droits de l’homme doit être une condition sine qua non pour pouvoir bénéficier d’un soutien des autres membres de l’Union, que ce soit par l’intermédiaire du Fonds de sécurité ou de tout autre mécanisme de solidarité.

3.13.

Concernant le paragraphe relatif à la cohérence avec les autres politiques de l’Union, il convient d’attirer l’attention sur la nécessaire création d’une synergie et d’une cohérence avec le Fonds «Asile, migration et intégration», le Fonds pour la gestion intégrée des frontières et l’Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes. C’est précisément à cet égard que l’on s’interroge sur la priorité excessive accordée par ces fonds et par l’Agence à l’objectif de sécurité par rapport à d’autres tâches relevant de la responsabilité de l’ensemble des autorités et des acteurs européens, dans le droit fil de l’appel déjà lancé en faveur d’une plus grande prise de conscience débouchant sur de meilleures garanties concernant le respect des droits fondamentaux.

3.14.

Le Fonds est et doit rester ouvert s’agissant de soutenir des actions de coopération avec des pays tiers. Les crédits afférents ne peuvent cependant être attribués directement aux autorités de ces pays, mais à des travaux et à des programmes réalisés en commun entre les autorités des États membres et des pays tiers. La coopération doit être totalement subordonnée au contrôle du financement octroyé par le Fonds, au respect des droits de l’homme par les pays bénéficiaires de cette coopération, et surtout au caractère public des entités collaboratrices pouvant bénéficier d’un tel financement, lesquelles doivent être contrôlées et gérées par l’État. Il convient d’éviter à tout prix que les crédits provenant du Fonds servent, en définitive, à financer des groupes ou des groupuscules incontrôlés, voire susceptibles de devenir un risque pour la sécurité dans leur pays ou dans l’Union elle-même.

3.15.

Les instruments internationaux en matière de droit de la mer, ainsi que la convention de Genève relative au statut des réfugiés et les autres textes relatifs à la protection des personnes qui se trouvent dans la situation difficile de franchir des frontières par des canaux non conventionnels font obligation à l’Union européenne et à tous ses membres de mettre le sauvetage en mer au cœur des préoccupations de leur politique en matière de sécurité des frontières et d’accueillir dans les ports plus proches les rescapés et les passagers clandestins qui arrivent au port, de respecter leurs droits fondamentaux et d’appliquer à ces personnes les procédures de refoulement ou de rapatriement avec toutes les garanties précises de leurs droits, en particulier du droit à la reconnaissance de leur statut de réfugié. Le Fonds devrait également être utilisé à ces fins, tant à travers le financement des besoins des États que dans le cadre du soutien à la société civile, comme expliqué ci-dessus.

Bruxelles, le 18 octobre 2018.

Le président du Comité économique et social européen

Luca JAHIER


(1)  COM(2018) 324 final.

(2)  Article 3, paragraphes 1 et 2, de la proposition.

(3)  Rapport final du groupe d’experts de haut niveau sur la prévention de la radicalisation (HLCEG-R).

(4)  Page 3 de l’exposé des motifs de la proposition.

(5)  Rapport final du groupe d’experts de haut niveau sur la prévention de la radicalisation (HLCEG-R); recommandations politiques. 2.5 en matière d’idéologie et de polarisation, le groupe reconnaît qu’il faut également prêter attention à la montée de l’extrémisme de droite et à la tendance prononcée à la polarisation dans la société.