12.10.2017   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 342/1


Avis du Comité européen des régions — La dimension locale et régionale du programme Horizon 2020 et le nouveau programme-cadre de recherche et d’innovation

(2017/C 342/01)

Rapporteur:

Christophe CLERGEAU (FR/PSE), conseiller régional des Pays de la Loire

RECOMMANDATIONS POLITIQUES

LE COMITÉ EUROPÉEN DES RÉGIONS (CdR)

A)   LA RECHERCHE ET L’INNOVATION (R&I) EUROPÉENNE: UNE AMBITION QUI DOIT ÊTRE RENFORCÉE AU-DELÀ DU PROGRAMME-CADRE

Réaffirmer la place du programme-cadre dans la réalisation de l’espace européen de la recherche et des objectifs de la stratégie Europe 2020

1.

salue le formidable succès de la politique européenne de recherche déployée à travers les programmes cadres successifs jusqu’à Horizon 2020, le plus important programme intégré de recherche du monde, fondé sur l’excellence scientifique et l’accélération des innovations;

2.

rappelle qu’Horizon 2020 est le principal outil de soutien au développement de la recherche et de l’innovation en Europe au sein d’une stratégie globale Europe 2020 et au service de la réalisation de l’Espace européen de la recherche (EER);

3.

réaffirme la pertinence de la stratégie Europe 2020 qui propose une approche consolidée du «triangle de la connaissance» (recherche — formation — innovation), étant entendu que le changement de l’esprit d’apprentissage et l’élévation du niveau de formation pour tous restent essentiels et qu’il y a lieu de stimuler la collaboration entre universités et entreprises; suggère par ailleurs de rechercher une plus grande articulation et complémentarité avec les programmes Erasmus+ et Interreg, y inclus Interreg Europe, voué à la coopération interrégionale; souligne que la réalisation de l’EER doit être poursuivie et passe par l’atteinte d’objectifs multiples dont l’excellence scientifique est un volet crucial et indispensable mais non exclusif;

4.

souligne l’actualité des objectifs de l’EER et l’intérêt de poursuivre leur réalisation, concernant notamment le développement des coopérations transnationales, la mobilité des connaissances, un marché du travail unifié des chercheurs et innovateurs, l’égalité entre femmes et hommes ou l’accès à l’information et à la science;

5.

propose qu’en vue d’ancrer le projet de construction d’une Europe de la connaissance, l’on procède à un recensement des talents européens et à un suivi de la carrière des chercheurs, que l’on établisse des parcours européens qui leur permettent de bénéficier de programmes d’appui à leur carrière de recherche durant les phases de transition et que l’on renforce leur intégration dans le monde de l’entreprise;

6.

refuse de limiter le débat budgétaire au seul programme-cadre. Selon les modes d’évaluation, la part de la politique de cohésion consacrée à la recherche et l’innovation (R&I) varie entre 43 et 110 milliards d’euros, sans compter les contributions importantes des autres politiques sectorielles et du plan Juncker;

Pour un retour de l’innovation et de la recherche au rang des priorités politiques et budgétaires

7.

demande le retour de l’innovation et de la recherche au premier rang des priorités dans le cadre du débat sur l’avenir de l’Europe et des priorités énoncées par la Déclaration de Rome (1), un renforcement de la gouvernance transversale des questions de recherche, d’innovation et de formation au sein de l’Union, ainsi qu’un accroissement de l’effort budgétaire global consacré par l’Union européenne à la R&I à travers l’ensemble de ces politiques, au sein du cadre financier pluriannuel actuel et du suivant. Dans ce cadre d’ensemble, et en cohérence avec le projet de rapport du Parlement européen (2) et le rapport du groupe d’experts indépendants à haut niveau sur la maximisation de l’impact des programmes R&I (Rapport Lamy) (3), le budget du futur programme-cadre doit être considérablement augmenté pour garder au minimum la dynamique de croissance du programme-cadre actuel (4). En tout état de cause, l’impulsion qu’il convient de donner à la recherche et l’innovation ne devra pas porter préjudice à l’importance de la politique de cohésion, qui reste l’outil-clé de financement de l’Union européenne pour la réalisation de la cohésion économique et sociale et la convergence entre ses territoires. Tout le potentiel des moyens d’action des politiques de cohésion et de la R&D devra être mobilisé et combiné afin de stimuler le développement régional;

8.

appelle à une nouvelle ambition collective qui ne porte pas seulement sur l’excellence scientifique en Europe mais aussi sur l’excellence scientifique et la capacité d’innovation de l’Europe toute entière, en mobilisant l’ensemble des potentiels de tous ses territoires, en contribuant au renforcement de leurs capacités et en promouvant une innovation ouverte et collaborative;

9.

considère que cette ambition est d’autant plus nécessaire dans le contexte d’une mondialisation dont les effets restent à maîtriser, notamment à l’échelle locale et régionale, et face à laquelle la recherche et l’innovation sont facteurs de résilience, de haute valeur ajoutée et de compétitivité durable;

10.

entend promouvoir une approche holistique des financements européens, nationaux et régionaux sans laquelle cette ambition et le débat budgétaire européen n’auraient pas de sens; rappelle l’importance de l’objectif de 3 % du PIB consacrés à la R&I publique et privée qui a été fixé pour tous les États membres par la stratégie Europe 2020, stagnant à 2,03 % depuis 2015 et mis à mal par, entre autres, la baisse des crédits dans beaucoup d’entre eux. Considère à cet effet primordial de poursuivre le renforcement des systèmes R&I, en tenant compte du contexte de chaque pays et de chaque région, à travers une meilleure coordination des politiques au niveau européen et en stimulant les réformes nécessaires au niveau national et régional, y compris par le biais du semestre européen et des stratégies de spécialisation intelligente;

Clarifier le débat sur les synergies avec les autres politiques européennes

11.

considère nécessaire de clarifier le débat sur les synergies et propose cinq principes opérationnels qui pourraient être partagés entre l’Union, les États membres, les régions et les villes:

principe de cohérence: partager la gouvernance, le choix des grands objectifs, des stratégies et des projets phares;

principe de compatibilité: permettre de combiner et de rationaliser les ressources de manière simple et efficace en traitant notamment la question des aides d’État;

principe de complémentarité: assurer une claire répartition des rôles et une bonne continuité d’action dans le financement des différents volets des projets, et leur accompagnement en amont (renforcement des capacités, etc.) comme en aval (valorisation des résultats de la recherche, mise sur le marché, etc.);

principe de coconstruction: instituer une approche cohérente «financer ensemble implique de concevoir ensemble et piloter ensemble»;

principe d’écosystèmes: reconnaître le rôle des initiatives collectives locales;

B)   RÉNOVER LES FONDATIONS DU PROGRAMME-CADRE TOUT EN CONSERVANT SON ARCHITECTURE

Un programme ouvert et collaboratif au service de tous

12.

rappelle que la valeur ajoutée européenne du programme-cadre repose d’abord sur sa dimension collective et collaborative et sur sa contribution à la mise en réseau des chercheurs et des écosystèmes d’innovation. Cette dimension doit continuer à prévaloir sur le soutien aux projets individuels;

13.

s’inquiète de la baisse du taux de succès moyen des appels à propositions, qui est plus faible que dans le programme cadre précédent, entravant sérieusement sa diffusion dans les territoires. La nécessaire compétition propre à une démarche d’excellence ne doit pas se traduire par une exclusion et une concentration excessive;

14.

affirme que maintenir l’ouverture du programme-cadre est indispensable pour en garantir la diffusion dans toute l’Europe, dans ses territoires ainsi qu’auprès de ses citoyens; incite à innover plus fortement dans les outils du programme-cadre pour combiner excellence, inclusion et participation;

15.

rappelle l’importance de maintenir un équilibre entre recherche fondamentale et recherche proche de la mise sur le marché mais aussi entre recherche libre et recherche répondant à des questions posées par la société et les acteurs économiques, cela afin de viser aussi bien l’innovation incrémentale que l’innovation de rupture, les deux pouvant créer des activités nouvelles et des emplois;

16.

note la primauté donnée aujourd’hui aux projets à haut niveau de maturité technologique (TRL), qui privilégie l’innovation incrémentale en encourageant les chercheurs à se concentrer sur des idées arrivées à maturité qui peuvent être mises sur le marché à brève échéance. En même temps, fait valoir que le soutien aux projets se trouvant aux premiers niveaux de maturité technologique est aussi important pour introduire davantage d’innovation sur le marché. Souligne l’intérêt des innovations de rupture qui s’appuient sur des TRL plus bas et qui permettent de proposer vite de nouveaux produits et services sur le marché. Dans tous les cas, l’accompagnement des PME vers le marché et la création d’emplois durables devraient être une priorité-clé de la politique d’innovation. Cela doit être notamment le rôle d’un Conseil européen de l’innovation;

17.

demande une meilleure prise en compte de toutes les formes d’excellence et d’innovation, et rappelle que l’innovation non technologique et l’innovation sociale suscitent un besoin de nouvelles connaissances pouvant structurer de nouveaux domaines d’excellence;

18.

appuie la nécessité d’une pleine reconnaissance de l’innovation sociale, correspondant à des idées novatrices (produits, services et modèles) permettant de répondre à des besoins sociétaux au sens large du terme;

19.

souligne que la recherche et l’innovation ne sont pas axées exclusivement sur les entreprises mais concernent aussi les politiques publiques, la santé, la culture et la vie sociale, ainsi que l’économie sociale et les nouveaux modèles économiques, qui contribuent à la création de partenariats, activités et rapports sociaux d’un nouveau type. Par conséquent, l’exploitation des résultats de l’innovation ne doit pas se concentrer sur le seul concept de produit présentant une valeur économique sur le marché mais également sur celui de service qui présente une valeur sociale pour les citoyens;

Une nouvelle approche de l’excellence

20.

souligne que le terme d’excellence est utilisé pour qualifier des réalités très différentes; propose de distinguer les enjeux suivants auxquels doit contribuer le programme-cadre:

l’excellence de la science, d’abord basée sur le principe de collaboration, suivi par celui de la compétition;

l’excellence des projets scientifiques et d’innovation qui se caractérise aussi par leur impact et leur contribution au transfert de connaissances;

l’excellence des écosystèmes d’innovation et des collaborations entre acteurs diversifiés;

l’excellence de toute l’Europe et sa capacité globale d’innovation;

Une nouvelle approche de l’impact des projets

21.

suggère, dans l’évaluation de l’impact des projets, de prendre en compte, aussi bien durant la phase ex ante, dans le cas des propositions, que pendant la phase ex post, pour les projets autorisés:

l’impact scientifique, mesuré prioritairement par les citations;

l’impact par la diffusion et l’appropriation des résultats des projets;

l’impact par l’innovation ouverte et collaborative et le développement de nouveaux produits et services portés notamment par des PME;

l’impact sur les écosystèmes territoriaux d’innovation et leurs trois piliers de recherche, formation et innovation, ainsi que sur les territoires et leurs habitants, notamment sur l’emploi et le bien-être;

Une nouvelle approche de la place des territoires dans le programme-cadre

22.

suggère, afin de contribuer à promouvoir l’excellence sous toutes ses formes, un rôle accru dans le futur programme-cadre pour les territoires en tant que:

partenaires de la gouvernance globale de la politique de R&I en Europe et du programme-cadre;

pièces centrales des réseaux européens d’excellence des pôles («hubs») et écosystèmes d’innovation;

participants aux projets avec une implication facilitée;

acteurs principaux de l’innovation, de la valorisation et de la diffusion des résultats d’Horizon 2020;

animateurs du dialogue continu entre science et société;

Faire évoluer les défis de société pour renforcer leur pertinence et leur impact

23.

demande l’introduction de deux nouveaux défis de société pour développer une production scientifique d’excellence sur des défis majeurs pour l’avenir des sociétés européennes:

relever les défis de la stratégie européenne en matière de compétences: la formation tout au long de la vie au cœur du modèle social et de la performance de l’Europe;

la dynamique territoriale de production de valeur, d’innovation et d’emploi, de lien social, et de développement durable, y compris en lien avec les défis démographiques auxquels sont confrontées les régions de l’Union européenne;

24.

préconise de renforcer dans les défis de société la place de l’interdisciplinarité et des sciences humaines et sociales, ainsi que la prise de risque, pour faire émerger des idées et des solutions nouvelles notamment via l’introduction d’appels à projets blancs;

25.

encourage l’ouverture d’une nouvelle approche complémentaire fondée sur des missions, pour réussir des explorations et grands projets, et sur des focus transversaux sur le modèle des villes intelligentes, des questions environnementales ou des questions maritimes; réitère à cet effet la demande du Comité que soit adopté pour le prochain programme-cadre un objectif de 10 % des projets ayant un impact significatif sur la recherche marine et maritime (5);

Pour des modalités de participation favorables à une plus grande diversité de projets

26.

s’étonne que de nombreuses possibilités ouvertes par les règlements actuels ne soient pas suffisamment utilisées et propose plusieurs axes d’amélioration:

des appels à propositions plus larges et plus ouverts permettant l’expression de nouvelles approches;

davantage d’interdisciplinarité dans la formulation des appels à propositions de sorte que l’ensemble des connaissances, technologiques ou non, soient mobilisées;

une meilleure intégration des sciences humaines et sociales, aujourd’hui insuffisante;

un meilleur soutien aux réseaux et aux initiatives allant de la base vers le sommet;

plus de transparence et de responsabilité à tous les stades de la procédure d’évaluation et de sélection des projets et d’attribution des financements, ainsi que dans les retours permettant de modifier les projets en vue du succès d’une nouvelle candidature;

une incitation à associer davantage de nouveaux entrants dans les appels à propositions à destination des primo-participants;

un recours accru et cohérent aux financements en cascade, qui sont une modalité d’intervention à même d’atteindre des publics peu sensibilisés au programme-cadre;

une mise en place de procédures simplifiées visant à réduire les formalités administratives inutiles pour les utilisateurs finals;

27.

demande à la Commission de présenter les éléments d’évaluation permettant de justifier le niveau élevé du financement des grandes entreprises dans le cadre d’Horizon 2020, alors que leurs dépenses de R&D ont peu augmenté, et de proposer en conséquence des évolutions pour le prochain programme-cadre;

28.

insiste sur la nécessité de financer les activités de recherche par des subventions; déplore la tendance à remplacer les subventions par des prêts mais reconnaît que les projets à haut niveau de maturité technologique, proches des activités du marché, doivent pouvoir y avoir recours, parmi d’autres instruments;

29.

considère que le développement des outils financiers au service des objectifs du programme-cadre n’est justifié que s’ils permettent de couvrir, en partenariat avec les institutions financières, des risques élevés pour lesquels le marché est défaillant, sur le modèle par exemple de l’offre INNOVFIN; déplore la faible mobilisation actuelle du plan Juncker pour élargir la couverture de ce type de risque;

30.

attire l’attention sur la nécessité d’améliorer le financement des projets d’innovation pour les PME, en particulier dans le cadre des programmes Industrie 4.0, de façon à mieux structurer le tissu industriel de l’Union européenne, tout en créant une demande technologique interne qui favorise son développement;

C)   POUR UN PROGRAMME-CADRE QUI SOUTIEN UNE R&I ANCRÉE DANS TOUS LES TERRITOIRES

Favoriser une approche de l’excellence ancrée dans les territoires

31.

constate que l’excellence scientifique est inscrite dans des pôles et écosystèmes d’innovation. La plupart des bénéficiaires d’Horizon 2020 (universités, organismes de recherche, PME, organisations de la société civile) ont un ancrage profond dans leurs territoires et la qualité des territoires contribue à la qualité de la science. Cette réalité doit être pleinement reconnue dans le programme-cadre;

32.

rappelle que la dimension territoriale devra être systématiquement prise en compte dans la conception de toutes les politiques, puisque les stratégies de spécialisation intelligente (RIS3) apportent aux acteurs scientifiques et aux entreprises des ressources et créent de la valeur pour les territoires et les citoyens;

33.

fait valoir que les RIS3 ont été adoptées et développées par les régions dans le but de structurer l’investissement dans la recherche et l’innovation au service du développement économique, en complémentarité avec les autres régions, et que concilier investissements des territoires et investissements européens sur des projets structurants dans des domaines de spécialisation intelligente accroît l’impact du programme-cadre, en évitant le financement de projets déconnectés des réalités locales;

34.

affirme que le programme-cadre doit promouvoir le renforcement des capacités de R&I dans les territoires, afin de les accompagner pour monter les marches de l’excellence, notamment dans les domaines de spécialisation intelligente, et de renforcer la capacité de toutes les régions à participer à Horizon 2020 en y contribuant avec des projets de qualité;

35.

insiste sur l’importance des villes comme pôles («hubs») d’innovation jouant un rôle central dans la construction de l’excellence; souligne également qu’une trop grande concentration de la science dans les pôles d’innovation est un obstacle à la recherche d’un effet d’entraînement sur tout le tissu économique et social et qu’il est nécessaire de mobiliser les poches d’excellence éloignées des sites principaux; rappelle le rôle crucial joué par la politique régionale dans ce domaine;

Pour une nouvelle alliance entre politique européenne de la recherche et territoires

36.

propose un nouveau partenariat pour l’excellence de la R&I en Europe entre UE, États membres, villes et régions autour d’une gouvernance à plusieurs niveaux renforcée, du respect du principe de subsidiarité, d’une culture commune de l’innovation ouverte et de la valorisation des initiatives venant du terrain selon une approche orientée de la base vers le sommet;

37.

demande une plus grande contribution du programme-cadre au renforcement des pôles et écosystèmes territoriaux d’innovation, un appui accru aux réseaux de transfert de technologie, ainsi que la création d’une nouvelle action «connexions territoriales» («territorial connexions») pour reconnaître et financer via le programme-cadre les réseaux territoriaux d’excellence sur le modèle de l’initiative Vanguard;

38.

invite les régions pionnières à former des consortiums européens en vue de créer des innovations de rupture dans l’ensemble de l’Europe. Cerner les possibilités de collaboration, cartographier les différents maillons de la chaîne de valeur et recenser les principales parties prenantes et capacités grâce à une spécialisation intelligente constituent des étapes essentielles dans le processus de création d’une valeur ajoutée européenne;

Combler le fossé de l’innovation entre régions et entre États membres

39.

déplore qu’à mi-parcours, Horizon 2020 souffre d’un déficit de participation des pays de l’Union européenne-13  (6) , et souligne les disparités de participation au niveau régional et local; rappelle l’enjeu que représente la mobilisation du programme-cadre, et pas seulement de la politique de cohésion, dans tous les territoires de l’Union pour soutenir les meilleurs pionniers de l’excellence et leur permettre de rejoindre les collaborations européennes;

40.

souhaite que le programme «Répandre l’excellence, élargir la participation» d’Horizon 2020 soit poursuivi et élargi dans cette perspective; demande une approche spécifique pour les régions en fort retard de développement de la R&I qui sont situées dans des pays non éligibles à ce programme, ce qui est le cas de la plupart des régions ultrapériphériques, sans perdre de vue le critère fondamental de l’excellence; souligne la faible part des ressources d’Horizon 2020 qui est mobilisée pour ce programme (1 %), note l’absence d’évolution significative dans l’accès au programme-cadre et s’étonne que les pays qui en sont les principaux bénéficiaires le soient aussi pour ledit programme; considère que cette situation fragilise la légitimité du programme-cadre et appelle de nouvelles initiatives;

41.

propose une approche intégrée de la marche vers l’excellence, à mettre en œuvre sur la base d’un plan de coordination propre à chaque pays et chaque région pour agir sur les réformes nécessaires, la construction de centres d’excellence ouverts à tous, la lutte contre la fuite des cerveaux et la participation de plein droit aux réseaux européens de la recherche, ce plan ayant vocation à être cofinancé par les fonds régionaux, nationaux et européens, dont Horizon 2020 et les Fonds Structurels et d’Investissement européens;

42.

propose à cette fin de renforcer l’accès aux collaborations européennes:

en étoffant le soutien aux infrastructures de recherche et de développement technologique, et en multipliant les chaires EER («ERA chairs») pour y attirer des chercheurs prometteurs et des leaders scientifiques;

en renforçant l’incitation à accueillir de nouveaux entrants dans les projets déposés et l’ouverture des projets sélectionnés à de nouveaux acteurs complémentaires;

en accroissant le soutien apporté aux PME pour la création d’unités de recherche-développement-innovation et le recrutement de techniciens ou de chercheurs par ces services;

en augmentant l’appui accordé pour que les PME mettent en place des structures internes qui leur permettent de participer à des réseaux de recherche ou d’innovation;

D)   FAVORISER LES OUTILS COLLECTIFS ET PARTAGÉS AU SERVICE DE L’EXCELLENCE SCIENTIFIQUE ET DE L’INNOVATION

Les réseaux d’acteurs européens, creusets de l’excellence et de l’innovation

43.

réaffirme avec force la primauté de la collaboration inscrite dans des réseaux sur la compétition au sein du programme-cadre conformément aux valeurs de l’Union, ainsi que l’importance de ces réseaux comme creusets des projets et de l’excellence;

44.

souligne à cet égard la pertinence du programme «Régions de la connaissance» intégré au septième programme-cadre, qui permettait des interactions probantes avec la politique régionale en contribuant à lancer des collaborations durables entre acteurs du triangle de la connaissance dans les territoires, à impliquer le secteur privé (PME notamment) dans les projets du programme-cadre, à soutenir la coopération transnationale entre les écosystèmes innovants et à intégrer les acteurs locaux et régionaux dans l’Espace européen de la recherche;

45.

demande l’instauration d’une politique ambitieuse de développement de ces réseaux de collaboration:

entre chercheurs, équipes ou laboratoires, ainsi qu’entre infrastructures de recherche, pour construire des questions scientifiques et proposer des appels à projets et des projets;

entre grappes (clusters), projets pilotes et démonstrateurs;

entre des acteurs diversifiés, dont les régions et les villes, les pôles et écosystèmes territoriaux d’innovation, en lien avec les RIS3;

46.

rappelle que de nombreuses possibilités existent au sein d’Horizon 2020 pour appuyer ces initiatives, s’interroge sur leur faible dotation et mobilisation et demande un usage plus intense des actions de coordination et de soutien (CSA); encourage une meilleure reconnaissance des initiatives innovantes portées par les territoires à travers le programme-cadre; demande également un renforcement du soutien aux coopérations interrégionales autour des RIS3, à la fois dans le cadre d’Horizon 2020 et de la politique de cohésion;

Développer la coconstruction de programmes de R&I avec les territoires

47.

note que l’association des territoires à l’exécution d’Horizon 2020 s’est accrue depuis son lancement, avec de plus en plus de régions partenaires d’instruments de programmation conjointe tels que les actions ERA-NET, les actions Marie Skłodowska-Curie COFUND et les partenariats public-privé de recherche et d’innovation tels que l’initiative Clean Sky;

48.

souhaite le développement de ces actions coconstruites, demande que l’on entreprenne de simplifier et d’harmoniser les règles de mise en œuvre et, par exemple, de faciliter, avec l’accord des États membres, la participation des régions aux initiatives de programmation conjointe (article 185 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne);

49.

demande que les efforts de simplification administrative dans le traitement des aides se poursuivent, que la centralisation des subventions et des aides dans le cadre d’un portail unique d’accès à l’information soit poursuivie et renforcée, et que les informations sur les programmes soient mise à disposition dans toutes les langues officielles de l’Union européenne, tout comme dans le cas de l’ensemble des procédures afférentes et de la plate-forme de gestion des aides du portail des participants, de manière que tous puissent y accéder plus facilement;

50.

encourage les mécanismes d’octroi de paiements complémentaires («top-up») de l’Union sur le programme-cadre pour soutenir les initiatives d’excellence issues des territoires et mobilisant des financements significatifs et diversifiés;

51.

considère que l’expérience des stratégies de spécialisation intelligente et de leur mise en œuvre offre des retours très utiles pour le pilotage d’Horizon 2020 et du futur programme-cadre et la définition des programmes de travail établissant les thèmes éligibles au financement; invite les autorités impliquées dans cette programmation à associer davantage les territoires dans ce processus, pour en renforcer la cohérence vis-à-vis des enjeux du terrain;

52.

estime qu’il est essentiel que les différents défis du programme Horizon 2020 tiennent compte de l’incidence socio-économique dans les régions, dès la conception du programme, sa planification et la définition de ses domaines de financement, de sorte que le choix qui en est fait contribue de manière efficace à améliorer la qualité de vie de toutes les régions européennes;

53.

invite à réexaminer l’ensemble des dispositifs du programme-cadre au regard des principes de subsidiarité et de complémentarité pour renforcer l’articulation entre les différents acteurs sous l’angle non seulement du financement conjoint mais aussi d’une nouvelle répartition des rôles, en concentrant l’action du programme-cadre sur les sujets ayant une plus-value européenne;

54.

propose de faire évoluer le «label d’excellence», octroyé aux meilleures des candidatures infructueuses au titre de l’instrument PME, afin qu’il devienne un véritable dispositif partenarial dont le pilotage soit partagé entre l’Union européenne et les régions pour articuler au mieux leur action en amont et en aval des candidatures déposées. Ces principes valent pour les autres mesures visées par le label d’excellence, telles que les actions Marie Skłodowska-Curie et les bourses du Conseil européen de la recherche, ainsi que tous les autres projets propices à des synergies;

Renforcer en partenariat avec les territoires les effets d’entraînement, l’innovation et la diffusion des connaissances

55.

souligne le rôle que les territoires jouent, au moyen des marchés publics, comme terrains d’expérimentation et pionniers dans l’adoption («early adopters»); demande un assouplissement du cadre réglementaire de ces activités et une simplification du dispositif de soutien aux marchés publics innovants, aujourd’hui trop peu utilisé et aux règles trop peu assimilées par les autorités adjudicatrices;

56.

réaffirme l’importance d’une approche à 360o de l’innovation, incrémentale et de rupture, technologique et non technologique, de l’innovation par le design et les usages, de l’innovation sociale et de l’innovation ouverte et collaborative; rappelle que les pôles et écosystèmes inscrits dans les territoires sont les principaux acteurs des actions d’innovation, de transfert et de valorisation; demande à la Commission, dans le cadre de la mise en place du Conseil européen de l’innovation (CEI), de prendre en compte le rôle que les territoires jouent au niveau local sur ces questions et de les associer aux futures missions du CEI;

57.

propose d’instaurer dans le prochain programme-cadre une nouvelle structuration de l’instrument PME dont les conditions de programmation et de mise en œuvre associeraient en amont et en aval les territoires, afin qu’il s’articule davantage avec les spécialisations intelligentes et les financements locaux et pour atténuer l’effet de découragement lié à son très faible taux de succès;

58.

s’oppose à toute idée de transfert d’une partie des fonds de la politique de cohésion vers des actions du programme-cadre pour financer automatiquement davantage de projets ou soutenir ces «recalés excellents»; entend défendre l’autonomie des politiques régionales et faire prévaloir l’approche proposée de coconstruction et de renforcement des complémentarités et coopérations;

59.

insiste sur la nécessité de prendre en compte dès la construction des projets les enjeux d’entraînement, de diffusion et d’appropriation des résultats; constate les limites des impacts actuels des projets dans ces domaines; soutient par conséquent le développement de programmes européens et locaux spécifiquement dédiés à ces activités; invite à associer davantage les territoires à l’exploitation et à la dissémination des résultats des projets au sein du programme-cadre;

60.

soutient également le développement des outils ciblant le passage de la preuve de concept au marché comme le pilote «Voie rapide vers l’innovation», ou la structuration de nouvelles filières industrielles via l’initiative INNOSUP et son volet «Projets facilités par des grappes (clusters) au bénéfice de nouvelles chaînes de valeur industrielles» («cluster-facilitated projects for new industrial value chain»), et demande leur amplification;

61.

estime que pour permettre des approches intersectorielles et des partenariats collaboratifs au niveau de l’Union européenne, il convient de mettre en place une combinaison d’outils de soutien pour les grappes, destinée aux groupes d’entreprises plutôt qu’aux entreprises individuelles. En outre, le rôle que les grappes peuvent jouer en tant que pont entre les acteurs à l’intérieur et à l’extérieur des régions et comme canaux d’aides aux PME doit se refléter dans les politiques de l’Union;

62.

demande que la Commission procède à une évaluation de l’incidence des réformes introduites en 2013 pour favoriser les synergies entre Horizon 2020 et les Fonds ESI;

63.

regrette que les industries émergentes ne soient pas suffisamment au cœur du second pilier et déplore le trop faible soutien apporté aux réseaux d’excellence de pôles et écosystèmes d’innovation tournés vers l’industrie du futur comme l’initiative Vanguard; s’alarme des difficultés persistantes rencontrées pour financer les projets pilotes industriels et les démonstrateurs grande échelle; demande à la Commission dès maintenant de renforcer les dotations et d’envisager de nouvelles actions sur ces points;

64.

propose la création d’un programme de soutien aux infrastructures de démonstration pour favoriser la mise en réseau des sites d’essai, démonstrateurs, projets pilotes, sur le modèle de la mise en réseau des infrastructures de recherche;

Développer la relation entre science et société en lien avec les territoires

65.

note que, dans une époque où la notion de progrès est contestée et débattue, la relation entre science et société doit être mise au cœur de la réflexion sur l’avenir de la politique européenne de R&I, qu’il s’agisse des orientations de la recherche, des conditions de conduite des projets ou des choix de développement des nouveaux usages sociaux et techniques de la science;

66.

en conséquence, suggère, tout à la fois de promouvoir la confiance dans la science et dans le progrès et de développer une approche de développement durable; entend à ce titre défendre le principe de précaution, qui est un principe de prudence en vertu duquel l’action est conduite en pleine connaissance des risques;

67.

souligne l’enjeu majeur que représente aujourd’hui la science ouverte («open science»), à travers le libre accès aux résultats des recherches et publications, la disponibilité d’informations pour le grand public qui soient à la fois fiables et pluralistes, ainsi que le débat avec les citoyens et les parties prenantes;

68.

considère qu’entre la science libre et la science finalisée doit exister un espace de dialogue entre acteurs scientifiques, économiques, mais aussi issus de la société civile, pour échanger et construire ensemble les grandes questions scientifiques nouvelles dans le respect de l’indépendance de chacun;

69.

insiste sur le besoin urgent de promouvoir la science, la technologie et l’ensemble de leurs métiers, dont ceux de l’industrie, auprès des jeunes et de leurs familles, en accordant une attention particulière à encourager les vocations techniques et scientifiques parmi les femmes;

70.

regrette la faible dotation du programme «Science pour et avec la société», sa fragmentation et donc son faible impact; appelle une priorisation autour d’actions à plus-value européenne, et dans le cadre d’une véritable collaboration avec les parties prenantes les États membres, les régions et les villes;

Dimension internationale du programme-cadre

71.

défend le principe d’une science ouverte mais entend préserver la spécificité du programme-cadre, y compris dans le contexte de la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne; souhaite que ce retrait ne se traduise pas par une baisse de ressources pour le programme-cadre mais entend que cette question soit traitée en cohérence avec la négociation d’ensemble avec le Royaume-Uni;

72.

souhaite le renforcement des coopérations internationales, dans le cadre du programme-cadre, avec les partenaires associés, les pays émergents mais aussi dans celui de la politique de voisinage ou de bassins maritimes tels que la Méditerranée.

Bruxelles, le 12 juillet 2017.

Le président du Comité européen des régions

Markku MARKKULA


(1)  Déclaration des dirigeants de 27 États membres et du Conseil européen, du Parlement européen et de la Commission européenne du 25 mars 2017: http://www.consilium.europa.eu/press-releases-pdf/2017/3/47244656633_fr.pdf.

(2)  Projet de rapport du Parlement européen sur l’évaluation de la mise en œuvre du programme Horizon 2020 en vue de son évaluation intermédiaire et de la proposition pour le neuvième programme-cadre (2016/2147(INI)].

(3)  Report of the independent High Level Group on maximising the impact of the EU Research and Innovation Programmes: «Investing in the European future we want» [Rapport du groupe indépendant d’experts de haut niveau sur la façon d’optimiser l’impact des programmes européens de recherche et d’innovation: «Investir dans l’avenir de l’Europe que nous appelons de nos vœux»] https://ec.europa.eu/research/evaluations/pdf/archive/other_reports_studies_and_documents/hlg_2017_report.pdf#view=fit&pagemode=none (disponible en anglais uniquement).

(4)  «Au minimum, le budget devrait maintenir le taux de croissance annuel moyen du programme Horizon 2020, en prenant comme point de départ le budget prévu pour la dernière année du programme. Cela permettrait de porter ce budget pour sept années à au moins 120 milliards d’euros aux prix courants.» Rapport du groupe indépendant d’experts de haut niveau sur la façon d’optimiser l’impact des programmes européens de recherche et d’innovation.

(5)  Avis du Comité européen des régions sur «Une nouvelle étape pour la politique européenne de croissance bleue», (CDR 6622/2016).

(6)  États membres bénéficiaires principaux du programme «Répandre l’excellence, élargir la participation»: la Bulgarie, la Croatie, Chypre, l’Estonie, la Hongrie, la Lettonie, la Lituanie, le Luxembourg, Malte, la Pologne, le Portugal, la République tchèque, la Roumanie, la Slovaquie et la Slovénie (lien).