17.8.2017   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 272/25


Avis du Comité européen des régions — Les stratégies de spécialisation intelligentes (RIS3): incidence sur les régions et la coopération interrégionale

(2017/C 272/06)

Rapporteur:

Mikel Irujo Amezaga (ES/AE), chef de la délégation de Navarre à Bruxelles

RECOMMANDATIONS POLITIQUES

LE COMITE EUROPÉEN DES RÉGIONS (CdR),

1.

rappelle que tant le Conseil que le Parlement européen ont reconnu que les stratégies de spécialisation intelligente (RIS3) peuvent être des instruments puissants à même de contribuer à relever les défis de la société et de stimuler l’innovation, les investissements et la compétitivité en tenant compte des spécificités socio-économiques et territoriales;

2.

souligne qu’il est important que le règlement (UE) no 1303/2013 ait fait des RIS3 une conditionnalité ex ante, et se félicite du fait que le cadre d’élaboration de la S3 laisse une place à l’approche régionale et ouvre ainsi la possibilité de prendre en considération les caractéristiques régionales;

3.

les régions ont adhéré à la S3 parce qu’il s’agissait d’une démarche utile pour mener le développement régional avec plus d’efficacité et de performance. Les régions entendent préserver cette démarche reposant sur la subsidiarité et une approche ascendante. Elles souhaitent préserver la liberté de choix des spécialisations régionales. L’élaboration des S3 doit continuer à répondre prioritairement à une volonté de renforcer la dynamique de développement régional et de créer des emplois dans les territoires;

4.

souligne que les spécifications et les lignes directrices destinées à l’élaboration d’une stratégie de spécialisation intelligente doivent satisfaire au principe de subsidiarité et accorder aux régions une marge de manœuvre suffisante, afin de leur permettre de répondre à des défis spécifiques;

Mise en œuvre des stratégies de spécialisation intelligente (RIS3)

5.

rappelle qu’il importe de garantir la participation de tous les niveaux de gouvernance, national, régional, infrarégional et/ou local, qui ont des compétences et mènent des activités dans les domaines d’action de la stratégie, ainsi que des acteurs concernés de la dénommée «quadruple hélice» (1), qui met l’accent sur le rôle de l’industrie, des établissements d’enseignement et de recherche et des citoyens, la combinaison précise d’organisations concernées dépendant toutefois du contexte régional;

6.

considère que les RIS3 offrent une valeur ajoutée aux collectivités locales et régionales en ce qu’elles génèrent des projets et des investissements conjoints transsectoriels et interrégionaux qui sont particulièrement bénéfiques pour le renouveau industriel;

7.

souligne que le développement des RIS3 doit associer toutes les parties intéressées, en les encourageant à agir de concert, guidées par une vision partagée. Le processus devrait encourager la gouvernance à plusieurs niveaux et contribuer à la création de capital créatif et social à l’intérieur du territoire;

8.

estime que la conception et le suivi constant des RIS3 doivent s’inscrire dans un mécanisme interactif de gouvernance qui sous-tend le processus de découverte entrepreneuriale, c’est-à-dire assorti d’une approche combinant des processus descendants et ascendants auxquels les citoyens, représentés par l’intermédiaire de canaux jugés appropriés, devraient eux aussi être associés de manière adéquate;

9.

signale que l’obligation de faire en sorte que le processus soit participatif découle du point 4.3 de l’annexe I du règlement (UE) no 1303/2013. Toutefois, dans de nombreux cas, le processus participatif demeure insuffisant. Par conséquent, il demande à la Commission d’encourager les acteurs concernés à l’échelon national, régional et local à veiller à l’application effective de cette disposition légale;

10.

rappelle qu’une direction et un consensus politiques sont souhaitables pour la mise en œuvre des RIS3; c’est pourquoi il recommande une participation active de l’ensemble ou de la plupart des forces politiques représentatives ainsi que des acteurs sociaux et des organismes de la société civile;

11.

estime que la RIS3 ne doit pas se limiter aux questions de recherche, d’innovation et de développement des entreprises. Dans l’esprit de la stratégie pour les nouvelles compétences en Europe (New skills agenda for Europe), elle doit traiter également du développement de nouvelles compétences, de l’éducation et de la formation pour tous les citoyens, en particulier les jeunes, les salariés et les chômeurs; de même, considère qu’il est important de promouvoir les programmes de formation et de développement, notamment dans les régions avec peu d’expérience dans ce domaine, en mettant en avant les exemples de réussite au niveau sectoriel susceptibles d’être utilisés comme points de référence pour les autres régions et en réclamant l’adoption de mesures en faveur de la coopération entre les régions innovantes et les régions moins développées;

12.

considère que les choix de spécialisation intelligente des régions peuvent également constituer un encouragement à renforcer certaines politiques communautaires. Par exemple, de nombreuses régions ont fait le choix de développer des spécialisations intelligentes autour des questions maritimes avec des approches transversales et intersectorielles face auxquelles les politiques européennes présentent un retard certain de structuration limitant leur capacité d’appui et leur efficacité;

13.

souligne que la priorisation des secteurs dans lesquels une région détient un avantage comparatif doit s’aligner sur les objectifs transversaux inhérents à la stratégie de Lisbonne (formation des jeunes et accès à l’emploi, égalité entre femmes et hommes, investissement dans l’enseignement supérieur et la recherche, soutien à l’innovation dans les petites et moyennes entreprises (PME) dans tous les secteurs de l’économie régionale, soutien à l’innovation sociale et écologique, etc.). Il est essentiel que les politiques européennes puissent continuer à soutenir ces objectifs socles de la stratégie de Lisbonne tout en accompagnant l’affirmation des S3. En effet, bien que des avancées importantes aient été accomplies dans ce domaine, les progrès dans la réalisation de ces objectifs doivent encore être poursuivis dans l’ensemble des régions européennes;

14.

souligne le rôle des stratégies de spécialisation et d’innovation pour le développement durable des zones rurales, et insiste sur l’importance des formations en rapport avec le recensement et l’exploitation du potentiel ou de la capacité que recèlent les communautés et les valeurs locales;

15.

rappelle que le règlement susmentionné prévoit que les RIS3 doivent comporter un «mécanisme de suivi» qui devrait permettre de capter et de suivre les changements envisagés au niveau de chaque priorité RIS3 grâce à un choix approprié d’indicateurs de résultat et promouvoir l’échange des meilleures pratiques; souligne l’importance de l’accent mis sur le suivi et l’évaluation. Ainsi il conviendrait de mettre en place un cadre commun de nature indicative et souple qui permette de capter et de suivre les changements envisagés au niveau de chaque priorité RIS3 afin d’aider les régions pour qu’elles soient en mesure de développer leurs propres mécanismes de suivi et indicateurs adaptés en fonction de leur situation et de leurs besoins. Le mécanisme de suivi permet aux régions de poursuivre en continu le développement de leurs stratégies en se fondant sur des données probantes. Celui-ci dépendant dans une large mesure des caractéristiques des RIS3, sa définition devrait faire partie intégrante du processus d’élaboration de cette stratégie; compte tenu de ce qui précède, suggère dans cette optique qu’une dotation financière multifonds spécifique puisse être envisagée pour soutenir une méthodologie souple de mise en œuvre intégrée et partagée par tous les acteurs, portant aussi sur les activités d’analyse, de monitorage, d’évaluation et de suivi;

16.

estime également que les RIS3 ne doivent pas se limiter à l’innovation et à la recherche mais être étendues afin qu’elles deviennent, à l’avenir, des stratégies de développement régional plus complètes en intégrant d’autres aspects tels que l’éducation ou la formation;

17.

prend note de la situation actuelle et propose la création d’un cadre commun indicatif de suivi, qui servira de référence à toutes les régions afin qu’elles élaborent leur propre cadre de suivi, qui tiendrait compte de leurs spécificités propres et leur permettrait d’utiliser leur propre système d’évaluation et de suivi;

18.

prend acte des efforts déployés par la plateforme S3 en matière d’assistance technique et d’élaboration des instruments, tout en soulignant qu’un cadre indicatif commun favoriserait une plus grande cohérence dans la mise en œuvre et le suivi des stratégies RIS3;

19.

incite à la progressivité et à la prudence dans la démarche d’évaluation des S3 qui restent une politique récente, complexe dans son élaboration et sa mise en œuvre, et qui ne peut produire tous ses effets qu’au fil des années. Le premier indicateur de réussite doit rester la réalité de la priorisation et de la mobilisation locale, les régions doivent être étroitement associées à la définition et au pilotage des dispositifs d’évaluation;

20.

en vue de la prochaine période de programmation, demande à la Commission de publier en temps opportun les conditions à respecter dans le cadre de l’élaboration des stratégies. La communication d’orientations au cours de la période de programmation, comme ce fut le cas pour les actuelles conditions ex-ante, met les instances chargées de la mise en œuvre dans une situation intenable;

21.

recommande d’assurer une étroite coordination avec le suivi des programmes opérationnels régionaux du Fonds européen de développement régional (FEDER), dès lors qu’ils jouent un rôle important dans la mise en œuvre de la stratégie de R&I, et avec l’utilisation des critères régionaux harmonisés établis dans ce cadre, tout en prenant pleinement en compte les spécificités territoriales, que la Commission européenne (2) divise en «indicateurs financiers», «indicateurs de réalisation» et «indicateurs de résultat» (qualitatifs et quantitatifs);

22.

attire en particulier l’attention sur le potentiel offert par les établissements d’enseignement supérieur, d’autres établissements d’enseignement, les organisations de recherche et de technologie et les industries, en particulier les jeunes entreprises de petite taille et les PME, dans la conception et la mise en œuvre des RIS3. Ces établissements constituent le pivot au sein du «triangle de la connaissance» (recherche, éducation et innovation) et peuvent contribuer par des moyens particulièrement adaptés à mettre en place les capacités d’innovation des régions; les pouvoirs exécutifs régionaux devraient dès lors encourager les établissements d’enseignement supérieur à assumer activement le rôle qui leur revient dans les processus des RIS3. À cet égard, il convient de tendre vers un équilibre entre une ouverture des établissements d’enseignement supérieur aux besoins du marché, d’une part, et l’éducation généraliste et la recherche (fondamentale), qui seront à l’origine des innovations d’après-demain, d’autre part; Il apparaît indispensable dans cette optique que les établissements d’enseignement supérieur soient accessibles à tous, contribuent à l’élévation du niveau d’éducation et de formation nécessaire à une société de la connaissance tournée vers la créativité, et qu’ils répondent aux besoins du marché de travail, aussi bien des entreprises que des autres employeurs;

23.

recommande que les stratégies RIS3 prévoient, dans la mesure du possible, la constitution d’organisations et/ou de structures flexibles et externes visant à assister les gouvernements, en particulier ceux dont les capacités en ressources sont limitées, dans le développement des capacités des collectivités locales et régionales; estime extrêmement utiles, mais insuffisants, les soutiens et les évaluations externes (appuyant les évaluations par les pairs et les visites d’experts) menés à bien par la plateforme S3, car il estime que chaque collectivité territoriale doit avoir la possibilité de développer ses capacités locales et régionales internes, y compris les mécanismes de mise en œuvre, de contrôle et de suivi des RIS3;

24.

souligne qu’il convient, aussi dans le cadre du développement et de la mise en œuvre des RIS3, de préserver un équilibre approprié entre les efforts consentis et les bénéfices obtenus. D’une manière générale, il y a lieu de saisir toutes les occasions d’éviter que les RIS3 n’entraînent de nouvelles charges administratives;

25.

souligne que les RIS3 doivent pouvoir être organisées de manière suffisamment souple sur toute la période de programmation concernée des Fonds structurels. Elles ne peuvent aller à l’encontre des nouvelles évolutions, des diversifications intelligentes et, notamment, des innovations de rupture dans les régions. En particulier, elles ne peuvent limiter les activités du secteur privé dans ces régions, par exemple celles des startups;

Synergies entre les Fonds structurels et d’investissement européens et d’autres programmes

26.

note que le fondement des RIS3 va au-delà de l’utilisation plus efficace des Fonds structurels, et que leur objectif consiste à créer des synergies entre les politiques d’innovation et de développement régional et les instruments financiers, afin d’éviter les doubles emplois;

27.

rappelle que la promotion des synergies entre les Fonds structurels et d’investissement européens («Fonds ESI») et le programme Horizon 2020 sont l’une des priorités pour la période 2014-2020. Cependant, la complexité des règles entrave ce processus. Cette recherche de synergies doit aussi concerner les autres politiques de l’Union Européenne et leurs outils d’intervention;

28.

insiste sur l’intérêt d’une telle démarche qui doit aussi viser à renforcer le soutien aux PME, à leurs projets individuels et leurs actions collectives, ainsi qu’aux startups;

29.

souligne qu’il est indispensable de simplifier le cadre réglementaire et de créer des interfaces efficaces, susceptibles d’améliorer les interactions entre les différents cadres d’appui. À leur tour, ceux-ci devraient s’accompagner d’une description compréhensible et claire des voies et moyens par lesquels l’on entend atteindre et faciliter des synergies;

30.

considère qu’il est important de promouvoir des programmes de renforcement des capacités, en particulier dans des régions disposant de peu d’expérience dans ce domaine, en mettant en exergue, dans une perspective sectorielle, des cas de réussite qui pourraient déboucher sur des avancées majeures pour d’autres régions;

31.

fait observer qu’un important facteur de réussite dans la création de synergies consiste à favoriser la communication et la coopération entre les acteurs qui sont familiarisés avec les différents instruments d’appui (Fonds structurels et Horizon 2020) mais n’ont encore qu’une connaissance limitée de leurs domaines d’intervention respectifs; cette observation vaut aussi bien à l’échelon régional qu’au niveau européen; invite la Commission et les régions à soutenir et encourager les échanges entre ces groupes;

32.

rappelle que la réussite d’un projet va dépendre en grande partie d’une relation harmonieuse entre les différents niveaux de gouvernance, européen, étatique, régional et, le cas échéant, local, ainsi que de la coordination entre les autorités de gestion et les points de contact nationaux, entre autres;

33.

déplore que l’harmonisation imparfaite entre le cadre réglementaire relatif aux aides en gestion directe par la Commission (Horizon 2020) et celui concernant les aides en gestion indirecte (Fonds ESI), qui sont soumises aux limitations des aides d’État, demeure un obstacle majeur à l’exploitation de synergies entre celles-ci; appelle à mettre en œuvre les recommandations formulées dans la récente étude commandée par le Parlement européen à cet égard (3);

Rationalisation des initiatives de la Commission européenne

34.

reconnaît à nouveau le travail important qu’a réalisé la plateforme S3, même s’il constate une multiplicité d’initiatives de la Commission européenne, qui peut être source de confusion, de méconnaissance et de manque de coordination entre les régions;

35.

estime qu’il convient d’analyser les synergies entre les différents instruments, initiatives, outils et instances de soutien, tels que la plateforme de spécialisation intelligente, l’Observatoire européen des grappes d’entreprises, les partenariats européens pour l’innovation, le Forum stratégique européen, les initiatives dans le domaine des technologies clés génériques (TCG) et les infrastructures de recherche, pour n’en citer que quelques-uns parmi tant d’autres;

36.

invite la Commission à assurer une plus grande cohérence en matière de compréhension des initiatives et de leur mise en œuvre, surtout dans les petites régions ou celles dotées de capacités administratives réduites;

37.

souhaite une clarification afin de bien identifier les thématiques dans lesquelles la Commission entendrait se doter de moyens importants pour développer une approche globale de la chaîne de valeur au niveau européen dans un secteur donné en s’inspirant des exemple réussis dans des thématiques qui intéressent le plus grand nombre possible d’États membres ou de régions et pour lesquelles il conviendrait qu’elle se concentre sur une approche de mise en réseau, d’appui et d’animation, en se fondant sur les S3;

38.

recommande à l’Union européenne de clarifier l’impact des stratégies de spécialisation intelligente sur les autres mécanismes d’orientation de l’Union européenne et sur les parties concernées, d’améliorer sa communication et d’élaborer un «atlas des initiatives, outils et projets de l’Union européenne» sur des thèmes intéressant les RIS3, en suivant l’exemple du portail de justice en ligne «e-Justice» de la Commission européenne, qui vise à «faciliter la vie des citoyens» en mettant à leur disposition des informations multilingues;

39.

recommande également la promotion d’une communauté de la connaissance qui forme et professionnalise des experts dans le domaine des RIS3, en tenant aussi compte des travaux de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), de la plateforme S3 ainsi que d’un vaste secteur universitaire;

Promotion de la coopération interrégionale et création de chaînes de valeur

40.

souligne que la création d’une masse critique au niveau territorial est essentielle pour la compétitivité de l’Union européenne et de son industrie au niveau mondial; considère que les collectivités locales et régionales sont l’espace approprié pour aborder les écosystèmes innovants, en créant les liens nécessaires entre les politiques de l’Union européenne, l’industrie, les centres de recherche et les établissements d’enseignement supérieur, sans oublier les citoyens;

41.

souligne que, sur la base des priorités définies dans les RIS3, il est nécessaire de développer une coopération interrégionale qui permette de créer des chaînes de valeur dans toute l’Union européenne;

42.

est convaincu que la coopération interrégionale créera des synergies entre les activités économiques et les ressources déjà définies dans les régions, de manière à mieux exploiter les potentialités et à éviter les doubles emplois inutiles en matière d’investissements, lors de l’utilisation des Fonds structurels;

43.

estime que la clé est de pouvoir disposer de suffisamment d’informations et de capacité de coordination dont le résultat idéal serait un système parfait de complémentarités cohérentes à même d’éliminer les inefficacités dues à la duplication et à la simple imitation;

44.

accueille favorablement les différentes initiatives de la Commission en ce sens comme, par exemple, les plateformes thématiques, tout en estimant que ces initiatives doivent être assorties dès l’origine d’instruments financiers et d’objectifs bien définis, permettant d’éviter le risque d’incertitude pour les participants, ainsi que les chevauchements avec d’autres initiatives ou programmes tels que les communauté de la connaissance et de l’innovation, le programme ERA-NET, les programmes de «grappes d’entreprises» de COSME, les projets dans le cadre de Interreg Europe, etc.;

45.

critique le fait que les grands instruments financiers laissent de côté les projets de moindre envergure et restent, malgré les montants importants mobilisés notamment au titre du FEIS, insuffisants pour permettre aux PME de pallier les défaillances de marché et faciliter l’accès au crédit et le financement des risques. Très souvent, ce sont le degré de complexité, les procédures de longue haleine liées à la préparation, à la réalisation et à la clôture d’un mégaprojet ainsi que les faibles niveaux de maturité technologique (loin de tout retour sur investissement visible) qui dissuadent les acteurs les plus modestes de s’engager;

46.

souligne l’importance du développement des plateformes thématiques de la Commission européenne et notamment l’occasion qu’elles offrent pour promouvoir la collaboration avec les acteurs régionaux; de même, constate que ces plateformes de coopération interrégionale ont joué un rôle crucial en matière de mise en œuvre en maximisant le potentiel de croissance économique et de commercialisation, notamment en ce qui concerne l’innovation conduite par l’industrie; juge dès lors qu’il devrait être possible pour plusieurs régions volontaires de concevoir l’organisation de certaines spécialisations à l’échelle interrégionale:

au sein d’un même pays,

au sein d’ensemble transfrontaliers,

dans les régions ultrapériphériques,

sur une façade maritime ou un massif de montagne,

au sein d’un réseau européen sans continuité territoriale (exemple des industries culturelles et créatives, les services associés aux défis démographiques ou l’initiative Vanguard);

47.

estime que les stratégies RIS3 devraient encourager les régions à travailler ensemble afin de développer entre les grappes d’entreprises une coopération internationale sectorielle ou par segments communs. Celles-ci appuieraient le renforcement des chaînes de valeur internationales. Le rôle que les grappes d’entreprises peuvent jouer en tant que pont entre les acteurs à l’intérieur et à l’extérieur des régions et comme canaux d’aides aux PME doit se refléter dans les politiques de l’Union;

48.

déplore que le cadre réglementaire en vigueur pour l’utilisation interrégionale et transnationale des Fonds structurels et d’investissement européens ne soit pas suffisamment exploité par les autorités nationales et régionales. Il en va de même pour la réalisation d’opérations en dehors de la zone couverte par le programme, qui n’ont pour ainsi dire jamais lieu dans la pratique;

49.

souligne que, selon de nombreuses études, il existe des obstacles de taille qui freinent l’utilisation des Fonds structurels et d’investissement européens au bénéfice de la coopération interrégionale et transnationale, tels que le manque de ressources et de capacité administrative, l’absence d’exemples de bonnes pratiques, une incertitude quant à la manière de s’y prendre, l’absence de cadre de référence et de méthodologies, un manque de clarté des objectifs, des niveaux de compétence politique inégaux, des barrières réglementaires et l’absence de cadre financier propice pour la développer;

50.

estime, dès lors, que le cadre réglementaire actuel n’encourage pas, mais restreint plutôt, la coopération interrégionale; invite dès lors la Commission européenne à soutenir les travaux des réseaux des autorités de gestion du FEDER et du FSE en apportant une aide concrète, par exemple en ce qui concerne l’échange d’informations et en éliminant les incertitudes quant à la recevabilité des mesures prévues dans certains cas précis, et à s’abstenir de toute interprétation restrictive du cadre réglementaire existant. néanmoins, reconnaît que certains des principaux obstacles rencontrés ne résultent pas d’insuffisances de la réglementation en vigueur mais d’un manque de capacités administratives et d’une asymétrie des niveaux de compétences politiques, administratives et scientifiques;

Nouveau cadre juridique et financier

51.

est d’avis que la S3 des régions devrait être effectivement prise en compte dans l’ensemble des politiques communautaires, y compris la mise en œuvre de l’ensemble de la politique de cohésion, et non dans la mise en œuvre du seul FEDER;

52.

considère qu’il peut s’avérer compliqué de mettre au point de nouvelles politiques en utilisant le même cadre réglementaire et financier; estime donc qu’il conviendrait d’autoriser une flexibilité des programmes de sorte que ceux-ci puissent promouvoir avec souplesse de nouvelles politiques;

53.

estime que pour développer leurs coopérations autour des RIS3, les régions ont besoin d’un outil simple qui permette de réellement prendre en compte les coûts de la mise en réseau et pas seulement ceux des projets opérationnels portés en commun;

54.

rejette toutes les tentatives de renationaliser la politique de cohésion au-delà de 2020, dans la mesure où elle demeure une pierre angulaire de la promotion des stratégies de spécialisation intelligente dans toutes les régions de l’Union européenne et que cette renationalisation risquerait de compromettre les évolutions positives déjà engagées en de nombreux endroits au niveau local et régional au cours de la période de financement actuelle;

55.

recommande par conséquent:

une réforme du cadre réglementaire actuel, avant la fin de la période 2014-2020, qui donne une impulsion à la fois aux synergies entre les Fonds structurels et d’investissement européens et d’autres programmes, ainsi qu’à la coopération interrégionale. Cette réforme doit imposer de simplifier et d’assouplir la gestion des Fonds structurels et d’investissement européens, en recourant à des méthodes simplifiées de justification, fondées par exemple sur l’obtention de résultats, le recours au critère du coût unitaire et d’autres mesures plus adaptées à une application efficace des fonds à la spécialisation intelligente,

un renforcement au sein des S3 des objectifs de croissance durable et inclusive et de création d’emplois,

un cadre commun de nature indicative et flexible, sous la forme de recommandations, relatif aux RIS3 qui comble les lacunes existantes en matière de coordination dont pâtissent actuellement la conception, l’élaboration, la mise en œuvre, la surveillance et le suivi de ces stratégies. Fondé sur le principe de subsidiarité, le document doit être flexible, «vivant», constamment évolutif et laisser de la place à l’apparition de nouvelles niches de spécialisation qui n’existaient pas à un moment donné,

la mise à disposition de toute urgence d’instruments de financement appropriés ad hoc afin d’encourager la coopération interrégionale. Ces instruments peuvent prendre la forme de combinaisons de financement (y compris un mélange de subventions et de prêts et de financements publics et privés à différents niveaux) et consister en l’utilisation innovante de fonds permettant de soutenir des projets pilotes destinés à des réseaux de coopération interrégionale, dans le cadre desquels un réel contact serait établi avec l’industrie, et dont le résultat aurait une incidence sur le marché,

à l’avenir, le programme Horizon 2020 devrait proposer une approche territoriale permettant d’articuler la politique européenne de recherche et d’innovation et les RIS3; il est souligné dans le même temps qu’il devra continuer à reposer sur le principe d’excellence,

cette approche territoriale devrait tenir compte des difficultés auxquelles sont confrontées certaines régions, telles que les régions ultrapériphériques, pour devenir partenaires de projets en raison de leur éloignement des centres économiques et technologiques,

l’exploitation des enseignements tirés des actions pilotes menées à bien par la DG REGIO avec les régions moins développées, afin d’aider celles-ci de manière adéquate à réduite la fracture de l’innovation au sein de l’Union,

une évaluation approfondie ex ante de l’impact territorial sur l’intégration de la stratégie de spécialisation intelligente dans les différentes politiques de l’Union, notamment la recherche (PC 9), la politique industrielle et la future politique de cohésion,

une allocation de ressources urgente à Interreg Europe qui est pour les années à venir l’outil concret et déjà connu des régions le plus adapté à ce soutien à la mise en réseau autour des RIS3,

la mise en œuvre du plan Juncker devrait favoriser la mise en place de plateformes régionales d’appui au montage des projets et de financement de ces derniers pour permettre au Fonds européen pour les investissements stratégiques (FEIS) de venir concrètement appuyer les RIS3. Afin de garantir une sélection responsable des projets, il importe de fournir aux parties prenantes associées à leur évaluation une information complète sur l’aide nécessaire aux collectivités locales et régionales ainsi que sur leurs besoins. Le renforcement de l’assistance technique au niveau régional dans le cadre du FEIS est une priorité absolue,

la participation du Comité européen des régions aux activités du groupe de haut niveau sur la maximisation de l’impact des programmes de R&I de l’Union européenne (High Level Group on maximizing impact of EU R&I Programmes);

56.

recommande à la Commission européenne de créer un groupe de travail avec la participation active du Comité européen des régions, qui prenne en compte tous ces éléments permettant de concrétiser davantage la conditionnalité ex ante des RIS3 déjà mentionnée et de l’assortir d’objectifs et d’instruments précis.

Bruxelles, le 22 mars 2017.

Le président du Comité européen des régions

Markku MARKKULA


(1)  Il s’agit des autorités de gestion nationales ou régionales et des parties prenantes concernées, telles que les universités et autres établissements d’enseignement supérieur, l’industrie et les partenaires sociaux ainsi que les citoyens, dans le cadre d’un processus de découverte des opportunités entrepreneuriales.

(2)  Voir par exemple à cet égard: «Suivi et évaluation de la politique européenne de cohésion — Document d’orientation — Fonds européen de développement régional et Fonds de cohésion, document d’orientation», Commission européenne, 2014.

(3)  «Maximisation of synergies between European Structural and Investment Funds and other EU instruments to attain Europe 2020 Goals» (Maximisation des synergies entre les Fonds structurels et d’investissement européens et d’autres instruments de l’Union européenne pour atteindre les objectifs de la stratégie Europe 2020), Parlement européen, Direction générale des politiques internes de l’Union, juin 2016, IP/B/REGI/IC/2015-131