Bruxelles, le 18.2.2016

COM(2016) 74 final

RAPPORT DE LA COMMISSION AU PARLEMENT EUROPÉEN ET AU CONSEIL


Règlement (UE) n° 995/2010 du Parlement européen et du Conseil du 20 octobre 2010 établissant les obligations des opérateurs qui mettent du bois et des produits dérivés sur le marché (règlement sur le bois de l'Union européenne)

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Rapport de la Commission au Parlement européen et au Conseil

1.    Introduction

L’Union européenne (l’UE) a adopté en 2010 le règlement (UE) nº 995/2010 établissant les obligations des opérateurs qui mettent du bois et des produits dérivés sur le marché 1 (règlement dans le domaine du bois, ci-après le «règlement "Bois"» ou le «règlement»), dans le cadre de la mise en œuvre du plan d’action de l’Union européenne relatif à l’application des réglementations forestières, à la gouvernance et aux échanges commerciaux (plans d’action FLEGT). Le plan d’action FLEGT est l’instrument stratégique de l’UE dans la lutte contre l’exploitation illégale des forêts dans le monde, et le règlement «Bois» est l’instrument principal visant à résoudre le problème du point de vue de la demande. Le règlement est entré en vigueur en mars 2013.

L’article 20, paragraphe 3, du règlement «Bois», exige que la Commission examine, sur la base des rapports des États membres concernant l’application du règlement et de l’expérience acquise lors de cette application, «le fonctionnement et l’efficacité du présent règlement, notamment pour la prévention de la mise sur le marché de bois issus d’une récolte illégale ou de produits dérivés de ces bois.». Conformément à ces exigences, le présent rapport présente le premier examen du règlement réalisé par la Commission.

L’examen effectué par la Commission prend la forme d’une évaluation réalisée conformément aux lignes directrices de l’Union pour une meilleure réglementation 2 . Il répond à cinq questions d’évaluation: la pertinence, l’efficacité, l’efficience, la cohérence et la valeur ajoutée de l’Union. L’évaluation couvre les deux premières années d’application du règlement «Bois». Ses conclusions se basent sur les rapports des États membres sur l’application du règlement présentés à la Commission, sur une consultation de diverses parties intéressées, sur une analyse des articles scientifiques pertinents, sur une analyse des flux commerciaux et sur un rapport d’évaluation rédigé par un consultant externe. 

Le présent rapport résume les principaux résultats de l’évaluation, en tire des conclusions et formule des recommandations d’actions de suivi. Il est complété par un document de travail des services de la Commission qui détaille les résultats de l’évaluation. Il convient de noter qu’une expérience de mise en œuvre de deux ans seulement s’est avérée un facteur limitant l’évaluation.

 2.    Contexte

L’exploitation illégale des forêts est un problème largement répandu qui suscite de vives préoccupations au niveau international. Elle a un impact dévastateur sur certaines des forêts les plus précieuses encore présentes dans le monde, ainsi que sur les peuples qui y vivent et qui dépendent des ressources qu’elles fournissent. Elle contribue à la déforestation tropicale et à la dégradation des forêts, phénomènes qui pourraient être responsables de 7 à 14 % 3 des émissions totales de CO2 issues de l’activité humaine; elle menace la biodiversité, nuit à la gestion durable des forêts et a un effet négatif sur la réduction de la pauvreté, la croissance économique durable et inclusive et le développement durable, y compris en nuisant à la viabilité commerciale des opérateurs qui exercent leurs activités conformément à la législation applicable.

Le plan d’action FLEGT de 2003 prévoit des processus et des mesures visant à prévenir la commercialisation du bois illégal dans l’Union, à améliorer l’offre de bois légal et à renforcer la demande de bois provenant de forêts gérées de manière responsable. Le plan d’action FLEGT a mentionné la possibilité d’élaborer une nouvelle législation afin d’attaquer le problème de l’exploitation illégale des forêts du point de vue de la demande, ce qui a abouti à l’adoption du règlement «Bois».

Le règlement «Bois» énonce les trois obligations suivantes:

1.il interdit la mise sur le marché de bois issus d’une récolte illégale ou de produits dérivés de ces bois;

2.il exige que les opérateurs fassent diligence lorsqu’ils mettent sur le marché de l’Union du bois ou des produits dérivés pour la première fois;

3.il exige que les commerçants en bois et produits dérivés tiennent des registres de leurs fournisseurs et clients après la première mise sur le marché.

La gamme de produits couverte par le règlement est reprise dans son annexe.

Le règlement «Bois» décrit l’obligation de diligence raisonnée et demande que les opérateurs conçoivent et appliquent un système de diligence raisonnée ou qu’ils utilisent celui d’une organisation de contrôle.

Le règlement «Bois» a été adopté en décembre 2010 mais n’est entré en vigueur que le 3 mars 2013. La période intermédiaire avait pour objectif de permettre aux autorités compétentes des États membres et au secteur privé de se préparer à son application. Durant cette période, la Commission a adopté un acte délégué et un acte d’exécution visant à faciliter la mise en œuvre du règlement 4 .

3.    Méthodologie

L’évaluation du règlement «Bois» a débuté en avril 2015 et couvre la période comprise entre mars 2013 et mars 2015.

Conformément à l’article 20, paragraphe 2, du règlement «Bois», les rapports des États membres sur l’application du règlement, présentés à la Commission au plus tard le 30 avril 2015, ont constitué la principale source d’informations pour l’élaboration du présent rapport. Par ailleurs, la Commission a lancé une consultation publique en ligne sur le site web «Votre point de vue sur l’Europe» (du 15 avril au 3 juillet 2015). D’autres enquêtes ciblées réalisées auprès des parties prenantes et des observations spontanées de la part de parties intéressées ont également été utilisées.

L’évaluation se base sur une vaste base de données factuelles; toutefois, l’évaluation de la performance d’un outil législatif novateur à peine deux ans après son entrée en vigueur s’est avérée difficile. Peu d’informations sont disponibles sur les incidences de la législation et il n’est pas possible d’imputer de manière inconditionnelle certains des effets et tendances qui ressortent de l’analyse à l’application du règlement «Bois».

4.    État d’avancement de la mise en œuvre

Le règlement exige 5 que chaque État membre désigne une ou plusieurs autorités compétentes, qu’il adopte des sanctions effectives, proportionnées et dissuasives applicables en cas de violations, et qu’il élabore des plans de contrôle et procède à des contrôles cohérents des opérateurs et des organisations de contrôle. Par ailleurs, le règlement «Bois» prévoit 6 la fourniture d’une assistance technique et de conseils aux opérateurs par les États membres, assistés par la Commission, ainsi qu’un échange d’informations entre les parties prenantes concernées.

L’évaluation a révélé que, au cours de la période comprise entre mars 2013 et mars 2015, l’état général de la mise en œuvre faisait apparaître des différences au sein de l’Union. Certains États membres n’ont commencé à mettre en œuvre le règlement que tard au cours de la période de référence. La Commission a engagé un dialogue bilatéral avec huit États membres, à la suite de quoi la majorité d’entre eux s'est rapidement conformée à leurs obligations. La Commission a néanmoins introduit une action en justice contre quatre États membres en infraction au cours de 2015 7 .

4.1 Désignation des autorités compétentes

À l’exception de l’Espagne, tous les États membres ont indiqué avoir désigné une autorité compétente pour contrôler la conformité des opérateurs aux exigences du règlement «Bois» 8 . Les structures institutionnelles, les pouvoirs et le statut juridiques de ces institutions, varient entre les États membres, reflétant ainsi différents cadres juridiques et institutionnels. De grandes différences dans les ressources humaines et financières disponibles pour l’application et la mise en œuvre du règlement «Bois» ont été notées. Les ressources humaines disponibles sont de l’ordre de 1 à 200 personnes par mois 9 .

4.2 Sanctions applicables aux violations des dispositions du règlement «Bois»

Vingt-quatre États membres ont rendu compte des sanctions prévues dans leur législation nationale applicables aux violations des obligations du règlement (interdiction, diligence raisonnée et traçabilité). L’élaboration de dispositions adéquates relatives aux sanctions est toujours en cours d’élaboration en Grèce, en Hongrie, en Roumanie et en Espagne. 

Les sanctions varient considérablement entre les États membres, allant de mesures correctives à des peines d’emprisonnement, en passant par des amendes, la saisie du bois et la suspension de l’autorisation d’exercer une activité commerciale. Certains États membres n’ont prévu que des sanctions administratives, alors que d’autres considèrent la violation de certaines obligations comme une infraction pénale. Les sanctions applicables à la violation de l’interdiction sont généralement plus lourdes que celles applicables aux violations des obligations de diligence raisonnée et de traçabilité. Parmi les facteurs pris en considération par les États membres pour déterminer le niveau des sanctions figurent les conditions économiques nationales et les niveaux des sanctions imposées pour la violation d’autres obligations comparables, par exemple dans la réglementation européenne en matière de commerce des espèces sauvages 10 . Bien que les États membres aient le pouvoir d’imposer des sanctions, la différence trop importante dans les niveaux de sanctions a pour conséquence que les opérateurs de l’UE ne sont pas sur un pied d’égalité.

Dans 19 États membres, les contrôles ont donné lieu à l’application de mesures correctives ou de sanctions pour violation des obligations du règlement «Bois». Des enquêtes ont été ouvertes sur la base de rapports étayés émanant de tiers. Alors qu’un nombre limité de sanctions ont jusqu’à présent été appliquées, il est encore impossible de déterminer si elles sont «effectives, proportionnées et dissuasives».

4.3 Contrôle des opérateurs et des organisations de contrôle

Vingt-six États membres 11 ont signalé que leurs autorités compétentes ont mis en place des plans pour le contrôle des opérateurs, conformément à l’article 10, paragraphe 2, du règlement «Bois». Toutes les autorités compétentes appliquent une approche fondée sur les risques pour la préparation et la révision de leurs plans. Parmi les facteurs de risque figurent les caractéristiques des fournisseurs et de leurs produits, le type d’opérateurs, ainsi que les informations reçues de la part de tiers (les «rapports étayés»).

Tous les États membres n’ont pas indiqué avoir procédé à des contrôles. Dans plusieurs pays, les contrôles ont commencé tardivement en raison des retards pris dans l’adoption de la législation nationale pertinente et étaient sporadiques au début; ils sont devenus toutefois plus systématiques et rigoureux avec le temps.

La reconnaissance des organisations de contrôle par la Commission a commencé en août 2013, lorsque les deux premières organisations ont été reconnues. Au moment de l’évaluation, la Commission avait reconnu neuf organisations de contrôle 12 . Les autorités compétentes étant obligées 13 de procéder au contrôle d’une organisation de contrôle au moins tous les deux ans, les contrôles de la première organisation de contrôle reconnue ont été effectués au cours du second semestre de 2015, soit après la période d’évaluation couverte par le présent rapport.

4.4 Communication, diffusion, coopération et échange d’informations

En 2012, la Commission a mené une campagne de communication sur le règlement «Bois» 14 et les États membres ont indiqué avoir également réalisé des campagnes nationales de sensibilisation. Afin de contribuer à une interprétation harmonisée des principales dispositions du règlement en vue de parvenir à une application uniforme dans l’Union, un document d’orientation sur le règlement «Bois» a été élaboré par la Commission en étroite collaboration avec les États membres 15 . Les États membres, assistés par la Commission, ont cependant fourni assez peu d’assistance et de conseils aux petites et moyennes entreprises (PME).

La Commission et les États membres ont coopéré étroitement et, dans ce cadre, des réunions d’experts sur la mise en œuvre ont été organisées, ainsi que des réunions ciblées sur le contrôle de l’application du règlement; enfin des contacts ont été noués avec toute une série de pays tiers producteurs et consommateurs de bois. En janvier 2015, la Commission a mis en place une plateforme de communication électronique pour l’échange d’informations entre les autorités compétentes des États membres.

5. Évaluation

5.1. Pertinence

L’Union est déterminée à lutter contre l’exploitation illégale des forêts et le commerce qui y est associé, qui restent un problème persistant à travers le monde, entraînant de nombreuses conséquences environnementales, sociales et économiques négatives. Le règlement «Bois», qui fait partie du plan d’action FLEGT, a été adopté en tant qu’instrument global visant à garantir que seuls les produits faits de bois récolté de manière légale sont commercialisés dans l’UE. Il a été établi que depuis son entrée en vigueur, le règlement a encouragé des politiques d’approvisionnement plus responsables et, par conséquent, a démontré qu'il peut changer le comportement des opérateurs sur le marché et établir des chaînes d’approvisionnement exemptes de bois récolté de manière illégale, contribuant ainsi à la réalisation des objectifs généraux du plan d’action FLEGT.

La pertinence du règlement a été confirmée dans le septième programme d’action pour l’environnement (2013-2020), qui renvoie explicitement au règlement «Bois» comme faisant «office de base juridique permettant à l’Union de traiter le problème mondial de l’exploitation illégale des forêts dans le cadre de sa demande en bois et en produits du bois» 16 .

L’évaluation a démontré que le règlement est considéré par de nombreuses parties prenantes comme apportant une valeur ajoutée significative aux efforts internationaux destinés à mettre un terme à la déforestation et à la dégradation des forêts, à préserver la biodiversité et à lutter contre le changement climatique (en réduisant les émissions issues de la déforestation, en renforçant le rôle de la préservation des forêts, de leur gestion durable et du renforcement des stocks de carbone forestiers dans les pays en développement, sur la base du cadre de Varsovie pour la REDD+) 17 , contribuant ainsi au respect des obligations internationales de l’UE.

5.2. Valeur ajoutée de l’UE

La lutte contre l’exploitation illégale des forêts et le commerce qui y est associé représente un défi mondial, qui ne peut être relevé de manière efficace par l’action individuelle des États membres. En établissant des règles uniformes au niveau de l’UE, le règlement «Bois» permet à l’Union et à ses États membres de profiter pleinement de leur influence combinée sur le marché pour garantir une demande de bois récolté de manière légale et d’éviter les distorsions du marché de l’Union qui se seraient produites si chaque État membre avait mis en place des règles différentes.

Le règlement «Bois» vise à créer des conditions équitables en imposant des exigences identiques de légalité pour le bois récolté au niveau national et pour les produits dérivés importés; il introduit également un contrôle supplémentaire applicable à tous les opérateurs dans l’Union. Sans le règlement «Bois», le processus de création de conditions équitables pour les opérateurs économiques serait discontinu, mettant les opérateurs qui appliquent déjà des exigences de diligence raisonnée dans une position défavorable, notamment parce que du bois illégal moins cher entrerait librement dans le marché de l’Union. Sans le règlement «Bois», les progrès réalisés par rapport à d’autres éléments du plan d’action FLEGT, par exemple les accords de partenariat volontaires (APV), ainsi que la possibilité pour l’Union de s’engager en faveur de la lutte contre l’exploitation illégale des forêts dans de récents accords commerciaux bilatéraux, seraient sérieusement compromis.

5.3. Efficience

Le règlement «Bois» entraîne des coûts de mise en conformité pour les États membres, notamment pour la réalisation des contrôles des opérateurs et des organisations de contrôle. Dans de nombreux cas, les ressources humaines et financières consacrées aux contrôles des opérateurs semblent démesurément faibles par rapport au nombre d’opérateurs dans ces pays, ce qui limite l’effet dissuasif des activités de contrôle de l’application du règlement. L’évaluation a démontré que les ressources financières attribuées aux autorités compétentes varient considérablement d’un État membre à l’autre. À cet égard, il convient de noter que certains États membres n’ont affecté aucune ressource financière supplémentaire à la mise en œuvre et au contrôle de l’application du règlement «Bois».

Le règlement «Bois» occasionne également des coûts de mise en conformité pour le secteur privé. Ces coûts dépendent de l’existence de politiques d’approvisionnement responsables antérieures, du type et de la complexité des produits commercialisés, du nombre et de la situation géographique des fournisseurs et, enfin, de la complexité des chaînes d’approvisionnement. Les coûts des entreprises peuvent inclure des investissements dans des systèmes d’information, la mise en place d’une expertise interne et la formation du personnel. Cette évaluation coïncide en grande partie avec l’estimation des coûts qui figure dans l’analyse d’impact 18 effectuée en 2008, lorsque la Commission a présenté sa proposition de règlement. Les coûts de mise en conformité pour l’obligation d’interdiction devaient être neutres, tandis que ceux concernant l’obligation de diligence raisonnée étaient jugés dépendants de la préexistence de systèmes de contrôle dans la politique d’approvisionnement des entreprises et de leur qualité.

Les coûts de mise en conformité pour le secteur privé sont généralement considérés comme raisonnables, pour les entreprises qui appliquent déjà des politiques d’approvisionnement responsables. Cela peut également être le cas pour celles optant pour des pratiques économiquement avantageuses (voir ci-dessous) ou commercialisant des produits dérivés du bois par l'intermédiaire de chaînes d’approvisionnement relativement simples.

Conséquences administratives pour les PME

L’obligation de diligence raisonnée du règlement «Bois» s’applique à toutes les entreprises, quelle que soit leur taille. Les grandes entreprises semblent avoir été en mesure de s’adapter mieux et plus rapidement aux nouvelles exigences que les PME. Les PME peuvent sembler désavantagées en raison de leurs faibles économies d’échelle, les frais du système de diligence raisonnée devant être couverts par un chiffre d’affaires moindre. Cependant, rien n’indique clairement que le fait d’être une plus petite entreprise est un obstacle à l’application d’un système de diligence raisonnée efficace 19 .

L’évaluation se base sur un très petit échantillon, qui a répondu à la consultation publique en ligne. Elle a démontré que certaines PME considèrent la mise en conformité avec le règlement «Bois» comme un défi, en raison des difficultés à comprendre les exigences techniques du système de diligence raisonnée, du manque de personnel doté des connaissances adéquates et de l’expérience nécessaire pour exercer la diligence raisonnée et/ou des ressources financières limitées dont elles disposent pour mettre à jour leurs systèmes de contrôle existants.

Les données disponibles montrent que les coûts de mise en conformité pour les PME peuvent être réduits si les entreprises ont recours à des pratiques économiquement avantageuses (voir ci-dessous), évitent les solutions informatiques coûteuses et bénéficient d’un soutien technique externe pour concevoir et appliquer un système de diligence raisonnée adéquat.

Pratiques économiquement avantageuses

Durant la mise en œuvre du règlement «Bois», plusieurs pratiques économiquement avantageuses ont été recensées: i) la coopération entre les autorités des États membres ainsi qu’entre ces autorités et leurs homologues de pays tiers; ii) l’utilisation par les autorités compétentes des rapports étayés émanant de tiers concernant le respect du règlement, et iii) la mise au point par les opérateurs de systèmes de diligence raisonnée qui ne satisfont pas uniquement aux exigences du règlement «Bois», mais également à d’autres instruments juridiques [la loi Lacey (Lacey Act) américaine et la loi australienne sur l’interdiction de l’exploitation illégale des forêts]; iv) l’utilisation par les opérateurs de systèmes de vérification tierce partie volontaires (c’est-à-dire la certification volontaire des forêts) dans le processus d’évaluation et d’atténuation des risques; v) l’utilisation aux fins de la diligence raisonnée des résultats des négociations menées par l’UE avec les pays ayant signé un APV concernant les définitions de la légalité et les contacts avec les autorités nationales.    

Depuis l’entrée en vigueur du règlement «Bois», les principaux régimes de certification du bois ont adapté leurs normes pour refléter la portée de la définition de la légalité consacrée dans le règlement et les opérateurs de l’UE peuvent désormais facilement utiliser ces normes dans leur processus d’évaluation et d’atténuation des risques. Le rôle des systèmes de vérification tierce partie dans la mise en œuvre de la législation pourrait être davantage expliqué dans le document d’orientation sur le règlement «Bois».

5.4. Efficacité

Les défis majeurs suivants relatifs à l’application efficace du règlement «Bois» ont été mis en lumière durant le processus d’évaluation: ressources humaines et financières insuffisantes attribuées aux autorités compétentes, différences au niveau des types et niveaux de sanctions d’un État membre à l’autre et manque de compréhension et d’application uniformes du règlement dans l'ensemble de l’Union. Ces défis se sont traduits par une application inégale, ce qui crée des conditions inéquitables pour les opérateurs économiques.

L’évaluation a toutefois démontré que le règlement et les campagnes de communication réalisées par la Commission et les États membres ont renforcé la prise de conscience du problème de l’exploitation illégale des forêts. Le règlement, texte présentant de l’intérêt pour l’EEE, a été inclus dans l’accord sur l’Espace économique européen (EEE) et est actuellement également mis en œuvre par la Norvège, l’Islande et le Liechtenstein. Il incite les pays producteurs à mettre en place des systèmes permettant de vérifier et de démontrer qu'ils respectent les exigences de légalité, et encourage également certains pays tiers à conclure des APV FLEGT avec l’Union 20 . Par ailleurs, il a encouragé, avec la loi Lacey américaine, d’autres pays consommateurs à intégrer à leur législation nationale des actes législatifs similaires (Australie, Suisse) ou à commencer à envisager l’adoption de mesures visant des objectifs similaires (Chine, Japon, Corée). Le règlement «Bois» a également influencé des modifications de la réglementation européenne en matière de commerce des espèces sauvages 21 qui ont renforcé le règlement de la Commission, en donnant aux autorités de gestion des États membres une base juridique pour refuser la délivrance d’un certificat d’importation en cas de doutes sérieux quant à la légalité d’une livraison d’espèces CITES.

Efficacité de l’interdiction de mise sur le marché (article 4, paragraphe 1)

Les États membres n’ont signalé aucun cas d’enquête clôturé pour violation de l’obligation d’interdiction 22 . En raison du temps limité et de l’expérience insuffisante enregistrée dans l’application de l’interdiction, aucune conclusion n’a pu être tirée en ce qui concerne son efficacité.

Une évaluation quantitative de l’impact du règlement «Bois» sur le commerce de bois issus d’une récolte illégale est difficile en raison de la nature clandestine des activités. Les statistiques commerciales analysées ne montrent pas qu'un changement clair s'est produit au cours des deux dernières années dans les importations de bois et de produits dérivés qui pourrait être attribué sans ambiguïté à l’application du règlement «Bois».

Mise en œuvre des systèmes de diligence raisonnée (article 6)

Les opérateurs de l’Union n’ont pas mis en œuvre de manière uniforme les exigences de diligence raisonnée durant les deux premières années d’application du règlement. Bien que les données disponibles montrent que la situation s’améliore progressivement, la mise en conformité générale du secteur privé reste inégale et insuffisante.

Les contrôles effectués par les autorités compétentes ont révélé que si de nombreux opérateurs disposaient d’un type de système de diligence raisonnée, ceux-ci ne respectaient pas toujours les exigences du règlement «Bois», qui demandait l’imposition de mesures correctives. Certaines parties prenantes ont déclaré que l’obligation de diligence raisonnée pose un problème important au niveau de sa mise en œuvre, en raison de sa nouveauté et d’orientations insuffisantes. 

Parmi les principaux obstacles à la mise en place de systèmes de diligence raisonnée entièrement opérationnels figurent les difficultés à comprendre tous les éléments nécessaires pour mettre en place un système de diligence raisonnée solide, les difficultés à rassembler des informations sur la législation applicable dans les pays producteurs, ainsi que le manque de coopération avec les fournisseurs et de mesures appropriées d’évaluation et d’atténuation des risques.

Les organisations de contrôle reconnues fournissent aux opérateurs un système de diligence raisonnée s’ils n’ont pas la capacité interne de concevoir leur propre système. Les opérateurs manifestent très peu d’intérêt pour les services des organisations de contrôle et seule une partie d’entre eux utilisent actuellement le système de diligence raisonnée des organisations de contrôle et leurs services de vérification. Un faible niveau de contrôle du respect de la législation par les autorités compétentes n’encourage pas l’adoption d’un système de diligence raisonnée, et les opérateurs sont réticents à signer un contrat avec une organisation de contrôle, car celle-ci est tenue, en vertu du règlement «Bois», de notifier aux autorités compétentes tout manquement majeur.

Bien que la mise en conformité avec l’obligation de diligence raisonnée se soit faite lentement, il s’avère que les opérateurs mettent progressivement en œuvre un système de diligence raisonnée, exigeant davantage d’informations et une garantie de légalité de la part de leurs fournisseurs. Cela démontre que l’obligation de diligence raisonnée pourrait changer les comportements des opérateurs sur le marché, créant ainsi des chaînes d’approvisionnement exemptes de bois issus d’une récolte illégale. Cependant, une évaluation définitive ne peut encore être réalisée.

5.5. Cohérence

Le règlement «Bois» est cohérent avec d’autres actes législatifs dans le secteur forestier et d’autres secteurs, et notamment avec le régime d’autorisation des APV FLEGT et la réglementation européenne en matière de commerce des espèces sauvages.

Progrès relatifs aux APV FLEGT

Les APV sont un élément essentiel du plan d’action FLEGT. Il s’agit d’accords bilatéraux entre l’Union et les pays tiers producteurs ou exportateurs de bois, négociés à la demande d’un de ces pays. Les APV prévoient l’établissement d’un régime d’autorisation FLEGT en vue de garantir la légalité des importations de produits dérivés du bois en provenance de ces pays dans l’Union. Le règlement «Bois» prévoit une présomption de légalité des produits dérivés couverts par une autorisation FLEGT 23 .

Six 24 APV ont été signés jusqu’à présent, et neuf 25 supplémentaires sont en cours de négociation. Les deux pays les plus avancés sont l’Indonésie et le Ghana, et les premiers produits dérivés du bois bénéficiant d’une autorisation FLEGT en provenance de l’un de ces pays (ou des deux) devraient être importés dans l’Union en 2016.

Nonobstant les progrès réalisés dans un certain nombre de pays APV FLEGT, en l’absence de bois autorisé FLEGT sur le marché de l’Union, il n’apparaît pas clairement que les APV ont contribué à minimiser la présence de bois issu d’une récolte illégale et des produits dérivés de ce bois sur le marché intérieur.

6. Gamme de produits concernés

La gamme de produits concernés par le règlement «Bois» est définie dans son annexe en utilisant une combinaison de références aux codes de la nomenclature combinée (NC) de l’Union et de descriptions des produits. Le règlement «Bois» couvre un nombre significatif de produits à base de bois, mais tous ne sont pas inclus dans son champ d’application. Plusieurs dérogations existent dans le texte du règlement 26 et dans son annexe. Certains produits à base de bois, comme les instruments de musique (NC 92), les cercueils en bois (NC 4421) ou les sièges en bois (NC 94), ne sont pas couverts par le règlement.

Les consultations avec les parties prenantes ont démontré que bon nombre d’entre elles ne considèrent pas la gamme actuelle de produits couverts par le règlement «Bois» comme optimale et estiment qu’elle devrait inclure davantage de produits dérivés du bois, comme les produits visés ci-dessus et le papier imprimé (voir ci-dessous). D’autres considèrent toutefois que la gamme de produits ne doit pas être élargie avant que le règlement «Bois» ne soit entièrement mis en œuvre et appliqué de manière efficace.

En termes de part de marché, un groupe important de produits actuellement non couverts se compose des «produits de l’édition, de la presse ou des autres industries graphiques; textes manuscrits ou dactylographiés et plans». Contrairement à la presse écrite nationale, où la légalité de la pâte et du papier importés est contrôlée, la presse écrite importée n’est pas soumise à la diligence raisonnée ni à des contrôles de la légalité des fibres de bois qu’elle contient. Elle comporte dès lors un risque plus élevé de provenir de bois issu d’une récolte illégale. La différence de traitement des produits imprimés fabriqués au niveau national et importés serait surmontée si le papier imprimé était inclus dans la gamme de produits. La variété et la complexité des produits imprimés devraient être prises en considération lorsque l’élargissement de la gamme de produits actuelle est envisagé.

7.    Conclusions

L’évaluation du règlement «Bois» intervient après seulement deux ans d’application, ce qui est insuffisant pour évaluer sa performance, notamment en raison de la nouveauté constituée par l’exigence de diligence raisonnée.

La mise en œuvre et l’application du règlement «Bois» ont été lentes et inégales durant les deux premières années, et demeurent incomplètes. Des progrès significatifs ont récemment été réalisés, même si, au moment de l’évaluation, tous les États membres ne satisfaisaient pas à toutes leurs obligations au titre du règlement. Il a été établi que les opérateurs se conforment progressivement à l’obligation de diligence raisonnée. Cependant, la mise en œuvre et l’application inégales durant les deux premières années n’ont pas facilité la création de conditions équitables, qui protégeraient les opérateurs d’une concurrence déloyale exercée par des produits faits à partir de bois issu d’une récolte illégale.

En raison de la période relativement courte écoulée depuis l’entrée en vigueur du règlement, l’évaluation n’a pas pu quantifier l’incidence du règlement sur le commerce de bois illégal et de produits dérivés de ce bois sur le marché intérieur; il était donc difficile de déterminer si le règlement a atteint son objectif qui est d’empêcher la mise sur le marché de bois illégal et de produits dérivés de ce bois.

Le règlement «Bois» est généralement perçu comme un instrument législatif important visant à combattre et à réduire l’exploitation illégale des forêts et le commerce de bois illégal et de produits dérivés de ce bois. Le règlement a incité d’autres pays consommateurs à élaborer des actes législatifs similaires. Par ailleurs, il représente le complément nécessaire axé sur la demande de l’instrument principal orienté sur l’offre: l’APV FLEGT. Sans le règlement «Bois», la mise en œuvre des APV serait beaucoup moins encouragée, car la garantie de légalité ne serait pas requise dans l’UE. 

Le règlement a sensibilisé l’industrie et les consommateurs au problème de l’exploitation illégale des forêts et de ses incidences sur l’environnement et le climat. Il a influencé les modifications visant à durcir la réglementation européenne en matière de commerce des espèces sauvages.

En ce qui concerne les points d’examen spécifiques repris à l’article 20 du règlement «Bois», l’évaluation a montré ce qui suit:

I.Les conséquences administratives pour les PME dépendent fortement de la complexité du contexte commercial de l’entreprise et de l’existence de politiques antérieures d’approvisionnement responsables. En raison de leurs faibles économies d’échelle, les PME peuvent sembler désavantagées en ce qui concerne l’application d’un système de diligence raisonnée efficace. Cependant, rien n’indique clairement que le fait d’être d’une plus petite entreprise est un obstacle à l’application d’un système de diligence raisonnée efficace.

II.En ce qui concerne la gamme de produits concernés, certaines parties prenantes la considèrent incomplète et suggèrent de l’étendre aux instruments de musique, aux cercueils, aux sièges et/ou au papier imprimé. Certaines parties prenantes ont même suggéré d’inverser l’approche de la gamme des produits concernés en y incluant tous les produits contenant du bois, avec d'éventuelles exceptions, tandis que d’autres considèrent que la gamme des produits concernés ne doit pas être élargie tant que le règlement «Bois» n’est pas appliqué de manière uniforme dans l’Union. La Commission pourrait envisager d’élargir la gamme des produits concernés, sous réserve d’une analyse d’impact des options.

III.En ce qui concerne l’efficacité de l’interdiction de mise sur le marché, aucune conclusion ne peut être tirée, en raison de l’expérience insuffisante en matière de contrôle du respect de cette interdiction. En ce qui concerne l’efficacité du système de diligence raisonnée, bien qu’elle soit difficile à comprendre et à appliquer, cette obligation semble avoir une incidence sur les pratiques des opérateurs.

8.    Recommandations et prochaines étapes

Afin de combler les lacunes identifiées, les États membres doivent fortement intensifier leurs efforts de mise en œuvre et de contrôle de l'application du règlement. Le niveau actuel en matière de capacité technique et de ressources (humaines et financières) attribuées aux autorités compétentes ne correspond pas aux besoins et doit être renforcé dans les États membres afin d’accroître le nombre et la qualité des contrôles de conformité. Cela incitera ensuite l’industrie à utiliser un système de diligence raisonnée fiable et réalisable. Des efforts supplémentaires doivent également être consentis par les autorités compétentes pour informer les opérateurs, notamment les PME, au sujet des exigences du règlement «Bois». Plus particulièrement, il convient d'encourager davantage les pratiques recensées comme étant économiquement avantageuses pour mettre en œuvre l’obligation de diligence raisonnée.

La Commission continuera de fournir des conseils aux États membres et aux opérateurs en complétant le règlement «Bois» par un document d’orientation, le cas échéant, en vue de parvenir à une application uniforme du règlement dans l’Union. Elle continuera de faciliter la communication et d’aider à harmoniser les approches entre les autorités compétentes en matière d'application de la législation lors des réunions du groupe d’experts.

Sur la base de ce qui précède, la Commission ne considère pas qu’il soit nécessaire de proposer des modifications des dispositions de fond du règlement «Bois», étant donné que l’évaluation n’a pas fait apparaître qu'il est clairement nécessaire de modifier des éléments essentiels de la législation. La Commission peut toutefois envisager d’élargir la gamme des produits concernés, qui figure à l’annexe du règlement «Bois», par un acte délégué sous réserve d’une analyse d’impact des options.

(1)

http://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/?uri=CELEX:32010R0995

(2)

 Communication de la Commission «Programme pour une réglementation affûtée et performante» -  COM(2014)368 .

(3)

https://ec.europa.eu/jrc/en/news/reporting-greenhouse-gas-emissions-deforestation-and-forest-degradation-pan-tropical-biomass-maps .

(4)

  Règlement délégué (UE) n° 363/2012 de la Commission (JO L 115 du 27.4.2012, p. 12) et règlement d’exécution (UE) n° 607/2012 de la Commission (JO L 177 du 7.7.2012, p. 16).

(5)

Article 7, paragraphe 1; article 10, paragraphe 1, et article 19 du règlement «Bois».

(6)

Article 13 du règlement «Bois».

(7)

 Hongrie, Grèce, Espagne et Roumanie.

(8)

http://ec.europa.eu/environment/forests/pdf/EUTR%20implementation%20scoreboard.pdf.

(9)

Rapports semestriels des États membres.

(10)

Règlement (CE) nº 338/97 du Conseil et règlement (CE) nº 865/2006 de la Commission.

(11)

La Grèce et la Hongrie n’ont pas fourni d’informations sur les facteurs de risque appliqués.

(12)

Trois organisations de contrôle supplémentaires ont été reconnues par la Commission après la période d’évaluation: http://ec.europa.eu/environment/forests/mos.htm.

(13)

Article 6, paragraphe 1, du règlement d’exécution (UE) nº 607/2012.

(14)

http://ec.europa.eu/environment/eutr2013/. 

(15)

http://ec.europa.eu/environment/forests/pdf/Final%20Guidance%20document.pdf.

(16)

Décision nº 1386/2013/UE du Parlement européen et du Conseil du 20 novembre 2013 relative à un programme d’action général de l’Union pour l’environnement à l’horizon 2020 «Bien vivre, dans les limites de notre planète» (JO L 354/171 du 28.12.2013, p. 177).

(17)

http://unfccc.int/land_use_and_climate_change/redd/items/8180.php.

(18)

Étude pour l’analyse d’impact des mesures supplémentaires éventuelles visant à prévenir l’importation ou la mise sur le marché de bois récolté de manière illégale ou de produits dérivés de ce bois. Voir http://ec.europa.eu/environment/forests/pdf/ia_report.pdf. Voir également le document de travail des services de la Commission accompagnant la proposition de règlement établissant les obligations des opérateurs qui mettent du bois et des produits dérivés sur le marché, disponible à l’adresse: http://ec.europa.eu/environment/forests/pdf/impact_assessment.pdf.

(19)

Voir une enquête sur l’approche en matière de diligence raisonnée des petites et moyennes entreprises effectuée par le Forum mondial du bois (GTF) en 2015: http://www.illegal-logging.info/content/gtf-supplier-and-consumer-due-diligence-analysis.

(20)

Il s’est avéré que les exportations d’Indonésie vers l’Union ont augmenté en 2014 et 2015, ce qui peut s'expliquer également par le fait que la mise en conformité avec le règlement «Bois» de bois couvert par un certificat Sistem Verifikasi Legalitas Kayu (SVLK), c’est-à-dire le système indonésien de garantie de la légalité du bois, a été facilitée.

(21)

Règlement (UE) 2015/870 de la Commission du 5 juin 2015 modifiant, en ce qui concerne le commerce des espèces de faune et de flore sauvages, le règlement (CE) nº 865/2006 portant modalités d’application du règlement (CE) nº 338/97 du Conseil (JO L 142 du 6.6.2015, p. 3).

(22)

Dans quelques cas individuels, les enquêtes sur la légalité des produits dérivés importés ont été réalisées sur la base de rapports étayés.

(23)

Article 1, paragraphe 3, du règlement «Bois».

(24)

  Cameroun , République centrafricaine , Ghana , Indonésie , Liberia , République du Congo .

(25)

  Côte d’Ivoire , République démocratique du Congo , Gabon , Guyana , Honduras , Laos , Malaisie , Thaïlande , Viêt Nam .

(26)

Article 2, points a) et b); et article 3 du règlement «Bois».