24.3.2017   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 93/71


P7_TA(2014)0079

Accords de coopération de l'UE relatifs à l'application de la politique de concurrence — la voie à suivre

Résolution du Parlement européen du 5 février 2014 sur les accords de coopération de l'UE relatifs à l'application de la politique de concurrence — la voie à suivre (2013/2921(RSP))

(2017/C 093/13)

Le Parlement européen,

vu la proposition de décision du Conseil sur la conclusion d'un accord entre l'Union européenne et la Confédération suisse concernant la coopération en matière d'application de leur droit de la concurrence (COM(2012)0245),

vu l'accord conclu le 17 mai 2013 entre l'Union européenne et la Confédération suisse concernant la coopération en matière d'application de leur droit de la concurrence (12418/2012),

vu la demande d'approbation présentée par le Conseil conformément aux articles 103 et 352, en liaison avec l'article 218, paragraphe 6, point a), v), du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (C7-0146/2013),

vu la question à la Commission sur les accords de coopération de l'Union européenne relatifs à l'application de la politique de concurrence — la voie à suivre (O-000022/2014 — B7-0105/2014),

vu l'article 115, paragraphe 5, et l'article 110, paragraphe 2, de son règlement,

1.

se félicite de la proposition d'un accord entre l'Union européenne et la Confédération suisse concernant la coopération en matière d'application de leur droit de la concurrence (ci-après dénommé «l'accord»); est très favorable à ces accords de coopération visant à faire respecter les règles de concurrence dans un environnement économique de plus en plus mondialisé où les ententes ne s'arrêtent pas aux frontières et où les fusions concernent souvent plusieurs juridictions;

2.

est convaincu de la nécessité d'un tel accord avec la Suisse, compte tenu de la situation géographique stratégique de ce pays pour l'Union européenne, de la présence en Suisse de nombreuses entreprises européennes et inversement, et du nombre d'enquêtes parallèles menées par les deux juridictions ces dernières années; estime en outre que la mise en œuvre de cet accord sera facilitée du fait du degré élevé de compatibilité des règles de fond de l'Union et de la Suisse en matière de concurrence; espère que les poursuites judiciaires à l'encontre des ententes internationales et les sanctions contre les infractions graves commises hors frontières seront plus efficaces grâce à cet accord et que la duplication des travaux des autorités de concurrence à propos de décisions portant sur des faits similaires et le risque d'interprétations divergentes dans les deux juridictions en seront réduits; appelle la Commission européenne et la Commission de la concurrence suisse à rester fermes dans leur détermination à lutter contre les ententes, celles-ci étant préjudiciables au bien-être des consommateurs et à l'innovation et ayant un impact négatif sur la compétitivité des deux économies;

3.

regrette cependant que cet accord n'instaure pas d'obligations contraignantes en matière de coopération et laisse une grande marge d'appréciation, notamment eu égard à des «intérêts importants» pouvant être invoqués par l'une ou l'autre des parties pour justifier qu'elle ne donne pas suite à une demande présentée par l'autre partie; demande à la Commission et aux autorités suisses de coopérer de bonne foi; invite également les autorités nationales de concurrence de l'UE et la Commission de la concurrence suisse à coopérer sur une base réciproque;

4.

souligne l'importance de veiller à ce que les garanties de procédure accordées aux parties dans leurs systèmes juridiques respectifs soient respectées; appelle à établir des mécanismes sûrs pour l'utilisation et la transmission d'informations confidentielles; invite la Commission à garantir l'attrait des programmes de clémence et des procédures de transaction malgré le principe général régissant l'échange d'informations confidentielles consacré dans cet accord; insiste dès lors sur l'importance de protéger les documents relatifs aux demandes de clémence ou aux procédures de transaction, notamment contre d'éventuelles divulgations futures dans le cadre de procédures civiles ou pénales, et de fournir aux demandeurs de mesures de clémence et aux parties à une procédure de transaction la garantie que ces documents ne seront pas transmis et utilisés sans leur consentement préalable; souligne que la protection des données à caractère personnel et des secrets commerciaux doit être pleinement garantie;

5.

fait remarquer qu'une approche cohérente en matière de recours contre des décisions finales dans les deux juridictions serait souhaitable et invite la Commission européenne et la Commission de la concurrence suisse à étudier cette possibilité de coopération complémentaire; relève toutefois que le fait de permettre aux parties d'introduire un recours contre des décisions intermédiaires comme par exemple l'échange d'informations bloquerait les enquêtes et pourrait compromettre l'efficacité de cet accord;

6.

appelle les États membres et leurs autorités de concurrence à coopérer pleinement avec la Commission afin d'assurer la mise en œuvre effective de cet accord; considère qu'il est essentiel de suivre de près sa mise en œuvre afin de tirer des leçons de cette expérience et de déceler d'éventuels éléments problématiques; à cet égard, demande à la Commission d'assurer un tel suivi;

7.

relève toutefois que les progrès réalisés en ce qui concerne la coopération en matière d'application des règles de concurrence de la Suisse et de l'Union ne sauraient masquer la nécessité urgente d'un accord institutionnel global entre la Suisse et l'Union garantissant une interprétation, un suivi et une application uniformes de leurs accords bilatéraux; invite dès lors la Commission à conclure rapidement et à soumettre au Parlement un accord institutionnel global entre la Suisse et l'UE afin de garantir l'efficacité de cet accord;

8.

estime que la nouvelle disposition la plus importante introduite par ce type d'«accord de seconde génération», à savoir la possibilité pour la Commission européenne et la Commission de la concurrence suisse d'échanger des informations confidentielles, représente une avancée positive; est convaincu que cet accord pourrait être considéré comme un modèle pour de futurs accords bilatéraux de coopération en matière d'application des règles de concurrence, dès lors qu'il existe un degré élevé de similitude entre les parties à l'accord en ce qui concerne leurs règles de fond en matière de concurrence, leurs pouvoirs d'enquête et les sanctions applicables; est d'avis que l'Union européenne devrait adopter un cadre général établissant une base commune minimale et cohérente pour des négociations futures sur la coopération en matière d'application des règles de concurrence, en laissant toutefois une marge de manœuvre à la Commission pour lui permettre d'atteindre des objectifs plus ambitieux, le cas échéant; relève que ce cadre devrait inclure des règles relatives à des canaux sûrs pour la transmission des informations confidentielles;

9.

invite la Commission à encourager activement la coopération en matière d'application des règles de concurrence au niveau international, principalement dans les enceintes multilatérales telles que l'Organisation mondiale du commerce (OMC), le réseau international de la concurrence (RIC) et l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE); est convaincu que cela constituerait le moyen de coopération le plus efficace, car les enquêtes concernent souvent de nombreuses juridictions pour lesquelles il n'existe pas d'accords bilatéraux entre toutes les parties ou pour lesquelles les accords bilatéraux contiennent des dispositions différentes; appelle l'OCDE et le RIC à développer des outils facilitant la coopération multilatérale et à maintenir à jour les orientations relatives aux meilleures pratiques;

10.

fait remarquer que, face à une coopération multilatérale qui n'est pas pleinement opérationnelle, le Conseil et la Commission devraient promouvoir ce type d'accord bilatéral; encourage la Commission à étudier la possibilité d'ouvrir des négociations similaires avec les pays ayant déjà conclu un accord de première génération, ainsi qu'avec d'autres acteurs importants sur la scène internationale et d'autres économies émergentes, comme la Chine ou l'Inde, dès lors qu'il existe un degré suffisant de similitude entre les parties à l'accord en ce qui concerne leurs règles de fond en matière de concurrence, leurs pouvoirs d'enquête et les sanctions applicables; en ce qui concerne la Chine, est favorable à un renforcement de la coopération sur la base du mémorandum d'accord UE/Chine sur la coopération dans le domaine de l'application de la loi anti-monopole du 20 septembre 2012 et demande que cette question soit incluse dans les négociations relatives au traité bilatéral en matière d'investissements afin de mieux protéger les droits des entreprises de l'Union; souligne qu'une stratégie visant la convergence dans l'application des règles anti-trust à l'échelle mondiale devrait permettre d'élaborer des moyens efficaces pour veiller à ce que le droit de la concurrence dans les pays tiers ne soit pas utilisé comme un moyen détourné pour poursuivre des objectifs de politique industrielle;

11.

se félicite dans ce contexte du mémorandum d'accord sur la coopération en matière d'application des règles de concurrence signé avec l'Inde le 21 novembre 2013, de la négociation en cours d'un accord bilatéral de deuxième génération avec le Canada et de la négociation des dispositions relatives à la coopération en matière de concurrence énoncées dans l'accord de libre-échange avec le Japon; souligne que si le mémorandum d'accord ou l'accord de libre-échange constituent un bon départ en matière de coopération, il est essentiel de tendre, à long terme, vers un type de coopération plus élaboré et contraignant étant donné que les ententes internationales et les infractions à la concurrence revêtent de plus en plus un caractère mondial;

12.

demande à la Commission et au Conseil d'accorder un plus haut degré de priorité au renforcement du volet des accords de libre-échange relatif à la politique de concurrence;

13.

note toutefois que des similarités suffisantes entre les régimes juridiques de concurrence concernés sont essentielles et qu'il doit être garanti que les informations transmises par l'Union européenne ne pourront pas être utilisées pour imposer des peines privatives de liberté à des personnes physiques, aussi longtemps que cela restera la ligne de conduite de l'Union;

14.

demande à la Commission de communiquer régulièrement au Parlement des informations à jour sur tous les types d'activités qu'elle mène dans le domaine de la coopération internationale, qu'il s'agisse d'initiatives multilatérales ou d'initiatives bilatérales de différents types (accords formels, mémorandums d'accord, etc.) bien avant le résultat final, en particulier sur les négociations en cours concernant l'accord bilatéral avec le Canada; demande que ces types d'activités soient inclus dans le programme de travail annuel présenté au Parlement par le commissaire en charge de la concurrence et que le commissaire informe régulièrement par lettre le président de la commission parlementaire compétente sur l'évolution de la coopération internationale en matière d'application des règles de concurrence;

15.

demande à la Commission, eu égard aux futures négociations sur les accords de concurrence, de fournir des informations plus détaillées et fréquentes au Parlement;

16.

charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission, aux autorités nationales de concurrence, à la Commission de la concurrence suisse, à l'OMC, à l'OCDE et au RIC.