19.9.2013   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 271/91


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions — Investir dans le domaine social en faveur de la croissance et de la cohésion, notamment par l'intermédiaire du Fonds social européen, au cours de la période 2014-2020»

COM(2013) 83 final

2013/C 271/17

Rapporteur: M. Oliver RÖPKE

Le 18 mars 2013, la Commission européenne a décidé, conformément à l'article 304 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions – Investir dans le domaine social en faveur de la croissance et de la cohésion, notamment par l'intermédiaire du Fonds social européen, au cours de la période 2014-2020»

COM(2013) 83 final.

La section spécialisée «Emploi, affaires sociales, citoyenneté», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 23 avril 2013.

Lors de sa 490e session plénière des 22 et 23 mai 2013 (séance du 22 mai 2013), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 160 voix pour, 3 voix contre et 11 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

Le CESE se félicite du paquet Investissement social de la Commission européenne et du changement de modèle qu'il représente à cet égard, les investissements sociaux accrus n'étant plus uniquement considérés comme un facteur de coût mais aussi comme des investissements pour l'avenir, ainsi que pour la croissance et l'emploi, qui apportent une contribution essentielle à la réalisation des objectifs de la stratégie Europe 2020 et représentent un élément fondamental du modèle social européen.

1.2

Si des investissements sociaux ciblés sont source de progrès économique et social, ils permettent dans le même temps de renforcer la compétitivité. En particulier en cette période de chômage sans précédent et de pauvreté croissante, les investissements dans l'État-providence jouent par ailleurs un rôle déterminant pour le renforcement de la cohésion sociale, pour l'inclusion sociale, ainsi que pour la lutte contre l'exclusion sociale et la pauvreté.

1.3

Le marché du travail est l'élément clé pour affronter avec succès les mutations démographiques et pour assainir les budgets publics de manière pérenne. Le CESE estime que des investissements sociaux forts et ciblés améliorent durablement l'employabilité des personnes. Le paquet Investissement social peut donc très largement contribuer à un changement de politique aux fins d'un renforcement de la croissance et de l'emploi, s'il est mis en œuvre de façon cohérente dans la pratique.

1.4

Le CESE rejoint la Commission européenne sur le fait que l'aménagement de la politique sociale relève avant tout de la responsabilité des États membres et que chaque pays doit trouver son propre équilibre entre viabilité et pertinence de son système social et de l'organisation de ses services sociaux. Du fait de l'importance des disparités nationales, la Commission devrait jouer un rôle central pour l'échange de bonnes pratiques et d'approches innovantes entre les États membres et tous les acteurs concernés.

1.5

Le CESE se félicite que, dans sa communication, la Commission reconnaisse expressément la contribution importante de l'économie sociale, des entreprises sociales, de la société civile et des partenaires sociaux à la mise en œuvre du paquet Investissement social. Dans ce contexte, il adhère explicitement à la demande d'association fondamentale des partenaires sociaux et des acteurs de la société civile organisée au niveau des États membres et dans le cadre du processus de coordination du semestre européen.

1.6

Le CESE invite la Commission européenne à présenter un plan en vue de la mise en œuvre concrète du paquet Investissement social, à aider les États membres à prendre les mesures nécessaires et à favoriser les échanges entre les pays, les partenaires sociaux, les organisations de l'économie sociale, les organisations non gouvernementales, la société civile organisée et les prestataires de services sociaux. Ces acteurs disposent de l'expertise technique nécessaire dans les domaines des investissements sociaux, de l'innovation sociale et de la promotion de l'emploi.

1.7

Toutefois, le CESE regrette que la question du financement du paquet Investissement social reste en grande partie sans réponse. Sans modification de la politique unilatérale de réduction des dépenses, il semble irréaliste que les propositions puissent être mises en œuvre avec succès. S'il convient de se féliciter de la meilleure utilisation des Fonds structurels et d'investissement européens, ainsi que du niveau d'efficacité et de pertinence des mesures le plus élevé possible, ces éléments ne seront en aucun cas suffisants pour parvenir au changement de cap souhaité.

1.8

Le CESE réaffirme par conséquent qu'il est indispensable de trouver de nouvelles sources de recettes pour assainir les budgets publics. À cet égard, il convient aussi bien de mentionner des mesures telles que la modification et l'élargissement des assiettes fiscales, la suppression des paradis fiscaux, la fin de la concurrence fiscale (très préjudiciable), ainsi que la lutte contre la dissimulation fiscale et les contributions pour les différents types de patrimoines.

1.9

Dans ce contexte, le CESE réaffirme notamment expressément sa demande d'un programme européen de relance et d'investissement à hauteur de 2 % du PIB. Un tel programme permettrait de financer un pacte d'investissement social, qui rendrait possible dans les faits également, en dépit de l'assainissement budgétaire souhaité, le changement de priorités politiques au profit du développement des investissements sociaux ainsi que le renforcement et la modernisation de la politique sociale dans les États membres. Seul un financement suffisant permettra de mettre en œuvre avec succès le paquet Investissement social; dans le cas inverse, il faudra se contenter des déclarations d'intention.

1.10

Le CESE invite la Commission à refléter, dans le cadre du processus de coordination du semestre européen également, la plus grande place accordée aux investissements sociaux. Cette nouvelle priorité doit être explicitement prise en compte dans les recommandations spécifiques par pays ainsi que dans l'examen annuel de la croissance à venir (2014). Commission doit rapidement présenter des propositions concrètes dans ce sens. Il y a lieu de préciser qu'un renforcement des investissements sociaux est compatible avec un assainissement budgétaire «différencié et favorable à la croissance»

2.   Le paquet Investissement social en faveur de la croissance et de la cohésion

2.1

L'un des objectifs prévus par la stratégie Europe 2020 est de faire sortir de la pauvreté au moins 20 millions de citoyens d'ici à 2020. Les conséquences profondes de la crise et la nécessité de rétablir la croissance ont amené la Commission à prendre toute une série d'initiatives visant en règle générale à préserver et à créer des emplois, à assurer des transitions professionnelles sans heurts et à favoriser l'intégration sur le marché du travail (1).

2.2

Le 20 février 2013, la Commission a publié son paquet «Investissement social», attendu de longue date. Ce dernier recouvre une communication («Investir dans le domaine social en faveur de la croissance et de la cohésion, notamment par l'intermédiaire du Fonds social européen, au cours de la période 2014-2020») et une recommandation de la Commission («Investir dans l'enfance pour briser le cercle vicieux de l'inégalité»), accompagnées de sept documents de travail des services de la Commission.

2.3

Ce paquet propose d'améliorer les investissements sociaux dans le contexte du semestre européen et rationalise la gouvernance et la communication obligatoire de l'Union et de ses États membres en vue d'atteindre les objectifs de la stratégie Europe 2020 dans le domaine des politiques sociales, de l'emploi et de l'éducation.

2.4

La Commission constate que dans de nombreux États membres, la pauvreté, l’exclusion sociale et l'exclusion du marché du travail se sont accrues pour de nombreux citoyens de l'Union au cours de la crise qui perdure en Europe depuis 2008 et qu'en l'occurrence, des niveaux sans précédent ont été atteints, en particulier dans les groupes les plus vulnérables. Aussi, dans sa communication, la Commission invite-t-elle les États membres à accorder davantage d'importance aux investissements sociaux et à faire en sorte que les ressources soient utilisées de manière plus efficace.

2.5

Selon la Commission, les investissements sociaux aident les citoyens. Ils renforcent leurs capacités et leurs qualifications et favorisent leur participation à la société et au marché du travail. Ils produisent ainsi un surcroît de prospérité, relancent l'économie et aident l'UE à sortir de la crise à la fois renforcée, resserrée et plus compétitive.

2.6

Les systèmes de protection sociale remplissent à cet égard une triple fonction: investir dans le domaine social pour un avenir meilleur, assurer une protection sociale lors des périodes difficiles de la vie et, surtout, stabiliser les économies nationales.

2.7

En la matière, la Commission demande des mesures qui garantissent que les systèmes de protection sociale prennent en compte les besoins des citoyens lorsqu'ils traversent des périodes difficiles de leur vie. Pour y parvenir, la Commission réclame des mesures préventives sous la forme d'investissements aussi précoces que possible, plutôt que de réparer ultérieurement les dégâts, ce qui s'avère plus coûteux. De ce fait, il importe d'investir dans l'enfance et la jeunesse.

2.8

En posant des orientations, la recommandation de la Commission aux États membres précise plus avant cet aspect. La Commission est d'avis que l'on pourra obtenir les investissements afin de prévenir la pauvreté des enfants et l'exclusion sociale, qui doivent favoriser les intérêts supérieurs de l'enfant, grâce à un large éventail de mesures différentes.

2.9

Sous le mot d'ordre «Accroître l'efficacité des politiques sociales», la Commission demande dans sa communication d'utiliser plus efficacement les moyens financiers afin de garantir une sécurité sociale adéquate et durable, ainsi qu'une politique sociale de meilleure qualité et fondée sur des données probantes. Pour y parvenir, les États membres devraient simplifier la gestion des prestations et des services, accorder les prestations de manière plus ciblée tout en les liant à des conditions, telles que par exemple la participation à des actions de formation continue.

2.10

Dans sa communication, la Commission invite à plusieurs reprises les États membres à renforcer la participation de tous les acteurs pertinents, notamment des partenaires sociaux et des organisations de la société civile, à l'amélioration de la politique sociale dans le cadre de la stratégie Europe 2020.

3.   Observations générales sur le paquet Investissement social

3.1

Cela fait maintenant cinq ans que le programme politique de l'Union européenne est déterminé par la crise économique et financière et ses profondes répercussions sur la croissance et l'emploi, ainsi que sur la cohésion économique et sociale. Alors que, au début, les États membres ont réagi en mettant en œuvre une politique économique contracyclique de stabilisation de la conjoncture, les plans de sauvetage des banques notamment ont entraîné une augmentation considérable de la dette publique. Les efforts que les gouvernements ont déployés, lors du ralentissement de l'économie, pour assainir les budgets publics au moyen d'une politique unilatérale de réduction des dépenses sont globalement considérés comme un échec. La communication de la Commission sur les investissements sociaux apporte donc une nouvelle perspective pour lutter contre la crise, à savoir que, si les investissements sociaux sont évidemment liés à des coûts à court terme, ils sont toutefois associés à des gains de bien-être pour la société et à un accroissement des recettes au profit des budgets publics à moyen et à long terme, qui permettent en outre de réduire sensiblement les coûts futurs pour la société.

3.2

Le CESE se félicite donc expressément du paquet Investissement social de la Commission et du changement de modèle de programme tourné vers l'avenir qu'il représente à cet égard pour les institutions de l'UE. Désormais, la Commission invite expressément les États membres à accorder davantage d'importance aux investissements sociaux, ainsi qu'à moderniser et à renforcer la politique sociale, et à faire en sorte que les ressources disponibles soient utilisées de façon plus efficace. Il convient d'améliorer la viabilité de la politique sociale. De cette manière, il semble que la Commission corrige les errements de ces dernières années et cesse de considérer les investissements sociaux uniquement comme des facteurs de coût. Bien au contraire, ces investissements accroissent les qualifications et les capacités des citoyens, augmentent leurs chances d'intégration dans la société et sur le marché du travail et, partant, leur prospérité, ils ont des incidences favorables sur la croissance et aident l'UE à sortir de la crise renforcée et plus compétitive. Le paquet Investissement social pourrait ainsi représenter l'une des initiatives de politique sociale les plus importantes de ces dernières années, pour autant qu'il soit véritablement mis en œuvre de façon cohérente et ambitieuse. Un soutien durable de la Commission est nécessaire à cette fin.

3.3

L'aménagement des politiques sociales relève toutefois avant tout de la responsabilité des États membres. Les différentes situations au niveau national exigent que chaque État membre trouve son propre équilibre entre viabilité et pertinence de son système social, puisque aucun modèle unique n'est applicable à tous les États. La Commission devrait centraliser les meilleures pratiques, notamment pour ce qui est d'encourager les prestataires de services d'intérêt général au moyen des marchés publics et de la liberté de choix dans le domaine des services sociaux, et encourager les États membres à organiser leur système social de manière innovante et efficace en privilégiant l'emploi et l'intégration sur le marché du travail, de façon à atteindre l'objectif de lutte contre la pauvreté énoncé dans la stratégie Europe 2020.

3.4

En des temps où sévissent dans l'UE un chômage sans précédent et une pauvreté croissante, le rôle de l'État-providence est indispensable pour relever les défis qui se posent. Des investissements ciblés dans la protection sociale et l'État-providence permettent de résoudre des problèmes structurels et de créer des emplois. Il est possible de tirer un meilleur parti des possibilités existantes si on poursuit une stratégie active d'inclusion et de participation aussi globale que possible en faveur de couches aussi larges que possible de la population et si tous les États membres mettent en œuvre les recommandations relatives à l'inclusion active des personnes exclues du marché du travail, formulées en 2008.

3.5

Alors que les dépenses sociales étaient jusqu'à présent essentiellement associées à des «coûts» et que l'on réclamait la réduction des budgets sociaux, la communication à l'examen pourrait constituer dans une certaine mesure un changement de cap politique au niveau tant de l'UE que de certains États membres. Le CESE avait déjà défendu auparavant l'idée qu'il existe une très grande nécessité d'investissements, y compris sociaux, et que ceux-ci peuvent entraîner des retombées positives sur l'emploi, prévenir la pauvreté et lutter contre l'exclusion sociale. À cet effet, il y a lieu de mobiliser les investissements aussi bien privés que publics et de mettre en œuvre des réformes (2).

3.6

Le CESE se félicite également de la nouvelle vision et de la nouvelle logique d'intervention que représente l'approche en faveur des investissements sociaux orientée sur le cycle de vie et sur les besoins, adoptée dans la communication de la Commission, qui peut contribuer aussi bien à accroître les possibilités de chacun dans la vie et la cohésion sociale qu'à améliorer le développement économique. Renforcer les investissements sociaux a des effets positifs notamment à moyen et à long terme, mais aussi des effets positifs à court terme qu'il ne faut en aucun cas sous-estimer. Les investissements dans une politique sociale de meilleure qualité et fondée sur des données probantes donnent des résultats rapides et positifs avérés dans de multiples situations (3).

3.7

Outre leurs effets sur le marché du travail, les investissements sociaux jouent également un rôle déterminant pour le renforcement de la cohésion et de l'inclusion sociales, ainsi que pour la lutte contre l'exclusion sociale et la pauvreté. Du fait de la crise économique profonde en Europe, la situation sociale de nombreuses personnes s'est considérablement détériorée. Pour inverser cette tendance, il faudra absolument opérer un changement de cap et renforcer les investissements sociaux.

3.8

Dans ce contexte, la Commission européenne devrait préciser et circonscrire son exigence de «conditions» pour l'octroi de prestations sociales. Ainsi, dans le domaine des politiques actives du marché de l'emploi par exemple, il pourrait être judicieux de conditionner l'aide à la réalisation d'un objectif précis, tel que la participation à des actions de formation, mais ce principe ne doit en aucun cas s'appliquer d'une manière générale à toutes les mesures de politique sociale (garde d'enfants par exemple). Les prestations sociales doivent être considérées comme des droits auxquels on peut prétendre sur la base de critères prévisibles, et ces droits doivent être garantis juridiquement.

3.9

La recommandation et les documents de travail publiés avec la communication à l'examen reflètent les principaux domaines dans lesquels cette «nouvelle logique» d'investissements sociaux doit être appliquée. La Commission devrait désormais engager le dialogue avec tous les acteurs pertinents sur la façon dont cette logique d'investissements sociaux doit être appliquée concrètement dans ces domaines thématiques prioritaires et présenter un plan en vue de la mise en œuvre de sa communication, qui contiendrait un guide d'action destiné à aider les États membres.

3.10

Le CESE se félicite que la Commission européenne reconnaisse expressément l'importance de l'économie sociale, notamment des entreprises sociales et de la société civile, dans la mise en œuvre du paquet Investissement social (4). En plus d'apporter son expérience et un complément de ressources, l'économie sociale est souvent directement associée à la concrétisation des objectifs politiques, par exemple par la fourniture de services sociaux. Pour faciliter l'accomplissement de ces missions, l'accès aux fonds publics et aux capitaux privés doit être amélioré et simplifié. Il convient de se féliciter des propositions consistant à inclure des objectifs thématiques relatifs aux investissements sociaux et des investissements comme volets de soutien dans la politique de cohésion de l'UE pour la période 2014-2020. Ces propositions devraient être prises en compte dans les négociations sur les programmes entre les autorités nationales et la Commission européenne, auxquelles participent des représentants de la société civile.

3.11

Selon la Commission, l'innovation est un élément essentiel des stratégies dans le domaine des investissements sociaux, car la politique sociale doit sans cesse être adaptée à de nouveaux défis. C'est pourquoi les entreprises privées qui peuvent s'appuyer sur des commandes publiques jouent un rôle important en tant que solution de substitution ou d'appoint au secteur public.

3.12

Les États membres doivent davantage recourir à des formules de financement innovantes, comme la participation du secteur privé ou le recours à des obligations d’investissements sociaux qui, selon la Commission européenne, permettent de réaliser des économies budgétaires (5). Toutefois, les obligations d'investissements sociaux donnent lieu à des discussions particulièrement controversées et leurs répercussions doivent faire l'objet d'une série d'investigations plus approfondies. En outre, la Commission devrait préciser les domaines qui pourraient se prêter à un «financement innovant». Quoi qu'il en soit, le CESE souligne que ces instruments ne doivent en aucun cas entraîner une commercialisation de la politique sociale. L'État ne doit pas se soustraire à ses responsabilités en matière de politique sociale.

4.   Observations particulières

4.1

Dans les années qui viennent, du fait notamment des paquets de mesures d'assainissement des finances publiques de chacun des États membres de l'UE, il convient malheureusement de partir de l'hypothèse que perdureront une spirale économique et sociale descendante et une dynamique ralentie de l'économie. C'est pourquoi il convient de relancer une croissance économique durable en renforçant la demande (intérieure), par exemple grâce à une meilleure intégration des femmes sur le marché du travail. La croissance des services sociaux et de l'économie sociale, qui ont montré leur potentiel précisément pendant la crise, joue aussi un rôle clé à cet égard.

4.2

Le paquet Investissement social peut contribuer à cette relance de manière significative. Ainsi, le renforcement des services sociaux a des effets sur l'emploi plus importants que toute autre forme d'intervention financière publique. En outre, il est nécessaire d'investir dans les services sociaux pour répondre à la demande et aux besoins sociaux croissants. Les objectifs en matière d'emploi de la stratégie Europe 2020 prévoient en premier lieu d'accroître l'emploi des femmes, en sus de lutter contre le chômage (des jeunes) et de mieux intégrer les personnes âgées dans le monde du travail.

4.3

Il importe de reconnaître que le soutien des politiques nationales en matière d'inclusion sociale, de système de santé et de services sociaux prévu dans le paquet Investissement social devrait aussi comprendre des prestations sociales facilement accessibles, abordables et de grande qualité pour les groupes sociaux défavorisés, tels que les personnes handicapées et le nombre croissant de personnes qui vivent dans l'extrême pauvreté. Ces prestations augmentent les chances des personnes concernées de vivre dans la dignité, ainsi que de trouver et de conserver un emploi.

4.4

L'exemple de la garde des enfants montre précisément que des investissements ciblés permettent de concilier progrès économique et social et renforcement de la compétitivité. Intensifier les investissements dans la garde des enfants et dans les services sociaux au sens large (garde des personnes âgées, formation, soins, services aux personnes handicapées, résidences encadrées et médicalisées, etc.) permet d'une part d'accroître la «qualité de la place économique» et, d'autre part, joue un rôle important dans l'accroissement de la participation des femmes au marché du travail et des personnes les plus éloignées du marché du travail, telles que les personnes handicapées, et contribue à soulager les budgets publics à moyen et long termes. Ainsi que la Commission l'a déjà reconnu, il importe de veiller à ce que ces investissements répondent de manière ciblée aux besoins spécifiques d'une personne plutôt qu'à ceux d'un groupe, de façon à obtenir une aide individualisée et les meilleurs résultats possibles (6). En outre, le CESE estime qu'il faut prévenir tous les types possibles de problèmes sociaux, quel que soit l'âge des personnes concernées. La prévention devrait donc être une approche globale de la politique sociale, qui s'appliquerait à tous les groupes sociaux et non uniquement aux enfants.

4.5

Le marché du travail est l'élément clé pour affronter avec succès les mutations démographiques et pour assainir les budgets publics de manière pérenne. Il y a donc lieu de se féliciter de la demande de la Commission d'améliorer la participation à l'emploi, grâce également à une politique active du marché du travail et au renforcement de l'inclusion sociale. En tirant un meilleur parti du potentiel d'emploi disponible, il est possible de maintenir dans une large mesure la stabilité du rapport entre les cotisants et les bénéficiaires des prestations (7) malgré une augmentation massive du nombre des personnes âgées. Toutefois, le CESE réaffirme que les investissements sociaux doivent également concerner les groupes sociaux pour lesquels la perception de prestations sociales ne débouche pas sur leur intégration sur le marché du travail.

4.6

Par ailleurs, les investissements sociaux et l'amélioration de la politique sociale n'ont pas seulement des effets importants sur la politique de l'emploi. Une mise en œuvre cohérente de la politique d'inclusion sociale dans les États membres et la lutte résolue contre la pauvreté génèrent des bienfaits essentiels pour l'ensemble de la société et favorisent la paix et la cohésion sociales.

4.7

Le changement de cap esquissé dans la communication à l'examen constitue aussi une contribution importante à un assainissement durable des budgets publics. L'exigence d'une croissance inclusive et une augmentation sensible des taux d'emploi jusqu'en 2020 peuvent également permettre de dégager une marge de manœuvre supplémentaire pour les budgets nationaux, qui représente pour les 27 États membres jusqu'à 1 000 milliards d'euros (8).

4.8

Toutefois, s'agissant des changements de priorités esquissés dans la communication à l'examen et de leur intégration au semestre européen, des questions fondamentales restent sans réponse. Si le CESE se félicite de l'amélioration du suivi, il est néanmoins conscient que l'orientation générale de l'examen annuel de la croissance 2013 repose encore sur les priorités de l'année écoulée. Il estime que les recommandations spécifiques par pays pour le second semestre devraient davantage porter sur les investissements sociaux. Dans l'examen 2014, il conviendra de tenir compte expressément des investissements sociaux et d'intégrer les problèmes sociaux dans le prochain semestre européen. En outre, il convient de préciser explicitement, au cours du semestre, qu'un renforcement des investissements sociaux est compatible avec un assainissement budgétaire «différencié et favorable à la croissance».

4.9

Cependant, dans la communication à l'examen, les observations concernant le financement des mesures volontaristes sur les investissements sociaux et la modification des structures fiscales sont malheureusement plutôt décevantes et représentent un recul par rapport au paquet Emploi, dans lequel la Commission avait recommandé non seulement d'alléger la fiscalité sur le travail mais aussi d'augmenter l'impôt sur le capital. Pourtant, c'est uniquement lorsque le financement aura été garanti que le changement de cap annoncé dans le paquet Investissement social pourra se concrétiser et porter ses fruits.

4.10

Néanmoins, la question du financement du paquet Investissement social reste en grande partie sans réponse. Mieux utilisés, les fonds structurels et d'investissement européens, en particulier le FSE, peuvent certes être des instruments de financement importants, mais ils ne seront en aucun cas suffisants pour mener à bien le changement de cap politique prévu. Au contraire, le CESE rappelle que, en plus d'augmenter l'efficacité et la pertinence des dépenses publiques, il est indispensable d'exploiter de nouvelles sources de recettes pour assainir les budgets publics. Dans ce contexte, il faudra également prendre en compte les contributions possibles des différents types de revenus et d'avoirs (9). Les ressources disponibles devraient par ailleurs être mieux utilisées.

4.11

Le CESE fait observer que l'on peut aussi appliquer la logique des investissements sociaux en apportant des modifications et des améliorations aux volets des politiques qui se sont révélés inefficaces. À cet égard, des investissements supplémentaires ne sont pas requis en premier lieu. Le CESE invite la Commission à fournir des informations et des explications sur les nouvelles politiques sociales qui sont meilleures pour le consommateur final et dont le cadre financier est comparable ou moins important.

4.12

Le CESE préconise depuis longtemps de ne pas se concentrer exclusivement sur les dépenses mais aussi d'accroître les recettes publiques, par exemple en modifiant et en élargissant l'assiette fiscale, en prélevant une taxe sur les transactions financières, en supprimant les paradis fiscaux, en mettant fin à la concurrence fiscale et en prenant des mesures contre la dissimulation fiscale (10). C'est précisément à la lumière du paquet Investissement social et des défis connexes que le CESE insiste une nouvelle fois expressément sur ces exigences ainsi que sur la nécessité d'un programme européen de relance économique et d'investissement à hauteur de 2 % du PIB (11). Si le paquet à l'examen fixe les bonnes priorités, il ne contient aucune proposition en vue d'un «pacte pour l'investissement social», qui permettrait de ne pas s'en tenir aux déclarations d'intention mais de mettre en œuvre la nouvelle orientation politique.

4.13

En plus d'exiger une association accrue des partenaires sociaux et de la société civile organisée par les États membres, ce que le CESE approuve pleinement, la Commission devrait présenter rapidement des propositions concrètes pour une association accrue et continue au processus de coordination du semestre européen. Il s'agit là également, et avant tout, d'une orientation renforcée en faveur des investissements sociaux et de l'intégration active. Une telle association devrait être primordiale et permettre une influence réelle sur l'élaboration des politiques.

Bruxelles, le 22 mai 2013.

Le président du Comité économique et social européen

Henri MALOSSE


(1)  Paquet Emploi, paquet Emploi des jeunes, initiative de l'UE sur les perspectives d'emploi des jeunes et initiative «Repenser l'éducation».

(2)  Voir: JO C 11 du 15.1.2013, pp. 65–70.

(3)  L'initiative «Housing First», aussi appelée «rapid re-housing», est une stratégie initialement appliquée dans le cadre de la politique sociale américaine pour faire face au problème des sans-abri. Elle est également mise en œuvre avec succès, depuis quelques années, en Autriche, au Danemark, en Finlande, en France, en Allemagne, au Portugal et au Royaume-Uni, comme solution de remplacement du système traditionnel d'abris d'urgence et de logement provisoire.

(4)  Voir: COM(2013) 83 final, p. 5.

(5)  Voir: COM(2013) 83 final, pp. 6 et 7.

(6)  Voir: COM(2013) 83 final, p. 8.

(7)  Voir: COM(2012) 55 final, Livre blanc de la Commission intitulé «Une stratégie pour des retraites adéquates, sûres et viables», p. 5.

(8)  Voir: document du CPE numéro 72, 2 novembre 2012: «1 000 milliards d'euros en jeu: comment stimuler l'emploi peut permettre de relever le défi des mutations démographiques et des déficits publics».

(9)  Voir: JO C 143 du 22.5.2012, pp. 94-101, par. 4.3, ainsi que JO C 306 du 16.12.2009, pp. 70-75, par. 3.4.2.

(10)  Voir: JO C 143 du 22.5.2012, pp. 23-28, par. 6.1.3.1.

(11)  Voir: JO C 133 du 9.5 2013, pp. 77-80, par. 3.2.4.