52012DC0478

COMMUNICATION DE LA COMMISSION AU PARLEMENT EUROPÉEN, AU CONSEIL, AU COMITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN ET AU COMITÉ DES RÉGIONS Encourager l’utilisation partagée des ressources du spectre radioélectrique dans le marché intérieur /* COM/2012/0478 final */


COMMUNICATION DE LA COMMISSION AU PARLEMENT EUROPÉEN, AU CONSEIL, AU COMITÉ ÉCONOMIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN ET AU COMITÉ DES RÉGIONS

Encourager l’utilisation partagée des ressources du spectre radioélectrique dans le marché intérieur

(Texte présentant de l’intérêt pour l’EEE)

1.           Introduction

L’Union européenne doit faire face à une croissance exponentielle du transfert de données sans fil. La connectivité sans fil joue un rôle de plus en plus important dans l’économie. Selon des sources appartenant au secteur d’activité, le trafic mobile de données à l’échelle mondiale va augmenter de 26 % par an d’ici à 2015. On comptera d’ici là 7,1 milliards de téléphones, tablettes et autres appareils mobiles capables de se connecter à l’internet. Le haut débit sans fil est devenu un moyen omniprésent d’accès à l’internet pour les Européens, et les opérateurs de réseau mobile vont devoir satisfaire une demande croissante des utilisateurs. Outre les communications électroniques, de nombreux autres secteurs économiques devraient bénéficier de l’innovation dans les technologies sans fil et d’applications de transfert de données à haut débit susceptibles d’améliorer la productivité et d’assurer une croissance durable.

La satisfaction de besoins croissants en matière de fréquences pour assurer la connectivité sans fil se heurte au manque de fréquences inutilisées et au prix élevé, en termes de coûts, de retards et parfois, en raison de la nécessité de retirer aux utilisateurs historiques l’usage de certaines fréquences, qu’engendre la réattribution de radiofréquences à de nouvelles utilisations. Pour répondre à la demande croissante, il importe d’utiliser le spectre plus efficacement et d’innover davantage. Au cours de la prochaine décennie, le progrès technologique pourra permettre à un nombre croissant d’utilisateurs de partager des droits d’accès simultanés à une bande de fréquences donnée. Encore faut-il que l’environnement réglementaire rende cette évolution possible.

L’utilisation partagée du spectre implique que différents utilisateurs jouissent chacun du droit d’utiliser une bande de fréquences donnée, dans le cadre de relations de types divers. En effet, les ressources spectrales ainsi libérées permettent de réduire les obstacles que doivent surmonter les nouveaux utilisateurs pour accéder au spectre. D’après une étude réalisée par la Commission, la mise à disposition de nouvelles ressources spectrales partagées pour le haut débit sans fil pourrait déboucher sur des gains économiques nets considérables pour l’UE. Les scénarios évalués dans l’étude, qui prévoient une augmentation du spectre à accès partagé pour le haut débit sans fil allant de 200 à 400 MHz, font état d’une augmentation nette de valeur pour l’économie européenne de l’ordre de plusieurs centaines de milliards d’euros d’ici à 2020[1].

Étant donné que la gestion du spectre est une condition préalable essentielle au développement du marché unique du numérique, la présente initiative contribue donc directement à la réalisation des objectifs de la stratégie Europe 2020 et, une fois mise en œuvre, pourrait contribuer à renforcer l’économie européenne. Il ne suffit pas, pour recueillir tous les avantages liés au partage du spectre, de supprimer les barrières réglementaires actuelles au déploiement de technologies d’accès radio innovantes; il faut aussi faciliter activement le partage de fréquences. Conformément au programme en matière de politique du spectre radioélectrique (PPSR)[2], la Commission cherche donc à obtenir le soutien politique le plus large possible en ce qui concerne les mesures proposées pour stimuler le développement d’innovations dans le domaine des technologies sans fil dans l’UE, de manière à assurer une exploitation optimale des fréquences actuellement attribuées.

La présente communication expose le contexte réglementaire, les moteurs et facteurs influençant l’utilisation partagée du spectre, ainsi que les défis à relever pour renforcer celle-ci. Le point 5 contient une description de la nouvelle approche proposée à la fois pour fournir des incitations au partage du spectre et pour garantir la sécurité juridique nécessaire à cet effet. Le point 6 propose de prochaines étapes pour favoriser l’utilisation partagée du spectre dans le marché intérieur, à la fois dans les bandes de fréquences soumises à licence et dans les bandes exemptes de licence.

2.           Contexte réglementaire

Le cadre réglementaire de l’UE pour les communications électroniques[3] vise à faciliter l’accès au spectre, en s’appuyant sur le système d’autorisations le moins coûteux possible. Il favorise le recours à des autorisations générales, sauf dans les cas où l’octroi de licences individuelles est clairement nécessaire, par exemple pour assurer la protection contre le brouillage préjudiciable. Il établit les principes d’efficacité de l’utilisation et de la gestion du spectre radioélectrique, ainsi que de la neutralité technologique et à l’égard des services. Le PPSR étend ces principes à tous les domaines d’action pertinents de l’UE[4]. Dans un souci de souplesse et d’efficacité, il demande aux États membres, en coopération avec la Commission, de favoriser le cas échéant l’utilisation collective et l’utilisation partagée du spectre[5].

Conformément à l’objectif stratégique de l’Union consistant à assurer l’attribution, en temps voulu, d’une quantité de spectre suffisante et appropriée de manière à satisfaire au mieux la demande croissante de haut débit sans fil, le PPSR vise à identifier au moins 1 200 MHz de fréquences adéquates d’ici à 2015 ainsi qu’à faciliter l’accès au spectre sur la base d’autorisations générales[6]. Il est explicitement fait référence à des méthodes de partage du spectre telles que les réseaux locaux radioélectriques (RLAN), les petites stations de base cellulaires et les réseaux maillés sans fil[7]. Le PPSR exige également que la Commission évalue, en coopération avec les États membres, la possibilité d’étendre les attributions de fréquences sans licence pour les systèmes d’accès sans fil[8]. La réalisation de ces objectifs passe par des solutions adaptées aux différentes situations en matière d’autorisations. Outre des bandes de fréquences exemptes de licence et des bandes faisant l’objet de licences exclusives, il existe aussi des bandes pour lesquelles un certain nombre d’utilisateurs disposent de licences, autrement dit de droits d’utilisation non exclusifs.

Enfin, le PPSR établit un inventaire des utilisations existantes du spectre, notamment pour identifier les possibilités de partage du spectre[9]. Dans la mise en œuvre de ces actions, la Commission veille au respect des droits consacrés par la Charte des droits fondamentaux de l’UE[10].

3.           Moteurs et facteurs de l’utilisation partagée du spectre

L’utilisation partagée du spectre fait référence à des situations où un certain nombre d’utilisateurs indépendants et/ou de dispositifs de transmission sans fil sont autorisés à accéder à la même gamme de fréquences, sous certaines conditions. Comme le montrent les trois exemples suivants, les parties prenantes ont de plus en plus recours, pour satisfaire la demande croissante de connectivité sans fil, aux possibilités de partage qui se font jour. Pour optimiser les avantages d’une utilisation efficace du spectre radioélectrique, il convient de soutenir cette tendance, tout en veillant à ce que la qualité des services fournis ne se détériore pas.

3.1.        Haut débit sans fil

Les réseaux Wi-Fi constituent l’exemple le plus connu de la manière dont les entreprises et les particuliers partagent actuellement le spectre en Europe. Fonctionnant dans des bandes de fréquences harmonisées pour les RLAN[11], les infrastructures à haut débit sans fil fondées sur les technologies Wi-Fi assurent déjà la disponibilité de connexions internet abordables et d’accès aisé dans certains États membres. Ces possibilités stimulent le développement de services en ligne pour concrétiser le potentiel de croissance, et le développement de solutions professionnelles nouvelles et innovantes en Europe[12].

Il semble que plus de la moitié du trafic lié aux téléphones intelligents soit acheminée via des réseaux Wi-Fi, et que ce trafic nomade connaisse une croissance 4 à 6 fois supérieure à celle du trafic de téléphonie mobile. Les ventes mondiales d’équipements dotés d’une fonctionnalité Wi-Fi devraient avoir atteint 3,5 milliards d’unités d’ici à 2014[13]. Les opérateurs de réseaux mobiles ont également recours aux mêmes fréquences RLAN exemptes de licence pour le délestage des données afin d’accroître la capacité de réseau, d’améliorer la couverture des bâtiments et de réaliser des économies dans les coût d’exploitation.

Les opérateurs disposant de licences d’autorisations exclusives peuvent également gagner en efficacité sur leurs réseaux mobiles respectifs en utilisant des fréquences en commun dans des zones géographiques spécifiques. En 2011, le Groupe pour la politique en matière de spectre radioélectrique (RSPG) a conclu que le partage du spectre pourrait favoriser une utilisation plus efficace des ressources, à condition que les conséquences sur la situation en matière de concurrence soient soigneusement prises en compte et que les accords de partage nécessaires soient autorisés dans tous les États membres[14].

L’utilisation partagée de fréquences à haut débit sans fil, exemptes ou non de licence, ouvre la porte à la réalisation d’économies par les opérateurs de réseaux mobiles, à une connectivité internet à des prix abordables et à des possibilités de partage d’infrastructures.

3.2.        La société connectée sans fil

Des besoins croissants se font jour en matière de connectivité sans fil, pas uniquement pour le haut débit sans fil mais aussi pour des applications telles que les compteurs/réseaux intelligents ou les communications de machine à machine (M2M). Actuellement, environ 80 % des nouvelles technologies sans fil couvertes par l’Institut européen des normes de télécommunications (ETSI) sont élaborées pour fonctionner dans des bandes de fréquences partagées exemptes de licence[15]. Les avantages apportés par ces innovations sont nombreux: on peut notamment citer les applications domotiques utilisant des capteurs sans fil, qui permettent aux Européens de mener une vie quotidienne plus respectueuse de l’environnement, par exemple en éteignant l’éclairage lorsqu’il n’y a personne à la maison ou en régulant les systèmes de conditionnement d’air en fonction de la température extérieure.

La Conférence européenne des administrations des postes et des télécommunications (CEPT) a récemment constaté par exemple que, pour la seule bande harmonisée des 863-870 MHz, exempte de licence, au moins 40 millions de dispositifs sans fil (notamment des télécommandes, des systèmes d’alarme et des capteurs) sont vendus chaque année en Europe[16]. Ces dispositifs à courte portée (SRD)[17] améliorent également l’efficacité des entreprises en réduisant leurs coûts et en accroissant leur productivité, par exemple grâce aux systèmes RFID employés dans la logistique et les applications de commerce de détail.

Toutes ces applications de l’«internet des objets» utilisent des bandes de fréquences harmonisées exemptes de licence. La valeur de ces bandes de fréquence est importante car elles sont librement accessibles par tout dispositif conforme aux règles en vigueur en matière d’accès au spectre de manière à éviter tout brouillage, sans nécessiter l’obtention d’une licence.

Toutefois, les PME et les entreprises innovantes, pour lesquelles cet accès est particulièrement important, doivent aussi veiller à ce que leurs technologies puissent faire face au risque de brouillage dans des bandes partagées où elles ne jouissent pas d’une garantie de protection de la part de l’autorité de régulation nationale (ARN). Les innovations en matière de technologies sans fil sont donc non seulement des facteurs permettant le partage du spectre, mais deviennent aussi un moteur du renforcement de l’usage partagé des fréquences, comme le démontrent les accords de partage qui se font jour[18].

L’évolution vers une société connectée démontre la valeur ajoutée qu’apporte une réduction des contraintes d’accès au spectre dans les bandes partagées exemptes de licence, en offrant un terrain favorable à une innovation qui stimule le développement et le déploiement de technologies sans fil plus résilientes.

3.3.        Recherche et technologies innovantes

Pour profiter pleinement des avantages offerts par le partage du spectre, il convient de mener des activités de recherche spécifiques portant sur l’accès dynamique au spectre, telles que celles soutenues au titre du septième programme-cadre (7e PC), à travers des projets consacrés à des technologies favorisant la radio cognitive, le partage dynamique du spectre et l’agrégation de fréquences[19]. Depuis le début du 7e PC, quelque 50 millions d’euros ont été investis dans la recherche liée au spectre dans le cadre de chaque programme de travail bisannuel.

Ces projets ont conduit à des avancées successives. Le partage dynamique du spectre est déjà inclus dans des normes actuelles applicables aux RLAN à 5 GHz pour permettre le partage de fréquence avec les radars. Les technologies de radio cognitive offrent des services coexistant avec des émetteurs de télévision, qui constituent le service primaire dans la bande UHF, en recourant aux données recueillies dans l’environnement pour déterminer le spectre inutilisé dans et entre les bandes de fréquences servant à la radiodiffusion (les «espaces blancs» du spectre). Des essais menés en Allemagne, en Slovaquie et au Royaume-Uni montrent que cette technologie approche du stade du déploiement pratique.

La Commission soutient cette évolution en délivrant un mandat de normalisation afin d’harmoniser l’accès aux données de localisation géographique pour ces technologies au moyen de bases de données de géolocalisation[20]. Pour permettre le développement et l’utilisation de ces technologies en Europe, le mandat répertorie les domaines où des normes sont nécessaires pour favoriser le respect de la législation de l’UE et des législations nationales relatives à la mise sur le marché et à l’utilisation d’équipements radio, et notamment de la directive R&TTE[21].

Si la création d’économies d’échelles pour les premiers déploiements est la préoccupation principale, l’importance de l’utilisation des «espaces blancs» ne se limite pas à une bande de fréquences spécifique. Il est possible d’exploiter davantage les possibilités qu’offrent les technologies de radio cognitive, par exemple en détectant d’autres utilisateurs du spectre. Des recherches sont également en cours pour créer des réseaux auto-gérés qui viseront à réduire au minimum les interférences croisées entre petites stations de base cellulaires dans les générations futures de technologies de haut débit sans fil.

La recherche a permis d’ouvrir l’accès au spectre sur une base partagée, tout en assurant la protection des services primaires. Les technologies de radio cognitive se développent actuellement en s’appuyant sur des mandats de normalisation portant sur des normes harmonisées et des essais de déploiement effectués dans le cadre de projets de recherche européens. De nouveaux progrès peuvent être attendus dans le domaine de la détection par capteur et de l’utilisation de petites stations de base cellulaires.

4.           Les défis à relever pour renforcer l’utilisation partagée du spectre

Comme l’illustrent les exemples cités au point précédent, le spectre radioélectrique est une ressource naturelle, extrêmement précieuse et disponible en quantité limitée, que le progrès technologique permet d’utiliser plus efficacement. En 2011, le RSPG a constaté la forte demande d’utilisation partagée et la nécessité de progresser davantage dans l’élaboration de mécanismes de régulation appropriés en ce qui concerne le partage du spectre[22].

Pour les autorités de régulation nationales, le principal défi est de trouver des moyens appropriés d’autorisation d’accès partagé à une bande de fréquences, c’est-à-dire permettant à deux utilisateurs ou plus d’utiliser la même gamme de fréquences selon un accord de partage défini. À ce jour, des utilisateurs partageant des bandes de fréquences exemptes de licences, tels que les dispositifs de transmission à courte portée, n’ont pas droit à une protection contre les brouillages préjudiciables, alors que les utilisateurs partageant des fréquences sur la base de licences individuelles peuvent bénéficier de garanties réglementaires à cet égard. Pour avancer sur ces questions, il faut que les ARN relèvent les défis décrits ci-dessous.

4.1.        Gérer les brouillages préjudiciables pour mettre fin à l’insécurité

Pour tirer le meilleur parti des possibilités qu’offre le partage du spectre, il est essentiel d’assurer la coexistence entre des applications différentes dans la même gamme de fréquences. Ces applications ne devraient pas interférer entre elles au point de voir leurs fonctions se dégrader gravement. Il faut définir entre les utilisateurs ou prévoir, dans la réglementation de l’accès partagé à une bande de fréquences, des niveaux de brouillage acceptables et des stratégies d’atténuation de leurs effets.

La gestion des brouillages peut être réalisée au moyen d’accords d’accès partagé fiables, fondés sur des règles et des conditions de partage claires et efficaces pour une bande de fréquences donnée, garantissant la sécurité tant des utilisateurs historiques que des candidats utilisateurs.

Par ailleurs, il est important, pour accroître la prévisibilité et l’acceptation mutuelle des accords de partage, de formuler des hypothèses transparentes lors d’études de compatibilité préalables et de prévoir des droits clairs à la protection pour les utilisateurs primaires, y compris le contrôle du respect des niveaux convenus d’atténuation des brouillages.

4.2.        Créer des incitations et des garanties suffisantes pour toutes les parties intéressées

Équilibrer l’incidence du partage sur l’utilisateur historique et les contraintes d’utilisation imposées à tout utilisateur supplémentaire est un défi. S’il convient de rassurer les utilisateurs historiques sur le fait que les utilisateurs supplémentaires se conformeront aux règles de partage, il se peut aussi que les utilisateurs historiques doivent supporter des coûts pour assurer une bonne qualité de service aux nouveaux utilisateurs, par exemple au moyen de technologies d’atténuation des brouillages ou de récepteurs plus résistants à ceux-ci.

Il faut que le partage présente des avantages pour tous les utilisateurs. Il se peut que les utilisateurs historiques qui, soit se verront imposer un accès payant au spectre, soit devront déployer des technologies adaptées pour permettre à des utilisateurs supplémentaires d’accéder aux fréquences dans le cadre d’accords de partage intéressants, demandent une compensation financière.

Il faudra également veiller à ce que les accords de partage des fréquences entre les utilisateurs n’aient pas d’incidence négative sur la concurrence (conformément aux dispositions du traité[23]) et prendre en compte l’incidence des possibilités de partage sur la conception des procédures futures d’attribution de fréquences dans les États membres.

4.3.        Capacité des bandes de fréquences exemptes de licence

Étant donné que les utilisateurs de bandes de fréquences exemptes de licence ne jouissent d’aucune protection réglementaire contre la congestion du trafic, des incertitudes demeurent sur le fait que les bandes partagées existantes offrent une capacité de transmission suffisante – par exemple, les bandes RLAN actuelles permettent-elles d’absorber la croissance tant de l’accès privé à haut débit que du délestage du trafic de données mobiles par les opérateurs de réseaux? Pour établir des prévisions objectives en matière de congestion et améliorer la fiabilité des accords de partage dans ces bandes de fréquences pour tous les utilisateurs, une surveillance de l’utilisation de ces bandes pourrait être utile aux ARN.

Une nouvelle génération d’équipements RLAN (dénommée 802.11ac), dont la mise sur le marché devrait intervenir d’ici à la fin de 2012, pourrait offrir aux utilisateurs des débits comparables à ceux des réseaux de lignes fixes. Tout en étant tributaires du spectre RLAN existant à 5 GHz, ces nouveaux équipements nécessiteront des canaux de fréquences très larges, dont le nombre est actuellement limité.

Compte tenu des pratiques actuelles d’utilisation du Wi-Fi, y compris par les opérateurs mobiles pour le délestage de données, il faudrait aussi réfléchir à la nécessité de recenser davantage de fréquences exemptes de licences pour les systèmes fixes d’accès sans fil, dans le cadre de la recherche de fréquences pour le haut débit ou à titre de ressource commune complémentaire.

Encourager l’utilisation partagée du spectre radioélectrique implique:

-           d’engager la responsabilité mutuelle des utilisateurs sur des niveaux de brouillage acceptables et des stratégies appropriées d’atténuation de ceux-ci;

-           de garantir la sécurité juridique concernant les règles et conditions applicables, des procédures de contrôle d’application, ainsi que la transparence à propos des hypothèses de compatibilité des signaux et des droits à la protection contre les brouillages;

-           de soutenir les investissements dans des technologies plus performantes avantageuses à la fois pour les utilisateurs historiques et pour les nouveaux utilisateurs, tout en protégeant et en stimulant la concurrence;

-           de répertorier de larges canaux de fréquences pour l’évolution du RLAN et établir des prévisions en matière de congestion du trafic de manière à accroître la prévisibilité et la fiabilité des principales bandes de fréquences partagées;

-           de faire en sorte que tout passage d’un système de droits d’utilisation exclusifs à une utilisation partagée renforce la concurrence provenant de nouveaux utilisateurs et, en particulier, qu’il ne confère pas d’avantage concurrentiel indu aux détenteurs de droits actuels ou futurs.

5.           Vers un cadre commun pour l’accès partagé au spectre en Europe

Les technologies sans fil émergentes étant de plus en plus capables de coopérer «intelligemment» entre elles pour éviter un brouillage mutuel, les ARN doivent se doter de moyens appropriés pour permettre la conclusion d’accords de partage adéquats et pour promouvoir l’utilisation partagée des ressources du spectre radioélectrique. La Commission propose par conséquent de mettre au point deux outils supplémentaires afin d’offrir davantage de possibilités d’accès au spectre pour les technologies innovantes et de favoriser une utilisation plus soutenue et plus efficace des ressources existantes du spectre:

(1) une approche à l’échelon de l’UE pour répertorier les possibilités de partage bénéfique dans des bandes de fréquences harmonisées ou non; et

(2) des droits d’accès partagé au spectre en tant qu’outils réglementaires pour autoriser des possibilités de partage sous licence moyennant des niveaux garantis de protection contre le brouillage.

5.1.        Recensement des possibilités de partage bénéfique

Dans l’ensemble du marché intérieur, il est possible de recenser des possibilités de partage bénéfique (PPB), tant dans les bandes de fréquences soumises à licence que dans les bandes exemptes de licence, chaque fois que l’avantage socioéconomique net combiné du partage d’une bande par plusieurs applications l’emporte sur l’avantage socioéconomique net lié à une seule application, compte tenu des coûts supplémentaires qui résultent de l’utilisation partagée[24].

Pour répertorier des PPB dans une bande de fréquences donnée, la transparence à propos de l’accord de partage qui s’appliquerait est indispensable, notamment concernant (i) les conditions de partage, c’est-à-dire les paramètres techniques définis par une ARN qui déterminent la hiérarchie des accès dans une bande partagée[25]; et (ii) les règles de partage, c’est-à-dire les dispositions d’utilisation communes permettant le partage, qui peuvent soit être rendues obligatoires par une ARN soit être définies par les utilisateurs sur la base de normes, de protocoles communs, ou d’accords de partage conformes au droit de la concurrence[26].

Pour stimuler l’innovation dans les technologies sans fil et favoriser le recensement des PPB, il faut que les parties intéressées aient la possibilité de demander à l’ARN compétente, sur la base d’une procédure transparente, le droit d’utiliser des bandes de fréquences sur une base partagée. Tout candidat à une PPB devrait démontrer la capacité de partager une bande sans compromettre indûment le droit de l’utilisateur historique d’en utiliser les fréquences.

Pour développer les économies d’échelle dans le marché intérieur afin de favoriser les investissements, il faut que l’UE définisse un processus de recensement des PPB pour assurer que tous les États membres appliquent une politique logique et cohérente lors du traitement des cas individuels. Ce processus, appliqué dans des bandes harmonisées ou non harmonisées, pourrait comprendre les éléments de base suivants:

· un calendrier harmonisé;

· une possibilité de négociation entre le candidat et l’utilisateur historique, dans laquelle l’ARN pourrait jouer le rôle de médiateur, afin de clarifier les conditions de la PPB, et notamment (i) les instruments destinés à prévenir la détérioration de la qualité du service et (ii) la répartition des coûts éventuels du partage;

· l’examen des avantages socioéconomiques devrait notamment prendre en compte (i) les conditions dans lesquelles ont été effectuées les attributions de fréquences existantes, y compris les frais encourus et (ii) les attentes légitimes des détenteurs de droits historiques et des candidats à une PPB. Tout aussi importants sont (iii) les effets dynamiques que pourraient avoir les PPB sur la concurrence, ainsi que sur les incitations à investir adressées respectivement aux utilisateurs historiques et aux nouveaux entrants potentiels, dans le contexte de la convergence des technologies;

· les moyens, pour l’ARN, d’approuver une PPB et d’assurer une utilisation partagée accrue du spectre, donc aussi efficace que possible, conformément à la législation applicable au niveau de l’UE et au niveau national. Le cas échéant, et compte tenu des droits existants, il peut s’agir de la possibilité d’appliquer des mesures telles que des redevances incitatives au niveau du coût d’opportunité socioéconomique identifié;

· la fourniture d’informations au niveau de l’UE sur les candidatures à une PPB et sur le résultat des processus nationaux ultérieurs, ainsi que la possibilité d’évaluer les PPB dans le cadre de l’inventaire des utilisations du spectre et de répertorier celles qui se prêtent à des applications dans l’ensemble du marché intérieur.

Dans la mesure où le progrès technologique ouvre davantage de possibilités de partage bénéfique (PPB) dans le marché intérieur, il est nécessaire de promouvoir les investissements et d’encourager les utilisateurs du spectre à faire un meilleur usage de leurs ressources en matière de fréquences en définissant, en étroite coopération avec les États membres, un processus et des critères clés au niveau de l’Union européenne pour répertorier les PPB (par exemple dans une recommandation).

5.2.        Autorisation d’un accès au spectre partagé sous licence

Lorsqu’une PPB dans une bande de fréquences donnée a été identifiée et approuvée, il peut en résulter un dividende de partage sous la forme de ressources du spectre partagées supplémentaires, si les ARN disposent des outils adéquats pour autoriser un accès partagé au spectre. Une telle autorisation devrait être octroyée conformément à la législation de l’UE et nationale applicable, et notamment aux articles 3, 5, 6, 7, 13 et 14 de la directive «autorisation»[27] et en tenant compte des droits de l’utilisateur historique.

Afin de faciliter le recensement de PPB avec des incitations fondées sur la dynamique de marché, des contrats de partage de fréquences pourraient servir d’accords juridiquement contraignants permettant aux utilisateurs historiques et aux candidats à une PPB de définir leurs droits et obligations respectifs, c’est-à-dire la mise à disposition de technologies et/ou la prise en charge de coûts supplémentaires liés à l’utilisation partagée. Pour faciliter la conclusion de tels contrats, les ARN pourraient être chargées de jouer le rôle de conseillers techniques impartiaux et d’enregistrer les conditions de ces accords. De tels contrats pourraient être nécessaires pour modifier les droits d’utilisation existants au niveau national, en accord avec l’utilisateur historique.

Les titulaires de droits historiques pourraient bénéficier de l’assurance mutuelle d’un contrat de partage approprié en proposant des PPB: ainsi, des organismes publics pourraient par exemple offrir à des opérateurs commerciaux l’accès aux ressources du spectre en contrepartie d’un cofinancement d’infrastructures de réseau destinées aux applications PPDR (protection publique et secours en cas de catastrophe) à haut débit.

Si les entreprises innovantes peuvent comparer les possibilités de partage dans un marché intérieur concurrentiel, des incitations économiques encourageraient les propositions de contrats de partage reposant sur des technologies innovantes et favoriseraient la coexistence de normes technologiques.

En outre, si les utilisateurs étaient en mesure de négocier un degré de protection adéquat contre le brouillage préjudiciable et de conclure des contrats de partage, il serait possible d’identifier des PPB sur la base de l’utilisation réelle du spectre. Il s’agirait d’une amélioration par rapport aux études de compatibilité technique traditionnelles fondées sur des modèles statistiques de partage du spectre.

Afin d’offrir aux parties contractantes des garanties réglementaires pour justifier les investissements nécessaires, il faudrait que les ARN puissent octroyer des droits d’accès partagé au spectre sur la base de contrats de partage qui soient juridiquement contraignants pour tous les utilisateurs d’une gamme de fréquences donnée.

Les droits d’accès partagé au spectre pourraient donc devenir un outil supplémentaire à la disposition des ARN pour autoriser un accès partagé au spectre dans les bandes où une PPB a été recensée et approuvée, par exemple avec des licences individuelles pour les utilisateurs supplémentaires.

Le RSPG a récemment souligné qu’une approche d’accès partagé sous licence assurerait aux utilisateurs supplémentaires des droits d’accès au spectre et une qualité de service garantie. Il a conclu que cela permettrait aux utilisateurs historiques de continuer à utiliser le spectre tout en offrant des capacités spectrales à d’autres utilisateurs[28].

Les contrats de partage du spectre apportent la sécurité juridique aux utilisateurs tout en créant des incitations fondées sur la dynamique de marché, y compris une compensation financière, pour répertorier davantage de PPB dans le marché intérieur, si les ARN octroient des droits d’accès partagé au spectre à des utilisateurs supplémentaires d’une bande de fréquences donnée.

6.           Prochaines étapes

Pour stimuler l’innovation dans les technologies sans fil dans l’UE, il est nécessaire d’améliorer en permanence les possibilités d’accès harmonisé au spectre tant dans les bandes exemptes de licence que dans les bandes soumises à licence, et de prévoir de nouveaux outils pour renforcer l’utilisation partagée des ressources du spectre radioélectrique au sein du marché intérieur. La Commission propose par conséquent de prendre les mesures suivantes:

(1)       Recenser des PPB dans les bandes de fréquences soumises à licence et dans les bandes exemptes de licence:

· en élaborant, en coopération avec les États membres, un processus logique et cohérent de recensement des PPB ainsi que des critères pour évaluer les candidatures à une PPB soumises au niveau national conformément à la législation applicable au niveau de l’UE et au niveau national et en tenant compte des éléments clés mentionnés au point 5.1;

· en utilisant les données recueillies grâce à l’inventaire établi par le PPSR;

· en permettant le développement et le déploiement de dispositifs de transmission fonctionnant dans les «espaces blancs» reposant sur des normes harmonisées pour les bases de données de géolocalisation, à élaborer conformément au mandat de normalisation qui sera prochainement émis par la Commission. La partie inférieure de la bande UHF (470-698 MHz, notamment) devrait fournir une première possibilité de partage, préparant la voie à une utilisation de cette approche dans d’autres bandes.

(2)       Envisager de rendre disponibles pour l’innovation dans les technologies sans fil une quantité suffisante de fréquences exemptes de licence, harmonisées au niveau de l’UE:

· en garantissant des accords de partage prévisibles et fiables dans les bandes SRD, tout en appliquant les principes de neutralité technologique et à l’égard des services, par une mise à jour régulière de la décision 2006/771/CE de la Commission;

· en étudiant et en mesurant la capacité actuelle et le risque de congestion du trafic dans les bandes des 2,4 et 5 GHz pour le délestage de données;

· selon le résultat des études techniques en matière de partage et l’impact sur le marché, en envisageant la désignation de fréquences exemptes de licence harmonisées supplémentaires pour les services RLAN (Wi-Fi) à 5 GHz (Wi-Fi), par une révision de la décision 2005/513/CE.

(3)       Définir, en coopération avec les États membres, une voie commune à suivre pour permettre davantage de possibilités de partage, sur la base d’accords contractuels entre les utilisateurs:

· en recommandant un format commun pour les droits d’accès partagé au spectre, une terminologie commune pour décrire les conditions et règles de partage, et de bonnes pratiques en matière d’autorisation d’accès partagé de manière à faciliter la conclusion de contrats, y compris pour les aspects liés à la concurrence;

· en organisant une consultation publique pour recenser les besoins des utilisateurs et les bonnes pratiques en matière de contrats de partage, ainsi que les besoins éventuels dans le domaine de la normalisation pour soutenir l’adoption de solutions innovantes;

· en élaborant des lignes directrices pour garantir l’utilisation efficace du spectre et stimuler la concurrence sur la base de contrats de partage entre utilisateurs actifs sur les marchés.

[1]               Voir: Perspectives on the value of shared spectrum access, SCF Associates, février 2012 (SCF 2012).

[2]               Décision n° 243/2012/UE du 14 mars 2012, JO L 81 du 21.3.2012, p. 7; article 4, paragraphe 1.

[3]               Directive 2009/140/CE, JO L 337 du 18.12.2009, p. 37; article 5, paragraphe 1, et article 5, paragraphe 2, 5e alinéa, de la directive 2002/20/CE, JO L 108 du 24.4.2002, p. 21, telle que modifiée en 2009.

[4]               Décision PPSR, articles 2 et 3.

[5]               Décision PPSR, article 4, paragraphe 1.

[6]               Décision PPSR, article 3, points b) et g).

[7]               Dans les réseaux cellulaires (tels que UMTS, LTE ou WiMax), on utilise ce qu’on appelle des picocellules ou des femtocellules pour le délestage de données vers des bandes de fréquences soumises à autorisation ou à l’extérieur de celles-ci; décision PPSR, article 6, paragraphe 10.

[8]               Décision PPSR, article 6, paragraphe 7.

[9]               Décision PPSR, article 9, paragraphe 1, point b).

[10]             Communication de la Commission intitulée «Stratégie pour la mise en œuvre effective de la Charte des droits fondamentaux par l’Union européenne», COM(2010) 573.

[11]             Les bandes 2 400-2 483,5 MHz, 5 150-5 350 MHz et 5 470-5 725 MHz.

[12]             Communication de la Commission intitulée «Un cadre cohérent pour renforcer la confiance dans le marché unique numérique du commerce électronique et des services en ligne», COM (2011) 942.

[13]             SCF 2012.

[14]             RSPG11-374.

[15]             SCF 2012.

[16]             Projet de rapport 182 de l’ECC (comité des communications électroniques de la CEPT).

[17]             Décision 2006/771/CE.

[18]             Par exemple dans les bandes de fréquences 870-876 MHz et 915-921 MHz.

[19]             Par exemple les projets SAPHYRE, CogEU, Sacra, OneFit, Faramir, E3, Socrates, Walter, NEWCOM++, NetWorks, Samurai, EUWB, Ucells, CROWN.

[20]             Mandat de normalisation donné au CEN, au CENELEC, et à l’ETSI relatif aux systèmes radio reconfigurables (SRR).

[21]             Directive 1999/5/CE, JO L 91 du 7.4.1999, p. 10.

[22]             RSPG11-392.

[23]             Comme précisé dans les lignes directrices de l’UE sur les accords de coopération horizontale, JO C 11 du 14.1.2011, p. 1.

[24]             L’existence d’une possibilité de partage bénéfique (PPB) peut être calculée à l’aide de la formule suivante: bénéfice net de l’application A < (bénéfice net des applications A+B+C…) – (coût du partage). Une telle évaluation pourrait être faite avant ou après le réaménagement d’une bande de fréquences.

[25]             C’est-à-dire le partage de la bande par les utilisateurs d’égal à égal ou dans le cadre d’une relation entre utilisateurs primaires et secondaires.

[26]             Les règles qui s’appliquent sont soit des règles de coexistence statiques valables pour tous les utilisateurs d’une bande, soit des règles de coopération dynamiques qui déterminent l’accès au spectre pour un utilisateur en fonction de l’utilisation de la même bande par un autre utilisateur.

[27]             Directive 2002/20/CE, JO L 108 du 24.4.2002, p. 21, modifiée en 2009.

[28]             RSPG11-392.