52012DC0230

"Communication from the Commission to the European parliament and the Council - Biannual report on the functioning of the Schengen area - 1 November 2011 - 30 April 2012" /* COM/2012/0230 final */


COMMUNICATION DE LA COMMISSION AU PARLEMENT EUROPÉEN ET AU CONSEIL

Rapport semestriel sur le fonctionnement de l'espace Schengen 1er novembre 2011 - 30 avril 2012

1.           Introduction

Le droit des personnes de circuler librement est l'une des pierres angulaires de l'Union européenne et l'espace Schengen sans contrôle aux frontières intérieures compte parmi les réalisations les plus précieuses de l'intégration européenne. La coopération Schengen a été instaurée à l'initiative de cinq pays de l'UE – la Belgique, la France, l'Allemagne, le Luxembourg et les Pays-Bas – au moyen d'un accord et d'une convention d'application signés respectivement en 1985 et en 1990, tous deux dans la ville luxembourgeoise de Schengen. Le contrôle aux frontières intérieures a été aboli en 1995 et, en 1997, ces accords ont été intégrés dans le cadre de l'Union européenne par le traité d'Amsterdam. L'espace Schengen s'est rapidement agrandi. Il couvre aujourd'hui une zone qu'entourent 42 673 km de frontières maritimes et 7 721 km de frontières extérieures terrestres, dans laquelle plus de 400 millions d'Européens de 26 pays peuvent voyager sans passeport.

Le droit de voyager au sein de l'espace Schengen sans être soumis à des contrôles aux frontières est subordonné au respect, par chaque État participant, des obligations inhérentes à l'acquis de Schengen. Il est dès lors essentiel que les institutions européennes restent vigilantes à l'égard du fonctionnement de l'espace Schengen et soient prêtes à réagir à d'éventuelles difficultés. Eu égard à ces considérations, dans sa communication du 16 septembre 2011 intitulée «Gouvernance de Schengen – Renforcer l'espace sans contrôle aux frontières intérieures», la Commission a annoncé son intention de présenter aux institutions de l'Union européenne un bilan semestriel sur le fonctionnement de Schengen. Le 8 mars 2012, le Conseil a salué l'intention de la Commission de présenter des rapports réguliers au Parlement européen et au Conseil sur le fonctionnement de la coopération de Schengen.

L'objet de ces rapports est de servir de base à un débat régulier au Parlement européen et au Conseil de manière à contribuer au renforcement du pilotage politique et de la coopération au sein de l'espace Schengen. Le présent premier rapport porte sur la période du 1er novembre 2011 au 30 avril 2012 et complète les mesures inscrites dans les propositions législatives de la Commission sur la gouvernance de Schengen[1], actuellement en cours d'examen au Parlement européen et au Conseil. Il se concentre sur le fonctionnement de l'espace Schengen, laissant de côté d'autres questions peut-être liées à l'espace de liberté, de sécurité et de justice mais qui ne concernent pas le thème principal, ainsi que celles qui sont traitées parallèlement dans d'autres documents. Parmi ces questions figurent notamment la proposition de la Commission sur l'Eurosur[2] et la proposition de la Commission concernant l'introduction d'une clause de sauvegarde sur les visas[3] ainsi que des questions traitées dans la communication de la Commission relative à l'approche globale de la question des migrations et de la mobilité[4] et le rapport annuel sur l'immigration et l'asile. Le rapport semestriel sur le fonctionnement de la coopération Schengen doit s'entendre en tant que partie de ce contexte plus global.

2.           État de la situation

2.1.        Situation aux frontières extérieures de l'espace Schengen

La pression aux frontières extérieures de l'espace Schengen s'exerce essentiellement sur un nombre limité de points sensibles.

Au cours de la période allant d'octobre à décembre 2011, le nombre de franchissements irréguliers des frontières a augmenté par rapport à l'année précédente, atteignant près de 30 000 passages. Environ 75 % de ces franchissements ont été recensés sur l'axe de la Méditerranée orientale, les nationalités les plus fréquemment concernées étant les Afghans et les Pakistanais. La Commission poursuit son soutien aux États membres en ce qui concerne la gestion de ces flux migratoires mixtes, au moyen, entre autres, d'aides financières de l'UE (à charge notamment du Fonds pour les frontières extérieures), d'une coopération avec les pays tiers concernés, et avec le concours des agences de l'UE (par exemple, Frontex)[5].

La pression à la frontière extérieure de l'espace Schengen est liée aux évolutions dans les pays tiers concernés, comme l'a clairement montré le Printemps arabe en 2011. La Commission fait d'ailleurs observer que la situation en Syrie pourrait déclencher à l'avenir un flux migratoire vers les pays voisins, ainsi que vers l'Union européenne. Pendant la période d'octobre à décembre 2011, 578 Syriens ont été appréhendés alors qu'ils tentaient de franchir la frontière Schengen extérieure terrestre en dehors des points de passage officiels, contre 210 personnes au cours du même trimestre de 2010. 82 % de ces franchissements ont été détectés à la frontière extérieure terrestre de la Grèce.

Un état de la situation plus détaillé est fourni dans l'analyse des risques annuelle 2012 de Frontex (http://frontex.europa.eu/assets/Attachment_Featured/Annual_Risk_Analysis_2012.pdf).

La Commission évaluera continuellement l'équilibre actuel des mesures d'appui (notamment les aides financières de l'UE et les opérations de Frontex) entre les points critiques actuels et le reste de la frontière extérieure afin de déterminer s'il est suffisant ou s'il est nécessaire d'envisager un nouvel ordre de priorités, eu égard d'une part aux effets possibles de déplacement dus à un contrôle accru aux frontières à ces points de passage ainsi qu'à de nouveaux flux de migration à la suite des évolutions dans les pays tiers.

2.2.        Situation à l'intérieur de l'espace Schengen

L'acquis de Schengen autorise les ressortissants de pays tiers[6] titulaires d'un titre de séjour ou d'un visa de long séjour délivré par un État membre à se rendre dans d'autres États membres pendant une période maximale de trois mois par période de six mois. Néanmoins, les demandeurs d'asile qui attendent une décision quant à leur statut sont privés de ce droit jusqu'à ce que leur demande de protection ait fait l'objet d'une appréciation finale. En outre, une grande majorité des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier dans l'espace Schengen y sont entrés légalement mais y sont restés après l'expiration de la période de séjour autorisée (séjour indûment prolongé), tandis que les autres y sont entrés illégalement. Pour ces personnes, soit leur séjour est régularisé par les États membres conformément à leur législation nationale, soit elles doivent faire l'objet d'une procédure de retour. Bon nombre d'entre elles ne restent pas dans le pays par lequel elles sont entrées dans l'espace Schengen mais se rendent dans un autre État membre.

En 2011, 350 944 ressortissants de pays tiers qui ne remplissaient pas les conditions de séjour ont été dénombrés dans l'espace Schengen[7], ce qui représente par rapport à l'année précédente une réduction de 9,1 %. Les nationalités les plus représentées étaient les Afghans, les Tunisiens et les Marocains. D'après Frontex[8], des déplacements secondaires, débutant à la frontière entre la Grèce et la Turquie, ont été détectés aux frontières terrestres entre les Balkans occidentaux et la Slovénie et la Hongrie, à la frontière maritime de l'Italie du Sud et aux alentours d'aéroports européens, notamment aux Pays-Bas, en Belgique et en Allemagne.

Peu d'informations sont disponibles sur le nombre de personnes non autorisées à séjourner dans l'espace Schengen qui cherchent à se rendre dans un autre État membre. Néanmoins, plusieurs opérations ponctuelles de collecte de données ont permis d'obtenir au moins quelques statistiques de base. Parmi ces opérations, la plus récente intitulée DEMETER[9] a été menée du 24 au 30 octobre 2011, dans 21 États membres (la France, l'Italie et la Grèce n'y ont pas participé). Au cours de cette semaine, les États participants, dans le cadre de leur activité quotidienne, ont rempli un formulaire visant à rendre compte de chaque incident lié à un séjour irrégulier suspecté sur leur territoire. Ces formulaires ont été ensuite transmis aux gardes‑frontières polonais, qui en ont compilé et analysé les données. Cette opération avait pour but de collecter des informations sur les flux migratoires dans les États membres de l'UE, en ce qui concerne en particulier:

– les pressions migratoires dans différents pays,

– les principaux axes de déplacement des migrants irréguliers,

– les principaux pays de destination des flux migratoires,

– les pays d'origine des migrants irréguliers et,

– les lieux où sont appréhendés les migrants irréguliers et les moyens de transport utilisés.

Au cours de cette opération, 1936 ressortissants de 104 pays tiers différents ont été interpellés. Les plus grands nombres de migrants en situation irrégulière ont été recensés en Allemagne (360 personnes), en Espagne (290 personnes) et en Hongrie (260 personnes). Une majorité d'entre eux étaient entrés dans l'espace Schengen en Espagne (207 personnes), en Grèce (180 personnes), à Chypre (161 personnes) et en Pologne (121 personnes). Les principaux pays de destination étaient l'Espagne (288 personnes), l'Allemagne (264 personnes) et la Hongrie (140 personnes).

Les conclusions de ces opérations mettent en lumière la nécessité de rechercher constamment une amélioration du suivi et de l'analyse des flux migratoires au sein de l'espace Schengen. Cela pourrait être fait notamment au moyen d'opérations semestrielles telles que l'opération DEMETER, et d'un échange d'informations régulier au niveau de l'Union européenne. La Commission se félicite de la coordination assurée par la présidence danoise de l'opération Balder du 16 au 22 avril 2012.

Parallèlement à l'obtention d'informations fiables sur les ressortissants des pays tiers qui résident illégalement dans l'espace Schengen, la mise en œuvre de la directive sur les sanctions et les mesures à l'encontre les employeurs[10] reste un important outil de lutte contre le séjour irrégulier au sein de cet espace.

Outre les initiatives actuelles et planifiées (telles que l'opération Balder), la Commission déterminera si d'autres mesures peuvent être prises afin de fournir davantage d'informations sur les flux migratoires au sein de l'espace Schengen.

3.           Application de l'acquis de Schengen

3.1.        Cas de réintroduction temporaire du contrôle aux frontières intérieures

L'article 23 du code frontières Schengen[11] prévoit que, exceptionnellement, en cas de menace grave pour l'ordre public ou la sécurité intérieure, un État membre peut réintroduire le contrôle à ses frontières intérieures. L'État membre doit, dans les meilleurs délais, en aviser les autres États membres et la Commission. En outre, un rapport doit être présenté au Parlement européen, au Conseil et à la Commission, afin de donner un aperçu notamment de la mise en œuvre des vérifications et de l'efficacité de la réintroduction du contrôle aux frontières. Depuis l'entrée en vigueur du code frontières Schengen en 2006, tous les cas de réintroduction du contrôle sont liés à la prévention et à la répression de différents types de criminalité en rapport avec des réunions de haut niveau ou des événements sportifs majeurs.

Au cours de la période du 1er novembre 2011 au 30 avril 2012, le contrôle aux frontières intérieures n'a été rétabli qu'à deux reprises. Le 4 octobre 2011, La France a fait savoir à la Commission qu'en vue de l'organisation à Cannes du sommet du G-20 rassemblant des chefs d'État ou de gouvernement, prévu pour les 3 et 4 novembre 2011, elle prévoyait de rétablir le contrôle aux frontières avec l'Italie entre le 24 octobre et le 5 novembre 2011. La France a ensuite informé la Commission que, pendant cette période, 38 620 personnes avaient été contrôlées à l'entrée sur le territoire (pour 563 158 franchissements de la frontière) et que 15 303 personnes avaient été contrôlées à la sortie (pour 605 062 franchissements de la frontière). Quatre cent quarante-trois personnes ont été refoulées, la plupart parce qu'elles n'étaient pas en possession de documents de voyage en cours de validité.

Le 20 avril 2012, l'Espagne a informé la Commission qu'en raison de la réunion de la Banque centrale européenne à Barcelone, du 2 au 4 mai 2012, il lui fallait réintroduire le contrôle aux frontières intérieures terrestres avec la France ainsi que dans les aéroports de Barcelone et de Gérone au cours de la période du 28 avril au 4 mai 2012.

3.2.        Maintenir l'absence de contrôle aux frontières intérieures

L'article 22 du code frontières Schengen fait obligation aux États membres de supprimer tous les obstacles qui empêchent un trafic fluide aux points de passage routiers aux frontières intérieures, notamment les limitations de vitesse qui ne sont pas fondées exclusivement sur des considérations de sécurité routière. À la suite de certaines mesures prises par la Commission, la France a progressivement levé les obstacles à une circulation routière fluide au niveau de plusieurs points de franchissement routiers à ses frontières intérieures avec l'Espagne, la Belgique et le Luxembourg. Ces mesures ont permis à la Commission de clore, en janvier 2012, la procédure d'infraction engagée contre la France.

Les Pays-Bas prévoient d'installer un système de caméras de surveillance (@migo-boras) à proximité des frontières intérieures, en tant que support technique pour les contrôles de police mobiles. En novembre 2011, la Commission a interpellé les Pays-Bas au sujet d'une possible violation du code frontières Schengen, de la législation de l'UE sur la libre circulation des citoyens de l'Union et des dispositions de la législation de l'Union relatives à la protection des données. Des explications ont été demandées notamment en ce qui concerne la nécessité et la proportionnalité du système et la Commission donne actuellement suite aux réponses des Pays-Bas.

En outre, au cours de la période du 1er novembre 2011 au 30 avril 2012, la Commission a demandé des informations quant à l'application correcte du droit de l'Union et notamment de l'acquis de Schengen dans trois nouvelles affaires, et a continué à examiner huit affaires en cours, interpellant en tout dix États membres différents (l'Autriche, la Belgique, la République tchèque, l'Estonie, l'Allemagne, l'Italie, la Lettonie, les Pays-Bas, la Slovaquie et la Suède). Ces dossiers concernent principalement la question de savoir si la mise en œuvre de contrôles de police à proximité de la frontière intérieure a un effet équivalent à celui de vérifications aux frontières (article 21 du code frontières Schengen), et l'obligation de supprimer les obstacles qui empêchent un trafic routier fluide, tels que les limitations de vitesse aux points de passage routiers aux frontières intérieures (article 22 du code frontière Schengen). Dans toutes ces affaires, l'échange d'informations avec les autorités nationales respectives est toujours en cours.

3.3.        Procédures d'infraction en cours liées à l'acquis de Schengen

Transposition de la directive «retour» (2008/115/CE) dans la législation nationale

Le délai prévu pour la mise en œuvre de la directive «retour» (2008/115/CE) a expiré le 24 décembre 2010. Vingt-six États membres ont déjà arrêté une nouvelle législation transposant la directive dans leur droit national et adopté les normes communes. Fin avril 2012, seule la Lituanie, la Pologne et l'Islande n'avaient pas encore notifié une transposition complète. La Commission a lancé des procédures d'infraction à l'encontre des États membres qui n'ont pas respecté leur obligation de transposition et de notification.

Une étude lancée en 2011 afin d'évaluer la transposition correcte de la directive dans la législation nationale a produit ses premiers résultats, dix-huit rapports étant désormais disponibles, les autres devant suivre dans le courant de 2012. La Commission examinera en profondeur les rapports de transposition et veillera à ce que les États membres transposent pleinement et dûment les dispositions de la directive.

Application du code frontières Schengen

En octobre 2009, des allégations faisant état de graves difficultés auxquelles étaient confrontés les migrants introduisant une demande d'asile, et de mauvais traitements infligés par la Grèce aux demandeurs d'asile (potentiels), y compris le renvoi de personnes risquant de subir un préjudice grave ou d'être persécutées, ont poussé la Commission à envoyer une lettre de mise en demeure à la Grèce. La Commission est d'avis que toute violation de l'acquis de l'UE en matière d'asile et du code frontières Schengen, en rapport avec les droits fondamentaux consacrés dans la charte des droits fondamentaux, les principes généraux du droit de l'Union et la convention européenne des droits de l'homme, doit être traitée en urgence.

La Commission reconnaît que la Grèce subit une pression considérable en raison du nombre important de ressortissants de pays tiers entrant sur son territoire. Simultanément, elle est préoccupée par les déficiences graves du système grec d'asile et par la violation des droits fondamentaux. Tout en reconnaissant les efforts consentis par la Grèce pour remédier à cette situation, la Commission maintiendra un suivi étroit dans cette affaire et prendra les dispositions nécessaires pour s'assurer du respect, par la Grèce, de ses obligations juridiques et veiller à ce qu'elle bénéficie de tout l'aide nécessaire à cette fin.

3.4.        Faiblesses répertoriées dans le cadre du mécanisme d'évaluation de Schengen

L'espace Schengen est fondé sur la confiance mutuelle entre les États membres dans leur capacité à mettre en œuvre les mesures permettant la levée des contrôles aux frontières intérieures et notamment des contrôles aux frontières intérieures. Afin d'obtenir et de maintenir cette confiance mutuelle, les États membres ont mis en place, en 1998, un mécanisme[12] destiné à vérifier le respect de l'ensemble des conditions préalables à l'application de l'acquis de Schengen (à savoir, la suppression des contrôles aux frontières) par les États membres qui souhaitent rejoindre la coopération Schengen, ainsi qu'à vérifier l'application correcte de l'acquis de Schengen par les États membres qui le mettent déjà en œuvre. Les États membres sont régulièrement évalués par des experts des États membres, le secrétariat général du Conseil et la Commission. Les évaluations sont fondées sur des réponses aux questionnaires approuvés par le Conseil ainsi que sur des visites sur place et les conclusions sont exposées dans des rapports, y compris des commentaires et des recommandations de suivi.

Entre le 1er novembre 2011 et le 30 avril 2012, des évaluations Schengen ont été réalisées; elles portaient sur les frontières aériennes en Hongrie, à Malte et en Slovénie, sur les visas en République tchèque, en Hongrie, à Malte et en Slovénie, sur le SIS/Sirène en Finlande et en Suède, sur la coopération policière à Malte, en Slovénie, en Suède, en Islande et en Norvège et sur la protection des données en République tchèque, en Hongrie, en Pologne, en Slovaquie et en Islande. Les rapports sont toujours en cours d'élaboration, mais on s'attend à ce qu'ils contiennent des commentaires positifs et négatifs et des recommandations sur des questions telles que la formation, le recours à l'analyse de risque, les échanges d'informations, la coopération internationale et les infrastructures aux points de passage frontaliers ainsi que les ambassades et les consulats. Si, en règle générale des améliorations restent possibles, aucune de ces évaluations n'a fait apparaître un type de déficience rendant nécessaire une action immédiate de la Commission.

Pendant l'évaluation Schengen de la Grèce menée en 2010-2011, plusieurs lacunes sévères ont été relevées, notamment en ce qui concerne le contrôle des frontières extérieures terrestres et maritimes. Étant donné la large portée des recommandations, la Grèce a élaboré un plan d'action national concernant les moyens de remédier à ces lacunes, parmi lesquels, notamment, une meilleure coordination des questions liées à la gestion des frontières, le déploiement de personnel et d'équipement à plus grande échelle, l'amélioration des infrastructures, un nouveau programme de formation, ainsi qu'une révision de la législation applicable. Afin d'apprécier les progrès réalisés à ce jour et de recenser les éléments pour lesquels les États membres pourraient offrir une assistance, une mission d'examen est prévue du 28 mai au 2 juin 2012. Cette mission se rendra à l'aéroport international d'Athènes «Eleftherios Venizélos», au port du Pirée et dans la région de l'Évros. Réitérant son engagement à soutenir les efforts consentis par la Grèce pour gérer ses frontières extérieures, la Commission invite la Grèce à continuer la mise en œuvre de son plan d'action Schengen et à mettre en place un dispositif de recensement global et systématique des besoins ainsi que des ressources disponibles.

Un calendrier indicatif des évaluations de Schengen de mai à octobre 2012 figure à l'annexe I.

3.5.        Suppression des contrôles aux frontières intérieures avec la Bulgarie et la Roumanie

Même si le Conseil de juin 2011 a conclu que tant la Roumanie et la Bulgarie remplissaient formellement les critères requis pour appliquer pleinement l'acquis de Schengen, il n'a pas été en mesure de se prononcer en faveur de la levée des contrôles aux frontières intérieures de ces pays. Le 2 mars 2012, le Conseil européen a demandé au Conseil de recenser et de mettre en œuvre les mesures qui contribueront à ce que l'élargissement de l'espace Schengen à la Roumanie et à la Bulgarie se déroule dans de bonnes conditions, et lui a demandé de revenir sur cette question afin de pouvoir adopter sa décision lors de la session du Conseil JAI de septembre 2012. La Commission est disposée à soutenir toutes les mesures qui pourraient être nécessaires pour assurer l'adoption d'une décision positive par le Conseil en septembre.

4.           Mesures d'accompagnement

4.1.        Utilisation du système d’information Schengen

Le système d'information Schengen (SIS) est un dispositif commun permettant aux autorités compétentes des États membres d'obtenir des informations liées à des signalements de personnes et d'objets. Les États membres peuvent utiliser ces informations à des fins de coopération policière et judiciaire en matière pénale, ainsi que pour des vérifications effectuées sur des personnes aux frontières extérieures de l'espace Schengen ou sur leur propre territoire national, ainsi qu'aux fins de la délivrance de visas et de titres de séjour. Le SIS est très efficace et génère des dizaines de milliers de signalements par an, et la Commission collabore avec le Conseil afin de détecter les pratiques et les règles qui font double emploi.

Bien que les États membres utilisent une base juridique commune pour la coopération, la mise en œuvre peut varier du fait de leurs différentes règles et procédures nationales. Cela signifie notamment que certains États membres qui se servent du SIS ont un taux de réussite important en ce qui concerne le dépistage de leurs grands criminels dans d'autres États membres, alors que d'autres n'utilisent que rarement cette possibilité.

Qui plus est, si la coopération entre les autorités responsables de l'échange d'informations supplémentaires (les bureaux SIRENE) peut être exemplaire, des retards interviennent souvent dans les États membres. Lorsqu'une personne a été appréhendée à une frontière et qu'un bureau SIRENE a besoin de manière urgente d'informations sur le passé de la personne, il n'est pas acceptable de devoir attendre des heures, voire des jours, pour obtenir ces informations importantes. Une telle arrestation ne saurait être justifiée, et une personne qui a été appréhendée pour un motif légitime peut devoir être relâchée faute d'informations.

Tous les États membres ne créent pas automatiquement un signalement pour indiquer qu'un document de voyage a été invalidé par l'autorité qui l'a délivré. Cela permet au ressortissant de pays tiers porteur de ce document de l'utiliser illégalement afin d'entrer dans l'espace Schengen, même après avoir été interdit d'entrée à la suite d'une condamnation pénale.

La Commission appréciera si des mesures devraient être adoptées pour que le potentiel du SIS et des bureaux SIRENE soit pleinement exploité et, dans l'affirmative, si d'autres mesures pourraient être envisagées, en plus des éléments précités.

4.2.        Utilisation du système d’information sur les visas

Le système d'information sur les visas (VIS) est un système d'échange d'informations sur les visas de court séjour, permettant aux autorités compétentes des États Schengen de traiter des données sur les demandes de visa et sur tous les visas qui sont délivrés, refusés, annulés, révoqués ou prolongés. Le lancement du VIS a été réalisé avec succès le 11 octobre 2011, dans les ambassades et les consulats des États membres dans la première région de déploiement (Algérie, Égypte, Libye, Mauritanie, Maroc et Tunisie). Selon la planification actuelle, le VIS sera mis en service le 10 mai 2012 dans la deuxième région (Israël, Jordanie, Liban et Syrie) et le 2 octobre 2012 dans la troisième région (Afghanistan, Bahreïn, Iran, Iraq, Koweït, Oman, Qatar, Arabie saoudite, Émirats arabes unis et Yémen). Le VIS fonctionne correctement et au 30 avril 2012, le système avait traité 775 489 demandes, 611 419 visas délivrés et 99 242 refus.

4.3.        Politique des visas et accords de réadmission

Mécanisme de suivi postérieur à la libéralisation du régime des visas pour les Balkans occidentaux

En raison d'une augmentation rapide des demandes d'asile dans certains États membres, après la libéralisation du régime des visas en faveur de l'ancienne République yougoslave de Macédoine, du Monténégro et de la Serbie en décembre 2009, ainsi que de l'Albanie, de la Croatie et de Bosnie‑Herzégovine en décembre 2010, la Commission a créé un mécanisme de suivi pour tous les pays des Balkans occidentaux qui ont obtenu cette libéralisation. En décembre 2011, la Commission a présenté son deuxième rapport sur ce suivi[13], en exposant les récentes mesures prises, la situation actuelle et les mesures proposées. Bien que le nombre total de demandeurs d'asile en provenance de cette région ait diminué au deuxième semestre de 2011 par rapport à la même période en 2010, à la suite de la baisse du nombre de demandeurs d'asile venant de Serbie et de l'ancienne République yougoslave de Macédoine, l'augmentation considérable du nombre de demandeurs d'asile en provenance d'Albanie et de Bosnie‑Herzégovine a contrebalancé cette réduction. La plupart des demandes d'asile (motivées par l'absence de soins de santé, par le chômage et le manque de structures scolaires) sont considérées comme non fondées, de telle sorte que le taux d'octroi de l'asile est très bas. La Belgique, l'Allemagne, le Luxembourg et la Suède demeurent les principaux pays de destination, en raison notamment de la longueur de leurs procédures d'asile et de la durée correspondante du séjour autorisé. Ces États membres ont pris des mesures visant à réduire le temps de traitement des demandes, mais il reste des améliorations à faire en ce qui concerne l'échange d'informations, les enquêtes sur les passeurs, le renforcement du contrôle aux frontières, les campagnes de sensibilisation ciblées et l'assistance aux minorités (notamment aux Roms).

Sur cette base, la Commission déterminera si le mécanisme de suivi postérieur à la libéralisation du régime des visas (y compris le mécanisme d'alerte de Frontex)offre les outils nécessaires pour assurer le suivi des flux migratoires à la suite de la libéralisation du régime de visas pour les pays des Balkans occidentaux ou si des améliorations de ce suivi sont nécessaires.

Accords de réadmission

La conclusion d'accords de réadmission est un volet important de la coopération de l'Union avec les pays tiers pour la gestion des migrations et de l'asile. En novembre 2011, la Commission a finalisé les négociations sur un accord de réadmission avec le Cap‑Vert, ouvrant ainsi la voie à la procédure de ratification formelle. Les négociations techniques avec la Turquie ont été achevées, ce qui permet d'escompter une signature de l'accord de réadmission et le lancement d'un dialogue sur la libéralisation du régime des visas. En outre, des négociations ont été lancées avec l'Arménie et l'Azerbaïdjan sur des accords de facilitation de la délivrance des visas et de réadmission.

5.           Lignes directrices relatives au fonctionnement de l'espace Schengen

Les mesures mises en œuvre dans le cadre de la coopération Schengen relèvent des compétences mixtes, en ce sens que les responsabilités sont partagées entre l'Union européenne et les États membres. Le bon fonctionnement de l'espace Schengen dépend non seulement de l'application uniforme de l'acquis de l'UE, mais aussi de l'utilisation des compétences nationales conformément à l'esprit de Schengen. Ce fait peut être illustré par deux exemples: les États membres peuvent mettre en œuvre des contrôles de police au sein de leur territoire, afin de de vérifier si une personne a le droit d'y séjourner, mais ces contrôles ne sauraient avoir un effet équivalent à celui du contrôle aux frontières. En outre, s'il relève de la compétence des États membres de délivrer des documents de voyage et de titres de séjour aux ressortissants de pays tiers, leurs décisions sont directement liées au droit de voyager au sein de l'espace Schengen et concernent donc également les autres États membres.

Dans ses communications sur la migration[14] et sur la gouvernance de Schengen[15], la Commission s'est engagée à fournir des lignes directrices pour garantir une mise en œuvre et une interprétation cohérentes de l'acquis de Schengen. Les lignes directrices sur la délivrance des titres de séjour et des documents de voyage ainsi que sur les mesures de police aux frontières intérieures, qui ont été élaborées par la Commission en concertation avec les États membres, sont exposées à l'annexe II.

ANNEXE I: Calendrier indicatif des évaluations Schengen de mai à octobre 2012[16]

Date || États membres || Thème

6 au 12 mai 2012 || Estonie, Lettonie et Lituanie || Frontières maritimes

28 mai au 2 juin 2012 || Grèce || Évaluation par les pairs

17 au 22 juin 2012 || Hongrie et Slovaquie || Coopération policière

1er au 7 juillet 2012 || Estonie, Lettonie et Lituanie || Frontières aériennes

23 au 27 juillet 2012 || Malte et Slovénie || Protection des données

9 au 20 septembre 2012 || Malte, Pologne et Slovénie || Frontières maritimes

23 au 29 septembre 2012 || République tchèque et Pologne || Coopération policière

7 au 12 octobre 2012 || Danemark, Islande et Norvège || SIS/Sirene

7 au 13 octobre 2012 || Lettonie et Lituanie || Visa

14 au 20 octobre 2012 || Estonie, Lettonie et Lituanie || Protection des données

ANNEXE II: Lignes directrices pour garantir une mise en œuvre et une interprétation cohérentes de l'acquis de Schengen

Le 16 septembre 2011, la Commission a présenté des propositions législatives portant sur un mécanisme d'évaluation de Schengen et sur une modification du code frontières Schengen en vue de renforcer la gouvernance de Schengen[17]. Par ailleurs, la Commission a annoncé[18] qu'elle réfléchirait aux domaines dans lesquels l'élaboration de lignes directrices pourrait garantir une application plus cohérente des règles de Schengen. Parmi les questions à aborder dans ces lignes directrices, elle a répertorié la délivrance des titres de séjour et des documents de voyage ainsi que les mesures de police aux frontières intérieures, et elle a organisé deux réunions avec des experts des États membres, le 20 juillet 2011 et le 28 novembre 2011, afin d'examiner la portée et le contenu de ces orientations. La question de la délivrance des titres de séjour et des documents de voyage a également fait l'objet de discussions avec les États membres lors de la réunion des points de contact nationaux dans le cadre du mécanisme d'information mutuelle, tenue le 1er décembre 2011.

Les lignes directrices exposées ci-après tiennent compte des précieuses observations et suggestions formulées par les États membres pendant ces consultations.

A.        Délivrance de titres de séjour temporaires et de documents de voyage aux ressortissants de pays tiers[19]

I.          Introduction

L'acquis de Schengen assure une harmonisation de la réglementation relative aux séjours de courte durée (c'est-à-dire la politique commune des visas, y compris la reconnaissance mutuelle des visas de court séjour reposant sur les procédures et conditions harmonisées de délivrance des visas définies dans le code des visas). Cet acquis ne prévoit pas l'harmonisation des conditions de délivrance de visas de long séjour, de titres de séjour ou de documents de voyage à des ressortissants de pays tiers. Ces questions sont régies par le droit interne des États membres.

L'acquis de l'Union dans le domaine de la migration et de l'asile comprend des dispositions relatives aux conditions et procédures de délivrance de titres de séjour à certaines catégories de personnes. Ainsi, par exemple, aucun titre de séjour ne peut être délivré aux demandeurs d'asile[20] en application du droit de l'Union, ceux-ci ne pouvant obtenir qu'une autorisation de demeurer sur le territoire de l'État membre.

En ce qui concerne les bénéficiaires d'une protection internationale[21], les réfugiés doivent se voir délivrer un titre de séjour valable pendant trois ans au moins et renouvelable, tandis que les bénéficiaires d'une protection subsidiaire doivent se voir délivrer un titre de séjour d'une durée de validité d'au moins un an, renouvelable. Les membres de la famille d'une personne bénéficiant d'une protection doivent également se voir délivrer un titre de séjour, mais sa durée de validité peut être plus courte.

Si une protection temporaire est accordée conformément à la directive correspondante, les États membres doivent procurer au bénéficiaire un titre de séjour pour toute la durée de la protection temporaire[22]. Il en va de même pour les membres de la famille qui font l'objet d'un regroupement conformément aux règles énoncées dans la directive[23].

Quant aux autres catégories de personnes, notamment celles faisant l'objet de mesures humanitaires ou de régularisations, la réglementation nationale s'applique à leur égard.

Il relève toujours de la compétence nationale de chaque État membre de délivrer une autorisation de séjour et/ou un document de voyage aux ressortissants de pays tiers dont la situation n'est pas régie par le droit de l'Union. Les décisions de cette nature sont adoptées sur le fondement de la réglementation nationale.

Pour ce qui concerne les titulaires de visas de long séjour et de titres de séjour, l'acquis de Schengen ne fait qu'énoncer le principe de l'équivalence entre un visa de long séjour/titre de séjour et un visa de court séjour[24]: selon ce principe, le titulaire d'un visa de long séjour ou d'un titre de séjour délivré par un État Schengen est autorisé à se rendre dans les autres États Schengen pour un bref séjour, pour autant qu'il remplisse les conditions d'entrée, c'est-à-dire qu'il soit en possession d'un document de voyage en cours de validité, qu'il justifie l’objet et les conditions du séjour envisagé et dispose de moyens de subsistance suffisants, qu'il n'ait pas fait l’objet d’un signalement diffusé dans le SIS aux fins d'une interdiction d'entrée, et qu'il ne soit pas considéré comme constituant une menace pour l'ordre public, la sécurité intérieure, la santé publique ou les relations internationales de l'un des États membres[25]. Il incombe aux autorités compétentes de l'État membre dans lequel se rend le titulaire d'un titre de séjour qui lui a été délivré par un autre État membre de vérifier si l'intéressé remplit ces conditions. Cette vérification peut être effectuée sur le territoire des États membres. Dans l'hypothèse où des contrôles aux frontières intérieures seraient rétablis, conformément au code frontières Schengen[26] (ci‑après le «code»), cette vérification pourrait avoir lieu aux frontières intérieures. Cela vaut également pour tout ressortissant de pays tiers en possession d'un titre de séjour provisoire ou d'un document de voyage délivré par un État Schengen[27].

Les États membres sont tenus de communiquer à la Commission leurs différents types de visas de long séjour, titres de séjour et titres de séjour provisoires équivalant à des visas de court séjour et la Commission met ces informations à la disposition des autres États membres[28]. Ces autres États membres ont l'obligation d'accepter que ces visas de long séjour et titres de séjour soient considérés comme équivalant à des visas de court séjour permettant de se déplacer au sein de l'espace Schengen.

Le cadre juridique de l'UE ne définit pas les conditions de délivrance de documents de voyage aux ressortissants de pays tiers, hormis les dispositions relatives aux documents de voyage délivrés aux personnes dont le besoin de protection internationale a été reconnu. Des documents de voyage doivent donc être fournis aux réfugiés (obligation au titre de la convention de Genève) et aux bénéficiaires d'une protection internationale (tout au moins lorsqu'ils doivent se déplacer pour des motifs humanitaires), à moins que des raisons impérieuses liées à la sécurité nationale ou à l’ordre public ne s’y opposent[29]. À titre exceptionnel, des documents de voyage peuvent être fournis à des demandeurs d'asile lorsque des raisons humanitaires graves le justifient[30]. Un laissez-passer peut être délivré à un demandeur d'asile faisant l'objet d'un transfert au titre du règlement de Dublin, en vue d'identifier l'intéressé et de lui permettre d'entrer sur le territoire de l'État membre responsable de l'examen de sa demande[31]. Enfin, si une protection temporaire est accordée, les États membres doivent utiliser un type particulier de laissez-passer pour les transferts des bénéficiaires entre États membres[32].

II.        Lignes directrices à l'intention des États membres

Les événements survenus en 2011 ont montré qu'en cas d'afflux soudain de migrants, la délivrance de visas de long séjour, de titres de séjour, y compris provisoires, et de documents de voyage aux ressortissants de pays tiers pouvait nuire au bon fonctionnement de l'espace Schengen sans frontières intérieures.

Lorsqu'un État membre est subitement confronté à une arrivée massive de migrants provenant de pays tiers et lorsque cette circonstance ne déclenche pas l'application de la directive sur la protection temporaire:

1)           cet État membre devrait informer sans retard les autres États membres et la Commission des décisions qu'il entend prendre quant à la délivrance de titres de séjour, y compris provisoires, et de documents de voyage aux ressortissants de pays tiers concernés dans le cadre du mécanisme d'information mutuelle (MIM)[33]. Sur la base des informations communiquées, des discussions ad hoc pourraient être engagées par la Commission, en collaboration avec la présidence du Conseil et après consultation de l'État membre ayant fourni ces renseignements, à un niveau adéquat au sein du Conseil;

2)           lorsqu'un État membre décide de délivrer des titres de séjour et qu'il a le choix entre différents types de titres de séjour en vertu de sa législation nationale, il devrait opter pour la délivrance de titres de séjour, provisoires ou non, qui ne sont pas équivalents à un visa de court séjour si les migrants concernés ne remplissent pas les conditions requises pour se déplacer dans l'espace Schengen;

3)           s'il délivre des titres de séjour, provisoires ou non, qui équivalent à un visa de court séjour, l'État membre devrait informer les titulaires de ces documents, d’une façon appropriée et efficace, des conditions auxquelles ils peuvent (ou ne peuvent pas) voyager dans l’espace Schengen. Les États membres sont invités à fournir ces informations sur leurs sites internet nationaux qui sont reliés au portail de l'UE sur l'immigration.

En outre:

1)           eu égard aux données déjà fournies par l'étude sur les statuts de protection harmonisés non UE[34], réalisée par le réseau européen des migrations (REM), qui a recensé les nombreux types de titres de séjour et visas de long séjour délivrés à des fins de protection ainsi que les multiples conditions auxquelles ils sont soumis, les États membres devraient échanger des informations sur leurs pratiques nationales dans ce domaine, dans le cadre du comité sur l’immigration et l’asile (CIA);

2)           les États membres devraient être prêts à contribuer à une future consultation ad hoc du REM visant à rassembler des données détaillées sur leur législation nationale fixant les conditions auxquelles est soumise la délivrance de documents d'identité ou de voyage aux ressortissants de pays tiers dépourvus d'un document de voyage délivré par leur pays d'origine et sur les pratiques dans ce domaine.

Pour sa part, la Commission continuera à promouvoir l'échange d'informations par l'intermédiaire du MIM, du CIA, du REM et d'autres canaux.

B.        Mesures de police dans les zones frontalières intérieures

I.          Introduction

Il pourrait arriver que des États membres estiment devoir appliquer des mesures supplémentaires dans leurs zones frontalières intérieures pour lutter plus efficacement contre la criminalité transfrontière. Bien que ces mesures ne puissent en aucun cas avoir un effet équivalent à celui des vérifications aux frontières, il est possible qu'elles portent préjudice aux pays voisins et à la libre circulation des personnes, y compris aux citoyens de l'Union et aux membres de leur famille. Les voyageurs peuvent les percevoir comme une atteinte aux réalisations fondamentales de l'Union européenne.

Le titre III du code frontières Schengen prévoit que les frontières intérieures séparant les États Schengen peuvent être franchies en tout lieu sans que des vérifications aux frontières soient effectuées sur les personnes, quelle que soit leur nationalité. La suppression du contrôle aux frontières intérieures suppose également la suppression de la surveillance des frontières. Cela ne préjuge pas du droit conféré aux États membres d'exercer des compétences de police par l'intermédiaire de leurs autorités nationales compétentes en vertu de leur législation nationale, y compris dans les zones frontalières intérieures, dans la mesure où l'exercice de ces compétences n'a pas un effet équivalent à celui des vérifications aux frontières. Le code contient une liste non exhaustive de critères à appliquer pour apprécier si l'exercice des compétences de police a ou non un effet équivalent à celui des vérifications aux frontières. Par exemple, des mesures de police ne peuvent être considérées comme équivalant à des vérifications aux frontières lorsqu'elles n'ont pas pour objectif le contrôle aux frontières, sont fondées sur des informations générales et l'expérience des services de police relatives à d'éventuelles menaces pour la sécurité publique et visent, notamment, à lutter contre la criminalité transfrontalière, sont conçues et exécutées d'une manière clairement distincte des vérifications systématiques des personnes effectuées aux frontières extérieures et sont réalisées sur la base de vérifications réalisées à l'improviste.

En octobre 2010, la Commission a fait rapport au Parlement européen et au Conseil sur l'application des dispositions liées à l'absence de contrôles aux frontières intérieures. Dans son rapport[35], la Commission concluait que la mise en place d'un espace sans frontières intérieures dans lequel la libre circulation des personnes est assurée constitue l'une des réalisations les plus considérables et les plus tangibles de l'Union. Toute restriction, telle qu'une vérification de police effectuée à proximité d'une frontière intérieure, est perçue par les citoyens comme une entrave à leur droit de circuler librement. Les personnes ne sauraient en effet faire l'objet d'une vérification au seul motif qu'elles franchissent une frontière intérieure, que ce soit à la frontière ou dans les zones frontalières.

Dans ce rapport, la Commission a exprimé sa préoccupation quant aux difficultés rapportées par des voyageurs au sujet de vérifications régulières et systématiques qu'effectueraient les autorités nationales de certains États membres dans des zones frontalières intérieures et elle s'est engagée à surveiller de près la situation dans ces zones pour garantir la bonne application du droit de l'Union.

Le 22 juin 2010, la Cour de justice de l'Union européenne a, dans un arrêt de principe[36], dit pour droit que l’article 67, paragraphe 2, du TFUE ainsi que les articles 20 et 21 du code frontières Schengen s'opposent à une législation nationale conférant aux autorités de police d'un État membre la compétence de contrôler, uniquement dans une zone de 20 kilomètres à partir d'une frontière intérieure, l’identité de toute personne, indépendamment du comportement de celle-ci et de circonstances particulières établissant un risque d’atteinte à l’ordre public, en vue de vérifier le respect des obligations de détention, de port et de présentation des titres et des documents prévues par la loi, sans prévoir l’encadrement nécessaire de cette compétence garantissant que l’exercice pratique de ladite compétence ne puisse pas revêtir un effet équivalent à celui des vérifications aux frontières.

À la suite de cet arrêt, la Commission a demandé aux États membres d'adapter en conséquence toute législation nationale conférant aux autorités de police nationales des compétences spécifiques dans les zones frontalières intérieures.

Par conséquent, certains États membres ont modifié leur législation nationale de manière à limiter l'exercice des compétences de police dans les zones frontalières intérieures en ce qui concerne la délimitation géographique, certains moyens spécifiques de transport et le cadre temporel (par exemple, limitation de la zone voisine de la frontière intérieure où des vérifications peuvent être effectuées sur des trains internationaux ou des véhicules franchissant la frontière; définition d'un créneau horaire maximum par jour, semaine ou mois; limitation du nombre maximal de wagons par train pouvant faire l'objet de vérifications).

II.        Lignes directrices à l'intention des États membres

1)           Conformément au code frontières Schengen, tout État membre peut exercer des compétences de police sur son territoire, y compris dans les zones frontalières intérieures, pour vérifier si une personne a le droit de séjourner sur son territoire. Ces vérifications doivent toutefois être ciblées et se fonder sur des informations actualisées et concrètes collectées par les services de police et sur leur expérience en matière de menaces pour la sécurité publique. Elles ne peuvent donc être effectuées qu’à l’improviste, sur la base d'une analyse du risque.

Il ne suffit pas de déplacer les vérifications de la frontière intérieure proprement dite vers une zone qui en soit distante, par exemple, de 800 mètres pour qu'on puisse considérer que ces vérifications n'ont pas d'effet équivalent à celui de vérifications aux frontières.

2)           Lorsque des vérifications régulières ou systématiques sont nécessaires pour assurer la sécurité sur leur territoire national, les États membres pourraient envisager de réintroduire temporairement le contrôle à leurs frontières intérieures, dans le respect du code[37].

3)           Conformément à ce que la Cour a déclaré aux points 73 et 74 de l'arrêt Melki, la législation relative aux vérifications effectuées dans les seules zones frontalières intérieures doit prévoir des limitations, notamment en ce qui concerne l'intensité et la fréquence des contrôles. En outre, dans le cas d'une vérification effectuée indépendamment du comportement de la personne contrôlée et de circonstances particulières établissant un risque d’atteinte à l’ordre public, la législation doit prévoir l’encadrement nécessaire afin de guider l’application pratique de cette compétence.

Par conséquent, toute législation fixant des objectifs précis pour la réalisation de ces vérifications et d'éventuelles limitations dans le temps est apte à fournir les garanties nécessaires, notamment si elle se fonde sur des informations générales détenues par les services de police et sur l'expérience de ceux-ci.

4)           Pour apprécier la compatibilité de vérifications effectuées par la police dans des zones frontalières intérieures avec l'acquis de Schengen, il y a lieu d'examiner la manière dont ces vérifications sont réalisées en pratique. Ainsi, lorsque la Commission est confrontée à des allégations sérieuses faisant état de vérifications effectuées dans des zones frontalières intérieures, comme indiqué dans le rapport de 2010, elle doit chercher à obtenir des statistiques concrètes auprès des États membres; elle peut donc demander à l'État membre concerné de lui communiquer des informations sur les vérifications effectuées à la frontière pendant une période donnée (mentionnant les dates, lieux, motifs et l'autorité nationale responsable), et de lui expliquer en quoi ces vérifications ont contribué à atteindre les objectifs définis dans sa législation nationale ou ses stratégies, entre autres la lutte contre la criminalité transfrontière.

Dans ce contexte, la Commission tiendra compte de l'existence d'une analyse de risque et du fait que l'État membre concerné prend des mesures non seulement dans la zone frontalière intérieure, mais aussi en d'autres endroits sur son territoire. Par conséquent, les États membres sont une fois de plus invités, comme dans le rapport de 2010 de la Commission, à prendre dans toute la mesure du possible les dispositions nécessaires pour rassembler ces informations, en ce qui concerne leurs zones frontalières intérieures mais aussi le reste de leur territoire. Cela permettra ensuite, au besoin, de procéder à une évaluation rigoureuse pour établir si les vérifications effectuées dans les zones frontalières intérieures sont proportionnées aux objectifs définis. Par ailleurs, associées aux évaluations ex post des résultats des vérifications, ces statistiques pourraient se révéler utiles aux États membres eux-mêmes lorsqu'ils évalueront leur stratégie nationale ou planifieront le déploiement futur de leurs ressources.

[1]               COM(2011) 561, Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions intitulée «Gouvernance de Schengen ‑ Renforcer l'espace sans contrôle aux frontières intérieures», COM(2011) 559, Proposition modifiée de règlement du Parlement européen et du Conseil portant création d'un mécanisme d'évaluation et de suivi destiné à contrôler l'application de l'acquis de Schengen et COM (2011) 560, Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) n° 562/2006 afin d'établir des règles communes relatives à la réintroduction temporaire du contrôle aux frontières intérieures dans des circonstances exceptionnelles.

[2]               COM(2011) 873 Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil portant création du système européen de surveillance des frontières (EUROSUR).

[3]               Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) n° 539/2001 du Conseil fixant la liste des pays tiers dont les ressortissants sont soumis à l’obligation de visa pour franchir les frontières extérieures des États membres et la liste de ceux dont les ressortissants sont exemptés de cette obligation.

[4]               COM(2011) 743 Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions intitulée «Approche globale de la question des migrations et de la mobilité».

[5]               Analyse des risques trimestrielle de Frontex, octobre-décembre 2011.

[6]               Aux fins du présent rapport, les membres de la famille d'un citoyen de l'Union qui n'ont pas la nationalité d'un État membre ne sont pas visés lorsqu'il est fait référence aux ressortissants de pays tiers, étant donné le statut privilégié dont ils bénéficient en vertu de la législation de l'UE relative à la libre circulation des personnes (directive 2004/38/CE) et de l'acquis de Schengen.

[7]               Analyse des risques annuelle de Frontex, 2012.

[8]               Analyse des risques annuelle de Frontex, 2012.

[9]               Rapport récapitulatif établi par le quartier général de la police des frontières polonaise, en novembre 2011.

[10]             Directive 2009/52/CE du Parlement européen et du Conseil prévoyant des normes minimales concernant les sanctions et les mesures à l’encontre des employeurs de ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier.

[11]             Règlement (CE) n° 562/2006 du Parlement européen et du Conseil établissant un code communautaire relatif au régime de franchissement des frontières par les personnes (code frontières Schengen).

[12]             SCH/Com-ex (98) 26 déf.

[13]             SEC(2011) 1570 Document de travail des services de la Commission – Second report on the post-visa liberalisation monitoring for the Western Balkan countries in accordance with the Commission Statement of 8 November 2010.

[14]             COM(2011) 248 Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions – Communication sur la migration.

[15]             COM(2011) 561 Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions - Gouvernance de Schengen ‑ Renforcer l'espace sans contrôle aux frontières intérieures.

[16]             Document du Conseil 5090/2/12 SCH-EVAL 1 COMIX 6 REV 2.

[17]             COM(2011) 559 et COM(2011) 560.

[18]             COM(2011) 561.

[19]             Aux fins des présentes lignes directrices, les membres de la famille d'un citoyen de l'Union qui n'ont pas la nationalité d'un État membre ne sont pas visés lorsqu'il est fait référence aux ressortissants de pays tiers, étant donné le statut privilégié dont ils bénéficient en vertu de la législation de l'UE relative à la libre circulation des personnes (directive 2004/38/CE) et de l'acquis de Schengen.

[20]             Article 6 de la directive 2003/9/CE sur les conditions d'accueil.

[21]             Article 24 de la directive 2004/83/CE relative aux conditions à remplir pour pouvoir prétendre au statut de réfugié.

[22]             Article 8 de la directive 2001/55/CE sur la protection temporaire.

[23]             Article 15, paragraphe 6, de la directive 2001/55/CE sur la protection temporaire.

[24]             Article 21, paragraphes 1 et 3, de la convention de Schengen telle que modifiée par le règlement (UE) n° 265/2010 du Parlement européen et du Conseil du 25 mars 2010, JO L 85 du 31.3.2010, p. 1.

[25]             Article 5 du règlement (CE) n° 562/2006 établissant un code communautaire relatif au régime de franchissement des frontières par les personnes (code frontières Schengen), JO L 105 du 13.4.2006, p. 1.

[26]             Articles 23 et suivants du règlement (CE) n° 562/2006 établissant un code communautaire relatif au régime de franchissement des frontières par les personnes, JO L 105 du 13.4.2006, p. 1.

[27]             Article 21, paragraphe 2, de la convention de Schengen.

[28]             Voir l'annexe 22 de la recommandation de la Commission du 6 novembre 2006 établissant un «Manuel pratique à l'intention des garde-frontières (manuel Schengen)» commun à utiliser par les autorités compétentes des États membres lors du contrôle des personnes aux frontières, C(2006) 5186 final.

[29]             Article 25 de la directive 2004/83/CE relative aux conditions à remplir pour pouvoir prétendre au statut de réfugié.

[30]             Article 6 de la directive 2003/9/CE sur les conditions d'accueil.

[31]             Article 19, paragraphe 3, et article 20, paragraphe 1, point e), du règlement (CE) n° 343/2003 («règlement de Dublin») et article 7, paragraphe 2, du règlement (CE) n° 1560/2003 portant modalités d'application du règlement de Dublin.

[32]             Article 26, paragraphe 5, de la directive 2001/55/CE sur la protection temporaire.

[33]             Établi par la décision 2006/688/CE du Conseil.

[34]             Disponible en anglais à l'adresse suivante: http://www.emn.europa.eu (rubrique «EMN Studies»).

[35]             Rapport de la Commission au Parlement européen et au Conseil sur l'application du titre III (Frontières intérieures) du code frontières Schengen, COM(2010) 554 final.

[36]             Affaires jointes C‑188/10 et C‑189/10, Melki e.a.

[37]             Articles 23 et suivants.