14.3.2013   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 76/24


Avis du Comité économique et social européen sur la «Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions – L'Acte pour le marché unique II – Ensemble pour une nouvelle croissance»

COM(2012) 573 final

2013/C 76/05

Rapporteur: M. SIECKER

Corapporteurs: Mme FEDERSPIEL et M. VOLEŠ

Le 19 décembre 2012, la Commission européenne a décidé, conformément à l'article 304 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de consulter le Comité économique et social européen sur la

«Communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions: L'Acte pour le marché unique II – Ensemble pour une nouvelle croissance»

COM(2012) 573 final.

La section spécialisée «Marché unique, production et consommation», chargée de préparer les travaux du Comité en la matière, a adopté son avis le 8 janvier 2013.

Lors de sa 486e session plénière des 16 et 17 janvier 2013 (séance du 16 janvier 2013), le Comité économique et social européen a adopté le présent avis par 162 voix pour, 24 voix contre et 18 abstentions.

1.   Conclusions et recommandations

1.1

Le Comité rappelle (1) que le marché unique est une pièce maîtresse de l'intégration européenne et qu'il a la capacité de produire des avantages directement perceptibles pour les parties prenantes européennes et de générer une croissance durable pour les économies de l'UE. Dans le contexte actuel de crise économique, un marché unique orienté vers l'avenir et qui fonctionne bien n'est pas seulement souhaitable mais bien essentiel pour l'avenir politique et économique de l'Union européenne.

1.2

Face à la crise économique actuelle et, notamment, aux conséquences de la déréglementation des marchés financiers sur les budgets nationaux des États membres, sur l'économie réelle, sur la pauvreté et sur l'emploi au sein de l'Union européenne (2), le ton optimiste adopté par la Commission dans sa communication relative à la mise en œuvre du marché unique semble inapproprié. Le CESE estime que la Commission n'a pas accordé suffisamment d'attention aux conséquences négatives imprévues du marché unique. Annoncer la réussite sur un ton trop explicite et démonstratif, mais de manière prématurée, ne peut que frustrer les citoyens de l'Union. Cette approche pourrait affaiblir davantage le marché unique au lieu de lui insuffler un nouvel élan. La Commission pourrait adopter une approche plus réaliste en tenant un discours plus nuancé.

1.3

L'amélioration du fonctionnement du marché unique, qui s'appuie sur les anciennes et les nouvelles orientations, est fortement menacée par l'augmentation massive du nombre de chômeurs (28 millions), qui frappe particulièrement les jeunes dans l'UE. Des centaines de milliers de PME ont fait faillite et 120 millions de citoyens sont exposés au risque de pauvreté et d'exclusion sociale, à savoir environ 25 % de la population de l'Union. C'est pourquoi la demande et la consommation dans l'UE sont fortement touchées. Outre la mise en œuvre d'actions-clés, l'UE et les États membres doivent redoubler d'efforts pour surmonter la crise financière, économique et budgétaire, et pour libérer tout le potentiel du marché unique.

1.4

Le CESE invite le Parlement, la Commission et le Conseil à agir rapidement, sans toutefois nuire à la qualité, afin de garantir l'adoption de ces propositions législatives avant la fin des mandats du Parlement et de la Commission au printemps 2014. Le Comité accueillerait très favorablement l'application rapide des mesures proposées dans la communication relative à la gouvernance du marché unique afin d'améliorer la mise en œuvre générale des règles de l'UE.

2.   Observations générales: «Pour une économie sociale de marché hautement compétitive»

2.1

La Commission a défini la deuxième phase de l'Acte pour le marché unique au moyen de 12 nouvelles actions-clés destinées à améliorer le fonctionnement du marché unique. Le CESE se félicite d'avoir été consulté avant la publication de la communication et du fait que la Commission ait repris certaines de ses recommandations dans l'Acte pour le marché unique II. Cependant, il déplore qu'aucune consultation publique formelle n'ait été menée cette fois-ci et que la consultation informelle n'ait pas été réalisée de manière équilibrée entre les acteurs concernés.

2.2

Malgré la contribution positive qu'il a apportée à la croissance économique et la création de nouveaux emplois depuis sa mise en place, le marché unique n'a pas déployé tout son potentiel vis-à-vis des différentes parties prenantes, qu'il s'agisse des entreprises, des travailleurs, des consommateurs, des citoyens ou autres. La Commission mentionne 2,77 millions d'emplois supplémentaires, mais elle ne fait aucune allusion à la nature précaire d'une partie de ceux-ci (3). Or, nous savons que quelque 10 millions d'emplois ont été perdus depuis le printemps 2008, lorsque les effets de la crise économique se sont fait sentir à travers l'Europe, et il semblerait que nous ne soyons pas encore au bout de cette récession (4).

2.3

Bien que la Commission indique les principes directeurs qui ont guidé ces choix (le principe du «mieux légiférer», le coût de la non-Europe, etc.), le caractère urgent de certaines propositions n'est pas toujours clair dans toutes les institutions européennes. En ce qui concerne notamment la mobilité des travailleurs, la Commission annonce une initiative en rapport avec le portail EURES, alors que, dans le même temps, d'autres activités fondamentales dans ce domaine sont toujours en suspens au Conseil.

2.4

Le CESE estime que la Commission n'a pas accordé suffisamment d'attention aux conséquences négatives imprévues du marché unique. La réglementation de l'UE en matière de marchés financiers n'a pas été suffisamment stricte pour mettre fin à une surveillance défaillante et pour empêcher un modèle d'entrepreneuriat orienté vers les intérêts à court terme d'un groupe privilégié d'actionnaires. Il y a lieu d'accorder une attention accrue à l'amélioration de la gouvernance d'entreprise. Il conviendrait d'accorder la priorité absolue au renforcement de la transparence et de la responsabilisation afin de garantir que le marché unique contribue au développement d'un environnement juridique qui respecte les intérêts légitimes de toutes les parties prenantes.

2.5

Il y a lieu de signaler la fermeté avec laquelle la Commission affirme que ces douze nouveaux leviers contribueront à renforcer la croissance, l'emploi et la confiance dans le marché unique. Le CESE estime que l'histoire de l'introduction du marché unique montre que certaines des mesures prises par le passé ont eu des conséquences majeures à court terme. Annoncer la réussite sur un ton trop explicite et démonstratif, mais de manière prématurée, ne peut que frustrer les citoyens de l'Union, surtout en l'absence de preuves solides provenant d'analyses d'impact. Cette approche pourrait affaiblir davantage le marché unique au lieu de lui insuffler un nouvel élan (5). La Commission pourrait adopter une approche plus réaliste en tenant un discours plus nuancé.

2.6

Malheureusement, la première et la deuxième édition de l'Acte pour le marché unique ne soulignent pas l'importance de la confiance en matière d'application des droits. Le CESE attend toujours avec impatience que l'on mette enfin à la disposition des consommateurs européens un mécanisme judiciaire de recours collectif efficace. Si la libéralisation des marchés et le renforcement de la concurrence constituent des objectifs clés de la politique du marché unique et jouent un rôle majeur en permettant aux consommateurs de choisir librement, ces derniers ont également besoin d'un cadre solide qui prévoie des droits de protection en matière d'achat de biens et services et l'application efficace de ces droits. Plusieurs études ont conclu que la mise en œuvre de différents instruments de l'UE est lente et que l'application demeure relativement faible, notamment en cas d'activités transfrontalières. La Commission européenne devrait donc d'urgence proposer des mesures contraignantes relatives à de nouveaux mécanismes d'exécution.

2.7

Il est regrettable que seule une des douze initiatives porte la mention «Consommateurs», en dépit du fait que plusieurs leviers ont un impact significatif sur la vie quotidienne des consommateurs européens (6). Nous espérons que cette approche ne reflète pas le point de vue général de la Commission vis-à-vis de la politique des consommateurs. Il importe de viser large et de ne pas considérer les consommateurs comme un appendice à la politique des entreprises, mais plutôt comme des acteurs indépendants, afin de créer un marché unique profitable à tous (cf. les rapports de Monti et de Grech). Le CESE partage l'avis de la Commission selon lequel les 50 propositions et les 12 premiers leviers n'exploitent pas pleinement le potentiel du marché unique. Toutefois, du point de vue des consommateurs, la Commission aurait pu et aurait dû mettre davantage l'accent sur des initiatives qui leur sont favorables, comme le CESE l'a souligné précédemment dans un avis (7).

2.8

Le CESE s'étonne de l'absence de toute sensibilisation au partenariat social dans cette communication. La confiance ne peut être rétablie si la participation des partenaires sociaux aux politiques de l'UE se limite au domaine politique relevant de la DG Emploi. La consultation des partenaires sociaux est également nécessaire dans le cadre de diverses activités de la DG Marché intérieur.

2.9

Comme le CESE l'a déjà souligné dans des avis antérieurs, toute proposition relative à des transactions transfrontalières avec des consommateurs doit être réalisée de manière progressive, en commençant par les contrats de vente transnationaux entre entreprises (B2B), conçus comme des opérations pilotes. En attendant l'adoption d'une proposition relative aux opérations d'entreprise à consommateur (B2C), aucune autre initiative à caractère facultatif ne doit être présentée en matière de contrats de vente transnationaux.

3.   Les douze premiers leviers et éléments manquants – situation

3.1

La Commission a déjà présenté 11 des 12 propositions législatives pour les actions-clés et le CESE a adopté des avis sur ces propositions (8). Le CESE invite le Parlement, la Commission et le Conseil à agir rapidement, sans toutefois nuire à la qualité, afin de garantir l'adoption de ces propositions législatives avant la fin des mandats du Parlement et de la Commission au printemps 2014. Il convient que les États membres mettent en œuvre la législation adoptée de façon appropriée et qu'ils veillent au respect de son application afin de garantir des conditions équitables. En outre, il y a lieu d'éliminer les entraves basées sur des motifs injustifiés et discriminatoires de manière à garantir le bon fonctionnement du marché unique.

3.2

Le retrait du règlement «Monti II» ne règle pas les problèmes engendrés par les arrêts de la Cour de justice de l'Union européenne relatifs au détachement des travailleurs. Il y a lieu de trouver une solution à la situation actuelle, qui empêche les travailleurs d'exercer pleinement leurs droits. La Commission devrait garantir que les droits sociaux fondamentaux ne soient pas restreints par les libertés économiques. Elle doit envisager une proposition qui prévoie l'intégration d'un protocole de progrès social dans les traités européens. Ce protocole devrait clarifier le lien entre les droits sociaux fondamentaux et les libertés économiques en confirmant que le marché unique n'est pas une fin en soi, mais qu'il a été établi afin d'instaurer le progrès social pour les citoyens de l'Union (de fait, en application de l'article 3.3 de la version consolidée du traité sur l'Union européenne). Il doit en outre indiquer clairement que les libertés économiques et les règles de la concurrence ne peuvent primer les droits sociaux fondamentaux et le progrès social, et qu'elles ne sauraient aucunement être interprétées de manière à accorder aux entreprises le droit de se soustraire ou de contourner les lois et les pratiques nationales dans le domaine social et en matière d'emploi, ou bien d'imposer une concurrence déloyale jouant sur les salaires et les conditions de travail.

3.3

Le CESE a relevé un certain nombre de mesures qui font défaut dans l'Acte pour le marché unique I et qui, selon lui, contribueraient également à renforcer la confiance des citoyens. Ces mesures manquantes portaient notamment sur la révision de la directive sur les droits d'auteur, les prélèvements au titre des droits d'auteur, la neutralité de l'internet, le protocole de progrès social, les microentreprises et les entreprises familiales, les mesures de soutien à la création de nouvelles sociétés et à l'extension des entreprises existantes, le surendettement et les virements interbancaires en vue de consolider le fonctionnement de l'espace unique de paiements en euros (SEPA).

4.   Les 12 nouveaux leviers

4.1   Transport

Le CESE accueille favorablement les mesures destinées à améliorer l'interconnexion du marché unique dans le domaine du transport ferroviaire, maritime et aérien, mais déplore l'absence d'une approche globale; la Commission ne propose en effet aucune action dans le domaine du transport de marchandises par rail, du transport routier, qui constitue le segment le plus important dans le transport des marchandises et des passagers, et du transport multimodal comme moyen d'optimiser l'efficacité des transports.

4.1.1   Ferroviaire

La façon dont la privatisation du transport ferroviaire est définie et défendue ne reflète nullement le fait que dans d'importantes régions d'Europe, il convient de prendre en considération des raisons autres que purement économiques afin de maintenir à flot le transport public. Se borner à introduire le critère de la rentabilité pourrait affaiblir la fonction d'utilité publique remplie par les systèmes de transport ferroviaire. Évaluer les privatisations qui ont réussi ou pas uniquement sur la base des économies réalisées ne suffira pas. Le raisonnement doit tenir compte en priorité de la qualité et de la sécurité pour le personnel et le grand public.

4.1.2   Maritime

Un véritable marché unique du transport maritime ne pourra être garanti que si les conditions de concurrence sont équitables par rapport aux autres modes de transport. Cela signifie qu'il convient de s'orienter résolument vers une simplification administrative (c'est-à-dire douanière) dans le cas des transports maritimes purement intra-UE. Les marchandises de l'UE devraient être traitées différemment de celles qui proviennent de pays tiers (notamment au moyen du manifeste électronique) afin de réduire les formalités administratives et déléguer la responsabilité aux transporteurs. En fait, les marchandises inspectées à leur entrée dans l'UE ne devraient pas faire l'objet d'une nouvelle inspection dans un autre port de destination situé au sein de l'UE.

Cela permettrait aussi, d'une part, de créer un transport maritime sans frontières au sein de l'UE et, d'autre part, de mettre en place les autoroutes de la mer, ces routes maritimes principales qui relient des ports européens en association avec d'autres modes de transport et dont l'UE a fortement besoin. Le CESE élabore actuellement un avis sur la «croissance bleue» et présentera des propositions pragmatiques début 2013.

4.1.3   Aérien

Bien qu'il reconnaisse l'importance de prendre des mesures contre la fragmentation actuelle de l'espace aérien européen, le CESE regrette que la révision du règlement relatif aux droits des passagers aériens en matière d'indemnisation et d'assistance des passagers en cas de refus d'embarquement et d'annulation ou de retard important n'ait pas encore été présentée. Il convient de clarifier et d'actualiser d'urgence cette législation européenne en ce qui concerne son champ d'application et l'interprétation de certaines dispositions générales. Le CESE invite également la Commission à soumettre une proposition législative qui impose aux compagnies aériennes de garantir la protection de tous les passagers en cas d'insolvabilité des compagnies aériennes, ainsi qu'à agir contre la prolifération de clauses contractuelles déloyales, le manque de transparence des prix des billets et les difficultés pour les consommateurs d'obtenir réparation en obligeant les compagnies aériennes à adhérer aux procédures de règlement extrajudiciaires des litiges (REL), ainsi qu'aux décisions prises par les autorités nationales chargées du transport aérien.

4.2   Énergie

Dans de nombreux États membres, il n'est toujours pas possible, étant donné l'absence de concurrence, de choisir entre différents fournisseurs d'énergie. Il reste du chemin à parcourir en Europe pour garantir l'accessibilité financière des services, une gestion efficace des plaintes, la comparabilité des offres et des prix, la possibilité de changer facilement de fournisseur et la transparence des tarifs et des clauses de contrat. Le CESE demande à la Commission et au Conseil de garder sous surveillance étroite les marchés nationaux de détail de l'énergie et, le cas échéant, d'agir rapidement pour assurer la poursuite efficace de la mise en œuvre du troisième paquet énergétique au bénéfice des citoyens. Il est important que les États membres transposent les dispositions du troisième paquet de manière à aider les citoyens vulnérables et à lutter contre la pauvreté énergétique dans leur pays. L'engagement des consommateurs est indispensable à la réussite de la mise en place de compteurs intelligents, un système susceptible d'améliorer l'efficacité énergétique. Toutefois, de nombreuses questions subsistent, notamment en ce qui concerne les avantages potentiels par rapport aux coûts supportés par les consommateurs, ainsi qu'en matière de protection des données. Dans l'intérêt de tous les utilisateurs d'énergie, il conviendrait de résoudre ces problèmes le plus rapidement possible.

4.3   Mobilité des citoyens

La Commission européenne est un ardent défenseur de la mobilité. Cependant, la mobilité ne constitue pas un objectif en elle-même. Il faut beaucoup pour qu'une personne quitte son lieu d'origine, et les comparaisons avec les États-Unis ne tiennent pas toujours la route. Les travailleurs, salariés et indépendants, qui traversent les frontières sont souvent confrontés au manque de reconnaissance de leurs qualifications, à de longues heures de travail, à des conditions de travail médiocres, aux discriminations, à l'inégalité de traitement et à la barrière de la langue. L'amélioration des conditions de travail et la promotion de l'égalité de traitement devraient être des objectifs poursuivis dans le cadre d'une politique active de l'emploi à l'échelle européenne. En particulier, le CESE déplore le fait qu'après plus de 20 ans, aucun progrès n'ait été enregistré dans le dossier important de la reconnaissance des qualifications professionnelles (9). Il conviendrait de promouvoir la mobilité des stagiaires, des apprentis et des jeunes entrepreneurs en Europe.

4.4   Accès aux financements

Les mesures proposées afin de faciliter l'accès aux fonds d'investissement à long terme constituent une avancée positive. Elles ne permettront toutefois pas de résoudre les problèmes que rencontrent les PME à cause du manque de capital opérationnel. Les PME, qui constituent l'épine dorsale de l'économie de l'UE, ne devraient pas faire l'objet de discriminations en matière d'accès aux financements en raison des règles strictes qui régissent les réserves bancaires (10). Le Comité renvoie à ses avis antérieurs consacrés à l'accès des PME aux financements (11). À cet égard, il recommande de créer des instruments renouvelables pour fournir de tels prêts afin de permettre aux PME d'accéder facilement au financement sans garanties excessives (12). Ces crédits seraient garantis par des ressources nationales ou européennes. Les États membres devraient envisager d'autres possibilités, telles que les exonérations fiscales pour les investisseurs privés et familiaux qui investissent dans les jeunes PME, leur extension pour un certain nombre d'années et d'autres mesures incitatives. Ces mesures devraient compléter la proposition relative à la libre circulation transfrontalière du capital-risque européen de l'Acte pour le marché unique I, qui s'axe sur les entreprises innovantes mais ne résout pas le problème du manque de financement que connaissent les autres PME.

4.5   Environnement des entreprises

La proposition visant à moderniser la législation en matière d'insolvabilité représente un pas dans la bonne direction si l'on veut améliorer l'environnement des affaires, surtout quand l'objectif poursuivi est de donner aux entrepreneurs une seconde chance. La part des charges administratives auxquelles les PME, et surtout les microentreprises, ne peuvent faire face est toujours trop importante. Le Comité invite la Commission à poursuivre ses efforts de réduction des charges administratives et à définir des objectifs quantitatifs et qualitatifs. À cet égard, il y aurait lieu d'améliorer constamment l'analyse d'impact. Les évaluations menées jusqu'à présent se focalisent trop sur la réglementation en tant que telle et sont, en partie à cause de cela, de nature trop «technocratique». La réglementation d'un État membre peut très bien être motivée par une volonté de maintenir la qualité du service fourni et donc être dans l'intérêt des citoyens; elle n'est dès lors pas superflue (13).

4.6   Services

Le CESE se félicite que l'Acte pour le marché unique II prévoie la révision de la directive sur les services de paiement (DSP) et souligne que le développement d'un marché européen des paiements efficace, au bénéfice de l'ensemble des consommateurs et des entreprises, devrait être l'objectif principal de cette révision. Il est particulièrement important de rendre les services de paiement accessibles aux consommateurs, mais aussi d'en assurer une offre qui soit sûre, efficace et peu coûteuse. La révision devrait interdire la pratique consistant à imposer aux consommateurs des majorations pour le recours à certains modes de paiement à travers l'UE. Les personnes qui ont recours à la domiciliation devraient se voir garantir des droits inconditionnels à remboursement pour les transactions autorisées et non autorisées. Les consommateurs devraient bénéficier d'une protection efficace quelle que soit la méthode de paiement qu'ils privilégient et qui tiendrait compte des règles solides de protection des consommateurs qui existent déjà dans certains États membres. À cet égard, il convient de tenir compte des nombreux avantages que présentent ces méthodes de paiement pour l'ensemble des acteurs concernés, mais aussi de la nécessité de limiter leur coût pour les PME qui les proposent à leurs clients. Le CESE salue la volonté de la Commission de présenter une proposition législative sur les commissions multilatérales d'interchange pour les paiements par carte.

4.7   Un marché unique numérique

Le CESE se félicite de l'intention de la Commission européenne de réduire les coûts et d'améliorer l'efficacité du déploiement des infrastructures de communication à haut débit en adoptant des règles communes. Le Comité souscrit à la proposition relative à l'amélioration de la connexion à l'internet à large bande et à haut débit comme une condition technique indispensable à l'expansion du commerce en ligne. Il importe d'adopter un modèle cohérent pour les méthodes de calcul des coûts utilisées par les autorités de régulation nationales à travers l'Union afin de veiller à ce que les coûts soient équitables et calculés selon des normes identiques. Des marchés des télécommunications dûment réglementés doivent garantir un choix aux consommateurs. Si un accès équitable des nouveaux opérateurs aux réseaux d'accès de la nouvelle génération n'est pas effectivement assuré, le choix de services de détail pour les consommateurs sera qualitativement faussé ou limité. Tous les concurrents devraient pouvoir accéder aux infrastructures aux mêmes conditions et l'accès aux réseaux pour les nouveaux venus et les opérateurs historiques devrait être garanti à des prix raisonnables (c'est-à-dire fixés en fonction des coûts).

4.8   La facturation électronique dans les marchés publics

Les entreprises demandent depuis longtemps le recours généralisé à la facturation électronique, notamment dans le cadre des activités transfrontalières. Pour cette raison, le CESE apporte un soutien ferme à la proposition visant à faire de ce type de facturation la règle générale pour les marchés publics. Cependant, le formulaire électronique devrait également être d'application dans le cadre de la présentation des offres étant donné que sa non-utilisation est l'une des raisons expliquant le nombre réduit de PME qui prennent part à des appels d'offres dans d'autres États membres que celui sur le territoire duquel elles ont leur siège (voir également le Programme de travail de la Commission 2013).

4.9   Consommateurs

4.9.1

L'on trouve toujours sur le marché de l'UE des produits de consommation dangereux, dont certains portent le marquage CE. Les risques qu'ils présentent pour la santé et la sécurité pourraient être évités. Le CESE se réjouit donc que la Commission européenne entende proposer un paquet législatif «Sécurité des produits» qui comprendra un instrument de surveillance du marché unique pour tous les produits non alimentaires, une proposition relative à une nouvelle directive sur la sécurité générale des produits (DSGP) et un plan-cadre pluriannuel pour la surveillance du marché. La révision devrait permettre de clarifier la manière dont les différentes législations européennes portant sur la sécurité des produits interagissent entre elles. Plus particulièrement, les responsabilités des fabricants doivent être renforcées et clarifiées. Il importe de garantir un degré d'application de la législation identique dans tous les États membres et que les activités de surveillance des marchés soient efficaces sur tout le territoire de l'UE.

4.9.2

Il convient d'accorder une attention spécifique aux produits attrayants pour les enfants et de maintenir l'interdiction des produits imitant la nourriture. La politique de l'UE doit constituer une avancée considérable en matière de sécurité et d'hygiène. Il convient de se pencher sur la question de la concurrence déloyale que subissent les entreprises européennes tenues de respecter les règles de l'UE. La révision de la directive sur la sécurité générale des produits devrait empêcher efficacement la mise sur le marché de produits dangereux, ce qui nécessite un système de surveillance européenne du marché, notamment des contrôles efficaces aux frontières extérieures de l'UE.

4.10   Cohésion sociale et entrepreneuriat social

4.10.1

Les propositions présentées ici sont placées sous ce titre de façon plutôt artificielle. Le CESE reconnaît l'importance, en cette période de crise, de mettre l'accent sur la lutte contre l'exclusion sociale et la pauvreté. À cet égard, l'entreprise de l'économie sociale a été présentée comme un élément fondamental de la stratégie de sortie de crise. Le manque d'actions-clés ciblées en faveur du développement et de la croissance de l'économie sociale et de ses entreprises est décevant. L'action-clé no 12 proposée omet l'exclusion sociale et la pauvreté croissantes en Europe. Pour cette raison, le CESE recommande de prévoir une action-clé claire et ciblée portant sur les entreprises de l'économie sociale, sur la base des recommandations du CESE, qui, selon lui, seront mieux à même de répondre au besoin de cohésion sociale (14).

4.10.2

Le CESE accueille favorablement la proposition visant à donner à tous les citoyens de l'Union européenne accès à un compte de paiement de base, à veiller à ce que les frais bancaires soient transparents et comparables et à simplifier le changement de compte bancaire. Le Comité espère que, cette fois, la Commission proposera une législation contraignante au lieu de la recommandation de juillet dernier, dont la nature facultative a suscité beaucoup de critiques. Le CESE observe que la transparence et la comparabilité des frais bancaires payés par les consommateurs ont soit présenté des lacunes considérables, soit complètement échoué. La législation européenne proposée devrait garantir à chaque citoyen le droit d'accès à un compte de paiement de base et devrait éliminer toute entrave au changement de compte bancaire.

Bruxelles, le 16 janvier 2013.

Le président du Comité économique et social européen

Staffan NILSSON


(1)  JO C 24 du 28.1.2012, p. 99.

(2)  http://epp.eurostat.ec.europa.eu/cache/ITY_PUBLIC/3-03122012-AP/EN/3-03122012-AP-EN.PDF (en anglais).

(3)  FLASH-IT, Policy Research Alert 5 – Employment, octobre 2012.

(4)  Communiqué de presse Eurostat, 31 octobre 2012.

(5)  Monti, 2010: «Cela saperait le fondement de l'intégration économique, de la croissance et de l'emploi dans l'ensemble de l'UE, au moment où l'émergence de nouvelles puissances mondiales et l'apparition de sérieux défis environnementaux rendent plus que jamais nécessaire la cohésion de l'UE, dans l'intérêt des citoyens européens et d'une gouvernance mondiale efficace.»

(6)  Résolution du Parlement européen du 14 juin 2012 sur «L'acte pour le marché unique: les prochaines étapes vers la croissance».

(7)  JO C 299 du 4.10.2012, p. 165.

(8)  JO C 24 du 28.1.2012, p. 99.

(9)  JO C 191 du 29.6.2012, p. 103.

(10)  cf. le paquet «CRD IV».

(11)  JO C 351 du 15.11.2012, p. 45.

(12)  La carte Széchenyi en Hongrie – cf. http://www.google.com/url?sa=t&rct=j&q=&esrc=s&source=web&cd=1&ved=0CC8QFjAA&url=http%3A%2F%2Fwww.iapmei.pt%2Fconferencia%2F1_Laslo_Krisan.ppt&ei=DM29UKvHJNGRhQehsoGwDA&usg=AFQjCNHWIFTTA7fbjHyT1ShycR1qL7tKRQ

(13)  Voir l'avis du CESE JO C 318 du 29.10.2011, p. 109, § 3.2.

(14)  Cette question a aussi été mise en évidence dans l'avis suivant du CESE: JO C 299 du 4.10.2012, p. 165.


ANNEXE

à l'avis du Comité économique et social européen

L'amendement suivant, qui a recueilli plus du quart des suffrages exprimés, a été rejeté au cours des débats (article 39, paragraphe 2 du règlement intérieur):

a)   Paragraphe 3.2 (amendement 5)

3.2

Le retrait du règlement «Monti II» ne règle pas les problèmes engendrés par les arrêts de la Cour de justice de l'Union européenne relatifs au détachement des travailleurs. Il y a lieu de trouver une solution à la situation actuelle, qui empêche les travailleurs d'exercer pleinement leurs droits. La Commission devrait garantir que les droits sociaux fondamentaux ne soient pas restreints par les libertés économiques. Elle doit envisager une proposition qui prévoie l'intégration d'un protocole de progrès social dans les traités européens. Ce protocole devrait clarifier le lien entre les droits sociaux fondamentaux et les libertés économiques en confirmant que le marché unique n'est pas une fin en soi, mais qu'il a été établi afin d'instaurer le progrès social pour les citoyens de l'Union (de fait, en application de l'article 3.3 de la version consolidée du traité sur l'Union européenne). Il doit en outre indiquer clairement que les libertés économiques et les règles de la concurrence ne peuvent primer les droits sociaux fondamentaux et le progrès social, et qu'elles ne sauraient aucunement être interprétées de manière à accorder aux entreprises le droit de se soustraire ou de contourner les lois et les pratiques nationales dans le domaine social et en matière d'emploi, ou bien d'imposer une concurrence déloyale jouant sur les salaires et les conditions de travail. La Commission a présenté deux propositions législatives destinées à améliorer et à renforcer la transposition, l’application et le respect dans la pratique de la directive «détachement des travailleurs». La première, relative à la mise en œuvre de la directive 96/71/CE, vise à renforcer la protection des travailleurs provisoirement détachés à l'étranger, en améliorant l'information, la coopération administrative et les contrôles; elle est encore en discussion. La seconde proposition, relative à l'exercice du droit de mener des actions collectives dans le contexte de la liberté d'établissement et de la libre prestation des services («Monti II»), a été retirée.

S'agissant du principe de l'égalité en valeur entre les droits sociaux fondamentaux et les libertés économiques, le Comité est d'avis que cette approche doit tout particulièrement être entérinée par le droit primaire. Il fait observer que le 3e considérant du Préambule, et plus concrètement l’article 151 du TFUE, stipulent déjà que l'un des objectifs est l'amélioration des conditions de vie et de travail «permettant leur égalisation dans le progrès». Le Comité demande expressément qu'un «protocole sur le progrès social» soit intégré dans les traités, afin de consacrer l'équivalence entre les droits sociaux et les libertés économiques fondamentaux et de préciser ainsi que ni les libertés économiques, ni les règles de concurrence ne peuvent prendre le pas sur les droits sociaux fondamentaux, et afin de définir clairement la portée de l'objectif de réaliser le progrès social qui a été assigné à l'Union  (1).

Exposé des motifs

Se fera oralement.

Résultat du vote de l'amendement:

Voix pour

:

77

Voix contre

:

114

Abstentions

:

11


(1)  JO C 376 du 22.12.2011, p. 74.