1.7.2011   

FR

Journal officiel de l'Union européenne

C 192/1


Résolution du Comité des régions sur le thème «Gérer l'impact et les conséquences des révolutions dans la région méditerranéenne»

2011/C 192/01

LE COMITÉ DES RÉGIONS

Une crise humanitaire est en cours

1.

observe avec préoccupation les changements et les incertitudes qui affectent le sud de la Méditerranée et appuie sans réserve le processus de réforme sociale, économique et politique qui devrait déboucher sur une véritable démocratisation, une nouvelle stabilité de tous les pays concernés et ouvrir aux hommes et femmes de la région d'authentiques perspectives de bâtir la paix et la prospérité; regrette et condamne avec force toute forme de violence et de violation des droits de l'homme dans certains pays de la région et invite instamment l'Union européenne à faire face à ses responsabilités et à soutenir le changement pacifique et les transitions démocratiques;

2.

exprime sa préoccupation face aux mouvements de réfugiés consécutifs aux événements survenus en Afrique du Nord, qui affectent directement les États membres et les collectivités locales qui sont les plus proches de cette zone; souligne dès lors la nécessité d'apporter sans délai la solidarité concrète et le soutien indispensable auxquels se sont engagés l'Union européenne et les États membres dans la déclaration du Conseil européen du 11 mars 2011 et dans les conclusions du Conseil européen des 24 et 25 mars 2011;

3.

rappelle la déclaration de la présidence du CdR du 4 mars 2011 (1), par laquelle le Comité a proposé de soutenir les aspirations des peuples de la région tout entière et exprimé sa solidarité avec leurs appels à une démocratie réelle, au pluralisme politique ainsi qu'au respect des libertés fondamentales et des droits de l'homme;

4.

note également qu'un nombre considérable de personnes arrivent dans l'UE pour des raisons économiques, politiques ou sociales; est conscient que certaines d'entre elles se déplacent en raison de la situation d'urgence prévalant dans la région et qu'elles sont susceptibles de pouvoir légitimement demander l'asile ou une protection internationale; rappelle que le droit d'asile est garanti, entre autres, par la Charte des droits fondamentaux et qu'il relève des obligations de l'UE et des États membres au titre du droit international;

5.

reconnaît que l'instabilité politique et sociale dans le sud de la Méditerranée, combinée avec la répression, aux difficultés économiques affectant toute une gamme de secteurs ainsi qu'avec la détérioration continue de l'environnement, sont de puissants catalyseurs des migrations de populations à l'intérieur et à partir de la région, mouvements qui se poursuivront en toute probabilité dans la mesure où le nombre de personnes qui fuient les troubles politiques et la pauvreté ne cesse de croître;

Une réponse immédiate à la crise

6.

souligne la nécessité d'apporter une réponse immédiate et urgente à la détérioration de la situation humanitaire qui tienne compte des droits fondamentaux et de la situation individuelle des personnes concernées; considère que cette réponse requiert une approche coordonnée de l'UE, des États membres et des collectivités infranationales et rappelle que l'expérience des villes et des régions de l'ensemble de l'UE en matière d'intervention d'urgence et de protection civile est à la disposition des institutions et des agences de l'UE, ainsi que des États membres. Il convient également d'associer la société civile organisée à cette approche, afin de pouvoir exploiter les relations interpersonnelles qu'elle entretient dans les pays concernés;

7.

appelle à une solidarité réelle et tangible envers les États membres et les collectivités les plus directement touchées par les flux migratoires, sur la base d'une répartition équitable des responsabilités opérationnelles et financières telles que sanctionnées par les traités, conformément à l'article 80 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne; presse l'UE et les États membres d'adapter en permanence ces mesures en fonction de l'évolution de la situation et des besoins des migrants ou des populations déplacées, ainsi que des collectivités qui leur fournissent assistance;

8.

appelle les collectivités locales et régionales de l'UE à soutenir un plan d'action en matière de répartition des charges pour aider à la réinstallation des réfugiés de la région, à mettre en place un fonds de solidarité pour traiter les pressions humanitaires provoquées par la crise et, partant, à plaider auprès des États membres pour qu'ils mettent en œuvre les mécanismes prévus dans la directive 2001/55/CE du Conseil relative à des normes minimales pour l'octroi d'une protection temporaire en cas d'«afflux massif» de personnes déplacées et à des mesures tendant à assurer un équilibre entre les efforts consentis par les États membres pour accueillir ces personnes et supporter les conséquences de cet accueil, sur la base du principe de solidarité entre les États membres et en vue de démontrer l'engagement réel de l'Union européenne en ce qui concerne le principe de solidarité et de partage des responsabilités;

9.

en attendant la mise à disposition de fonds appropriés, demande que les instruments financiers existants permettent de mobiliser, à court terme, des ressources dans les territoires concernés afin de faire face aux situations d'urgence liées à l'afflux d'immigrants;

10.

suggère l'introduction de mesures compensatoires afin d'aider les territoires les plus touchés par des situations d'urgence, dans le but d'équilibrer les pertes importantes et les effets négatifs sur les économies locales, en particulier dans des secteurs clés comme le tourisme et la pêche;

11.

dans ce contexte, propose que la directive 2001/55/CE du Conseil soit révisée afin de définir plus clairement ce qu'est un «afflux massif» d'immigrants, éventuellement par rapport à la population des pays de destination;

12.

souligne que toutes les mesures prises par les États membres doivent être conformes à la législation de l'UE, respecter l'acquis des Accords de Schengen, qui garantissent la liberté de circulation des citoyens au sein de l'UE et constituent dès lors une réalisation essentielle en matière d'intégration européenne et de sauvegarde des droits fondamentaux de l'homme tels que définis dans les instruments du droit international et les traités de l'UE, en particulier la Charte des droits fondamentaux;

13.

accueille favorablement les propositions de la Commission européenne qui visent à préserver le caractère communautaire du système de Schengen et sont destinées à faire en sorte que les réponses à apporter aux événements extérieurs soient fondées sur des règles européennes, communes et transparentes et ne restreignent pas indûment la coopération transfrontalière existante;

Une réponse à long terme

14.

est plus que jamais conscient du besoin pressant d'élaborer des politiques communes d'asile et d'immigration globales qui soient fondées sur la solidarité et un partage équitable des responsabilités; souligne que les collectivités locales et régionales devraient être incluses en priorité dans les politiques sur l'immigration légale et l'intégration des immigrants;

15.

insiste pour que tous les efforts soient mobilisés afin de lutter contre l'immigration clandestine et ses effets secondaires, en particulier le trafic des êtres humains; est favorable à la conclusion d'accords de réadmission entre l'UE et les pays de la région; demande que le mandat et le rôle de FRONTEX soient revus et, notamment, que soient renforcées ses ressources financières, techniques et humaines aux fins d'une surveillance aux frontières de l'UE, y compris le long des côtes méditerranéennes;

16.

se joint aux appels lancés pour que soit révisée la législation existante en matière d'asile, en particulier le mécanisme qui permet de déterminer quel État membre est responsable de l'examen des demandes d'asile, et appelle les institutions européennes et les États membres à continuer à œuvrer pour l'achèvement d'un régime européen commun d'asile; espère que le Bureau européen d'appui en matière d'asile (BEA) fournira une aide précieuse aux États membres les plus exposés dans la gestion de l'immigration;

17.

est convaincu qu'une démocratie fondée sur des élections libres et régulières et un État de droit, ainsi qu'une administration locale et régionale efficace et démocratique, sont des conditions préalables à la stabilité et au développement politique et économique des pays concernés et sont cruciales si l'on veut permettre aux citoyens d'exploiter leurs compétences dans leur propre pays;

18.

souligne l'utilité pratique des programmes de renforcement des capacités dans le contexte de l'élargissement et des politiques européennes de voisinage et, prenant l'exemple concret du programme pilote de l'instrument pour l'administration locale (2), propose que des initiatives similaires soient développées pour les pays du Sud de la Méditerranée afin d'y encourager le renforcement des capacités au niveau local et régional;

19.

note la corrélation entre l'immigration et les politiques de développement et estime qu'il est nécessaire d'élaborer des politiques favorisant la création, dans la région, de conditions économiques et sociales qui permettent d'assurer aux populations locales un avenir durable, limitant ainsi les incitations à la migration; en particulier, considère qu'il est essentiel de réduire la pauvreté et de créer des emplois pour les jeunes et, par conséquent, préconise l'exploitation optimale des ressources et de l'expérience de l'UE afin de soutenir l'enseignement et la formation professionnelle dans ces pays;

20.

souligne qu'il importe d'encourager vigoureusement le commerce et les investissements dans ces pays, ainsi que l'octroi de facilités de microcrédits pour la création de petites entreprises, afin d'aider ces pays à renforcer leur propre croissance économique et à réduire la pauvreté; un accroissement des échanges commerciaux avec l'Afrique du Nord serait également bénéfique pour l'Europe, car il conduirait à la création de nombreux emplois pour des Européens, ainsi qu'à de la croissance économique dans l'UE; appelle par conséquent à des efforts communs pour démanteler, s'il y a lieu, les barrières commerciales qui subsistent;

21.

est convaincu que l'Union pour la Méditerranée (UpM) pourrait jouer un rôle important dans la question de l'immigration et de ses implications si elle était dotée de la volonté politique et des ressources nécessaires par toutes les parties concernées; souligne à cet égard la contribution que pourrait apporter l'Assemblée régionale et locale euro-méditerranéenne (ARLEM), en facilitant la coopération et l'échange de savoir-faire entre les collectivités locales et régionales; propose que l'Assemblée de l'ARLEM examine avec soin la situation et inclue au nombre de ses priorités les réponses appropriées aux événements en cours et qu'elle prenne les mesures nécessaires dans le cadre de ses attributions afin de soutenir activement le processus de démocratisation dans les pays concernés;

22.

relève que la diplomatie au niveau des villes et des régions peut aider à promouvoir et à consolider les processus de démocratisation en cours, à associer le grand public et à améliorer les relations entre la population et le gouvernement;

23.

invite la Commission européenne à s'assurer que ses prochaines initiatives politiques (3) posent les jalons nécessaires pour pouvoir apporter des réponses globales, notamment par une sensibilisation au rôle et à la contribution des collectivités locales et régionales, et que de nouvelles synergies soient développées entre les politiques en matière d'immigration et d'asile, d'action extérieure et de développement, en étroite interaction avec les collectivités locales et régionales;

24.

charge la présidente du CdR de présenter la présente résolution au président du Conseil européen, au Parlement européen, à la Commission européenne, à la présidence hongroise du Conseil de l'UE, au Service européen d'action extérieure, au Haut-commissaire des Nations unies pour les réfugiés, au Comité économique et social européen, à la coprésidence et au secrétariat de l'UpM, ainsi qu'à l'assemblée parlementaire de l'UpM et à l'ARLEM.

Bruxelles, le 12 mai 2011.

La présidente du Comité des régions

Mercedes BRESSO


(1)  CdR 113/2011.

(2)  Le CdR coopère déjà étroitement avec la Commission européenne en soutenant le programme pilote, qui se limite pour le moment aux pays candidats ou potentiellement candidats.

(3)  Par exemple la révision de la politique européenne de voisinage, le rapport annuel en matière d'immigration et d'asile, la communication sur le développement de la solidarité au sein de l'UE, la communication pour l'immigration et la mobilité pour le développement, ainsi que l'approche globale de l'immigration.